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INDU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON INDUSTRY

COMITÉ PERMANENT DE L'INDUSTRIE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 21 mars 2000

• 0902

[Traduction]

La présidente (Mme Susan Whelan (Essex, Lib.)): La réunion porte sur l'objet du projet de loi C-229, Loi modifiant la Loi sur la Société canadienne des postes (lettres intransmissibles). Cela a été envoyé au comité par motion de la Chambre.

Nous sommes très heureux de recevoir la députée de Kitchener-Centre, Karen Redman. Du ministère de l'Industrie Canada, nous avons aussi Nicole Ladouceur, sous-commissaire adjointe de la concurrence, Pratiques loyales des affaires, Bureau de la concurrence; et Brendan Ross, agent de commerce, direction des Pratiques loyales des affaires, Bureau de la concurrence.

Je propose que nos témoins nous fassent une déclaration liminaire et que nous passions ensuite aux questions. Je suggérerais que nous commencions par Karen Redman.

Madame Redman, s'il vous plaît.

Mme Karen Redman (députée de Kitchener-Centre, Lib.): Merci, madame la présidente. Je suis très heureuse d'être ici aujourd'hui.

Essentiellement, nous parlons ici d'une question qui touche les consommateurs. Il s'agit de la remise de prix dans le contexte de jeux de hasard, de loteries ou de concours où l'on oblige le participant à verser un certain montant avant de pouvoir toucher un prix. C'est une pratique trompeuse à propos de laquelle j'estime que le gouvernement devrait faire quelque chose.

Je pense en effet que nous devons protéger les consommateurs contre les dangers des cartes à gratter. J'ai certains exemples et je ne sais pas si vous les avez vus. Beaucoup d'entre vous les ont probablement aussi reçus par la poste. Nous pouvons les faire circuler; j'ai les originaux à mon bureau.

Si vous remarquez ce qu'il y a écrit au dos en tous petits caractères—et ce n'est pas facile à voir si on ne le cherche pas—cela dit qu'il faut composer un numéro 1-900. Pour des cartes comme le bingo, toutes les cartes sont gagnantes et quand les destinataires téléphonent au numéro 1-900, l'appel peut leur coûter de 3,99 $ à 19,99 $ la minute alors qu'il leur faut suivre toute une série d'instructions enregistrées qui servent à les garder en ligne aussi longtemps que possible.

LRJ Promotions de Waterloo (Ontario) envoie aux gagnants des reproductions couleur authentiques qui, selon cette entreprise, valent 45 $. La reproduction est la copie d'une photo prise par le beau-père du propriétaire de cette entreprise. Vous trouverez dans la documentation l'interview avec le propriétaire de l'entreprise qui est parue dans un journal local l'été dernier. L'imprimeur qui a réalisé les reproductions a déclaré au Kitchener—Waterloo Record: «Cela coûte en fait environ 3 cents, un peu moins que les billets eux-mêmes. Je ne les mettrais pas sur mon mur de salle de bain. C'est horrible.» Et c'est une citation mot pour mot.

• 0905

Dans le même article, le président de LRJ Promotions est interrogé sur l'argent qu'il a gagné avec les cartes à gratter et répond: «Cela semble si facile que cela devrait être illégal mais ça ne l'est pas.» Il dit aussi que les gens qui répondent à ces cartes perdent au maximum 24 $ et que cela leur sert de leçon. Je vous invite tous à lire cet article au complet.

Un avocat indépendant de Kitchener m'a remis son avis sur le projet de loi C-229 par écrit et j'aimerais vous lire ce qu'elle dit:

    Il est raisonnable de supposer qu'un certain nombre de consommateurs croiraient le contenu de cette lettre indiquant qu'il s'agit d'un jeu de hasard qui leur aura permis de gagner un prix sans réaliser qu'on leur ferait payer quelque chose quand ils réclameraient ce prix ni que ce qu'on leur ferait payer pourrait être beaucoup plus que la valeur du prix. [...] La société peut vraiment souffrir de ce genre d'escroqueries postales.

Or c'est quelque chose qui se produit tous les jours dans notre pays.

Les statistiques de PhoneBusters indiquent 81 p. 100 des victimes du télémarketing ont plus de 60 ans et qu'entre 1996 et 1999, elles ont perdu au total plus de 25 millions de dollars. PhoneBusters indique d'autre part que la troisième méthode utilisée pour escroquer les Canadiens est le numéro 1-900. PhoneBusters m'a dit que les gens qui se font prendre par les numéros 1-900 ont tendance à ne pas le rapporter, si bien que le nombre de victimes qui paient à cause de ces numéros 1-900 est probablement bien supérieur à ce que le laissent entendre les statistiques.

J'insisterai sur le fait que la majorité des Canadiens touchés par ce problème sont des personnes de l'âge d'or. Pour ces gens-là, pouvoir de faire des achats au téléphone et par la poste est indispensable. Les pratiques déloyales de télémarketing entament la confiance des personnes âgées qui comptent sur la poste et le téléphone pour faire ce qu'elles ont à faire.

Le projet de loi C-229 a été présenté à la Chambre des communes par notre collègue de Burlington, Mme Paddy Torsney. Elle vous dirait qu'elle s'inquiète de la distribution par Postes Canada des cartes à gratter et du fait que cela risque en quelque sorte de légitimer le concours. Cette perception a été vérifiée par SCAMBLOCK qui déclare:

    Les personnes âgées nous indiquent souvent que les «occasions» de gagner ne peuvent être frauduleuses si elles sont distribuées par Postes Canada. Elles croient vraiment que notre gouvernement n'autoriserait jamais une société d'État comme Postes Canada à considérer ses intérêts financiers avant les besoins et l'intérêt des citoyens.

Depuis que j'ai pris la responsabilité du projet de loi, j'ai eu l'occasion d'en parler avec des citoyens, des entreprises, des parties prenantes, des ministres et des responsables de Postes Canada. En examinant le projet de loi, j'ai trouvé qu'il n'allait pas suffisamment loin et qu'une modification à la Loi sur la Société canadienne des postes ne réglerait pas tous les problèmes que posent ces cartes. De ce fait, j'ai consulté des gens du Bureau de la concurrence d'Industrie Canada pour discuter d'autres possibilités. À partir de leurs suggestions, j'ai préparé et présenté un nouveau projet de loi, le C-438. Il porte sur le même sujet mais de façon plus complète.

Le projet de loi C-438, Loi modifiant la Loi sur la concurrence, interdit la distribution, par la poste ou par tout autre moyen, «des imprimés dont le contenu donne l'impression générale que le destinataire de l'imprimé a gagné un prix ou un avantage, et que leur attribution est... conditionnelle au paiement préalable d'une somme d'argent ou de frais téléphoniques déterminés». La Loi sur la concurrence a été modifiée durant la dernière législature au sujet des pratiques trompeuses de télémarketing; le projet de loi C-438 reprend le libellé concernant le télémarketing et applique ces dispositions aux loteries et concours imprimés. L'article 52 de la loi contient des dispositions concernant les déclarations trompeuses et l'article 74 porte sur les concours de promotion. La Loi sur la concurrence nous permet d'attaquer le problème des pratiques trompeuses de façon complète et directe.

Il faut reconnaître que ni le projet de loi C-229 ni le projet de loi C-438 empêcheraient les entreprises de télémarketing légitimes d'opérer. En fait, la clause de disculpation contenue dans le projet de loi C-438 en est la garantie. De même, aux termes de ce projet de loi, les tribunaux sont invités à considérer des facteurs tels que l'utilisation des listes de personnes qui ont été victimes de tels actes, les caractéristiques des destinataires de ces imprimés, le montant des recettes réalisées et les condamnations antérieures pour un tel délit.

Il ne faut pas oublier que les dispositions actuelles de la Loi sur la concurrence ne s'appliquent que lorsqu'il y a une communication orale et directe entre deux ou plusieurs personnes. Le système téléphonique le plus courant utilisé par les entreprises qui envoient ces cartes est un message préenregistré. Le correspondant ne parle pas à quelqu'un. Le projet de loi C-438 éliminerait cette échappatoire.

• 0910

Le projet de loi prévoit en outre des amendes et peines importantes. Ce serait laissé à la discrétion des tribunaux mais il est prévu un emprisonnement maximal de cinq ans. Dans le cas de procédures sommaires, la peine maximal serait 200 000 $ d'amende et un an de prison. Le projet de loi C-229 impose à la Société canadienne des postes la responsabilité de ne pas distribuer des cartes à gratter. Le projet de loi C-438 fait retomber cette responsabilité sur les entreprises et les particuliers qui créent et font circuler ces jeux.

J'aimerais aussi parler brièvement des logos. Le projet de loi C-229 évoque l'utilisation abusive des logos du gouvernement. Voilà encore une question importante qui mérite l'attention de ce comité. Je voudrais faire circuler ici un échantillon de ce que l'on distribue par courrier. Ces logos, comme les cartes, sont trompeurs par nature et peuvent être préjudiciables à la société. Le projet de loi c-229 vise à obliger Postes Canada à enregistrer tout logo qui doit être distribué par courrier.

Les logos fédéraux sont enregistrés à l'Office de la propriété intellectuelle du Canada, et protégés par la Loi sur les marques de commerce. Je crois cependant savoir qu'il n'existe aucune mesure de contrôle qui garantisse la bonne utilisation des logos. Il n'existe qu'une procédure de plainte susceptible de déboucher sur des accusations et des poursuites judiciaires. Avec les moyens techniques actuels, on peut sans trop d'effort faire des reproductions des logos du gouvernement. Le problème risque de s'aggraver et de mettre de nombreux canadiens en situation de vulnérabilité. Il faut donc procéder à une refonte de la loi et de ses mécanismes d'application.

Dans les circonstances actuelles, je ne pense pas qu'on puisse résoudre ce problème par l'intermédiaire de la Loi sur les postes ou de la Loi sur la concurrence. Les fonctionnaires de l'Office de la propriété intellectuelle du Canada voudront peut-être se prononcer sur la question et indiquer de quelle façon la Loi sur les marques de commerce protège les logos fédéraux enregistrés.

En conclusion, je vous soumets cette question parce que de toute évidence, c'est au législateur d'y répondre. Le projet de loi C-229 constitue une première étape importante, et je suis certaine que le projet de loi C-438 nous permettra de franchir la deuxième étape en réagissant à ces jeux qui obligent les Canadiens à payer quelque chose avant de recevoir un prix. Il nous incombe à nous, législateurs, de régler ce problème.

Je voudrais remercier les membres de tous les partis qui ont appuyé mes efforts et qui ont reconnu la gravité du problème. J'adresse également mes remerciements au ministre de l'Industrie Canada et à son secrétaire parlementaire, qui m'ont aidée à piloter ce dossier.

Merci.

La présidente: Merci beaucoup, madame Redman.

Je donne maintenant la parole à Mme Ladouceur.

Mme Nicole Ladouceur (sous-commissaire adjointe de la concurrence, Pratiques loyales des affaires, Bureau de la concurrence, ministère de l'Industrie Canada): Merci.

Madame la présidente, mesdames et messieurs du comité, je suis heureuse de participer aujourd'hui à l'étude du projet de loi C-229, Loi modifiant la Loi sur la Société canadienne des postes, et du projet de loi C-438.

Le projet de loi C-229 concerne la livraison par la Société canadienne des postes de lettres qui ne sont pas dans une enveloppe et qui comportent une invitation à participer à un concours, à une loterie ou à un tirage de prix, comme les cartes à gratter, et qui rendent l'attribution du prix conditionnelle au paiement préalable d'un certain montant de la part du destinataire de la lettre.

Comme vous le savez, le projet de loi C-229 vise à modifier la Loi sur la Société canadienne des postes de façon à interdire l'envoi d'une lettre portant un logo gouvernemental enregistré dans le cadre d'un régime d'enregistrement géré par la Société canadienne des postes.

[Français]

Le projet de loi C-20 modifiant la Loi sur la concurrence, que votre comité a examiné au printemps de 1998, est entré en vigueur en mars 1999. Il a eu pour effet d'inclure dans la Loi sur la concurrence une disposition sur le télémarketing trompeur selon laquelle la pratique de la communication téléphonique interactive devient une infraction criminelle lorsqu'elle est utilisée pour donner des indications fausses ou trompeuses dans le but de promouvoir soit la fourniture d'un produit, soit des intérêts commerciaux. Selon cette disposition, il est interdit aux télévendeurs de tenir ou de prétendre tenir un concours, une loterie ou un jeu si la remise d'un prix au participant est conditionnelle au paiement préalable d'une somme d'argent par celui-ci. Grâce à cette disposition, les entreprises et les consommateurs canadiens sont mieux protégés contre les fraudes de télémarketing.

Les nouvelles dispositions de la loi qui portent sur le télémarketing trompeur s'attaquent à un problème très similaire à celui que le projet de loi C-229 présenté par Mme Redman vise à régler, soit les représentations et les concours trompeurs.

[Traduction]

Le Bureau de la concurrence approuve la démarche de Mme Redman qui dénonce ce courrier trompeur. Le Bureau ne s'oppose pas à ce que la teneur du projet de loi C-229 soit intégrée dans la Loi sur la concurrence.

• 0915

Cependant, nous voulons faire les observations suivantes:

Un tel projet de loi devrait comprendre une interdiction concernant spécifiquement les concours trompeurs réalisés par courrier.

Il devrait également veiller à ne pas nuire aux activités commerciales légitimes.

Le projet de loi devrait viser tous les envois par courrier, et non pas uniquement les documents qui ne sont pas placés dans une enveloppe, comme ceux visés actuellement par le projet de loi C- 229.

Le projet de loi devrait prévoir également une injonction provisoire, semblable à celle qui est actuellement disponible aux termes de la Loi sur la concurrence à l'égard du télémarketing trompeur, à l'encontre des expéditeurs de courrier trompeur ou des tierces parties fournisseurs de services comme la Société canadienne des postes lorsqu'elles assurent un service à un contrevenant récidiviste.

Enfin, le projet de loi ne devrait pas proposer de système d'enregistrement géré par la Société canadienne des postes pour les logos du gouvernement. Le Bureau des marques de commerce, qui relève de l'Office de la propriété intellectuelle du Canada à Industrie Canada, tient déjà un registre des marques de commerce, y compris de celles du gouvernement du Canada.

Le projet de loi présenté par Mme Redman soustrait cette question de la sphère d'activités de la Société canadienne des postes et vise par contre à modifier la Loi sur la concurrence. Il prévoit une infraction criminelle dans le cas des concours trompeurs réalisés par courrier. Le projet de loi C-438 répond à chacune des cinq préoccupations du bureau, que je viens de mentionner. C'est pourquoi le bureau approuve sans réserve les objectifs de ce projet de loi.

Comme il partage son objectif de lutte contre le courrier trompeur, le bureau a aidé Mme Redman à rédiger le projet de loi C-438, dont il a vérifié la faisabilité technique et juridique. Cependant, comme il s'agit d'un projet de loi d'initiative parlementaire, ce dernier n'a pas pu bénéficier d'une vaste consultation officielle.

Comme la Loi sur la concurrence est une mesure d'application générale, il importe de veiller à ce qu'elle n'ait aucun effet imprévu sur le marché. Bien que le bureau approuve l'orientation générale du projet de loi, il se pourrait que la consultation fasse apparaître des problèmes qui nécessiteront des amendements ultérieurs au projet de loi C-438. Nous attendons donc de connaître les commentaires de toutes les parties concernées.

Je voudrais remercier les membres et la présidente du comité de m'avoir donné l'occasion de présenter le point de vue du bureau. Je serai maintenant heureuse de répondre à vos questions. Merci.

La présidente: Merci beaucoup, madame Ladouceur.

Nous allons maintenant passer aux questions, en commençant par M. Schmidt.

M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Merci beaucoup, madame la présidente.

Merci, madame Redman, d'avoir pris cette initiative. Madame la présidente, vous savez, comme Mme Redman, que je suis très favorable à sa démarche, dont je tiens à la féliciter, mais je ne pouvais accorder mon appui au projet de loi précédent, précisément pour les raisons qui l'ont amenée à en présenter un nouveau. Je tiens donc à l'en féliciter. Je félicite aussi la représentante du Bureau de la concurrence pour ses commentaires. En somme, les choses se présentent bien.

Il y a quand même une question que je voudrais poser et qui concerne la poursuite des contrevenants. Il semble y avoir une difficulté dans la Loi sur la concurrence, dans la mesure où bon nombre des infractions y sont considérées comme des infractions criminelles, et non pas civiles. S'il est difficile de faire condamner des personnes qui reconnaissent avoir commis des infractions, c'est notamment parce que ces infractions sont régies par le droit criminel et qu'il est matériellement difficile, sinon impossible d'obtenir une condamnation. J'aimerais savoir ce que Mme Redman et les représentants du Bureau de la concurrence pensent de la possibilité de soumettre les infractions de ce genre à un tribunal civil, plutôt que d'en faire des infractions criminelles.

Mme Nicole Ladouceur: Nous avons nous aussi abordé la question que vous soulevez lors de notre comparution devant ce même comité à propos du projet de loi C-20.

M. Werner Schmidt: C'est exact.

Mme Nicole Ladouceur: Autrefois, toutes les infractions ou dispositions concernant la publicité trompeuse dans la Loi sur la concurrence étaient de nature criminelle, et vous avez tout à fait raison de dire qu'il était difficile de faire aboutir les poursuites. Mais on a fait adopter une loi pour mettre en place ce que nous appelons des procédures parallèles.

En ce qui concerne le courrier trompeur, Mme Redman a parlé d'associer ces dispositions à celles qui concernent le télémarketing trompeur. Nous considérons que certains comportement sont plus préjudiciables que d'autres et justifient à ce titre le recours au Code criminel. Dans la situation présente, où certains éléments de l'infraction sont réunis, l'approche criminelle pourrait s'imposer.

• 0920

Évidemment, les dispositions générales plus larges de l'article 74 de la nouvelle loi vont toujours s'appliquer à l'information trompeuse en général, ce qui nous permettra toujours d'exercer un recours civil. Dans le dossier «Cave-Promotions», où il était question de courrier trompeur, nous avons opté pour le recours civil. Mais celui-ci présente des avantages et des inconvénients. Des accusations criminelles comportent un élément dissuasif très fort, par opposition à des poursuites au civil. Nous avons des lignes directrices qui déterminent le choix entre le criminel et le civil, mais lorsqu'on a la preuve d'un comportement flagrant—en l'occurrence, le fait de demander un paiement avant la remise d'un prix constitue de toute évidence une infraction. On ne peut être plus clair. Si quelqu'un choisit de se comporter de cette façon, nous intenterons des poursuites criminelles.

Mme Karen Redman: Permettez-moi d'ajouter que mon objectif était de reprendre la formule du C-20. Je voulais reprendre les dispositions de la loi actuelle concernant le télémarketing pour les étendre à ce genre de concours réalisés par courrier. Ils sont déjà partiellement régis par la loi, mais j'ai considéré deux grands aspects, à savoir les groupes cibles, la récidive, le nature du préjudice causé—je crois que ces éléments doivent être pris en compte, quelle que soit la solution retenue.

M. Werner Schmidt: Si vous me permettez de poursuivre le raisonnement, madame la présidente, je dirais qu'il s'agit de faire en sorte que tout cela fonctionne. Je suis très préoccupé par la possibilité de procédures parallèles, soit au pénal, soit au civil. Le choix initial risque de poser un gros problème, lorsqu'il faut opter pour les poursuites au criminel ou les poursuites au civil, car les conséquences sont bien différentes, selon le choix que l'on fait au départ.

Je crains que si cette double possibilité existe, on puisse techniquement prétendre que des poursuites intentées au civil auraient dû en réalité être portées devant une cour criminelle, ou l'inverse. Selon le choix initial, l'affaire risque de ne pas aboutir. C'est la procédure qui devient le véritable problème. Voilà ce que je crains.

Pourrait-on formuler la loi de façon à indiquer clairement que certaines catégories d'infractions iront d'un côté tandis que certaines autres iront de l'autre côté? Je crains que des avocats ou des justiciables retors ne tirent parti de cette dualité, et que les victimes en fassent les frais; le plaignant risque de dépenser beaucoup d'argent pour ne rien obtenir en définitive.

Mme Nicole Ladouceur: Je répète ce que j'ai dit sur certains éléments de l'infraction. Le projet de loi C-438 énonce certaines caractéristiques précises de l'infraction, comme nous l'avons fait pour le télémarketing trompeur, par exemple. Lorsqu'on est en présence de ces éléments spécifiques révélés par l'enquête, c'est l'option criminelle qui s'impose. Comme vous le savez, la Société canadienne des postes distribue de vastes quantités de courrier; des volumes importants de publicité sont acheminés par courrier, mais la publicité ne comporte pas toujours des concours. Lorsqu'on est en présence d'information trompeuse diffusée par courrier, cette information trompeuse tombe sous le coup des dispositions civiles de la Loi sur la concurrence, qui sont d'application très vaste.

Comme je l'ai dit, lorsqu'on a la preuve que quelqu'un veut organiser un concours dont les gagnants devront effectuer un paiement préalable pour obtenir leur prix, je pense que nous avons resserré—et je partage votre préoccupation concernant les infractions criminelles—l'application de la disposition concernant les paiements préalables à la remise du prix. Toutes les autres informations trompeuses diffusées par courrier seront poursuivies au civil.

M. Werner Schmidt: Cela me convient bien, et je trouve très utile que vous ayez procédé ainsi, mais je crains que le courrier électronique pose un problème bien différent. Le projet de loi est très clair en ce qui concerne le courrier traditionnel, mais dans le cas du courrier électronique, les circonstances sont bien différentes. La technologie est tout à fait différente et des questions de contrôle différentes doivent entrer en jeu.

• 0925

C'est donc un secteur de préoccupation. Dans un domaine voisin, il faut aussi parler de l'Internet et du courrier électronique, qui nous ramènent au même sujet. J'aimerais savoir si la loi est suffisamment vaste pour couvrir toutes ces éventualités sans créer les difficultés que je viens d'évoquer.

Mme Nicole Ladouceur: Évidemment, on nous a posé la même question sur l'Internet lorsque nous avons comparu devant le comité pour parler du projet de loi C-20. Le bureau et le ministère considèrent actuellement qu'ils n'ont pas à réglementer l'Internet...

M. Werner Schmidt: Vous ne pouvez pas le faire.

Mme Nicole Ladouceur: ...mais notre loi régit actuellement certains comportements particuliers que l'on peut rencontrer sur Internet, et sous réserve de changements très mineurs, le projet de loi C-438 pourrait avoir le même effet.

Le bureau a déjà poursuivi certaines infractions sur Internet. La Loi sur la concurrence est une loi cadre, d'application très vaste, qui régit toutes les formes de communication, notamment la radio, la télévision, l'imprimé et, évidemment, les nouveaux médias électroniques; nous avons donc pu poursuivre certaines infractions.

En ce qui concerne le projet de loi C-438, je crois que lorsqu'il est question d'imprimés, le bureau souhaite que toutes les modifications apportées à la loi soient très précises, et il propose par conséquent que l'on remplace l'expression «document imprimé» par «écrite». Il peut s'agir d'une information électronique transmise sur Internet ou une information écrite reproduite sur papier.

M. Werner Schmidt: Est-ce que vous couvrez spécifiquement le courrier électronique? C'est un support bien différent de l'Internet. Il fait appel à une technologie semblable, mais c'est un domaine bien spécifique.

Mme Nicole Ladouceur: Absolument.

En ce qui concerne le courrier électronique, les interventions ne sont pas terminées.

M. Werner Schmidt: Bien.

Mme Nicole Ladouceur: Nous considérons que les dispositions générales s'appliquent au courrier électronique en cas d'informations trompeuses, mais à notre avis, le projet de loi C- 438 s'appliquera aussi bien à un concours dont les gagnants doivent effectuer un versement préalable, que ce concours soit diffusé par télémarketing—il y a une disposition spécifique à cet égard—ou par courrier, aussi bien par courrier électronique que par courrier imprimé déposé dans la boîte aux lettres.

M. Werner Schmidt: J'espère que vous avez raison.

Il devra y avoir une vaste consultation. Je crois qu'un véritable problème se pose à cet égard, et je ne suis pas certain qu'on ait couvert tous les détails, car le domaine est très vaste, on ne connaît pas encore très bien le monde des médias électroniques et on ne peut prévoir tout ce qui pourrait s'y produire à l'avenir.

Merci, madame la présidente.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Schmidt.

Monsieur Lastewka, avez-vous des questions?

M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Ce qui m'inquiète, c'est que si nous empêchons la Société canadienne des postes de distribuer ce courrier, on l'acheminera par d'autres moyens. Que faut-il faire pour empêcher la distribution de ce matériel d'arnaqueur?

Dans ma région, les personnes âgées représentent une forte proportion de la population. Nous avons des complexes d'hébergement pour personnes âgées. Le plus important accueille 1 700 personnes. C'est très facile d'y livrer du courrier. Peu importe donc que ce courrier soit livré aux personnes âgées par la Société canadienne des postes, par un distributeur privé ou par quelqu'autre moyen; on risque simplement de changer le mal de place.

Notre objectif devrait être d'empêcher la distribution de ce matériel d'arnaqueur. Autrement dit, il ne faut pas qu'il puisse atteindre les personnes âgées, qui sont très vulnérables. N'y aurait-il pas une solution? Je n'aime pas déplacer les problèmes; je préfère les régler.

• 0930

Mme Nicole Ladouceur: Absolument. C'est d'ailleurs l'une des raisons pour lesquelles le bureau n'a pas donné son appui au projet de loi C-229 tel qu'il était rédigé. Nous avons craint que le problème ne soit simplement déplacé des postes à un autre secteur.

Ce que nous disons ici, c'est qu'il faut spécifiquement interdire, au plan criminel, la tenue de concours dont les gagnants sont obligés avant de pouvoir toucher leur prix. Comme je l'ai dit, que le concours soit fait par télémarketing—il existe déjà une infraction à cet égard—ou qu'il soit réalisé par courrier, ce sera une infraction. Nous adoptons donc une formule beaucoup plus vaste et nous proposons carrément une interdiction totale des concours où les gagnants sont obligés de verser une somme avant d'obtenir leur prix.

La présidente: Madame Redman, avez-vous quelque chose à ajouter à ce sujet?

Mme Karen Redman: Ce qui distingue le projet initial du projet de loi C-438 est que le fardeau de la preuve incombe maintenant au fabricant de la carte et non pas à Postes Canada. Je crois que cela devrait en partie répondre à votre préoccupation.

Mme Nicole Ladouceur: Je me permets d'ajouter pour la gouverne du comité que la modification proposée à la loi par l'ajout de l'article 52.2 énonce ce qui suit: «faire distribuer, par la poste ou par tout autre moyen,...». Cette disposition viserait les imprimés distribués par des services de messagerie comme FedEx ou UPS. Elle s'appliquerait aussi aux imprimés distribués au moyen d'Internet ainsi que ceux que les gens reçoivent à la maison.

M. Walt Lastewka: Tous les moyens de distribution seraient donc visés. La disposition s'appliquerait-elle au cas d'imprimés qui auraient été imprimés dans une collectivité et qu'on aurait fait distribuer dans une autre?

Mme Nicole Ladouceur: Oui, je le crois, parce qu'il y a un système de distribution qui a été mis en place pour assurer la livraison des imprimés.

M. Walt Lastewka: Très bien. Supposons que j'ai une famille qui ne rebute pas à la tâche. Supposons que j'imprime ces cartes et que les membres de ma famille les distribuent. La disposition s'appliquerait-elle dans ce cas...

Mme Nicole Ladouceur: Oui, je le crois. Le projet de loi vise à interdire la promotion de concours où l'attribution du prix prévu est conditionnelle au paiement préalable d'une somme d'argent. Quel que soit le système de distribution prévu...

M. Walt Lastewka: Est-il bien clair qu'un paiement préalable peut prendre la forme de frais téléphoniques pour joindre un numéro 1-900?

Mme Nicole Ladouceur: Oui.

M. Walt Lastewka: Tout paiement préalable?

Mme Nicole Ladouceur: Oui, peu importe le montant de ce paiement.

M. Walt Lastewka: Très bien.

La présidente: Madame Redman.

Mme Karen Redman: Je vous remercie.

J'aimerais ajouter qu'il semble s'agir d'une industrie en pleine expansion à l'échelle internationale. En 1994, les États- Unis ont adopté une loi en matière d'envois postaux illicites qui prévoit des sanctions plus rigoureuses que celles qui sont prévues au Canada. Si je ne m'abuse, encore au printemps dernier, des entreprises canadiennes faisaient parvenir des imprimés aux États- Unis et au Royaume-Uni. Le problème semble d'envergure internationale; voilà une autre raison de s'y attaquer.

La présidente: Je vous remercie.

Monsieur Brien.

[Français]

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): J'aimerais que nos témoins, autant Mme Redman que les représentants du Bureau de la concurrence, nous disent s'ils se sont penchés sur les initiatives que certaines provinces canadiennes auraient pu prendre pour lutter contre ce genre de pratiques. Est-ce que, dans le cadre des pouvoirs qui leur sont dévolus, certaines provinces ont cherché à restreindre ou encadrer ces pratiques-là?

[Traduction]

Mme Karen Redman: Il incombe clairement à ce comité de se pencher sur cette question qui relève de la compétence fédérale. Je pense que les questions qui ont été posées montrent clairement que le problème ne se pose pas seulement dans une région. Je crois comprendre qu'il s'agit d'une question qui doit être réglementée à l'échelle fédérale plutôt qu'à l'échelle provinciale.

[Français]

M. Pierre Brien: Il existe dans plusieurs provinces des lois qui ne portent pas nécessairement cette même appellation, mais qui visent à protéger les consommateurs. Par exemple, au Québec, il y a la Loi sur la protection du consommateur. Bien qu'on n'y traite pas des infractions criminelles, qui sont souvent très lourdes et pour lesquelles il est très difficile d'obtenir des mises en accusation de toute façon, il existe dans les lois sur la protection du consommateur des dispositions civiles qui peuvent atteindre les mêmes objectifs.

Ne croyez-vous pas que ces dispositions sont un peu plus simples ou moins lourdes à gérer que des dispositions sur les infractions criminelles, compte tenu de toute la procédure ou de tout le fardeau entourant l'obtention d'une condamnation?

• 0935

Mme Nicole Ladouceur: Nous travaillons très étroitement avec toutes les provinces. D'ailleurs, j'étais justement à Québec la semaine dernière, où j'assistais au Colloque international sur la protection des consommateurs, dont vous avez sans doute entendu parler. On tenait également une réunion fédérale-provinciale des sous-ministres en matière de consommation. Le ministère et le Bureau de la concurrence travaillent de très près avec les provinces à ce niveau-là.

Le problème qui se pose au niveau de la sollicitation postale trompeuse devient de plus en plus un problème transfrontalier, comme on l'indiquait. Il s'agit d'un problème qui traverse non seulement les frontières des provinces, mais de plus en plus la frontière entre le Canada et États-Unis. Les compagnies à qui nous avons affaire sont malheureusement devenues beaucoup plus sophistiquées au niveau de leur organisation. Plusieurs opérations sont menées des deux côtés de la frontière et leur but est très évident: échapper aux organismes de mise en application.

Il est indéniable qu'au Canada, c'est la Loi sur la Société canadienne des postes qui couvre la sollicitation postale trompeuse, pour les raisons que le bureau a indiquées. Nous n'appuyons pas de modifications à cette loi.

L'article 206 du Code criminel interdit formellement la tenue d'un concours où on exige un paiement pour l'obtention d'un prix. Je vous répète que les provinces n'ont pas la compétence pour modifier les dispositions du Code criminel.

La Loi sur la concurrence a l'avantage d'être une loi d'application générale, dont les dispositions réussissent très facilement à transcender les frontières des provinces, ainsi que les frontières entre deux pays. À mon avis, la Loi sur la concurrence est une loi tout à fait appropriée pour couvrir ce genre de pratiques. Au niveau du télémarketing, c'était exactement le même problème qui se posait. Je sais que votre collègue a soulevé exactement les mêmes préoccupations au niveau des lois provinciales en matière de protection du consommateur. Malheureusement, les pratiques sont transfrontalières et il est donc très important qu'on se dote aussi au niveau fédéral d'outils qui nous permettront d'enquêter et de sévir dans ce genre de situations.

M. Pierre Brien: Bien que vous parliez de la poste, il ne s'agit là que d'une petite partie du problème. De toute façon, je ne suis pas sûr que le courrier postal soit appelé à connaître une grande expansion à l'avenir. La Société canadienne des postes est la première à se tourner vers le commerce électronique puisqu'elle est consciente que c'est de là qu'émaneront graduellement les nouvelles boîtes postales avec le temps. Elle ne fait plus de la distribution porte-à-porte que dans certains secteurs. En ne parlant que de la poste, on ne cible qu'une petite partie de la sollicitation indésirable. Qu'est-ce qu'on fait du reste?

Mme Nicole Ladouceur: Comme j'essayais de l'indiquer dans ma réponse, le reste est régi par la Loi sur la concurrence, qui est une loi d'application générale qui va couvrir toutes ces pratiques. Comme je le mentionnais tout à l'heure, la loi vise toutes les formes de médias. Dans ma réponse à la question de M. Lastewka, j'ai fait allusion aux modes de livraison de ces documents, papiers ou cartons. Je crois que notre loi fédérale, qui prévaut dans tout le pays, est d'application très facile.

Je ne connais aucune province qui ait adopté une loi particulière relative aux concours. Nous avons indiqué que s'il y avait une consultation à grande échelle, il pourrait sans doute arriver qu'une province veuille le faire. Je travaille quand même assez étroitement avec les provinces et je ne suis pas au courant de quelque initiative ou projet de loi en ce sens à ce stade-ci. Encore une fois, même s'il y avait une loi d'application provinciale, il faudrait reconnaître que le problème existe aussi au niveau transfrontalier.

M. Pierre Brien: Cet argument vaut ce qu'il vaut parce que le même problème existe entre le Canada et les États-Unis. On n'invoquera pas une loi américaine parce qu'il y a un problème à la frontière du Canada et des États-Unis.

Mme Nicole Ladouceur: Je suis d'accord avec vous, mais je dois toutefois signaler que le Canada et les États-Unis ont signé des traités d'entraide en matière judiciaire et qu'ils collaborent l'un avec l'autre. D'ailleurs, je dois quitter Ottawa en fin de journée afin d'aller discuter avec les Américains de plusieurs dossiers. Nos deux pays ont conclu des traités en vue d'une collaboration dans les enquêtes et poursuites en matière de pratiques déloyales, dont fait partie la sollicitation postale trompeuse. Nous menons de front des enquêtes conjointes dans plusieurs dossiers avec les organismes américains responsables dans ce domaine.

M. Pierre Brien: Merci.

• 0940

[Traduction]

La présidente: Je vous remercie beaucoup, monsieur Brien.

Monsieur Cannis, vous avez la parole.

M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.): Je vous remercie, madame la présidente.

J'aimerais d'abord féliciter ma collègue Karen Redman des bonnes intentions qui l'animent en s'attaquant aussi vigoureusement à ce problème.

J'aimerais revenir à ce que disait mon collègue Walt Lastewka au sujet des diverses formes de distribution des imprimés. J'aimerais notamment aborder un point particulier, car je me demande si le projet de loi élimine toutes les échappatoires. À toute mesure, il existe une parade. Les gens trouvent toujours d'autres moyens de parvenir à leurs fins.

Walt a parlé d'une famille qui ne rebuterait pas à la tâche. Je vois des jeunes gens qui distribuent des sacs entiers d'imprimés avec des journaux locaux dans de petites localités. J'ai déjà vu ce genre d'imprimés. Mon fils en a reçu un. Il m'a dit qu'il venait de remporter un gros prix. C'est ce qu'il croyait jusqu'à ce que je lise les petits caractères d'imprimerie. Si je n'avais pas été là, peut-être que mon fils aurait aussi fait un paiement préalable pour obtenir son prix.

Nous parlons toujours de la «distribution», mais il y a beaucoup de modes de distribution comme l'a fait remarquer M. Schmidt. Il a essayé de prévoir quelle pourrait être l'évolution des modes de distribution, et je l'en félicite, mais nous devons aussi voir quelle est la situation actuelle. Les dispositions du projet de loi s'appliquent-elles à tous les modes de distribution?

Il y a aussi la question de l'étendue du champs de compétence. Des organisations de Tucson en Arizona ou de Chattanooga au Tennessee font la promotion de ce genre de jeux de hasard à caractère trompeur. Le projet de loi permet-il au gouvernement... Vous avez fait remarquer à juste titre qu'il s'agissait d'une industrie en pleine expansion à l'échelle internationale. Vous avez raison. Vu l'ampleur du phénomène, et nous constatons la même chose avec le commerce électronique, ce projet de loi peut-il vraiment protéger nos aînés ainsi que nos jeunes? Qu'en est-il à ce sujet?

La présidente: Madame Redman.

Mme Karen Redman: Je suis sûre que les représentants du Bureau de la concurrence voudront aussi répondre à cette question, mais voici ce que je peux brièvement vous dire à ce sujet.

En 1977, le premier ministre Chrétien et le président Clinton ont discuté de ce problème dont l'ampleur est clairement internationale. J'ai mentionné plus tôt la loi qui a été adoptée aux États-Unis en 1994. Les États-Unis continuent d'améliorer cette loi. Nous ne nous sommes pas attaqués avec autant d'ardeur à ce problème, ce qui a nuit aux Canadiens.

J'aimerais souligner le fait que dans le projet de loi C-438, le fardeau de la preuve incombe aux fabricants et aux distributeurs de ces imprimés et non pas aux services de distribution comme Postes Canada. Je crois que cette mesure devrait permettre de répondre à vos préoccupations.

La présidente: Madame Ladouceur.

Mme Nicole Ladouceur: Je ne suis pas une spécialiste de la langue, mais je crois que le mot «distribution» est bien celui qui convient, car si je ne m'abuse, je peux le voir à mon écran d'ordinateur lorsque j'envoie un message et que je veux savoir s'il est bien parvenu à son destinataire. On peu voir la date et l'heure de réception du message.

Il est question à l'article 52.2 de «faire distribuer, par la poste ou par tout autre moyen...». Je crois que le mot distribué conviendra pour désigner l'action que fait le livreur de journaux, le courrier électronique ou tout autre mécanisme par lequel une chose est transmise.

Quant à votre deuxième question, il est vrai que le fait que le problème soit international soulève certaines préoccupations. L'Internet jouera un rôle de plus en plus grand au cours du XXIe siècle et beaucoup de pays devront s'adapter au phénomène de la mondialisation. Ces arnaqueurs n'opèrent pas seulement à l'intérieur des frontières de leur propre pays. Ils utilisent des moyens très perfectionnés. Ils disposent d'un ensemble d'entreprises réparties dans nos nombreux pays. Le centre financier se trouve toujours dans les Antilles, mais l'arnaque elle-même est malheureusement conçue aux États-Unis. Les arnaqueurs mettent à l'essai leurs projets aux États-Unis et une fois qu'ils s'attaquent au marché canadien, ils savent à peu près combien d'argent ils pourront tirer des Canadiens.

• 0945

Cette situation a amené les gouvernements à collaborer plus étroitement. Le Canada et les États-Unis ont participé à des groupes de travail qui ont étudié le problème et les dirigeants de nos deux pays se sont réunis pour voir comment y remédier. Nous participons à une réunion annuelle qui porte sur les crimes transfrontaliers. Les gouvernements partagent l'information dont ils disposent sur ces arnaques et collaborent davantage pour y mettre fin. Le Canada et les États-Unis envisagent d'harmoniser dans une certaine mesure leurs lois dans ce domaine. Ainsi, les États-Unis ont adopté dernièrement une loi sur le télémarketing et ont apporté récemment des modifications à leur loi sur les services postaux, modifications que le président a ratifiées en décembre 1999. Le Canada veut faire en sorte que ses lois cadrent avec les lois américaines pour qu'il n'y ait pas d'échappatoire. Nous discutons donc beaucoup de ces questions avec nos homologues américains.

M. John Cannis: J'ai remarqué un logo sur l'un de ces imprimés. Je cherchais les armoiries du Canada et le logo que j'ai vu s'en rapprochait, mais j'ai constaté que ce n'était pas la même chose. C'était assez différent. Pour le simple citoyen, qui ne connaît pas toujours très bien les armoiries de son pays... Au départ, je me suis dit que c'était les armoiries du Canada, mais j'ai ensuite vu que ce n'était pas le cas.

Comment empêcher une entreprise comme ce fournisseur de devises étrangères qui aurait son propre logo tout comme une famille peut avoir ses propres armoiries comme celles que nous voyons sur le mur de se livrer à ce genre d'arnaque?

Mme Nicole Ladouceur: La Loi sur les marques de commerce interdit l'utilisation à des fins trompeuses des armoiries et des logos. Cette loi comporte une disposition interdisant la représentation trompeuse. La Loi sur la concurrence comporte une disposition semblable.

En 1997, notre bureau a reçu des plaintes au sujet de l'usage qui était fait du logo du gouvernement et de l'acronyme d'un organisme gouvernemental. L'entreprise en question s'appelait SBBC, Small Business Consumer Centre. Industrie Canada a un programme de centres d'information destiné aux petites entreprises. L'acronyme de ce programme se rapprochait beaucoup de l'acronyme de cette entreprise. Celle-ci faisait la promotion d'information et de livres portant sur les subventions et les prêts offerts par le gouvernement et les personnes qui s'adressaient à elle devait débourser de l'argent pour obtenir ces documents. Les personnes qui se sont plaintes au bureau pensaient vraiment que cette société était un organisme gouvernemental et que cet argent était versé au receveur général du Canada.

Lorsque nous avons fait enquête, nous nous sommes rendus compte que ce n'était pas le cas et qu'on s'y était pris de façon très habile pour essayer de faire croire aux consommateurs canadiens qu'il s'agissait d'un organisme gouvernemental. En vertu des pouvoirs qui lui permettent de faire enquête sur les cas de représentation trompeuse, le bureau a lancé une enquête officielle et l'entreprise visée à finalement communiqué avec nous. L'affaire a été réglée sans que nous ayons apporté des accusations criminelles. L'entreprise a dû faire paraître dans tous les journaux où elle avait à l'origine placé des annonces un avis indiquant aux gens qu'elle ne représentait pas le gouvernement. Les consommateurs qui avaient été bernés par l'entreprise ont pu être indemnisés à même un fonds de 100 000 $ créé à cette fin.

Voilà donc le type de mesures qui sont prises à l'égard de ceux qui utilisent à des fins trompeuses les logos, les armoiries et les acronymes. Dans ce cas-ci, c'est le logo et l'acronyme d'un organisme gouvernemental qu'on avait utilisé.

M. John Cannis: Je vous remercie, madame la présidente.

La présidente: Je vous remercie beaucoup, monsieur Cannis.

Monsieur Bernier.

M. Gilles Bernier (Tobique—Mactaquac, PC): Je vous remercie.

Madame Redman, je veux vous remercier de comparaître devant le comité. Vous savez que j'appuie sans réserve votre projet de loi d'initiative parlementaire. J'aimerais vous remercier de tout le travail que vous avez fait dans ce domaine. Comme vous le savez, je déposerai sans doute demain mon propre projet de loi d'initiative parlementaire qui va dans le même sens que le vôtre.

J'aimerais vous poser une question au sujet de votre projet de loi. Si je comprends bien ce qu'il en est au sujet de la Loi sur la concurrence, sera-t-il totalement illégal de promouvoir et de distribuer ce genre de documents au Canada ou sera-t-il seulement illégal d'en faire la promotion?

• 0950

Supposons qu'en vertu de votre projet de loi il soit illégal pour Postes Canada de distribuer le courrier qui fait la promotion de ce genre de jeu de hasard. Si Postes Canada me confiait la tâche de distribuer ce courrier—je ne travaille pas pour Postes Canada—serais-je assujetti à la loi?

Mme Karen Redman: Par votre intermédiaire, madame la présidente, j'aimerais remercier M. Bernier de son intérêt et de son soutien pour mon projet de loi. Il a certainement manifesté un vif intérêt pour celui-ci.

Si je ne m'abuse, le projet de loi C-229 visait Postes Canada et étant donné que la teneur de ce projet de loi... Aux termes du projet de loi C-438, le fardeau de la preuve appartient à la personne qui crée le concours ou qui en bénéficie. Le fardeau de la preuve n'incombe pas au distributeur, qu'il s'agisse de Postes Canada ou d'un étudiant de l'école secondaire. Le moyen de distribution revêt une certaine importance, mais le fardeau de la preuve appartient maintenant au fabricant des cartes s'il exige comme condition préalable à l'attribution du prix le paiement d'une somme d'argent ou le paiement de frais téléphoniques pour joindre le numéro 1-900. Le fardeau de la preuve incombe au créateur du concours et non au distributeur. De toute évidence, il faut recourir à un moyen de distribution.

Mme Nicole Ladouceur: J'aimerais ajouter que l'article 52.2 énonce qu'il est illégal de promouvoir directement ou indirectement ou de faire distribuer directement ou indirectement, par la poste ou par tout autre moyen... Par conséquent, cet article s'appliquerait au distributeur direct ou à une tierce personne. L'article 52.2 s'applique dans tous les cas.

M. Gilles Bernier: À l'heure actuelle—ce projet de loi n'a pas encore été adopté—est-il difficile d'intenter des poursuites pour activité frauduleuse par la poste?

Mme Nicole Ladouceur: Ce n'est pas facile. Cela exige beaucoup de ressources. Permettez-moi de revenir à ce que je vous disais au sujet du télémarketing.

Nous avons obtenu une condamnation dans le cas de «Cave-Promotions». Je vous ai induit en erreur en disant qu'il s'agissait de poursuites civiles. Mon collègue m'a rappelé qu'il s'agissait de poursuites criminelles. Je voulais rectifier le compte rendu.

Intenter des poursuites dans ce genre de cas n'est pas facile et exige un investissement important en ressources parce que la loi définit de façon assez large ce qu'on considère comme de la représentation trompeuse et parce qu'il faut prouver au tribunal qu'il y a aussi eu dommage matériel. Il y a aussi un critère relatif à l'impression générale qui doit être respecté.

Ce genre d'enquête exige donc un investissement important en personnel et en temps. Dans le cas de la société «Cave», ce qui est le plus triste, c'est que la société a eu le temps de berner beaucoup de gens avant que nous puissions faire la preuve qu'il s'agissait d'une arnaque.

Le projet de loi que nous vous présentons prévoit une infraction tellement précise que nous pensons qu'il nous sera possible de recueillir des preuves beaucoup plus rapidement étant donné que nous n'aurons pas à respecter certains critères très généraux. L'infraction est définie de façon très claire: fait-on ou non la promotion d'un concours? Le promoteur du concours exige-t-il ou non un paiement préalable du gagnant du concours?

Voilà des choses qu'il est facile à prouver. Il ne s'agit pas d'établir si le consommateur canadien moyen a été berné. Il nous faut souvent recourir à des groupes d'étude pour prouver statistiquement que l'information donnée était trompeuse. Ce qui peut être trompeur dans votre cas peut ne pas l'être pour moi et vice versa.

Ces affaires exigent donc un investissement considérable en argent et en ressources humaines. Ma réponse est longue. Oui, nous pouvons intenter des poursuites, mais sauf dans les cas les plus graves, ces poursuites sont difficiles et c'est pourquoi il vaudrait mieux créer une infraction très précise.

• 0955

M. Gilles Bernier: Je crois que le premier projet de loi d'initiative parlementaire que vous avez déposé, le projet de loi C-229, ne portait que sur la distribution par Postes Canada de ce genre de courrier promotionnel. Comme vous le savez, Postes Canada ne distribue qu'environ 20 p. 100 de ce genre de courrier.

Si j'ai bien compris lorsque mon collègue a posé des questions, cela signifie que votre projet de loi C-438 éliminerait la totalité de la distribution et de la production de ce type de publicité ici au Canada. Est-ce exact?

Mme Karen Redman: Oui. Sa portée est beaucoup plus vaste.

M. Gilles Bernier: Je vous remercie.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Bernier.

Monsieur Martin.

M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Je vous remercie, madame la présidente.

Je tiens aussi à complimenter mon collègue d'avoir présenté ce projet de loi et de nous avoir donné l'occasion de tenir ce débat important. J'estime que ce projet de loi est nécessaire et important. Il est très opportun et très pratique. Il existe toutes sortes de bonnes raisons, à différents niveaux, pour lesquelles nous devrions nous occuper de cette question maintenant.

La principale raison, à mon avis, c'est qu'étant donné que les gouvernements deviennent de plus en plus dépendants des recettes produites par les loteries et les jeux de hasard, il faut renforcer la réglementation concernant les jeux et paris et leur diffusion. Nous avons l'obligation et le devoir d'intervenir lorsque nous savons qu'il existe des jeux clairement trompeurs dont l'objet est de frauder le consommateur. Cela est indispensable sur le plan moral et éthique, et il est tout à fait immoral que ces individus puissent se livrer à ce genre d'activités. Mais il ne fait aucun doute qu'un organisme gouvernemental sur lequel nous exerçons un contrôle quelconque ne devrait pas participer à ce genre d'activités à quelque niveau que ce soit. Donc je suis très heureux que nous soyons saisis de ce projet de loi aujourd'hui.

Je suis scandalisé, comme nous le sommes tous, par certains de ces exemples flagrants de tromperie. Je n'avais jamais eu connaissance du genre de cas dont on a parlé ici aujourd'hui, et il est tellement évident que l'on cherche à profiter des personnes vulnérables, à leur donner de faux espoirs. Pendant que j'étais assis dans cette salle, je regardais la photo de Tommy Douglas qui se trouve ici, et Tommy avait l'habitude de dire que les jeux de hasard, quels qu'ils soient, équivalaient à taxer les pauvres, parce que les pauvres sont toujours plus susceptibles de se faire prendre à ce genre de chose. Les diagrammes circulaires qu'on a fait circuler ici aujourd'hui sont une preuve supplémentaire que les pauvres plus âgés sont encore plus vulnérables, parce qu'ils ne sont pas habitués à ce niveau de malhonnêteté, à mon avis. Je crois qu'ils ont grandi à une époque plus civilisée, ou ce genre de fraude était... Il y avait des escrocs, mais ils ne se présentaient pas à votre porte avec une enveloppe portant le logo du gouvernement pour essayer de vous embringuer dans un truc de ce genre. Donc je suis vraiment heureux que ce projet de loi ait été présenté.

L'autre point qui a déjà été soulevé ici, c'est qu'il faut absolument éviter que le Canada devienne un refuge ou une zone sûre pour ces escrocs. Si d'autres pays comme les États-Unis sont déjà en train de prendre des mesures pour contrôler ce genre d'agissements, nous ne voulons pas devenir un sanctuaire quelconque pour des individus... Il est même possible qu'un escroc américain se livre à ses activités à partir du Canada parce qu'il y a moins de règles dans notre pays. Donc pour toutes sortes d'obligations internationales aussi, il faut qu'il y ait un certain niveau de coopération afin de tuer dans l'oeuf ce genre de chose.

Je sais que je ne suis pas en train de poser des questions, madame la présidente, mais je tenais simplement à en parler.

Une question que je me pose... Je tiens à signaler d'abord que jusqu'à présent c'est en fait sur les employés de la Société canadienne des postes qu'est retombée la responsabilité d'être la conscience de la Société canadienne des postes, de faire preuve de discernement. Récemment, dans un cas bien connu, une femme, par principe, a refusé de livrer ce genre de matériel, ce pourquoi elle a été disciplinée. Elle a été pénalisée. Je pense qu'elle a en fait perdu son emploi parce qu'elle a refusé de mettre dans les boîtes à lettres des choses qu'elle savait être fausses. Donc un projet de loi comme celui-ci éviterait aux employés d'avoir à prendre ce genre de décision, et c'est pourquoi il est d'autant plus nécessaire.

Je pense que cela ne poserait pas autant problème à la Société canadienne des postes si elle mettait moins l'accent sur les profits et davantage sur le service. Il n'y a pas longtemps que le gouvernement considère la Société canadienne des postes comme une entité génératrice de recettes, et en fait la Société canadienne des postes donne au gouvernement 200 millions de dollars par année, ce qui est bien au-delà de ce qu'elle gagne pour fournir des services aux Canadiens. Donc vraiment, si l'unique mandat de la Société canadienne des postes était de fournir un service nécessaire et non pas de générer des recettes, il est probable qu'elle ne jugerait pas nécessaire de s'occuper de la livraison de choses de ce genre. Donc c'était l'argument que je voulais aussi faire valoir.

• 1000

En ce qui concerne la grande vulnérabilité des aînés, cette situation n'est absolument pas différente du cas de l'escroc qui frappe à leur porte et qui leur dit: «J'installerai un nouveau toit sur votre maison pour 10 000 $», puis prend le chèque et disparaît. Ils ne cessent de se faire exploiter par des escrocs de toutes sortes, et il incombe aux gouvernements à tous les paliers de tâcher de s'assurer qu'on ne fraude pas les consommateurs.

Je ne suis pas tellement pas préoccupé par le point qui a été soulevé selon lequel si nous traitons de la livraison du courrier, qu'en est-il des autres moyens de communication et de distribution? Je considère que l'article 52.2 du projet de loi et l'autre projet de loi, le projet de loi C-438, en tiennent effectivement compte et traitent des autres moyens de communication. Donc je sais qu'on a soulevé cette question avec les meilleures intentions du monde, mais il semble que ces deux projets de loi prévoient toutes ces situations.

Je ne crois pas avoir de question. Je voulais simplement discourir.

La présidente: Mme Redman souhaite répondre à vos commentaires.

M. Pat Martin: Très bien.

La présidente: Madame Redman, je vous en prie.

Mme Karen Redman: Je vous remercie, madame la présidente.

Je tiens à remercier M. Martin d'appuyer l'objet du projet de loi, mais je tiens à souligner à nouveau que le projet de loi C-229 était un premier pas dans la bonne direction. Ce projet de loi n'a jamais visé à faire retomber la responsabilité sur le facteur. Et le cas dont vous avez parlé est celui de Mme Pamela Cornell de la région de Kingston. Je lui ai parlé et je sais qu'à cause de ses convictions personnelles, elle s'est sentie obligée d'agir ainsi.

Les projets de loi que moi-même ou Mme Torsney avons présentés ne visaient aucunement à ce que cette responsabilité retombe sur les facteurs, ni sur le personnel de la Société canadienne des postes qui vérifie le courrier pour s'assurer de ne pas envoyer de dispositifs incendiaires, de matériel pornographique ou de choses qui sont de toute évidence illégales. Ces jeux de hasard ne sont pas illégaux, et c'est l'aspect sur lequel ont porté les nombreuses discussions que j'ai eues avec la Société canadienne des postes.

Je tiens à dire que les responsables de la Société canadienne des postes sont toujours à la recherche d'une solution à ce problème. Ils ont fait preuve d'une attitude très positive et ont été plus que disposés à travailler en collaboration avec moi sur cette question. Donc je ne voudrais pas donner l'impression qu'ils tergiversent. Mon objectif était d'assurer une distribution responsable du courrier et dans leur cas, il étaient préoccupés par les questions de censure. Donc de toute évidence, ils ont été plus que disposés à travailler à trouver une solution à ce problème pour les Canadiens.

La présidente: Merci beaucoup, madame Redman.

Monsieur Schmidt.

M. Werner Schmidt: Merci, madame la présidente.

Madame Ladouceur, vous avez utilisé l'adjectif «flagrant» très souvent, et j'aimerais savoir ce que vous entendez par là. Certaines petites entreprises, par exemple, ont porté devant le Bureau de la concurrence des plaintes d'abus de position dominante par certains éditeurs. C'est un exemple de cas, et il y en a d'autres. Le Bureau de la concurrence ne s'occupe pas des cas mineurs; il s'occupe de cas plus importants. Ici, il s'agit des gens les moins méfiants qui sont les plus victimisés—à savoir les pauvres et les personnes âgées—donc je me demande quelle doit être l'ampleur d'un problème avant qu'il soit considéré flagrant.

Mme Nicole Ladouceur: Je pense qu'il y a une distinction à faire ici. Je crois que le terme «flagrant» décrit vraiment la nature du comportement, à savoir l'intention de tromper. Donc même si quelqu'un avait manifesté un comportement très flagrant, cela ne veut pas dire nécessairement, pour bien des raisons—et je les aborderai de façon plus détaillée après ma déclaration—que nous allons poursuivre la personne en question. Dès le départ, je tiens à faire la distinction entre le comportement qui est flagrant, qui est grave, et dont l'intention est réellement de tromper... et toutes les mesures, avant et après, qui visent réellement à tromper, avec préméditation. Car il y a aussi l'idée de préméditation et de malveillance, de négligence et de conduite insouciante de la part d'un individu.

À l'heure actuelle, je pense que nous devons, comme bien d'autres organismes, établir des priorités. Par exemple, notre direction reçoit près de 10 000 plaintes par année de consommateurs canadiens de toutes les régions du pays. Nous recevons en plus probablement 2 000 à 3 000 plaintes de citoyens américains. Donc on est en droit de se demander comment répartir les ressources dont nous disposons pour les enquêtes. De toute évidence, nous ne pouvons pas faire enquête sur 10 000 cas. C'est pourquoi le bureau a adopté, tout comme notre direction, un système selon lequel nous tenons compte de plusieurs critères pour déterminer les cas sur lesquels nous enquêterons.

Dans le cas du courrier trompeur...

• 1005

M. Werner Schmidt: Ces critères sont-ils disponibles?

Mme Nicole Ladouceur: Oui.

M. Werner Schmidt: Pourrions-nous en avoir une copie?

Mme Nicole Ladouceur: Je ne les ai pas avec moi, mais je prends note de votre demande et nous vous les ferons transmettre sans faute.

M. Werner Schmidt: Je vous remercie.

Mme Nicole Ladouceur: De toute évidence, dans le cas du courrier trompeur, l'un des premiers critères, c'est le nombre de plaintes que nous recevons. Dans le cas de K, nous avons reçu pas mal de plaintes. Nous suivons les plaintes à l'aide d'une analyse statistique et d'une analyse des tendances. Vous pourriez par exemple me demander n'importe quand un imprimé sélectif des plaintes concernant le courrier trompeur que je reçois et je serai en mesure de vous le fournir.

Donc au fur et à mesure de l'évolution des cas, par exemple, ou au fur et à mesure que nous réglons des cas ou que nous réussissons à intenter des poursuites, les enquêteurs peuvent alors passer à d'autres cas. Nous consultons ensuite notre banque de données pour voir quels sont les prochains cas.

Bien entendu le nombre est important, la vulnérabilité... Comme je l'ai dit, nous avons établi des critères: quel est le degré de vulnérabilité des personnes ciblées par une escroquerie en particulier, une pratique en particulier? C'est aussi un facteur que nous examinons. Y a-t-il possibilité de ce que nous appelons l'autocorrection? Est-il possible pour la personne qui lit quelque chose de se rendre compte très rapidement que l'on essaie de la tromper? S'il est possible de le faire très rapidement et très facilement, ce genre de cas sera considéré moins grave qu'un comportement qu'un aîné canadien moyen par exemple ne serait pas en mesure de détecter. Pour nous cela est un peu plus grave.

Donc il y a beaucoup de critères dont nous tenons compte. Il peut aussi exister des pressions particulières. Comme je l'ai déjà indiqué à un député, effectivement nous travaillons étroitement avec les gouvernements provinciaux, avec la Federal Trade Commission des États-Unis et le service postal américain. Parfois, pour des raisons stratégiques, nous pouvons décider de cibler un individu en particulier afin d'indiquer clairement à la collectivité le genre de comportement que les instances canadiennes ne toléreront pas, par exemple.

Donc, il existe de nombreux critères, et je me ferai un plaisir de vous les transmettre.

M. Werner Schmidt: Je vous remercie, madame la présidente.

La présidente: Merci, monsieur Schmidt.

Madame Ladouceur, vous pourrez peut-être transmettre ces critères au greffier du comité et il les fera circuler parmi les membres du comité.

J'aimerais simplement avoir certains éclaircissements. Nous avons parlé d'Internet. En examinant le libellé du projet de loi C- 438, je vois qu'on y parle d'imprimés. Est-ce que cela se trouve en fait à exclure la transmission par Internet puisque ces informations ne sont pas en fait imprimées?

Mme Nicole Ladouceur: Nous croyons que oui. Comme je l'ai indiqué dans ma déclaration préliminaire, il n'y a pas eu beaucoup de consultation à sujet. Nous avons bien entendu lu avec intérêt le document préparé par l'attaché de recherche de la Bibliothèque du Parlement. Après réflexion, si d'autres amendements étaient apportés au projet de loi, nous proposerions entre autres que l'on remplace le terme «imprimés» par le terme «représentation écrite», que ce soit sous forme électronique ou sur papier. Nous estimons que cela permettrait de viser les représentations faites sur Internet.

Il s'agit sans aucun doute d'un bon argument, et nous sommes d'accord avec vous. Nous ne croyons pas que le terme «imprimés» engloberait en fait la représentation faite sur Internet.

La présidente: Deuxièmement, toujours en ce qui concerne le projet de loi C-438, lorsque vous examinez la question du télémarketing, le projet de loi C-438 traite de concours qui obligent les participants à payer un certain montant avant de pouvoir toucher leur prix ou à payer des frais téléphoniques particuliers. Craignez-vous que le projet de loi C-438 nuise au télémarketing légitime?

Mme Nicole Ladouceur: Bien entendu, lorsque nous avons dit qu'il n'y a pas eu beaucoup de consultation concernant notre projet de loi... Nous avons travaillé très étroitement avec l'Association canadienne du marketing direct, par exemple, lorsque nous avons travaillé au projet de loi C-20.

Les spécialistes du marketing légitime n'agissent pas habituellement ainsi. Habituellement, ils ne demandent pas un paiement préalable avant de remettre un prix, c'est pourquoi nous n'avons pas considéré que cela nuirait au marché. À ce stade, nous ne craignons pas que cela nuise au marché.

La présidente: Mais il y aura des consultations au sujet du projet de loi C-438, et il y aura des discussions, et vous voudrez sans doute vous assurer que cette question entre autres ne leur cause pas du tort.

Madame Redman.

Mme Karen Redman: J'aimerais attirer votre attention sur le paragraphe 52.2(3) du projet de loi qui dit ceci:

    (3) La personne accusée d'avoir commis une infraction au présent article ne peut en être déclarée coupable si elle établit qu'elle a fait preuve de toute la diligence voulue pour empêcher la perpétration de l'infraction.

Cette disposition vise à faire en sorte que les spécialistes du télémarketing légitime ne soient pas touchés s'ils font preuve de toute la diligence voulue.

• 1010

La présidente: Je vous remercie.

Je ne vois personne d'autre qui veut poser une question et je tiens à remercier les témoins et toutes les personnes présentes d'avoir été des nôtres ce matin.

Je tiens à rappeler aux membres du comité de direction que le comité de direction se réunira cet après-midi.

La séance est levée. Merci beaucoup.