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JURI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON JUSTICE AND HUMAN RIGHTS

COMITÉ PERMANENT DE LA JUSTICE ET DES DROITS DE LA PERSONNE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 24 novembre 1998

• 0917

[Traduction]

La présidente (Mme Shaughnessy Cohen (Windsor—St. Clair, Lib.)): Nous recevons aujourd'hui du Bureau du Commissaire intérimaire du Nunavut, Mme Nora Sanders, sous-ministre désignée de la Justice et ancienne résidente du sud-ouest de l'Ontario, et Rebecca Williams, sous-ministre adjointe désignée de la Justice. Nous recevons également, de Nunavut Tunngavik Inc., M. Allan MacLure, conseiller juridique, ainsi que Leena Evic-Twerdin, conseillère à la politique et au programme. Je souhaite la bienvenue à tous et à toutes. Il y a également une interprète qui nous traduira la déclaration liminaire de Rebecca, qu'elle fera en inuktitut. C'est bien ça?

Une voix: Elle assurera l'interprétation pour Leena et Rebecca.

La présidente: Très bien. Nous allons commencer tranquillement. Vous pouvez vous brancher sur le canal français ou sur le canal anglais et obtenir l'interprétation mais au Nunavut, il y a plus de deux langues officielles.

Très bien. Nous sommes prêts à écouter votre témoignage, après quoi nous passerons aux questions. Nora, si vous voulez bien organiser votre délégation...

Mme Nora Sanders (sous-ministre désignée de la Justice, Bureau du Commissaire intérimaire du Nunavut): Merci, madame la présidente.

Je vous remercie beaucoup de l'occasion qui m'est offerte de comparaître devant le comité aujourd'hui et de vous parler du projet de loi C-57. Comme la présidente l'a dit, je m'appelle Nora Sanders et je suis sous-ministre de la Justice pour le Nunavut. Je suis accompagnée de Rebecca Williams, sous-ministre adjointe. Nous sommes très heureuses d'être ici aujourd'hui en compagnie des autres membres de la délégation: les représentants de Nunavut Tunngavik, Leena Evic-Twerdin et Allan Maclure.

Je suis heureuse de pouvoir comparaître ici ce matin dans une tenue acceptable. J'ai pris l'avion hier soir à Iqaluit et, pour des raisons inexpliquées, ma valise, elle, a abouti à Kimmirut. Je portais un jeans et des vêtements de voyage ordinaires. Hier soir, j'ai donné un coup de téléphone paniqué à Lois Leslie, l'avocate qui suit notre dossier ici à Ottawa et elle est arrivée ce matin avec une tenue complète qui me permet de me présenter à vous dans une tenue décente.

La présidente: Nous vous aurions entendue vêtue de jeans, Nora.

Mme Nora Sanders: Merci, Shaughnessy.

M. Chuck Cadman (Surrey-Nord, Réf.): Ça ne m'a jamais dérangé.

La présidente: Le problème ici au comité, c'est que Chuck est trop élégant.

Mme Nora Sanders: Rebecca et moi sommes ici aujourd'hui au nom de Jack Anawak, le commissaire intérimaire du Nunavut. Il est dans l'Extrême-Arctique aujourd'hui et ne pouvait être des nôtres. Au rythme où vont les choses de ces temps-ci, on s'attend à ce qu'il ait le don d'ubiquité. Je sais qu'il aurait aimé être parmi nous aujourd'hui parce qu'il tient beaucoup à ce projet de loi et à cette nouvelle organisation judiciaire.

• 0920

Nous représentons un gouvernement en puissance ou, plus justement, en préparation. Actuellement, nous nous employons à ce que le ministère de la Justice soit prêt à fonctionner dès le 1er avril au Nunavut. Notre travail s'inspire des plans de la Commission d'établissement du Nunavut, qui a produit un document intitulé Footprints in New Snow—dont la deuxième édition s'intitule Footprints 2—qui nous sert de guide. Nous sommes également guidés dans notre tâche par les trois parties à l'accord politique du Nunavut: le gouvernement du Canada, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et Nunavut Tunngavik Inc.

Dans la lettre d'instruction que le commissaire intérimaire a reçue lors de sa nomination en avril 1997, le ministre des Affaires indiennes a bien précisé que le gouvernement du Nunavut devait disposer d'un appareil judiciaire pleinement opérationnel dès le début. C'est notre tâche à nous, et le projet de loi dont nous venons vous parler aujourd'hui en est un élément.

Dans le document Footprints 2, la Commission d'établissement du Nunavut a souscrit au principe de l'unification de l'appareil judiciaire du Nunavut dans toute la mesure du possible. Elle a aussi recommandé que le commissaire intérimaire convoque une réunion afin de déterminer si la population du Nunavut est en faveur de cette idée.

Je ne parlerai pas en détail de cette rencontre aujourd'hui, je laisserai à Rebecca le soin de le faire. Cette réunion a eu lieu en novembre dernier. J'y étais à titre de représentante du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, où je vivais. C'est Rebecca qui a convoqué la réunion. Le fait que nous soyons ici aujourd'hui montre bien que les différentes régions du Nunavut étaient en faveur de l'idée d'un tribunal de première instance à palier unique.

J'aimerais vous expliquer brièvement le pourquoi de cette structure. Auparavant, j'aimerais vous décrire nos tribunaux pour vous donner une meilleure idée de ce que cela représente.

Actuellement au Nunavut, il n'y a qu'un seul juge, le juge du tribunal territorial d'Iqaluit dont la juridiction se limite à la région de Baffin. Baffin est l'une des trois grandes régions du Nunavut. Le tribunal territorial, l'équivalent de la cour provinciale, pour les deux autres régions, est situé à Yellowknife, et donc à l'extérieur du Nunavut. Toute la Cour suprême au Nunavut est desservie par des juges de Yellowknife. Vous voyez donc que quelle que soit la façon dont nous allions nous y prendre, que ce soit un tribunal à palier unique ou à deux paliers comme nous y sommes habitués, il fallait créer une infrastructure à Iqaluit ou dans le Nunavut pour servir le Nunavut. Actuellement, tous les écrits destinés à la Cour suprême sont déposés à Yellowknife. Il n'y a même pas de bureau au Nunavut où l'on peut déposer ses actes de procédure.

Même si le Nunavut s'étend sur un vaste territoire, il ne compte qu'environ 25 000 habitants. Il y a 27 localités, et aucune d'elles n'est reliée par la route à l'exception d'Arctic Bay et de Nanisivik, où se trouve une mine. Partout ailleurs, les liaisons se font par avion, par motoneige ou par bateau. Notre capitale, Iqaluit, compte entre 4 000 et 5 000 habitants.

Au début, nous aurons deux juges et nous en aurons un troisième à la fin de la première année, lorsque toute l'infrastructure sera en place. Je voulais vous faire cette description pour vous montrer que ce serait bien peu pour un appareil judiciaire à deux paliers. Voilà donc pourquoi, sur le plan pratique, il nous semble préférable d'avoir un système à palier unique. Vous pouvez facilement imaginer quels maux de tête causerait l'organisation des circuits dans 27 localités si nous n'avions que trois juges pour deux paliers différents. Ce serait un casse-tête.

Nous devons d'ailleurs compter avec le fait qu'au Nunavut on a le sentiment que l'appareil judiciaire est inutilement compliqué. Beaucoup de gens comprennent mal le système. Nous estimons que le tribunal de première instance à palier unique créé par ce projet de loi sera plus simple.

• 0925

Les habitants du Nunavut comprennent mal le système actuel. Ils s'interrogent lorsque le juge et les fonctionnaires de la cour se présentent. Ils ne peuvent entendre que certains types d'affaires et c'est un autre juge accompagné d'autres fonctionnaires de la cour qui doivent venir une autre fois entendre d'autres affaires pendantes dans la localité.

Nous estimons que si le système est plus simple, il sera mieux compris et donc plus accessible à la population. Les juges auront aussi plus de latitude. On espère que le tribunal sera plus efficace, réduisant ainsi le délai entre la première comparution et le procès, et réduira les retards.

La Cour de justice du Nunavut continuera de reposer sur des circuits itinérants. La cour se rendra sur place pour entendre les affaires. Cela ne changera pas. Toutefois, parallèlement au tribunal de première instance à palier unique, nous voulons améliorer les programmes des juges de paix. Actuellement, il y a au moins un juge de paix dans chaque localité, mais leur éventail de fonctions varie beaucoup. Cela tient en grande partie à la formation qu'ils ont reçue.

Actuellement, ils sont nommés par le juge en chef de la cour territoriale, qui sera le doyen des juges de la nouvelle cour. Ils occuperont dorénavant des fonctions différentes. Il y aura trois niveaux. Au niveau supérieur, le juge de paix pourra présider à un procès et présider à un tribunal de la jeunesse. Le tribunal de la jeunesse est d'ailleurs une nouveauté et la première séance de la formation des juges de paix pour ce tribunal se donne cette semaine à Iqaluit.

Nous allons également nommer un administrateur des juges de paix qui travaillera étroitement avec le doyen des juges et les juges de paix dans leurs localités. L'administrateur sera la personne-ressource et un conseiller s'occupera de leur formation, etc. Nous pensons qu'avec cet appui renforcé, qui se raffermira avec le temps, les juges de paix auront l'assurance nécessaire pour entendre un éventail plus vaste d'affaires.

L'avantage ici, c'est que l'affaire se réglera sans doute plus rapidement et dans un cadre plus familier pour les parties si elle est entendue par quelqu'un de l'endroit. Il s'agit là d'une initiative complémentaire qui ne relève pas du projet de loi, mais qui vient s'ajouter à la création du tribunal de première instance à palier unique.

Comme vous le savez, la création du tribunal exige des modifications à la fois à des lois fédérales et à des lois territoriales. C'est évidemment pour discuter du projet de loi fédéral que nous sommes ici aujourd'hui. À l'heure actuelle, un projet de loi correspondant est à l'étude à l'Assemblée législative des Territoires du Nord-Ouest. De fait, le comité de l'Assemblée l'étudiera jeudi de cette semaine. Le texte remplace la Loi sur l'organisation judiciaire des Territoires du Nord-Ouest, abroge la Loi sur la Cour territoriale tout en conservant les éléments essentiels de cette loi.

Les deux groupes de lois ont été revus minutieusement à intervalles réguliers par un groupe de travail multipartite. En font partie ceux que vous voyez ici et qui représentent le Bureau du Commissaire intérimaire du Nunavut et NTI, le gouvernement du Canada—représenté par MAINC et la Justice—et, évidemment, les Territoires du Nord-Ouest.

Il y a également eu des consultations auprès de la magistrature, du Barreau des Territoires du Nord-Ouest et, en particulier, des membres du barreau du Nunavut. Le Conseil de développement social du Nunavut a reçu copie du texte et a eu l'occasion de le commenter. Nous croyons savoir que le ministère de la Justice a également consulté les autres gouvernements du pays, qui sont donc au courant.

Je suis très heureuse d'être ici aujourd'hui en compagnie des représentants de NTI. Cela vous donne une idée, je crois, du cheminement que nous avons suivi. Nous avons eu des discussions animées et très approfondies au cours de l'examen de ces textes, et nous sommes arrivés à un point dont nous sommes heureux du résultat et convaincus que le texte devrait être adopté. Nous sommes très heureux du précédent que constitue la démarche suivie pour aboutir à ce consensus.

• 0930

Demain, je sais, vous entendrez Goo Arlooktoo, ministre de la Justice des Territoires du Nord-Ouest. Ses représentants ont évidemment fait partie de ces démarches. Son message sera semblable au nôtre.

Nous savons que le projet de loi C-57 a fait l'objet d'une étude approfondie à la fois de la part du groupe multipartite et d'autres intéressés. Les fonctionnaires du ministère de la Justice ont mené le processus de consultation de façon ouverte, respectueuse et sérieuse, ce qui a beaucoup contribué au résultat que vous avez sous les yeux.

Je n'ai pas l'intention aujourd'hui de commenter les modifications de façon détaillée. Je sais que les fonctionnaires du ministère de la Justice vous ont donné des séances d'information détaillées. J'aimerais toutefois vous mentionner un ou deux points importants pour nous.

Tout d'abord, l'un des objectifs du Bureau du Commissaire intérimaire du Nunavut dans l'élaboration du projet de loi C-57 était de s'assurer que le texte ne porte pas atteinte aux droits fondamentaux des habitants du Nunavut. Après en avoir discuté soigneusement avec les membres du barreau et d'autres, nous sommes convaincus que cet objectif a été atteint.

Deuxièmement, ce projet de loi précise certaines dispositions transitoires importantes. Cela nous accordera la souplesse nécessaire pour la création du nouveau tribunal. Nous en sommes très satisfaits.

Ce nouveau tribunal s'appellera la Cour de justice du Nunavut. Nous estimons qu'il saura mieux répondre aux besoins des habitants du Nunavut. Le projet de loi C-57 préserve les droits de fond et les droits procéduraux de notre peuple. Grâce à l'adoption du projet de loi C-57, ainsi que de la loi territoriale correspondante, nous aurons le cadre législatif nécessaire à la mise en oeuvre d'un élément essentiel au système de justice du Nunavut. C'est une autre étape très enthousiasmante qui mènera à la création du Nunavut.

Nous encourageons le comité à appuyer l'adoption du projet de loi dans les meilleurs délais. Je vous remercie de m'avoir écoutée.

J'inviterais maintenant Rebecca Williams à prendre la parole. Après qu'elle et nos collègues de NTI auront pris la parole, nous serons ravis de répondre à vos questions et d'écouter vos observations.

La présidente: Rebecca, vous pouvez commencer quand vous le voudrez.

Mme Rebecca Williams (sous-ministre adjointe désignée de la Justice, Bureau du Commissaire intérimaire du Nunavut); (Interprétation): Bonjour. Je vous remercie beaucoup de nous avoir invités.

Je m'appelle Rebecca Williams. Je suis sous-ministre adjointe de la Justice. Je suis heureuse d'avoir l'occasion de vous entretenir aujourd'hui de la Cour de justice du Nunavut et du processus d'inclusion des Inuits dans la conception d'un tribunal que nous comprenons et qui tient compte de nos besoins et de notre mode de vie.

• 0935

Je suis heureuse d'être ici avec Leena Evic-Twerdin et Allan Maclure, de Nunavut Tunngavik.

Je travaille au sein du système de justice du Grand Nord depuis 1982, au sein des cours territoriales et supérieures des Territoires du Nord-Ouest, avec des juges de paix et avec les services de probation et de libérations conditionnelles. Pendant ces années, j'ai travaillé dans des domaines tels que la justice pénale et l'aide à l'enfance dans les tribunaux comme dans le système de justice en général. Comme Inuk, j'ai aussi pu observer chez moi et chez les membres de ma famille les conditions de vie des Inuits et les défis qu'ils doivent relever.

Le travail que nous avons accompli en prévision de la création de la Cour de justice du Nunavut revêt pour moi une importance particulière. D'après mon expérience, c'est le début d'une véritable participation des Inuits au contenu même de leur propre système de justice.

Pour bien vous faire comprendre, je vous décrirai le contexte dans lequel la justice est rendue au Nunavut. Pendant des années, le système judiciaire, dans notre territoire, a existé et influé sur nous, mais sans nous écouter. Les Inuits n'avaient pas voix au chapitre. Bien des facteurs ont contribué au silence des Inuits au sein du système de justice. Il me faudrait beaucoup plus de temps que je n'en dispose aujourd'hui pour vous les décrire.

Nous avons subi la justice en silence trop souvent à cause du silence qui régnait dans nos collectivités—silence au sujet des problèmes sociaux, des comportements inacceptables, des souffrances, de nos propres conflits et de la façon de les régler. Les Inuits ne savaient pas comment se servir du système qui avait été créé pour cela. Le système fonctionnait en marge de nos collectivités et notre culture.

• 0940

Dans bien des communautés, on estimait que le système de justice relevait de quelqu'un d'autre, appartenait à quelqu'un d'autre. Souvent, et c'est encore le cas aujourd'hui, les détenus et les victimes sont amenés hors de la collectivité. Parallèlement, nous constatons que nos parents qui ont des démêlés avec la justice doivent attendre longtemps avant que les choses se règlent. Souvent, la situation s'aggrave dans l'intervalle.

On nous dit qu'il y a maintenant près de 200 détenus sous responsabilité fédérale et territoriale. Les services correctionnels du Canada nous disent que le taux de crimes avec violence et le taux d'incarcérations est plus élevé chez nous que partout ailleurs au Canada. Nous savons qu'il y a surpopulation dans les centres de détention, et que les détenus n'en reviennent pas guéris. Souvent, leur comportement est encore pire à leur retour.

D'après mon expérience, essayer de mettre en oeuvre des politiques qui ont été élaborées sans la participation des Inuits est une entreprise vouée à l'échec.

Le processus que nous avons utilisé pour jeter les bases de la Cour de justice du Nunavut est révolutionnaire parce que c'est la première fois qu'on fait participer les Inuits. Ceux-ci ont pu décrire les systèmes dont ils ont besoin pour régler les conflits et pour favoriser la paix et la sécurité dans les collectivités à l'avenir. Le processus lui-même m'a donné espoir envers l'avenir de notre gouvernement au Nunavut. Il m'a permis d'apprendre des moyens de mettre fin à notre silence.

• 0945

En août 1997, le commissaire intérimaire du Nunavut, Jack Anawak, m'a confié la responsabilité de le conseiller sur l'élaboration d'un système pour le Nunavut. Nous voulions mettre en place un système qui soit perçu comme étant logique par tous les citoyens du nouveau territoire. Depuis lors, nous avons défini nos valeurs dans un dépliant intitulé «Mission for Nunavut». Nous pourrons en fournir un exemplaire à tous les membres que cela intéresse.

J'ai organisé la réunion où on a examiné pour la première fois les mesures dont nous discutons ici aujourd'hui. Je veux parler de la réunion consultative sur la justice au Nunavut, qui s'est tenue à Iqaluit les 18 et 19 novembre 1997.

Plus de 50 personnes y ont participé, y compris bon nombre d'intervenants du système de justice actuel, des personnes qui sont au courant des réformes judiciaires et d'autres types de réformes ailleurs au Canada. Surtout, il y avait un grand nombre de représentants inuit et d'autres personnes qui possédaient une expérience des organisations sociales inuit.

C'est le groupe Tatigiit qui a animé la réunion. Je suis très fière de ce groupe. J'en faisais partie et j'ai collaboré avec les organisateurs de la réunion. Je suis très heureuse que Leena Evic soit ici aussi. Elle a collaboré avec nous aussi.

Notre rapport s'intitule «Justice That Brings Peace».

• 0950

J'ai été étonnée de voir à quel point, dans un contexte de collaboration et de respect mutuel, nous avons pu arriver à un consensus au sujet d'un système judiciaire qui serait susceptible de respecter les besoins exprimés à la réunion.

Nos conclusions se trouvent aux recommandations 11 à 26 du document du commissaire intérimaire intitulé Footprints 2.

Je souhaite vivement qu'on adopte ce projet de loi dans sa forme actuelle.

Je crois que nos efforts ont abouti à un système judiciaire qui servira bien les Inuits. À mon avis, il a tout ce qu'il faut pour intégrer les connaissances actuelles sur les systèmes judiciaires et la résolution des conflits. Je pense que notre processus d'élaboration du système judiciaire a été influencé par tous les résidents du Nunavut et qu'il leur appartient. Je suis convaincue qu'il pourra rendre justice à nos collectivités et à nos familles.

Je suis aussi très heureuse des commentaires positifs et des sentiments harmonieux qui ont découlé de notre processus, et j'espère que les choses vont continuer ainsi.

Je voudrais vous remercier de m'avoir donné l'occasion de comparaître, et j'aimerais remercier Martha Flaherty d'avoir assuré l'interprétation.

Le vice-président (M. John Maloney (Erie—Lincoln, Lib.)): Merci, madame Williams.

Leena Evic-Twerdin.

Mme Leena Evic-Twerdin (conseillère, Politique et programme, Nunavut Tunngavik Inc.); (Interprétation): Bonjour. J'aimerais d'abord vous remercier de m'avoir permis de m'exprimer dans ma propre langue. Merci.

J'aimerais aussi profiter de l'occasion pour remercier le Bureau du commissaire intérimaire et le ministère de la Justice du gouvernement du Nunavut de nos efforts conjoints. Je voudrais remercier aussi la Commission d'établissement du Nunavut d'avoir fait preuve de beaucoup de courage et de créativité. Nous en sommes à mettre en oeuvre le modèle qu'elle a recommandé.

• 0955

Enfin, j'aimerais remercier Martha Flaherty de ses services d'interprétation.

Je suis heureuse de vous faire cette première déclaration. Je suis heureuse pour la population du Nunavut, qui disposera d'une nouvelle structure judiciaire.

Une fois le projet de loi C-57 adopté, on passera à l'institution d'un tribunal de première instance à palier unique. C'est une bonne chose car il fait partie intégrante du processus d'édification de notre nation.

Nunavut Tunngavik Inc. a été créé en 1993. NTI représente les Inuits du Nunavut. Il joue un rôle de leadership auprès des Inuits et il travaille en vue d'un avenir prospère et stable qui favorisera le bien-être de la population inuit du Nunavut. NTI est responsable de la mise en oeuvre de l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut.

J'ai le plaisir de collaborer avec NTI depuis la création de son bureau en avril 1993, bien que j'aie dû m'absenter pendant un an.

Depuis le début, j'ai constaté que beaucoup de progrès ont découlé de la mise en oeuvre de l'Accord, entre autres le lancement avec succès de programmes et de services au Nunavut par l'intermédiaire de divers organismes.

La création du Nunavut comporte pour nous deux éléments clés: les Inuits auront la propriété et la responsabilité de la gestion de leurs terres et de l'environnement, et un nouveau gouvernement sera créé.

Les trois signataires de l'Accord politique du Nunavut, soit le gouvernement fédéral, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et NTI, ont tous des obligations en vertu de l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut.

• 1000

Avant que la responsabilité soit remise aux citoyens du Nunavut, je voyais beaucoup d'Inuit qui ne savaient pas vers où ils voulaient se diriger. Par contre, depuis l'établissement du Nunavut, je vois beaucoup d'Inuit qui possèdent une vision pour l'avenir.

Leur espoir est représenté par leur expression: maintenant nous avons le Nunavut. Il est clair que le Nunavut représente leur vision, leur avenir.

Selon la tradition, les Inuits du Nunavut sont maîtres de leur propre vie et de leur propre destin.

Nous avons encore beaucoup d'Inuit qui ont déjà connu cette vie traditionnelle, et beaucoup d'entre eux possèdent toujours la sagesse et les connaissances qui viennent d'une vie sans crise. Ils savent ce que c'est que la responsabilité personnelle et les responsabilités envers autrui, l'importance du respect et de l'accomplissement.

Comme nous comprenons notre identité, nous sommes en train de faire beaucoup de choses au Nunavut. Entre autres, nous élaborons des programmes, nous lançons des initiatives dans le domaine de la santé et du bien-être, ainsi que de la guérison et de la prévention du suicide. Nous avons dû entreprendre ce genre d'initiatives parce que beaucoup d'Inuits ont perdu leur sensation de bien-être en raison du contrôle exercé par les services et les programmes gouvernementaux.

Dans le passé, nous savions qui nous étions, nous avions des compétences et la capacité de vivre de façon à éviter des crises, nous possédions la sagesse nécessaire pour bien enseigner et apprendre ces compétences; de là, nous sommes arrivés à une époque où nous nous sentions désorientés et déboussolés. De nombreuses personnes ont souffert en raison de cette perte de leur capacité d'agir. On nous rappelle souvent que le Nunavut a le plus haut taux de suicides et d'autres problèmes sociaux.

• 1005

Nous entamons aujourd'hui le processus de rétablissement de notre identité et de nos façons de faire. La possibilité qui nous est offerte nous permet de commencer ce processus.

Cette possibilité est le Nunavut, et tout ce qui est relié à l'établissement du Nunavut est susceptible d'avoir des conséquences positives pour l'avenir des Inuits.

L'adoption du projet de loi C-57 mènera à un meilleur avenir pour le Nunavut et pour ses citoyens. C'est pour cela que nous sommes ici pour vous encourager à appuyer ce projet de loi.

La structure de cour proposée par le Nunavut permettra aux collectivités de mieux prendre en charge leur destin parce qu'elle prévoit plus de responsabilités pour les juges de paix, la formation de ceux-ci, la présence de résidents du Nunavut, un système administratif mieux défini et, bien sûr, l'établissement de liens plus étroits avec les collectivités.

Mme Martha Flaherty (interprète): Mme Evic-Twerdin vous fera maintenant une courte déclaration en anglais.

Mme Leena Evic-Twerdin: Des avocats des ministères de la Justice fédérale et du Nunavut ont sans doute déjà comparu ou vont comparaître devant le comité. NTI convient avec eux que la création d'un tribunal de première instance à palier unique ne privera pas les résidents du Nunavut des droits juridiques dont jouissent les autres Canadiens.

Vous devriez savoir, cependant, que l'idée d'un tel tribunal vient surtout de ceux qui habitent le territoire visé par les revendications territoriales. Ce projet de loi respecte le consensus généralisé selon lequel une seule instance servirait mieux les intérêts des citoyens du Nunavut et l'administration de la justice au Nunavut.

Ce projet de loi est l'aboutissement de vastes consultations et d'études approfondies, comme l'ont bien dit Nora et Rebecca. Pendant bon nombre de mois, les avocats et le personnel des ministères fédéraux de la Justice et des Affaires indiennes et du Nord, du ministère de la Justice du Nunavut, du ministère de la Justice des Territoires du Nord-Ouest et de NTI ont travaillé de concert. Les téléconférences, la rapidité étonnante du courrier électronique, et une réunion en personne à Ottawa ont ouvert la voie. Au cours de ces séances, le projet de loi a été étudié et revu pratiquement ligne par ligne.

NTI a jugé le processus bien pensé, productif et très centré sur le Nunavut. Ce fut un exercice très valable qui sera sans doute à l'avantage de la population du Nunavut aussi bien que de l'administration de la justice.

Le groupe de travail législatif était motivé par le fort intérêt qu'il portait à l'avenir du Nunavut. Cet engagement était d'ailleurs le reflet de celui du gouvernement du Canada, du Bureau du commissaire intérimaire, du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et de NTI.

On en voit une autre manifestation, dans l'intention de tenir une conférence du groupe de travail en avril 2001, pour revoir des questions liées à l'administration de la justice au Nunavut. La conférence réunirait les ministères fédéraux de la Justice et des Affaires indiennes et du Nord, le ministère de la Justice du Nunavut, NTI, et peut-être aussi d'autres parties intéressées comme des les membres de la magistrature. Nous appuyons ce projet.

• 1010

Mme Martha Flaherty: De nouveau, j'interpréterai Mme Evic-Twerdin.

Mme Leena Evic-Twerdin (interprétation): Pour conclure, je voudrais dire que nos fonctionnaires et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest ont travaillé étroitement sur les amendements nécessaires qui nous ont menés jusqu'ici.

Après l'adoption du projet de loi C-57, nous mènerons le processus à son terme.

Merci.

Le vice-président (M. John Maloney): Merci, Leena.

Allan, avez-vous une déclaration à faire?

M. Allan S. Maclure (conseiller, Nunavut Tunngavik Inc.): J'ai peu de choses à ajouter à ce que l'on a déjà dit. J'y consens de bon gré.

J'ai commencé à participer au processus il y a environ cinq mois lorsque je suis devenu membre de NTI, et je dois dire que ma collaboration avec le groupe de travail a été une expérience des plus utiles et enrichissantes. Cette expérience m'a porté à regretter de ne pas avoir participé dès le début, plutôt que d'arriver il y a seulement cinq mois. C'est un groupe très uni et très dévoué à la tâche, et je suis heureux d'avoir participé à ses travaux.

Le vice-président (M. John Maloney): Merci.

Maintenant, nous entendrons les questions des membres du comité.

Monsieur Cadman.

M. Chuck Cadman: Merci, monsieur le président.

Tout d'abord, je veux remercier les témoins de leur comparution. Je suis heureux de vous voir.

Je n'ai que quelques questions d'ordre général. Je suis certain que M. MacKay et M. Lee aborderont des sujets d'ordre juridique.

Je vous ai entendu dire que cette loi répondra mieux aux besoins de la population du Nunavut. Pourriez-vous peut-être me donner quelques exemples concrets de la manière dont elle profitera au citoyen moyen au niveau des délais, des frais, et d'autres choses semblables, si vous avez, toutefois, cette information.

Mme Nora Sanders: J'ai peut-être quelque chose à dire à ce sujet. Il faut surtout comprendre que tout n'est pas encore là. Nous n'en avons qu'une partie ici. Ces amendements sont un élément assez technique de l'ensemble.

Je pense qu'il est essentiel de réfléchir à ce qui se serait produit si nous n'avions pas agi, et j'ai essayé de l'évoquer, en disant que nous aurions un système extrêmement complexe et des frais plus élevés s'il fallait organiser différentes cours dans différents circuits. Il faut aussi noter la simplification de la procédure. À l'arrivée du juge, on sait qu'il est le juge. Alors les gens s'y reconnaissent mieux.

Nous pensons qu'en donnant plus de souplesse à la magistrature au point de vue des horaires et ainsi de suite, les juges auront plus de latitude. On veut quand même faire attention parce que la magistrature, évidemment, est indépendante et tout le reste. Mais il y a aussi un précédent qui leur permet d'établir une certaine relation avec les communautés. Le juge de la cour territoriale, installé à Iqaluit, à l'heure actuelle, a l'habitude de siéger en comité avec les aînés. Cela a été fait aussi par un juge de la Cour suprême au Nunavut, mais ce n'est pas là une pratique courante de la Cour suprême. Nous croyons qu'un processus judiciaire plus simple accordera plus de latitude en la matière.

Comme je l'ai déjà dit, il faut aussi songer—et cela ne se trouve pas dans la loi—à l'occasion offerte aux juges de paix d'avoir une formation plus poussée et de jouer un rôle plus important. À notre avis, ces juges de la Cour de justice du Nunavut joueront un rôle de mentor auprès des juges de paix, nous les connaîtrons individuellement, etc. Le système sera quand même assez restreint pour permettre ce genre de choses.

Quant aux statistiques, je ne sais pas ce qu'on peut en tirer, parce que nous sommes assez peu nombreux et la juridiction est assez petite. Mais nous croyons que toutes ces choses feront une différence.

• 1015

M. Chuck Cadman: Je m'intéresse au côté pratique, comme les retards avant de subir son procès, les retards avant de se faire entendre. Les retards sont-ils énormes à l'heure actuelle et la situation s'améliorera-t-elle grâce au nouveau système?

Mme Nora Sanders: Côté retard, ce n'est probablement pas pire qu'ailleurs au Canada. La vraie question, c'est de savoir si c'est assez bon ou pas. Toutes les fois où je me suis pointée à une réunion communautaire où il a été question de justice, on a soulevé la question des retards. Nous connaissons tous des cas où ces retards ont créé des difficultés pour les individus ou leurs familles. Je crois que les retards sont dus, en partie, parce qu'on attend de voir quelque chose de mystérieux qui vient d'ailleurs et qu'on ne sait pas quel sera le résultat.

Si nous avions les deux niveaux de tribunaux, j'ai l'impression que pour une petite juridiction comme la nôtre, les retards seraient pires encore. Lorsqu'on fait un plus grand effort pour que les juges de paix soient saisis de cas d'importance mineure, c'est encore là une façon de composer avec les retards. Parce que ces juges auront la souplesse voulue pour s'occuper de toutes les sortes de cas et que les juges de paix auront un rôle plus important à jouer, on réussira à éviter certains des retards.

M. Chuck Cadman: Dans les deux dernières présentations, il m'a semblé qu'on parlait beaucoup d'initiatives de justice réparatrice. Pour moi, toute cette question constitue un domaine tout à fait différent d'une restructuration des tribunaux. Sommes-nous en train de discuter d'un système de justice totalement différent pour ces régions par opposition à ce qui ne serait que des tribunaux différents?

Mme Nora Sanders: Je pourrais peut-être essayer de répondre à cette question et Rebecca ou Leena voudront peut-être ensuite ajouter quelque chose.

M. Chuck Cadman: Je sais ce qu'est la justice réparatrice alors vous n'avez pas besoin de m'expliquer de quoi il retourne. Ce qui m'inquiète, c'est qu'on semble s'écarter d'une simple restructuration des tribunaux pour parler de tout un nouveau système auquel n'ont peut-être pas accès les autres Canadiens.

Mme Nora Sanders: Vous verrez que pour nous il est difficile de tout cloisonner de façon absolue. Comme vous l'avez souligné, cette loi ne crée pas une justice réparatrice. Elle crée un nouveau tribunal supérieur, mais elle accorde à ce tribunal des compétences beaucoup plus larges.

Il y a déjà beaucoup d'initiatives en cours au niveau de la justice réparatrice et nous espérons faire beaucoup plus dans ce sens lorsque le Nunavut aura vu le jour. À notre avis, c'est quelque chose de complémentaire. En d'autres termes, simplifier un peu la procédure formelle facilite l'activité au niveau de la justice réparatrice, mais ne l'introduit pas pour autant.

Alors voilà tout ce que j'avais à dire et, Rebecca, tu voudras peut-être ajouter quelques mots.

Mme Rebecca Williams: À l'heure actuelle, il y a des groupes de justice communautaire dans toutes les communautés du Nunavut et ce sont eux qui reçoivent beaucoup de choses de la GRC. Voilà donc une partie de l'affaire.

Je crois que le véritable changement se produira au niveau communautaire. Ce sera complété par la Cour de justice du Nunavut qui pourra travailler de plus près avec plus de gens dans la communauté.

À l'heure actuelle, voici la situation: la Cour territoriale se rend dans trois communautés différentes, disons, dans le Grand Nord, ce qui coûtera quelque 22 000 $. Si une enquête préliminaire est remise à plus tard, il faudra attendre quatre à six autres mois avant d'y arriver. Il faudra donc que ce même tribunal débourse encore une fois le même montant. Ensuite, cela passe à la Cour suprême, pour venir dans la communauté, cela coûte encore 15 000 $. Je vois comment on pourrait couper certains de ces frais, parce que l'enquête préliminaire et le procès pourraient peut-être se dérouler en même temps.

En tout cas, il y a bien des initiatives qui se prennent déjà au niveau de l'activité des groupes de justice communautaire.

M. Allan Maclure: Je crois que cela pourra aussi aider le juge à mieux comprendre la communauté qu'il sert. Avec un tribunal à palier unique, le juge s'occupe de toute la gamme de questions juridiques dont pourrait être saisi un tribunal. Les causes ne sont pas divisées en fonction de compétences qui reviennent soit au niveau territorial, soit à la Cour suprême.

M. Chuck Cadman: Il ne me reste qu'une question. Avec la mise en oeuvre d'un nouveau système comme celui-ci, je m'attends bien à ce que certains petits problèmes se pointent de temps à autre. Comment vous proposez-vous de contrôler ce genre de chose et de vous en occuper, si de tels problèmes surgissaient?

• 1020

Mme Nora Sanders: Nous sommes à mettre sur pied l'appareil administratif, à l'heure actuelle, et vous avez probablement raison, c'est comme toute autre chose dans la vie. Une partie de la solution, c'est que les communications à l'intérieur du système soient franches. De temps en temps, nous devrons compter sur la magistrature des Territoires du Nord-Ouest pour venir nous aider pour certaines questions.

On mettra en place un système d'évaluation, pour le plus long terme, et je sais que le ministère de la Justice s'y attaque déjà. Nous travaillons aussi de concert avec le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest pour mettre sur pied un nouveau système d'information juridique au niveau des statistiques du tribunal. Une partie de la difficulté que nous aurons à affronter au départ, c'est que le système qui existe à l'heure actuelle ne se prêtera pas très bien à ce processus. Nous espérons que, dès le 1er avril, il y aura un nouveau système disponible, du moins sous forme de projet pilote. Cela nous permettra au moins d'obtenir l'information.

Il me semble donc qu'il y a certaines réalisations concrètes et nous devrons aussi compter beaucoup sur le gros bon sens et de la coopération de tous ceux qui sont associés à la chose.

Le vice-président (M. John Maloney): Merci.

Peter MacKay.

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Merci, monsieur le président. Je tiens aussi à remercier le comité. Votre prestation a été fascinante, très lucide et nous a livré beaucoup de détails sur ce qui s'est fait jusqu'à ce jour. Je vous félicite donc pour l'étendue de votre présentation.

J'ai quelques questions précises et d'autres plus générales et je commence donc par les plus générales. Je m'intéresse au genre de formation qui sera offerte aux juges de paix et aux autres juges aussi, au niveau de la sensibilisation aux cultures traditionnelles du Nunavut. De plus, y a-t-il une formation ou des conditions spéciales qui encourageront plus d'Autochtones à intégrer le système actuel au niveau des rôles traditionnels de juges et d'avocats?

Mme Nora Sanders: Peut-être me permettrez-vous d'être la première, encore une fois, à répondre. La formation de juges de paix sera améliorée pour correspondre aux besoins de chacun. Une des premières choses auxquelles nous avons pensé est au niveau des besoins en évaluation et nous en discutons déjà avec le ministère de la Justice du Canada. Ce ministère va nous aider, dès le début de tout le processus, en parlant aux juges de paix qui sont déjà en place pour déterminer quels sont leurs besoins en la matière.

Même en n'ayant pas fait cela, je peux vous dire que nous savons que certains n'aiment pas présider un procès ou une audience pendant laquelle ils doivent entendre les observations des parties. La formation sera donc axée sur ces besoins; on enseignera les procédures et ce genre de choses et on donnera aux juges de paix l'occasion de participer à des procédures simulées ainsi que de siéger avec des juges de paix chevronnés et peut-être même avec des juges.

Nous avons donc prévu diverses mesures et la formation sera adaptée aux besoins de chacun; il y aura aussi des séances de groupe. Je crois que la formation qui se tient cette semaine à Iqaluit s'adresse aux juges de paix de la région de Baffin qui travailleront pour la première fois au tribunal de la jeunesse et qui doivent revoir la procédure qui régit les procès en général. C'est là le genre de choses que nous ferons.

Nous espérons que le juge de paix qui sera choisi comme administrateur pourra servir de personne-ressource avec qui tous seront à l'aise. Les juges de paix pourront bien sûr compter sur la magistrature en tout temps. Je sais pour avoir observé le fonctionnement de la cour territoriale que le juge qui est actuellement dans la région de Baffin entretient des relations étroites avec les juges de paix et qu'il discute souvent, non pas bien sûr des détails des causes, mais de la façon de traiter de certaines questions de procédure, par exemple. Nous espérons tabler sur cette collaboration pour assurer ainsi un soutien constant.

En termes simples, en ce qui concerne la formation des juges, il faudra d'abord voir qui est nommé et quels sont leurs besoins. Mais il est certain que dans leur cas, comme dans le cas de tous les autres professionnels qui viendront d'ailleurs pour travailler à Iqaluit, les nouveaux titulaires devront suivre des cours. Si ces personnes sont comme moi, ils n'en viendront peut-être pas à parler couramment la langue—ce qui est loin d'être mon cas d'après Martha—mais ils auront une meilleure compréhension de la culture et du milieu et peut-être même de certaines des réalités de l'interprétation qu'il faut connaître en cour, certains des termes qui peuvent être interprétés différemment selon la façon dont on pose sa question. Ainsi, si vous posez une question négative, cela paraîtra étrange et on ne saura pas si on est censé répondre par oui ou non.

• 1025

Ce sont là les mesures courantes prévues pour presque tous ceux qui oeuvrent dans le domaine juridique.

L'idée d'intégrer des Inuits au système judiciaire est très importante. C'est un objectif à long terme.

Nous avons discuté avec les représentants de Justice Canada de la possibilité de créer un programme de bourses d'études, etc. Les détails n'ont pas encore été réglés, et cela entraînera des coûts. Mais c'est un investissement qui en vaut la peine et qui sera fait à l'avenir.

Nous collaborons aussi avec le ministère. Lors de la dotation de postes en personnel, nous accordons la priorité aux Inuits. Nous reconnaissons aussi que certains postes dont on avait toujours cru qu'ils devaient être occupés par un avocat peuvent peut-être être comblés par quelqu'un qui ne l'est pas, mais qui a une certaine expérience du système judiciaire et peut tout autant contribuer, sinon davantage, puisqu'il comprend mieux la culture et la langue. Nous envisageons donc différentes mesures sur plusieurs fronts.

M. Peter MacKay: Merci.

M. Allan MacLure: Je voudrais rajouter, au sujet de votre préoccupation concernant la sensibilisation des juges aux différences culturelles, qu'il y aura des consultations dans les localités dans le cadre du processus de consultation sur les affaires judiciaires. Nous estimons que cela contribuera à rehausser cette sensibilisation.

M. Peter MacKay: Cela m'amène à une autre question plus générale sur l'infrastructure même. J'ai passé du temps dans la région de Baffin et dans l'Extrême-Arctique, et je me demande comment on pourra constituer un jury dans des endroits comme Arctic Bay, Nanisivik ou Pond Inlet. J'essaie de voir comment vous pourrez constituer un jury impartial. Il y a aussi la question des choix qui s'offrent aux accusés et de la possibilité que le même juge préside à l'enquête préliminaire et au procès. Cela pourrait mener à des préjugés en pratique.

Mme Nora Sanders: C'est une question qui n'est pas directement reliée au nouvel accord. La constitution des jurys est un problème qui existe depuis longtemps, mais nous tenons néanmoins un nombre important de procès devant jury en comparaison avec les autres provinces et territoires. Vous avez toutefois raison de dire que c'est tout un défi, tout comme l'est la formulation des instructions qu'on donne aux jurés de façon à ce qu'ils comprennent bien. Mais cela se fait, on fait de son mieux. Évidemment, l'interprétation est un élément clé de tout procès devant jury.

Les choses n'iront pas nécessairement mieux ni moins bien après la création du Nunavut. C'est un domaine où nous tentons constamment de nous améliorer et ces efforts s'inscrivent dans nos tentatives en vue d'amener les gens à mieux comprendre le système en général et à mieux participer comme juré et comme intervenant devant le tribunal.

Pour ce qui est du choix des juges, il se peut que le juge qui préside l'enquête préliminaire ne soit pas le même que celui qui présidera au procès, et le contraire serait plutôt exceptionnel. J'ai l'impression que les juges sont extrêmement prudents à cet égard. Ils sont tout à fait conscients du préjugé réel ou apparent que cela peut entraîner. Je sais qu'il y a des précédents. Au Nouveau-Québec, on l'a déjà fait; il y a donc un précédent. Je sais aussi qu'on fera preuve d'une grande prudence.

Nous avons tenté de nous donner une plus grande latitude, et je crois que, dans la plupart des cas, ce seront des juges différents qui présideront à l'enquête préliminaire et au procès.

M. Peter MacKay: Ce que je crains, c'est qu'un juge préside une audience du tribunal de la famille ou du tribunal de la jeunesse, où on traite habituellement de poursuites sommaires, et siège ensuite comme juge de la cour supérieure, le même jour, et qu'il entende des causes touchant une seule personne ou peut-être les membres d'une même famille, qu'il y ait des chevauchements de ce genre. Il prendra ainsi connaissance d'informations qui ne lui auraient pas été communiquées dans des circonstances normales.

• 1030

Mme Nora Sanders: Il est vrai qu'un juge qui dessert une certaine région en vient à connaître certains gens, certains noms, certaines familles à mesure qu'il entend des causes, que ce soit le même jour ou sur une plus longue période... Bien sûr, cela a des avantages et des inconvénients. Je sais que pour notre système judiciaire, l'indépendance et l'impartialité sont essentielles, mais il faut se demander si, pour être impartial, il faut nécessairement ne rien savoir des circonstances de l'affaire. Dans le Nord, nous devons souvent faire la part des choses car, parfois, il est bon d'avoir à son actif une certaine participation à la vie communautaire pour mieux connaître le milieu.

M. Peter MacKay: C'est certainement vrai dans bien des petites localités, où les juges en viennent à bien connaître la situation de ceux qui comparaissent devant eux.

J'ai une dernière question, brièvement, qui plaira aussi à M. Cadman, je crois.

Mme Williams a employé une expression très touchante pour décrire son peuple qui, a-t-elle dit, subit la justice en silence. Je trouve que c'est une description très juste. J'aimerais savoir quelles mesures ont été prises pour que, dans ce nouveau système, les services aux victimes, une question que notre comité a examinée attentivement au cours de la dernière année, soient disponibles et accessibles.

Mme Rebecca Williams: J'ai parcouru les régions du Nunavut pour rencontrer les groupes de justice communautaire et leurs présidents, avec un représentant du ministère fédéral de la Justice, Scott Clark. Nous nous sommes entretenus avec eux de ce qu'ils font à l'heure actuelle bien que j'en sache déjà pas mal à ce sujet ayant moi-même occupé ces fonctions. Mais en prévision de la création du système de justice du Nunavut, nous voulons savoir ce que ces groupes communautaires ont fait, quelles sont leurs aspirations, leurs capacités et quels rôles ils aimeraient jouer dans la collectivité, dans les prisons, par rapport à la GRC et aux autres intervenants de l'appareil judiciaire.

Une des grandes questions que j'ai soulevées portait sur ce que l'on fait pour les victimes. On m'a souvent dit que les tribunaux pénaux ne font rien pour les victimes. Si cela se trouve, nos tribunaux pénaux les victimisent de nouveau. Au niveau communautaire, nous craignons de faire la même chose en parlant aux victimes et en leur posant des questions, ce qui est exactement ce que les tribunaux font en discutant avec les victimes ou en remettant en question la crédibilité d'une victime. Cela se passe devant le tribunal et au sein de la communauté.

Cela nous préoccupe donc, car bien souvent les témoins sont laissés pour compte. Sinon, on ne fait que les victimiser de nouveau ou on les blâme dans les petites collectivités. Je crois que les tribunaux pénaux et les collectivités inuit doivent se rendre compte qu'ils ont besoin de notre aide. Des prisons existent pour les auteurs d'infraction. Des agents de probation et des agents de liberté conditionnelle existent pour aider ces détenus. Mais que faisons-nous pour les victimes? Pas grand-chose.

J'ai dit que pendant des années nous avons gardé le silence. Maintenant que nous pouvons faire notre deuil, les choses changeront et c'est quelque chose qui nous préoccupe. Depuis bien des années, il y a des petits comités qui viennent de Pauktuutit et qui se rendent dans chaque collectivité. Parfois les collectivités les utilisent pour offrir des services aux victimes, ou pour offrir du counselling. C'est une préoccupation. Je suis contente que vous ayez soulevé la question, car c'est une préoccupation que partagent tous les Canadiens, je crois.

Le vice-président (M. John Maloney): Merci, Rebecca.

Allez-y, Leena.

Mme Leena Evic-Twerdin: Je voulais simplement soulever un autre point. C'est peut-être une réponse indirecte à l'avant- dernier point que vous avez mentionné à propos d'une plus grande participation des Autochtones au système.

Je crois, naturellement, que pour satisfaire les besoins des Inuits du Nunavut au niveau de la justice, il faut augmenter la participation des Autochtones. Cela peut faire une grande différence.

Une des questions qui est souvent négligée, c'est celle des barrières linguistiques. Bien des gens ne parlent que l'inuktitut; il y a donc un défi de plus qui s'ajoute au fait que le système de justice est inconnu. Il est très difficile de ne pas pouvoir communiquer aisément et directement ses préoccupations.

• 1035

Le vice-président (M. John Maloney): Merci, Leena.

Du côté ministériel maintenant, M. Saada.

M. Jacques Saada (Brossard—La Prairie, Lib.): Merci, monsieur le président.

J'aimerais tout d'abord vous remercier beaucoup. Nous remercions toujours les témoins qui comparaissent devant nous, mais j'aimerais vous remercier particulièrement. Je crois que votre grande détermination ainsi que votre enthousiasme sont très communicatifs et je l'apprécie énormément.

Avant de poser une question de fond, monsieur le président, j'aimerais poser une question par intérêt personnel. J'aimerais vous poser une question linguistique, pour comprendre quelque chose.

Madame Williams, j'ai remarqué que lorsque vous parliez de dates ou de chiffres, vous les dites en anglais. Pour le reste, vous avez parlé inuktitut. Qu'est-ce qui explique cela?

Mme Rebecca Williams: J'ai dit certains chiffres en anglais, mais lorsque j'ai parlé de «plus de 50», je l'ai dit en inuktitut. Nous utilisons les deux.

M. Jacques Saada: Je vois.

Mme Rebecca Williams: Pour exprimer les chiffres en inuktitut, il faut les additionner. Pour dire «plus de 50», par exemple, j'ai dit: «2 fois 20, plus 10, et plus encore».

M. Jacques Saada: Donc, dire 1987 posera un problème.

Voici ma question de fond. Mme Williams a dit que bien des détenus retombaient dans le crime après avoir purgé leur peine. En même temps, j'ai entendu Mme Williams et Mme Evic-Twerdin utiliser le mot «guérison». Évidemment, il y a une différence entre ce que vous croyez qui doit se passer et ce qui se passe.

Nous savons que beaucoup de programmes visent la réadaptation et cherchent à éviter la récidive. Grosso modo, ces programmes fonctionnent assez bien. Pourriez-vous expliquer pourquoi il y a un taux si élevé de récidive et quelles mesures pourraient être mises en place pour régler ce problème?

Mme Rebecca Williams: Je crois que si nous avions les réponses, cela ne se produirait pas. Mais je vais quand même essayer de répondre à votre question. Il est vrai que beaucoup de gens récidivent. Dans la plupart des cas, il y a quatre programmes principaux dans les pénitenciers, que les détenus doivent suivre avant d'avoir le droit de faire une demande de libération conditionnelle. Ce sont de très bons programmes, mais le gouvernement a un peu oublié l'objectif des programmes communautaires—de bons programmes postpénaux pour ceux qui sont en période de probation, et des programmes pour les victimes.

Aujourd'hui, du point de vue des Inuits, aller en prison veut simplement dire fuir ses problèmes Si la situation à la maison n'est pas corrigée, une fois que le détenu revient dans la communauté, les mêmes problèmes se produisent. C'est parce que nous n'avons pas fait beaucoup pour améliorer la situation familiale, et les relations du détenu. Donc il revient dans la communauté, et il récidive.

J'ai eu l'occasion de visiter l'institution Bowden et le pénitencier de Saskatchewan. J'étais avec Nora. Les détenus nous ont dit que les programmes—même s'ils existent—sont difficiles à comprendre, parce qu'ils utilisent un vocabulaire différent. C'est la langue des médecins, ou des sociologues. C'est très différent de la langue que parlent les détenus.

Les programmes étaient bons, mais une fois retournés dans la communauté, les détenus récidivent. La situation est la même. Les gens boivent encore, et sont encore violents. Il y a encore de la violence familiale. Ils retournent donc très souvent en prison.

Dans le rapport que j'ai mentionné, Jose Kusugak—le président de Nunavut Tunngavik—indique qu'il nous faut un processus de rétablissement ou de guérison, qu'il faut que les gens aient la possibilité de se rétablir. Le détenu, la victime et la famille doivent tous avoir la possibilité de se rétablir. Vous nous demandez pourquoi nous sommes comme nous sommes, et ces initiatives découlent justement de vos questions. Pendant très longtemps, les programmes sociaux et d'autres initiatives nous étaient imposés de l'extérieur. Ces programmes ne fonctionnent pas toujours, et maintenant nous avons l'occasion d'élaborer des programmes qui fonctionnent. Nous n'allons plus garder le silence. Nous allons faire quelque chose dans nos collectivités.

• 1040

Mais il faudra du temps pour trouver des solutions. Dans nos régions, beaucoup de gens ont une perception d'eux-mêmes qui est assez négative. Par exemple, j'avais l'impression que je ne pouvais rien faire sans recevoir une éducation en anglais, sans aller à l'école. Beaucoup de gens ne sont pas allés à l'école, donc ils ont l'impression qu'ils ne peuvent rien accomplir. À l'école, je devais manger différemment, je devais m'habiller différemment, et on changeait ma langue. Les gens de l'extérieur me changeaient tout; ce n'était pas mes parents. Ma perception de moi-même était donc très négative. Il n'y avait rien de positif.

Certaines de nos gens sont peut-être restées à ce stade, mais d'autres font des progrès. Nous espérons qu'il y aura des programmes. Notre service travaille de près avec le ministère de la Santé et des Services sociaux. Nous essaierons aussi de collaborer plus étroitement avec le ministère de l'Éducation, pour que les gens du Nunavut nous voient travailler ensemble pour améliorer les collectivités.

J'ai établi un petit comité de neuf membres pour étudier les questions correctionnelles au Nunavut. Aujourd'hui, 60 ou 80 membres de nos collectivités sont incarcérés à Bowden. Il y en a d'autres à Yellowknife, et à peu près 60 à Iqaluit. Nous avons établi un comité pour étudier la question. Son mandat est de voir ce qui se passe dans ces régions-là, et d'identifier les programmes, la formation et le personnel requis. Nous devrons peut- être établir un centre au Nunavut même, avec un personnel qui connaît les familles de la région. Le comité aura terminé son rapport le 31 juillet. Nous aurons donc quelque chose en place, ou nous pourrons au moins faire des recommandations au nouveau ministre au sujet des services correctionnels au Nunavut et des mesures que nous aimerions prendre.

J'ai parlé pendant assez longtemps, mais je ne sais pas si j'ai vraiment répondu à votre question.

M. Jacques Saada: Je vous aurais écoutée volontiers pendant bien plus longtemps. Merci.

Le vice-président (M. John Maloney): Monsieur Cadman.

M. Chuck Cadman: Je n'ai pas de questions, monsieur le président.

Le vice-président (M. John Maloney): Monsieur MacKay, vous avez un peu moins detemps.

M. Peter MacKay: J'ai quelques questions logistiques: quand pensez-vous avoir votre troisième juge?

Mme Nora Sanders: D'ici un an.

M. Peter MacKay: D'ici un an.

Mme Nora Sanders: Premièrement, il faut un peu de temps pour trouver le personnel de soutien. En établissant ce ministère, nous constatons que nous ne pouvons pas engager tout un bureau en une journée. Il faudra engager du personnel avant le 1er avril. Ils auront la possibilité de se familiariser avec leurs tâches. Après cela, nous comblerons les autres postes.

Deuxièmement, il y aura une période de transition après le 1er avril. Pendant cette période, les juges des Territoires du Nord-Ouest seront encore saisis des affaires du Nunavut. Nos propres ressources judiciaires seront donc moins utilisées, ce qui donnera aux deux premiers juges l'occasion de se familiariser avec leur travail. Mais en tout cas, nous espérons que le troisième juge sera nommé au cours de la première année. C'est une nomination fédérale, bien sûr, mais si je ne m'abuse, le troisième juge sera nommé une fois que l'infrastructure sera en place et une fois qu'on aura trouvé un bon candidat.

M. Peter MacKay: Ma prochaine question est dans la même veine que celle de M. Cadman. L'examen de ce système comprend une surveillance et une évaluation. Pensez-vous que ce système pourrait servir de modèle pour les autres territoires, et peut-être même pour certaines régions reculées des provinces?

• 1045

Mme Nora Sanders: On ne saurait vous dire. Nous estimons que le système fonctionnera bien pour nous. Je suppose que d'autres vont le surveiller avec intérêt. L'idée a certainement été étudiée dans d'autres régions du Canada. Comme vous le savez, il existe certains tribunaux unifiés de la famille. Vers la fin des années 80 en Ontario, la commission Zuber a recommandé un tribunal unifié pour l'Ontario, mais la province n'a procédé à l'unification qu'au niveau des comtés et de la Cour suprême. Ils n'ont pas inclus le tribunal provincial.

Ce n'est donc pas une idée nouvelle. C'est à d'autres de décider s'ils veulent l'instaurer chez eux. Mais en tout cas, ils pourront toujours communiquer avec nous pour des informations sur le fonctionnement du système dans notre région.

M. Peter MacKay: J'ai une question très particulière à laquelle vous pourrez peut-être répondre. Si je comprends bien, le tribunal unifié comprendra toutes les instances, y compris le tribunal des poursuites sommaires, la Cour suprême, et toutes les instances des tribunaux civils et des tribunaux familiaux. Les juges de la Cour supérieure seront-ils donc saisis des infractions provinciales? Je sais que les juges de paix sont supposés traiter des causes mineures, mais auront-ils aussi compétence pour traiter des infractions provinciales et des infractions sommaires— compétence qu'ils n'auraient pas normalement.

Mme Nora Sanders: Oui, mais comme vous dites, une fois que les juges de paix auront reçu plus de l'information et auront plus d'expérience, ils pourront sans doute s'occuper d'un bon pourcentage de ces causes.

M. Peter MacKay: Ils essaieront de faire du nettoyage.

Mme Nora Sanders: Oui, c'est ça.

Comme vous savez, il y a toute une gamme d'infractions provinciales. Certaines infractions en vertu des lois provinciales ont des conséquences très graves—les infractions environnementales, par exemple. Mais d'autres infractions sont beaucoup plus courantes, et ce sont celles-là dont les juges de la paix pourraient peut-être être saisis, une fois qu'ils auront la formation et l'expérience voulues.

M. Peter MacKay: Pensez-vous que le personnel de soutien et les autres employés seront en place à temps?

Mme Nora Sanders: Oui, nous faisons de notre mieux, et je pense que ce sera possible.

M. Peter MacKay: Merci.

Le vice-président (John Maloney): Merci.

Monsieur DeVillers.

M. Paul DeVillers (Simcoe-Nord, Lib.): Merci.

Vous avez parlé de la surveillance et de l'évaluation du système. Lorsque nous avons reçu les fonctionnaires du ministère de la Justice, ils ont parlé de quelque chose qui sera appelé le Comité de la justice du Nunavut, qui s'occupera des questions administratives. Est-ce qu'il s'agit du même organisme ou de quelque chose de différent?

Mme Nora Sanders: Il y a peut-être un peu de confusion à ce sujet. Si nous comprenons bien, il y aura un comité consultatif sur les nominations judiciaires en provenance du Nunavut. Bien entendu, il y a également ce que nous appelons les comités de la justice communautaire dans chaque communauté. Rebecca en a parlé dans ses remarques.

M. Paul DeVillers: Et ils existent déjà.

Mme Nora Sanders: Nous n'avons pas de projet officiel pour créer un comité de la justice du Nunavut, mais nous allons avoir des examens et des consultations de façon permanente. Par exemple, le Conseil de développement social du Nunavut, qui relève de NTI, a la responsabilité de conseiller le gouvernement concernant tous les programmes sociaux, y compris les questions qui relèvent de notre compétence. Nous avons parlé aux représentants du Conseil, et nous pensons avoir des réunions et des rapports permanents avec ce groupe, tout comme nous en aurons avec nos collègues de NTI.

M. Paul DeVillers: Donc, il n'existe pas de comité permanent de la justice du Nunavut qui s'occupera de questions administratives.

Mme Nora Sanders: Non.

M. Allan MacLure: Ce sera peut-être possible, cependant. Rien n'est confirmé pour l'instant, mais je m'attends à ce qu'un comité composé d'avocats et de juges joue un rôle dans le système.

M. Paul DeVillers: Oui, avec le Comité des nominations dont vous avez parlé. Vous avez raison, je suis perdu.

Le vice-président (M. John Maloney): M. Grose, suivi de Mme Bakopanos et de Mme Cohen.

M. Ivan Grose (Oshawa, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je n'ai pas de questions; je vais plutôt faire une déclaration qui s'adresse à tous nos témoins. J'ai trouvé intéressante la référence à la récidive, un mot très compliqué qui décrit la situation d'une personne qui est réincarcérée à plusieurs reprises. Le même problème existe au sud du 60e parallèle, donc peut-être que nous aussi nous avons un problème de communication. Il se peut qu'on puisse discuter de ce problème qui nous est commun. La situation n'est pas unique.

D'après moi, notre système de justice, après la détermination de la peine, donne de bien piètres résultats pour tous les Canadiens. Il va falloir examiner cette situation, qui n'est pas unique. Je connais un peu le système. Selon moi, il va falloir faire quelque chose.

J'ai trouvé intéressant le fait que vous avez dit que vous ne communiquiez pas bien avec ces gens-là. De toute évidence, nous ne communiquons pas bien avec les récidivistes au sud du 60e parallèle non plus. C'est donc quelque chose qu'on peut examiner.

• 1050

Merci, monsieur le président.

Mme Nora Sanders: J'aimerais faire une remarque, monsieur le président, car je trouve que le commentaire est très pertinent.

M. MacKay a dit plus tôt que certaines choses sont communes dans toutes les petites collectivités, où qu'elles soient. Je tiens simplement à dire qu'à certains égards, la situation est tout à fait unique. J'ai déjà exercé le droit en Ontario et ensuite j'ai vécu dans le Grand Nord pendant un certain nombre d'années, et je puis vous dire que certaines choses sont complètement différentes. Cependant je suis d'accord pour dire que certaines choses sont tout à fait semblables. J'ai l'impression qu'à cause de notre situation, les problèmes qui existent ailleurs sont plus graves chez nous—pour nous ils sont encore plus évidents. Compte tenu de la taille de notre collectivité, cependant, nous avons des possibilités pour régler ces problèmes de façon différente. J'ai souvent pensé que beaucoup de ce qui se fait du côté du système de justice pour les Autochtones va servir d'exemple pour le système dans son ensemble. Je pense que bien des initiatives dont nous avons parlé aujourd'hui présentent les mêmes possibilités.

Le vice-président (M. John Maloney): Merci.

Madame Bakopanos.

Mme Eleni Bakopanos (Ahuntsic, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président. Je tiens également à remercier les témoins de nous avoir fait part de leur réalité, car quand on n'est jamais allé dans le Grand Nord, il est très difficile même d'imaginer certains défis auxquels ils doivent faire face tous les jours.

L'une de mes questions portait sur les juges de paix, mais je pense que vous y avez plus ou moins répondu en réponse à M. MacKay. Je me demandais ce qui se faisait du côté de la formation et du recrutement de juges de paix. Ma deuxième question porte sur la formation des avocats. Combien de jeunes s'intéressent à cette profession? Qu'est-ce qu'il y a pour les encourager ou pour financer la formation dont ils auront besoin pour faire partie de ce système unique de justice que nous sommes en train de créer?

Mme Nora Sanders: La question du recrutement est essentielle pour ce qui est de la formation de juges de paix. Je ne l'ai pas mentionné plus tôt, donc je suis contente que la question ait été posée. À l'heure actuelle, les juges de paix sont recommandés par leurs collectivités avant d'être nommés. Cela se fait déjà, mais il est très clair que les personnes sont plus disposées à accepter ces postes lorsqu'elles ont l'impression de bénéficier de l'appui de la collectivité. La personne responsable des juges de paix va devoir parler aux personnes pressenties. Il aura peut-être à voyager dans les différentes régions et collectivités et à parler aux responsables locaux des qualités de la personne recherchée, pour qu'il comprenne le rôle que le juge de paix aura à jouer. Comme avec tout ce qui a trait à ce système de justice, il y a beaucoup de choses qui ne sont pas bien comprises. Nous espérons que ce genre d'appui va améliorer nos possibilités de recrutement.

Nous examinons également la possibilité d'avoir deux juges de paix ou plus ensemble pour présider une cause. Vous comprendrez que lorsqu'on habite une toute petite collectivité et qu'on a à juger des gens qu'on connaît, et qui sont même peut-être des parents, il peut parfois être très difficile de prononcer un jugement. Il serait peut-être bon qu'il y ait deux juges de paix. Cela n'exige pas d'amendement à la loi, et cela se fait déjà parfois. L'une des questions dont on a parlé à la conférence de la justice tenue par le Conseil de développement social du Nunavut au début de septembre, c'était justement la possibilité que les juges de paix entendent les causes à deux ou même à trois. Deux juges de paix, ce serait tout de même un bon début.

Pour ce qui est de la formation juridique, il reste beaucoup de travail à faire. Nous avons évoqué certaines initiatives. J'ai certainement parlé à mes collègues du ministère de l'Éducation de la possibilité d'avoir un conseiller de l'aide juridique ou quelqu'un d'autre pour présenter ce genre de carrière juridique lors des journées de carrière dans les écoles secondaires. Il y a quelqu'un à Iqaluit qui se prépare aujourd'hui pour son admission au Barreau. Il s'agit donc d'un très grand pas en avant. Il faut que davantage de gens s'intéressent à ce genre de carrière. Pour cela, il faut faire des études loin de son peuple, loin de sa culture, et cela représente un engagement énorme.

Au fil des ans, on a pas mal discuté de la possibilité d'avoir une faculté de droit du Nunavut. Nous ne savons pas si ni comment cela va se concrétiser. Il va sans dire que le financement est toujours une question importante, mais on essaie de faire mieux et de trouver des moyens de soutenir les gens qui s'intéressent à une carrière de ce genre.

• 1055

Mme Eleni Bakopanos: J'aimerais poser une question supplémentaire. Que faites-vous pour essayer d'encourager les facultés de droit au Canada d'offrir des bourses aux jeunes Autochtones qui veulent devenir avocats?

Ce serait bon aussi si un gouvernement pouvait offrir le financement, mais il existe des bourses dans les différentes facultés de droit du Canada. Il s'agirait peut-être d'un effort conjoint de la part du gouvernement, des gouvernements provinciaux et de vous-mêmes pour essayer d'encourager les facultés de droit, ou même les associations du Barreau de ce pays, à offrir un tel encouragement aux jeunes de votre collectivité.

Vous allez avoir besoin de ces avocats. Éventuellement, ils deviendront des juges, si on envisage l'évolution future du système.

Mme Nora Sanders: Ce serait peut-être une bonne idée d'explorer cela. L'avenir nous réserve sans doute bien des surprises, mais c'est une bonne idée. Nous en prenons note.

Mme Eleni Bakopanos: Merci.

Le vice-président (M. John Maloney): Madame Cohen.

Mme Shaughnessy Cohen: Quelle est la taille du Barreau au Nunavut? Combien d'avocats y a-t-il?

Mme Nora Sanders: Je n'ai pas assez de mes 10 doigts pour les compter.

Je pense que nous sommes plus de 10. C'est en partie parce que le gouvernement commence à doter... C'est plus de 10 et moins de 20. Voilà ce que je dirais.

Mme Shaughnessy Cohen: Avec une population comme celle-là, il sera difficile de nommer des juges de votre propre collectivité, n'est-ce pas?

Mme Nora Sanders: Oui.

Mme Shaughnessy Cohen: Cela va créer une pénurie d'avocats.

Mme Nora Sanders: Nous pourrions nous retrouver avec un effectif d'avocats du Nord et du Sud.

Mme Shaughnessy Cohen: Lorsque nous nous sommes rendus là-bas, la juge Browne nous a dit que... Je me dois de préciser que c'est le comité précédent qui est allé là-bas. Je pense que M. Maloney et moi-même sommes les deux personnes ici présentes qui l'ont rencontrée à cette occasion. Je parle certainement en notre nom à tous les deux en disant qu'elle nous a beaucoup impressionnés par sa compétence et par son appréciation de la culture qu'elle visite et au sein de laquelle elle travaille.

Elle nous a dit que dans certaines collectivités, elle siège en compagnie d'anciens, dont le nombre peut aller jusqu'à quatre. Lorsqu'elle a commencé à soulever l'idée d'avoir des conseils de détermination de la peine et d'autres choses de ce genre, on l'a regardée comme si elle était tombée d'une autre planète. Les différences culturelles sont assez extrêmes d'un bout à l'autre du Nord.

On a tendance à penser que le Nord, ce n'est qu'une vaste étendue de neige, mais lorsqu'on y est, on commence à comprendre qu'il y cohabite trois grandes cultures et une myriade de petites sous-cultures.

Je ne vous demanderai pas de me dire ce que vous pensez de la juge, puisque cela serait inopportun. Mais son approche a-t-elle été bienvenue? A-t-elle été en mesure de susciter la participation de la collectivité à ce système étranger que nous avons imposé?

Mme Rebecca Williams: Je pense que j'ai été l'une des premières personnes rebutées par cette idée que des anciens siègent avec un juge. Les anciens n'adhèrent pas au Code criminel. Ils devraient être issus de la collectivité.

Lorsque j'étais agent de probation, j'ai souvent été témoin de cette façon de faire. Elle a eu pour effet de créer des liens entre les collectivités et les tribunaux.

Pour ce qui est de trouver des solutions, les intervenants des collectivités peuvent discuter des peines possibles. Ils peuvent fournir des renseignements généraux sur les caractéristiques des collectivités, les services qui y existent, ce qui pourrait arriver, la façon dont on pourrait offrir du counselling.

Avec le temps, j'en suis venue à penser qu'il était acceptable que des juges siègent de concert avec des représentants de la collectivité. J'essayais de faire des distinctions parce que je ne voulais pas que mon peuple collabore avec un juge qui envoie les gens en prison. Lorsqu'ils reviennent, ils ne sont pas meilleurs.

Ce qui s'est passé, c'est que cela a brisé la glace. Les tribunaux sont très intimidants, ils font peur. Cette juge a su jeter des ponts avec la population. Il n'en demeure pas moins qu'elle est très prudente lorsqu'elle siège à ce tribunal avec les représentants de la collectivité.

Mme Shaughnessy Cohen: Merci.

Je tiens également à vous dire que le comité a essayé très fort d'aller à Iqaluit, mais vous n'avez pas suffisamment d'hôtels ou de locaux où nous pourrions nous réunir.

Je tenais à vous dire que nous avons fait beaucoup d'efforts, mais individuellement, nous serions tous ravis de recevoir une invitation à vous rendre visite, en avril peut-être, lorsque le nouveau système sera en place. Si nous avions une telle invitation, nous ferions tout en notre pouvoir pour venir.

Ceux d'entre nous qui sont déjà allés là-bas et qui y ont passé un certain temps savent... C'est une chose que de savoir instinctivement que de visiter une région, ce n'est pas... Visiter Iqaluit, ce n'est pas visiter le Nunavut. Nous le savons en théorie, mais lorsqu'on le vit concrètement, une fois qu'on y a été, qu'on a visité certains hameaux éloignés, qu'on a vu la ville d'Iqaluit en soi, on se rend compte à quel point on en sait peu au sujet de ce nouveau territoire qui fait partie intégrante de notre pays.

• 1100

J'encouragerais tous mes collègues ici présents à accepter une telle invitation.

Vous devriez savoir qu'une partie de notre budget nous permet de nous rendre n'importe où au Canada à notre guise. Si nous recevions une invitation, j'exercerais des pressions et j'encouragerais les députés à vous rendre visite.

Le vice-président (M. John Maloney): Je vous remercie, madame Cohen, de ces invitations.

Rebecca, vouliez-vous ajouter quelque chose?

Mme Rebecca Williams: Je voulais dire que j'avais parlé à Roger, de notre bureau, et que j'étais très contente à l'idée que vous alliez venir. Mais tout le monde voulait demeurer au même endroit, ce qui a posé des difficultés. Vous êtes les bienvenus dans nos résidences personnelles, si vous venez et que vous n'avez pas de chambre d'hôtel. Il y a énormément de maisons. Les Inuits ont un proverbe qui dit qu'aucune maison ne va éclater parce qu'il y a trop de gens dedans. Il y a donc énormément de possibilités de logement.

Mme Nora Sanders: Je voulais dire que nous serions très honorés d'accueillir les membres du comité au Nunavut à un moment donné. Si vous vous êtes heurtés à une pénurie de chambres d'hôtel cette semaine, je dois vous avertir que la semaine du 1er avril est aussi une période achalandée. Mais après cela, il se peut fort bien qu'il y ait une occasion et nous serions très heureux de discuter davantage avec vous de toute initiative.

Nous apprécions le fait que certains députés ici présents sont déjà venus dans le Nord. Cela nous donne à tous une façon différente de voir les choses.

Chaque fois que je me rends dans une collectivité du Nunavut, j'apprends de nouvelles choses. Par conséquent, je sais qu'il en sera de même pour vous lorsque vous viendrez dans le Nord.

Le vice-président (M. John Maloney): Merci.

Notre dernier intervenant est M. Lee.

M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.): Merci. Au risque de paraître obnubilé par le puzzle constitutionnel, je voulais vous poser une question. Si j'ai bien compris, les autorités territoriales exigeront une loi complémentaire car même si la loi fédérale a préséance sur la loi actuelle des Territoires du Nord-Ouest, il n'en demeure pas moins qu'il y a un vide à certains égards.

Pourriez-vous nous dire quand, à votre avis, cette mesure législative sera présentée? Allons-nous fonctionner avec... Je suppose que l'ancienne pourrait continuer à s'appliquer si elle n'était pas compatible avec la présente mesure.

Mme Nora Sanders: En fait, cette mesure a été présentée au début du mois à l'Assemblée législative des Territoires du Nord- Ouest. Comme vous le savez, aux termes de la Loi sur le Nunavut, l'Assemblée législative des Territoires du Nord-Ouest a le pouvoir d'adopter des mesures législatives uniquement pour le Nunavut, à la requête du commissaire intérimaire.

C'est ce qui a été fait et d'ailleurs, cette mesure a été élaborée à la suite d'un processus de consultation analogue qui a mis à contribution les parties que nous avons mentionnées pour le présent projet de loi. En fait, un comité permanent en sera saisi à Yellowknife jeudi, et nous espérons qu'il sera adopté en décembre.

M. Derek Lee: C'est formidable. Je trouve cette idée de créer une nouvelle forme d'administration pour le Nunavut très excitante. Je sais qu'il y a eu de vastes consultations partout sur pratiquement tous les aspects.

Pour ce qui est de la présente mesure et des consultations qui ont eu lieu, je sais qu'elles ont permis de dégager un vaste consensus. Je ne voudrais pas minimiser cela, mais les témoins se souviennent-ils qu'une personne ou un groupe de personnes à un moment donné se soit objecté en disant que cela ne fonctionnerait pas pour eux? Vous souvenez-vous que quelqu'un se soit levé, dans cette région septentrionale, pour implorer qu'on n'adopte pas une mesure comme celle-ci en invoquant qu'elle aurait une incidence négative? Vous souvenez-vous de quelque chose de ce genre?

Mme Nora Sanders: Non. Il y a eu un débat animé sur certains points, sur la façon de régler certaines questions. Mais il y avait un consensus généralisé sur le résultat qu'on voulait obtenir. Chose certaine, tout le monde s'est rallié au principe d'avoir un tribunal de première instance à palier unique.

En fait, cela a été la réaction même des gens qui ne sont pas partie au système judiciaire. C'est qu'on a annoncé récemment à la radio que le projet de loi avait été présenté à la Chambre. Les gens disent que c'est une initiative enthousiasmante, que cela semble être une bonne mesure. Je ne me rappelle pas avoir entendu quiconque dire...

• 1105

M. Allan Maclure: Moi non plus.

Mme Leena Evic-Twerdin: Au cours de la conférence dont Rebecca a parlé, qui a eu lieu en novembre 1997, je me souviens que les participants ont posé des questions très pointues. Ils voulaient savoir quelle différence il y avait entre les deux systèmes, si on avait besoin d'un nouveau système et pourquoi ce nouveau système était proposé, par opposition au système actuel.

Une fois qu'ils ont été renseignés sur les deux systèmes, ils sont arrivés à la conclusion qu'un tribunal de première instance à palier unique serait la solution pour pallier le problème.

M. Derek Lee: Sans vouloir faire de jeu de mots.

Merci, monsieur le président.

Le vice-président (M. John Maloney): Merci. Nous sommes très reconnaissants aux membres du groupe d'être venus comparaître aujourd'hui pour nous aider dans notre examen de la Loi sur la Cour de justice du Nunavut. Nous avons bénéficié d'un point de vue unique et d'un exposé très intéressant. Je pense que nous envisagions l'examen de cette mesure avec quelques inquiétudes. Nous vous remercions d'avoir comparu car vous avez répondu à bien des interrogations. Pour ma part, je suis beaucoup plus confiant que non seulement cette initiative fonctionnera, mais qu'elle fera école. Il vous faudra peut-être comparaître devant nous ultérieurement parce que nous envisagerons peut-être d'appliquer cette initiative à d'autres régions du pays.

Je vous remercie beaucoup d'être venus. Ce fut très apprécié.

La séance est levée.