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SIFS Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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SUB-COMMITTEE ON INTERNATIONAL FINANCIAL REPORTING GUIDELINES AND STANDARDS FOR THE PUBLIC SECTOR OF THE STANDING COMMITTEE ON PUBLIC ACCOUNTS

SOUS-COMITÉ DES LIGNES DIRECTRICES ET NORMES INTERNATIONALES RELATIVEMENT AUX ÉTATS FINANCIERS DU SECTEUR PUBLIC DU COMITÉ PERMANENT DES COMPTES PUBLICS

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 25 mars 1999

• 1606

[Traduction]

Le président suppléant (M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.)): Je déclare ouverte la séance du Sous-comité des lignes directrices et normes internationales relativement aux états financiers du secteur public du Comité permanent des comptes publics.

Le premier point à l'ordre du jour, conformément à l'alinéa 108(3)e) du Règlement, est la présentation du rapport sur la cinquième assemblée biennale du Conseil australasien des comités des comptes publics 1999. Nous accueillons aujourd'hui M. John Williams, que tout le monde connaît bien, et, bien entendu, le vérificateur général du Canada, M. Denis Desautels, qui est accompagné de Mme Maria Barrados, vérificatrice générale adjointe.

Bienvenue à tous.

Ça fait plaisir, monsieur Williams, de vous voir de ce côté-là de la table. Je suis certain que vous aurez à répondre à des questions difficiles de la part des membres du comité, et surtout de la présidence. Nous avons hâte de prendre connaissance de votre rapport sur les réunions importantes et informatives auxquelles vous avez participé. La parole est à vous.

M. John Williams (St. Albert, Réf.; président, Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes): Merci, monsieur le président. Je vois que vous n'avez pas de marteau. J'espère tout de même que vous allez maintenir l'ordre pendant la réunion, surtout avec mes collègues ici présents. Veuillez à ce qu'ils ne me cuisinent pas trop.

Monsieur le président et membres du sous-comité, c'est avec grand plaisir que je fais part au sous-comité des lignes directrices et normes internationales relativement aux états financiers, des résultats de mon récent voyage en Australie et en Nouvelle-Zélande.

Je suis accompagné de M. Denis Desautels, le vérificateur général du Canada, et de Mme Maria Barrados, qui ont fait le voyage en Australie et en Nouvelle-Zélande. Nous avons préparé des notes récapitulatives de la réunion du Conseil australasien des comités des comptes publics, et un rapport conjoint sur notre voyage en Australie et en Nouvelle-Zélande. Vous avez reçu des copies de ces documents. Je pense que vous allez les trouver très intéressants, puisqu'ils se rapportent au travail que le sous-comité entreprendra au cours des prochains mois.

Je vrais d'abord faire quelques brefs commentaires, après quoi M. Desautels et moi répondrons à vos questions.

Avant de parler de la conférence du Conseil australasien des comités des comptes publics, je voudrais vous donner un aperçu du rapport conjoint. Ce rapport décrit d'abord les réformes récentes qui ont été apportées aux pratiques de gestion, de comptabilité et de déclaration du secteur public en Nouvelle-Zélande et en Australie. Nous avons discuté de ces réformes avec plusieurs représentants des deux pays. Leurs noms figurent à l'annexe 3 du rapport.

Comme vous êtes nombreux à le savoir, la Nouvelle-Zélande et l'Australie ont été les premiers à moderniser le fonctionnement de l'appareil gouvernemental. Nous avons des leçons à tirer de leurs efforts puisque nous sommes confrontés, au Canada, aux mêmes défis.

Les réformes instituées dans les deux pays visent à rendre les services publics plus efficaces et moins coûteux. Les deux pays ayant adopté des modèles différents, nous allons examiner ceux-ci à tour de rôle, en commençant par celui de la Nouvelle-Zélande, qui a adopté certaines des réformes les plus innovatrices.

La Nouvelle-Zélande a restructuré les rapports qui existent entre les ministres et les ministères, et la façon dont le Parlement vote les crédits. Les ministres procèdent à des achats de services auprès des ministères au moyen de conventions d'achat conclues avec les sous-ministres. Le Parlement, pour sa part, fournit aux ministres les ressources dont ils ont besoin pour acheter les services requis. Les ministères disposent, en retour, d'une plus grande liberté de gestion.

L'obligation de rendre compte n'a pas été laissée de côté dans ce projet de réforme. Je vous renvoie aux sections qui traitent des rapports sur le rendement et du contrôle par le Parlement. Nous avons énuméré huit caractéristiques du modèle néo-zélandais qui pourraient vous intéresser. Ce modèle prévoit notamment un système de comptabilité d'exercice intégrale qui permet de saisir la pleine valeur économique et la pleine utilisation de tous les actifs du gouvernement.

• 1610

Nous terminons la section sur la Nouvelle-Zélande par une description du contexte dans lequel ces réformes ont été entreprises. Nous décrivons également certains points forts des réformes, de même que divers points à améliorer qui nous ont été signalés par les fonctionnaires.

Le rapport examine ensuite l'expérience australienne qui, comme je l'ai mentionné, n'est pas aussi avancée que l'expérience néo-zélandaise.

Les Australiens ont adopté une approche différente pour rendre leurs services publics plus efficaces et moins coûteux. Ils ont choisi de faire subir aux services et aux programmes gouvernementaux l'épreuve des mécanismes du marché, en vertu de la politique nationale sur la concurrence. Cette démarche vise à éprouver l'efficience et le coût des services gouvernementaux par rapport à ceux offerts par le secteur privé.

La combinaison des services gouvernementaux classiques avec des services ayant subi l'épreuve du secteur privé a donné lieu à un mouvement prononcé vers la sous-traitance. Les gestionnaires ont été astreints à préciser les résultats et les coûts des diverses activités gouvernementales couvertes par la politique en matière de concurrence.

L'Australie a également opéré des réformes en matière de gestion à l'échelle du gouvernement, amélioré le mécanisme de rapports sur le rendement et commencé la mise en place d'un système de calcul des crédits selon la comptabilité d'exercice. Il semble y avoir consensus autour des objectifs généraux de la politique en matière de concurrence et de l'adoption d'une méthode de comptabilité d'exercice. Toutefois, les Australiens s'interrogent sur la place qu'on accorde à la transparence et à la reddition des comptes dans la réforme des services gouvernementaux.

Nous résumons ensuite brièvement l'orientation des changements qui seront apportés.

J'aimerais, pour terminer, attirer votre attention sur la dernière partie de notre rapport, qui contient une série de suggestions à l'intention du Comité des comptes publics.

J'ai indiqué, plus tôt, que la comptabilité d'exercice intégrale constituait un élément clé des réformes qui visent à rendre les services publics plus efficaces et moins coûteux en Nouvelle-Zélande et en Australie. Comme bon nombre d'entre vous le savent, le gouvernement du Canada est en train de mettre en place un système de comptabilité d'exercice intégrale dans le cadre de la stratégie d'information financière, ou SIF. Le vérificateur général a inclus un chapitre sur la mise en oeuvre de la SIF dans son rapport de 1998. Le Comité des comptes publics a tenu des audiences sur la question en octobre dernier. Nous avons déposé un rapport dans lequel nous avons recommandé que le gouvernement accélère ses efforts en ce qui concerne la SIF et applique au processus d'affectation par crédits un système de comptabilité d'exercice intégrale.

Je pense que, par suite de notre examen, nous appuyons tous le principe de la SIF et souhaitons, en tant que comité, que le projet aille de l'avant. Nous proposons dans notre rapport six façons dont le comité peut apporter une contribution au processus. Je propose que nous discutions de ces suggestions à la prochaine réunion du comité de direction du Comité des comptes publics, et que nous soumettions ensuite un projet d'ordre du jour au comité plénier.

Avant de vous parler de la réunion du Conseil australasien des comités des comptes publics, je voudrais attirer votre attention sur les annexes du rapport. L'annexe I résume les questions qui ont été abordées à la conférence. L'annexe II donne la liste des participants aux réunions, et l'annexe III, la liste des personnes que nous avons rencontrées pendant le voyage.

Le rapport comprend également des copies de deux lettres. Dans le premier cas, il s'agit d'une lettre que le ministre a adressée au président du Comité des comptes publics pour se plaindre des témoins convoqués par le comité. La deuxième lettre est la réponse du président. Ces lettres sont instructives et montrent le degré d'autonomie qu'exerce le Comité des comptes publics.

J'aimerais maintenant vous parler de la réunion du Conseil australasien des comités des comptes publics.

Au Canada, nous avons le Conseil canadien des comités des comptes publics, qui regroupe tous les CCP. Le CCCCP se réunit tous les ans et tient plusieurs réunions conjointes avec les vérificateurs législatifs du Canada.

Il existe, en Australie, une organisation équivalente, soit le Conseil australasien des comités des comptes publics, ou le CACCP. M. Max Trenorden, président du Comité des comptes publics et de l'examen des dépenses de l'Australie-Occidentale, a assisté à plusieurs réunions du CCCCP. Cette année, il m'a invité à participer à la cinquième conférence biennale du CACCP, où j'ai présenté un exposé sur le rôle des comités des comptes publics vu par le Canada. Je peux vous fournir des copies de mon exposé, si vous voulez.

Il est question, dans mon exposé, des CCP, de leur évolution depuis la confédération, de leur mandat et de leurs objectifs, soit l'obligation de rendre compte, la transparence, l'amélioration du rendement et la qualité de l'information transmise au Parlement et aux Canadiens. Je parle également du passage à l'an 2000, du système d'information financière, de la façon dont le gouvernement prépare ses états financiers pour les comptes publics du Canada, et enfin de nos espoirs et aspirations pour l'avenir. Je pense pouvoir dire sans trop m'avancer que mon exposé reflétait le point de vue de tous les membres du comité.

• 1615

De façon plus précise, j'insiste sur notre désir commun d'apporter une contribution constructive au processus pour que tous les Canadiens aient accès à des services publics qui tiennent compte des principes d'économie et d'efficience, étant donné qu'ils sont financés par les contribuables. Je mets également l'accent sur notre désir de ne pas laisser l'esprit de parti dominer les travaux du comité, de miser davantage sur l'obligation de rendre compte plutôt que sur l'élaboration de politiques. Je pense que vous allez être d'accord avec moi quand je dis que cet objectif a été atteint dans une large mesure.

Avant de partir, je vous ai fait part de la proposition de créer une organisation internationale des comités des comptes publics. Je vous ai dit que cette proposition figurait à l'ordre du jour de la réunion du CACCP, et que je ferais le point sur l'état de la question.

La proposition a reçu un accueil favorable de la part des délégués à la conférence. Ils ont trouvé l'idée excellente, et ils ont adopté une résolution appuyant, en principe, la création de l'organisation. Ils ont convenu qu'il fallait poursuivre le travail dans ce dossier.

Nous avons décidé qu'il faudrait commencer par établir, dans un premier temps, des assises solides. Les éléments sont déjà en place. J'ai parlé du CCCCP et du CACCP. On trouve des organisations équivalentes ailleurs dans le monde, dans le sous-continent indien par exemple, où j'ai assisté, l'année dernière, à une conférence sur la lutte contre la corruption. Ces groupes régionaux peuvent se constituer en réseau, discuter de l'établissement d'une organisation internationale et promouvoir l'idée.

Le principe de saine gestion publique, auquel les parlementaires souscrivent déjà, servirait de fondement à l'organisation internationale. Or, la promotion de ce principe passe par l'adoption de normes comptables internationales, qui sont essentielles à tout système de comptabilité; la reconnaissance de l'indépendance des vérificateurs généraux, ou des institutions supérieures de contrôle des finances publiques, comme on les appelle parfois; la compréhension des forces à l'origine de la corruption; et l'élaboration de méthodes pour lutter contre celle- ci.

Nous sommes tous conscients du fait que l'obligation de rendre compte et la transparence sont des principes auxquels doit souscrire tout régime qui souhaite améliorer la gestion des affaires publiques et lutter contre la corruption. Comme le disait Louis Brandeis, ancien juge de la Cour suprême des États-Unis, il n'y a pas meilleur désinfectant que le soleil.

Le comité voudrait peut-être déterminer quelle est la meilleure façon de promouvoir l'adoption de saines pratiques de gestion. Certains mécanismes existent déjà. Comme je l'ai mentionné, il y a le CCCCP, le CACCP et le Centre parlementaire, qui organise tous les ans un séminaire dans les Laurentides. De plus, une conférence a eu lieu récemment à Kampala, en Ouganda, conférence qui a permis d'établir un réseau de parlementaires africains—des membres des assemblées nationales et sous- nationales—dont le mandat est de lutter contre la corruption.

Des initiatives similaires peuvent être entreprises dans d'autres régions du monde. À mon avis, il faut tirer parti des possibilités qui existent puisqu'elles vont permettre, à la longue, de créer une organisation internationale de parlementaires qui va miser sur les principes de saine gestion publique, la transparence et l'obligation de rendre compte.

Le fait de réunir des parlementaires pour lutter contre la corruption profitera à tous, surtout à ceux qui se trouvent au bas de l'échelle économique.

Voilà, chers collègues, qui termine mon exposé. Si vous avez des commentaires ou des questions, M. Desautels et moi y répondrons volontiers. Merci beaucoup.

Le président suppléant (M. Lynn Myers): Merci beaucoup, monsieur Williams. Je tiens à dire, au nom de tous les membres du comité, que vous avez très bien représenté le Canada.

J'ai remarqué que vous avez dit que tous les membres du comité veulent apporter une contribution constructive au processus, que nous voulons nous assurer que l'argent des contribuables est dépensé judicieusement, et que nous voulons faire notre travail sans nous laisser dominer par l'esprit de parti. C'est important, et je suis content que vous l'ayez souligné.

Monsieur Desautels, souhaitez-vous faire une déclaration?

M. L. Denis Desautels (vérificateur général du Canada): Oui, monsieur le président. Je voudrais vous parler de quatre points qui sont mentionnés dans le rapport et qui ont été abordés dans le cadre des réunions que nous avons eues avec des représentants des gouvernements australien et néo-zélandais.

Premièrement, il y a la rapidité avec laquelle le système de comptabilité d'exercice intégrale a été implanté dans ces pays. La Nouvelle-Zélande utilise ce système depuis un certain nombre d'années, et l'Australie compte le mettre en place en trois ou quatre ans. Or, si nous comparons cela à notre situation—et je fais surtout allusion à l'Australie, dont le gouvernement est comparable au nôtre—s'ils réussissent dans leur démarche, ils auront été beaucoup plus rapides que le Canada. C'est un point intéressant que nous avons noté quand nous étions là-bas.

• 1620

Deuxièmement, il est possible de mettre en place un système de calcul des crédits selon la comptabilité d'exercice. C'est une des questions qu'on se posait. Nous avons encouragé le Secrétariat du Conseil du Trésor à envisager la possibilité d'instituer un tel système dans le cadre de la SIF. Nous nous sommes rendu compte, en parlant avec les gens là-bas, qu'il était possible d'instituer un tel système. C'est non seulement possible, mais également très souhaitable.

Troisièmement—et cela s'applique plutôt à la Nouvelle- Zélande—j'ai été étonné par le grand degré de précision qui caractérise leurs demandes de crédits. Comme l'indique notre rapport, ils ont un certain nombre de crédits, peut-être deux ou trois par ministère, sauf que les demandes de crédits sont réparties en 800 crédits, et ceux-ci sont très détaillés. Certains vont juger qu'on accorde trop de place aux détails, mais cette approche est différente de celle que nous suivons au Canada, où nous regroupons des dépenses importantes en quelques crédits dans chaque ministère. Pour ce qui est du contrôle qu'effectue le Parlement, le modèle néo-zélandais offre des possibilités intéressantes qui, à mon avis, méritent d'être explorées.

Quatrièmement, quand on parle, dans les deux pays, de comptabilité d'exercice et d'octroi de crédits selon la comptabilité d'exercice, on fait allusion à un système intégral de gestion des programmes gouvernementaux. Ces systèmes sont, d'une certaine façon, uniques. Il serait intéressant de demander aux fonctionnaires canadiens quelle orientation ils entendent adopter pour atteindre les mêmes objectifs.

C'est pourquoi, à la page 8 de notre rapport, nous formulons six recommandations au comité, dont celle d'inviter des représentants du Conseil du Trésor et du ministère des Finances à venir expliquer au comité comment ils comptent atteindre les mêmes objectifs que ceux visés par les modèles australien et néo- zélandais. C'est pourquoi j'aimerais attirer l'attention du comité sur les six recommandations que M. Williams et moi avons formulées.

Merci, monsieur le président.

Le président suppléant (M. Lynn Myers): Merci beaucoup, monsieur Desautels.

Madame Barrados, désirez-vous ajouter quelque chose?

Mme Maria Barrados (vérificatrice générale adjointe, Bureau du vérificateur général du Canada): Non, je n'ai rien à ajouter.

Le président suppléant (M. Lynn Myers): Merci beaucoup.

Monsieur Mayfield.

M. Philip Mayfield (Cariboo—Chilcotin, Réf.): Merci beaucoup. Est-ce que je dois vous appeler monsieur le président ou monsieur le président suppléant, compte tenu du fait que notre président est assis à l'autre bout de la table?

Le président suppléant (M. Lynn Myers): Je pense que «monsieur le président» fera l'affaire.

M. Philip Mayfield: Merci beaucoup, monsieur le président. C'est ce que je ferai volontiers.

Je m'excuse de ne pas avoir pu entendre intégralement votre rapport, John. Vous m'en voyez désolé.

La question qui m'est venue à l'esprit pendant que vous parliez porte sur le système néo-zélandais des conventions d'achat. Je me demandais si vous pouviez nous le décrire un peu plus en détail, nous expliquer son fonctionnement et, en particulier, comment s'effectue la responsabilisation entre les ministères et les dirigeants politiques du gouvernement.

M. John Williams: Oui. Les ministres sont les politiques qui décident quels services le gouvernement souhaite offrir aux citoyens. Chaque ministre conclut ensuite un contrat avec son ministère au sujet des services qu'il souhaite, à titre de politicien, que ce dernier offre à la population. Ensuite, il conclut un contrat très détaillé avec son sous-ministre, que l'on appelle administrateur principal.

Supposons que le ministre des Transports veuille construire un nouveau pont. L'administrateur principal lui dira combien il en coûtera pour construire un nouveau pont, mais à cela, il ajoutera le coût des frais généraux, de la gestion administrative et du personnel cadre, afin que l'on sache quels sont non seulement les coûts directs liés à la construction du pont ou de tout autre service, mais également le coût total. Le ministre peut alors décider d'aller de l'avant, s'il est disposé à augmenter les impôts pour offrir le service en question ou décider de s'en tenir là.

• 1625

Au cours de l'année, si le ministre décide d'ajouter des services additionnels, son administrateur principal lui dira: «Si vous voulez que j'offre davantage de services A, quel autre service voulez-vous que j'interrompe? En effet, je n'ai pas de budget à ce titre. Allez-vous me fournir des fonds additionnels?»

Il s'agit donc d'un système intégral d'évaluation des coûts programme par programme qui tient compte des frais généraux, de l'administration et de son coût, ainsi que des sommes consacrées au programme en particulier. De cette façon, le ministre, le ministère et les citoyens savent exactement combien coûte chaque service. Voilà la méthode de mesure, d'analyse et d'interaction avec les hauts fonctionnaires qui a cours en Nouvelle-Zélande.

En Australie, les choses sont quelque peu différentes. Je ne me souviens pas de l'expression précise dont on se sert là-bas, mais c'est quelque chose comme système de mesure concurrentielle. Tout doit être ventilé, mesuré et analysé sur une base concurrentielle.

Ainsi, on a donné l'exemple de l'entretien des avions militaires. Comment savoir si on réalise l'optimisation des ressources pour ce qui est de l'entretien des avions militaires? Il y a des comparaisons possibles avec l'entretien des avions civils. On prend donc en compte les coûts qu'engagent des sociétés indépendantes d'entretien d'avions civils qui oeuvrent dans un contexte concurrentiel et si les coûts d'entretien des avions militaires se démarquent sensiblement, il y a lieu de se demander pourquoi.

Voilà donc les deux modèles.

Monsieur Desautels, vous voulez peut-être ajouter quelque chose.

M. Denis Desautels: La différence fondamentale c'est que là- bas, les crédits sont fondés sur la valeur des extrants que le ministre se procure auprès de son propre ministère ou d'un autre.

Ici, la coutume veut que les crédits d'un ministère soient fondés sur les ressources qu'il consomme. Le nombre d'employés, les contributions versées, les contrats accordés, les immobilisations qu'il achète et entretient, etc. Voilà comment on établit les budgets ici.

Par contre, là-bas, on essaie de commencer par l'autre bout de la chaîne. On achète les extrants d'un ministère donné, qui ont une certaine valeur fondée sur une évaluation du marché—pour autant qu'il soit possible d'en faire une. Mais le but visé est d'essayer de déterminer le coût des intrants et d'acheter des extrants. Voilà ce qui détermine la valeur des crédits. Une fois qu'on a convenu de cela, c'est le fondement du contrat entre le ministre et le ministère ou l'organisme fournisseur de services.

M. Philip Mayfield: Il me semble que la comptabilité d'exercice s'imposerait pour ce genre de planification et d'engagement contractuel. Si ce n'est pas le cas, peut-être pourriez-vous m'expliquer ce qu'il en est.

Une autre chose me vient à l'esprit. L'Australie est victime des mêmes problèmes que la Colombie-Britannique, en ce sens qu'à certains intervalles, elle doit absorber des dépenses énormes pour lutter contre les incendies de forêt. Existe-t-il un mécanisme spécial pour faire face à cette situation ou s'en tient-on au processus habituel de budgétisation?

M. Denis Desautels: C'est l'une des lacunes de leur système: ils se retrouvent avec des contrats très rigides entre le ministre et les fournisseurs. En cas d'imprévu, il se pourrait qu'ils aient un problème.

Par conséquent, dans ces deux pays, on essaie de confronter ce problème particulier du système, et c'est l'un des secteurs qui doit être amélioré. Il faut qu'en cas d'imprévu, il y ait une marge de manoeuvre. L'organisme fournisseur de services ne peut tout simplement pas dire: «Désolé, monsieur le ministre. Cela n'est pas dans mon contrat.» Il va de soi qu'on ne veut pas que cela se produise.

J'ignore comment ils s'en tirent. Peut-être que Mme Barrados ou M. Williams ont une meilleure réponse. Je suppose que le ministre peut puiser dans d'autres réserves afin de conclure un contrat supplémentaire en cas d'imprévu.

M. Philip Mayfield: Ce n'est pas très important pour nous, mais voulez-vous ajouter quelque chose, madame Barrados?

• 1630

Mme Maria Barrados: Je voulais simplement ajouter que les conventions d'achat précisent les ressources qui seront consommées et qu'il est nécessaire d'utiliser la comptabilité d'exercice à cette fin, mais parallèlement, il faut aussi prendre en compte les résultats escomptés. Par conséquent, il y a à la fois un résultat et un coût, les deux ensemble.

Vous avez parlé des incendies de forêt. À cet égard, on s'attend à ce que l'organisme responsable assure dans une certaine mesure la protection des forêts. Comme M. Desautels l'a signalé, il sera plus difficile à ce moment-là d'établir des coûts parce que ce n'est pas comme si on achetait une chose que l'on peut visualiser et qui donne lieu à des certitudes.

Cela dit, on essaie de recourir là-bas à la même doctrine et aux mêmes principes pour insuffler de la rigueur dans le système, notamment en ce qui a trait à la gestion, à l'affectation des crédits par le Parlement et à la responsabilisation des ministres et des bureaucrates.

M. John Williams: Je voulais simplement dire qu'en Nouvelle- Zélande, on se fonde sur la réalité. Ainsi, on prévoit dans le budget un certain nombre d'évasions de détenus tous les ans parce qu'on sait qu'il en survient. Nous n'avons jamais vu ce genre de budgétisation réaliste ici.

M. Philip Mayfield: Monsieur le président, je ne sais pas de combien de temps nous disposons.

Le président suppléant (M. Lynn Myers): Nous pouvons laisser libre cours à la discussion.

M. Philip Mayfield: Je céderais volontiers la parole. J'aimerais aborder une autre tangente, mais vous voudrez peut-être laisser quelqu'un d'autre intervenir.

Le président suppléant (M. Lynn Myers): Allez-y. Nous allons donner la parole à M. Cardin dans un instant et ensuite, à M. Grose.

M. Philip Mayfield: Voici la tangente que je veux aborder. L'été dernier, lorsque nous étions ensemble à Yellowknife, nous avons discuté du fait que d'autres pays, particulièrement dans la région du Pacifique, se tournent vers l'Australie, la Nouvelle- Zélande, voire même le Canada, pour mettre sur pied leur système de comptes publics. Je me demande si certaines de vos conversations là-bas ont porté là-dessus. A-t-on exploré ou discuté ce sujet plus avant?

M. John Williams: Nous avons eu affaire à l'organisation internationale dont nous avons parlé à Yellowknife au cours de la conférence du CCCCP l'année dernière. La question a été soulevée et, comme je l'ai mentionné dans mon rapport, elle a donné lieu à un accord de principe au Conseil australasien des comités des comptes publics.

Nous n'avons pas été en mesure de définir un modèle qui permettrait de réaliser cela, mais comme je l'ai mentionné dans mon rapport, il semble que partout dans le monde, divers groupes se rassemblent spontanément. Par exemple, lorsque j'étais à Delhi, l'an dernier, j'ai constaté que l'Inde, le Pakistan, le Népal, le Sri Lanka et le Bangladesh reconnaissaient tous la gravité du problème et souhaitaient s'orienter dans cette direction.

Comme je l'ai mentionné, Bob Miller, le directeur exécutif du Centre parlementaire s'est rendu en Ouganda il y a quelques semaines pour assister à une conférence sur la subornation et la corruption. À cette occasion, les participants ont spontanément décidé de créer un réseau.

La clé est donc d'instaurer les meilleures pratiques du bon gouvernement en s'inspirant des comités des comptes publics de pays comme le Canada, l'Australie, la Nouvelle-Zélande et d'autres. En effet, on note chez ces pays une volonté d'instaurer ce type de discipline à grande échelle.

Le président suppléant (M. Lynn Myers): Merci, monsieur Mayfield.

M. Philip Mayfield: Merci, monsieur le président. Peut-être pourrais-je reprendre la parole plus tard.

Le président suppléant (M. Lynn Myers): Oui, absolument. Nous vous reviendrons dans quelques minutes.

[Français]

Monsieur Cardin, est-ce que vous désirez poser une question?

M. Serge Cardin (Sherbrooke, BQ): J'aimerais commencer par remercier le vérificateur général et notre président d'avoir accepté de consacrer leur temps du 21 février jusqu'au 2 mars au bénéfice du comité.

Malheureusement, je n'ai reçu les notes d'information que ce matin et je n'ai donc pas eu le temps de les lire au complet. Selon les propos que j'ai entendus cet après-midi, j'ai cru comprendre que lorsqu'on parle d'information financière et de l'exercice intégral, on englobe aussi la comptabilité par activité. Quand le gouvernement s'engage dans des activités, il doit avoir recours à la meilleure façon de comptabiliser ses frais pour évaluer ainsi que contrôler sa performance face à cette activité-là. Vous en avez sans doute déjà discuté. L'objectif principal qu'on vise, c'est bien sûr l'information, ainsi que le contrôle et l'imputabilité de ceux qui gèrent toutes ces sommes d'argent.

Lors de vos discussions et échanges, est-ce que vous avez eu l'impression que certaines gens avaient mis de l'avant de meilleurs outils de contrôle afin de mesurer l'efficacité en termes d'imputabilité à l'intérieur des comptes publics? Est-ce que d'autres pays sont passablement plus avancés que nous et est-ce que nous aurions intérêt à les consulter?

• 1635

M. Denis Desautels: Monsieur le président, je pourrais bien répondre dans un premier temps et inviter M. Williams à ajouter quelques mots, ce qui serait sans doute très bien.

Monsieur Cardin, j'expliquais plus tôt que nous avions constaté, surtout en Nouvelle-Zélande, qu'on avait recours à un système de gestion globale. Ce système ne se limite pas simplement à la comptabilité, aux bienfaits de la comptabilité d'exercice, et à un système de budget. Il s'agit plutôt d'un système global de gestion des activités gouvernementales qui couvre tout le cycle de gestion des d'activités gouvernementales, à partir du moment où on soumet au Parlement les demandes de crédits budgétaires jusqu'au moment où on fait rapport des résultats atteints par chacune des agences à qui on a confié des programmes gouvernementaux. D'après moi, c'est ce système global qui est intéressant. La leçon que j'en tire, c'est qu'on a intérêt à suivre cette approche d'assez près. Ils n'ont pas encore réglé tous les problèmes techniques, bien sûr, mais ils ont quand même fait des progrès intéressants. Nous avons donc avantage à maintenir le dialogue avec ces deux pays-là, au moins pour l'instant, et à voir quelles idées nous pourrions emprunter. Par contre, il serait assez difficile d'importer ici tout ce système, parce qu'il est basé sur certains principes de gestion publique qui ne sont pas tout à fait les mêmes que les nôtres.

Comme M. Williams le disait, en Australie entre autres, les ministères sont assujettis à une loi sur la concurrence. Tous les services publics doivent donc subir un test de concurrence du marché. Il y a d'autres concepts semblables qui sont au centre même de leurs systèmes et qu'on ne retrouve pas nécessairement ici ou dont on ne semble pas avoir l'équivalent.

C'est pourquoi il serait intéressant que nous puissions entendre les fonctionnaires fédéraux, dont ceux du Conseil du Trésor ou du ministère des Finances, qui sont responsables de ces activités-là afin qu'ils puissent nous expliquer leur vision. Ils connaissent sans doute les systèmes qu'utilisent l'Australie et la Nouvelle-Zélande et ils pourraient nous donner une réponse canadienne ou expliquer la façon canadienne de faire ce qu'on fait là-bas. Il serait peut-être intéressant de les entendre nous expliquer cette vision et de voir comment le système canadien, de façon globale, se tient ensemble.

M. Serge Cardin: Il va sans dire que je partage ce point de vue. La gestion ne se limite pas à des chiffres et à la production d'états financiers. Comme vous venez de le dire, elle est aussi basée sur certaines valeurs selon les différents pays. On invoque les notions de concurrence, d'appels d'offres entre les ministères et ainsi de suite. Il est évident que le système de gestion qu'on adopte varie en fonction des objectifs vers lesquels on tend, de l'information qu'on veut recueillir, de la gestion qu'on veut se donner et des valeurs qu'on veut défendre. Il est donc évident qu'il ne serait pas utile de claquer fidèlement un modèle déjà existant. Lorsqu'on élabore un système, il faut premièrement déterminer de façon précise l'objectif qu'on poursuit et la façon de l'atteindre.

Comme comptables, lorsque nos clients nous demandent des renseignements d'ordre financier, il faut savoir les conseiller en fonction des actions qu'ils ont l'intention d'entreprendre. On peut donc aller chercher ce qu'on veut pour atteindre les objectifs qu'on vise. Lorsqu'on détermine quel système de gestion saura le mieux nous servir, il faut bien connaître la direction qu'on veut suivre.

[Traduction]

M. John Williams: La comptabilité d'exercice permet de jeter les bases d'un modèle de gestion. En soit, la comptabilité d'exercice ne permettra pas de s'acquitter de cette tâche, mais comme vous le savez, Serge, en votre qualité de comptable, elle donne à la gestion les outils qui lui permettent de prendre des décisions quantitatives intelligentes quant à ses orientations.

Voilà pourquoi j'estime que le gouvernement devrait rapidement instaurer la comptabilité d'exercice et concrétiser le projet relatif au système d'information financière. Comme je l'ai mentionné, le vérificateur général y a consacré un chapitre l'an dernier. Une fois que les gestionnaires auront en main cette information comptable de base, on pourra commencer à élaborer un système de dépenses gouvernementales ciblées.

• 1640

J'ai été très impressionné par l'analyse et l'exposé des représentants de l'Agence centrale de Nouvelle-Zélande. Ils font preuve d'une grande lucidité en ce sens qu'ils s'attendent à des résultats et uniquement aux résultats attendus. Par conséquent, si les dépenses ont permis d'aller plus loin que prévu, cela est considéré comme N'importe quel autre cas de gaspillage. Ils adhèrent au principe de l'évaluation continue.

Je vous renvoie au rapport du Sous-comité des subsides du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Ce rapport a été déposé à la Chambre des communes en décembre dernier par le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Nous attendons la réponse du gouvernement, qui devrait arriver d'ici la fin d'avril. Essentiellement, le rapport pose quatre questions fondamentales concernant l'évaluation des programmes.

Comme nous le savons, à titre de membres du Parlement, nous ne pouvons voter que sur les dépenses non législatives, qui représentent environ 50 milliards de dollars. Il y parallèlement des dépenses législatives de l'ordre de 100 milliards de dollars qui ont cours. Il s'agit de sommes allouées à la suite de l'adoption de mesures législatives, dans certains cas il y a 30, 40 ou 50 ans. La Chambre n'en a jamais discuté.

Dans son rapport, le sous-comité demande au gouvernement d'envisager de poser ces quatre questions dans le cadre de l'évaluation des programmes. L'une d'elle est la suivante: Quel est l'objectif de politique gouvernementale visé par le programme? Une fois qu'on a cerné la politique gouvernementale, on peut se demander dans quelle mesure le programme réussit à atteindre cet objectif. On peut également poser les deux questions suivantes: Le fait-il de façon efficiente? Serait-il possible d'obtenir les mêmes résultats en procédant autrement?

Il s'agit de quatre questions simples que nous devrions nous poser constamment. En Australie et en Nouvelle-Zélande, on les pose déjà. En effet, les dépenses sont fonction de ce que les politiciens souhaitent, et rien d'autre.

[Français]

Le président Suppléant (M. Lynn Myers): Monsieur Cardin, c'est tout?

M. Serge Cardin: Oui, merci.

Le président Suppléant (M. Lynn Myers): Merci.

[Traduction]

Monsieur Grose, je vous prie.

M. Ivan Grose (Oshawa, Lib.): Merci, monsieur le président.

J'ai quelque peu perdu le fil des travaux du comité récemment. Je n'ai pas été très assidu. Vous êtes partis à l'étranger et je ne vous ai pas suivis. Pendant que vous jouissiez de la chaleur du climat et de l'hospitalité de vos hôtes en Australie et en Nouvelle-Zélande, je me suis rendu dans des établissements pénitentiaires aux deux extrémités de notre pays. Je m'empresse d'ajouter que je l'ai fait à titre de visiteur seulement.

Ce que vous dites est fascinant. C'est ainsi qu'une véritable entreprise gérerait ses affaires, mais cela me rappelle une chose que j'ai observée à la Ville de Toronto il y a quelques années. Il avait été décidé que les divers services allaient livrer concurrence à l'entreprise privée. Autrement dit, si une canalisation d'égout devait être remplacée, il y avait appel d'offres. Les services municipaux pouvaient présenter une soumission, de même que l'entreprise privée. Dans de nombreux cas, c'est l'entreprise privée qui a enlevé le contrat.

À l'époque, je travaillais pour la ville sur une base contractuelle et j'ai constaté, chose étrange et merveilleuse, que le nombre d'employés des divers services ne changeait jamais, qu'ils aient obtenu le contrat ou non. Par conséquent, je ne sais pas si c'était un bon système.

Je m'intéresse à l'idée de gérer le gouvernement comme une entreprise et à la possibilité de prévoir une certaine somme pour réaliser certaines choses, au lieu de procéder par ententes contractuelles. C'est bien beau pour le secteur privé, qui peut choisir son champ d'action et éviter les catastrophes, soit en n'intervenant pas, soit en les faisant couvrir par ses assurances. Les gouvernements ne peuvent faire cela. Par conséquent, comment s'y prendre? Supposons qu'une inondation provoque l'effondrement d'une douzaine de ponts. Va-t-on ou non remplacer ces ponts? La question ne se pose pas.

Au bout du compte, pensez-vous que ce sera beaucoup mieux en vertu de ce système? A-t-on déjà des résultats? La Nouvelle-Zélande est déjà assez avancée dans cette voie, apparemment. Quels sont les résultats?

M. John Williams: Évidemment, la Nouvelle-Zélande était l'un des pays les plus réglementés du monde libre. A la suite de la crise, elle a essentiellement fait faillite. Or, maintenant, les finances du pays sont en excellent état, en grande partie grâce à la gestion du budget gouvernemental selon cette méthodologie.

Il y a trois niveaux de hiérarchie. Selon eux, le gouvernement en soi existe à strictement parler pour élaborer la politique publique. Dans ce contexte, des contrats sont conclus avec les agences gouvernementales, ce que nous appellerions notre fonction publique, afin de fournir des services dans un cadre monopolistique dont sont exclues les entreprises, par exemple la délivrance de chèques d'assurance sociale ou d'assurance-emploi.

• 1645

Il y a ensuite le volet affaires, par exemple les services d'imprimerie. Ici au Canada, nous avons privatisé le groupe Communications Canada, qui faisait office d'imprimeur du gouvernement depuis de nombreuses années. Pourquoi le gouvernement était-il présent dans le champ de l'imprimerie alors qu'il y a littéralement des milliers d'entreprises d'imprimerie dans tout le pays qui sont parfaitement capables de s'acquitter de cette tâche? L'imprimerie, c'est l'imprimerie.

On reconnaît donc, comme certaines personnes l'ont dit, que le gouvernement doit se charger des domaines qui n'intéressent pas les milieux d'affaires. Pour reprendre l'analogie des ponts démantelés par une inondation, nous savons qu'il faudra les remplacer, mais pourquoi le gouvernement devrait-il s'occuper de la construction de ponts? Il existe certainement une politique qui stipule que nous devons remplacer les ponts et allouer les ressources nécessaires, mais faisons un appel d'offres auprès des constructeurs de ponts pour voir quelle firme peut s'en charger le mieux, le plus rapidement et à moindre coût.

Nous devons reconnaître les aspects différents de la politique gouvernementale, la prestation de services qui n'intéressent pas le secteur privé et les services directs que n'importe qui peut fournir. Laissons à chacun le soin de s'attacher à ses propres objectifs.

M. Ivan Grose: Je suis fasciné parce que vous-même et le vérificateur général avez dit: on réalise ce que souhaite réaliser le ministre dans l'intérêt de ses commettants ou pour toute autre raison. Cela me pose un problème. Autrement dit, le ministre peut décider de remplacer ou non un pont ou d'en construire un nouveau et il peut aller de l'avant après avoir obtenu une estimation des coûts, et ainsi de suite.

M. John Williams: Pour garder le même exemple, il est peu plausible que la construction de trois ponts ait figuré dans son contrat annuel avec l'administrateur principal, les ponts en question n'ayant pas été détruits et le ministre n'ayant pas prévu qu'ils le seraient.

M. Ivan Grose: Non, je ne parle pas des ponts démantelés. Je parle de la décision de construire un autre pont qui n'existait pas auparavant.

M. John Williams: S'il s'agit de déterminer la nécessité de construire un autre pont, je vous rappelle notre propre système. Le Parlement fournit les crédits. C'est la même chose là-bas.

Le ministre soumet au Parlement le projet d'un nouveau pont. Le Parlement l'approuve et vote les crédits nécessaires. Le ministre est alors autorisé à conclure un contrat avec son administrateur principal. Le ministre dit: «Je vais construire un nouveau pont», ce à quoi l'administrateur répond: «Cela coûtera tant. Donnez-moi l'argent et je ferai en sorte qu'il soit construit.» S'il s'agit de faire construire un pont, le ministre va sans doute procéder par appel d'offres car des entreprises privées peuvent faire cela. Voilà les rapports entre les intervenants.

Voulez-vous ajouter quelque chose, monsieur Desautels.

M. Denis Desautels: Tout cela est fondé sur la prémisse selon laquelle il est nécessaire d'obtenir l'autorisation du Parlement. Les ministres obtiennent l'autorisation du Parlement, tout comme nous le faisons ici, ainsi que l'approbation des crédits. Ensuite, le ministre peut conclure un contrat soit avec son ministère soit avec d'autres ministères ou avec un organisme privé, mais ce contrat vise les marchandises et les extrants qu'il a été autorisé à acheter grâce à ces crédits.

M. Grose pose une question fort valable: Cette approche axée sur l'entreprise fonctionne-t-elle dans un cadre gouvernemental? C'est une question que nous devons nous poser. Les Néo-Zélandais et les Australiens sont convaincus que leur système est valable et qu'il fonctionne. Nous devons observer cette expérience avec un certain scepticisme et être sûrs d'être convaincus avant d'en chanter les louanges.

Cependant, il en est déjà ressorti certaines choses utiles qui n'ont peut-être pas été mentionnées. Par exemple, afin de permettre aux ministères individuels de fournir les services contractuels exigés par le ministre, on a accordé à ces derniers une plus grande marge de manoeuvre en ce qui concerne les règles d'embauche, notamment de contractuels, et de passation de marchés. Cela permet à une organisation gouvernementale d'agir un peu plus rapidement et de s'acquitter d'une mission avec plus d'efficience que dans un cadre traditionnel.

M. Ivan Grose: Tout cela s'appuie sur l'inspection d'un vérificateur général, naturellement.

M. Denis Desautels: J'allais y venir. J'allais dire que dans leur système, les mécanismes de responsabilisation peuvent se trouver renforcés car avec une telle démarche, comme je l'ai dit tout à l'heure, il y a plus de précision dans l'ensemble du système quant à qu'on souhaite que fassent les ministères. Par conséquent, on peut exiger des rapports sur le rendement plus précis. On peut même fonder la rémunération des sous-ministre sur leur rendement.

• 1650

Je dirais qu'il faut voir cela avec scepticisme, tout en gardant l'esprit ouvert face à certains des avantages qui semblent déjà se dessiner.

M. John Williams: Cela permet également de mettre l'accent sur ce qu'on veut réaliser grâce aux politiques gouvernementales et sur la façon d'y arriver.

Voici un exemple qu'on nous a donné en Nouvelle-Zélande. Avant la crise, les Postes avaient le mandat fondamental de livrer le courrier avec rapidité et efficience. Mais il existait également une politique tacite selon laquelle les Postes devaient absorber une main-d'oeuvre peu qualifiée dans les circonscriptions des politiques pour réduire le chômage. Comme vous pouvez le voir, il y avait un conflit entre ces deux politiques.

Une fois qu'il a été établi sur papier que le mandat des Postes était purement et simplement de livrer le courrier aussi rapidement, aussi efficacement et aussi économiquement que possible, sans politique tacite sous-jacente, les gestionnaires ont pu s'atteler à la tâche et ont réussi à réduire très sensiblement les coûts.

Cela a causé un problème ailleurs—la hausse du chômage de la main-d'oeuvre peu qualifiée—, mais maintenant ce problème est du domaine public et on pourra essayer de le régler au lieu d'accepter ce coût caché année après année.

Le président suppléant (M. Lynn Myers): Madame Barrados, voulez-vous intervenir?

Mme Maria Barrados: Oui.

Je voudrais faire un bref commentaire à la suite de votre question, monsieur Grose.

Le cadre général découlant du système parlementaire de Westminster demeure en place. Autrement dit, le rôle du budget du ministre des Finances, le rôle des crédits, le rôle du Budget des dépenses et les rapports soumis au Parlement, tout cela demeure en place.

Ce qui a vraiment changé en l'occurrence, c'est la façon dont la fonction publique est administrée, la gestion et l'administration de la fonction publique. Il y a eu un changement important dans les rapports entre les hauts fonctionnaires et les ministres et ensuite, le Parlement. Voilà la nature des changements. Ce sont des changements qui relèvent de la gestion et de l'administration.

Comme M. Desautels l'a dit, ces deux pays cherchaient activement des moyens de rendre leur fonction publique plus efficiente. Ils voulaient s'assurer que celle-ci s'acquittait de sa mission de façon efficiente et à un coût raisonnable. Ils ont adopté ce modèle concurrentiel. Ce n'est certainement pas le seul modèle. Nous devrions être sceptiques face à cette solution en particulier. Mais le problème est le même. Nous faisons face au même problème: nous souhaitons que la gestion des affaires publiques se fasse de la façon la plus efficiente et efficace possible, à un coût raisonnable.

M. Ivan Grose: Au bout du compte, les mêmes têtes vont rouler si les choses tournent mal. On n'a pas évacué la possibilité de dire qu'un ministre n'administre pas son ministère comme il le devrait.

M. John Williams: Le ministre est responsable des décisions politiques. Il est responsable du concept global, de sorte qu'il peut être appelé à démissionner. Pour ce qui est de l'administration courante, quotidienne, c'est l'administrateur principal dont la tête roulerait s'il n'a pas su livrer la marchandise. Le volet politique relève de la responsabilité ministérielle.

J'ajouterai une chose. En Nouvelle-Zélande, étant donné qu'un administrateur principal a un contrat renouvelable de cinq ans, cela décourage la création d'empires. Le contrat en question peut être prolongé de trois ans. Le maximum est donc de huit ans, pas plus. On réduit donc la possibilité que des hauts fonctionnaires se créent des empires.

M. Ivan Grose: Merci.

C'est tout ce que j'ai à dire.

Le président suppléant (M. Lynn Myers): Merci beaucoup.

Il y a d'autres questions dont nous devons discuter et nous allons passer à huis clos, à moins qu'il y ait d'autres interventions. Je demanderais à M. Williams de bien vouloir conclure.

M. John Williams: Cela montre que le Canada n'est pas une île et qu'il y a beaucoup à apprendre des meilleures pratiques appliquées ailleurs. Il ne fait aucun doute que nous avons aussi beaucoup à partager avec autrui. Nous devrions reconnaître cela et être constamment à l'affût des nouvelles idées et méthodologies qui sont essayées et adoptées.

• 1655

Comme Mme Barrados l'a dit, dans certains domaines, il y a lieu d'être sceptique. Il n'est pas nécessaire que nous endossions les idées d'un autre pays simplement parce qu'elles sont nouvelles et qu'au premier abord, elles semblent meilleures. Prenons le temps d'examiner cela en profondeur. Si nous sommes convaincus qu'il s'agit d'une bonne pratique et que le Canada devrait adopter, alors fort bien.

Le président suppléant (M. Lynn Myers): Merci.

Monsieur Desautels.

M. Denis Desautels: Je suis tout à fait d'accord, monsieur le président.

Le président suppléant (M. Lynn Myers): Très bien.

Monsieur Mayfield, vous avez une brève question?

M. Philip Mayfield: Oui, et je pense qu'elle appellera une brève réponse également.

Je sais qu'il existe en Australie un mouvement en faveur de l'adoption d'un modèle de gouvernement républicain. Y a-t-il des changements liés à cette tendance qui pourrait avoir une incidence sur les questions dont nous avons discuté aujourd'hui?

M. John Williams: Non, les Australiens ne cherchent pas à abandonner le modèle de Westminster pour adopter un régime présidentiel.

Comme vous le savez, les Australiens souhaitent nommer leur propre chef d'État en remplacement de la Reine. Ils n'ont pas encore décidé si la personne en question devrait être nommée par le Parlement ou encore par voie référendaire ou électorale, mais je pense qu'ils envisagent un chef d'État figuratif, et non un chef d'État doté d'un pouvoir réel, comme le président des États-Unis qui évolue dans un régime présidentiel. Ils ont l'intention de conserver le modèle de Westminster.

M. Philip Mayfield: J'aurais voulu poser une question au sujet des 800 votes et de quelques autres petites choses, mais je le ferai en privé plus tard.

Merci, monsieur le président.

Le président suppléant (M. Lynn Myers): Merci beaucoup.

John, je vous remercie de votre exposé aujourd'hui. Je remercie également le vérificateur général et le vérificateur général adjoint. Ce fut une séance très informative et intéressante. Comme vous l'avez signalé, il y a des choses que nous pouvons apprendre et peut-être appliquer ici au Canada.

Voilà qui met fin à cette partie de la séance. Je demanderais à M. Williams de s'asseoir au fauteuil pour le volet à huis clos qui porte sur les travaux futurs et d'autres questions.

Merci beaucoup.

[La séance se poursuit à huis clos]