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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FINANCE

COMITÉ PERMANENT DES FINANCES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 4 novembre 1999

• 0936

[Traduction]

Le président (M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.)): La séance est ouverte. Bienvenue à tous. Les personnes que nous entendrons ce matin présenteront, j'en suis convaincu, des points de vue intéressants dans le cadre de la consultation prébudgétaire.

Nous sommes réunis en table ronde comme tous les ans pour mon plus grand plaisir. Comme vous l'avez probablement compris à la suite de la mise à jour économique et financière du ministre des Finances, cette question revêt une très grande importance pour le gouvernement du Canada et sa population alors que nous tentons de définir le genre de pays que nous voulons vraiment construire pour nous-mêmes et les générations futures.

Nous accueillons des représentants de diverses associations dont l'Association des industries aérospatiales du Canada, M. Peter Smith, président-directeur général; de l'Association des industries de l'automobile du Canada, M. Michael Bryan, président du conseil d'administration et Mme Beverlie Cook, vice-présidente; du Collectif en faveur des sciences et des technologies, M. Denis A. St-Onge, président et M. Howard Alper, président sortant; du Bureau d'assurance du Canada, M. George D. Anderson, président et chef de la direction; du Conseil de recherche en sciences naturelles et en génie, M. Thomas A. Brzustowski, président, et enfin, du Bureau canadien de l'éducation internationale, M. Jim Fox, président.

Bienvenue à tous. Vous êtes tous des spécialistes et ce n'est pas la première fois que vous venez ici. Je n'ai pas à vous expliquer le fonctionnement de ce comité. Vous avez environ 10 minutes pour faire votre exposé. Nous aurons par la suite une période de questions.

Nous allons commencer par M. Peter Smith.

M. Peter Smith (président-directeur général, Association des industries aérospatiales du Canada): Bonjour, monsieur le président et merci de l'occasion que vous offrez à l'industrie aérospatiale du Canada d'exposer ses vues.

L'AIAC a déposé auprès du comité un mémoire détaillé en août dernier. Pour éviter de nous répéter, permettez-moi simplement de souligner certains points saillants et, ce faisant, d'exprimer les inquiétudes de l'industrie que je représente.

Pour la première fois depuis des décennies, le gouvernement a la latitude financière de garantir l'avenir économique de toutes les Canadiennes et de tous les Canadiens. Ce dont on a besoin, c'est de courage et de leadership. Nous sommes sans l'ombre d'un doute un pays commerçant. Nous exploitons le marché mondial et l'économie mondiale nous affecte. Par conséquent, les débats entourant le budget doivent faire entrer ce paradigme en ligne de compte.

Il n'y a peut-être aucune industrie de notre économie qui représente la mondialisation autant que le secteur de l'aérospatiale. Aujourd'hui, plus de 75 p. 100 de notre production totale est exportée. Au cours des années 90, notre industrie a connu une très grande croissance, presque trois fois plus que le PIB. Elle s'est taillée une place sur le marché mondial grâce à des produits d'excellence, mais malheureusement tout ne baigne pas dans l'huile. Permettez-moi de vous donner un ou deux exemples.

Depuis 1995, le contenu canadien de nos produits aérospatiaux est tombé de 66 à 54 p. 100. Alors que nos exportations sont montées en flèche, les importations ont grimpé plus rapidement. Cela signifie que des produits étrangers sont importés au Canada. Si la tendance actuelle se maintient, les deux tiers de la production matérielle destinée aux produits canadiens de l'aérospatiale proviendra de l'étranger. Cela signifie moins d'emplois pour les Canadiens et les Canadiennes.

Pourquoi cette situation s'est-elle produite? Il y a bel et bien un défi d'innovation entre nous et nos concurrents. Nous devons être concurrentiels étant donné qu'il n'y a pratiquement pas de marché intérieur pour les produits et services de l'aérospatiale. Positionner le Canada en tant que chef de file concurrentiel doit être une priorité du gouvernement. Nous investissons dans l'innovation et la technologie. Nous sommes indiscutablement en retard sur nos principaux concurrents à cet égard, n'ayant pas de budget de défense et seulement de modestes investissements dans les programmes comme Partenariats technologiques Canada.

• 0940

Malheureusement, notre taux d'investissement est le plus bas de tous les pays du G-7 à l'exception de l'Italie. L'AIAC demande donc un programme d'innovation. Nous avons besoin du leadership du gouvernement et nous lui assurons la coopération de l'industrie. Pour stimuler l'adoption plus rapide de l'innovation, un accroissement des investissements du gouvernement en R-D s'impose.

De nombreux outils politiques sont déjà en place—PTC, le CNRC, le programme PARI, les crédits à la recherche scientifique—mais ces programmes doivent être pourvus de fonds suffisants en vue de créer et de soutenir notre avantage concurrentiel.

L'innovation naît des gens. L'industrie aérospatiale du Canada doit attirer et retenir une main-d'oeuvre hautement qualifiée et de grande valeur. Encore une fois, nous concurrençons pour obtenir ce qu'il y a de mieux et de plus brillant sur le marché mondial.

Nous avons découvert que notre régime d'imposition au Canada nous désavantage sur le plan de la concurrence. Notre industrie doit concurrencer pour l'obtention de travailleurs hautement mobiles, en mesure de faire valoir leurs compétences n'importe où. Cela ne devrait pas nous surprendre que de plus en plus de production du matériel nécessaire à nos produits provienne de l'étranger. C'est là que la main-d'oeuvre novatrice et créatrice dont nous avons besoin se trouve. Cela ne devrait pas nous surprendre que nous ayons de la difficulté à attirer et à retenir les travailleurs dont nous avons besoin.

Dans le même ordre d'idées, notre régime d'imposition des sociétés n'est pas concurrentiel. Le taux d'imposition au Canada est de 43 p. 100. Le taux aux États-Unis, le plus grand importateur des produits canadiens d'aérospatiale, est de 39 p. 100. Cela ne contribue vraiment pas à inciter l'industrie à s'établir chez nous. Cela n'encourage pas la prise de risques ni les investissements dans l'innovation.

L'AIAC exhorte donc le gouvernement à assumer un rôle de chef de file. Le Canada doit se positionner comme un pays concurrentiel dans l'économie mondiale. Il doit investir dans l'innovation. Nous devons fixer des taux d'imposition des particuliers qui nous permettront de concurrencer pour l'obtention de main-d'oeuvre de grande valeur. Nous devons fixer des taux d'imposition des sociétés qui nous permettront d'attirer les investissements dans l'innovation et d'encourager la prise de risques responsable.

Le gouvernement a l'occasion de prendre les guides. Rendons le Canada concurrentiel. L'ONU affirme que le Canada est le pays où il fait le mieux vivre au monde. Faisons maintenant du Canada le pays où il fait le mieux travailler au monde.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Smith.

Nous entendrons maintenant les représentants de l'Association des industries de l'automobile du Canada, M. Michael Bryan et Mme Beverlie Cook. Bienvenue.

M. Michael Bryan (président, conseil d'administration, Association des industries de l'automobile du Canada): Merci de l'occasion que vous nous offrez d'exposer nos points de vue aujourd'hui. J'aimerais me présenter moi-même en tant que président de l'Association des industries de l'automobile du Canada et une représentante des volontaires de cette association, Beverlie Cook, vice-présidente et membre du personnel.

En réalité, je suis heureux de rencontrer l'homme qui m'écrit sans cesse. Merci de toutes ces lettres, monsieur Bevilacqua. J'ai répondu à certaines d'entre elles.

Qui représentons-nous? Nous représentons le marché secondaire de l'automobile qui se chiffre à 15 milliards de dollars. Ce marché englobe les détaillants de matériel de service et de réparation. Nous travaillons en étroite collaboration avec le Conseil du service d'entretien et de réparation automobile du Canada dirigé par Dan Bell. Celui-ci a été mis sur pied en 1988 afin de mettre au point une stratégie de ressources humaines pour le marché secondaire de l'automobile. Nous collaborons aussi étroitement avec la Corporation des associations de détaillants d'automobile et avec d'autres associations provinciales.

Pourquoi sommes-nous ici? Nous comparaissons pour défendre le mémoire que nous avons présenté antérieurement, le mémoire de l'AIA qui aborde trois questions. La première était les allégements fiscaux d'application générale, la deuxième, la stratégie de réduction de la dette et la troisième, les allégements fiscaux ciblés.

Aujourd'hui je vais m'attacher plus particulièrement à la deuxième question. Nous cherchons à obtenir un allégement fiscal pour les mécaniciens et apprentis de l'industrie qui doivent se munir d'outils pour satisfaire aux conditions de leur emploi. Pourquoi cela est-il important? Le coût élevé des outils pour lequel aucune déduction fiscale n'est prévue dissuade les jeunes gens de devenir mécanicien.

Par exemple, quelqu'un qui veut oeuvrer dans l'industrie et devenir apprenti dans un atelier de réparation de véhicules doit débourser environ 4 000 $ pour se procurer ses propres outils s'il veut se voir offrir un emploi. Tous les ans, il devra dépenser 1 000 $ pour remplacer ses outils et aucune déduction fiscale ne lui est accordée. Nous parlons là des personnes qui font leur entrée dans l'industrie et qui gagnent entre 9 $ et 10 $ l'heure. Il s'agit là des personnes qui en moyenne, lorsqu'ils obtiendront leur licence de techniciens, gagneront entre 20 000 $ et 40 000 $ par année. Ce ne sont pas des hauts salariés, mais ils n'ont droit à aucune déduction pour les outils qu'ils doivent acheter s'ils veulent obtenir un emploi. Des études ont démontré qu'il en coûte en moyenne 15 000 $ à un technicien pour l'achat de ses outils. Nous parlons donc de sommes assez importantes.

• 0945

Cela a aussi pour effet de créer une pénurie de main-d'oeuvre qualifiée au sein de notre industrie. Il n'y a pas de relève. L'autre jour, mes collègues de l'Institut canadien du service d'entretien et de réparation automobiles me disaient que la plupart des travailleurs qu'ils forment appartiennent à la catégorie des 30 à 50 ans. Il n'y a pas de jeunes dans la vingtaine, de 17 ans ou de 25 ans; un emploi dans l'industrie ne les intéresse pas. Donc, à mesure que les enfants de l'après-guerre prennent leur retraite, nous commençons à sentir les effets d'une pénurie de main-d'oeuvre qualifiée qui ne pourra que s'exacerber avec le temps. Je vous rappelle que, chaque année, le nombre de véhicules sur le marché augmente, qu'il y a plus de véhicules roulant sur nos routes chaque année. Nous ne parlons donc pas ici d'une industrie en déclin ou d'un marché en régression.

Une autre raison, bien sûr, est le coût élevé des outils. Quiconque songe à travailler dans l'industrie s'arrêtera au coût des outils, coût qui ne disparaîtra pas. Toutefois, le fait qu'on ne puisse déduire comme frais liés à l'emploi le coût de ces outils ne fait qu'aggraver le problème. La situation n'est pas la même que celle du plombier ou de l'électricien, par exemple, qui transporte plus ou moins ses outils sur lui. L'électricien ou le plombier a ses outils dans un coffre ou à la ceinture. L'investissement n'est tout simplement pas du même ordre.

Il est question ici d'outils coûteux qu'il faut remplacer et renouveler à mesure que... Ainsi, lorsqu'on est passé des mesures standards aux mesures métriques, certains outils sont devenus désuets. De nouveaux véhicules ont été introduits, et leurs composantes étaient elles aussi nouvelles. Il faut donc constamment renouveler la trousse d'outils. Ce n'est pas une dépense que l'on fait une fois dans la vie. Elle ne disparaît pas. Elle ne fait qu'augmenter.

Par conséquent, nous réclamons l'équité et l'égalité fiscales par rapport à autres métiers, comme les musiciens, les artistes et les opérateurs de scie à chaîne, avec lesquels nous avons beaucoup de points en commun. Nous réclamons le même traitement.

Vous demanderez peut-être pourquoi l'employeur ne paie pas les outils. En réalité, il le fait. Les employeurs de l'industrie de l'entretien et de la réparation automobiles dépensent en moyenne entre 350 000 et 700 000 $ pour équiper les ateliers. Mais ce dont nous parlons ici, ce sont des outils qui appartiennent au travailleur et qui lui permettent d'exercer son métier.

Quels seraient les avantages d'une déduction fiscale pour les frais liés à l'achat d'outils? Notre industrie a des emplois à offrir aux jeunes. Il y a actuellement des vacances, et il n'y a pas de relève. Nous aimerions que notre industrie bénéficie des mêmes règles que les autres de manière à pouvoir attirer les jeunes. Autre avantage, cela enverra aux jeunes le message que le gouvernement accorde de l'importance à l'industrie de la réparation automobile, une composante du moteur de l'économie, particulièrement en Ontario. Nous croyons également que cela enverra à l'industrie le message que le gouvernement reconnaît l'importance de la main-d'oeuvre qualifiée dans la réparation et l'entretien convenables des automobiles, de manière à ce qu'elles puissent rouler en toute sécurité sur nos routes.

L'an dernier, votre comité a appuyé notre demande voulant que soit autorisée la déduction fiscale du coût d'achat des outils des techniciens de l'automobile. Nous vous en sommes reconnaissants. Nous demandons à nouveau votre appui, et nous sommes encouragés par les propos tenus récemment par M. Martin dans la presse selon lesquels la saine gestion des dernières années nous permet maintenant d'envisager d'autres réductions d'impôt. L'AIA prie instamment le gouvernement d'autoriser les techniciens de l'automobile à déduire de leur revenu le coût de leurs outils. Ce serait pour le gouvernement une bonne occasion de contribuer à la réalisation de son objectif, notamment d'offrir aux jeunes du Canada des possibilités d'emploi significatif à très faible coût pour le contribuable canadien.

Je vous remercie de m'avoir écouté. Je demeure à votre disposition pour répondre aux questions.

Le président: Monsieur Brian, je vous remercie beaucoup.

Nous allons maintenant entendre les représentants du Collectif en faveur des sciences et de la technologie, soit MM. Denis St-Onge et Howard Alper.

[Français]

M. Denis A. St-Onge (président, Collectif en faveur des sciences et des technologies): Merci beaucoup, monsieur le président. Je vous suis très reconnaissant d'avoir eu l'amabilité de nous inviter ici aujourd'hui. Cela nous fait plaisir de participer à nouveau à l'établissement des priorités pour le prochain budget.

[Traduction]

Je ne vais pas vous faire la lecture du mémoire que nous vous avons envoyé. J'en ai des exemplaires, si vous en voulez. J'aimerais plutôt faire ressortir certains points.

• 0950

Nous nous réjouissons particulièrement que la plupart des points que nous avions fait valoir dans notre première priorité, soit de rechercher et de promouvoir l'excellence, ont essentiellement été réglés dans le discours du Trône, plus particulièrement dans le discours fait par le premier ministre en réponse au discours du Trône. Je n'aurais pas pu faire mieux si j'avais rédigé le discours moi-même. Ce qu'il a dit m'a beaucoup réjoui, particulièrement en ce qui concerne la création de chaires d'excellence pour le XXIe siècle, et répond à la plupart de nos préoccupations. Je puis vous le dire, cette déclaration faisait chaud au coeur.

Dans ce contexte, nous sommes conscients qu'il y aura une circulation des cerveaux au sein de l'économie de recherche mondiale actuelle. Les chercheurs quitteront le Canada pour aller travailler ailleurs pour diverses raisons. Nous refusons d'admettre qu'ils quittent le Canada en raison surtout des impôts. Par contre, une réduction des impôts au cours des cinq prochaines années, comme l'a annoncé le ministre des Finances, ne fera certes pas de mal.

Cependant, la principale raison pour laquelle les chercheurs vont travailler à l'étranger, c'est que les conditions de recherche sont meilleures. Il faut donc que le Canada fasse en sorte d'offrir des conditions de recherche parmi les meilleures au monde. Le Collectif en faveur des sciences et de la technologie est ravi, bien sûr, de la création de la FCI en particulier qui a permis de mettre en place l'infrastructure voulue non seulement pour conserver ici les bons chercheurs, mais également pour les rapatrier si, pour une raison quelconque, ils sont allés travailler à l'étranger. C'est ce genre d'attitude qu'il faut nourrir et entretenir.

Notre recommandation, aujourd'hui, vise essentiellement à faire en sorte que nous continuions d'investir en recherche. À cet égard, j'aimerais vous lire un court passage de David Caplan, PDG de Pratt & Whitney. Mon collègue là-bas le connaîtrait de toute évidence. L'extrait est tiré d'un cahier qui a été distribué avec le Ottawa Citizen, le week-end dernier:

    Au cours des dernières années, j'ai beaucoup insisté sur l'importance d'intensifier l'investissement en R-D au Canada. En réalité, c'est une question de choix. Soit que nous voulions être des leaders, soit que nous acceptons simplement que notre niveau de vie baisse graduellement. Le choix n'est pas difficile.

Ces quelques lignes font ressortir l'absolue nécessité, pour le Canada, de continuer d'accroître le taux d'investissement dans une économie du savoir, comme l'a mentionné le premier témoin tout à l'heure.

Nous aimerions aussi encourager le gouvernement à créer de nouveaux partenariats mondiaux, en vue particulièrement de faciliter l'accès des chercheurs canadiens à certaines installations internationales—par exemple, à faciliter l'accès d'un astronome canadien à une installation extraordinaire d'Hawaï. C'est là un exemple manifeste, mais il y en a bien d'autres. Ce n'est pas toujours aussi facile à faire que l'on pourrait croire. Je n'ai pas de solution facile à vous offrir, sauf de dire que c'est une question à laquelle il faut vraiment s'attaquer. M. Brzustowski vous en parlera peut-être lui aussi.

Nous encouragerions aussi le Canada à faciliter la venue de chercheurs étrangers au Canada, lorsque nous avons les meilleures installations du monde, plus particulièrement de permettre aux entreprises étrangères d'être admissibles aux versements de contrepartie des organismes subventionnaires dans le cadre de partenariats entre universités et industrie. Cela pourrait s'avérer extrêmement avantageux tant pour la science au Canada que pour la science à l'échelle internationale.

• 0955

Le troisième point que nous tenons à faire valoir concerne la création et le développement de groupes spéciaux. Je ne vais pas insister sur ce point, étant donné que la création de ces groupes est si manifestement avantageuse pour tous. Il en existe des exemples bien connus. L'industrie biopharmaceutique de Montréal excelle parce qu'il existe un groupe spécial en son sein. Kanata en est un autre excellent exemple. Aider différentes entreprises et différents instituts à s'établir crée un centre d'excellence qui représente plus que la somme de ses parties.

La création d'un nouveau conseil tripartite en vue de promouvoir la collaboration multidisciplinaire dans un centre deviendra probablement une réalité, en raison en partie des chaires d'excellence prévues pour le XXIe siècle. C'est là le genre d'initiative que nous encourageons le gouvernement à examiner de plus près.

Enfin, il faut que le Canada examine la recherche effectuée dans les ministères. L'examen des programmes a indubitablement entraîné une baisse significative de la quantité et de la qualité de travaux de recherche effectués dans les laboratoires du gouvernement. Malheureusement, les compressions ont été effectuées n'importe comment, sans cibles particulières. Résultat, vous aviez d'excellents laboratoires qui, comme des prunes laissées au soleil, se sont littéralement transformés en pruneaux.

Il faut évaluer quel genre de recherche doit être effectué dans les laboratoires du gouvernement et ce qu'il vaudrait mieux laisser soit à l'industrie soit aux universités. Il n'est pas nécessaire d'avoir des dédoublements. Le gouvernement n'a pas besoin de s'engager dans certains aspects de la recherche. L'entreprise privée peut le faire et probablement le faire mieux, tout comme les universités d'ailleurs. Par contre, le gouvernement a besoin de données impartiales sur lesquelles arrêter ses orientations, entre autres, mais ce besoin n'a pas été bien cerné. Nous recommandons vivement que, si un pareil examen est entrepris, ce que nous espérons, il sera confié à des praticiens de la recherche, plutôt qu'à un consultant qui rédigerait un rapport ne répondant pas à la question cruciale de savoir quelle sorte de recherche devrait effectuer le gouvernement et pourquoi.

Ce sont les principaux points. À nouveau, je tiens à vous remercier et à féliciter le gouvernement d'avoir créé les chaires d'excellence, une initiative remarquable. Monsieur Bevilacqua, voilà qui met fin à mon exposé.

Le président: Monsieur St-Onge, je vous remercie.

C'est maintenant au tour des témoins du Bureau d'assurance du Canada. Monsieur George Anderson et monsieur Paul Kovacs, soyez les bienvenus.

M. George D. Anderson (président et chef de la direction, Bureau d'assurance du Canada): Monsieur le président, je vous remercie beaucoup et je vous salue. Il est bon de se retrouver ici pour discuter d'un sujet peut-être un peu moins litigieux que la réforme des services financiers au sujet de laquelle nous avons comparu de nombreuses fois au fil des ans.

Je suppose toutefois que votre comité et le gouvernement sont aux prises à nouveau avec des conseils concurrentiels et conflictuels, ce qui ne doit pas faciliter la vie des décideurs. Le débat cette fois a ceci de bon qu'étant donné les excédents budgétaires prévus par M. Martin, il semblerait que nous disposions d'une gamme de choix. Nous disposons d'une plus grande marge de manoeuvre qu'auparavant, lorsque nous étions aux prises avec des déficits, quand le gain de l'un était la perte de l'autre. J'estime donc que les espoirs sont permis.

Ce qui est évident, de plus en plus clair, que l'on soit de l'Est ou de l'Ouest ou de la droite ou de la gauche politique, c'est que les Canadiens souhaitent voir dans les prochains budgets du gouvernement fédéral des baisses générales de l'impôt sur le revenu des particuliers. Nous reconnaissons qu'il faudrait que de pareilles réductions, de même que l'alignement de nos taux d'impôt sur le revenu des sociétés sur les taux à l'étranger, soient une priorité du gouvernement au cours des prochaines années.

Certains estimeraient qu'il y a un conflit entre les réductions d'impôt et l'augmentation des dépenses sociales. À mon avis, il s'agit là, jusqu'à un certain point, d'une fausse dichotomie. Bon nombre des programmes sociaux les plus efficaces du Canada sont financés au moyen du régime fiscal, et de nombreuses charges sociales favorisent à leur tour une augmentation de la productivité et la création d'emplois. Par conséquent, je soutiendrais que le compromis entre des réductions d'impôt, d'une part, et des dépenses sociales, d'autre part, surtout s'il est réalisé à l'aide du régime fiscal, n'est pas aussi net ou aussi absolu qu'on pourrait le croire et que le laisse entendre le débat dont il est question dans les journaux.

• 1000

Il est clair, toutefois, que les Canadiens croient effectivement que leur revenu disponible n'augmente pas. On pourrait qualifier cette opinion, sur le plan politique, de question en train de supplanter toutes les autres, et elle semble se répandre, d'après tous les sondages que j'ai vus récemment.

Par conséquent, de notre point de vue, à ce stade-ci, il vaudrait mieux que le gouvernement envisage de réduire les impôts pour créer une impression générale de bien-être qui donne espoir dans l'avenir et foi dans l'économie. À cette fin, il faut que les gouvernements réduisent les impôts. Ces réductions doivent être réelles et bien senties, et il faut qu'elles soient perçues comme étant équitables et efficaces. À notre avis, il faut cesser de donner d'une main pour reprendre de l'autre, que ce soit un transfert d'un programme à l'autre du gouvernement ou entre ordres de gouvernement.

Monsieur le président, j'aimerais me concentrer aujourd'hui sur un autre sujet qui nous tient à coeur, soit la préoccupation croissante du public à l'égard des catastrophes naturelles. M. Martin en a parlé récemment dans un discours comme l'un des coûts humains et financiers croissants avec lequel est aux prises le gouvernement fédéral. Depuis deux ans, votre comité nous a beaucoup aidés à faire reconnaître la nécessité d'agir à cet égard. Il faut maintenant envisager un plan de réduction des catastrophes naturelles au Canada.

Au cours des trois dernières années, les Canadiens ont été frappés par trois catastrophes très coûteuses, notamment l'inondation de la région du Saguenay, le débordement de la rivière Rouge et, bien sûr, la terrible tempête de verglas de 1998 qui a dévasté l'est de l'Ontario, le Québec et les provinces de l'Atlantique. Au cours des trois dernières années seulement, ces événements météorologiques extrêmes ont touché plus de quatre millions de Canadiens. La tempête de verglas de 1998 a été la catastrophe naturelle la plus coûteuse qu'ait connu le Canada et elle a donné lieu aux réclamations les plus élevées enregistrées en Amérique du Nord, supérieures à celles qui avaient suivi le passage de l'ouragan Andrew. Les dommages couverts par les assureurs et le gouvernement ont excédé 2,7 milliards de dollars. Selon le Conference Board du Canada, la tempête de verglas a également donné à l'économie un coup de frein évalué à 1,6 milliard de dollars et entraîné des pertes de revenus de 1 milliard de dollars. Malheureusement, tout indique que l'avenir nous réserve d'autres fortes tempêtes de ce genre et que le coût pour s'en remettre assumé par les contribuables connaîtra une croissance exponentielle.

Depuis les années 60, les paiements d'aide aux sinistrés versés par les contribuables ont doublé tous les cinq ou dix ans, une tendance alarmante tant au Canada qu'à l'échelle internationale qui doit être corrigée. Depuis trois ans, les gouvernements du Canada ont dépensé en moyenne 500 millions de dollars par année pour réparer les dommages causés par des phénomènes météorologiques extrêmes, mais, bien souvent, les résidences et les commerces des assurés demeuraient tout aussi vulnérables.

Il est temps à notre avis d'être un peu plus prévoyants. Nous savons quelles régions du Canada sont susceptibles d'être affectées par différents genres de phénomènes météorologiques et par des tremblements de terre, un risque élevé au pays. Nous savons comment améliorer la protection des personnes dans les résidences et dans les commerces. Nous savons comment réduire l'impact économique des catastrophes naturelles et la souffrance humaine qui l'accompagne. Toutefois, pour être très franc avec vous, nous n'appliquons tout simplement pas ces connaissances d'une manière consistante et coordonnée en vue de protéger la population canadienne.

Quand les Canadiens ont pris des mesures pour prévenir les catastrophes ou pour en réduire l'impact, elles ont été efficaces. Prenons l'exemple du canal de dérivation de Winnipeg, construit au début des années 50, après qu'un fort pourcentage de maisons de Winnipeg aient été détruites par le débordement constant de la rivière Rouge. À l'époque, le coût, qui était partagé par le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial, atteignait 63 millions de dollars, une somme faramineuse à l'époque. Certains d'entre vous dans la salle se rappelleront le ridicule dont on a couvert le premier ministre du Manitoba lorsqu'il a fait construire le canal autour de la ville. On qualifiait à l'époque le canal de «fossé de Duff», d'après le prénom du premier ministre Duff Roblin. En fait, c'est un témoignage vivant de l'utilité d'agir avec prévoyance et de planifier longtemps d'avance. Il a fait économiser jusqu'ici plus de 20 fois l'investissement initial de 63 millions de dollars. Le canal de dérivation a été de toute évidence une saine décision économique. Il a fait épargner à tous les ordres de gouvernement des centaines de millions de dollars en coûts d'intervention d'urgence et de remise en état.

L'Alberta s'est dotée d'un programme de prévention de la grêle, un autre excellent exemple d'initiative en vue de réduire les effets de phénomènes météorologiques extrêmes.

• 1005

Monsieur le président, il faut que le Canada mène plus de projets de ce genre en vue de réduire les pertes attribuables à des catastrophes naturelles, y compris à la menace d'un tremblement de terre à Vancouver et dans la vallée du Saint-Laurent. En tant que pays, nous avons toujours fourni une aide efficace aux collectivités touchées par des catastrophes dues à des phénomènes météorologiques extrêmes. Toutefois, nous nous sommes très peu arrêtés aux mesures qui nous permettraient d'éviter au départ les dommages que peuvent causer ces phénomènes. C'est un peu comme si les Canadiens investissaient beaucoup dans l'effort de guerre, mais beaucoup moins dans le maintien de la paix.

Monsieur le président, nous prions instamment tous les gouvernements d'élaborer un plan de réduction des catastrophes naturelles en vue de réduire la vulnérabilité du Canada à ces phénomènes. Le plan exige une série d'investissements et de projets modestes en vue d'aider les localités à mieux résister aux phénomènes géologiques et météorologiques naturels extrêmes. En fin de compte, ces projets feraient baisser le coût que devront un jour assumer les gouvernements, surtout le gouvernement fédéral.

À notre avis, ce plan se composerait de trois volets. Le premier serait un fonds de protection contre les catastrophes naturelles auquel les trois ordres de gouvernement pourraient contribuer jusqu'à 750 millions de dollars sur une période de cinq ans en vue de financer des projets qui permettront de réduire les pertes des localités dues à des phénomènes météorologiques extrêmes. Ce programme représenterait une composante importante du programme d'infrastructure projeté par le gouvernement fédéral—M. Martin en a parlé.

La deuxième composante consiste à passer en revue les arrangements actuellement prévus pour intervenir d'urgence et remettre en état en cas de catastrophe. Un examen de ces arrangements est prévu dans l'année, et nous estimons qu'il faudrait y ajouter un élément de prévention des pertes. Ainsi, chaque fois que survient une catastrophe naturelle, un montant égal à 15 p. 100 environ de ce que les gouvernements affectent aux interventions d'urgence en cas de catastrophe devrait être investi dans des mesures visant à réduire l'impact d'un pareil événement. Les États-Unis ont mis en place un programme analogue, et il semble très bien fonctionner.

Enfin, il faut développer au sein de nos localités ce que nous appelons le réflexe de prévoyance. Il faut convaincre ceux qui envisagent d'investir dans l'infrastructure d'intégrer dans leurs critères de décision la capacité de réduire ou de prévenir les catastrophes.

Nous estimons qu'en aidant les collectivités à tenir compte d'éventuelles catastrophes naturelles, nous rapprocherons tous les Canadiens. Chaque région du pays est touchée par un événement météorologique extrême sous une forme ou une autre. Dans la région atlantique, les effets d'une marée de tempête qui a frappé récemment la région de la baie de Fundy nous ont rappelé la possibilité croissante d'ouragans catastrophiques. La menace d'un important séisme est à la fois réelle et inévitable sur la côte Ouest et dans la vallée du Saint-Laurent, comme je l'ai déjà mentionné. Les collectivités des Prairies sont souvent inondées et elles sont frappées par des tempêtes de grêle et peuvent aussi vivre des périodes de grande sécheresse. Le Canada central a été touché par plusieurs tornades au cours des dernières années, de même que par la tempête de verglas. Naturellement, le Québec est aussi aux prises avec des inondations périodiques.

Permettre à ces localités de mieux résister à ces phénomènes météorologiques est selon nous efficace sur le plan des coûts. Le canal de dérivation de Winnipeg et le programme d'ensemencement des nuages de l'Alberta—qui sert à réduire les dommages causés par la grêle—ne sont que deux exemples de nombreux projets utiles que nous pourrions entreprendre.

Notre organisme est disposé à travailler de concert avec tous les ordres de gouvernement pour faire de ce programme une réalité. Comme je l'ai dit tout à l'heure, cela pourrait être intégré au programme d'infrastructure national. J'exhorte donc les membres du comité, de même que vous, monsieur le président, à continuer de faire preuve de leadership dans ce dossier. Commençons par instituer un fonds de protection contre les catastrophes naturelles qui aidera les Canadiens et les rapprochera autour d'un grand thème.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Anderson.

Nous allons maintenant entendre le professeur Thomas Brzustowski, président du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie. Monsieur, nous vous souhaitons encore une fois la bienvenue.

[Français]

M. Thomas A. Brzustowski (président, Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada): Merci, monsieur le président. Merci de m'avoir invité encore une fois, et merci de votre appui personnel envers le CRSNG et de l'appui du comité tout entier. C'est très important pour nous.

[Traduction]

Monsieur le président, je me disais en venant ici ce matin que je ne vous ferai pas connaître l'excitation de vos réunions de Londres, mais peut-être pouvons-nous donner un peu de couleur aux délibérations. Je vous propose d'examiner ce document qui a été distribué, et je vous demande d'y réfléchir très sérieusement. Outre le fait qu'il est plein de couleurs, il renferme une description très minutieuse et détaillée de ce que fait le CRSNG, pourquoi et comment il le fait.

• 1010

Vous remarquerez que notre vision est très claire. Nous nous voyons comme un instrument pouvant aider le Canada à devenir prospère et les Canadiens à avoir une qualité de vie supérieure. Nous avons utilisé l'expression «Smart Canada en tête», que je préfère d'ailleurs en français qu'en anglais parce qu'elle y a deux sens: elle désigne le Canada comme un chef de file et indique qu'il se sert de sa tête. Nous voulons dire par là que c'est un pays dont les citoyens sont capables d'utiliser le savoir d'une manière intelligente et efficace dans tous les domaines de l'activité sociale et économique. C'est, à notre avis, un facteur important de la vision.

Nous investissons d'abord et avant tout dans les gens; nous investissons dans la découverte et nous investissons dans l'innovation. Ce sont les trois grands thèmes de notre programme. L'investissement dans les gens se fait sous forme de bourses de recherches et d'études visant à soutenir les jeunes gens en particulier. Vous vous rappellerez que la directive nous a été donnée, dans le budget de 1998, d'accroître cet investissement. C'est ce que nous avons fait et cela a été très bien accueilli.

L'investissement dans l'innovation, c'est investir dans les partenariats entre les universités et l'industrie qui font communiquer les générateurs du savoir avec ceux qui l'appliquent de façon productive dans l'économie. Vous vous rappellerez encore, monsieur le président, qu'une deuxième directive du budget de 1998 nous incitait à investir aussi un peu plus dans ce secteur de nos activités.

Enfin, l'aspect découverte serait l'investissement que nous faisons dans la recherche fondamentale, qui sous-tend tout le reste. Elle ouvre les portes du savoir et permet la formation de gens bien informés. Elle crée un nouveau savoir et nous donne accès à toute la connaissance créée dans le monde entier, pour laquelle nous n'avons rien à payer—ce sont les 96 ou 97 p. 100 restants.

Bien entendu, nous visons l'excellence dans tous cela, et nous fonctionnons selon un système de concours fiables et impartiaux—un mécanisme dans lequel nous avons toute confiance.

Enfin, la bannière rouge, au bas de la page, indique que nous reconnaissons qu'il y a des limites constitutionnelles à notre mandat, mais il n'y en a pas qui nous empêchent de créer des partenariats avec des gens dotés de responsabilités dans le domaine de l'éducation, par exemple, de les aider et d'influencer leurs décisions.

Monsieur le président, je voudrais que vous voyiez dans ce document un sommaire réfléchi et soigneusement préparé de ce que nous faisons, de la manière dont nous le faisons et de nos raisons de le faire. Je vais ensuite passer à mon mémoire.

Ce mémoire a été distribué en septembre, et je ne voudrais pas perdre le temps du comité en en faisant un examen détaillé. Permettez-moi, cependant, d'attirer votre attention sur deux parties de ce document.

À la première page, dans les deux langues, particulièrement au deuxième paragraphe, sous la rubrique «NSERC and universities» ou

[Français]

le CRSNG et les universités,

[Traduction]

nous essayons d'expliquer pourquoi nous insistons tellement sur la recherche universitaire au Canada. Pourquoi en parlons-nous tant?

À mon avis, et je crois que je pourrais étayer cette opinion de preuves, dans une économie mondiale fondée sur le savoir, où tellement de choses dépendent des progrès de la science et de la technologie, l'avantage comparatif du Canada réside dans ses universités. Notre secteur privé fait, c'est sûr, de la R-D de première qualité, mais il n'y en a pas tellement. Nos laboratoires publics font de la recherche de tout premier ordre, mais ils n'en font pas autant que les concurrents du Canada. Cependant, si vous faites une comparaison du nombre d'étudiants, des proportions étudiants-enseignants, du nombre de chercheurs dans les universités et de la qualité de la recherche qu'ils font, nous sommes du même calibre que nos compétiteurs. Par conséquent, notre avantage comparatif réside dans nos universités.

Ceci dit, j'aimerais souligner les deux fonctions, parce qu'elles sont tellement importantes.

[Français]

La recherche universitaire génère un nouveau savoir et fait du même coup deux autres choses. En premier lieu, elle sensibilise et forme des personnes à la création et à l'utilisation de nouvelles connaissances et, en second lieu, par ces personnes et leurs enseignants, elle ouvre la porte aux connaissances du monde entier.

[Traduction]

Avec l'accès de plus en plus grand à la recherche effectuée dans le monde entier, à l'ère de l'Internet, on peut télécharger n'importe quoi, mais pour ce qui est de savoir quoi télécharger, de le comprendre et de savoir quoi en faire, il faut des assises et de la recherche.

• 1015

C'est ici que j'aimerais faire le plaidoyer que je comptais vous présenter aujourd'hui. J'aimerais plaider pour que le travail qu'a entrepris le gouvernement soit fait à fond. Il faut faire les choses jusqu'au bout. Vous l'avez déjà entendu à deux reprises auparavant. Vous l'avez reconnu par écrit dans votre dernier rapport. Le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie est exactement ce qu'il nous fallait. C'était une idée merveilleuse de doter le pays d'un moyen de se rattraper sur le plan de l'infrastructure de recherche fondamentale, de l'infrastructure de recherche de grande qualité, de l'infrastructure de recherche pouvant soutenir les travaux les plus modernes; mais nous avons maintenant besoin d'un financement qui nous permette d'utiliser ce matériel, d'exploiter ces installations. Cette tâche très importante ne peut être entreprise sans ces fonds d'exploitation supplémentaires.

Une annonce absolument merveilleuse a été faite dans le discours du Trône, à propos de la création de chaires d'excellence du XXIe siècle, au nombre, au bout du compte, de 2 000, ce qui amènera l'effectif de toutes universités, pour toutes les matières, à environ 36 000 professeurs, ce qui représente une amélioration très importante. De plus, nous attirerons au Canada certains des meilleurs chercheurs sur lesquels nous pourrons mettre la main. De toute évidence, il nous faudra leur fournir un plus grand soutien à la recherche que nous ne l'avons fait jusqu'ici.

On a déjà démontré que c'est la possibilité de faire des travaux attrayants, importants, à la fine pointe de la technologie qui attire les gens au Canada et les y fait rester. En plus de créer les chaires, qui couvriront le salaire et certains des frais de recherche, il nous faut de toute évidence élargir tout le domaine du soutien à la recherche pour ces gens. Ces chercheurs, puisqu'ils sont les meilleurs, remporteront du succès dans tous nos concours. Ils rapporteront beaucoup, et c'est pourquoi nous devons les attirer ici. C'est ce que voulait le premier ministre.

Je plaide donc devant ce comité pour qu'il insiste auprès du gouvernement pour faire les choses jusqu'au bout, pour faire le travail à fond.

Enfin, j'aimerais attirer votre attention sur quelque chose que vous entendrez aussi venant d'autres personnes. C'est dans notre mémoire. Cela concerne le secteur de la micro-électronique du Canada. Ce secteur est l'histoire d'une réussite phénoménale. Il connaît un essor rapide, il s'impose sur les marchés mondiaux, il a eu des répercussions sur nos vies, et il a créé beaucoup d'excellents emplois au Canada, mais son essor est freiné par le manque de disponibilité de gens hautement qualifiés.

L'industrie fait, depuis deux ans, beaucoup de pressions à ce sujet, et qu'est-ce qui est arrivé? Les gouvernements provinciaux, du moins, autant que je sache, ceux de l'Alberta, du Québec et de l'Ontario, ont convenu de payer le supplément d'effectifs dans ces domaines. Les universités sont parties en quête, et ont réussi à recruter une bonne part des professeurs dont elles avaient besoin, des gens très compétents. L'industrie fournit certaines installations, qu'elle partage parfois avec les programmes provinciaux.

Il ne manque plus au casse-tête que la pièce du gouvernement fédéral. Puisqu'il y a cette vague de nouveaux professeurs qui entrent dans ces secteurs importants, nous devons leur fournir les moyens de conserver leur avance sur nos concurrents, afin que ceux qu'ils éduquent puissent devenir ce dont l'industrie a besoin pour prospérer. Il nous faut de l'argent pour leur offrir des bourses de recherche.

Il ne s'agit pas d'une hypothèse. Dans sa propre réallocation des ressources, une démarche qu'il fait tous les quatre ans, le CRSNG a accru d'environ 22 p. 100 les ressources qu'il attribue aux secteurs du génie et des sciences informatiques, ainsi que du génie électrique, aux dépens d'autres secteurs. Nous avons privé certains pour donner à d'autres. Le taux de croissance s'avère insuffisant, et les demandes reçues cet automne dépassent de beaucoup le taux de croissance que nous avions prévu, sur lequel nous nous étions fondés pour effectuer la réallocation des ressources. Il nous faut de l'argent pour pouvoir offrir des bourses de recherche à ces chercheurs hautement qualifiés que nous attirons dans un secteur qui stimule la prospérité de notre pays et la création d'excellents emplois.

Je suis sûr que les représentants de l'industrie vous en parleront dans le cadre d'autres audiences que vous aurez dans tout le pays. Ils vous diront probablement que Brzustowski a raison, mais que les chiffres qu'il présente sont loin de la réalité. Ils vous diront que je devrais demander trois fois plus que ce que je demande dans mon mémoire. Ils auront peut-être raison, mais je vous ferai remarquer que dans un domaine où l'on a du succès, un succès phénoménal, et qu'il est difficile d'en faire plus en raison du manque de gens hautement compétents, nous avons un rôle à jouer. En fait, l'élément fédéral est la dernière pièce du casse-tête, et j'insiste pour vous le faire comprendre.

• 1020

[Français]

Monsieur le président, je vous remercie de votre attention et je vous remercie encore une fois de votre appui.

[Traduction]

Le président: Merci, monsieur Brzustowski.

Nous allons maintenant laisser la parole à M. Jim Fox et à Mme Jennifer Humphries, du Bureau canadien de l'éducation internationale. Vous êtes les bienvenus.

M. Jim Fox (président, Bureau canadien de l'éducation internationale): Merci beaucoup, monsieur le président, mesdames et messieurs.

On estime qu'environ un tiers des emplois au Canada sont maintenant des emplois de spécialistes et que cette proportion ne fera qu'augmenter. Puisque le Canada dépend largement du commerce international, on peut tout aussi bien dire que ces emplois sont des emplois de travailleurs internationaux du savoir.

Le récent discours du Trône mettait un accent important sur la connectivité au Canada et l'investissement dans la R-D, tous des éléments d'une économie du savoir, mais il n'y a pas été question de la stratégie du savoir international dont le Canada a grand besoin.

[Français]

Malgré le fait que nous sommes un des pays les plus multiculturels, nous sommes un des pays les moins internationalisés en termes d'études et de commerce. Malgré le fait que les relations académiques et la culture sont le troisième pilier de notre politique étrangère, nous prenons du retard dans nos relations éducationnelles au lieu d'avancer.

[Traduction]

En fait, depuis l'arrivée de ce gouvernement au pouvoir, le financement de notre programme d'éducation internationale a été réduit et est passé de 26 millions à 20 millions de dollars. De nos jours, seulement 3 p. 100 de nos étudiants entreprennent des études postsecondaires à l'étranger et, tout comme notre commerce, ils vont presque exclusivement aux États-Unis.

Le nombre d'inscriptions d'étudiants étrangers stagne depuis une dizaine d'années, bien que la demande ait plus que doublé à l'échelle mondiale. Nous terminons la décennie avec 1 000 étudiants étrangers de moins qu'à son début. Nous dépensons moins par habitant sur l'éducation internationale qu'aucun pays de l'OCDE: 80 sous, comparativement à 9 $ en Australie.

Les études économiques, y compris le très récent rapport du Conference Board du Canada, citent un grand nombre d'effets positifs de l'espérance acquise à l'étranger, dont un rapport positif avec la tenue de l'économie, une forte incidence positive sur la croissance du PIB et un effet positif sur l'innovation.

[Français]

Si nous voulons continuer d'être un joueur exceptionnel dans le monde, nous avons besoin d'une stratégie internationale des connaissances. L'état actuel des choses nous incite à penser que cela ne se produira pas facilement ou sans appui au niveau fédéral. Nous avons besoin d'un plan d'investissement et d'action.

[Traduction]

Tony Blair est en train d'engager la Grande-Bretagne à doubler le nombre d'étudiants étrangers, et aussi les bourses d'études qu'elle offre aux sujets britanniques. La France a déclaré qu'elle compte augmenter de 120 000 à 500 000 le nombre d'étudiants étrangers qu'elle accueille. La Communauté européenne dépense déjà un milliard de dollars chaque année sur les échanges relatifs aux études internationale. L'Australie prévoit de faire de l'éducation l'un de ses trois plus grands domaines d'exportation, et les États-Unis sont sur le point d'annoncer une stratégie d'éducation internationale qui leur permettra de rester à la tête des éducateurs du monde. En passant, tous ces engagements doivent se réaliser d'ici cinq ans, sinon moins.

Le Canada a beaucoup, lui aussi, à offrir. L'étude que nous avons réalisée récemment auprès des étudiants étrangers au Canada révèle que 80 p. 100 d'entre eux recommanderaient l'expérience éducative canadienne à un parent. Espérons que c'est un parent qu'ils apprécient!

Les Canadiens se précipitent en masse sur les quelques opportunités d'études, d'études coopératives internationales et de stages professionnels à l'étranger. Il était intéressant de constater l'intérêt que suscitent aussi les échanges professionnels chez les chercheurs et les scientifiques. Il est clair qu'il serait important de nous engager fermement dans la voie des échanges internationaux. Mon propre organisme, le Bureau canadien de l'éducation internationale, continue d'exporter l'éducation des acheteurs qui y accordent une grande valeur. Nous avons vendu pour plus de 500 millions de dollars d'éducation à l'étranger.

• 1025

Donc, que faut-il faire pour améliorer le rendement du savoir canadien à l'étranger?

Puisque les relations avec les universités étrangères sont l'affaire du gouvernement fédéral, le gouvernement du Canada devrait investir 100 millions de dollars par année dans une stratégie internationale du savoir. La stratégie appuierait les intérêts du Canada au moyen de l'éducation dans le monde entier. D'autres éléments sont:

Des bourses d'études internationales stratégiques visant à attirer les plus grands cerveaux du monde par le biais des études et de la recherche au Canada—on pourrait appeler cela une stratégie de gain de cerveaux.

Un programme stratégique d'apprentissage international qui permettrait à beaucoup plus de Canadiens d'étudier à l'étranger, de participer à des programmes coopératifs internationaux, à des stages et à des échanges professionnels.

Une promotion stratégique du Canada dans le monde en tant qu'éducateur dans les domaines liés à notre marché de l'exportation, qui met l'accent sur les ressources du savoir du Canada dans ces domaines et qui explore la possibilité d'utiliser l'Internet comme outil de marketing et de prestation multimédia de programmes d'éducation à distance et de programmes de grande qualité au Canada. Il faudra établir un fonds spécial pour stimuler les exportations dans le domaine de l'éducation.

Un soutien stratégique à l'éducation au Canada, pour qu'il puisse devenir concurrentiel à l'échelle internationale.

Un soutien stratégique aux institutions qui cherchent à s'internationaliser.

Et enfin, une approche stratégique aux mesures officielles du Canada d'aide au développement, afin de réaliser l'objectif de 0,07 p. 100 du PIB et d'établir des relations du savoir et des réseaux de connaissance avec les pays en voie de développement, pour que le Canada puisse être pour ces pays ce que Maurice Strong a désigné sous le nom de courtier du savoir.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Fox.

Nous passons maintenant à la période de questions. Nous avons le temps de faire une ronde de dix minutes, et nous commencerons par M. Epp, qui sera suivi de M. Dubé.

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Merci, monsieur le président et merci à tous d'avoir bien voulu prendre le temps de venir témoigner devant notre comité aujourd'hui. J'apprécie tout le travail que vous avez mis dans vos exposés.

J'ai plusieurs questions différentes, qui portent, en fait, sur un assez vaste domaine, et je dois les faire précéder d'une introduction. Les autres membres du comité qui étaient avec nous auparavant savent que je dis souvent qu'il ne faut pas croire que l'on sait, d'après mes questions, où je veux en venir. La raison de ceci est qu'ayant enseigné pendant 31 ans, j'ai appris que pour savoir ce que pensent les gens, il faut parfois poser des questions pour les faire parler. Donc, je vous fais parler, ce n'est pas vous qui me faites parler.

Le président: On appelle cela l'avertissement Epp.

M. Ken Epp: Ce n'est pas vraiment un avertissement, c'est seulement pour que nous nous comprenions mutuellement.

Je voudrais d'abord parler de l'industrie l'aérospatiale avec M. Smith. Pourquoi devrions-nous investir quoi que ce soit dans l'industrie aérospatiale? Nous avons assez de problèmes ici sur Terre. Nous en avons beaucoup rien qu'au Canada. Pourquoi vouloir dépenser de l'argent dans l'espace?

M. Peter Smith: En réalité, il ne s'agit pas uniquement de l'espace extra-atmosphérique. Notre association représente en fait 250 fabricants d'aéronefs et de pièces d'aéronefs, et cela englobe les astronefs dont les ventes, en comparaison, ne représentent qu'un pourcentage relativement faible de nos activités.

L'une des choses sur lesquelles il me semble que je devrais insister est que l'industrie aérospatiale, comme je le disais dans mes commentaires, a connu une croissance trois fois supérieure à celle du PIB depuis dix ans et, rien que cette année, elle générera environ 16 milliards de dollars de ventes, dont 75 p. 100 viendront de l'exportation.

D'autres commentaires se rapportaient, il me semble, à l'industrie aérospatiale dans le sens où elle est probablement le plus important employeur d'étudiants et de diplômés spécialisés, dont ont parlé plusieurs personnes, issus d'instituts de recherche. En passant, c'est l'un des emplois les mieux rémunérés au Canada, particulièrement du côté de la production, où il est possible de gagner environ 200 $ de plus qu'un employé ordinaire du secteur de la production à cause de l'exigence de compétences particulière dans cette profession.

Finalement, je devrais aussi préciser que l'industrie aérospatiale du Canada est l'un des plus gros investisseurs dans la R-D. Nous en tirons un très grand orgueil et si vous avez suivi les progrès de l'industrie aérospatiale au Canada récemment, vous avez pu voir que, chaque année, un nouveau produit sort des ateliers de Bombardier, du Dash 8 400 au Continental en passant par le Global Express, sans compter l'hélicoptère Bell Textron 427 et toute une série de dérivés des moteurs qui permettent à ces véhicules de se déplacer.

• 1030

La conclusion à votre question est qu'en maintenant la R-D pour lancer des produits et créer des emplois, pour ramener au pays des dollars frais en réponse à une très grande demande de produits de qualité au Canada, à notre avis, on ne peut être que gagnants. Et pour cela, il faut prendre de très gros risques, ce qui nécessite un partenariat avec le gouvernement fédéral.

Si vous permettez, j'aimerais ajouter deux observations en guise de complément à certains des commentaires qui ont été faits dans les exposés présentés ici. Je tiens particulièrement à féliciter le gouvernement pour l'investissement continu qu'il fait dans l'industrie aérospatiale, certainement avec le soutien du président et du comité, par le biais du Programme de partenariats en technologie du Canada. Nous avons été encouragés par les commentaires qu'a faits le ministre Martin, qui disait que le gouvernement compte maintenir son engagement à aider l'industrie aérospatiale. Cependant, il y a deux choses dont j'aimerais parler, qui requièrent aussi un investissement.

Le Conseil de recherche nationale travaille depuis 40 ans en partenariat avec l'industrie et il y a deux initiatives actuellement en oeuvre actuellement qui nous troublent. Il s'agit du Turbine Environmental Research Centre et de l'Advanced Manufacturing Technology Centre, qui coûteront chacun de 30 à 35 millions de dollars. L'industrie aérospatiale du Canada a déjà investi 15 millions de dollars dans la première et 12 millions dans la deuxième, en attendant une réaction du gouvernement fédéral.

Une occasion se présente ici, où l'industrie est prête à investir pour offrir des opportunités aux étudiants qui sortent des universités et pour continuer de développer des produits, ce qui est aussi indispensable pour assurer notre succès dans le futur. Je vous dirais donc que, monsieur, qu'il est important de stimuler cet environnement pour l'emploi, d'offrir un retour sur l'investissement sous la forme d'impôts. C'est sûr que le défi, certainement, comme l'ont fait remarquer plusieurs de nos collègues ici présents, est que ce n'est pas uniquement le salaire, mais aussi l'environnement qui retiendra les chercheurs au Canada.

Merci.

M. Ken Epp: Merci beaucoup. J'aimerais bien avoir encore une demi-heure pour discuter avec vous mais j'ai encore d'autres questions, et au rythme où vont les choses, il se peut bien que je n'aie pas le temps de toutes les poser.

J'aimerais m'adresser à M. Bryan et à Mme Cook. Je suis très étonné que cette question de déduction fiscale des outils de mécanicien n'arrête pas de revenir sur le tapis. Je suis député depuis maintenant un peu plus de six ans et j'en entends parler depuis mon arrivée ici. L'un de nos députés a présenté un projet de loi qui a passé presque toutes les étapes au Parlement avant d'expirer, mais la question n'arrête pas de revenir sur le tapis.

Donc, j'aimerais vous dire que nous continuerons de faire pression à ce sujet, en ce qui nous concerne. Nous sommes très au fait de la question. Des gens de ma propre circonscription m'en parlent pour ainsi dire continuellement, et je crois que c'est l'une des grandes lacunes de notre régime fiscal. Je ne vous demanderai pas d'en dire plus là-dessus, puisqu'il me semble que vous avez été au fond des choses. J'aimerais vous poser une question, cependant, sur le fonds de l'assurance-emploi. Vous n'en avez pas parlé aujourd'hui, mais vous l'avez effectivement mentionné dans votre présentation, c'était à propos du fonds de l'assurance-emploi.

De toute évidence, c'est un coût énorme pour l'industrie automobile en particulier, et c'est un excédent. J'aimerais vous donner une petite minute pour nous dire pourquoi il faudrait le réduire.

M. Michael Bryan: Ce dont nous parlions ici c'est la cotisation de l'employeur à l'assurance-emploi et, bien sûr, cela s'ajoute aux autres coûts dans une industrie qui voudrait engager du monde et qui a des postes vacants, mais qui ne peut pas se permettre de le faire parce qu'elle subit des pressions constantes, comme dans toute entreprise, venant du haut de la structure hiérarchique, pour contenir les prix et réaliser des gains d'efficience.

• 1035

Toutes ces choses, comme les taxes sur les outils, ne sont que des frais supplémentaires que doivent débourser les entreprises et les particuliers et qui les empêchent d'exploiter et de développer leur entreprise comme ils devraient pouvoir le faire.

M. Ken Epp: J'ai une question à vous poser. Si je devais soutenir, par exemple, à titre de député, que les règles devraient être changées de manière à ce que les cotisations de l'employeur et de l'employé soient égales et qu'elles devraient être toutes deux réduites de manière équitable en fonction des besoins réels de ce fonds, seriez-vous d'accord?

M. Michael Bryan: Oui.

M. Ken Epp: Je le pensais bien. Merci beaucoup.

M. Michael Bryan: C'est plein de bon sens. Merci.

M. Ken Epp: J'en suis heureux.

Il ne me reste presque plus de temps, mais je voudrais poser une question à M. St-Onge.

J'aimerais tout d'abord vous féliciter pour vos petits déjeuners, ces petits déjeuners Bacon et Crâne d'oeuf. Je ne sais pas si d'autres membres du comité ont eu l'occasion d'assister à l'un d'eux. Je les recommande fortement. Ils sont des plus informatifs et, en fait, très stimulants. C'est important que nous, les parlementaires, voyions ce qui se passe dans le domaine de la R-D dans nos universités et les autres installations de R-D de tout le pays. À mes yeux, c'est le germe que l'agriculteur sème au printemps dans l'espoir d'une récolte à l'automne. Le jour où nous cesserons de le faire, je crois que serons vraiment mal pris. Je tiens donc à vous féliciter.

J'aimerais que vous étoffiez un peu l'un des commentaires que vous avez faits. Vous avez posé une question sur l'utilisation de fonds de contrepartie. C'était à propos, je crois, de financement de l'industrie, des universités et du gouvernement. Je n'ai pas très bien compris ce que vous vouliez dire. Vous avez aussi dit qu'il faudrait faire certains changements aux règles du financement de contrepartie si l'investissement vient de l'étranger. Pourriez-vous préciser un peu votre pensée?

M. Denis St-Onge: Je laisserai mon collègue, le professeur Alper, répondre à votre question.

Je vous remercie pour vos commentaires sur les petits déjeuners Crânes d'oeuf. J'aimerais signaler à tout le monde qu'il y en aura un la semaine prochaine, où il sera question de climat et de catastrophes, un sujet dont parlaient nos collègues.

Howard, vous avez la parole.

M. Howard Alper (président sortant, Collectif en faveur des sciences et de la technologie): J'aimerais ajouter un commentaire essentiel pour que ce soit mieux apprécié. Les petits déjeuners Bacon et Crânes d'oeuf sont une initiative conjointe du Collectif en faveur des sciences et de la technologie et du CRSNG. Nous apprécions véritablement cette collaboration avec le CRSNG. C'est une initiative fantastique. Je dois vous dire que j'en ai parlé dans d'autres pays à des gens qui occupent des positions similaires, et qu'ils vont essayer de lancer le même genre d'initiative dans leur propre parlement.

À propos de la question industrie-universités, le président du CRSNG a mentionné les différents programmes qu'offre son organisme, dont certains sont aussi offerts par d'autres conseils. Il y a notamment un partenariat universitsés-industrie où le secteur de l'entreprise fournit un certain financement—de l'argent comptant, parfois combiné à un appui non financier—doublé d'un financement égal du conseil subventionnaire. C'est un levier financier très important. Il est important pour les universités parce qu'il augmente le soutien aux projets de recherche, et pour l'industrie, puisqu'il permet de la convaincre que son investissement de, disons, 50 000 $ par année donne en réalité 100 000 $ à la recherche.

C'est extrêmement efficace, et cela ne fonctionne pas uniquement entre les universités et l'industrie. Je pourrais mentionner, par exemple, un programme entre le CRSNG, le CNR et les universités. Je participe à l'un d'eux, qui a abouti récemment à plusieurs brevets. C'est extrêmement précieux, lorsque la compagnie apporte aussi sa contribution.

D'un point de vue personnel, je peux vous dire d'après mon expérience à divers conseils d'administration d'entreprises à l'étranger—aux États-Unis et en Corée—qu'il serait très avantageux pour le pays de permettre au secteur étranger des affaires de participer au financement de contrepartie.

• 1040

Il y a une clause conditionnelle: la propriété intellectuelle doit résider au pays. Cette condition est très importante, parce que si je siège à un comité qui envisage d'investir 30 millions de dollars de l'argent de l'industrie—c'est un exemple réel—et que j'examine des demandes du Canada par rapport à d'autres des États-Unis, de la Grande Bretagne, etc., toutes choses étant égales par ailleurs, si je vois que l'investissement étranger de contrepartie est autorisé, cela fera pencher la balance. Cela fait effectivement pencher la balance. Cela mérite donc sérieuse réflexion.

M. Ken Epp: Je vous remercie.

Le président: C'est moi qui vous remercie, monsieur Epp.

[Français]

Monsieur Dubé.

M. Antoine Dubé (Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, BQ): Plusieurs intervenants ont élaboré sur un point particulier, rappelant le fait que le Canada est au dernier rang des pays du G-7, à peu près sur un pied d'égalité avec l'Italie, pour ce qui est de la recherche et du développement.

Certains d'entre vous ont parlé de la question de l'impôt. M. Smith parlait de l'écart de 4 p. 100 entre le Canada et les États-Unis comme étant un incitatif à l'exode des cerveaux. Cela a été un peu nuancé par M. St-Onge, qui a dit que c'était le cas, mais qu'il n'y avait pas seulement cela. Il a dit que les conditions de travail des chercheurs avaient une influence là-dessus et qu'on était également en retard à cet égard.

Je voudrais parler de la question de l'écart au niveau des impôts. Je suis membre du Comité de l'industrie, et mardi, une étude de Statistique Canada et des gens de l'Industrie démontrait qu'il y avait effectivement un écart entre le Canada et les États-Unis, mais que des pays comme la France et l'Allemagne avaient des taux d'imposition supérieurs aux nôtres. Mais, bien sûr, au Canada, nous regardons nos voisins américains, et cela joue.

Les députés du Bloc québécois sont de ceux qui préconisent une réduction des impôts pour ceux qui gagnent 40 000 $ et plus. Si vous avez ces données, pouvez-vous nous donner une idée du salaire moyen versé dans chacun de vos domaines, excluant évidemment les administrateurs, les pdg? Quel est le salaire du travailleur moyen de votre industrie?

M. Michael Bryan: Monsieur, le salaire des techniciens dont j'ai parlé tout à l'heure est entre 20 000 $ et 40 000 $ par an.

M. Antoine Dubé: Et dans les autres secteurs?

[Traduction]

M. Peter Smith: En aérospatiale, il oscillerait entre 40 000 et 60 000 $. Comme je l'ai dit tout à l'heure, dans mon exposé, cet emploi est probablement un des plus rémunérateurs dans le secteur manufacturier en raison tout simplement des exigences.

Toutefois, si je puis simplement renchérir sur ce que vous avez dit, je ne crois pas que l'industrie de l'aérospatiale soit différente des nombreux autres secteurs qui viendront témoigner devant le comité. Ce que vous avez dit au sujet des impôts est tout aussi valable pour l'Angleterre, la France et ainsi de suite, mais, malheureusement, notre voisin est l'un des plus grands pays du monde et, que cela vous plaise ou non, c'est lui qui achète la plus grande partie de nos exportations.

Par exemple, très peu savent que, dans le secteur de l'aérospatiale, 60 p. 100 environ de mes entreprises sont la propriété de sociétés américaines qui exploitent des filiales au Canada. Donc, quand on pense à Pratt & Whitney Canada, une filiale de United Technologies des États-Unis, ou à plusieurs autres entreprises qui vous viennent facilement à l'esprit étant donné votre connaissance de l'industrie de l'aérospatiale, certaines comparaisons sont faites entre le travailleur canadien et le travailleur américain, surtout au siège social de l'entreprise.

Nous brassons des affaires à l'étranger. Nous sommes des fournisseurs d'Airbus et de Boeing. Toutefois, à cause de la proximité du Canada aux États-Unis, on a toujours tendance à comparer les taux d'imposition des deux pays.

• 1045

M. Paul Kovacs (premier vice-président, Élaboration des politiques et économiste en chef, Bureau d'assurance du Canada): J'aimerais simplement rajouter que, du point de vue de l'assurance aussi, la fiscalité internationale a beaucoup d'importance dans le choix du pays où investir. Dans la mesure où les taxes prélevées de l'industrie ici au Canada excèdent celles de la France, des États-Unis ou d'ailleurs, il est très difficile d'attirer et de conserver des capitaux au pays.

L'impôt comme un des principaux et nombreux facteurs déterminants de l'investissement prend de plus en plus d'importance dans le monde actuel où règne la concurrence. Il importe donc énormément de constamment faire la comparaison avec le régime fiscal d'autres pays.

Il existe de grands écarts, selon l'industrie. Dans l'industrie de l'assurance, la situation européenne est très importante. Nous faisons constamment des comparaisons. Actuellement, le fardeau fiscal de nos sociétés est beaucoup plus lourd que celui de bien des pays européens et de bien des compagnies d'assurance. Il entraîne une certaine fuite des capitaux, ce qui n'est pas bon pour le pays.

[Français]

M. Denis St-Onge: Étant donné la nature du groupe que je représente ici aujourd'hui, je ne peux pas vous donner de salaire moyen. Ce n'est pas possible car il y a trop de variété. Un professeur d'université fait peut-être en moyenne 65 000 $, alors qu'un travailleur en biotechnologie fait un tout autre salaire. Je ne peux pas vous donner cela.

Ce que je voulais faire ressortir, c'est que les impôts plus bas ne sont pas la principale raison pour laquelle des gens quittent le Canada. La principale raison pour laquelle un chercheur quitte le Canada, c'est que les conditions de recherche sont meilleures ailleurs qu'ici. Il y a de meilleurs laboratoires, il y a un meilleur environnement, il y a plus d'étudiants et ainsi de suite. Vous avez sans doute lu comme moi la revue L'Actualité, dans laquelle on donne les résultats d'une étude sur les conditions dans les universités au Québec. Il y a un énorme problème. C'est vrai qu'elles perdent de très bons chercheurs parce que les conditions sont meilleures dans d'autres provinces ou aux États-Unis.

La réduction des impôts, à long terme, est évidemment une très bonne chose, mais il ne faudrait pas qu'on dise qu'en réduisant les impôts, on va garder nos chercheurs. On ne gardera pas nos chercheurs en réduisant les impôts. On va garder nos chercheurs et on va faire de la bonne recherche qui va contribuer au bien-être des Canadiens en créant de meilleures conditions de recherche au Canada.

M. Antoine Dubé: Si j'ai encore du temps, j'aimerais traiter d'un autre aspect que je trouve intéressant. Monsieur parlait de l'éducation internationale. D'après vous, si le gouvernement canadien devait choisir une priorité, serait-il plus important qu'il envoie plus d'étudiants faire une expérience d'étude à l'étranger ou qu'il tente d'attirer ici des gens de l'étranger?

M. Jim Fox: Je pense que la mobilité des étudiants dans les deux directions est importante. On ne peut pas dire qu'une direction est plus importante que l'autre. Dans l'étude du Conference Board, on indique que les gains économiques sont plus forts en termes de mobilité des étudiants du Canada à l'étranger. Mais à long terme, pour créer des relations économiques, il faut un échange dans les deux directions.

M. Antoine Dubé: Mais la question de la propriété intellectuelle est quand même importante.

M. Denis St-Onge: Oui, elle est très importante. S'il y a des gens qui viennent faire des études ici et travailler dans des laboratoires, quelles que soient les conditions—et on espère que la recommandation concernant les matching funds sera acceptée—, il faut s'assurer que la propriété intellectuelle de la recherche faite au Canada demeure au Canada. C'est évident.

M. Antoine Dubé: Autrement, on investit dans un panier percé.

M. Denis St-Onge: C'est beau d'être généreux, mais...

Le président: Madame Humphries.

Mme Jennifer Humphries (directrice, Services aux membres et services canadiens, Bureau canadien de l'éducation internationale): J'aimerais ajouter quelque chose.

• 1050

Nous accordons la priorité aux deux directions. Si nous voulons encore des étudiants étrangers au Canada, c'est que cela fait partie de l'éducation des étudiants qui ne peuvent pas sortir du pays. Les Canadiens qui restent ici vont pouvoir communiquer avec les gens d'autres pays ici, au Canada.

Deuxièmement, nous avons fait des études auprès des employeurs qui indiquent que les employeurs canadiens veulent aujourd'hui que nos étudiants aient plus d'expérience internationale, qu'ils puissent parler d'autres langues et aient même étudié et travaillé à l'étranger. C'est une étude qui a été faite il y a seulement un an.

M. Antoine Dubé: Par qui?

Mme Jennifer Humphries: Par nous. Cette étude a été faite auprès d'une vingtaine d'employeurs, mais nous aimerions en faire plus. En fait, c'est un changement. Les employeurs s'intéressent maintenant davantage à l'international.

M. Antoine Dubé: Je ne suis pas membre du Comité des finances, mais j'aimerais savoir si cette étude pourrait nous être remise si elle est déjà disponible.

Mme Jennifer Humphries: Oui, nous l'avons ici et il y a aussi une version française. Je peux les donner au comité.

M. Antoine Dubé: Merci.

[Traduction]

Le président: Monsieur Dubé, merci.

Monsieur Cullen, suivi de M. Szabo. Nous passerons ensuite à Mme Bennett.

M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Merci, monsieur le président.

J'avais une question à poser à M. Smith et à M. Fox, mais je me vais me contenter d'interroger M. Smith et je laisserai du temps à mes collègues.

Monsieur Smith, j'ignore si cette question relève de l'exercice de consultations prébudgétaires ou pas, mais je suis curieux de savoir où en est... l'ITAR. J'ai de la difficulté à m'y retrouver dans les acronymes, mais il s'agit essentiellement des mesures prises par les États-Unis pour rendre plus difficile l'accès de l'industrie de la défense canadienne aux marchés de l'industrie de la défense américaine. Où en est-on?

De plus, en ce qui concerne le PTC et l'Organisation mondiale du commerce, allons-nous pouvoir rendre le programme conforme ou devrions-nous plutôt nous tourner vers d'autres outils d'intervention ou en rajouter?

M. Peter Smith: Monsieur Cullen, je vous remercie.

En réalité, ITAR désigne les règles concernant le trafic international des armes qui ont été modifiées récemment, c'est-à-dire en avril dernier. À priori, vous avez raison de dire qu'elles ont nui à la capacité des entreprises canadiennes de travailler en collaboration avec des homologues américains à des technologies qui auraient été déclarées secrètes pour des raisons de sécurité nationale aux États-Unis.

Nous avons travaillé exceptionnellement fort avec nos membres et avec les personnes des sièges sociaux aux États-Unis en vue de résoudre le problème. En fait, il en a été question lors de la rencontre entre le premier ministre Chrétien et le président Clinton, il y a environ deux semaines.

Actuellement, de hauts fonctionnaires du Département d'État des États-Unis et de notre ministère des Affaires étrangères et du Commerce international se rencontrent pour discuter de trois questions. La première est la définition des données technologiques ou données techniques. La double citoyenneté donne lieu à des préoccupations sur le plan de la sécurité. Il y a aussi la nécessité, pour le Canada, d'harmoniser ses mesures de contrôle des exportations en vue de rassurer le département d'État que le Canada n'est pas, comme il le croit, un pays d'où l'on peut importer leur technologie secrète.

J'ai espoir que nous trouverons une solution. Le processus a été très lent, mais il mènera, selon moi, à un règlement qui permettra de rétablir les échanges commerciaux.

La deuxième question mentionnée était le Programme de partenariats technologiques du Canada, le PTC, dont on a interjeté appel devant l'OMC dans l'affaire d'Embraer et de son recours à PRO-EX. Nous connaissons tous les résultats. Le programme PRO-EX utilisé par la société brésilienne Embraer a été jugé non conforme et, dans le cas du Canada, le PTC aussi parce qu'il était perçu comme étant une subvention à l'exportation prohibée.

Au sein de l'association, nous avons collaboré avec Industrie Canada et nous sommes heureux de dire que le Programme de partenariats technologiques a été restructuré de manière à en retrancher la partie s'appliquant à des produits particuliers, de sorte qu'il ne devrait plus passer pour une forme de subvention prohibée.

En fait, je crois savoir que le ministre Manley a accepté de déposer les modalités révisées du programme devant le groupe spécial de l'OMC d'ici au 18 novembre. Des pourparlers sont en cours avec les Brésiliens, ce qui est le processus normal lorsqu'il y a interjection d'appel devant l'OMC.

• 1055

À nouveau, je crois qu'avec la collaboration des hauts fonctionnaires et, certes, avec l'appui du gouvernement, nous avons réussi à trouver une solution à ces deux questions.

Le président: Je vous remercie.

Madame Bennett.

Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.): Merci, monsieur le président.

Tous les exposés étaient excellents et assez explicites.

J'aurais simplement une petite question à poser à M. Fox au sujet de la mobilité des étudiants dans les deux sens. Je suppose qu'une grande partie de l'intérêt réside dans les véritables échanges culturels et l'acquisition de langues, ainsi que l'aise qu'ont ensuite ces personnes à l'étranger. Certes, nous avons constaté par nous-mêmes les bienfaits du Programme de stages internationaux pour les jeunes dont vous avez parlé. Lors de notre récent voyage en Chine, il était extraordinaire de voir ces jeunes trilingues qui pouvaient se trouver un emploi n'importe où dans le monde du simple fait qu'ils connaissaient toutes les cultures.

Ce que j'aimerais savoir, c'est ce que fait votre organisme au sujet de l'apprentissage à distance et de l'éducation en ligne? Cela ne finit-il pas par livrer concurrence à ce que vous tentez de faire? Existe-t-il un moyen grâce auquel les universités canadiennes pourraient faire davantage sur ce plan simplement en tant que source de revenu?

De plus, comme en témoigne la diminution du nombre d'inscriptions à l'université, manifestement, certains étudiants canadiens sont vexés que l'on cherche à attirer des étudiants de l'étranger qui paient des frais de scolarité plus élevés. Cela pourrait faire baisser le nombre d'étudiants canadiens qui sont admis, cependant.

J'aimerais donc que vous m'éclairiez a) au sujet de l'éducation en ligne et comment cela cadre avec votre organisme et b) comment nous pouvons faire en sorte de promouvoir ce que vous tentez de faire sans rencontrer de résistance politique.

M. Jim Fox: Tout d'abord, notre organisme a comme membre des collèges, des universités, des commissions scolaires et d'autres organisations à caractère éducatif au Canada. Par conséquent, nous avons une vue assez globale de l'éducation internationale. Le support nous intéresse au plus haut point et la possibilité de faire cette éducation en ayant recours au multimédia est grande, non seulement au niveau des études supérieures, mais à tous les niveaux. En faire une réalité représente un défi de taille.

Nous commençons à offrir certains cours d'éducation internationale à distance et dans les multimédias, mais c'est bien trop peu. Actuellement, que je sache, nous sommes incapables d'offrir à l'échelle internationale un programme complet à distance, alors qu'en Australie, on offre des programmes à temps plein à plus de 30 000 étudiants. C'est à peu près le nombre d'étudiants que nous avons ici au Canada.

Il y a beaucoup à faire. C'est un projet qui a tout l'appui de notre organisme. Lorsque nous voyageons à l'étranger, nous nous rendons compte que l'éducation canadienne suscite beaucoup d'intérêt, tant à distance qu'au Canada. On reconnaît que notre éducation est d'une qualité très spéciale, je crois. Nous sommes perçus comme les meilleurs pour ce qui est de l'éducation, que ce soit à distance ou au Canada. Nous ne réalisons tout simplement pas notre potentiel—nous n'avons même pas commencé à le faire.

Le président: Y a-t-il d'autres questions, madame Bennett?

Mme Carolyn Bennett: Non, je vous remercie.

Le président: Monsieur Szabo.

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Je vous remercie.

Monsieur Anderson, vous avez mentionné dans une partie de votre mémoire qu'il faudrait essentiellement faire des «réductions générales d'impôt». Pouvez-vous m'en dire davantage sur ce que vous entendez par là?

M. George Anderson: Oui. À mon avis, les réductions d'impôt devraient être à la fois... J'estime que les réductions de l'impôt sur le revenu des particuliers sont prioritaires. Les sondages commencent à révéler que les Canadiens, en dépit des gouvernements qui disent avoir réduit les impôts, ne voient aucune progression de leur revenu net. Ils auront confiance dans l'avenir—et dans l'avenir de l'économie en particulier, selon moi—seulement s'ils ont le sentiment réel d'avoir un certain revenu disponible à investir dans toutes ces choses que les familles jugent importantes, y compris prendre soin de leurs enfants et les faire instruire, ce qui importe beaucoup aux Canadiens.

M. Paul Szabo: Si vous aviez à rédiger un rapport qui recommande des réductions générales d'impôt, quelles réductions proposeriez-vous au juste de faire?

M. George Anderson: Nous commencerions par réduire, je crois, l'impôt sur le revenu des particuliers. Il faudrait commencer par résoudre la question de la progression par tranches. Ensuite, pour ce qui est des entreprises, nous envisagerions une baisse des charges sociales, parce qu'elles tuent l'emploi.

• 1100

M. Paul Szabo: D'accord. Il y a 14 millions de contribuables au Canada. Si chacun d'entre eux payait 100 $ de moins d'impôt, cela nous coûterait 1,4 milliard de dollars.

M. George Anderson: C'est juste.

M. Paul Szabo: Avez-vous des suggestions à faire au comité quant au nombre de dollars de réductions générales d'impôt qui équivaudrait à ce dont ont besoin les Canadiens?

M. George Anderson: Non. Je ne peux pas vous donner de chiffre précis.

M. Paul Szabo: Serait-ce 1 000 $? Cela ferait-il une différence?

M. George Anderson: Bien sûr que cela ferait une différence! N'importe quel montant ferait une différence. Plus il sera élevé, mieux ce sera.

Ce que j'essaie de dire, c'est que, si nous optons pour cette voie—je crois que c'est ce que fera le gouvernement—, il faut le faire d'une manière qui est jugée significative et concrète. Il faut éviter qu'en bout de ligne, les contribuables se fassent dire par les analystes que la réduction d'impôt revient à 35 $ dans leurs poches à la fin de l'année. Ce ne serait pas une réduction concrète.

Souvent, les réductions envisagées par le gouvernement sont en fait des montants de cette ampleur et, pire encore, ils sont ensuite récupérés par d'autres moyens. Ainsi, l'effet net n'est pas une diminution du tout, mais plutôt une augmentation. Je dirais donc que tout montant significatif sera bien accueilli par les contribuables.

M. Paul Szabo: Qu'entendez-vous par significatif? Nous n'en sommes pas sûrs.

M. George Anderson: En toute franchise, cela relève autant du domaine politique que du domaine économique.

M. Paul Szabo: D'accord. J'ai une brève question à poser à M. Smith.

Je suis heureux que vous ayez parlé de l'impôt sur les sociétés. En règle générale, au cours des discussions, cette question semble avoir moins de priorité que les réductions d'impôt sur le revenu des particuliers.

Quand on compare les taux canadiens aux taux américains, êtes-vous conscient d'un changement ou de dispositions de l'un ou de l'autre régime fiscal ou régime de réglementation dont il faudrait aussi tenir compte?

M. Peter Smith: Le Canada a certes un régime de crédits fiscaux à la recherche très favorable, beaucoup plus favorable que ce que l'on trouverait aux États-Unis. Toutefois, en réalité, bien que je parle de l'écart entre l'imposition des sociétés au Canada et aux États-Unis—le taux est manifestement plus élevé au Canada, comme je l'ai dit—, j'ai été ravi d'entendre le ministre Martin dire, dans sa déclaration d'il y a deux jours, qu'il était disposé à l'examiner dans l'optique d'avoir des taux compétitifs par rapport au reste du monde.

L'écart n'est pas grand, mais il demeure suffisamment important pour faire la différence entre une marge de 5 p. 100 ou une marge de 7 p. 100. Cela compte quand on décide où investir.

En réponse à votre question, cependant, je crois effectivement que les entreprises canadiennes qui font de la R-D, comme l'industrie aérospatiale canadienne, évoluent dans un contexte très intéressant en raison des crédits d'impôt à la recherche. Nous avons exprimé notre opinion à cet égard, soit qu'il s'agit certes là d'éléments que le gouvernement a mis en place et entretenus et qui attirent de l'investissement.

Le président: Monsieur Szabo, je vous remercie beaucoup.

J'aimerais ajouter quelques observations et poser peut-être une question concernant toute la question des réductions d'impôt. M. Szabo fait valoir à bon droit qu'une réduction d'impôt de 100 $ ne fera pas vraiment une différence—c'est-à-dire si l'argument en faveur des réductions d'impôt consiste uniquement à laisser plus d'argent dans les poches du contribuable.

Je crois que le débat à ce sujet englobe beaucoup plus grand que cette question. La question des réductions d'impôt a aussi un rapport avec l'incitation au travail,... Ce sont des questions économiques extrêmement importantes si nous souhaitons avoir une économie saine. Donc, bien qu'il soit important que les gens sachent qu'on leur enlève moins d'argent, il est aussi important de savoir ce qui sera fait de cet argent.

• 1105

Si nous voulions mettre en place un régime fiscal compétitif, il est incontestable qu'il faudrait réduire les impôts pour avoir un impact. J'estime que, bien qu'une grande part du débat ait porté sur l'impôt sur le revenu des particuliers, toute la question de l'impôt des sociétés au Canada en particulier doit prendre plus d'importance. D'après ce que j'ai lu sur l'impact d'une réduction de l'impôt des sociétés, les retombées sont phénoménales.

Comme l'a fait remarquer, avec raison, M. Smith, les gens commencent à analyser la situation pour voir où ils vont placer leur argent. Le placeront-ils au Canada ou aux États-Unis? Par ailleurs, des endroits comme l'Irlande attirent beaucoup d'investissement. Si vous examinez les courbes de migration entre les États-Unis et l'Irlande, vous constaterez qu'en réalité, plus de gens retournent en Irlande qu'il n'y en a qui viennent aux États-Unis. L'unique explication tient aux avantages économiques d'un régime fiscal compétitif.

Monsieur St-Onge, vous avez dit que les impôts ne sont pas forcément la raison pour laquelle les gens partent, mais plutôt les conditions de travail. Puis-je vous demander cependant si, selon vous, les meilleures conditions de travail ne seraient pas dues aux impôts?

M. Denis St-Onge: Je ne puis honnêtement pas vous répondre. Je ne connais pas assez l'économie des autres pays. Vous savez, pourquoi déménage-t-on à Boston ou à San Diego? Il existe probablement deux raisons—les laboratoires sont plus grands et mieux équipés, et les hivers y sont plus cléments.

Je ne peux pas répondre à votre question, bien que j'aie fait des recherches. C'est pourquoi l'information que j'ai donnée était fortuite. Je n'ai pas de données solides à ce sujet. Toutefois, je ne connais pas d'étude, quel que soit l'organisme qui l'ait effectuée, qui appuierait l'argument voulant que les chercheurs partent en raison des impôts. C'est tout simplement sans fondement. De telles données n'existent pas. Par contre, ils y vont pour travailler dans de meilleurs laboratoires.

Le président: Oui, Howard.

M. Howard Alper: Puis-je ajouter un commentaire? Je ne crois pas que ce soit la seule raison. Oui, ils partent en partie à cause de l'impôt sur les sociétés. Si l'entreprise X décide de s'installer en Irlande, c'est en raison, entre autres, du coût de la R-D et, à mon avis, il s'agit là d'un argument de poids pour notre pays. Les mêmes recherches, disons dans le domaine pharmaceutique, coûtent environ 40 p. 100 de moins au Canada qu'aux États-Unis—40 p. 100—et on devrait se servir de cet argument pour attirer les entreprises.

Donc, oui, l'impôt des sociétés ne doit pas décourager les entreprises à venir s'installer ici. Mais il n'y a pas que les impôts, il y a aussi le coût de la R-D, le coût annuel par individu. Par exemple, si je prends mon domaine de spécialisation, le coût est de 210 000 $ par année aux États-Unis, en dollars américains, et de 140 000 $ au Canada, en dollars canadiens, soit à peu près la moitié.

Le président: Je ne veux pas induire qui que ce soit en erreur. Je tiens à être très clair. Je ne crois pas, moi non plus, que les impôts soient le seul facteur. Autrement, les Îles Caïmans seraient le centre de l'univers, n'est-ce pas? Il n'y a pas que cela. Toutefois, il ne faudrait pas prendre cette question à la légère. Elle a plus d'importance que nous ne le croyons.

Monsieur Brzustowski.

M. Thomas Brzustowski: Monsieur le président, j'aimerais ajouter quelque chose aux propos de M. Alper. Il y a le coût de la recherche, mais également l'existence d'un bassin important de travailleurs hautement qualifiés dans l'industrie micro-électronique. Personne ne bougerait s'il s'agissait là d'un facteur restrictif. Or, si nous arrivons à maintenir le coût de la recherche à son niveau actuel et à fournir en plus des travailleurs hautement qualifiés, nous attirerons des entreprises.

Le président: Monsieur Smith.

• 1110

M. Peter Smith: J'ai répondu plus tôt à une question sur le taux d'imposition du revenu des particuliers au Canada et aux États-Unis. Je tiens tout simplement à préciser que l'industrie aérospatiale canadienne fait affaire avec environ 48 pays. Quand vous vendez un avion, vous offrez des garanties, vous vous occupez des réparations, ainsi de suite, et le personnel, vu sa grande mobilité, peut souvent aller n'importe où pour travailler sur un avion, en raison des garanties. Il va donc pouvoir établir des comparaisons pour ce qui est de l'impôt des particuliers.

Par ailleurs, la compagnie Bombardier, par exemple, qui a des installations en Irlande et aux États-Unis, où elle a fait l'acquisition du Learjet, et qui a des centres d'entretien dans divers pays, a elle aussi l'occasion de voir comment sont traitées les entreprises dans d'autres pays.

Donc, si je me fie à vos propos et à ceux du ministre des Finances, le fait qu'on veuille procéder à une étude comparative de l'impôt des sociétés et des particuliers en vigueur dans divers pays est pour le moins encourageant. Les Canadiens sont aujourd'hui beaucoup mieux informés en raison de la nature du travail qu'ils effectuent. La mobilité des travailleurs, qui n'existait même pas il y a 10 ans, est aujourd'hui phénoménale. Donc, les gens font des comparaisons, et ils font des choix. Évidemment, dans notre cas, nos travailleurs savent que leurs compétences sont transférables et qu'elles font partie intégrante de l'économie du savoir.

Voilà le défi que doivent relever le gouvernement et l'industrie—faire du Canada un lieu de travail satisfaisant et donner aux travailleurs, comme vous l'avez dit, les incitatifs dont ils ont besoin pour les encourager à rester ici. Les commentaires formulés cette semaine, et les solutions explorées par le comité dans ces deux domaines, sont fort encourageants.

Le président: Merci.

Monsieur Kovacs.

M. Paul Kovacs: Reprendre le contrôle des finances du pays a représenté tout un défi. Il a fallu faire beaucoup de sacrifices. Nous avons atteint notre objectif et nous avons repris la situation en main, sauf que cela a pris plusieurs années et des décisions très difficiles.

Je pense qu'au cours de cette période, la population s'est dit que ses efforts seraient récompensés une fois qu'on se retrouverait dans la situation que l'on connaît actuellement. Il est tout à fait normal, comme l'a indiqué le gouvernement, que ces efforts soient récompensés. Cette récompense se manifeste sous diverses formes, comme la réduction des impôts et l'investissement dans des secteurs clés. Nous passons beaucoup de temps à parler de recherche, des universités, ainsi de suite, où nous investissons de façon fort judicieuse. Or, il y a d'autres secteurs dont il faut tenir compte.

Les impôts constituent un élément primordial, et c'est quelque chose que la population va surveiller de près au cours des prochaines années. Il faudra du temps pour lui remettre cette récompense importante. Or, 35 $ ou 100t, s$ sur un an ne semble peut-être pas beaucoup, mais la réduction risque d'être appréciable sur cinq ans. Voilà le genre de choses que les Canadiens s'attendent à recevoir et que nous sommes maintenant prêts à leur donner.

D'après le milieu des affaires, et les gens avec qui je travaille, il faudrait accorder la priorité aux impôts des particuliers. Il faudrait réduire ces impôts sans tarder, et de façon radicale.

Pour ce qui est de l'impôt des sociétés, on a l'impression que notre régime fiscal ne se compare pas à celui d'autres pays. Cela a un impact sur l'ensemble du milieu des affaires et sur la création d'emplois. Nous n'arrivons pas à créer des emplois intéressants.

J'espère que nous allons bientôt nous attaquer aux écarts qui existent au chapitre de l'impôt des sociétés, et que nous allons faire de sérieux efforts pour les réduire. Ils sont tellement importants qu'ils ont un impact sur les emplois et l'avenir des travailleurs dans ce pays. Nous devons nous attaquer très bientôt à ce problème.

En résumé, nous avons assumé tout un défi quand nous avons décidé de remettre de l'ordre dans nos finances. Nous avons accompli de l'excellent travail. Or, le moment est venu de récompenser la population de ses efforts, puisque l'état de nos finances nous le permet. La réduction des impôts est une solution parmi d'autres, mais pour les particuliers, elle constitue sans doute une priorité, ce qui est tout à fait normal. Je pense que nous serons en mesure de réduire les impôts sur plusieurs années. Nous devrons ensuite nous attaquer à l'impôt des sociétés.

Le président: Madame Cook.

Mme Beverlie Cook (vice-présidente, Association des industries de l'automobile du Canada): Merci beaucoup, monsieur le président.

Nous avons mis l'accent, dans notre mémoire, sur la nécessité de réduire les impôts des particuliers et des sociétés. Or, il faudrait également réduire les impôts des petites et moyennes entreprises. Notre secteur en regroupe environ 27 000, et il s'agit essentiellement de petites entreprises.

• 1115

Nous aimerions que ces entreprises aient l'occasion d'effectuer ce que nous appelons des «investissements stratégiques». Dans notre cas, soit l'industrie de service, nous estimons que ces entreprises doivent tirer parti des possibilités qu'offre la nouvelle économie, comme le commerce électronique.

On a posé, plus tôt, une question intéressante sur la formation à distance. C'est en tout cas un domaine où des changements s'imposent. Nous devons convaincre ces petites entreprises qu'elles ont intérêt à investir. Nous devons leur venir en aide afin qu'elles puissent continuer de prendre de l'essor et ainsi s'occuper du nombre sans cesse croissant de véhicules qui sillonnent les routes.

Merci.

Le président: Merci beaucoup.

Je voudrais, au nom du comité, remercier les témoins. Ils apportent toujours une contribution utile au débat. C'est d'ailleurs le but de cet exercice: trouver des moyens utiles de contribuer à l'essor du pays.

Des défis majeurs nous attendent, mais je crois que notre pays est en mesure de les relever. Comme l'a indiqué M. Kovacs, nous avons maintenant la possibilité de prendre des décisions judicieuses.

Or, comme vous le savez sans doute, chaque fois que nous prenons des décisions, nous devons faire des compromis. Atteindre l'équilibre budgétaire était beaucoup plus facile, sur le plan décisionnel, que ce que nous sommes en train de faire maintenant. Nous allons donc continuer de nous fier aux sages conseils que vous nous donnerez, comme vous l'avez fait au fil des ans, en vue de bâtir un pays meilleur et d'améliorer la qualité de vie des Canadiens.

Encore une fois, merci beaucoup.

La séance est suspendue jusqu'à 11 h 30.

• 1117




• 1133

Le président: Je déclare la séance ouverte, et je vous souhaite à tous la bienvenue. Nous accueillons des représentants du Consortium canadien pour la recherche, du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada, de la Fédération des sciences humaines et sociales, du Conseil national de recherches du Canada, de l'Association des ingénieurs-conseils du Canada et de l'Académie canadienne du génie.

Cette table ronde a donné lieu, tous les ans, à des discussions fort intéressantes. Je suis certain que ce sera la même chose cette année. Le comité trouve ces discussions stimulantes, car elles portent sur les choix que nous devons faire pour bâtir un avenir meilleur pour notre pays.

Sans plus tarder, nous allons donner la parole au Consortium canadien pour la recherche. Je souhaite la bienvenue à M. Don McDiarmid et à Mme Francine Ford.

Mme Francine Ford (Consortium canadien pour la recherche): Merci. Bonjour, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité. Je suis la directrice exécutive de l'Association canadienne des physiciens. Nous sommes ici, mon collègue Don McDiarmid et moi, à titre de représentants du Consortium canadien pour la recherche.

Le Consortium regroupe 22 organismes qui représentent plus de 55 000 chercheurs au Canada—des physiciens, chimistes, biologistes, économistes, historiens, professeurs d'université, étudiants diplômés—oeuvrant dans diverses disciplines.

J'aimerais d'abord, au nom des chercheurs, remercier le comité pour l'appui qu'il accorde à la recherche au Canada. Nous trouvons fort encourageants les investissements qu'a effectués le gouvernement au cours des trois dernières années. Ces investissements ont, et continueront d'avoir, un impact important sur tous ceux qui envisagent de faire carrière dans le domaine de la recherche. Ceux-ci comprennent l'amélioration du financement des conseils subventionnaires, la mise sur pied de la Fondation canadienne pour l'innovation et des instituts canadiens de recherche sur la santé, et un nouveau programme de chaires, que le gouvernement a annoncé dans son discours.

J'ai appris que deux diplômés sont revenus s'installer au Canada. L'amélioration du financement les a encouragés à revenir au Canada. Le premier est un physicien en physique des plasmas qui a passé un an en France et trois ans aux États-Unis. Il est revenu l'année dernière et travaille pour un centre d'excellence situé en Ontario. Le deuxième, un ingénieur physicien de l'Université de la Saskatchewan, vient de remporter le prix John Polanyi. Il a passé trois ans à Stanford. Il est revenu l'année dernière et travaille maintenant pour le Centre d'oncologie de la région d'Ottawa. Ce prix est décerné au jeune scientifique qui se démarque le plus en Ontario. Ces personnes, et d'autres comme elles, contribuent de façon importante au bien-être futur de l'économie canadienne.

• 1135

Le Consortium a cerné les grands enjeux qui doivent être abordés dans le domaine de la recherche au cours des prochaines années. On peut les répartir en trois catégories: le financement global de l'enseignement postsecondaire, le financement continu de la recherche fondamentale par le biais des conseils subventionnaires, et le financement de la recherche scientifique au sein du gouvernement et des installations nationales connexes. Le Canada, dont l'économie a toujours reposé sur l'exploitation des ressources, poursuit son virage vers une économie axée sur le savoir et la technologie. Il est donc essentiel que nous ayons une collectivité scientifique solide et dynamique si nous voulons que le Canada demeure compétitif et qu'il fournisse de l'expertise et des travailleurs hautement qualifiés à l'industrie.

Pour y arriver, le Canada doit continuer de soutenir activement toutes les activités de recherche, allant de la recherche fondamentale à la recherche privée en passant par le transfert des technologies. Autrement, la croissance de l'industrie de haute technicité risque d'être compromise à long terme. Comme vous le savez, ces activités de recherche englobent la recherche menée par les universités, le secteur privé, et les organismes et ministères gouvernementaux.

Le Comité consultatif sur la science et la technologie a récemment encouragé le gouvernement à poursuivre les mesures prises au cours des trois dernières années en vue d'accroître le financement de la recherche fondamentale. Ce type de recherche aboutissant souvent à des résultats fort prometteurs, le Consortium exhorte le gouvernement à continuer d'améliorer le financement des conseils subventionnaires. Il est important qu'il le fasse, surtout si nous voulons améliorer notre position par rapport à nos concurrents internationaux, qui ont considérablement augmenté le soutien accordé à la recherche fondamentale ou qui se sont engagés à le faire.

Le sous-financement est plus important dans les sciences sociales. Alors qu'elles regroupent 54 p. 100 des étudiants et des professeurs dans les universités canadiennes, ces disciplines ne reçoivent que 15 p. 100 des fonds gouvernementaux consacrés à la recherche. Le Consortium encourage donc le gouvernement à corriger cette situation en doublant le budget du CRSH sur une période de trois ans. Nous demandons également au gouvernement d'augmenter le budget du CRSNG de 80 millions de dollars l'an prochain, et ce, afin de lui permettre de mettre en oeuvre les programmes qui ont été approuvés par la FCI et de financer les activités nouvelles des universités, notamment les programmes de science informatique. Nous aimerions également que le gouvernement songe à allouer 1 p. 100 du budget national de la santé aux instituts canadiens de recherche sur la santé.

Les initiatives entreprises récemment ont surtout mis l'accent—forcément—sur la recherche universitaire, de sorte que l'autre pilier de l'activité scientifique, c'est-à-dire la recherche en science effectuée au sein du gouvernement, s'est retrouvé relégué au second plan. Le moment est venu pour le gouvernement de porter son attention sur la recherche qui est effectuée au sein de l'appareil gouvernemental en vue de mieux équilibrer les efforts de recherche au Canada.

La recherche scientifique au sein du gouvernement vise trois grands objectifs. D'abord, combler l'écart entre la recherche fondamentale effectuée par les universités et la recherche appliquée effectuée par l'industrie; ensuite, étayer l'élaboration de politiques; et enfin, améliorer les services offerts par le gouvernement. Nous appuyons les efforts déployés par le Comité consultatif sur la science et la technologie, qui a examiné le rôle du gouvernement fédéral dans le domaine de la recherche. Nous savons aussi que la mise en oeuvre des recommandations qu'il a formulées dans son rapport prendra du temps. Nous encourageons donc le comité et le gouvernement à examiner les besoins primordiaux des organismes et ministères gouvernementaux chargés de répondre aux défis prioritaires à l'échelle nationale, et de leur allouer suffisamment de fonds pour qu'ils puissent continuer d'appuyer la recherche au Canada.

Le financement des installations nationales constitue également un volet de la recherche scientifique. Ces installations sont d'une importance primordiale pour les collectivités canadiennes de la science et de la technologie dans de nombreuses disciplines et dans de nombreux secteurs. En offrant à des scientifiques étrangers de les utiliser selon les principes du mérite, les Canadiens obtiennent le droit d'utiliser ailleurs des installations semblables selon le même principe. Cet arrangement est très avantageux pour le Canada et contribue grandement à la place qu'occupe notre pays sur la scène internationale de la science et de la technologie.

Nous savons que le gouvernement est en train d'envisager deux initiatives. Il y a d'abord le renouvellement du financement de l'installation TRIUMF, et le projet de création d'une nouvelle installation spécialisée dans la recherche sur les neutrons. Cette installation vise à appuyer un des grands secteurs de recherche reconnus au Canada, celui de la science des matériaux.

• 1140

Le Consortium encourage le gouvernement à financer immédiatement les projets dignes d'intérêt. Autrement, nous risquons de perdre des compétences fort importantes dans ces domaines, puisque les chercheurs iront s'installer dans les pays où ils pourront poursuivre leurs activités de recherche.

Ces dernières années, le financement global des établissements canadiens d'enseignement postsecondaire a considérablement diminué. Les universités, par exemple, ont subi une perte réelle de 23 p. 100 de leurs fonds d'exploitation au cours des cinq dernières années. Cette diminution a entraîné une forte augmentation des frais d'inscription dans les universités. La dette étudiante a aussi augmenté et l'accessibilité à l'enseignement supérieur a reculé. L'infrastructure universitaire a également souffert du manque de financement. Le personnel enseignant a été réduit, les ressources consacrées aux bibliothèques ont diminué, les travaux d'entretien ont été reportés et le soutien technique de la recherche a chuté.

En tant que mère de deux jeunes enfants qui font leur entrée dans le système scolaire, je crains que, au moment où l'enseignement postsecondaire est en train de devenir plus important pour eux et pour le pays, le système universitaire au Canada ne devienne trop coûteux ou n'ait pas accès aux ressources dont il a besoin.

Est-ce que cela veut dire que les cotisations du gouvernement aux REEE ne serviront à rien? Est-ce que je vais être obligée d'envoyer mes enfants étudier à l'extérieur du Canada? Le gouvernement a déclaré, dans son discours du Trône, qu'il veillera à ce qu'il y ait une capacité moderne et efficace en matière de recherche et de science au sein de l'administration publique, pour promouvoir la santé, la sécurité et le bien-être économique des Canadiens. Je trouve cela fort encourageant, et le Consortium espère que le gouvernement jouera un rôle de leadership à l'échelle nationale en vue d'assurer le bien-être futur du secteur de l'enseignement postsecondaire, tout comme il l'a fait l'an dernier pour le secteur de la santé.

En résumé, le Consortium recommande que le gouvernement investisse de façon stratégique dans l'enseignement postsecondaire; qu'il améliore le financement de tous les conseils subventionnaires, dont celui du CRSH; qu'il définisse le rôle joué par la recherche scientifique au sein du gouvernement et qu'il finance adéquatement les organismes et ministères gouvernementaux, de même que les installations nationales.

Merci.

Le président: Merci, madame Ford.

Nous allons maintenant entendre les représentants du Conseil de recherche en sciences humaines du Canada, MM. Marc Renaud et Tim Brodhead. Je vous souhaite la bienvenue.

[Français]

M. Marc Renaud (président, Conseil de recherches en sciences humaines du Canada): Merci beaucoup, monsieur le président, et bonjour, tout le monde.

Je suis président du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada. Je suis accompagné de Tim Brodhead, qui est le directeur général de ce qui est la plus grosse fondation familiale au Canada, la Fondation McConnell.

[Traduction]

Comme nous avions convenu de nous limiter à quatre minutes chacun, pas plus, nous allons parler rapidement.

Le président: Prenez cinq minutes et parlez un peu plus lentement.

Des voix: Oh, oh!

[Français]

M. Marc Renaud: Dans le communiqué de presse qu'il nous a fait parvenir le 18 octobre dernier, le comité nous demandait notre avis sur cinq questions.

[Traduction]

En fait, les chercheurs dont le CRSH finance les activités ont des commentaires à faire sur chacun des cinq thèmes. Par exemple, le CRSH a décidé la semaine dernière d'entreprendre une étude nationale sur la productivité en recherche afin de comprendre ce qui se passe sur ce front et de voir comment nous pouvons améliorer la productivité dans ce domaine. Nous avons également mis sur pied un comité qui se chargera d'examiner les changements apportés par l'économie fondée sur le savoir. Nous avons donc des commentaires à faire sur presque tous ces points.

[Français]

Dans le mémoire que nous vous avons présenté, nous avons essayé de couvrir tout cela.

Je voudrais aujourd'hui me concentrer en particulier sur la question de l'infrastructure sociale et sur celle de la recherche sociale. Avec la mondialisation et la révolution de l'information, on est en train de vivre un changement absolument incroyable, qui est probablement un des plus grands changements du millénaire. Il est aussi grand que celui lié à l'imprimerie et que celui lié à la révolution industrielle et à la machine à vapeur.

Ces changements nous posent toutes sortes de questions. La société change, l'économie change et la recherche change, et nous nous posons des questions. Où sommes-nous? Que sommes-nous? Où allons-nous?

Je voudrais prendre seulement deux minutes pour vous dire ce que les chercheurs en sciences humaines essaient de faire pour aider le pays dans ce domaine. La recherche, notamment en sciences humaines et également dans les autres secteurs, est un domaine qui est en train de changer de manière radicale. Les gens travaillent de plus en plus en équipe et de manière interdisciplinaire, parce que les problèmes auxquels nous sommes confrontés nécessitent toutes sortes de perspectives. Les gens travaillent de plus en plus de manière enracinée dans leur milieu, en rapport avec leur communauté.

• 1145

[Traduction]

Nous assistons en ce moment à un retour aux indicateurs sociaux, un programme qui avait été lancé aux États-Unis par le président Kennedy dans les années 60. Le secteur des sciences sociales et humaines est en train de mettre au point de nouveaux outils de recherche collectifs. Par exemple, il y a deux semaines, le CRSH a organisé une conférence à laquelle ont assisté 18 pays et qui portait sur le rôle des sciences sociales dans un monde numérique. Cette conférence visait à jeter un regard sur l'avenir. Il est étonnant de voir tous les changements qui vont se produire. Ce sont là certaines des grandes tendances qui se manifestent dans le monde de la recherche.

Ce que nous essayons de faire, en toute modestie, au sein du CRSH, c'est de nous assurer que ces tendances évoluent normalement. Tim va vous en parler davantage. Nous avons mis sur pied un programme fort efficace en vue de former des partenariats plus solides avec les collectivités. Nous avons entrepris un projet sur l'utilisation de statistiques sociales auquel participent toutes les universités canadiennes. Enfin, nous avons établi un centre de transfert des connaissances auquel tout le monde a accès.

Ce gouvernement est le premier, depuis très longtemps, à avoir élaboré une politique scientifique. Il a investi dans le Fonds canadien pour l'innovation, dans les instituts canadiens de recherche sur la santé, qui vont littéralement métamorphoser la recherche en santé au cours des 20 prochaines années, et dans le fonds du millénaire. Comme l'a mentionné le premier ministre dans son dernier discours du Trône, le gouvernement a mis sur pied un nouveau programme de chaires et amélioré aussi les budgets des conseils subventionnaires. Le gouvernement, sans le savoir, est peut-être le premier, depuis la Seconde Guerre mondiale, à exploiter les connaissances au profit des Canadiens.

Or, et je n'ai pas l'intention de trop insister là-dessus, il manque à tout le moins un morceau pour compléter le casse-tête. La recherche en sciences humaines et sociales est sous-financée, et nous avons besoin de votre aide. Nous vous demandons de doubler notre budget. La hausse est modeste: elle représente une augmentation de 40 millions par année, sur trois ans. À défaut de cela, le pays en souffrira.

Je ne dis pas cela pour attaquer le CRSNG, mais à titre de comparaison. Si notre budget était l'équivalent, par personne, de celui du CRSNG, il ne serait pas de 100 millions de dollars mais d'un milliard de dollars. Nous n'avons pas besoin d'un milliard de dollars, ni de l'équipement qui est requis dans le domaine des sciences naturelles, mais il est clair que nous ne pouvons pas accomplir ce que nous voudrions avec un budget de 100 millions de dollars.

Je vais maintenant céder la parole à Tim.

Le président: Monsieur Brodhead.

M. Tim Brodhead (directeur général, J.W. McConnell Family Foundation, Conseil de recherches en sciences humaines du Canada): Je vais vous parler du côté plus humain de ce qu'a présenté Marc, qui a exposé quelques grandes tendances et grands problèmes auxquels la société canadienne est confrontée.

Je travaille pour une fondation familiale privée à Montréal, comme Marc vous l'a dit, et notre mandat consiste à aider les Canadiens à comprendre les changements et à s'y adapter. C'est donc dire que nous travaillons auprès de la communauté. Nous travaillons avec les gens et nous nous intéressons aux problèmes de la violence familiale, du décrochage scolaire et de la création d'organismes communautaires appelés à jouer un rôle plus important dans le domaine des soins de santé. Ce sont des problèmes qui touchent les Canadiens de tout le pays. Le rôle de notre fondation est d'aider les gens à trouver des moyens de répondre à ces problèmes.

Ce sont des problèmes compliqués, et les solutions ne sont pas simples. La fondation ne finance pas la recherche, et nous comptons donc sur des organismes, comme les conseils subventionnaires et particulièrement le CRSH, pour aider les groupes communautaires à chercher des moyens de résoudre certains de ces grands problèmes sociaux.

Je pense que la société nord-américaine est tellement axée sur l'évolution technologique que nous avons tendance à croire que nos problèmes, tout comme leurs solutions, sont d'ordre technique. En fait, je pense que plus souvent qu'autrement les problèmes sont d'ordre social et non scientifique.

Dans tous les journaux, il y a des articles sur les problèmes qui attirent notre attention. Il est évident que la science peut contribuer à la façon dont nous gérons les stocks de poisson, par exemple, mais je pense qu'il est à tout le moins aussi important de chercher à mieux comprendre les intérêts contradictoires dans la gestion de ressources limitées. Dans ce domaine, les sciences sociales peuvent apporter leur contribution.

L'économie du savoir est formidable. Nous parlons de la mondialisation et de ses répercussions dans nos vies, mais la cohésion sociale, le maintien d'une certaine qualité de vie et la participation à la vie communautaire sont des facteurs tout aussi importants pour comprendre l'impact de la mondialisation.

Dans le domaine de la santé, nous savons évidemment que les sciences biomédicales ont beaucoup à apporter, mais nous savons aussi que le mode de vie des gens, comme le fait de fumer ou de consommer des drogues, peut influencer autant sinon plus la santé de la société.

• 1150

Ce sont tous des problèmes auxquels toute la population du pays est confrontée, et la recherche autant dans le domaine des sciences sociales que dans d'autres domaines peut contribuer à apporter des solutions. C'est dans ce sens que la fondation travaille.

Comme membre du conseil d'administration du CRSH, je trouve important d'examiner les problèmes de la société canadienne de façon globale, c'est-à-dire en étudiant autant les valeurs culturelles et la santé, dont Marc a parlé plus tôt, que les défis et les perspectives de l'économie du savoir, et la cohésion sociale. Tous ces secteurs doivent recevoir des ressources, d'après le conseil d'administration du CRSH qui a beaucoup discuté de la question. Nous devons offrir aux chercheurs canadiens la possibilité de faire plus de recherches dans ces domaines qui sont déterminants pour notre avenir.

Il y a d'autres enjeux. Marc a parlé de la productivité, comment mieux la comprendre, la mesurer et l'améliorer. C'est un secteur pour lequel nous aimerions qu'on consacre plus de ressources s'il y en avait.

Il est souvent question de biotechnologie dans les nouvelles. Le Conseil aimerait intensifier les recherches dans ce secteur, mais bien sûr il a besoin d'un budget plus important.

Je voudrais simplement dire en terminant que la recherche dans le domaine des sciences sociales est souvent prise à la légère parce que nous considérons que nos problèmes sont liés, non pas à la gestion de l'organisation sociale, par exemple, mais à la technique. En siégeant au conseil du CRSH, j'ai pris conscience de l'extraordinaire dynamisme de l'activité des chercheurs dans le domaine des sciences humaines au Canada, et aussi de l'énorme écart entre les besoins et le financement.

Francine vient de nous dire qu'environ 15 p. 100 de fonds sont consacrés à la recherche dans ce domaine. Je ne suis ni chercheur ni universitaire, mais je suis tout à fait d'accord avec Marc pour qu'on double le budget du CRSH au cours des trois prochaines années. Je pense que nous en verrions très rapidement les résultats dans le cas de certains des grands problèmes auxquels la société est confrontée.

Nous sommes probablement le seul organisme non gouvernemental à financer le CRSH. Nous ne sommes pas vraiment en mesure de fournir les 30 millions de dollars par année de plus dont le conseil a besoin. Toutefois, ce que nous faisons montre que nous reconnaissons très bien la contribution qui peut être faite.

Le président: Merci beaucoup. Je suis content de voir que vous êtes du même avis.

Nous allons maintenant entendre le témoignage de Louise Robert et de Garth Williams, qui représentent la Fédération des sciences humaines et sociales. Bienvenue à vous.

[Français]

Mme Louise Robert (directrice générale, Fédération canadienne des sciences humaines et sociales): Merci. Je m'appelle Louise Robert et je suis directrice générale de la Fédération canadienne des sciences humaines et sociales.

La fédération est un organisme à but non lucratif qui représente 24 000 chercheurs et chercheuses du pays dans les sciences humaines et dans les sciences sociales. Elle représente aussi 68 sociétés savantes et 69 universités canadiennes dans ces disciplines.

Je vais parler aujourd'hui des sciences sociales et des sciences humaines. Je suis d'accord sur les sentiments et les propos de M. Renaud et de M. Brodhead, dont Mme Ford a aussi parlé, mais je vais me pencher un peu plus longuement sur l'importance de ces disciplines au niveau individuel, au niveau de chaque Canadien. Je me base sur une déclaration récente du président Robert Young de la compagnie Red Hat Linux, une compagnie technologique qui est en train de défier Microsoft.

[Traduction]

Cette entreprise peut livrer à Microsoft son plus important combat. Son PDG a prononcé une allocution à l'Université de Toronto, son alma mater, au cours d'une conférence sur le leadership et les aptitudes nécessaires au leadership au XXIe siècle. Il a déclaré que son diplôme en histoire de l'art—un domaine des sciences humaines—est ce qui l'a le mieux préparé à devenir un entrepreneur efficace dans une des entreprises de haute technologie les plus florissantes au monde.

• 1155

Il a fourni deux raisons pour expliquer pourquoi un diplôme dans un domaine des sciences sociales et humaines peut aider quelqu'un comme lui non seulement à vivre mais aussi à prospérer dans ce genre d'économie. D'après lui, la première raison est que ce diplôme a développé sa capacité d'apprendre et a éveillé sa curiosité. La deuxième raison, c'est qu'un diplôme de ce genre donne le courage de prendre des décisions quand la situation est incertaine, quand il n'existe pas de réponse claire et que tout n'est pas noir et blanc. Un diplôme de cette nature donne aux Canadiens la capacité de gérer le changement et de fonctionner dans des circonstances difficiles.

Je pense que vous savez tout cela. Le président du comité en a parlé.

Il est de plus en plus difficile de décider comment distribuer les fonds parce que le monde se complexifie. Les sciences humaines et sociales aident les gens sur le plan personnel. C'est ce dont nous avons besoin. Nous vivons dans un monde en transition, qui s'oriente vers l'économie du savoir. Nous connaissons des changements sociaux comparables à ceux de la révolution industrielle, et nous savons que des changements de ce genre ne s'implantent pas du jour au lendemain. Nous savons que ces changements exigent énormément d'énergie de la part des gens et entraînent leur lot d'incertitudes et de difficultés.

Dans ces circonstances, il devient très important que les Canadiens acquièrent les compétences nécessaires pour répondre à ce qui les attend. Il est impérieux qu'ils acquièrent des compétences techniques, mais ils doivent aussi avoir la possibilité et le goût de se recycler si les connaissances qu'ils possèdent sont dépassées. Ils doivent pouvoir travailler dans différents milieux et différentes cultures, dans différentes langues et avec toutes sortes de gens. Ils doivent savoir résoudre des problèmes et avoir des capacités d'analyse.

Les Canadiens ont besoin de sentir qu'ils peuvent décider de leur avenir. Pour cela, ils doivent développer leur esprit critique et savoir choisir, parmi toutes les informations dont nous sommes inondés, celles qui leur conviennent le mieux. Ils doivent développer leur esprit d'analyse et leur jugement. Ils doivent savoir régler des problèmes et entretenir de bonnes relations interpersonnelles. Une formation dans le domaine des sciences humaines et sociales permet d'acquérir toutes ces compétences.

Pour réussir, les Canadiens doivent avoir la possibilité de développer toutes leurs compétences et leurs aptitudes.

[Français]

Les sciences sociales et les sciences humaines nous offrent encore plus. M. Renaud a été très éloquent au sujet de la recherche, et je vais en dire un peu plus. La recherche dans les domaines des sciences sociales et des sciences humaines permet d'identifier les conséquences et les implications de ces changements que j'ai mentionnés. Par exemple, elle permet de comprendre la division grandissante entre pays riches et pays pauvres, entre les milieux urbains et les milieux ruraux, et entre les divers groupes sociaux. La recherche en sciences humaines et sociales propose des palliatifs et des mesures nouvelles, et propose aussi aux individus des comportements nouveaux. Elle peut informer les décideurs, les politiciens comme vous qui doivent légiférer sur de nouveaux comportements et de nouvelles situations. Elle peut aussi informer les individus et leur permettre d'analyser les choix qu'ils ont d'adopter ou de ne pas adopter les nouveaux comportements.

Une société qui se valorise est une société qui a à coeur que tous ses citoyens aient tous les outils nécessaires pour réussir. Nous estimons que le financement des sciences sociales et des sciences humaines est une des clés de la prospérité et de la réussite canadiennes.

[Traduction]

Comment doter les Canadiens des compétences et des aptitudes nécessaires pour réussir au cours du nouveau siècle? D'après nous, il faut faciliter l'accès du plus grand nombre de Canadiens à l'enseignement postsecondaire en rétablissant le financement de base. Il faut aussi doubler le budget du CRSH, pour que les chercheurs dans le domaine des sciences humaines et sociales aient les mêmes possibilités que les autres. Il faut aussi établir un cadre de recherche dans le domaine des sciences humaines et sociales qui complète les initiatives de la Fondation canadienne pour l'innovation et des Instituts canadiens de la recherche en santé.

• 1200

Merci.

Le président: Merci.

M. Garth Williams (directeur, Affaires publiques, Fédération canadienne des sciences humaines et sociales): Monsieur le président et mesdames et messieurs du comité, j'aurais quelques commentaires à ajouter. En plus de travailler pour la Fédération des sciences humaines et sociales, je suis inscrit à un programme d'études supérieures en histoire à l'Université d'Ottawa. C'est vraiment à titre d'étudiant diplômé que je m'adresse à vous aujourd'hui.

Il y a deux ou trois ans, je suis retourné à l'université parce que je voulais mieux comprendre les changements que vivait ma communauté et trouver un meilleur moyen d'y faire face. J'ai découvert deux choses que j'aimerais vous faire partager.

D'abord, j'ai découvert un groupe d'étudiants diplômés qui effectuent des recherches remarquables avec d'autres étudiants dans différents départements. L'un d'entre eux vient à peine de terminer sa thèse. Il a étudié comment les communautés au Canada et aux États-Unis ont réagi à la fermeture de grandes usines dans les années 70 et 80. Il a découvert que le facteur déterminant dans la façon dont ils réussissent à s'adapter au changement, qui est en fait causé par la restructuration que la mondialisation entraîne, est leur esprit communautaire et leur sentiment patriotique, qui étaient très différents au Canada et aux États-Unis.

L'autre jour, j'ai rencontré un étudiant de l'Université de la Colombie-Britannique aux archives. Il effectue des recherches sur la violence dans la société. Il se demande si la violence change avec le temps, c'est-à-dire si elle augmente ou diminue, et pourquoi. Ses travaux pourraient répondre à certaines questions et nous aider à tirer des leçons du passé, de façon à découvrir comment réduire la violence aujourd'hui.

Les étudiants diplômés cherchent des réponses aux questions qui font l'objet d'articles dans les journaux tous les jours. Voilà quelques-unes des raisons pour lesquelles je suis retourné à l'université.

La deuxième chose que j'ai découverte, c'est qu'il y avait beaucoup d'étudiants diplômés dans la même situation que moi. Nous pouvons nous permettre de retourner à l'université pendant un an ou deux, mais ensuite nous devons poursuivre nos travaux de recherche à temps partiel et travailler à temps plein, ce qui nous empêche d'obtenir du financement pour nos travaux.

Le Conseil de recherches en sciences humaines fait de son mieux, mais il ne peut subventionner qu'environ 5 p. 100 de tous les étudiants au doctorat dans le domaine des sciences humaines et sociales. C'est une des raisons pour lesquelles moins de la moitié de ces étudiants finissent leurs études de doctorat.

Personnellement, les étudiants vont s'en tirer. Ils ont un baccalauréat ou une maîtrise et ils peuvent toujours trouver de bons emplois ou en créer de nouveaux, comme ils font déjà. Ceux qui sont perdants, ce sont les Canadiens, puisque nous ne pouvons profiter du fruit de leurs travaux et des connaissances qu'ils pourraient apporter à notre société et à notre économie. Voilà pourquoi je pense qu'il est très important de financer la recherche dans ces domaines.

Le président: Merci monsieur Williams. Merci madame Robert.

Nous allons maintenant entendre le témoignage de M. Arthur Carty, du Conseil national de recherches du Canada. Soyez le bienvenu.

[Français]

M. Arthur J. Carty (président, Conseil national de recherches du Canada): Monsieur le président et membres du comité, bonjour et merci de m'avoir invité à me joindre à vous aujourd'hui.

[Traduction]

J'aimerais d'abord remercier le comité d'avoir appuyé, dans le rapport de l'an dernier, les sciences en général et le Conseil national de recherches du Canada en particulier.

Le document que nous avons déposé explique les liens que nous faisons entre la recherche, l'innovation et la productivité. J'aimerais simplement faire quelques commentaires sur certains de ces liens.

Les Canadiens sont fiers, à juste titre, d'avoir une économie prospère, une société sécuritaire et un niveau de vie qui se classe parmi les plus élevés du monde. Cependant, à l'approche du XXIe siècle, la nouvelle économie est tributaire des marchés mondiaux, et le savoir et l'innovation sont des facteurs de plus en plus déterminants pour la productivité, la croissance et la concurrence.

Comme beaucoup d'entre vous l'ont lu dans les journaux au cours des derniers mois, des analystes soutiennent que, depuis dix ans, la productivité, la croissance et le rendement sont en recul au Canada par rapport aux États-Unis. Ce décalage est attribuable entre autres aux faits suivants.

• 1205

Les États-Unis ont toujours beaucoup investi dans la R-D. Ce pays est aussi un leader mondial dans la gestion de l'innovation et il réussit extrêmement bien à utiliser les forces locales et régionales—les systèmes d'innovation communautaire comme on les appelle—pour créer des grappes de forte densité technologique dans des endroits comme Silicon Valley, le grand Boston, Austin, au Texas, et un certain nombre d'autres villes.

Par contre, le Canada n'a pas assez investi dans la R-D et connaît des lacunes sur le plan de l'innovation, comme le signale l'OCDE; en fait, nous sommes très créatifs, mais nous tirons de l'arrière par rapport aux autres pays pour ce qui est de l'application de ces idées dans la conception de nouveaux produits et services.

Le déficit d'innovation au Canada est illustré sur cette diapositive et il est attribuable à deux grands facteurs. Premièrement, nous ne parvenons pas à fabriquer, à partir des idées issues de la recherche, des produits pour le marché et, deuxièmement, nous n'avons pas assez de moyennes et grandes entreprises qui investissent des sommes importantes dans la R-D stratégique à moyen et à long termes, à l'étape intermédiaire entre la recherche fondamentale et le développement.

Dans les trois derniers budgets, comme certains députés ici l'ont déjà signalé, le gouvernement a beaucoup investi aux deux extrémités du spectre de la R et D. Cependant, les domaines importants qui se trouvent entre les deux ont toujours cruellement besoin d'aide.

Sur cette diapositive, vous voyez la recherche fondamentale, qui est effectuée principalement dans les universités, et les travaux de développement qui sont bien sûr principalement le domaine de l'industrie. C'est entre les deux qu'il y a un déficit d'innovation, et c'est là qu'il faut investir davantage.

Je pense que l'organisme au Canada qui est le plus en mesure d'établir des partenariats pour combler ce déficit d'innovation est le Conseil national de recherches du Canada. Nous voulons combler ce déficit en mettant notamment l'accent sur la création et l'application des idées, mais surtout sur le transfert de la technologie et du savoir.

Dans le dialogue entre les centres de recherche fondamentale et l'industrie, le CNR est là à la fois pour écouter et faciliter le travail. Nous collaborons de près avec les petites et grandes entreprises ainsi qu'avec les universités et les gouvernements. Je pense qu'il est effectivement vrai que la grande force du CNR est l'établissement de partenariats qui encouragent l'interaction entre les deux parties. En fait, nous traduisons le langage de la science en langage des affaires et, dans un sens, nous jouons un rôle crucial pour l'innovation, un rôle qui est déterminant pour l'économie canadienne.

Comme je l'ai signalé plus tôt, le Canada a aussi du mal à développer des grappes de technologie importantes, comme il y en a ailleurs, aux États-Unis, en Europe et dans certains pays en Asie du Sud-Est.

Le Centre national de recherches du Canada est le principal agent du système d'innovation du gouvernement fédéral, le principal organisme de R-D du gouvernement fédéral et joue un rôle crucial pour soutenir l'innovation communautaire et régionale d'un bout à l'autre du pays. Avec de nouvelles ressources, nous croyons être en mesure de faire beaucoup plus.

Les partenariats du CNRC—et j'insiste pour dire qu'il s'agit de partenariats avec les universités, les entreprises et d'autres institutions de recherche—ont déjà accéléré le processus d'innovation dans de nombreuses villes canadiennes. Grâce à nos installations de R-D disséminées d'un bout à l'autre du pays, des grappes d'innovation se sont développées dans des collectivités où se trouvent nos instituts, comme celui de Saskatoon—un grand nombre d'entre vous le connaissent—de même qu'à Montréal et à Winnipeg.

Pour illustrer ce fait, j'ai inséré parmi la série de diapositives des renseignements au sujet d'une importante contribution de l'Institut de recherche en biotechnologie du CNRC à Montréal à un centre régional d'innovation situé dans la région métropolitaine de Montréal. Voici une citation du directeur de biologie moléculaire de Astra Pharma, qui dit ce qu'il pense de l'Institut de recherches en biotechnologie à Montréal. Je ne la lis pas car vous pouvez tirer vous-même vos conclusions.

Mais je veux insister sur le fait que le CNRC est en mesure, tant par l'entremise de son personnel que de ses programmes, d'influer davantage sur l'innovation et l'accroissement de la productivité d'un bout à l'autre du pays. Nous pouvons jouer ce rôle important en éliminant l'écart dans le domaine de l'innovation et en aidant les entreprises canadiennes à tirer partie des sommes déjà investies par le gouvernement dans la création de la connaissance, dans les compétences de nos gens et dans un contexte commercial dynamique.

• 1210

Je crois qu'il nous faut maintenant choisir où nous ferons nos investissements stratégiques à l'avenir. Le CNRC est un joueur clé en ce qui a trait à l'innovation d'un bout à l'autre du pays et grâce aux ressources que nous réclamons, nous pouvons être le premier à créer des grappes d'innovation tant communautaires que régionales. Pour nous, c'est primordial si nous voulons augmenter la productivité et mettre en place une économie basée sur les connaissances, robuste et concurrentielle.

Merci.

Le président: Merci, monsieur Carty.

Nous entendrons maintenant M. Timothy Page, président de l'Association des ingénieurs-conseils du Canada. Il est accompagné de M. Jim Miller.

[Français]

M. Timothy Page (président, Association des ingénieurs-conseils du Canada): Bonjour, monsieur le président et membres du comité. Cela nous fait grand plaisir de nous trouver avec vous aujourd'hui pour parler d'une question aussi importante et fondamentale que celle de l'infrastructure.

Je représente une association qui compte 600 membres ainsi qu'une industrie qui emploie 41 000 professionnels, techniciens et autres employés du savoir-faire, et qui a un chiffre d'affaires d'au-delà de 5 milliards de dollars.

[Traduction]

Je suis accompagné aujourd'hui de M. Jim Miller, directeur du génie pour la région d'Ottawa—Carleton.

[Français]

À nous deux, nous allons tenter de vous présenter une image de notre infrastructure nationale qui est en train de se faire détruire.

[Traduction]

Premièrement, nous aimerions reconnaître publiquement le discours du Trône et la réponse du premier ministre à ce dernier. Tant le gouverneur général que le premier ministre ont reconnu la nécessité d'un nouveau programme national quinquennal d'infrastructure. Ce faisant, ils ont ainsi reconnu, selon nous, le lien important entre la productivité, la compétitivité, la salubrité et la sécurité des communautés et un environnement durable. Il s'agit là de points saillants de cette position du gouvernement fédéral et nous sommes ravis que l'engagement en ce qui concerne l'infrastructure qui a été pris dans le discours du Trône et les remarques du premier ministre confirment le lien qui entre les deux.

Pourquoi prenons-nous la parole? En tant qu'ingénieurs professionnels dont la responsabilité première consiste à protéger la santé et la sécurité du public, nous nous inquiétons de l'état de nos infrastructures nationales. M. Miller, qui utilise et gère des infrastructures au niveau local, en a une connaissance claire dans la région d'Ottawa—Carleton et vous en parlera.

Vous avez reçu une copie de notre mémoire.

[Français]

Je crois que tout le monde a eu le temps de le regarder au moins de loin. Nous déposons aussi un petit cadeau aujourd'hui, un petit truc de deux pages qui résume en quelque sorte notre politique et la raison qui la sous-tend.

[Traduction]

Nous y avons fait un certain nombre de suggestions. Nous avons tout d'abord parlé de la nécessité d'investir maintenant pour effacer le déficit actuel de 60 milliards pour le réseau routier national et les infrastructures municipales.

Deuxièmement, nous devons prendre des mesures pour gérer efficacement nos infrastructures nationales. Il s'agit d'un actif. Au même titre que vos maisons et ma maison qui sont un actif, nous faut aussi gérer infrastructures nationales. Nous avons laisser entendre que si nous devions inclure la valeur de nos infrastructures nationales dans le bilan financier des gouvernements dans ce pays, nous aurions une meilleure idée de ce qu'est cette véritable valeur et de la dépréciation qu'elle subit à la longue.

Nous préconisons en outre la mise au point de ce que nous appelons par euphémisme un outil de diagnostic. À l'instar d'un mécanicien qui estime qu'à 20 000 kilomètres votre voiture devrait faire l'objet de certaines vérifications, nous croyons que la recherche effectuée au Centre national de recherches en vue de la rédaction de normes relatives aux infrastructures contribueront grandement à aider les gouvernements à gérer plus efficacement les infrastructures au Canada.

Nous croyons également que l'investissement dans les infrastructures encourage le développement de nouvelles technologies et de méthodes innovatrices de gestion et de développement des infrastructures. Le génie-conseil arrive à l'heure actuelle au quatrième rang dans le monde en ce qui a trait à la génération des recettes provenant de la scène internationale et nous avons de bonnes histoires à raconter pour illustrer ce dont nous sommes maintenant capables à l'échelle internationale grâce à l'expérience acquise chez nous.

• 1215

Enfin, nous avons exhorté le gouvernement à établir une stratégie d'investissement à long terme dans une infrastructure durable. Je sais que Jim veut vous dire très rapidement quelques mots à ce sujet. À cet égard, je crois qu'il est important que les décisionnaires songent à adopter de nouvelles formes de financement et, à plus long terme, à adopter une approche plus intégrée pour gérer nos besoins en infrastructure.

Si vous le permettez, je vais maintenant inviter Jim à prendre la parole.

Le président: Merci, monsieur Page.

Monsieur Miller.

M. Jim Miller (Association des ingénieurs-conseils du Canada): Merci beaucoup. Je suis heureux de l'occasion qui m'est offerte de participer à vos discussions d'aujourd'hui. Je crois que les points de vue que j'apporte sont partagés par de nombreuses municipalités d'un bout à l'autre du pays.

Comme vous le savez, Ottawa—Carleton est un fournisseur important d'infrastructures urbaines, qu'il s'agisse de réseaux d'aqueducs, de systèmes d'égout, de routes, de régie de transport et de systèmes d'enfouissement. Nous n'avons pas participé directement à la rédaction du mémoire de l'ACEC, mais nous souscrivons aux principes qui y sont énoncés.

Un point sur lequel j'aimerais insister, c'est qu'il n'y a pas de doute que la lacune en ce qui concerne les infrastructures pour les municipalités prend de l'ampleur. Il y a deux ans dans Ottawa—Carleton, notre programme décennal d'immobilisations a été amputé de plus de 70 millions de dollars pour des raisons de capacité financière, ce qui aura pour résultat de multiplier les engorgements et de baisser le niveau de service. Notre budget d'immobilisations de l'an 2000 ne prévoira pas de fonds pour les projets de transport ou de transit connexes à la croissance. Pour protéger l'actif dont nous disposons, le conseil a dû prendre cette année une décision et consacrer des crédits supplémentaires au programme de resurfaçage, nos données ayant indiqué clairement que nous nous dirigions rapidement vers un fiasco.

Depuis 1988, notre programme d'immobilisations en matière de transport a été renfloué au moyen de programmes de financement spéciaux. Il s'agit de programmes tels que les programmes de base, les programmes d'infrastructure Canada un et deux et les programmes provinciaux. Et nous sommes très reconnaissants aux divers gouvernements de ces programmes. Ne me permettez pas d'en parler autrement. Je veux toutefois dire qu'on pourrait en améliorer l'efficacité.

Pour être plus efficace, le financement de l'infrastructure municipale doit être prévisible, durable et stable. L'évolution en dents de scie des programmes de financement spéciaux n'est pas efficace. Les programmes de financement spéciaux peuvent encourager la surconstruction dans certains cas. En outre, ils ne permettent pas d'utiliser efficacement les ressources, que ce soient les municipalités ou l'entreprise privée qui financent ces programmes. Il faut s'organiser en vitesse, former des gens et mettre rapidement le programme en place.

Je veux ajouter aussi que ces programmes de financement spéciaux obligent souvent les municipalités, lorsqu'elles essaient de réaliser les projets, de choisir des périodes d'activités intenses et de payer ainsi très cher. Le financement de l'infrastructure ne devrait pas être une question marginale lorsque des fonds sont disponibles. Pourquoi devrait-on alors mettre en place dans les plus brefs délais un financement prévisible et stable? Cela sauvera pour ainsi dire de l'argent aux contribuables canadiens. On éliminerait les inefficacités liées à l'évolution en dents de scie. Des systèmes d'infrastructure municipaux efficaces permettraient à notre industrie de croître, de prospérer et de générer une plus grande activité économique pour la collectivité.

Voici un exemple de cela dans Ottawa—Carleton. Il y a huit ans, les gens d'affaires avaient fait des démarches pour améliorer l'infrastructure routière à l'ouest de la municipalité de Kanata. Un projet a donc été réalisé sur le chemin March et a servi de catalyseur pour des centaines de millions de dollars de développement et d'activité économique dans cette région.

Un rapport de 1997 publié en Australie, dont a fait état l'Institut canadien des ingénieurs, révèle que 15 p. 100 des coûts des entreprises sont associés à l'infrastructure. Je crois qu'il est raisonnable de penser qu'il en va de même au Canada. Nous avons comme traits commun notre population et les longues distances. Les piètres infrastructures feront grimper les coûts des entreprises et nuiront à leur rentabilité. Selon nous, l'argent investi dans les infrastructures enrichira les Canadiens et débloquera davantage de fonds pour d'autres sources et besoins de la collectivité.

Merci beaucoup.

• 1220

Le président: Merci.

M. Timothy Page: Pour terminer, monsieur le président, nous aimerions répéter les dernières paroles de M. Miller. Il faut considérer l'infrastructure comme un investissement, comme un moyen de bien gérer un actif qui contribue à la santé et au bien-être des Canadiens et des Canadiennes et à l'amélioration tant de l'environnement que de la productivité. Si nous n'investissons pas les sommes qu'il faut dans les infrastructures, nous risquons de faire augmenter les coûts de la santé, de nuire à notre environnement, de faire chuter notre productivité et d'entraver une nouvelle croissance économique.

L'investissement dans les infrastructures donne des signes positifs sur tous ces fronts et nous sommes heureux de voir que le discours du Trône le reconnaît et confirme cet aspect. Nous incitons votre comité à encourager le ministre des Finances à examiner d'un oeil très favorable la possibilité d'un fort appui dans les plus brefs délais.

Merci.

Le président: Merci, messieurs Page et Miller.

Nous allons maintenant passer à M. Philip Cockshutt, le directeur général de l'Académie canadienne du génie. Bienvenue monsieur.

M. Philip Cockshutt (directeur général, Académie canadienne du génie): Merci beaucoup, monsieur le président.

L'académie est heureuse d'avoir l'occasion de s'entretenir avec les membres du comité au nom de la communauté des ingénieurs canadiens. Même si l'Académie canadienne du génie regroupe seulement un peu plus de 200 ingénieurs exceptionnels, je crois que nous pouvons les considérer comme des représentants des 160 000 ingénieurs professionnels qui exercent au Canada.

Nos brèves remarques d'aujourd'hui porteront sur deux impératifs intereliés qui, soit dit en passant, n'ont pas été abordés, je crois, par aucun des conférenciers précédents. Il s'agit de nous demander comment encourager l'entrepreneuriat technologique et comment commercialiser la recherche universitaire.

L'académie a publié récemment une étude intitulée La richesse par l'entrepreneuriat technologique: Les défis et les opportunités qui se présentent aux Canadiens, qui portait sur une lacune importante dans la culture des entreprises canadiennes. Pour générer de la richesse et créer des emplois dans une économie du savoir comme celle dans laquelle nous vivons actuellement, l'essor de telles entreprises suppose un nombre croissant d'entrepreneurs dans le domaine technologique. De telles personnes sont une denrée très rare au Canada.

Pour ce qui est du financement des nouvelles entreprises à base de technologie, nous ne recommandons pas la participation directe des gouvernements à la sélection ou au financement de nouvelles entreprises. Nous recommandons toutefois que soient mises en place des politiques budgétaires visant à réduire au minimum les aspects négatifs de la fiscalité au cours des premières années de vie des nouvelles entreprises technologiques. Elles devraient par contre stimuler les dépenses en développement et en commercialisation des produits pour encourager les nouveaux investissements en croissance et en main-d'oeuvre au Canada. Il existe donc un lien direct entre l'allégement du fardeau fiscal et l'encouragement de l'entrepreneuriat au Canada.

L'académie a participé dernièrement à une consultation portant sur le rapport publié par le Groupe d'experts sur la commercialisation des résultats sur la recherche universitaire, rapport intitulé Investissements publics dans la recherche universitaire: Comment les faire fructifier. Plusieurs autres personnes assises autour de cette table aujourd'hui ont, je crois, répondu à ce document d'étude.

Les auteurs de cette importante étude recommande un certain nombre de mesures devant améliorer, pour le contribuable canadien, le rendement des investissements considérables effectués par l'entremise des conseils subventionnaires dans le domaine de la recherche universitaire au pays. Nous insistons sur le fait que nos remarques portent précisément sur la partie des sciences appliquées de la recherche universitaire. Notre académie appuie donc la recommandation du groupe d'experts selon laquelle le gouvernement devrait fournir un appui supplémentaire aux chercheurs universitaires en augmentant de 5 p. 100 (pourcentage théorique), le montant des subventions, surtout celles visant la commercialisation des résultats de la recherche menée par ces établissements. L'académie précise les moyens d'aller chercher un tel appui et de trouver de nouveaux participants pour la commercialisation.

• 1225

L'académie appuie également la recommandation du groupe d'experts selon laquelle il faudrait revoir complètement la politique fiscale canadienne pour voir à ce qu'elle n'entrave pas l'innovation axée sur la recherche et, dans la mesure du possible, appuie ce type d'innovation.

De nombreux membres de notre académie se sont dits inquiets du fait que les taux actuels d'imposition des particuliers et des sociétés entravent l'innovation au Canada et encouragent l'exode de professionnels hautement spécialisés qui sont si nécessaires à l'essor de nos branches d'activité axées sur la connaissance.

Pour terminer, l'académie vous est reconnaissante de l'occasion qui lui est donnée de faire part de son point de vue aux membres du comité, compte tenu de son programme et de l'étendue de notre mission. Pour l'académie, il ne faut pas se concentrer exclusivement sur l'allégement de la dette, sur la réforme fiscale ou sur les dépenses de programmes. Ces trois facteurs doivent être pris en compte dans une approche équilibrée. On estime toutefois de plus en plus que les facteurs désincitatifs d'ordre fiscal amoindrissent la capacité du Canada d'innover. Leurs effets à long terme sur l'économie seront probablement très nuisibles, si l'on ne redresse pas la barre bientôt.

Merci.

Le président: Merci beaucoup monsieur Cockshutt.

Nous allons maintenant passer à la période des questions. Nous avons assez de temps pour un tour de sept minutes, et nous allons commencer par M. Epp.

M. Ken Epp: Merci monsieur le président, et j'aimerais encore une fois remercier tous les témoins.

C'est intéressant de connaître vos divers points de vue sur la façon dont nous devons dépenser ou redistribuer l'argent perçu auprès des contribuables canadiens.

J'ai des questions à poser à tout le monde, mais je vais devoir me limiter.

J'aimerais d'abord poser une question à Mme Ford. Elle a dit qu'un jour ses enfants devraient peut-être aller faire leurs études universitaires dans un autre pays. D'après ce que j'ai entendu dire, aux États-Unis, par exemple, les frais de scolarité sont exorbitants par rapport au Canada. Je me demande si elle connaît un autre pays qui offre une formation universitaire de qualité à un coût comparable.

Mme Francine Ford: Je ne parlais pas précisément du coût de l'éducation, mais je m'attends à ce qu'il devienne aussi élevé au Canada si on n'y voit pas.

Je m'inquiète davantage des ressources des universités—l'infrastructure, l'équipement, les installations et tout ce dont dépendent les services de recherche. Quand on a le choix, on doit examiner d'un oeil critique ce que le système d'enseignement postsecondaire offre au Canada sur le plan de la recherche et se demander si la recherche est à jour au point de permettre au Canada de se comparer favorablement aux autres pays en matière d'enseignement.

La recherche contribue au savoir. Si nous suivons le rythme—c'est-à-dire si notre équipement et nos capacités de recherche sont à la fine pointe—, notre enseignement universitaire le sera aussi. C'est une question d'équilibre.

Évidemment, quitter le pays ne serait pas mon premier choix. Je fais confiance à la structure canadienne et à notre système d'éducation. Mais les frais de scolarité ont beaucoup augmenté en très peu de temps parce qu'on a réduit le soutien de base, le financement de base des universités. Et on peut facilement présumer qu'ils vont continuer d'augmenter si on ne fait rien.

M. Ken Epp: Vous proposez donc que le gouvernement fédéral augmente le financement de base des universités et des autres établissements postsecondaires du pays?

Mme Francine Ford: Oui.

M. Ken Epp: Pour ainsi réduire les frais de scolarité?

Mme Francine Ford: Oui.

M. Ken Epp: Bien.

Vous vous préoccupez aussi de la dette élevée des étudiants. Augmenteriez-vous les subventions aux étudiants pour réduire leur endettement? Comment régleriez-vous ce problème?

Mme Francine Ford: Je ne suis pas sûre de bien pouvoir répondre à cette question. Les mesures prises auront des répercussions sur tous les plans. Si l'infrastructure est améliorée, les frais de scolarité vont baisser, ce qui soulagera les étudiants.

Si on finance davantage la recherche au-delà du premier cycle, on offrira plus de subventions aux étudiants. Cela aidera aussi ceux qui veulent entreprendre des études supérieures. C'est à ce stade que les obstacles se présentent, qu'on se demande sérieusement si on va faire des études de maîtrise ou de doctorat, parce que l'endettement peut devenir important si on ne peut obtenir de fonds pour ses travaux de recherche.

Ce sont deux facteurs.

• 1230

M. Ken Epp: Nous pourrions poursuivre sur ce sujet, mais j'ai d'autres questions à poser.

J'aimerais m'adresser aux ingénieurs maintenant. La question de l'infrastructure m'intéresse vraiment. J'ai eu l'occasion de me rendre dans différentes régions du pays et, quand je pense aux autoroutes, par exemple, j'ai tendance à être de votre avis.

Dans certaines villes que j'ai visitées, l'approvisionnement en eau laisse à désirer. On dirait que l'eau embouteillée est une nouvelle industrie au Canada, ce que je trouve vraiment incroyable. On dirait que les projets d'ingénierie font en sorte que les conduites d'eau, notamment, n'arrivent pas à répondre à la demande.

J'ai une question à vous poser, une question générale au sujet du budget, comme il s'agit d'une consultation prébudgétaire. Les programmes d'infrastructure mis en place par le gouvernement fédéral au cours de ses deux mandats ont fait l'objet de critiques. Je ne dis pas qu'ils ne comportaient pas de bons éléments. Mais une des principales critiques a été formulée par les administrations municipales, qui ont dit avoir en fait été forcées de dépenser à ce moment-là sinon elles n'auraient pas eu d'argent.

Comme les trois ordres de gouvernement participaient au programme, les municipalités perdaient leur part si elles n'acceptaient pas le tiers du budget venant de la province et l'autre tiers venant du gouvernement fédéral. Dans des localités que je connais, on a proposé un projet qui n'était pas vraiment encore nécessaire. Ailleurs, on s'est plaint de ne pas avoir assez d'argent pour mener à bien tous les travaux voulus. Je pense à une ville qui avait de gros problèmes d'égouts. Ils ne répondaient plus aux besoins de l'agglomération et il a vraiment fallu refaire tout le réseau. On n'a pas eu assez d'argent pour bien faire les choses.

J'aimerais avoir votre avis sur ce que le gouvernement fédéral devrait percevoir en impôts et sur le rôle qu'il devrait jouer dans la distribution des fonds aux localités, parce que cela impose des contraintes artificielles quand on veut améliorer les infrastructures et planifier à long terme.

Vous êtes peut-être plusieurs à vouloir répondre à cette question et nous faire part de votre expérience et de vos connaissances là-dessus.

Le président: Merci monsieur Epp.

Monsieur Page.

M. Timothy Page: Si je peux me permettre, je pense qu'il est déjà formidable qu'il y ait eu un programme d'infrastructure national. Le programme s'étalait sur plusieurs années et, selon notre groupe d'ingénieurs, 75 p. 100 de son budget total a été dépensé à bon escient, pour des travaux utiles, comme la réfection de systèmes d'aqueducs, de routes et d'autoroutes. C'est un secteur où il y a déjà un déficit de 60 milliards de dollars. Les coûts de réparation d'une infrastructure en mauvais état ne feront qu'augmenter d'année en année si on ne fait rien.

Pour répondre plus précisément à votre question, monsieur Epp, il serait bon que le prochain programme accorde assez de souplesse en matière de gestion et d'élaboration de projets, mais le plus important, je pense, et cela a été reconnu dans le discours du Trône et par le premier ministre, c'est de savoir que nous avons besoin d'une infrastructure sécuritaire et efficace pour assurer notre compétitivité sur le plan économique.

M. Jim Miller: J'aimerais faire quelques commentaires. J'ai entendu des critiques semblables moi aussi. Il faut dire que les délais d'exécution des travaux étaient très serrés dans le cas des derniers programmes, ce qui compliquait un peu les choses. Si l'on n'avait pas déjà un projet en plan, on était défavorisé. Notre conseil régional nous a présenté une liste de projets dont la majorité visait à protéger ce qui existait déjà. Nous avons été chanceux de pouvoir exécuter un bon nombre de projets de ce genre, comme des travaux de réparation du revêtement des routes.

Je pense que la bonne gestion devrait être prise en considération dans le cadre de ces programmes. Il ne faudrait pas que ce soit seulement ceux qui se plaignent qui obtiennent ce qu'ils veulent, qui obtiennent des fonds. Je pense que les programmes devraient tenir compte des principes de gestion des biens que nous connaissons, comme la dépréciation et le coût du cycle de vie du matériel.

• 1235

Vous avez parlé de la situation des aqueducs. C'est un secteur où la situation est critique. C'est un service qui devrait fonctionner selon le principe de l'utilisateur-payeur, avec l'installation de compteurs d'eau. Le service est plus efficace quand on paie pour la quantité d'eau qu'on utilise. Ce principe devrait être appliqué à tous les autres services municipaux, la gestion des eaux usées et le transport.

Le président: Quelqu'un d'autre veut-il ajouter quelque chose?

Merci monsieur Epp.

C'est maintenant au tour de M. Cullen.

M. Roy Cullen: Merci monsieur le président.

Je veux remercier les témoins de leurs exposés. Je suis désolé d'avoir manqué les tout premiers exposés.

Il en a peut-être été question pendant que je n'étais pas là... Mais si on veut doubler le financement de la recherche dans le domaine des sciences sociales et humaines, pouvez-vous nous dire quelles sont les questions sociales sur lesquelles il est urgent de faire des recherches aujourd'hui, et pourquoi le gouvernement devrait y accorder la priorité? Pouvez-vous nous donner un aperçu de ces questions et nous dire pourquoi il serait utile de pousser la recherche dans ces domaines?

M. Marc Renaud: C'est un sujet dont nous discutons très souvent au conseil du CRSH. Quelles sont les grandes questions? Dans quels domaines doit-on développer le savoir?

Tim a parlé de la cohésion sociale. Avec la mondialisation, nos communautés perdent de la vitalité, et il faut chercher à renforcer la cohésion sociale, à aider les communautés à se serrer les coudes malgré le fait que les Wal-Mart viennent remplacer les petits commerçants. C'est une priorité.

L'économie du savoir nous pose un énorme défi à tous, mais nous ne savons pas vraiment ce que cela veut dire. Toutes les institutions devront s'adapter. Personne n'aurait pu prédire l'arrivée du commerce électronique il y a dix ans et, pourtant, c'est ce qui va changer notre façon de transiger. Qu'est-ce que cela implique au juste? Nos chercheurs sont capables d'expliquer les choix que nous avons à faire.

Je vais vous donner un autre exemple. Le Canada entreprend de nouvelles négociations avec l'Organisation mondiale du commerce en vue d'une refonte du secteur financier dans le monde. Nos chercheurs sont capables de discuter de ce problème, de fournir des connaissances.

Il y a toutes sortes de domaines où le savoir est nécessaire, dont celui des sciences humaines.

J'arrive de l'Université York. J'ai rendu visite à une équipe de chercheurs qui étudient le commerce des esclaves dans les régions reculées du Nigéria au XIXe siècle. C'est un sujet qui ne semble pas vraiment pertinent et, pourtant, 15 étudiantes et étudiants africains m'ont vraiment touché quand ils m'ont expliqué que cette étude les aidait à s'adapter à la société canadienne, en tant qu'immigrants, qu'elle leur avait permis comprendre les origines du racisme ainsi que la sort réservé aux réfugiés dans le monde aujourd'hui.

Nous avons effectivement des priorités. Pour nous, la productivité est une priorité, ainsi que la cohésion sociale. La santé est aussi une priorité, et les enfants. Mais il est aussi important pour nous d'aider la recherche fondamentale. Tous ces intérêts...

Si vous êtes libres, nous organisons une autre exposition de recherche les 21 et 22 novembre, ici au Parlement. Les 20 plus importants projets de recherche dans le domaine des sciences sociales et humaines au Canada seront présentés, ici à Ottawa, par les étudiants les plus compétents en la matière. Si vous avez l'occasion de venir y faire un tour, vous pourrez voir ce que nous apprennent les sciences humaines au Canada. C'est extraordinaire.

M. Roy Cullen: Puis-je poser une autre question?

Le président: Oui.

M. Roy Cullen: Merci.

Je vais passer à autre chose. J'aimerais en savoir davantage sur la façon dont les priorités sont établies. Sont-elles proposées par les chercheurs ou par les conseils subventionnaires?

Je vais peut-être en poser une autre, qui s'adresse à qui voudra bien y répondre. Je devrais peut-être la poser à d'autres, mais je suis sûr que vous avez une opinion là-dessus. Pensez-vous qu'il y a un bon équilibre au Canada entre le nombre d'étudiants qui fréquentent les universités et ceux qui fréquentent les collèges techniques ou technologiques? Je suis porté à penser qu'il y a trop d'étudiants dans les universités et pas assez dans les collèges techniques. C'est très général, mais je me demande si vous avez réfléchi à cela et si vous avez fait des recherches sur le sujet. Est-ce qu'il y a un bon équilibre?

En Scandinavie et dans d'autres pays d'Europe, par exemple, ce n'est pas dévalorisant de fréquenter une école technique mais, ici, nous avons le sentiment qu'il est important que nos enfants fréquentent l'université. Je ne suis pas spécialisé en la matière, mais j'ai l'impression que certains d'entre eux auraient plutôt intérêt—autant pour eux que pour l'ensemble du Canada—à fréquenter un collège technique. Mais on les pousse à choisir l'université.

Est-ce juste de le dire? Avez-vous des idées là-dessus?

• 1240

Le président: Y a-t-il un bon équilibre, ou est-ce que nous ou celui qui pose les questions manquons-nous d'équilibre?

M. Marc Renaud: Pour ce qui est des priorités, très rapidement, elles sont établies de bien des façons.

Par exemple, la cohésion sociale est une question qui nous a été présentée par la greffière du Conseil privé. Elle est venue nous demander de l'aide parce qu'elle avait le sentiment que la situation était critique. Il y a d'autres sujets qui sont proposés par les chercheurs. Par exemple, les gens du milieu des sciences humaines se demandent quel est l'avenir des sciences humaines. Nous commençons à croire qu'il nous faudrait examiner cette question. Les priorités sont vraiment proposées par tous les milieux.

Pour ce qui est de savoir où nos enfants devraient étudier, un grand débat, mais aussi beaucoup de mythes entourent cette question. Par exemple, on croit que ceux qui étudient dans le domaine des arts et des sciences humaines ne trouvent pas d'emploi, que ceux qui font un doctorat en sociologie finissent serveurs. C'est absolument faux, d'après les données fournies aux chercheurs par Statistique Canada. Le taux de chômage des diplômés en sciences sociales est inférieur à celui des ingénieurs, et il est à peine plus élevé dans le cas des diplômés en sciences humaines.

Il devient de plus en plus clair qu'aujourd'hui nous avons probablement surtout besoin d'informaticiens, de techniciens qualifiés, qui ont aussi une bonne formation dans le domaine des arts, des têtes bien faites, quoi. L'autre jour, j'ai visité une entreprise de logiciels qui fabrique des jeux, et j'ai été surpris de constater qu'elle embauche plus de diplômés en littérature que de techniciens. Pourquoi? Parce que, pour créer un jeu et le mettre sur le marché, il faut à la fois de la couleur et de l'imagination, et c'est ce que les diplômés en sciences humaines peuvent offrir.

Je pense qu'il faut présenter les faits pour alimenter le débat. C'est important. Je n'ai rien contre la formation technique. Je pense que nous en avons besoin, mais il est dangereux de la privilégier au détriment de la formation universitaire.

Le président: Autre chose?

M. Garth Williams: J'aurais un bref commentaire à ajouter. Je sais que quelques travaux de recherche ont été faits sur le sujet. D'après une étude effectuée par Robert Allen de l'Université de la Colombie-Britannique, quand on compare les meilleures années de salaire, les diplômés en sciences sociales et humaines gagnent autant que les ingénieurs et les diplômés en commerce. Leur salaire est peut-être inférieur à la sortie de l'université mais, avec les années, il semble que la société apprécie un peu plus la contribution de ces diplômés que celle des techniciens qui doivent continuellement s'adapter aux changements technologiques. Ce n'est pas que nous n'avons pas besoin autant des uns que des autres, mais il est certain que le gain en valeur ajoutée est considérable pour l'économie quand on investit dans le domaine des sciences humaines et sociales.

Le président: Monsieur Carty.

M. Arthur Carty: Dans une économie mondiale en constante évolution sur le plan des communications, les télécommunications et la technologie de l'information sont extrêmement importantes. Le changement crée des demandes importantes, et pas seulement pour Internet et la télécommunication. Nous savons qu'on a énormément besoin de spécialistes dans ces domaines. Il suffit de lire les journaux pour s'en rendre compte. Mais cette révolution crée aussi des demandes dans des domaines connexes. En biotechnologie, par exemple, nous commençons à connaître une pénurie de spécialistes en chimie et en biologie moléculaire. Il est aussi très difficile de trouver quelqu'un qui possède à la fois des connaissances spécialisées et des connaissances plus générales dans des secteurs du génie et de la production, par exemple, qui font appel à deux champs de compétence.

Je crois que ce dont a besoin notre système d'éducation, c'est un peu plus de flexibilité. Il nous faut de la flexibilité parce que le changement est là et qu'il nous faudra nous adapter aux besoins du marché. Cela veut dire que des choses comme le recyclage professionnel prendront une très grande importance, par exemple le recyclage des scientifiques et des ingénieurs qui sont dans le mauvais domaine au mauvais moment, pour les amener dans un autre domaine. Il faudra aussi recycler les spécialistes des sciences sociales et humaines pour saisir les possibilités qui sont créées. À mon avis, la flexibilité dans le recyclage professionnel est absolument essentielle.

Le président: Merci, monsieur Cullen.

[Français]

Monsieur Dubé.

M. Antoine Dubé: Je vais commencer par un commentaire. Je pensais intervenir avec les mêmes expressions que M. Carty.

• 1245

Lorsque j'étais moi-même en formation, je constatais qu'il y avait presque autant de distance entre les fédéralistes et les souverainistes qu'entre les gens des sciences molles et ceux des sciences dures dans une université tellement ce monde ne communiquait pas. Je suis heureux de voir réunis ici ce matin des gens des différents secteurs, des ingénieurs, des scientifiques, des gens de sciences humaines et ainsi de suite. Dans le fond, vous demandez la même chose. Vous demandez au gouvernement plus de ressources pour faire de la recherche ainsi que des infrastructures. Vous demandez plus d'argent et vous justifiez cela très bien.

Il y a une autre chose. Vous n'en avez pas beaucoup parlé, mais vous en avez parlé quand même un peu. Vous êtes d'accord avec ceux qui sont venus parler un peu plus tôt ce matin des modifications à la fiscalité. J'y vois une certaine opposition. Au tout début des témoignages, on parlait de sciences très avancées, de techniques, de la nouvelle technologie et la nouvelle économie, mais les études démontrent qu'il y a des gens qui sont laissés pour compte. Ce ne sont peut-être pas ceux qui font des études doctorales, mais il y en a qui ne suivent plus l'économie du savoir. Au Québec—je n'ai pas les chiffres des autres endroits—, 40 p. 100 des garçons adolescents éprouvent de la difficulté et ne terminent pas leurs études secondaires. Imaginez l'écart qui est en train de se creuser.

J'essaie parfois de m'expliquer les causes de cela. Il y en a certaines qu'on connaît tous. Je lisais des textes de Toffler, par exemple, qui disait qu'au Japon, la compétitivité était un facteur déclencheur du suicide. Quand je vois que des gens réussissent dans la vie alors que d'autres n'y arrivent pas, je m'inquiète. Il y a une augmentation effarante du taux de suicide au Québec, pas seulement dans les communautés autochtones mais aussi dans la population en général. J'ai personnellement connu des universitaires qui, devant l'échec à un haut niveau, se sont jetés en bas de... C'est effarant et il ne faut pas l'oublier.

Je dis oui à l'économie du savoir et oui à une compétitivité accrue, mais nous sommes de plus en plus en concurrence avec le monde entier. Il faut faire attention, car il y a des gens qui sont laissés pour compte. Il faudrait peut-être s'en occuper. Je ne sais pas s'il y en a qui ont le goût de réagir à cela, mais j'ai hâte aux 20 et 21 novembre. Vous parlez de projets concrets d'étude. Souvent les sciences humaines se vendent moins bien parce que c'est de la recherche fondamentale. Il y a des gens qui terminent leur doctorat, mais combien y en a-t-il qui ne réussissent pas à faire ce dont ils rêvent, c'est-à-dire de la recherche? Comment un philosophe peut-il faire de la recherche s'il n'est pas professeur à l'université?

Il y en a un qui a réussi dans la vie, du moins je le pense, et c'est Pierre Péladeau. Il a commencé ses études en philosophie et il a fondé l'une des plus belles entreprises au Québec, qui est devenue Quebecor, que tout le monde connaît.

Je me préoccupe de cela, mais je pense aussi que les politiciens ne sont que le reflet de la société. Il faut démontrer aux politiciens comme à l'ensemble de la population les avantages très concrets et les enjeux des sciences humaines. Il faut qu'il y ait une meilleure information publique là-dessus.

Le président: Monsieur Renaud.

M. Marc Renaud: En ce qui concerne le problème des adolescents à l'école, que nous avons au Québec et qui existe partout, j'aimerais vous inviter très cordialement au Salon de la recherche, qui se tiendra à la fin du mois. Je vous inviterais à regarder un de ces projets de recherche, qui est celui de l'équipe de Richard Tremblay de l'Université de Montréal, qui vient de faire la manchette du Globe and Mail.

M. Tremblay suit depuis 20 ans les enfants de la Commission scolaire de Montréal. Il peut vous dire si un enfant de six ans sera capable de terminer plus tard ses études secondaires. Il le sait et, sachant cela, il s'est mis à construire un programme dans le but d'essayer de renverser le destin. C'est incroyable. Les enfants qui entrent dans son programme ne décrochent pas de l'école plus tard, même s'ils ont vécu dans des conditions très défavorables: un milieu pauvre, des parents séparés et ainsi de suite.

Cela démontre encore une fois à quel point les connaissances peuvent féconder l'action. Je vous inviterais à venir rencontrer en particulier cette équipe parce qu'elle a obtenu des résultats extraordinaires.

M. Antoine Dubé: Merci.

• 1250

[Traduction]

Le président: Est-ce qu'il y a d'autres commentaires?

[Français]

Madame Robert.

Mme Louise Robert: Je voudrais ajouter que ce qui est important, c'est la flexibilité du système scolaire. Il ne faut pas opposer les aptitudes techniques aux aptitudes intellectuelles. Je pense que l'humain est beaucoup plus complexe que cela. Il s'agirait d'avoir système scolaire beaucoup plus flexible qui permette d'exposer les étudiants, les jeunes à une gamme de développements. Je pense que c'est nécessaire pour pouvoir composer avec une société basée sur la connaissance qui va nous poser toutes sortes de défis qu'on n'a jamais vus.

[Traduction]

Le président: Merci.

Monsieur Brodhead.

M. Tim Brodhead: Oui, merci.

J'aimerais donner un petit exemple pratique. Plusieurs organisations sont venues nous dire leurs préoccupations au sujet de la violence dans les écoles. Elles proposaient une gamme de solutions, comme la collaboration entre les enfants et les professeurs, etc. Il y avait tant de formules pour faire face au problème que nous avons vite compris que les gens ne saisissaient pas vraiment ce qu'est réellement la violence dans les écoles.

Nous avons embauché quelques chercheurs, dont certains de l'Université de Montréal. Ce que nous avons clairement compris, et que leurs travaux de recherche ont permis de découvrir, c'est que la violence dans les écoles est en réalité le symptôme d'un problème. Ce n'est pas le problème, alors il est inutile de mettre le point de mire des programmes directement sur le problème de la violence.

Il faut se demander pourquoi les enfants de certaines écoles se comportent d'une façon particulière et pas dans d'autres écoles. Ce n'est pas parce que ce sont des écoles de quartiers aisés, et ce n'est pas à cause des antécédents familiaux. Ça a plutôt rapport à l'ampleur du sentiment d'appartenance des jeunes, au fait qu'ils ont l'impression d'être en quelque sorte les citoyens de l'école, et non pas seulement des étudiants passifs qui n'ont aucune influence, aucun sentiment de responsabilité ni aucun lien avec ce qui se passe autour d'eux. Dans les écoles où le directeur ou la commission scolaire... ou quelque chose dans l'environnement est tel que les étudiants ont l'impression que c'est leur école et qu'ils en ont la responsabilité, il n'y a pas de graffitis, il n'y a pas de violence, et il n'y a pas tous ces divers moyens de se faire remarquer.

C'est donc un domaine où nous aurions facilement pu financer la mise en oeuvre de tout un tas de solutions que les gens pensaient avoir, alors qu'en fait personne n'avait vraiment saisi la nature même du problème.

Le président: Monsieur Philip Cockshutt.

M. Philip Cockshutt: Je serai bref. Je voudrais seulement dire que le concept de l'apprentissage continu n'est qu'une réponse partielle à la question qui a été posée. C'est de plus en plus populaire auprès des gens qui ont un diplôme universitaire, et bien souvent de ceux qui ont fait des études supérieures. On a compris que ces gens peuvent avoir besoin de se rééquiper deux, trois ou quatre fois au cours de leur carrière. À mon avis, le concept de l'acquisition continue du savoir est important non seulement pour les professionnels hautement qualifiés, mais qu'il pourra épurer le système. Peut-être nos écoles secondaires devraient-elles mettre très fort l'accent sur cet aspect de la stratégie.

Le président: Merci, monsieur Dubé.

Nous laissons maintenant la parole à M. Brison.

M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Merci, monsieur le président.

J'ai bien apprécié vos interventions de ce matin. Je suppose qu'on pourrait dire que cette audience a été une combinaison d'exposés des cerveaux de gauche et de droite. Pour ceux d'entre nous qui sommes au centre politique, c'est tout à fait pertinent.

M. Roy Cullen: Est-ce que c'est nouveau?

M. Scott Brison: Je suppose qu'on pourrait dire centre-droite.

Une voix: N'oubliez pas qu'il faut deux ailes pour voler.

M. Scott Brison: C'est un sujet dont il faudra discuter une autre fois.

Quoi qu'il en soit, j'ai beaucoup apprécié vos interventions.

Lorsque l'on discute d'arts et de sciences humaines, je dis souvent d'entrée de jeu que je n'ai pas d'instruction, même si j'ai une formation, puisque j'ai un diplôme en administration des affaires. J'ai encouragé tous mes neveux et nièces à acquérir une éducation artistique, ce que leurs parents ne me pardonneront jamais. Le fait est que j'accorde une très grande importance aux sciences humaines et à l'éducation artistique. De fait, depuis plusieurs années, les banques d'affaires se sont peu à peu rendu compte que certains de leurs meilleurs éléments sur le plan financier étaient en fait des gens issus de programmes d'arts et de sciences humaines, donc il me semble qu'il est très important de reconnaître leur importance.

J'adresse la première question au côté provincial. Est-ce que les gouvernements provinciaux sont favorables à l'enseignement des sciences humaines et des arts? J'ai entendu quelque chose dernièrement qui m'a presque choqué. Je ne le crois pas forcément, mais je voudrais qu'on me le confirme.

• 1255

Il y aurait, paraît-il, des provinces qui partagent l'éducation postsecondaire en deux catégories—soit l'éducation pertinente et l'éducation non pertinente. J'aimerais qu'on me dise si c'est vrai ou non, parce que si ça l'est, je trouverais cela assez déconcertant. C'était ma première question.

Deuxièmement, M. Cockshutt a soulevé le sujet de la fiscalité. Plus précisément, est-ce que les impôts sur les gains en capital pourraient revêtir une importance particulière en ce qui concerne les nouvelles entreprises ou le secteur de la haute technologie, ce genre de choses? J'aimerais que M. Cockshutt, ou quiconque d'autre, m'explique l'ampleur du rôle de l'impôt sur les gains en capital, particulièrement dans le cas de l'exode des cerveaux vers les États-Unis.

Le président: C'est votre formation en administration des affaires qui refait surface. Vous ne vous intéressez pas à l'accomplissement personnel.

Des voix: Oh, oh!

M. Scott Brison: C'est juste. Eh bien, cela peut être pertinent si vous faites assez d'argent pour rester au Canada. C'est un objectif de réalisation personnelle que visent, je crois, beaucoup de Canadiens.

Le président: C'est vrai.

M. Scott Brison: Troisièmement, à propos des grappes de technologies et du rôle que peut y jouer le CNRC, j'aimerais savoir quel genre de démarches conjointes ont été faites au Canada Atlantique. Je sais que l'UCCB offre un programme qui a remporté un certain succès au Cap-Breton, par exemple, mais je serais intéressé de connaître les engagements du même genre qui ont été pris, s'il y en a.

Cela fait trois questions. J'espère que nous aurons le temps d'en poser plus.

Mme Louise Robert: Je crois que ce sujet des études pertinentes par rapport aux études non pertinentes est important. Il illustre en quelque sorte la comparaison entre les études techniques et universitaires. Il y a des gouvernements provinciaux dont la perspective de la recherche universitaire est fondée sur la perception de ce qui est utile, immédiatement utile ou inutile. Généralement, un produit ou un service est considéré «utile» s'il est immédiatement visible.

Alors, si on se demande si les sciences humaines et les sciences sociales sont utiles à la société, c'est difficile parce que ce n'est généralement pas si évident. Il ne fait pas de doute que c'est utile à la société, mais les résultats concrets ne peuvent pas être directement mis noir sur blanc.

Je crois que ces critères ont été formulés à une époque d'austérité et de ressources limitées, quand les gens se limitaient au plus utile. Ils ne tenaient pas compte du sens plus large du mot «utile». Je crois que cela pose un danger, en tout cas lorsqu'on se fonde là-dessus pour définir les priorités dans la répartition des fonds. Il faut donc en être conscients.

Pour ce qui est de la fiscalité, le gouvernement fédéral offre un crédit d'impôt du côté scientifique, mais les sciences sociales et humaines n'y sont pas admissibles. On dirait presque qu'il y a deux poids deux mesures pour déterminer ce qu'est la science. Si les crédits d'impôt et l'allégement fiscal sont importants, je crois que ce devrait être franc jeu pour tout le monde. La recherche en sciences sociales et humaines est tout autant de la recherche que la recherche en sciences naturelles ou en sciences médicales et biologiques.

Le président: Monsieur Renaud.

M. Marc Renaud: Les provinces soutiennent les arts et les lettres, mais souvent sans le savoir. Savez-vous pourquoi? Les étudiants et les professeurs de ces domaines représentent 55 p. 100 de la population des universités, et les universités sont financées par les gouvernements provinciaux. Par conséquent, étant donné que le gouvernement fédéral n'investit pas beaucoup dans les arts, les sciences sociales et les lettres, ce sont en réalité les provinces qui paient la facture.

Ceci dit, les provinces ne fonctionnent pas de la même manière. Je suis particulièrement impressionné par le Québec, l'Alberta et la Colombie-Britannique, dont les conseils subventionnaires ont un rôle complémentaire à celui des conseils subventionnaires fédéraux.

Ce n'est pas le cas de l'Ontario, par exemple. Il est vrai que le premier ministre Harris a déclaré à plusieurs reprises que les gens sont bêtes d'étudier les arts, parce que ça ne leur donnera pas d'emploi. Premièrement, les faits prouvent qu'il a tort. Deuxièmement, je crois qu'il a changé son fusil d'épaule. Savez-vous qu'il a commandé une étude sur la littérature et les enfants? Le rapport, qui vient d'être publié, est intitulé Reversing the Real Brain Drain: Early Years Study.

Tout cela, c'est de la recherche en sciences sociales. Pour savoir quoi faire pour les enfants maintenant, il faut des connaissances en sciences sociales. Donc, même le premier ministre Harris, qui a une réaction normale à l'égard des sciences sociales et des sciences humaines, semble changer d'idée.

• 1300

Le président: Monsieur McDiarmid.

M. Don McDiarmid (Consortium canadien pour la recherche): Je voudrais seulement ajouter un commentaire sur l'exode des cerveaux et les impôts. Il me semble qu'une seule solution ne peut pas convenir à tout le monde. Les entrepreneurs ont certains besoins, mais dans notre monde de gens qui font de la recherche fondamentale en particulier, d'après les commentaires que nous recevons, ce n'est pas le revenu après impôt qui est le facteur clé qui les convainc de partir, c'est plutôt les possibilités—le financement de la recherche.

En fait, j'ai ici un numéro récent de la revue Science Magazine, où on cite le professeur Richard Taylor, qui a reçu son premier diplôme en physique de l'Université de l'Alberta et a poursuivi ses études supérieures aux États-Unis, où il est resté, et qui a fini par recevoir le Prix Nobel. Il parlait de ce genre de chercheurs, et il a dit «Ce n'est pas l'appât du profit qui attire les gens aux États-Unis, c'est l'ambition». C'est une autre façon de formuler ce que je viens de dire. Ce n'est pas le revenu personnel qui les fait aller aux États-Unis, c'est la possibilité de se réaliser professionnellement.

Merci.

M. Scott Brison: Monsieur le président, si vous pouviez me permettre...

Le président: Bien sûr, si vous voulez ajouter quelque chose.

M. Scott Brison: Je pensais à quelque chose à ce sujet—et je comprends votre argument. En fait, je suis d'accord que ce n'est pas uniquement le revenu personnel après impôt, mais je soutiens que l'impôt sur les sociétés joue un rôle en ce qu'il crée un environnement, par exemple, où les compagnies peuvent payer plus, et il peut y avoir un environnement plus dynamique dans le secteur privé, où les opportunités peuvent se trouver. Donc, même si ce n'est pas uniquement une question d'impôt personnel, ce peut être les impôts personnels et les impôts sur les sociétés aussi. J'apprécie cependant le commentaire.

M. Don McDiarmid: C'est bien ce que je voulais dire en affirmant qu'une solution ne convient pas à tout le monde.

Le président: Monsieur Carty.

M. Arthur Carty: Peut-être puis-je répondre à la question sur le Conseil national de recherche. Vous l'avez peut-être remarqué sur le dernier document qui a été projeté, nous avons recensé dix initiatives communautaires d'innovation dans tout le pays. Cinq d'entre elles ont été lancées avec des ressources minimales et remportent déjà un succès phénoménal. Si vous connaissez la région, vous reconnaîtrez que Saskatoon, de nos jours, est en plein essor comme ville de la haute technologie, axée sur la biotechnologie agricole. Nous avons conçu un plan d'innovation avec les intervenants de Saskatoon et nous avons contribué au développement là-bas en assurant une présence physique, en attirant les compagnies et en aidant les entreprises à croître. Dans le Canada Atlantique, nous avons défini plusieurs cibles. Nous avons déjà entamé les pourparlers à St. John's, à Halifax, au Cap-Breton et au Nouveau-Brunswick.

Le gros avantage de tout cela est que nous pouvons déterminer avec la communauté le moyen de stimuler l'essor de son économie d'une façon particulière en mettant l'accent sur la technologie. Nous apportons nos ressources en vue de collaborer avec les partenaires de la région ou de la communauté à l'atteinte de cet objectif. Il faut absolument des ressources, tout de même, et nous avons tourné à plein régime au CNRC ces deux dernières années. Nous ne pouvons tout simplement pas entreprendre ces initiatives à moins d'obtenir un financement de base supplémentaire.

Le président: Merci, monsieur Carty.

M. Pillitteri posera la dernière question.

M. Gary Pillitteri (Niagara Falls, Lib.): Merci, monsieur le président.

J'adresse spécifiquement ma question à Mme Ford. Vous vous préoccupez du facteur coût de l'éducation, pour les enfants, et au bout du compte de l'éducation postsecondaire. Puisque c'est du ressort du gouvernement provincial et que le gouvernement n'effectue que des transferts en vrac au titre des transferts sociaux, avez-vous vraiment fait l'effort de vous adresser au gouvernement provincial pour voir si l'argent reçu du gouvernement fédéral est attribué à l'éducation postsecondaire? Ou encore pouvez-vous suggérer à ce comité des recommandations qu'il pourrait faire au gouvernement...? Est-ce que ce devrait être lié à des obligations, comme avant? Avec les transferts sociaux, le gouvernement fédéral rétablit le financement d'avant les compressions, alors je ne vois pas pourquoi les frais de scolarité sont augmentés.

Le président: Madame Ford.

• 1305

Mme Francine Ford: Merci.

Nous collaborons avec plusieurs autres groupes, alors je sais qu'il y a des organisations qui examinent la question. Je ne crois pas que ce soit nécessairement mon rôle de dire comment les choses peuvent être faites. J'ai jugé important d'aborder le sujet et de reconnaître que ce facteur devient important et qu'il faut s'y arrêter.

Je suis très consciente de la problématique de la compétence provinciale-fédérale, et je ne perds pas espoir que, d'une façon ou d'une autre, on puisse contourner cela et trouver des solutions créatives en tant que groupe. Je sais qu'il y a plusieurs possibilités, si les transferts fédéraux... Oui, ils existaient auparavant, quand... Et il y avait là une composante qui visait spécifiquement l'éducation postsecondaire. Avec le transfert social et la création du TCSPS, ça a en quelque pris une voie de garage.

J'ai entendu des grognements... Je ne devrais pas dire des grognements. Des messages positifs sont venus des provinces. Je sais qu'à l'assemblée des premiers ministres de l'Ouest, ils ont spécifiquement dit qu'ils seraient ouverts à une sorte d'arrangement au niveau fédéral-provincial pour que certains transferts ciblent spécifiquement l'éducation postsecondaire.

Donc, peut-être le climat est-il en train de changer et devient plus propice à une négociation du même genre que celle qui concernait la santé, et le transfert pourrait peut être plus cibler l'éducation postsecondaire. J'aimerais bien voir certains efforts en ce sens, ou à tout le moins quelques solutions créatives, par exemple, le modèle des États-Unis, où les subventions sont assorties d'une composante frais généraux.

Je suis convaincue qu'il y a beaucoup de solutions potentielles et qu'il y a moyen de mettre quelque chose au point. Et, oui, nous discutons au niveau provincial. Nous avons présenté des exposés au Conseil des premiers ministres à ce sujet-là précisément. Donc, il me semble que c'est de là que vient peut-être le changement de climat. Je ne peux pas dire que toutes les provinces sont avec nous, mais il se pourrait bien que nous ayons assez d'élan pour nous lancer.

Le président: Merci, est-ce qu'il y a d'autres questions?

M. Don McDiarmid: Est-ce que je peux ajouter quelque chose?

Le président: Certainement.

M. Don McDiarmid: Il me semble qu'avec le virage qui se fait vers une économie du savoir, la santé du système d'éducation postsecondaire devient l'affaire du gouvernement fédéral, en ce qu'elle se reflète, en bout de ligne, sur la santé de l'économie. Par conséquent, nous soulevons la question comme un problème auquel il faut trouver une solution, et qui touche, d'après nous, non seulement la responsabilité des provinces, mais aussi celle du gouvernement fédéral.

Le président: Au nom du comité, j'aimerais remercier... C'est, comme je le disais plutôt, toujours une discussion très intéressante.

Je crois que maintenant, nous avons enfin des choix. Nous avons des fonds pour faire des choix intelligents, je l'espère.

Cette discussion sur les sciences humaines et les sciences est très intéressante, parce que j'ai l'impression que dans la nouvelle économie, ces disciplines vont converger, et je peux même en citer un exemple. J'ai visité IBM dans le cadre d'un stage, et ils ont ces centres d'appel, maintenant, pour les relations avec les clients, et où sont réglés les problèmes. Maintenant, la personne qui travaille là doit avoir des connaissances techniques, mais aussi ce que j'appellerais une approche très humaine des rapports avec les clients.

Il y a quelque chose que j'ai constaté, en traitant avec des gens qui ont fait des études en sciences humaines et sociales, c'est qu'ils ont une perspective globale des choses. Ils sont plus sensibles aux différences culturelles, par exemple. Il ne faut pas oublier que les centres d'appel, de nos jours, reçoivent des appels du monde entier. Par conséquent, il est essentiel de stimuler ce genre de sensibilité dans une société comme la nôtre qui cherche à se faire une place sur le marché mondial, par exemple.

Donc, si je dois tirer une conclusion de ceci, c'est qu'en fait ces domaines sont très importants dans un monde en évolution qui requiert une meilleure compréhension de la dynamique humaine.

Vous pourriez même trouver que ce point de vue est reflété dans le rapport.

M. Marc Renaud: J'aimerais seulement appuyer ce que vous venez de dire. Si vous demandez à des gens chargés de programmes coopératifs—dans des universités qui ont de solides programmes coopératifs, comme Waterloo et Simon Fraser—ils vous diront que les gens qui ont le mieux réussi sont les philosophes qui ont une culture informatique. C'est le cas de Pierre Péladeau.

Le président: Il en existe.

Merci beaucoup.

La séance est levée.