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NRGO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON NATURAL RESOURCES AND GOVERNMENT OPERATIONS

COMITÉ PERMANENT DES RESSOURCES NATURELLES ET DES OPÉRATIONS GOUVERNEMENTALES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 14 décembre 1999

• 1538

[Traduction]

Le président (M. Joseph Volpe (Eglinton—Lawrence, Lib.)): Conformément au mandat du comité aux termes du paragraphe 108(2) du Règlement, étude de l'industrie minière au Canada, je déclare la séance ouverte.

Je voudrais d'abord remercier tous nos collègues d'avoir modifié leur horaire afin que nous puissions nous réunir cet après- midi. Je veux également remercier M. Comba d'avoir attendu si patiemment ce matin et de s'être mis de nouveau à notre disposition.

Je suis sûr que M. Comba comprendra, même s'il ne l'apprécie pas, que certains d'entre nous peuvent être retenus à la Chambre par des circonstances qui échappent à notre volonté. C'est ce qui est arrivé ce matin. Nous vous remercions infiniment d'être revenu cet après-midi.

Nous avons donc devant nous M. Comba, qui est l'un des directeurs de l'Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs.

J'ai rencontré des membres de cette association il y a quelque temps et, à la suite des discussions que nous avons eues autour de cette table concernant la suggestion que nous tenions compte des intérêts du secteur miniers, je leur ai demandé de présenter une demande par écrit afin qu'ils puissent venir témoigner devant notre comité avant les vacances de Noël—j'aurais aimé que ce soit un peu plus tôt, mais c'est toujours avant Noël—et que nous ayons l'occasion d'entendre ce qu'ils avaient à nous dire au nom de leur association de telle sorte que nous puissions ajouter notre grain de sel aux décisions budgétaires, celles qui restent encore à prendre, et que nous nous tenions au courant des questions qui se posent dans l'industrie minière.

• 1540

Sans plus attendre, monsieur Comba, vous pouvez commencer votre exposé. Normalement, nous accordons une dizaine de minutes à nos témoins avant de passer aux questions et aux réponses. Certains des députés autour de la table vous connaissent probablement mieux que moi et sont plus au courant des questions dont vous traitez que je ne le suis, ou que je ne l'aurais été, et aimeraient probablement passer directement aux questions.

Je vous remercie de nouveau. Le micro est à vous. Les députés vont entrer et sortir, ne vous laissez pas distraire par leurs allées et venues.

M. David Comba (directeur des questions d'intérêt, Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs): Merci, monsieur le président.

Je suis géologue de profession et je travaille actuellement pour l'Association canadiennes des prospecteurs et entrepreneurs où je suis directeur des questions d'intérêt.

Au nom de l'ACPE, de ses plus de 5 500 membres individuels et des 90 sociétés minières qu'elle représente, j'aimerais vous remercier de cette occasion de venir témoigner devant vous. Notre association, fondée en 1932, est très célèbre pour son congrès annuel qui a lieu à Toronto. Il attire plus de 7 000 personnes qui viennent du monde entier. C'est le congrès de ce genre le plus important au monde.

J'aimerais souligner en commençant que notre secteur est de nature très cyclique car il est fortement influencé par le cours des matières premières. En fait, la crise que nous traversons actuellement a débuté par un simple ralentissement. D'ailleurs, ce n'est qu'à la mi-novembre de cette année que le conseil d'administration de l'ACPE a convenu qu'il y avait une crise et qu'il fallait faire quelque chose.

Pourquoi une crise maintenant? Eh bien, certains changements structurels dans le secteur de l'exploration indiquent clairement que ce ralentissement n'est pas comme les autres. Les sociétés minières juniors ne sont plus dans le champ de vision des investisseurs à haut risque. À l'heure actuelle, comme vous le savez probablement pour la plupart, il y a un engouement spectaculaire pour les actions qui se vendent sur Internet.com, ce qui détourne les investisseurs à haut risque des sociétés minières juniors.

Il leur est quasiment impossible d'obtenir un financement par actions qui, en outre, dilue beaucoup le capital vu la faiblesse des évaluations d'aujourd'hui. Incapables de trouver un financement, les sociétés juniors ne peuvent profiter des subventions et des crédits d'impôt sur le capital qu'offrent certaines provinces et certains territoires. Plusieurs provinces, conscientes de ce ralentissement, ont mis en place des systèmes très novateurs de subventions, mais malheureusement, les sociétés juniors ne peuvent pas en profiter car elles n'arrivent pas à trouver le financement préalable requis.

Le nombre d'actes de financement est tombé de 120 par mois au début de l'année à 80 en juillet, et maintenant on peut compter sur les doigts de la main le nombre des sociétés juniors financées entre juillet et décembre.

Mais ce qui est encore pire, c'est la diminution de la valeur moyenne du financement. Elle est passée de 2,5 millions de dollars à moins de 500 000 $. Avec moins de 500 000 $, une société junior arrive tout juste à rester en vie. Ça lui suffit pour rester cotée en bourse, pour garder une ou deux personnes essentielles, pour payer les frais généraux et pour garder ses concessions clés. Elle doit poursuivre le travail d'évaluation si elle veut les conserver, mais elle n'a pas les moyens d'entreprendre de nouveaux programmes.

Pour trouver des moyens de redresser la situation, nous sommes revenus 16 ans en arrière et nous avons examiné un programme fédéral qui avait aidé le secteur de l'exploration à se relever après l'un de ses ralentissements cycliques causés par le fléchissement du cours des matières premières... changement structurel qui a touché l'industrie quand les compagnies pétrolières et gazières se sont retirées de l'exploration minière. Ce programme fédéral intitulé «déduction pour épuisement au titre de l'exploration minière», ou DEEM, fonctionnait très bien, trop bien même.

À posteriori, il est facile de dire qu'il n'aurait dû être en place que deux ou trois ans au lieu des quatre ans qu'il a duré, de 1983 à 1987. Par ailleurs, ce programme présentait quelques défauts structurels concernant les délais dans lesquels faire les dépenses et les programmes souterrains autorisés pour être admissible.

Seize ans plus tard, il est facile de voir comment on peut améliorer le programme. Nous proposons la refonte des actions accréditives. En augmentant de quatre fois les délais autorisés pour les dépenses, soit jusqu'au 31 décembre de l'année suivante plutôt que le 28 février, le principal obstacle à la conformité avec l'ancien programme DEEM est éliminé. En outre, en collaboration avec l'Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs, on pourrait clarifier et préciser les définitions et les lignes directrices concernant ce qui constitue une dépense d'exploration admissible.

• 1545

Pour assurer le respect des dispositions relatives à la diminution progressive de la prime, une série de mesures indépendantes de contrôle de l'activité, qui se renforceraient mutuellement, pourraient être entreprises. Par exemple, nous pourrions obtenir la collaboration de la nouvelle bourse de Calgary spécialisée dans les capitaux de risque. Elle pourrait nous donner le volume et la valeur des transactions quotidiennes concernant les émissions des sociétés minières juniors. Nous pourrions obtenir la collaboration de la Canadian Drilling Association, qui nous donnerait le total mensuel du métrage foré. Nous pourrions obtenir la collaboration de Gamah International, société qui tient des statistiques sur la fréquence et la valeur du financement des sociétés juniors. Nous recommandons également une autre chose importante: la cessation obligatoire du programme après trois ans. Par ailleurs, aucun programme souterrain ne serait admissible.

Nous avons intitulé ce programme, qui est assujetti à beaucoup plus de restrictions que sont prédécesseur, «programme d'actions accréditives ciblées»; qui plus est, aucune nouvelle mesure législative n'est nécessaire. Nous proposons de commencer avec une prime de 40 p. 100 pour attirer l'attention des investisseurs, puis de la ramener à 30 p. 100 la deuxième année et à 20 p. 100 la troisième et dernière année. Nos calculs, qui sont basés sur la méthodologie utilisée par les ministères des Finances et des Ressources naturelles pour le programme précédent, indiquent que pour chaque dollar d'impôt auquel le gouvernement fédéral renoncerait, de 3 $ à 4 $ supplémentaires seront investis dans l'exploration. N'oubliez pas que le montant de ces impôts provenant de l'exploration est brut et non pas net, car à cela s'ajouteraient les impôts prélevés sur le salaire des employés ainsi que les taxes de vente provinciales et fédérales.

Ce programme s'adresserait aux régions rurales et au Nord. Il serait limité à l'exploration en surface. La formule de diminution peut servir d'outil de gestion et peut être vérifiée tous les mois. L'un des problèmes que nous avons actuellement est que nous travaillons, vous et moi, avec des chiffres vieux de trois ans. Ça ne nous donne pas un bon outil de gestion.

C'est pour le gouvernement l'occasion de reprendre une mesure qui a fait ses preuves et qui n'a pas encore été complètement éliminée. Le problème, c'est que, actuellement, la prime dont est assortie la déduction pour épuisement au titre de l'exploration minière est de 0 p. 100, ce qui veut dire qu'un acheteur d'actions accréditives peut déduire 100 p. 100 quand il achète les actions d'une société junior. Nous demandons une bonification de la prime la première année. À 40 p. 100, cet investisseur bénéficierait d'une déduction de 140 p. 100 s'il achetait les actions la première année.

Nous avons remarqué, particulièrement dans certains des documents d'information dont nous avons pris connaissance ces deux ou trois semaines à Ottawa, qu'il semblait y avoir un manque très clair de compréhension du succès du programme précédent. On y parle bien de quelques sociétés minières d'or. Je suis ici pour vous dire que la mine Louvicourt à Val-d'Or, au Québec, a été découverte avec l'argent des actions accréditives et grâce à la prime du programme DEEM des années 1983 à 1987. Il s'agit d'un important gisement de métal de base et la société qui l'a découvert, Band-Ore Resources, est en passe de devenir une société internationale.

J'ai personnellement participé à la découverte de la mine Lindsley, à Sudbury, en Ontario. J'étais alors géologue en chef chez Falconbridge Limited, à Sudbury. Falconbridge était à l'époque l'une des rares sociétés qui émettait des actions accréditives et son président d'alors, Bill James, a été très critiqué pour avoir profité d'un programme que la plupart des gens pensait être réservé aux sociétés juniors. Mais comme le cours du nickel était à moins de 2 $ la livre et que Falconbridge n'était pas rentable et que, selon toute vraisemblance, elle ne le serait pas avant plusieurs années, Bill James a mis sur pied un programme d'actions accréditives et l'argent a servi à découvrir la mine de Lindsley.

En Colombie-Britannique, on a découvert la mine d'Eskay Creek. Tout aussi important est le fait que c'est pendant cette période qu'ont eu lieu les travaux préparatoires à la découverte des deux premières mines de diamants au Canada, Ekati et Diavik. Gren Thomas, qui était alors président d'Aber Resources, est un de mes bons amis. J'ai beaucoup parlé de tout cela avec lui, et il a dit à maintes reprises combien il avait été important, entre 1983 et 1987, de pouvoir trouver des capitaux grâce à la DEEM car, à l'époque, tous les experts étaient convaincus qu'il n'y avait de diamants au Canada. DeBeers faisait de l'exploration au Canada depuis la fin des années 50 et n'avait pas encore trouvé de diamants. Eh bien, deux sociétés juniors en ont trouvé et DeBeers cherche toujours.

• 1550

Les capitaux disponibles entre 1983 et 1987 ont été déterminants dans cette histoire. Ce genre d'exploitation est à la fine pointe de la technologie. Nous parlons ici de la séparation de minéral lourd d'échantillons de sol et de l'utilisation de microsondes électroniques afin de déterminer la composition chimique de dioxydes de chrome et de grenats très exotiques; ce sont des minéraux associés aux diamants dans les strates géologiques qui renferment des gisements de diamants. C'est un travail très spécialisé, qui a été financé par les actions accréditives pendant la période allant de 1983 à 1987. Si ces sociétés s'étaient adressées directement à des maisons de courtage pour essayer d'obtenir les capitaux nécessaires à l'exploration diamantaire au Canada, elles auraient essuyé un refus.

Gren m'a rappelé que c'est pendant cette période qu'Aber Ressources a découvert le gisement de béryllium de Thor Lake et le gisement de zinc, de plomb et de cuivre de Sunrise Lake. Ni l'un ni l'autre n'est encore exploité. Mais il ne fait aucun doute à mes yeux que, avec les progrès de la technologie et des méthodes de récupération, ils le seront un jour. De plus, afin d'être admissible, tout le travail d'évaluation qui avait été fait devait être remis aux autorités provinciales et territoriales responsables de l'inventaire géologique; c'est ainsi que la base de données géoscientifiques du Canada s'est grandement enrichie pendant cette période.

Nous avons entendu dire à plusieurs reprises au cours des deux ou trois dernières semaines que les gens préféreraient un crédit d'impôts car il limite les risque. Je suis ici pour vous dire que les crédits d'impôt ne marchent pas, et ce, pour plusieurs raisons. Ils n'encouragent pas les investisseurs à acheter des émissions. Et c'est réellement ce dont il est question ici, du financement initial des sociétés juniors par des gens qui sont attirés par le risque.

Ces gens n'aiment pas les crédits d'impôts pour deux raisons. S'il s'agit d'un crédit d'impôt simple, l'argent doit être dépensé avant que l'investisseur puisse le déduire, soit un ou deux ans plus tard. Par exemple, je sais que je vais devoir payer des impôts pour 1999, mais mon contrat avec l'ACPE prend fin en février. J'ignore si j'aurai un revenu imposable l'an prochain. Si je veux profiter d'un crédit d'impôt—j'ai déjà acheté des actions accréditives pour cette année—il me faut cette déduction pour l'année où je sais que je vais payer des impôts.

Par ailleurs, les crédits d'impôts peuvent être ainsi faits que c'est la société qui doit les demander et qu'ils sont encaissables immédiatement. Ainsi, un crédit d'impôt pour une société junior qui n'est pas imposable n'a aucun sens. On me dit toutefois qu'on peut structurer les crédits d'impôt de façon à ce qu'ils viennent enrichir la caisse de la société. Mais là encore, ça ne profite pas aux investisseurs; les crédits d'impôts ne les encouragent donc pas à acheter.

Nous avons appris quelque chose à la conférence des ministres chargés des mines, qui a eu lieu à Charlottetown en septembre. Le sous-ministre de la Colombie-Britannique a déclaré sans ambages que le système de crédits d'impôt de sa province ne marchait pas. Nous avons les chiffres. La province avait mis de côté 9 millions de dollars pour cette année et elle aura de la chance si elle arrive à accorder pour 1,7 million de dollars de crédits d'impôt. C'est la même chose au Yukon. Terre-Neuve a elle aussi un excellent programme de subventions. Elle avait prévu 2 millions de dollars pour cette année, il lui en reste 1,5. Nous sommes en décembre et il est très clair qu'elle aura beaucoup de chance si elle arrive à accorder pour 1 million de dollars en subventions. Il y a, à l'échelle du pays, une prise de conscience croissante que ce qui est problématique, c'est le financement initial des sociétés juniors et que les crédits d'impôts ne règlent pas à ce problème.

Nous avons fait une analyse des coûts et bénéfices pour le gouvernement. En résumé, si le programme que nous proposons est un échec, il n'en coûtera rien au gouvernement et la situation de 1986-1987, alors que les dépense ont atteint 1,2 milliard de dollars, ne se reproduira pas. Elle ne se reproduira pas car, entre temps, des mesures prévoyant un impôt minimum sont entrées en vigueur. Entre ces deux extrêmes, il y aura un coût, celui du manque à gagner en recettes fiscales, mais c'est une perte brute. Elle sera plus tard compensée par les impôts sur les salaires des personnes qui seront employées par une industrie de l'exploration revigorée, sans oublier la TPS et la TVP sur les biens et services fournis à notre industrie.

• 1555

Lorsqu'une mine est découverte, ou que plusieurs mines sont découvertes, la richesse qui est créée est toute neuve. Il ne s'agit pas d'un transfert.

J'aimerais également faire remarque que notre industrie est différente de toutes les autres en cela qu'elle est fixe. Contrairement à la plupart des autres industries, nous ne pouvons pas aller nous installer dans une région où le régime fiscal est plus favorable. Les gisements ne se déplacent pas.

Bien qu'elles se soient faites attendre, les redevances et les recettes fiscales provenant de Diavik et d'Ekati—Ekati est déjà exploitée et, comme vous le savez, le ministre Anderson a donné le feu vert à Diavik il y a environ trois semaine, ici à Ottawa—viennent récompenser les années de vache maigre de 1983 à 1987 car c'est pendant cette période qu'ont eu lieu les travaux essentiels sur le terrain qui ont conduit à la découverte de mines de diamants au Canada. Pour la seule mine de Diavik, les dépenses en capital s'élèvent à 1,4 milliard de dollars, ce qui fait plus que compenser les dépenses et le manque à gagner en recettes fiscales pour cette année-là.

La durée de vie de cette mine se mesurera en décennies. Des ententes de participation ont déjà été signées avec la communauté. Pour la première fois de l'histoire, le tri et la classification des diamants, ainsi que d'autres activités à valeur ajoutée, auront lieu à Yellowknife.

J'aimerais remercier le comité d'avoir donné à notre association l'occasion de venir témoigner devant vous aujourd'hui. J'aimerais également redire que les vastes étendues du Nord canadien recèlent de nombreuses richesses minières qui restent à découvrir. L'exploration minière de haute technologie entreprise par les sociétés juniors a permis de découvrir des diamants dans les Territoires du Nord-Ouest, du nickel, du cuivre et du cobalt à la baie Voisey, au Labrador. Avec un coup de pouce par le biais d'un programme comme celui que nous proposons, les sociétés juniors peuvent encore faire de grandes découvertes. Elles ont seulement besoin de capitaux d'amorçage pour redémarrer.

J'aimerais ajouter au document que vous avez déjà un article paru dans le Financial Post du 26 novembre sous le titre «Junior Mining Hits Rock Botton—VSE Resource Stocks Fail to Reflect Commodity Prices», ainsi que la traduction en français de l'annexe A.

Merci. Ceci conclut mon exposé.

Le président: Merci beaucoup.

Monsieur Chatters.

M. David Chatters (Athabasca, Réf.): Merci, monsieur le président.

Je ne sais pas exactement comment réagir à vos propos car vos suggestions et vos encouragements vont dans le sens de ce que j'ai déjà entendu et de ce quÂau moins Reg et Julien ont déjà entendu. Nous avons passé beaucoup de temps pendant la législature précédente à étudier l'Initiative minière de Whitehorse et à faire des recommandations. Si je me souviens bien, l'une des recommandations contenue dans notre rapport était qu'il fallait encourager l'émission d'actions accréditives pour financer les nouvelles mines.

Ceci dit, l'article que vous avez joint à votre mémoire suggère la même chose. Le gros obstacle aux investissements spéculatifs dans les mines nouvelles est l'environnement et les revendications territoriales et non pas forcément les avantages fiscaux ou les revenus dont on peut bénéficier en investissant dans des titres miniers de nature spéculative. En Colombie- Britannique particulièrement, l'environnement et les revendications territoriales sont deux gros problèmes. Peu importe les actions accréditives ou tout autre système qui pourrait être plus avantageux. Tant qu'on n'aura pas réglé les problèmes liés au mouvement écologique ainsi qu'aux revendications territoriales et au mode de possession des terres, on ne réussira pas à attirer des capitaux d'amorçage.

M. David Comba: Pour ce qui est de l'environnement, il est reconnu que notre secteur n'a pas grand effet sur ce dernier. Pour explorer, nous avons principalement recours à la télédétection, soit par satellite, soit par aéronef à voilure fixe ou par hélicoptère. Le travail sur le terrain est fait par des personnes qui se déplacent à pied et qui prélèvent des échantillons de sol ou des échantillons de roche de la taille d'un point, ce qui a un effet négligeable sur l'environnement. En fait nous pouvons aller jusqu'à l'étape du forage sans avoir à construire de routes. Je pense que c'est la construction de routes qui inquiète le plus les écologistes.

En ce qui concerne les revendications territoriales en suspens, c'est effectivement un problème, mais nous sommes en contact avec les autochtones. Ils veulent collaborer avec le secteur de l'exploration car, dans de nombreux cas, c'est leur seul espoir de débouchés. Il y a au Canada de vastes régions sans aucune couverture forestière et sans aucune valeur commerciale, leur seule chance d'échapper à une économie de subsistance est donc le secteur minier. Notre conseil d'administration compte un autochtone parmi ses membres et nos liens avec les autochtones sont en train de se resserrer, et non l'inverse.

• 1600

M. David Chatters: Je ne le contesterai pas, mais la question de savoir à qui appartiennent les ressources et à qui vont les redevances, que ce soit les autochtones de la région ou le gouvernement provincial en question, continue à se poser. Ce n'est pas que les autochtones soient opposés aux mines et au développement, c'est qu'on ne sait pas à qui appartiennent les ressources et avec qui traiter.

Ce que vous dites est vrai. Le travail préliminaire qui est fait avant de découvrir une mine et d'en établir le potentiel ne pose pas de problème du point de vue écologique, mais ça ne vous rapporte rien. Votre investissement commence à vous rapporter quand la mine ouvre. C'est à ce moment-là qu'il faut construire des routes et l'infrastructure de la mine.

M. David Comba: Je regrette, mais pour les sociétés juniors, les dividendes ne viennent pas de là. Ils proviennent de la découverte. Si elle est importante, ce que les actionnaires espèrent, c'est que la société junior va être rachetée par une grosse société. C'est d'ailleurs ce qui s'est passé ces dernières années. À la bourse de Vancouver, nous avons vu Barrick acquérir Arequipa. Argentina Gold, autre société junior cotée à la bourse de Vancouver, a été achetée par une grosse société américaine. C'est comme ça que les investisseurs de haut risque qui misent sur les sociétés juniors sont récompensés. Les juniors ne sont plus là quand la mine entre en production.

Dans le cas de notre industrie, nous commençons avec des prospecteurs qui jalonnent les concessions. Ces dernières sont offertes aux sociétés minières qui fournissent l'argent pour évaluer, avec des moyens de haute technologie, les ressources minérales de la propriété du prospecteur. Quand on fait une découverte et qu'elle est importante, la propriété change très rapidement de mains et abouti entre celles d'une grande société. Seules les grandes sociétés minières ont parmi leur personnel les ingénieurs et les environnementalistes capables de faire les études environnementales et techniques nécessaires pour établir le potentiel du gisement, obtenir les permis et entreprendre sa mise en production. À de très rares exceptions près, les sociétés juniors n'ont pas la capacité d'attirer ce genre de talents.

M. David Chatters: Je le sais et je pourrais me lancer dans un débat sur cette question, mais je ne le ferai pas, monsieur le président.

Le président: Je vous en sais gré, monsieur Chatters.

Passons à M. St-Julien.

[Français]

M. Guy St-Julien (Abitibi—Baie-James—Nunavik, Lib.): Merci, monsieur le président. Monsieur Comba, je vais aller droit au but. Dans la province de Québec, on est à 175 p. 100. Nous sommes à 100 p. 100.

Qu'est-ce qui a tué les actions accréditives pour les sociétés juniors? Il y a eu des scandales comme celui de Bre-X, etc. Ce qui fait défaut actuellement dans les programmes d'actions accréditives, au Québec comme au Canada, c'est qu'il s'y trouve des zones grises, des zones grises quant aux frais d'exploration, des zones grises quant aux frais d'administration et des zones grises quant à la location de matériel.

Je vais vous dire pourquoi, monsieur le président. C'est qu'après deux ans et demi, Revenu Canada et les enquêteurs ont décidé tout à coup de faire l'inspection d'un projet d'actions accréditives, etc., et les personnes qui ont investi dans les actions accréditives ont été cotisées à nouveau trois ans plus tard. Une personne qui a investi 10 000 $ peut être cotisée à nouveau à 8 000 $ deux ans et demi ou trois ans après, ce qui n'a aucun sens.

Actuellement, le consommateur est responsable de ses actions accréditives, mais le promoteur qui a émis le prospectus ainsi que les actions accréditives n'est responsable de rien. C'est ce qu'il faut déterminer à propos des actions accréditives. Le promoteur peut faire la promotion de n'importe quel projet au Canada et au Québec, mais il n'est responsable de rien, même pas le géologue.

Il faut, monsieur le président, responsabiliser le promoteur et les géologues si on veut rendre sécuritaires les actions accréditives. C'est le message que j'essaie de vous transmettre.

Qu'est-ce qui est arrivé en Abitibi? Il y a deux ans et demi, Revenu Canada a envoyé une équipe de 25 enquêteurs pour inspecter les actions accréditives et les promoteurs. J'appelle ces enquêteurs des pit bulls. Ils sont arrivés chez nous, même armés d'une carabine dans certains cas, pour saisir des documents et pour finir, après six mois d'enquête, par s'excuser et dire qu'ils n'avaient rien trouvé de répréhensible par rapport à cette société junior. Cela n'a pas de bon sens. Je vais m'arrêter là.

Monsieur Comba, qu'avez-vous déterminé par rapport aux zones grises et par rapport à la responsabilité des promoteurs? Avez-vous rencontré les fonctionnaires du gouvernement du Québec pour tenter d'élaborer une nouvelle politique ainsi qu'une nouvelle attitude fédérale-provinciale face à l'exploration minière au Québec?

• 1605

[Traduction]

M. David Comba: Oui, j'ai le plaisir de vous dire que nous avons rencontré des représentants du ministère des Finances du Québec. Essentiellement, dans cette province, particulièrement dans les régions où elle veut encourager les sociétés juniors, la déduction pour l'exploration en surface est de 175 p. 100. Je fais partie du conseil d'administration d'une société junior qui était cotée à la bourse de Montréal et qui vient tout juste de déménager dans l'Ouest. Nous avons émis des actions accréditives à 175 p. 100. Cela représente beaucoup d'argent et ce système est en vigueur au Québec depuis sept ou huit ans. Quand on laisse une telle somme sur la table pendant aussi longtemps, on finit par attirer des éléments qui veulent en profiter.

Quand je suis venu à Ottawa, il y a une dizaine de jours, j'ai entendu dire que les vérificateurs du gouvernement fédéral avaient trouvé qu'il y avait 68 p. 100 de fraude. C'est ce qu'on m'a dit et j'ai demandé s'il s'agissait de vérifications au hasard ou de vérifications ciblées. On m'a dit qu'elles étaient ciblées. Pour moi, cela veut dire que les personnes qui les ont ciblées savaient ce qu'elles faisaient. J'ai ensuite demandé s'il s'agissait de fraude ou de non-conformité. On m'a dit qu'on ne savait pas. Il semble que pour la majorité c'était des cas de non-conformité. Quelle en était l'importance? Là encore, on ne savait pas. Je suis sûr qu'il m'est personnellement arrivé d'envoyer mon brouillon au lieu de la version définitive d'un formulaire d'impôt et qu'il n'était pas signé. Techniquement, c'est un cas de non-conformité, mais est-ce que c'est de la fraude? Non. Je pense que le chiffre de 68 p. 100 est très exagéré.

Toutefois, je sais pertinemment qu'il y a des gens de Val d'Or en particulier qui avaient trouvé un moyen de transformer les capitaux conditionnels provenant des actions accréditives en capitaux fermes. Je pense qu'ils ont fait l'objet d'une vérification, à juste titre, et qu'ils ont été démasqués. Il faudra attendre pour savoir si cela donnera lieu à des accusations criminelles.

L'une de mes responsabilités à l'Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs consiste à faire partie d'un comité appelé le groupe de travail sur les normes de l'industrie minière. C'est une des conséquences de l'affaire Bre-X. Nous allons placer la barre beaucoup plus haut, cela ne fait aucun doute. Nous recommandons qu'il y ait toujours une personne qualifiée parmi les membres du conseil d'administration et qu'il y ait divulgation continue. Nous sommes donc aujourd'hui en bien meilleure posture qu'il y a quelques années.

Les lois ne peuvent pas plus empêcher la fraude que les meurtres, mais je pense qu'on peut rendre la tâche beaucoup plus difficile aux gens qui veulent créer des problèmes pour les investisseurs.

[Français]

Le président: Monsieur Fournier.

M. Ghislain Fournier (Manicouagan, BQ): Je vous remercie de votre exposé. J'ai pris des notes afin de vous poser trois questions que j'ai relativement à votre exposé.

On me dit que les ressources naturelles sont de compétence provinciale. On sait que depuis 1993, je crois, les dépenses affectées à l'exploration minière ont atteint leur plus bas niveau au Canada. Comment qualifiez-vous et expliquez-vous cette situation qui prévaut depuis 1993, depuis presque sept ans? Est-ce parce que la responsabilité a été transférée aux provinces? Si oui, que peut faire le fédéral? Y a-t-il désaccord ou de mauvaises ententes? Qui va investir? Cela doit causer un tort énorme à l'exploration minière.

J'aimerais savoir ce que vous en pensez. J'aurai deux autres courtes questions à vous poser par la suite, si vous me le permettez.

[Traduction]

M. David Comba: Votre question comporte plusieurs parties.

Tout d'abord, les droits miniers appartiennent aux provinces et aux territoires. Toutefois, dans presque tout le Canada, exception faite du Québec, qui perçoit lui-même ses impôts, la question des impôts relève du fédéral.

• 1610

Pour ce qui est de la baisse des dépenses d'exploration, les grandes compagnies minières ne font plus d'exploration au Canada, et votre collègue de l'Abitibi peut indiquer le nombre de grandes compagnies qui ont fermé leurs bureaux en Abitibi pour s'en aller ailleurs.

Cela a commencé en 1992. Notre association suit les dépenses des grandes compagnies minières depuis de nombreuses années. Pendant des décennies avant 1992, elles investissaient environ 60 p. 100 de leur budget d'exploration au Canada et environ 40 p. 100 dans le reste du monde.

À l'époque, en 1992, il y avait une dizaine de pays où elles consentaient à investir: l'Irlande, les États-Unis, le Mexique, l'Australie, l'Afrique du Sud, le Zimbabwe. En 1999, moins de 20 p. 100 de l'argent qu'elles réservent à l'exploration est dépensé au Canada. Le reste, soit 80 p. 100, est dépensé à l'étranger. Les grandes compagnies minières peuvent maintenant explorer et acquérir des mines dans plus de 100 pays.

Au début des années 90, les gouvernements de l'Amérique centrale et de l'Amérique du Sud ont amélioré la qualité de leurs titres miniers et les ont rendus très attrayants. Aussi, pour le première fois, l'ex-union soviétique a laissé entrer les sociétés minières canadiennes sur son territoire et leur a permis d'examiner, d'explorer et d'acquérir des terres.

Le monde est devenu beaucoup plus concurrentiel qu'il ne l'était.

En ce qui concerne le régime fiscal lui-même, nous pensons que grâce au programme en place au Québec, qui est resté fidèle aux actions accréditives assorties d'une prime alors que cette dernière était éliminée dans le reste du Canada, le ralentissement des activités d'exploration ne s'est pas fait sentir de façon aussi marquée dans cette province.

La moyenne du ralentissement pour l'ensemble du Canada est de 54 p. 100. Au Québec elle n'est que de 45 p. 100 et en Ontario, où la crise est particulièrement prononcée, elle est de 69, presque 70 p. 100. Je pense que c'est donc là une indication que la prime liée aux actions accréditives marche dans une certaine mesure. C'est certainement le cas au Québec. Elle y a limité les dégâts dans une certaine mesure. Mais je pense que le Québec se rend compte qu'on ne peut pas puiser sans cesse à la même source. Son programme est très généreux—cela fait longtemps qu'il offre 175 p. 100 et les investisseurs commencent à se méfier.

À Charlottetown, le Québec faisait partie de ceux qui ont plaidé en faveur de la création d'un nouveau programme national du genre de la DEEM car il se rend compte qu'il pourrait ainsi attirer beaucoup plus d'investisseurs qu'avec un programme strictement provincial. Par exemple, la société dont je suis l'un des administrateurs a émis des actions accréditives l'an dernier au Québec et nous nous apprêtons à recommencer cette année. Comme j'habite en Ontario, je ne peux déduire que 100 p. 100 de l'investissement que j'ai fait dans cette société. Si j'habitais au Québec, je pourrais déduire 175 p. 100.

Il n'en demeure pas moins que c'est un programme très attrayant et que, pour nous, c'est une indication que ce genre de chose plaît aux investisseurs.

Je suis vraiment heureux de vous apprendre que, après notre réunion avec votre président le 23 novembre, le tout nouveau président de l'Association des prospecteurs du Québec a quitté Ottawa et a passé trois jours à Québec. Quand il en est reparti le vendredi après-midi, il avait l'assurance du ministère des Finances du Québec qu'il harmoniserait son programme avec ce que le fédéral proposerait. Nous sommes parfaitement conscients qu'on ne peut pas avoir 175 p. 100 et 140 p. 100. Il n'y aurait aucun risque pour les investisseurs, et c'est une chose à laquelle tant le ministère des Finances que nous même tenons. Il faut que l'investisseur assume une partie des risques.

Je suis heureux de dire que, oui, le Québec reconnaît que c'est un bon programme et qu'il est prêt à l'harmoniser avec ce que le fédéral proposera.

Le président: Ghislain Fournier.

[Français]

M. Ghislain Fournier: D'après vous, qu'est-ce qui se passe?

Le président: Excusez-moi, monsieur Fournier. Je vous donnerai la parole au prochain tour. C'est à M. Julian Reed.

[Traduction]

M. Julian Reed (Halton, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Monsieur Comba, pourriez-vous éclairer une personne dont ce n'ai pas la spécialité et nous expliquer la différence entre des capitaux fermes et des capitaux conditionnels.

• 1615

M. David Comba: Les capitaux fermes sont ceux qu'on va chercher sans les actions accréditives. Tout les capitaux obtenus par le biais des actions accréditives sont considérés plus faciles à obtenir, bien que dans ce marché, il ne semble pas y avoir une grande distinction. Je suis désolé d'avoir utilisé...

M. Julian Reed: Non, ce n'est pas grave. Je suis heureux que vous me l'ayez expliqué.

J'aimerais revenir sur la question de l'environnement, parce que, en dépit du fait qu'une société junior fait de l'exploration et autre, elle n'est généralement plus là quand l'extraction commence pour de bon. C'est du moins ce que j'ai cru comprendre.

Mais je peux vous dire qu'il y a en général beaucoup d'idées fausses—à mon avis—sur l'industrie minière et l'environnement. Elles viennent pour la plupart du fait que les méthodes utilisées dans le traitement des résidus et autres ont résulté dans la présence d'acides dans les ruisseaux, etc. Je ne crois pas le climat ait beaucoup changé, si j'en crois ce que j'entends sur la colline du Parlement. Il y a encore des gens, encouragés par certaines organisations non gouvernementales, qui sont vraiment opposés à toute exploitation minière. Je le dis en connaissance de cause. J'ai un frère qui travaille depuis longtemps dans le secteur de l'exploration minière. Il est pour moi une précieuse source de renseignements sur la rigueur du processus d'évaluation environnementale.

Je me demande si vous avez une idée de ce qu'il faudrait faire pour surmonter cet obstacle, comment aller au-delà ce cette idée que tout ce qui est naturel est bon et que l'industrie minière est mauvaise.

M. David Comba: J'aimerais bien avoir la réponse à votre question. J'ai la chance de participer à un programme au Manitoba, d'assister à des réunions en vue de compléter le réseau des parcs et des aires protégées de cette province. Les représentants des grandes sociétés minières et des sociétés juniors s'assoient à la même table que le Fonds mondial pour la nature et autres groupes environnementaux pour décider des limites des parcs, de leur taille et de leur emplacement. C'est vraiment étonnant de les voir collaborer et ça marche. Il existe au Manitoba un bon sens qui semble manquer dans le reste du pays.

J'ai participé à un programme en Ontario et c'était épouvantable. Notre industrie s'est sentie vraiment trahie par le processus. Ayant eu l'occasion de voyager dans tout le pays, c'est une chose que j'ai vue ailleurs, mais essentiellement c'est un clivage entre les régions urbaines et les régions rurales. Les gens qui vivent à Toronto ne connaissent plus personne qui gagne sa vie en abattant des arbres, en trayant des vaches ou qui fasse autre chose que prendre un train de banlieue. C'est notre problème: les gens ne comprennent plus les circonscriptions rurales.

M. Julian Reed: Je suis entièrement d'accord avec vous et ce qui est ironique, c'est que le centre de la technologie minière se trouve à Toronto.

M. David Comba: C'est exact.

M. Julian Reed: Il y a donc des gens comme nous qui doivent assumer la responsabilité de surmonter cet obstacle et toute indication que vous pourrez nous donner sur la façon de le faire sera bienvenue. Les attaques contre l'industrie minière sont devenues une méthode de levée de fonds.

M. David Comba: Oh oui!

M. Julian Reed: À chaque fois qu'on arrive à faire peur à quelqu'un, un chèque de 100 $ arrive. Mais il faut que nous arrivions à vaincre ça si nous voulons faire quelque chose d'utile dans les régions rurales du Canada.

M. David Comba: Il m'arrive souvent de me sentir très frustré car, si en tant que membre du conseil d'administration et directeur d'une société minière, je faisais des déclarations du genre de celles que font les écologistes, je serais en prison. Je ne pourrais pas être administrateur ou directeur d'une société coté en bourse. Ils n'ont aucune hésitation à mentir parce que leur cause est juste.

• 1620

Par ailleurs, je pense que notre industrie mérite d'être critiquée car nous n'avons pas proclamé les bonnes nouvelles aussi fort que nous aurions pu le faire. Il y a deux ans, j'ai visité une mine dans la Saskatchewan. Elle est située dans un parc provincial. C'est étonnant comment, avec un peu de planification et d'imagination, on a réussi, avec très peu de choses, à ce qu'elle ne se voit pas d'un itinéraire de canotage très fréquenté. Au lieu de construire une usine tout en hauteur, on l'a construite presque entièrement sous terre. On ne peut rien entendre et rien voir.

Les ingénieurs adorent construire des routes toutes droites, mais elles sont très voyantes. Ce qu'ils ont fait pour cette mine, c'est qu'ils ont conçu une route aussi étroite que possible qui suit les courbes du relief. Même d'un avion, on peut à peine la voir. Tous les bâtiments sont recouverts d'un parement en métal vert.

Ce sont des petites choses très simples, mais très efficaces. Je pense que c'est le genre de choses qu'il faut que nous montrions aux gens: il est possible d'avoir une mine dans un parc sans porter atteinte à la valeur du parc. À l'heure actuelle, il est très difficile de convaincre les écologistes qu'on peut faire de l'exploration dans un parc et ne parlons pas d'y exploiter une mine.

Le président: Monsieur Schmidt, c'est à vous de défendre l'honneur de la présidence et la ville de Toronto. Faites-moi plaisir et posez des questions raisonnables.

M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Je vais poser des questions raisonnables, monsieur le président. Quant à savoir si elles vous plairont, c'est une autre histoire.

Le président: Tant que vous défendrez l'honneur des gens du sud de l'Ontario, ça ira.

M. Werner Schmidt: J'ai trouvé la franchise de vos derniers propos rafraîchissante. Vous méritez qu'on vous en félicite. Le problème est réel.

Je pense que dans votre dernière phrase vous avez mis le doigt sur le véritable problème. Le véritable problème n'est pas de réunir des capitaux en mettant des titres sur le marché public, bien que ce soit quelque peu problématique en soi. Tant qu'une grosse société ne rachète pas la société d'exploration, l'argent se sera pas là.

Les investisseurs qui achètent ces actions accréditives—il fut un temps où je les prenais ferme—sont des gens très avertis. Ils étudient la situation et décident qu'ils vont miser sur telle société d'exploration. Dans cinq ou six ans, ils la vendront et feront des gains en capitaux et tout sera formidable. Mais il faut qu'ils aient l'espoir que quelque chose se passera au bout de six ans.

Dans la situation actuelle au Canada, au bout de six ans, il ne se passe rien. C'est pour ça que les grosses compagnies n'explorent plus au Canada. Nous savons que c'est vrai. C'est là qu'est le problème.

Je ne suis donc pas sûr qu'émettre des actions accréditives ou que permettre de le faire changera quoi que ce soit. Je ne pense pas que ce soit la solution. Peut-être, mais j'en doute, car à moins de voir la lumière au bout du tunnel, ça ne mènera à rien.

Je voudrais vraiment vous poser la même question que M. Reed. Comment peut-on faire changer les attitudes? Je ne suis pas sûr que ce soit ce que vous avez dit, mais je crois que vous avez laisser entendre qu'il fallait tromper les écologistes de façon à ce qu'ils ne soient pas au courant de ce que nous faisons.

M. David Comba: J'espère que ce n'est pas ce que j'ai dit ou laisser entendre. Vous feriez mieux de vous taire car Julian est membre du Comité de l'environnement.

Je pense que M. Reed a dit très correctement que le problème était que les écologistes comptaient sur la peur pour financer leurs organisations.

M. Werner Schmidt: C'est exact, c'est ce qu'ils font.

M. David Comba: C'est pour nous un problème très difficile à surmonter.

Je ne suis pas d'accord avec vous quand vous dites que les grosses sociétés rechignent à acheter des sociétés juniors.

M. Werner Schmidt: Combien en ont-elles acheté cette année?

M. David Comba: Les sociétés juniors n'ont pas fait d'exploration depuis presque deux ans maintenant. Il n'y a donc eu aucune nouvelle, aucune activité, rien pour aviver l'intérêt des gens.

M. Werner Schmidt: Non, mais il y a eu...

M. David Comba: Permettez-moi de finir. Après la découverte de la baie Voisey, les gisements de diamants ont fait l'objet d'une bataille des offres. Si vous trouvez une bonne cible, les grosses sociétés seront là. Elles nous ont dit qu'elles achetaient des gisements en ce moment. Si on trouve quelque chose au Canada, elles l'achèteront. Penser que l'octroi de permis n'est pas un problème dans les autres administrations et que les sociétés minières y font ce qu'elles veulent est archi faux.

M. Werner Schmidt: C'est vrai, j'en conviens.

M. David Comba: Une des choses qui me surprennent le plus à propos de la Bre-X, c'est qu'on s'est surtout intéressé à la fraude, à la dissimulation que, soit dit très franchement, l'on ne pourra jamais prouver en cour.

Ce qui est vraiment évident, c'est qu'elle avait perdu le titre de propriété. L'Indonésie est un pays qui applique le code civil. Lorsqu'on viole la loi dans un pays qui applique le code civil où un titre est lié à un contrat, on n'a plus de titre, et c'est ce qui est arrivé. La société Bre-X avait un contrat de travail lui permettant de construire seulement tel nombre de routes dans la jungle et d'avoir seulement tel nombre de puits de forage en exploitation dans jungle. Comme elle a très nettement excédé cela, le gouvernement indonésien lui a dit qu'elle avait violé le contrat de travail. Dans un pays qui applique le code civil, c'est fini. Elle n'avait pas de titre et certaines des premières transactions d'initiés ont eu lieu lorsqu'on lui a dit qu'elle n'avait plus de contrat.

• 1625

Vous vous rappellerez peut-être que, à un moment donné, la société Arequipa devait avoir la part du lion pour ce qui est du gisement et la Bre-X allait pouvoir garder 25 p. 100. Cela a provoqué un scandale. Comment pouvait-on garder 100 p. 100 et lui donner seulement 25 p. 100? Le gouvernement indonésien a dit que c'était bien dommage, mais que la Bre-X ne possédait alors rien et que, en reconnaissance du travail qu'elle avait accompli, il allait lui donner 25 p. 100.

On ne semble tout simplement pas comprendre que l'on doit composer maintenant avec le mouvement écologique partout dans le monde. Grâce aux caméras vidéo et Internet, un problème environnemental, qu'il se pose au Ghana ou en Espagne; fait la une des journaux dès le lendemain et l'on a du mal à trouver du financement.

M. Werner Schmidt: Je tiens à être clair. Je crois que les mots ont dépassé votre pensée. Je comprends cela, mais je voulais faire valoir un point, et vous l'avez très bien fait valoir dans votre réponse. Nous avons affaire aux écologistes dans le monde entier, et je ne crois pas que cela soit si mal.

M. David Comba: J'en conviens.

M. Werner Schmidt: Il faut faire attention à l'environnement, car les compagnies minières ont fait des choses terribles, tout comme le secteur de l'exploitation forestière. En ce moment même, on boycotte le bois d'oeuvre canadien dans d'autres parties du monde. On n'achète pas le bois d'oeuvre canadien pour des raisons environnementales.

À la défense des citadins préoccupés par l'environnement, il faut dire qu'ils ne savent que trop ce que risque de faire la pollution de l'environnement. Il faut les convaincre non pas que nous nous préoccupons de l'environnement, mais qu'il est possible de contrôler l'environnement de telle sorte que le développement soit, en fait, écologique. Tel est le problème. C'est ce que vise à l'heure actuelle la coupe sélective, pour prendre l'exemple du secteur de l'exploitation forestière.

Si l'on regarde l'exploitation minière à ciel ouvert qui se fait surtout dans des endroits comme Wabamun, en Alberta, par exemple, où la récupération a été complète, la topographie est en fait améliorée par rapport à ce qu'elle était avant d'être dérangée. Ce sont des messages de ce genre qu'il faut transmettre, je crois.

Les citadins ne sont pas stupides. Ils savent exactement ce qu'ils veulent, mais il faut les convaincre. Ils sont tous du Missouri. Ils se promènent avec une caméra et ils disent que ceci ou cela n'est pas correct, et ils ont raison. Que faites-vous aujourd'hui pour empêcher cela?

Le message doit passer. Avec l'offre d'actions accréditives dans le cadre d'un certain régime fiscal, c'est peut-être exactement ce qu'ils veulent. Les grands investisseurs recherchent aussi la sécurité. Ceux d'entre nous qui vivent dans des centres urbains ont besoin de ce développement, car ils savent que, sans lui, notre niveau de vie baissera. Nous savons cela.

Comment faire cela dans la collaboration de façon à avancer en même temps sur tous les fronts, comme il le faut? Vous favorisez un côté, mais que dire de l'autre? Ils doivent aller ensemble car, autrement, nous n'obtiendrons pas ce que nous recherchons, puisque chacun ne peut pas réussir seul.

Le président: D'accord, monsieur Schmidt. Je suis persuadé que votre expertise est très grande, mais il faut mettre un point quelque part.

M. Werner Schmidt: Je ne voulais pas m'arrêter.

Le président: Je ne crois pas qu'il voulait une réponse. Il voulait seulement que vous disiez «d'accord».

M. David Comba: D'accord.

M. Werner Schmidt: Ma foi, la question est maintenant de savoir comment on peut faire cela. Elle va de soi.

Le président: Monsieur Bélair.

M. Réginald Bélair (Timmins—James Bay, Lib.): J'irai droit au but. Quelle est l'incidence ou l'effet de la cartographie aérienne sur les petites sociétés minières?

M. David Comba: Les petites sociétés minières ont-elles recours à la cartographie aérienne? Oui. Leurs cartes aériennes ne sont pas aussi imposantes que celles de sociétés comme Inco ou Falconbridge, mais elles demeurent utiles pour les petites sociétés. En fait, une façon pour les gouvernements qui possèdent les droits miniers d'attirer les petites sociétés est de faire une carte aérienne et de la rendre tout de suite publique de telle sorte que tout le monde puisse l'utiliser en même temps.

M. Réginald Bélair: C'est juste que des membres du secteur industriel laissent plus ou moins entendre qu'ils savent exactement ce qu'il y a là et qu'il est donc vraiment inutile de forer.

• 1630

M. David Comba: Je travaille dans ce secteur depuis bientôt 37 ans...

M. Réginald Bélair: Je me fais l'avocat du diable.

M. David Comba: ... et je ne dirai jamais que je sais ce qui se passe. Je ne peux pas voir plus loin dans le sol que vous. Très souvent, dans notre secteur, les grandes découvertes surviennent là où l'on s'y attendait le moins. C'est peut-être la dixième cible qui sera la bonne. Il est arrivé très rarement dans ma carrière que ma première cible soit la bonne. Il y avait une mine sur la propriété, mais on ne l'a pas trouvée au premier forage.

M. Réginald Bélair: Mais les cartes n'indiquent-elles pas très correctement, presque exactement le genre de minerai, de minéraux, ou de métaux...

M. David Comba: Non. On peut parfois avoir une idée du type de roche. Certains types de roche ont tendance à contenir certains types de gisement; on peut donc avoir une idée que des gisements d'or devraient se trouver à tel ou tel endroit. Mais cela ne veut pas dire qu'on ne pourrait pas tomber sur un très bon gisement de cuivre et de zinc et vice versa.

M. Réginald Bélair: D'accord.

À part les finances, quels autres obstacles empêchent les petites sociétés de prospection de faire leur travail?

M. David Comba: C'est vraiment le régime de réglementation au Canada.

M. Réginald Bélair: Pourriez-vous être plus précis?

M. David Comba: Je préférerais reprendre des exemples que cite l'Association minière du Canada, car ils sont bons. Cela fait des années que l'Association minière du Canada signale qu'il s'écoule de plus en plus de temps entre la découverte, le permis d'exploiter et la production en tant que telle, et qu'il y a énormément de doubles emplois, au point presque de nuire.

M. Réginald Bélair: Entendez-vous par doubles emplois des lignes directrices fédérales et provinciales?

M. David Comba: Oui. Par exemple, la société Placer Dome a fait ses débuts au Canada et elle y a fermé tous ses bureaux. Elle ne fait plus de prospection ici. Elle a amené une nouvelle mine au niveau de la production dans le nord de l'Ontario qui s'appelle Musselwhite. Le ministère des Pêches et Océans s'en est mêlé et la société a dû déplacer une dizaine de grands brochets—comme si le brochet était une espèce en danger de disparition. Cela lui a coûté, si j'en crois les statistiques, quelque 107 000 $ le brochet et, en dedans de quelques semaines, un autochtone du coin avait pris les brochets au filet pour nourrir ses chiens.

Tobin a raconté une histoire semblable à un dîner donné dans le cadre de la conférence des ministres des Mines, à St. John's, il y a trois ans environ. Il a parlé d'un cas à Terre-Neuve où il avait fallu déplacer des truites au coût de 7 000 $ ou 8 000 $ la truite. Et cela, dans une province dont les stocks de poisson côtier et hauturier venaient tout compte fait d'être décimés. Il se demandait vraiment ce que faisaient les gens de Pêches et Océans à déplacer ainsi des truites dans les eaux intérieures de Terre-Neuve.

Il y a donc des cas. On entend des histoires d'horreur de ce genre.

Le président: Monsieur Godin.

[Français]

M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur Comba, j'aimerais vous poser une question spécifique.

Regardons la situation des mines. Personnellement, je n'ai pas 15 ans d'expérience à la Chambre des communes, mais je peux dire que j'en ai 15 dans les mines. J'ai travaillé sous terre à la mine Brunswick, au Nouveau-Brunswick, pour la Noranda et j'arrive à comprendre les choses qui concernent les mines.

Je ne sais pas si vous êtes d'accord avec moi, mais je crois qu'aujourd'hui, avec l'économie mondiale, les sociétés peuvent faire de meilleurs deals, pour utiliser le mot anglais, avec d'autres pays qu'autrefois. Il est facile, dans le monde d'aujourd'hui, d'aller ouvrir une mine et investir ailleurs. Je vais vous donner un exemple. La Noranda a ouvert des mines en Afrique. Elle en a ouvert partout.

Êtes-vous d'accord avec moi qu'à cause de l'exploitation et de l'aide gouvernementale que certains reçoivent aujourd'hui, comparativement peut-être à d'autres pays, l'exploration est empêchée dans notre pays, où on pourrait trouver des mines?

[Traduction]

M. David Comba: La concurrence est féroce dans le monde et, comme les impôts canadiens ne sont pas les plus bas et comme notre régime de réglementation n'est pas le plus rapide, nous perdons du terrain sur le marché. C'est vraiment inquiétant. Si les Noranda de ce monde veulent survivre, prospérer et faire réaliser des profits à leurs actionnaires, ils doivent jouer le jeu international. Ils doivent aller là où ils obtiendront le meilleur marché. Mais il est faux de prétendre que tous les pays du monde sont supérieurs au Canada.

• 1635

Les titres continuent de poser un problème dans la plupart des pays de l'ancienne Union soviétique. La notion de propriété n'est pas bien établie là-bas, ni le système judiciaire qui pourrait l'établir. Je crois donc que le Canada n'est pas aussi peu concurrentiel que certains le disent, mais les grandes entreprises sont certes plutôt craintives.

L'événement qui a vraiment mis les décideurs du secteur minier sur un pied d'alerte est survenu en 1992, lorsque le gouvernement de la Colombie-Britannique a exproprié la société Windy Craggy. La Windy Craggy est une mine de cuivre et de cobalt de catégorie internationale située dans le coin nord-ouest de la Colombie-Britannique. L'expropriation de cette mine a vraiment secoué le secteur industriel. Cela a attiré l'attention de toutes les sociétés minières du monde.

La déduction d'épuisement pour l'exploration minière, en vigueur de 1983 à 1987, a contribué jusqu'à un certain point à donner une assurance énorme aux milieux financiers canadiens. Quand la déduction d'épuisement pour l'exploration minière a pris fin, en 1987, cette force énorme est partie à la conquête du monde. Nos grands concurrents sont l'Australie et, dans une moindre mesure, les États-Unis, mais nous les battons à plates coutures, en fait. Les petites sociétés canadiennes sont parties trouver des mines en Argentine, au Pérou et dans de nombreux pays de l'ancienne Union soviétique.

C'est un marché mondial, mais on ne peut pas être concurrentiel au plan international si l'on n'a pas un marché national fort. C'est ce que nous dit très clairement notre secteur des services généraux. Par exemple, la Canadian Drilling Association participe beaucoup à la campagne de sensibilisation. Le président en est cette année Tim Bremner, de North Bay, en Ontario. Il est un vice-président de la société Boart Longyear, qui est une des plus grandes sociétés d'équipement de forage au diamant au monde. Cette société vient de mettre à pied 400 personnes au Canada, dont 257 dans la circonscription du premier ministre Harris.

C'est une entreprise très raffinée. Elle fabrique beaucoup de trépans électro-hydrauliques de pointe et des couronnes à diamants. Elle fait beaucoup de choses, et elle met des gens à pied à l'heure actuelle. Elle craint vraiment de ne pas pouvoir survivre sans un secteur industriel national.

Lorsque j'ai découvert la mine Lindsley, à Sudbury, en 1987, j'ai signé ce qui est encore aujourd'hui le plus important contrat unique à jamais avoir été signé par la société Longyear dans le monde entier. J'ai convenu non seulement d'acheter tant de trépans, mais de la laisser fabriquer tant de trépans d'une certaine taille, dont elle n'aurait normalement pas besoin au Canada, parce que la mine Lindsley se trouvait bien au-delà d'un mille de profondeur—c'était une mine très profonde.

Ce qu'on voulait faire, notamment, à l'usine de la Longyear, à North Bay, c'était construire une machine vraiment grosse qu'ils appelaient la Longyear 60, mais cela n'avait jamais été justifié jusque-là. La Falconbridge lui a donné une raison d'aller de l'avant et de construire cette machine, qui a été mise à l'essai à Sudbury.

Quand je suis allé là-bas, il y a deux ou trois mois, pour commencer à parler de cette campagne, j'ai demandé où étaient les Longyear 60. On en a fabriqué seulement trois et elles son toutes en Afrique du Sud à l'heure actuelle. L'avantage était que l'usine de la Longyear les construisait à North Bay et que la Falconbridge employait le prototype à Sudbury; ainsi, si une modification s'imposait, on pouvait le savoir très vite.

Tel est l'avantage que donne un secteur minier national fort. Les Canadiens sont considérés dans le monde entier comme d'excellents prospecteurs, d'excellents foreurs et d'excellent exploitants. Mais beaucoup de progrès technologiques ont été accomplis ici même, au Canada et, sans un secteur minier national fort, nous allons perdre cette compétence.

Le président: D'accord. Merci beaucoup.

[Français]

Monsieur St-Julien.

M. Guy St-Julien: Merci, monsieur le président. J'attendais justement le deuxième tour.

Monsieur Comba, j'ai l'impression que vous êtes trop poli avec nous, du gouvernement du Canada. J'ai l'impression que vous marchez sur des oeufs.

Je suis un ancien mineur; j'ai travaillé au forage de diamant et j'ai travaillé dans une mine pendant plusieurs années. Aujourd'hui, ce qu'il faudrait, monsieur Comba, c'est marcher sur des carottes de forage. Je vais vous dire pourquoi.

Je vous ai parlé tout à l'heure du consommateur qui a goûté à la médecine de Revenu Canada, à la médecine de la zone grise sur les frais d'exploration. J'ai vécu des manifestations sur l'exploration minière dans ma circonscription. En 11 ans, j'ai vécu de nombreuses réunions avec la Chambre de commerce de Val-D'Or et la Chambre de commerce de Rouyn-Noranda.

• 1640

Mais le problème n'est pas là. Le problème, c'est le manque de coordination entre plusieurs ministères. Je sais, monsieur Comba, que vous et votre association minière ainsi que l'Association des prospecteurs du Québec avec M. Guy Parent se promènent d'un ministère à l'autre, de celui des Ressources naturelles à ceux des Finances, du Revenu, du Développement économique, des Affaires indiennes et de l'Environnement. Ce qui manque, monsieur le président, ce sont des outils adaptés aux régions minières.

On arrive à l'an 2000, et il n'y a pas de mécanisme pour assurer le suivi. Les promoteurs des projets d'exploration minière ne sont responsables de rien, non plus que les géologues. Un géologue devrait être tenu responsable tout autant qu'un comptable agréé. Ce serait une nouvelle façon d'aider l'industrie de l'exploration minière au Canada.

Le problème est qu'il n'y a pas de coordination entre tous les ministères que je vais vous nommer: Ressources naturelles, Finances, Revenu Canada, Développement économique Canada, Affaires indiennes et Environnement Canada. Le gouvernement canadien devrait faire une offre intégrée en vue de mettre en place un programme d'exploration minière en collaboration avec les provinces, mais aussi avec les associations de prospecteurs du Canada et des provinces.

Notre problème est de ne pas avoir de leader au gouvernement du Canada pour diriger le programme des actions accréditives. Ni Ressources naturelles ni Revenu Canada n'en sont responsables. On devrait donner un mandat de coordination à Développement économique Canada.

Ai-je raison de dire qu'il manque une instance de coordination entre les ministères, monsieur Comba?

Le président: Monsieur St-Julien, est-ce que vous avez fréquenté la même école que M. Schmidt?

M. Guy St-Julien: Non, mais je vais vous dire...

Le président: Vous appartenez à la même profession.

M. Guy St-Julien: Le problème, monsieur, c'est que j'ai la formation des gens de l'Abitibi.

Le président: Oui, oui.

[Traduction]

M. David Comba: Ce serait vraiment bien s'il y avait un guichet unique, mais ce n'est pas le cas. Je dois dire, toutefois, que les divers ministères que j'ai contactés m'ont fourni beaucoup de renseignements utiles, et cela, pas seulement ici, à Ottawa, mais aussi à Terre-Neuve, en Nouvelle-Écosse et au Manitoba, où j'ai eu l'occasion d'aller. Le président de notre organisation est en Colombie-Britannique et, avant que cette campagne ne soit très avancée, nous avons l'intention d'aller dans les dix provinces et les deux territoires.

Nous bénéficions d'un très large appui. Je ne peux pas dire que toutes les idées se marient bien. Il arrive parfois qu'elles soient contradictoires. Un sénateur, Nicholas Taylor, a laissé entendre que nous ne voyions pas assez grand, que nous devrions réclamer des pertes de 200 p. 100. Il m'a parlé de la société Dome Petroleum qui fait du forage dans le delta du Mackenzie.

Le président: M. St-Julien vient de vous parler de la même chose.

M. David Comba: Je dois dire que les gens sont sensibilisés au problème, mais qu'ils sont choqués de voir à quelle vitesse le secteur industriel a décliné et la mesure dans laquelle il a décliné. Au fond, Ressources naturelles Canada n'a pas encore publié les statistiques de forage pour 1997. On nous a communiqué quelque chose au téléphone pour la conférence des ministres des Mines. Sur un graphique, on dirait que nous participons à une course de lièvre sur une pente descendante, mais nous essayons de leur dire que nous venons de descendre un escarpement à ski et qu'ils ne s'en sont même pas encore rendu compte.

Le problème est donc que les gens ne comprennent pas à quel point ce ralentissement est marqué et que, si le prochain budget ne prévoit rien pour nous, il ne se fera plus vraiment de prospection ici.

[Français]

Le président: Une dernière question de la part de M. Fournier.

M. Ghislain Fournier: Monsieur Comba, je suis un homme qui aime beaucoup regarder ce qui se passe ailleurs dans tel ou tel domaine. Or, dans le domaine minier, j'éprouve beaucoup de difficulté à établir une comparaison. Vous connaissez le dicton: «Quand on se regarde, on se désole, mais quand on se compare, on se console». En ce qui concerne les richesses naturelles au Canada, je n'ai jamais réussi à établir de comparaison.

Parce que vous êtes un homme compétent en la matière, j'en profiterai pour vous demander ce qui se passe dans le domaine de la prospection et de l'exploration minière au Canada. Est-ce comparable à ce qui se fait ailleurs dans le monde? On sait que maintenant, la concurrence se fait à l'échelle mondiale. Qu'est-ce qu'on a aujourd'hui comme prospection, comme exploration? Est-ce comparable à ce qui se fait ailleurs dans le monde? Si oui, nous sommes dans la bonne voie. Est-ce qu'on exerce une certaine concurrence? Sinon, il faut changer d'attitude. Il faut faire certaines choses pour être en concurrence sur le plan international. Il faut se comparer, parce qu'aujourd'hui il faut se comparer. Il faut être performant. Il faut être comme les autres.

• 1645

Une autre question me vient à l'esprit. Si j'ai bien compris ce que vous avez dit dans votre exposé, on a découvert des gisements miniers importants de nickel, de diamant et j'en passe. Pouvez-vous me dire en quels lieux du Canada, du Québec ou du Grand Nord on a trouvé ces gisements intéressants?

[Traduction]

M. David Comba: Encore une fois, votre question couvre beaucoup de terrain.

Au plan géologique, de nombreux pays ont des richesses minérales comparables à celles du Canada. Toutefois, le Canada est le seul pays à avoir de petites sociétés minières de cette taille et de cette compétence. Le seul autre pays à avoir quelque chose d'approchant est l'Australie. Mais il n'y a pas en Australie, par exemple, d'association du genre de la Prospectors and Developers Association of Canada. L'Australie a essayé, en fait, de conclure avec nous un accord en vertu duquel nous irions en Australie établir des conventions et commencer à harmoniser les divers états. L'Australie ressemble beaucoup au Canada en ce sens que les différents états possèdent les droits miniers. Il y a des organisations de prospecteurs et d'exploitants, mais pas d'organisme national.

Le Canada a vraiment une longueur d'avance sur ses concurrents. Le problème, c'est que nos concurrents voient ce qui s'est passé à Windy Craggy. Ils voient le gouvernement de Terre- Neuve adopter ce qui est fondamentalement une mesure législative rétroactive dans ses négociations avec la société Inco. Ils reconnaissent le leadership du Canada, mais ils ne savent vraiment pas quoi penser de ce qui se passe au Canada à l'heure actuelle. Ils comprennent que l'exploitation minière a été très importante pour le développement du Canada, que l'exploitation minière est très importante pour leur propre développement et ils n'arrivent pas à croire les messages qu'il reçoivent du Canada à l'heure actuelle.

J'espère que cela répond à la plupart de vos questions. Je répète que les gisements sont Louvicourt, à Val-d'Or, Lindsley, à Sudbury, en Ontario, Eskay Creek, en Colombie-Britannique et les deux mines de diamant des Territoires du Nord-Ouest. Beaucoup d'autres gisements ont été découverts entre 1983 et 1987—au Québec, par exemple—mais ils ne sont pas encore en production.

La découverte d'une mine est plus qu'un programme; c'est un processus d'apprentissage. Plus on en apprend sur la façon dont ces gisements se sont formés, ou plus nous développons de nouvelles techniques, et plus nous pouvons examiner ce qui s'est fait avant et constater que c'était du bon travail, mais qu'on a foré dans la mauvaise direction, en fait, soit parallèlement au gisement. Cela arrive souvent dans notre secteur industriel; il s'agit donc d'un processus graduel. Le gisement Hemlo, découvert en Ontario, a été complètement manqué par les trois premiers niveaux de trous. C'est seulement au milieu du troisième niveau que le gisement Hemlo a été découvert. Les gens qui ne trouvent rien au premier programme et qui en concluent qu'il n'y a rien là ne connaissent vraiment pas grand-chose à notre secteur industriel.

Une des choses qui inquiètent le plus notre secteur industriel à l'heure actuelle, c'est que les grandes sociétés minières ont fermé leur bureau au Canada. Elles étaient les véritables mentors. J'ai passé le plus clair de ma carrière au groupe Falconbridge. En fait, j'ai commencé à travailler sous terre, à la mine Giant, à Yellowknife, et c'est là que j'ai commencé à m'intéresser à la géologie. Le groupe Falconbridge m'a aidé à obtenir deux diplômes universitaires et j'ai travaillé pour beaucoup de bonnes gens. On m'a guidé dans tout le système. J'ai changé de place tous les cinq à huit ans pour voir différentes choses. Nous aurons manifestement un problème de plus en plus grave au Canada. Ce programme d'encadrement n'existe plus parce que les grandes sociétés minières ont fermé leur bureau de prospection au Canada. Elles ont gardé quelques cadres supérieurs pour les aider à assurer une diligence raisonnable quant aux gisements qu'elles achètent dans le monde entier, mais aucun jeune ne monte plus dans la hiérarchie, et c'est vraiment inquiétant.

Le président: Monsieur Comba, merci beaucoup de nous avoir donné des réponses vraiment exhaustives. Je suis persuadé que tous les membres ont aimé l'échange. Je suis ravi que vous ayez répondu à toutes les questions. Vous semblez avoir porté la plupart de vos problèmes à notre attention.

Je tiens aussi à remercier tous les membres d'avoir participé à la discussion.

• 1650

Monsieur Comba, nous aurons sûrement l'occasion de dialoguer encore avec vous un jour. Le comité continuera peut-être de s'intéresser à ce secteur, au point peut-être de communiquer à nouveau avec vous plus tard. Entre-temps, merci beaucoup. Au nom de tous les membres du comité, je vous souhaite à vous et aux vôtres le plus joyeux des Noëls et tout ce qu'il y a de mieux pour la nouvelle année.

M. David Comba: Merci beaucoup. Je reviendrai avec grand plaisir.

Le président: Ne partez pas, collègues du comité! Nous allons prendre une pause de deux minutes, puis nous réunir à huis clos.

[Note de la rédaction: Les délibérations se poursuivent à huis clos]