Passer au contenu
Début du contenu

FAIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain

STANDING COMMITTEE ON FOREIGN AFFAIRS AND INTERNATIONAL TRADE

COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 29 octobre 1998

• 0911

[Traduction]

Le président (M. Bill Graham (Toronto-Centre—Rosedale, Lib.)): J'aimerais ouvrir la séance.

Nous devons étudier le projet de loi C-35, Loi modifiant la Loi sur les mesures spéciales d'importation.

Vous vous souvenez sans doute que le sous-comité du comité ainsi qu'un sous-comité du Comité permanent des finances, ont rédigé un rapport sur la Loi sur les mesures spéciales d'importation. J'imagine que tout le monde a vu le rapport. Je crois que le projet de loi reprend essentiellement ce qui figurait dans le rapport ainsi que les recommandations des deux sous-comités à la Chambre et au gouvernement.

Nous avons ce matin six témoins. Je vais demander à M. Valeri de commencer; nous donnerons ensuite la parole à M. Larry Herman, Mme Van Loon, M. Peter Clark, M. Albrecht et M. MacDonald. La plupart d'entre eux ont comparu devant le sous-comité si j'ai bonne mémoire. J'aimerais que l'on respecte cet ordre.

Je pense que nous avons demandé aux témoins de se limiter à huit ou dix minutes pour leur exposé car nous voulons terminer nos audiences ce matin. Nous passerons ensuite à l'étude article par article mardi prochain.

Monsieur Valeri.

M. Tony Valeri (secrétaire parlementaire du ministre des Finances): Merci, monsieur le président.

Il y a également ici trois personnes du comité des finances qui vont pouvoir répondre aux éventuelles questions des députés.

Je vais tenter de vous brosser un tableau général de ce que contient le projet de loi et de la façon dont il est né à la suite du travail du sous-comité.

Ce projet de loi propose des modifications qui amélioreront le fonctionnement du système canadien de recours commercial prévu dans la Loi sur les mesures spéciales d'importation et la Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur. Comme le savent les membres du comité, les modifications de fond contenues dans ce projet de loi sont proposées en réaction directe aux recommandations de ce comité et du Comité permanent des finances, qui ont établi en 1996 deux sous-comités chargés d'entreprendre un examen conjoint. L'examen mené par les sous-comités a consisté en une série de délibérations et audiences publiques exhaustives sur les éléments stratégiques et la procédure du système prévus dans la loi. Ces travaux ont été caractérisés par une étroite collaboration entre tous les membres des sous-comités et il y a certainement eu consensus sur les principaux éléments du rapport.

En ce qui a trait à la nature de leurs travaux, les sous- comités ont fait observer dans leur rapport qu'il s'agissait pour eux de voir si cette législation servait toujours adéquatement à la fois ceux qui pâtissent des importations sous-évaluées ou subventionnées et ceux qui risquent d'être affectés par des droits antidumping ou compensateurs.

Bref, les comités ont cherché à savoir si l'équilibre réalisé en 1984 convenait toujours à la situation économique des années 90. À cet égard, monsieur le président, les sous-comités ont conclu que les lois continuaient de protéger les producteurs canadiens contre le préjudice causé par les importations qui sont subventionnées ou qui font l'objet d'un dumping, tout en limitant le préjudice accessoire causé aux consommateurs et aux utilisateurs en aval. Ils ont ensuite cerné plusieurs aspects où des ajustements permettraient que les lois soient plus efficaces et tiennent davantage compte des besoins économiques du Canada. C'est la mise en oeuvre de ces recommandations, monsieur le président, que vous avez devant vous aujourd'hui dans le projet de loi C-35. Comme le gouvernement a l'occasion pour la première fois de procéder à un examen en profondeur avec ce projet de loi, ce dernier renferme aussi plusieurs modifications techniques ou administratives qui visent à éclaircir certaines dispositions actuelles des lois.

Si vous me le permettez, j'aimerais établir les principaux thèmes du rapport des sous-comités dont ce projet de loi fait état. Ces thèmes sont la simplification du processus de la loi afin d'en accroître l'efficacité, l'accès au système de la loi par les petites et moyennes entreprises, un éclaircissement des dispositions d'intérêt public et un accroissement de la transparence et de l'équité en matière de procédure.

• 0915

Monsieur le président, en se fondant sur l'expérience de 12 années d'application de cette loi, les sous-comités ont déterminé des façons de simplifier les fonctions d'enquête partagées par Revenu Canada et le Tribunal canadien du commerce extérieur. À l'heure actuelle, Revenu Canada est en grande partie responsable des questions de dumping et d'octroi de subventions; quant au tribunal, il lui incombe dans une large mesure de déterminer le préjudice causé aux producteurs canadiens. Ces rôles deviennent toutefois interchangeables à l'étape préliminaire et à celle de l'examen d'une affaire.

Le projet de loi C-35 remédiera à ce problème en modifiant les responsabilités de chaque organisme de façon que le tribunal traite la question du préjudice à toutes les étapes du processus, tandis que Revenu Canada se concentre sur la question du dumping et de l'octroi de subventions. Alors que les fonctions de Revenu Canada et du Tribunal canadien du commerce extérieur sont simplifiées pour mieux tenir compte de leurs domaines de compétence respectifs, aucun changement n'est apporté au seuil d'imposition des droits aux termes de la loi, ni aux délais dans lesquels les décisions doivent être rendues en application de la loi.

Dans un effort visant à réduire les coûts et la paperasserie, qui préoccupent particulièrement les petits producteurs, Revenu Canada demeure le guichet unique auquel l'industrie canadienne doit s'adresser pour porter plainte et faire instruire une affaire.

Les sous-comités ont également recommandé que Revenu Canada adopte des mesures concrètes afin que les petites et moyennes entreprises aient un recours juste et équitable à la loi. Cette question doit être une préoccupation de tous les instants pour le gouvernement, tout comme elle était, j'en suis sûr, une grande préoccupation pour les membres des comités. Ainsi, même si Revenu Canada a toujours déployé des efforts notables pour aider les petits producteurs à recourir au système de la loi, depuis l'examen parlementaire, il a adopté un certain nombre de nouvelles démarches de sensibilisation afin de faciliter davantage ce recours. Il y a notamment eu la présentation de séminaires à de grands organismes gouvernementaux et commerciaux de tout le Canada, l'aide technique aux petits producteurs, la formation du personnel, la préparation de documents relatifs à la loi et l'établissement d'une page Web dans Internet afin de procurer un accès facile aux renseignements sur la loi.

Monsieur le président, en ce qui concerne les questions d'intérêt public, la loi renferme, à l'heure actuelle, une disposition générale qui permet au tribunal de mener une enquête d'intérêt public afin de déterminer si les droits instaurés pour éliminer le préjudice causé aux producteurs d'un secteur d'activité en particulier doivent être réduits ou abolis pour tenir compte des préoccupations plus générales concernant l'intérêt public.

Dans cette optique, les sous-comités ont recommandé que le gouvernement dresse une liste non exclusive de facteurs devant orienter le tribunal en matière d'intérêt public. Ils ont établi des facteurs comme l'incidence des droits sur les autres secteurs d'activité et sur les consommateurs; ils ont aussi recommandé que la législation prévoie expressément une option de droits moindres pour le tribunal, lequel peut recommander l'imposition de droits suffisants pour éliminer le préjudice, mais moins élevés que les montants prévus pour les dumpings ou l'octroi de subventions.

Le projet de loi tient compte de la totalité de ces recommandations, et les facteurs proposés par les sous-comités seront appliqués par règlement. Le gouvernement procédera à des consultations au sujet de ce règlement dès que le projet de loi sera adopté.

Dans l'ensemble, ces éclaircissements assureront, comme le voulaient les sous-comités, un équilibre accru sur le plan législatif en matière de protection des divers intérêts du pays. À la deuxième lecture, certains députés ont indiqué qu'ils aimeraient que la législation aille plus loin sur la question de l'intérêt public. Il a été suggéré, monsieur le président, que la question de l'intérêt public soit examinée au moment de l'enquête initiale sur le préjudice, plutôt que dans le cadre d'une enquête distincte une fois que les droits prévus aux termes de la loi auraient été établis.

J'aimerais faire une petite mise en garde à ce sujet, monsieur le président. Comme l'ont souligné les sous-comités, cette législation doit assurer un juste équilibre entre les intérêts des Canadiens qui recherchent une protection et ceux des personnes qui pourraient être lésées par cette protection.

Si, comme proposé, le tribunal devait se pencher sur la question de l'intérêt public dans le cadre de toutes les affaires qui lui sont soumises, bon nombre de producteurs canadiens considéreraient que l'équilibre de la législation serait inutilement dévié de son objectif initial qui est de protéger les producteurs canadiens contre des pratiques préjudiciables de dumping et d'octroi de subventions.

Il est tout aussi important de noter qu'exiger que les enquêtes d'intérêt public soient menées avec les enquêtes sur le préjudice dans le laps de temps prévu par la loi pourrait, dans certains cas, retirer au tribunal la souplesse dont il a besoin pour prendre pleinement en considération la question plus vaste d'intérêt public.

En outre, le Canada va déjà plus loin que son principal partenaire commercial, les États-Unis, en matière d'intérêt public. Les lois américaines ne prévoient aucune intervention concernant l'intérêt public général.

• 0920

Nous estimons que les modifications proposées à votre comité permettent d'assurer un bon équilibre à cet égard. Elles respectent l'objectif fondamental de la loi qui est de protéger l'industrie canadienne contre le préjudice causé par le dumping ou l'octroi de subventions, tout en prévoyant un processus distinct qui tienne entièrement compte des autres intérêts incontournables qui peuvent se présenter dans une affaire en particulier.

Il est tout à fait évident que les enquêtes menées aux termes de la loi doivent respecter les règles de l'équité en matière de procédure. À ce chapitre, les sous-comités ont fait un certain nombre de recommandations qui portent sur des éléments de la procédure. Leur objectif consistait à faire en sorte que toutes les parties intéressées puissent entièrement faire valoir leurs points de vue et réfuter la preuve avancée par l'autre partie. Les modifications qui facilitent l'accès à l'information confidentielle sont les plus importantes à cet égard. Les sous-comités ont recommandé que les avocats aient un meilleur accès à l'information confidentielle qui figure dans les enquêtes menées par Revenu Canada sur le dumping et les subventions. En uniformisant les pratiques de Revenu Canada et celles du tribunal, il serait possible de traiter de façon plus cohérente cette information tout au long du processus d'enquête.

Les sous-comités ont également recommandé que la loi soit modifiée afin de permettre une participation plus efficace des témoins experts dans les affaires instruites par le tribunal. À l'heure actuelle, les experts qui ont eu accès à des renseignements confidentiels en leur qualité d'avocats pour une partie ne peuvent ensuite témoigner dans le cadre de la même affaire. En tenant compte d'une part du rôle important que peuvent jouer les témoins experts et d'autre part du caractère sensible des renseignements confidentiels d'ordre commercial, les sous-comités ont recommandé de respecter un certain équilibre en prônant une divulgation limitée aux experts, sous réserve de pénalités indiquées, afin de les dissuader d'utiliser cette information à mauvais escient.

Le projet de loi tient compte de toutes ces recommandations. Il permet d'accéder plus facilement à l'information confidentielle tout en veillant à ce que cet accès ne donne pas lieu à une divulgation préjudiciable en instaurant de nouvelles sanctions comme des amendes élevées.

Pour finir, j'aimerais parler d'une autre question importante qui a été soulevée dans le rapport des sous-comités, à savoir celle des pénuries. Les sous-comités ont recommandé que le ministre des Finances modifie la législation afin que des marchandises puissent être exonérées temporairement des droits prévus aux termes de la loi en période de pénurie.

Je suis heureux d'annoncer au comité qu'après avoir étudié la question, le gouvernement a conclu que le fondement législatif actuel, dont le pouvoir d'accorder une remise des droits aux termes de la loi, combiné aux modifications figurant dans le projet de loi qui nous occupe, tient compte comme il se doit des situations de pénurie qui peuvent survenir. En fait, le gouvernement s'est récemment occupé des pénuries dans le cadre des lois en vigueur.

Pour conclure, j'aimerais féliciter les membres du comité d'avoir procédé à un examen très complet du système de recours commercial prévu dans la Loi sur les mesures spéciales d'importation. Le gouvernement s'est efforcé au maximum de mettre en oeuvre fidèlement les propositions découlant de cet examen. J'espère que les députés en conviendront et qu'ils contribueront à faire adopter ce projet de loi dans les meilleurs délais.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci, monsieur Valeri. Je crois que vous avez des obligations à la Chambre ou d'autres engagements qui pourraient vous contraindre à partir avant midi. C'est bien cela?

M. Tony Valeri: Oui, monsieur le président.

Le président: Chers collègues, si vous avez des questions à poser en particulier à M. Valeri, nous pourrions peut-être interrompre les déclarations maintenant pour les lui poser. Mais je vous rappelle que nous avons parmi nous M. Terry Collins-Williams. Nous le connaissons tous fort bien pour l'avoir vu à de nombreuses autres réunions. Nous avons aussi Carole Nelder-Corvari et Pat Saroli du ministère. Et également des délégués du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, de Revenu Canada, du Tribunal canadien du commerce extérieur et d'Industrie Canada. Il y a donc de nombreuses personnes pour remplacer M. Valeri s'il doit partir. Je pencherais personnellement pour passer au témoin suivant qui est M. Herman, mais si quelqu'un a une question particulière à poser à M. Valeri, qu'il le fasse maintenant de peur qu'il ne doive se lever précipitamment pour aller à la Chambre.

Vous n'y voyez pas d'inconvénients? Bien.

M. Tony Valeri: Merci, monsieur le président.

Le président: Lorsque vous devrez partir, vous pourrez vous glisser hors de la pièce sans problème.

Nous allons donc passer à M. Herman. Nous vous souhaitons la bienvenue au comité, M. Herman.

M. Lawrence Herman (présentation à titre individuel): Merci beaucoup, monsieur le président.

Je dois expliquer aux députés et autres personnes présentes que c'est le comité lui-même qui m'a demandé de comparaître en ma qualité d'avocat qui a participé, dans l'exercice de sa profession, aux délibérations sur la loi, et j'imagine aussi à titre de personne qui descend dans les tranchées pour travailler à ce genre de questions.

• 0925

J'ai écouté avec beaucoup d'attention M. Valeri, et je crois que je suis d'accord avec lui dans l'ensemble, monsieur le président, pour dire que le projet de loi représente un équilibre soigneusement établi entre les divers groupes intéressés par le processus prévu dans la loi. Je pense qu'il a été rédigé avec soin, après un examen approfondi de la part du comité mixte du Parlement et en tenant compte de son rapport. À mon avis, il met fidèlement en oeuvre ce rapport ainsi que la réaction du gouvernement audit rapport.

Je dirais très brièvement que le système de recours commercial fonctionne généralement bien au Canada. C'est un processus que nous qui travaillons dans les tranchées considérons comme une expérience raisonnablement satisfaisante à la longue. Le projet de loi C-35 procède à quelques modestes ajustements du système de recours commercial, bien que certains changements soient plus importants que d'autres. C'est un projet de loi de mise au point qui apporte des modifications administratives sous réserve de ce que je vais dire sur quelques questions de fond. Mais la façon dont les changements sont appliqués en pratique avec les règlements est essentielle. Le projet de loi donne un cadre. La législation modifiée sera adoptée et c'est la façon dont elle sera appliquée qui sera la chose la plus importante.

Je crois qu'il est important que l'on comprenne quelques autres points essentiels lorsque le comité passera à l'étude du projet de loi. La loi prévoit le respect des obligations du Canada en vertu du droit international. Ce sont les obligations qui découlent de l'accord sur l'OMC et le Canada ne peut pas se soustraire à ces obligations. Mon examen du projet de loi C-35, et de la loi en vigueur, me permet de conclure que leurs dispositions sont conformes aux obligations du Canada en matière de commerce international.

Il y a autre chose que j'aimerais préciser, car je crois qu'il est important de le comprendre, c'est que la loi n'est pas un document législatif protectionniste. Il s'agit d'une mesure que le Canada applique conformément aux conventions internationales sur les effets de distorsion du commerce dus aux prix déloyaux et aux subventions. Ce sont des règles internationales et des normes internationales que le Canada respecte.

Je sais, et je le dis à titre de parenthèse, qu'il y a des commentateurs qui prétendent que les droits antidumping et compensateurs sont des mesures rétroactives qui pénalisent le pays importateur parce qu'ils constituent en quelque sorte une protection injuste pour le secteur national qui ne peut faire face à la concurrence internationale. Je crois que c'est une idée fausse. La loi représente la réaction du Canada aux règles internationales puisqu'elle reconnaît les effets préjudiciables des marchandises proposées à des prix déloyaux sur les marchés libres et ouverts.

L'un des principaux changements apportés par le projet de loi C-35 est le passage à un système qui bifurque. C'est l'un des changements de fond dont j'ai parlé plus tôt. Je crois qu'il a des répercussions que nous devons prendre en compte et il me semble que la valeur de ces changements ne peut être comprise que lorsqu'on les met en oeuvre. Comme l'a dit M. Valeri, la raison de ce système qui bifurque, selon lequel Revenu Canada prend des décisions en matière de dumping et de subventions et le tribunal traite de toutes les questions de préjudice, est d'affecter efficacement les ressources entre les divers organismes gouvernementaux de nature commerciale qui s'occupent de l'application de la loi et—je dois insister là-dessus—éventuellement réduire les coûts du recours au processus prévu dans la loi pour les parties.

Je suis un avocat spécialisé dans les questions commerciales et tout ce que j'entreprends ou que mes collègues qui sont dans la salle entreprennent lorsqu'ils agissent au nom d'un client entraîne des coûts pour le client. Qu'il s'agisse d'un producteur canadien ou d'un importateur, il y a un coût. Et je pense que le comité doit comprendre que si l'objectif de la simplification et de l'efficacité plus grande qu'a mentionné M. Valeri doit être atteint, il faut qu'il y ait en définitive une limite ou un plafond aux coûts d'utilisation du système, ou une réduction de ces coûts.

• 0930

Permettez-moi de revenir à l'une des raisons qui ont justifié ces modestes ajustements du projet de loi C-35. L'une des inquiétudes exprimées au début du processus d'examen de la loi a été la lenteur de l'instruction par le Tribunal canadien du commerce extérieur des affaires de préjudice dû aux droits antidumping et compensateurs. Bon nombre de personnes, représentant des intérêts divers, se sont dites inquiètes du fardeau que représentent ces procédures du fait qu'il semble augmenter au fur et à mesure que l'instruction se prolonge. Et cette évolution a eu lieu depuis que nous nous occupons des questions relevant de la loi.

L'une des raisons qui ont justifié de passer à un système qui bifurque est, à mon avis, de garantir que les enquêtes prévues dans la loi et effectuée par le tribunal deviennent moins longues et soient faites de façon plus efficace afin de réduire les coûts pour les intéressés. Pour cela, on a jugé bon de permettre au tribunal d'agir plus tôt, si vous voulez, grâce au système qui bifurque. Autrement dit, le tribunal, en vertu du projet de loi C-35, prendra une décision provisoire au départ afin de dire s'il y a des raisons suffisantes de croire qu'il y a préjudice pour les producteurs canadiens. C'est là le nouvel élément du système et il représente un changement de fond par rapport à ce que nous avons actuellement.

En étudiant ces amendements, il est important de garder à l'esprit qu'ils ne sont logiques, du moins à ce qu'il me semble, que si en définitive l'intervention du tribunal à une étape antérieure, grâce à la décision provisoire de dommage, rend l'instruction plus efficace et moins coûteuse au bout du compte. Dans le cas contraire, le comité devrait revoir cette question la prochaine fois que cela sera indiqué, car on n'aura pas réussi à réaliser cette efficacité et ces économies.

Il reste toujours une petite inquiétude. Je ne veux pas dire par là qu'il faille changer quoi que ce soit au projet de loi, ou ne rien changer, mais je tiens à exprimer une légère inquiétude. Chaque fois qu'un nouveau processus est instauré, comme avec cette bifurcation, si nous ne suivons pas de près la mise en application, nous ne faisons qu'ajouter des processus et des coûts supplémentaires pour les clients.

Il y a autre chose que je tiens à dire, et c'est simplement pour planter le décor pour votre étude finale du projet de loi C-35, c'est que vous devez comprendre—et M. Valeri y a fait allusion—qu'au Canada, nous agissons dans un contexte commercial nord-américain. Nos lois sont comparables à celles des États-Unis. C'est inévitable. Il n'est pas indiqué que le Canada s'éloigne du type de système de recours commercial qui prévaut aux États-Unis. C'est la réalité qui veut que nous nous trouvions dans cette situation. Mais il nous faut par ailleurs éviter, autant que faire se peut, certaines accumulations complexes de procédures qui existent dans le système américain. J'estime nécessaire que nos recours restent comparables, mais ils ne doivent pas reproduire à tous égards le système américain.

Je dirais pour terminer que l'important pour ces amendements consiste à garantir une utilisation plus efficace des ressources et une simplification du système. En permettant au tribunal d'intervenir plus tôt, nous devrions pouvoir y parvenir. Le paragraphe 34(2) proposé représente le principal changement de fond, à mon avis, de ce système qui bifurque. Si pour finir les coûts ont augmenté pour les usagers, on peut craindre que seules les grandes sociétés qui disposent des fonds nécessaires pourront se permettre d'avoir recours au processus alors que ce ne sera pas le cas pour les petites entreprises.

• 0935

Quelques petites choses pour terminer. Premièrement, la certitude est une valeur importante dans le processus prévu par la loi et les ordonnances rendues par le tribunal devraient rester intactes à moins qu'il y ait des raisons évidentes de les modifier.

Deuxièmement—et c'est une question qui pourrait être abordée au moment des questions—il est nécessaire, en mettant en oeuvre ce processus, de respecter tout ce dont M. Valeri a parlé en matière de confidentialité de la procédure et de garantie, pour les parties qui ont recours à la procédure, que les renseignements protégés de leur entreprise ne seront pas divulgués ni recopiés largement pendant l'instruction de l'affaire.

Enfin, en ce qui concerne la question de l'intérêt public, je crois, comme M. Valeri l'a indiqué, que les valeurs ont été équilibrées comme il se doit dans ce texte de loi. Les questions ont été étudiées avec soin et je ne vois pas la nécessité de modifier la façon de faire qui est prévue dans le projet de loi. Comme M. Valeri l'a indiqué, nous sommes en avance par rapport aux États-Unis à ce chapitre. Il nous faut reconnaître le fait que nous oeuvrons dans le même contexte commercial que nos homologues américains et que notre législation devrait être, dans la mesure du possible, comparable.

Voilà ce que j'avais à dire, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Herman, pour ces remarques tout à fait utiles et lucides. C'est faire preuve d'un désintéressement remarquable que de venir, en tant qu'avocat, nous demander de réduire les coûts. C'est une attitude rassurante et quelque peu différente lorsqu'on parle au nom de quelques-uns des autres avocats qui font partie du panel. C'est assez remarquable et très utile.

Nous allons passer à Mme Van Loon, qui est présidente, comme vous le savez, de l'Association canadienne des producteurs d'acier. Nous vous souhaitons à nouveau la bienvenue au comité, Mme Van Loon.

Mme Jean Van Loon (présidente, Association canadienne des producteurs d'acier): Merci beaucoup, monsieur le président.

[Français]

Je remercie les membres du comité de nous avoir invités ce matin.

[Traduction]

Je suis ici aujourd'hui en ma qualité de présidente de l'Association canadienne des producteurs d'acier. J'ai à mes côtés M. Dennis Martin, directeur des relations commerciales et des données du marché pour Dofasco. Nous avons décidé que je ferais les remarques préliminaires mais que nous serions tous deux disponibles pour répondre aux questions.

Dans ma déclaration, j'aimerais aborder trois sujets: vous dire qui nous sommes, pourquoi cette législation est importante pour nous et ce que nous en pensons.

L'ACPA représente les producteurs primaires d'acier du Canada. Il s'agit d'une industrie de 11 milliards de dollars qui emploie plus de 33 000 personnes directement et environ quatre personnes de plus pour chacun de ces employés, à titre indirect. Nous ne sommes pas seulement un fournisseur important pour l'industrie de l'aval, nous sommes aussi un client important pour certaines des nouvelles industries importantes qui connaissent une croissance, notamment les services environnementaux, l'information technologique et les services de génie.

Pourquoi nous inquiéter de cette législation? Nous avons besoin d'outils efficaces pour lutter contre le commerce déloyal. Il est vrai que la région nord-américaine des aciéries est la seule au monde à ne pas avoir une production nettement supérieure à sa consommation. Nous sommes donc en permanence un marché cible. Les sidérurgistes préféreraient naturellement vendre à bas prix à l'étranger plutôt que de réduire la production dans leur pays. Étant donné que nous sommes un marché ouvert, nous sommes donc une cible. Dans une période comme celle que nous vivons actuellement, lorsque plus d'un tiers de la capacité de production mondiale d'acier se vend sur des marchés déprimés, nous sommes particulièrement vulnérables. Sans des recours efficaces, les problèmes temporaires du marché d'autres pays peuvent entraîner des dommages permanents pour l'économie canadienne.

Devons-nous constamment contester contre le dumping? Non. Nous avons un marché très ouvert pour l'acier dans notre pays. Environ 95 p. 100 de l'acier importé ne sont pas touchés par des poursuites commerciales. L'année dernière plus de 35 p. 100 des besoins canadiens ont été satisfaits par des importations et ces importations sont venues de 54 pays différents. C'est donc bien un marché ouvert.

La plupart des négociants font du commerce loyal. Nous avons besoin d'outils efficaces pour régler les quelques situations où le commerce de l'acier est fait de façon déloyale.

• 0940

J'aimerais maintenant passer à notre opinion du projet de loi. De façon générale, nous pensons que ce projet de loi représente un cadre juste et équilibré. Il pourrait être un cadre légal efficace pour que les recours commerciaux soient traités rapidement, mais il faut des règlements solides, comme le permet ce projet de loi.

Nous voulons un processus juste et transparent. Le projet de loi précise les règles pour Revenu Canada et le TCCE et procède à un ralignement entre ces deux instances. Il autorise pour la première fois un règlement précisant les conditions dans lesquelles vous pouvez effectuer divers types de réexamen—intermédiaire, de temporisation et d'intérêt public—ainsi que les facteurs qui devraient être pris en compte pour effectuer ces réexamens. Nous considérons que ce sont là des étapes positives.

Nous voulons que les renseignements confidentiels soient suffisamment protégés. Nous avons déjà entendu dire que l'on aurait plus facilement accès aux renseignements confidentiels. Nous admettons que c'est nécessaire, mais il faut que cela soit fait de façon responsable. Nous nous inquiétons des cas où, de l'avis de nos membres, des renseignements confidentiels, très sensibles qui n'étaient pas vraiment pertinents pour l'affaire en instance devant la commission ont néanmoins dû être fournis en de nombreux exemplaires et largement distribués aux avocats qui s'occupaient de l'affaire.

Nous considérons la lettre d'intention du TCCE sur la façon dont il envisage de procéder pour ce règlement comme une étape positive. Nous estimons qu'elle nous offre une certaine garantie de traitement responsable des affaires, mais nous souhaitons voir la version provisoire de ce règlement.

Nous voulons aussi être protégés contre les révisions frivoles des décisions rendues. Larry a parlé de l'importance d'avoir une certitude. La législation offre une certaine souplesse pour les réexamens intermédiaires. Là encore, nous ne contestons pas l'intention, mais nous ne souhaitons pas voir cette possibilité utilisée de façon frivole de sorte que les cas peuvent être rouverts à n'importe quel moment, ce qui coûte très cher à toutes les parties concernées, et ce qui constituerait une grande incertitude pour une industrie qui recherche avant tout une protection. Nous pensons que le règlement provisoire proposé constitue une approche acceptable et équilibrée à cet égard. Dans la mesure où il deviendra définitif, nous pourrions l'accepter.

Nous aimerions que certaines contraintes soient imposées aux recours aux interrogatoires dans le cadre de la procédure du TCCE qui sont faits à titre d'enquêtes exploratoires. Encore une fois, les interrogatoires ont un rôle légitime à jouer; nous ne le contestons pas. Mais il ne faut pas abuser du processus. Encore une fois, la lettre d'intention du TCCE va dans la bonne direction et nous attendons avec impatience le moment de voir la version provisoire de ces règles.

Pour terminer, j'aimerais vous parler de notre inquiétude. Bien que nos membres soient parmi les plus grosses entreprises, nous nous inquiétons cependant beaucoup du coût de ces procédures. Certains de nos membres ont même été sollicités par des entreprises plus petites de l'aval qui ont demandé aux sidérurgistes de défendre leur cause en leur nom parce que ce serait trop coûteux pour elles. Il est très important de limiter au minimum les coûts nécessaires pour que le processus soit juste et transparent. En vertu du règlement provisoire proposé dans le cadre de la loi et de la lettre d'intention du TCCE, nous pensons qu'on s'engage dans la bonne direction. Si on continue dans cette foulée, nous serions favorables.

Dans l'ensemble, nous sommes satisfaits de l'équilibre atteint dans le texte de loi. Nous sommes satisfaits de la direction que semble prendre le règlement, mais nous considérons la réglementation suffisamment importante pour vouloir voir le texte final avant de dire qu'il nous semble tout à fait acceptable.

Merci beaucoup.

Le président: Merci beaucoup, madame Van Loon. Votre intervention a été très utile.

Monsieur Clark.

M. Peter Clark (représentant, Grey, Clark, Shih and Associates; Krupp Fabco Inc., Maksteel, Titan Tool and Die Ltd., et Magna International Inc.): Merci, monsieur le président.

Nous vous avons distribué un mémoire qui contient notre opinion et mes collègues qui m'accompagnent aujourd'hui m'ont signalé que j'avais fait une grave erreur. J'ai dit qu'ils venaient tous de l'Ontario, ce n'est pas exact. Vous le verrez clairement lorsque je les présenterai.

J'ai amené avec moi M. Wayne Brush qui est vice-président des achats pour Magna International. Outre ses usines ontariennes, Magna a aussi des établissements au Québec et un à North Sydney en Nouvelle-Écosse. Magna emploie 14 000 personnes au Canada et 49 000 dans le monde entier.

• 0945

J'ai également à mes côtés M. Mike Morris, qui achète l'acier pour Krupp Fabco Inc., entreprise qui compte 650 employés et a des usines à Windsor, Ridgetown et Dresden en Ontario.

J'ai aussi avec moi M. Martin Carfrae qui est directeur des achats pour Maksteel and Makauto. Cette compagnie a des usines à St-Hubert au Québec, à Mississauga, Windsor, Concord et Scarborough en Ontario, et aux États-Unis.

Ces entreprises sont de grosses consommatrices d'acier. Elles s'occupent d'emboutissage de pièces automobile. Elles oeuvrent dans le secteur économique le plus axé sur le libre-échange d'Amérique du Nord, l'industrie automobile.

Si nous admettons que nous ne contestons pas que les producteurs canadiens qui sont lésés par le dumping devraient être protégés, nous voulons aussi être sûrs que cette protection ne va pas museler les industries de l'aval comme l'industrie automobile.

Nous avons les mêmes inquiétudes que M. Herman et Mme Van Loon concernant le coût du processus. Le fait est que si les procédures existent, M. Herman et moi-même devons tous deux les utiliser de façon différente pour défendre nos clients au mieux de nos capacités. Mais si nous sommes limités dans ce que nous pouvons faire, cela coûtera moins cher à nos clients. Il faut que le processus soit crédible à tous égards, qu'il soit accessible aux petites et moyennes entreprises, ce qu'il n'est pas pour l'instant. Il est très au-dessus de leurs moyens.

Nous avons lu la réponse du gouvernement à vos recommandations, monsieur le président, et nous avons constaté qu'en effet, en ce qui concerne les producteurs canadiens de petite et moyenne taille, Revenu Canada fait tout son possible pour les aider à préparer leur cause. C'est ce que le ministère a toujours fait, et je crois qu'il faudrait en quelque sorte encourager cela. Mais les Canadiens qui doivent de temps à autre importer des produits doivent également assumer des coûts; ce sont aussi des électeurs, ils emploient également des gens et ils doivent être traités avec équité.

Nous avons constaté après avoir discuté avec vous, la dernière fois, et après avoir exprimé nos inquiétudes sur les pénuries qui se sont produites au moment le plus fort du cycle lorsque des droits antidumping ont été imposés, que Revenu Canada a modifié sa façon de faire à l'égard des petits exportateurs qui ne sont pas des fabricants. Le ministère n'exige plus automatiquement qu'ils fournissent l'information concernant le coût de production. C'est une étape importante et nous aimerions qu'il continue à le faire.

Pour le processus de bifurcation dont ont parlé M. Herman et Mme Van Loon, nous sommes tout à fait favorables aux changements proposés dans les articles 17 à 23 du projet de loi C-35 et nous nous opposons à toute modification de ces dispositions. Nous espérons également que le processus deviendra plus efficace. Leur modification ne semble guère justifiée si l'on en croit les intentions du tribunal exprimées par M. Gosselin dans sa lettre d'intention. Il ne devrait pas y avoir grand-chose d'autre qu'un requérant doive faire, au sujet de sa plainte, pour qu'elle soit traitée par le tribunal.

Quant aux intimés, ils auront davantage de possibilités d'éliminer la plupart des coûts qui se situent à l'autre extrémité de l'enquête. Ce sera certainement moins coûteux pour eux. C'est aussi juste sur le plan procédural, et cela est conforme aux obligations contractées par le Canada dans le cadre de l'OMC. C'est l'un des domaines où nous sommes en retard par rapport aux États- Unis. Nous ne nous proposons pas d'aller aussi loin que les États- Unis et je pense que ce que M. Gosselin prévoit est à la fois juste et raisonnable.

En ce qui concerne l'accès aux renseignements confidentiels, je suis heureux de voir que les pénalités qui ont été proposées devraient garantir la confidentialité. Et cela faisait défaut dans la législation précédente.

En ce qui concerne l'accès à l'information des experts, M. Herman ne sera pas surpris d'entendre que je suis d'accord avec lui à ce sujet, car nous sommes allés à une réunion avec M. Stobo et son personnel, M. Albrecht y était également, c'est-à-dire une réunion de praticiens, au cours de laquelle nous avons exprimé nos inquiétudes concernant l'accès et notre volonté de garantir un accès limité à ce qui est strictement nécessaire pour permettre aux experts de faire leur travail. C'est ce type de garantie que nous offre le secrétariat du tribunal.

Je dois aussi préciser que dans toutes mes interventions auprès des comités, et cela remonte à la première comparution de l'AMC en 1982, il n'y a jamais eu de consultation aussi générale de la part des organismes et ministères pour l'élaboration d'un texte de loi. C'est tout à fait louable et je crois que c'est pour cela que nous n'avons pas de divergences graves. Je crois qu'avec ce texte, on a fort bien réussi à respecter l'intention de la réglementation dans les limites imposées.

• 0950

Nous avons cependant des inquiétudes en ce qui concerne les experts. Et elles découlent, monsieur le président, du fait que lorsqu'on est expert, on a tendance à proposer ses services à la ronde. L'information obtenue reste à l'esprit et qu'ils aient l'intention de la divulguer ou non, que cela se fasse accidentellement ou non, cette information reste dans leur esprit. Nous tenons donc à ce que l'accès à l'information soit vraiment précisé et limité et je pense que c'est ce que nous allons avoir.

Notre recommandation 6 demande que l'on prenne en compte les ventes à bas prix sur des marchés tiers. Je ne peux pas m'empêcher de dire, monsieur le président, que nos amis de l'industrie sidérurgique se sont bien faits comprendre la dernière fois. Le fait est que l'on ne peut pas vraiment faire de commerce à l'échelle internationale sans faire de dumping. Ce que vous essayez de régler avec l'entente contre le dumping est en fait le préjudice et non le dumping, car le commerce ne se ferait pas si vous ne faisiez pas de dumping. Le fait que l'on vende à bas prix sur un marché tiers n'est pas nécessairement le signe qu'il y a menace de dommage.

Le tribunal s'occupe de ce genre de problème de temps à autre. Si l'on a conclu que quelqu'un a subi un préjudice sur un autre marché ou que le comportement de ce marché revient à un dumping préjudiciable, c'est une chose. Mais pour le dumping pur et simple, le fait est que si vous avez un fabricant à Trois-Rivières qui vend quelque chose à Shawinigan, son établissement va faire une meilleure affaire que s'il vend le même produit au même prix à quelqu'un qui se trouve à Edmonton. Techniquement, cette différence du revenu net pour l'usine constitue du dumping.

Je crois donc que la simple preuve de dumping sur un marché tiers va vraiment plus loin que ce que l'on devrait considérer. Si c'est un simple facteur à prendre en compte cependant, on peut en discuter. Je ne vois vraiment rien qui justifie ce changement, ni dans le raisonnement logique ni dans la pratique.

Nous sommes favorables à plusieurs autres règles et nous n'allons donc pas en discuter.

Quant à la méthode prospective d'imposition des droits, nous avons étudié la question avant de comparaître devant vous, car nous avons constaté que le gouvernement avait fait plusieurs propositions dans la législation en ce qui concerne la perception des droits à la suite d'un appel ou d'un réexamen dans le cadre de l'ALENA, et si la décision a été annulée. Monsieur le président, cela donne une industrie qui n'a pas gain de cause, que ce soit au tribunal pour l'enquête originale sur le préjudice ou dans le cadre du réexamen prévu à l'article 76, une année supplémentaire de protection effective car cela crée une certaine incertitude sur le marché.

Il y a une certaine logique à permettre d'en appeler d'une décision prise par des tribunaux experts, mais je suis sûre que M. Herman pourrait expliquer cela mieux que moi puisqu'il est avocat et que je ne le suis pas. Je vois là un problème dont j'ai d'ailleurs discuté avec mon ami M. Séguin à plusieurs reprises. Pendant cette période d'incertitude, où les intimés peuvent être éventuellement responsables de dumping—allégation qui pourrait faire surface pour les frapper un an plus tard ou davantage—Revenu Canada ne va pas nous dire quelle est la valeur normale. C'est une question de politique que de ne pas nous dire quel devrait être le prix pour éviter ces droits antidumping si l'affaire refait surface un an plus tard.

Nous croyons que la législation n'empêche pas Revenu Canada de le faire maintenant, mais elle crée une incertitude considérable et inutile. S'il doit y avoir une disposition rétroactive, je pense que la charte des droits des contribuables, qui est sur le site Web de M. Séguin au ministère, ne permet pas aux contribuables—et les Canadiens paient effectivement ces impôts—de savoir quelle est leur responsabilité. Si le comité est d'accord, nous aimerions qu'il en parle dans son rapport final ou qu'une modification soit apportée au texte de loi si M. Séguin et ses collègues en ont besoin, pour faire en sorte qu'on ne se trouve pas dans de telles situations.

En ce qui concerne le réexamen intermédiaire et le réexamen relatif à l'expiration, j'ai toujours eu l'impression que le tribunal pouvait réviser les décisions à n'importe quel moment en vertu de la législation en vigueur de toute façon.

• 0955

En ce qui concerne la partie de l'article 36 qui traite des effets cumulatifs, nous avons étudié cet article et nous l'appuyons, parce que le tribunal a le pouvoir de déterminer dans quelles circonstances ces effets cumulatifs peuvent avoir lieu.

En ce qui concerne notre recommandation 13, nous constatons que la liste non exclusive des facteurs a été incluse dans le règlement et non dans la loi. N'étant pas avocat, j'ai toujours cru que les règles constituaient des indications et que la loi constituait une obligation. M. Saroli a déjà essayé de me l'expliquer, mais puisque je suis ici, peut-être pourrait-il essayer à nouveau de m'expliquer pourquoi cela ne diminue en rien les intentions originales du comité lorsqu'il a recommandé de les inclure dans la loi.

En ce qui concerne la notion de droits moindres, nous sommes heureux que cela figure dans le texte de loi. C'était la recommandation la plus importante que nous avions faite au nom du secteur de l'emboutissage des pièces automobiles dans nos recommandations originales au gouvernement, monsieur le président. J'aimerais une plus grande sévérité encore, mais il pourrait s'agir de montrer au tribunal, dans la pratique, comment y parvenir vraiment. Nous ne proposons aucun changement à cette partie du texte de loi.

Enfin, en ce qui concerne le fait d'être exempté temporairement des ordonnances de droits antidumping et compensateurs pour les marchandises lorsque l'offre intérieure est insuffisante, j'ai demandé à M. Brush de vous dire brièvement quelle a été notre expérience à ce sujet. On a dit que la législation en vigueur permettait de résoudre ce genre de situations, et c'est effectivement le cas. Mais à notre avis, elle ne permet pas de le faire suffisamment bien ou suffisamment automatiquement. Il ne nous semble pas acceptable que l'industrie plaignante ait le droit de veto ou semble du moins avoir le droit de veto en ce qui concerne les exonérations.

Merci.

Le président: Merci beaucoup.

Monsieur Brush.

M. Wayne Brush (vice-président, Achats, Magna International Inc.): Ma remarque sera brève, monsieur le président.

Peter vous a assez bien décrit la situation, mais je dois vous rappeler que nous n'avons pas beaucoup de stock dans une usine d'emboutissage. Le stock correspond peut-être à une ou deux journées de production. Si nous arrivons dans une période de pénurie, nous ne pouvons pas nous permettre d'attendre. Si nous ne pouvons satisfaire un client, notre réputation risque de subir des sanctions financières ou autres qui pourraient avoir des répercussions sur nos transactions futures. Et bien sûr qui dit transactions futures dit emplois, il faut donc agir rapidement dans une telle situation.

Le problème que pose le processus actuel, est qu'il faille obtenir le consensus entre fournisseurs pour pouvoir obtenir une exemption. Même si nous devons agir pour que l'acier continue à arriver afin que nos usines continuent à tourner, nous pouvons nous voir imposer des droits après coup. Il nous faut donc un processus qui soit non seulement efficace, mais également rapide et ne demande pas trop de temps pour ceux d'entre nous qui doivent s'en occuper après coup.

Le président: Merci beaucoup. Voilà qui est très utile. Je vous remercie.

Monsieur Albrecht.

M. Dalton J. Albrecht (associé, MacMillan, Binch; représentant, IPSCO Inc.): Merci, monsieur le président et messieurs et mesdames les membres du comité. Je suis ici au nom d'IPSCO Inc., un important producteur canadien d'acier qui a son siège social en Saskatchewan mais des établissements dans toute l'Amérique du Nord.

D'une façon générale, IPSCO est favorable à l'ensemble des dispositions qui figurent dans le projet de loi C-35 et dans les textes de loi accessoires. J'entends par là le règlement proposé ainsi que les nouvelles règles proposées pour le tribunal. IPSCO s'inquiète de la décision provisoire de dommage, surtout pour le fardeau et les coûts supplémentaires que cela représente, mais IPSCO comprend que l'ensemble doive être équilibré.

De même, nous acceptons l'application éventuelle de droits pour le dumping avec des valeurs normales connues pour donner un peu de certitude aux personnes concernées. Cela est très différent du système rétroactif américain qui est sans doute plus punitif et devrait être plus favorable à notre avis, mais nous admettons la nécessité de voir les choses de façon prospective car cela est aussi plus conforme à l'accord du GATT de 1994.

Nous considérons également le projet de loi comme un ensemble généralement équilibré. Dans le passé toutefois, nous nous sommes inquiétés—et nous le sommes toujours—de la divulgation des renseignements confidentiels, hautement sensibles à des conseillers non juristes en vertu de la législation en vigueur. Nous remarquons la communication aux experts en plus, comme proposé dans les amendements à l'article 45 de la Loi sur le TCCE, et le terme «experts» n'y est pas défini, soit dit en passant. Il pourrait s'agir de quiconque est jugé utile par le tribunal pour sa décision; cela peut représenter un groupe très disparate. Nous pensons que cela va augmenter le problème et nous nous inquiétons du fait que cette divulgation générale de renseignements commerciaux portant sur des spécialités qui ne sont pas divulgués ailleurs et qui ne sont même pas généralement connus au sein de l'organisation.

• 1000

Je parlais notamment des procès-verbaux des réunions du conseil d'administration, des séances d'information confidentielles, des plans stratégiques de la haute direction et du détail des coûts concernant les filiales situées dans d'autres pays. Tout ces renseignements ont été exigés dans le cadre de l'enquête préalable.

Au lieu d'avoir un nombre restreint d'avocats qui comparaissent régulièrement devant le tribunal et qui ont intérêt à respecter la confidentialité de ces renseignements s'ils veulent continuer à travailler, nous allons avoir une multitude de gens qui auront accès à cette information. Il s'agira de soi-disant experts régis par aucun organisme, des petites merveilles que l'on va peut- être voir une seule fois, qui vont rester une minute et qui la minute d'après vont représenter quelqu'un d'autre de l'industrie à titre d'experts-conseils, ou qui sont même employés par quelqu'un d'autre.

IPSCO veut donc faire connaître ses inquiétudes persistantes. Nous les avons exprimées au ministère des Finances, au ministre responsable, à l'honorable Jim Peterson. Malgré l'imposition de pénalités monétaires qui peuvent être assez importantes, comme proposé dans les amendements, une grave inquiétude demeure.

L'honorable Penson en a parlé lors de la discussion en deuxième lecture; on s'inquiète toujours du préjudice important qui pourrait être causé si cette information était divulguée par inadvertance.

Le président: Pourriez-vous nous rappeler de quel article il s'agit?

M. Dalton Albrecht: Le numéro de l'article? Duquel voulez-vous parler?

Le président: Celui qui porte sur la communication dans le projet de loi.

M. Dalton Albrecht: On en parle en fait à deux endroits. Je veux parler de l'article 45. C'est l'article que l'on se propose d'amender. Il s'agit de l'article 59 du projet de loi C-35.

Le président: Qui va modifier l'article 45?

M. Dalton Albrecht: Exactement.

Le président: Merci beaucoup. Désolé de vous avoir interrompu.

M. Dalton Albrecht: Le paragraphe 45(3) proposé prévoit une communication supplémentaire. Le paragraphe 45(7) proposé prévoit des pénalités. Mais il s'agit de l'article 59 du projet de loi. Je vous demande pardon pour toute cette confusion.

Nous sommes prêts à appuyer le projet de loi. Après avoir vu la lettre d'intention du tribunal du 19 octobre, qui a été communiquée, concernant les procédures prévues par la loi, et les nouvelles règles proposées pour le TCCE—qui seront en gros mises en oeuvre comme prévu dans la lettre, à ce que comprend IPSCO— ainsi que les consultations sur le règlement provisoire proposé. Nous devons cependant vous signaler les graves inquiétudes que nous avons.

J'aimerais maintenant passer aux propositions d'amendements supplémentaires des dispositions concernant l'intérêt public. Je constate que le projet de loi a été élaboré à la suite d'un processus complet d'étude par un comité mixte et un sous-comité auquel toutes les parties concernées ont participé. Dans le cadre des audiences, on a également demandé l'avis des intéressés et du public. Tout cela a donné lieu au rapport du gouvernement déposé en avril dernier.

Il me semble qu'il est un peu tard d'envisager des changements de fond du genre proposé pour les dispositions concernant l'intérêt public. Je parle du genre de propositions faites au cours du débat en deuxième lecture. On manquait de précisions sur les propositions proprement dites, qui semblaient être de nature très essentielle, pour pouvoir traiter du fonds du problème.

Pour mener une enquête d'intérêt public en même temps qu'une enquête sur le préjudice, ou dans le cadre de celle-ci en vertu de l'article 42, cela voudrait dire que la protection prévue des producteurs canadiens face aux pratiques de commerce déloyales serait anéantie. Cela est dû au fait que la prépondérance de l'enquête sur le préjudice serait englobée dans une enquête économique générale, ce qui n'est pas l'objet de la loi.

Même une enquête automatique d'intérêt public, si c'est ce qui est prévu, n'est pas nécessaire. Elle n'est pas indiquée. Il y a des dispositions pour une enquête d'intérêt public si l'intérêt public est suffisamment important, et tout le monde est libre de faire des déclarations.

Si l'enquête d'intérêt public est importante, et le projet de loi en tient compte, et exige que des facteurs soient pris en considération par le tribunal dans une telle enquête, il pourrait s'agir notamment des répercussions sur les consommateurs, sur les producteurs de l'aval et sur la compétitivité du Canada. Ce qui n'est pas la même chose que la protection des producteurs canadiens face aux pratiques commerciales déloyales. C'est l'objectif de la loi et c'est ce qui est prévu dans l'accord du GATT de 1994, dans le cadre des ententes sur l'OMC.

Le Canada est en fait l'un des rares pays à avoir un processus officiel et transparent concernant l'intérêt public. Nous avons entendu dire que les États-Unis n'en avaient pas. Ce n'est pas obligatoire et ce n'est même pas mentionné directement dans l'accord du GATT de 1994.

Le processus de l'enquête d'intérêt public a été largement étudié par le Parlement et il a fait l'objet du rapport du sous- comité mixte et de la réponse du gouvernement. C'est plus qu'il n'en faut.

Nous tenons à signaler que cela n'est pas nécessaire de toute façon au début de l'enquête, car l'intérêt public n'est pertinent que si la décision conclut au dommage. Pourquoi rendre l'enquête confuse?

Nous demandons donc avec force de ne pas apporter de changements au projet de loi à cet égard. Et si on doit l'amender, IPSCO aimerait avoir une nouvelle occasion de faire entendre son avis sur la question mais aussi sur d'autres sujets d'inquiétude.

Merci.

• 1005

Le président: Merci beaucoup.

Nous allons maintenant passer à M. MacDonald. L'endroit où il se trouve dans la salle du comité ne veut pas nécessairement dire qu'il est membre du Parti réformiste.

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Non, mais nous serions très heureux de l'accueillir parmi nous étant donné que je suis seul.

Le président: Cela pourrait être bien pour vous, monsieur Penson. Vous auriez enfin une alliée.

Des voix: Oh, oh!

Le président: Monsieur MacDonald.

M. Ken MacDonald (secrétaire et directeur, Élaboration des politiques, Association des fabricants de pièces d'automobile): Merci, monsieur le président, de votre remarque. Je dois en fait faire preuve de la plus grande circonspection étant donné que je suis ici au nom de l'industrie des pièces d'automobile qui est constituée de membres très divers.

Notre association représente les fabricants de pièces, de matériels et d'équipement utilisés pour la construction de voitures et de camions; il peut s'agir d'acier et de verre aussi bien que de composants électroniques et de matériel de télédétection.

Nos membres représentent environ 90 p. 100 de l'industrie, c'est-à-dire 26 milliards de dollars d'expéditions l'année dernière au total. Nous sommes responsables de 92 000 emplois au Canada. Comme je l'ai indiqué, nos membres comptent à la fois des producteurs d'acier et de nombreux utilisateurs d'acier. Ce ne sont que quelques-uns des visages connus qui sont dans cette pièce et tous ont une énorme expérience des mesures antidumping.

Il est donc logique que l'association se soit intéressée à la loi et aux questions commerciales apparentées depuis un certain temps. Nous avons présenté des mémoires au sous-comité il y a pratiquement deux ans.

Au printemps 1997, les membres de l'AFPA ont essayé avec succès d'obtenir un décret de remise concernant les droits prévus dans la loi pour l'acier traité contre la corrosion. Ce printemps nous sommes revenus à Ottawa pour faire des déclarations dans le cadre d'une audition du TCCE sur la tôle d'acier écroui et nous avons suivi de très près le processus d'élaboration du projet de loi C-35.

Il y a bien sûr des divergences nettes d'opinion entre nos membres en ce qui concerne la loi. Les producteurs d'acier veulent s'assurer de ne pas manquer de ventes en raison de la concurrence déloyale due aux prix des importations. Par ailleurs, les fabricants de pièces d'acier doivent avoir des sources fiables et économiques d'acier à l'étranger. Bien que les fabricants de pièces d'acier en question obtiennent la plus grande partie de leur acier dans des usines ou des centres de services canadiens, il faut qu'ils aient accès à des sources étrangères dans certaines circonstances.

Nous avons déjà entendu parler des pénuries qui se produisent de temps à autre au Canada pour certains types d'acier. Le premier exemple qui vient à l'esprit est celui de l'acier traité contre la corrosion au printemps de l'année dernière.

Comme vous le savez sans doute, nos clients s'attendent à recevoir des livraisons au moment adéquat, ce qui parfois nous laisse une marge de deux à trois heures seulement. Le fabricant de pièces n'a pas d'autre choix alors que de s'approvisionner auprès d'une source étrangère de façon temporaire. Il se trouve parfois aussi que certains clients de nos membres exigent que certains matériaux soient achetés chez un fournisseur donné à l'extérieur du Canada.

Après la publication des recommandations des comités chargés de l'examen de la loi en décembre 1996, nous avons procédé à un sondage auprès de nos membres pour connaître leur opinion. Plusieurs recommandations de ces rapports ont reçu l'appui de la majorité des répondants, et ce sont les résultats de cette enquête qui constituent le point de départ de mon exposé d'aujourd'hui qui sera nécessairement assez général.

Nous tenons vraiment à ce que la méthode prospective d'imposition des droits qui est en vigueur soit maintenue. Il est impératif que lorsqu'ils importent du matériel, nos membres sachent s'ils seront assujettis à des droits antidumping. Tout changement proposé à la loi, à l'article 33 du projet de loi C-35, doit être pesé en fonction de cela. Les processus prévus dans la loi doivent rester aussi efficaces que possible pour garantir un accès juste et équitable aux petites et moyennes entreprises, que ce soit à titre de plaignants ou d'intimés.

Nous sommes très heureux de voir apparaître de nouveaux facteurs précis pour orienter les enquêtes d'intérêt public du TCCE. Comme vous le savez, depuis l'entrée en vigueur de la loi en 1984, l'intégration économique s'est accélérée nous obligeant à compter davantage sur les produits étrangers pour qu'ils subissent une autre transformation au Canada. C'est vrai de nombreux secteurs, mais pour aucun autant que pour le nôtre.

Nous sommes particulièrement heureux de voir que ces facteurs d'intérêt public reprennent les inquiétudes de l'industrie concernant les pénuries. Nous recommanderions cependant que les décisions du TCCE découlant de cette enquête puissent être révisées par la Cour fédérale—c'est-à-dire qu'il s'agisse d'une révision juridique et non politique.

• 1010

Dans un même ordre d'idées, nous sommes heureux de l'amendement permettant des déclarations concernant les engagements, bien qu'on nous informe que le règlement ne permettra de faire de telles déclarations qu'avec un préavis de sept jours. À notre avis, c'est un délai assez court, surtout si les engagements sont reçus peu après la décision provisoire.

Nous sommes heureux de voir une disposition donnant au TCCE le pouvoir d'imposer des droits moindres. Mais nous pensons que ce devrait être le cas chaque fois que des droits sont imposés, c'est- à-dire pas uniquement lorsque le TCCE a conclu que l'imposition du plein montant ne serait pas dans l'intérêt public. Une telle limite n'est pas conforme à l'objet des droits prévus dans la loi, objet qui est de constituer un redressement pour un dommage subi.

Enfin, nous sommes heureux que l'accès aux renseignements confidentiels soit élargi aux avocats et aux experts.

Pour terminer, nous sommes en général satisfaits car nous estimons que les opinions et les recommandations de nos membres ont été prises en compte dans le projet de loi C-35. Il suffit de rectifier les questions en instance que j'ai mentionnées concernant l'imposition prospective des droits, la plus grande importance de l'intérêt public, les engagements concernant les droits moindres, ainsi que la loi, et cela nous sera très utile pour un certain temps.

Merci.

Le président: Merci, monsieur MacDonald. Puis-je vous demander rapidement si vous proposez que la décision concernant l'intérêt public ne soit pas révisable par la Cour fédérale?

M. Ken MacDonald: Nous proposons qu'elle soit révisable par la Cour fédérale.

Le président: Quelque chose laisse-t-il supposer que ce n'est pas le cas dans la législation en vigueur?

Dans toute instance, je crois, s'il y a une erreur de droit dans le réexamen entrepris par le TCCE, la Cour fédérale pourrait procéder à une révision, n'est-ce pas? Je veux dire que la Cour fédérale a compétence générale en matière de...

Voulez-vous faire une remarque là-dessus, monsieur Herman, afin que nous puissions préciser la chose?

M. Larry Herman: Je ne pense pas qu'elle soit révisable car ce sont des opinions et des recommandations du tribunal.

Le président: Très bien, d'accord. Elles sont de nature purement administrative et donc... Mais si une erreur de droit de quelque ordre que ce soit était commise—ou faudrait-il qu'il s'agisse d'un préjugé par exemple pour que la décision soit révisable?

M. Dalton Albrecht: La façon dont l'audition a été menée pourrait faire l'objet d'une révision...

Le président: Oui, il faudrait que ce soit le déroulement de l'audition.

M. Dalton Albrecht: ...mais non la décision finale, car c'est en fait la décision du ministre.

Le président: D'accord, je comprends. Merci beaucoup. Voilà qui est très utile. Désolé de vous avoir interrompu. Parfait.

M. Peter Clark: Monsieur le président, puis-je disposer de 30 secondes pour répondre à la question soulevée par M. Albrecht? Si j'avais su qu'il allait la poser, j'en aurais parlé dans mes déclarations.

Le président: C'est ce qui se produit constamment lors des audiences du comité.

M. Peter Clark: J'imaginais que vous alliez faire preuve de souplesse pour ce genre de choses.

Ce n'est pas nécessairement la position de M. Albrecht. C'est la position de ses clients qu'il a soulevée dans le passé. Il s'oppose à ce que les conseillers qui ne sont pas des juristes aient accès à l'information confidentielle. Étant donné que notre cabinet comparaît devant le tribunal sans doute plus souvent que n'importe quelle autre organisation, nous ne sommes pas d'accord. Nous aimerions apporter quelques précisions.

C'est une pratique canadienne qui existe depuis longtemps que d'autoriser des conseillers, juristes et non juristes, à comparaître devant les tribunaux administratifs. Les affaires instruites devant le tribunal ont pour objet de déterminer le dommage, ce qui constitue un processus économique. C'est ce qui est mis sur la table. Je ne pense pas qu'il y ait vraiment eu violation de la confidentialité de la part d'avocats ou de conseillers non juristes qui ont comparu devant le tribunal. L'intégrité ne vient pas avec l'admission au barreau, monsieur le président. Nous nous opposons donc à cette proposition.

Merci.

Le président: Nous allons laisser ce sujet. Nous n'allons pas exiger que vous étudiiez le droit, monsieur Clark, si c'est ce que vous voulez dire.

M. Dalton Albrecht: Monsieur le président, me donnez-vous une seconde?

Le président: Non, nous n'allons pas entamer le débat sur la question.

M. Dalton Albrecht: Non, je ne demande pas à en débattre. Je veux simplement qu'il soit bien clair que je n'ai fait aucune insinuation personnelle.

Le président: Nous allons poursuivre. Si le sujet revient au cours des questions, nous passerons à autre chose.

Je donne la parole à M. Penson.

M. Charlie Penson: Merci, monsieur le président.

Je salue toutes les personnes qui sont venues représenter l'industrie aujourd'hui.

Monsieur le président, il semble que nous ayons pratiquement réussi à faire l'impossible à notre sous-comité. Il se pourrait que nous ayons atteint un équilibre qui satisfasse tout le monde; c'est du moins ce qu'il apparaît à entendre les témoins d'aujourd'hui. Même si quelques éléments précis me semblent mériter un éclaircissement, j'estime qu'il est bien que l'on ait dépassé le stade où l'on parle de copier la législation américaine en matière de dumping. Il me semble tout simplement, d'après ce que j'entends autour de la table, et on pourra me corriger si je me trompe, que l'on ait réussi à atteindre un assez bon équilibre avec ce texte de loi.

J'aimerais poser quelques questions. Je n'ai pas tout à fait saisi les remarques de M. Brush sur les pénuries, les situations de pénuries, à savoir qu'un consensus est nécessaire et que cela vous empêche donc d'agir rapidement. Pourriez-vous préciser ou nous expliquer davantage ce que vous entendez par là?

• 1015

M. Wayne Brush: C'est la récupération ou la réduction de la pénalité. La pénalité pour l'acier écroui a été de 87,5 p. 100 et pour la tôle d'acier revêtu, les droits de dumping sont de 155 p. 100. Si une usine n'a pas une valeur normale, c'est ce que nous devons payer. Nous pouvons récupérer un drawback si les pièces sont vendues à l'extérieur du pays, mais si elles sont utilisées dans des véhicules au Canada, on ne les obtient pas nécessairement.

Il faut agir d'une façon ou d'une autre en cas de pénurie. On ne peut simplement pas dire non à un client. Lorsqu'on s'adresse au cabinet pour obtenir une sorte décret de remise pour nous couvrir dans de telles situations, à moins que toutes les usines s'entendent, il existe un droit de veto. À ce moment-là, on ne peut rien récupérer.

Pour la période dont parlait Peter, nous avions une pénurie pour les produits en acier écroui et revêtu. Voilà donc la situation que nous vivions. Nous avons dû aller à l'extérieur des États-Unis pour obtenir ce dont nous avions besoin pour continuer à faire tourner nos usines.

M. Charlie Penson: Je comprends cela, M. Brush, mais la disposition concernant les pénuries figure maintenant dans le projet de loi. On espère qu'elle constituera une solution applicable.

Vous semblez laisser entendre que parce que le consensus est nécessaire, elle pourrait ne pas répondre à vos besoins encore une fois et que vous pourriez devoir encore payer des droits. Existe-t- il un meilleur processus? Existe-t-il quelque chose que vous puissiez suggérer pour améliorer la proposition?

M. Peter Clark: Monsieur Penson, aucun changement n'a été apporté au texte de loi pour mettre en oeuvre cette recommandation. On nous a dit que la législation en vigueur prévoyait le nécessaire. M. Brush disait en gros que la législation en vigueur est très discrétionnaire. La pratique veut jusqu'ici qu'on obtienne le consensus de l'industrie qui est protégée pour savoir si oui ou non on peut accorder une remise.

M. Charlie Penson: La question logique est donc de savoir s'il y a un processus qui répondrait mieux à vos besoins. Proposez-vous une amélioration quelconque? C'est la question que je vous pose.

M. Wayne Brush: Je n'ai pas de suggestion. Je faisais simplement une remarque sur l'application de la loi telle qu'elle est actuellement libellée.

M. Charlie Penson: Très bien.

L'autre question que j'aimerais poser au panel, monsieur le président... Nous semblons avoir oublié un article dans tout cela alors qu'on étudie précisément le projet de loi C-35. On parlait à une époque d'essayer de conclure une entente avec les États-Unis pour abandonner la législation commerciale. Des panels avaient été constitués dans ce but. Il n'en a pas du tout été question aujourd'hui.

J'aimerais savoir si c'est quelque chose qu'on a jugé impossible à appliquer, si c'est une chose qui ne pourra jamais se faire. Étant donné que l'essentiel du produit dont nous parlons, l'acier notamment, est fabriqué par une industrie largement intégrée en Amérique du Nord, j'aurais cru que l'on allait encore tenter d'atteindre cet objectif. Est-ce quelque chose que l'on devrait encore viser?

Le président: Vous voulez dire que l'on devrait tout de même conserver cette législation pour la Russie, le Brésil et tous les autres, mais...

M. Charlie Penson: On parle de produits intégrés—les automobiles, l'acier, le boeuf, tous les produits pour lesquels il existe un marché intégré en Amérique du Nord.

Le président: ...dans le cadre de l'ALENA que l'on ait réussi ou non à régler le problème de l'antidumping.

Voulez-vous faire une...

M. Dalton Albrecht: J'aimerais vous conter une petite anecdote, M. Penson. C'est exactement la question que j'ai posée à Mickey Kantor; il a éclaté de rire en disant non, parce que cinq pour cent du marché américain seulement est concerné par le commerce international. Ça ne pourrait tout simplement pas se faire à cause de la façon dont le Congrès fonctionne là-bas. Il estime que ce ne serait pas réaliste et qu'il serait idiot d'essayer de pousser plus loin cette tentative.

Le président: Madame Van Loon, vous souhaitez peut-être répondre.

Mme Jean Van Loon: Je pourrais en dire quelque chose car notre industrie était très favorable à cette idée. Nous avons beaucoup travaillé il y a quelques années pour essayer de mobiliser un certain soutien, surtout aux États-Unis, afin de changer dans ce sens. Nous avons essayé de travailler avec d'autres industries intégrées de l'autre côté de la frontière, l'industrie automobile, etc., mais nous n'avons pas pu obtenir ce soutien. L'opposition est intraitable aux États-Unis. Rares sont ceux qui sont prêts à défendre cette idée.

Le président: Serait-il possible de demander à M. Collins-Williams ou à quelqu'un d'autre si le comité existe toujours? Il existe un comité composé de délégués du Canada, du Mexique et des États-Unis qui continue à étudier la question, avec 44 autres comités ou organismes. Il existe toujours et rend des services inestimables?

M. Terry Collins-Williams (directeur, Division des politiques commerciales internationales, ministère des Finances): Monsieur le président, nous continuons à croire que le régime antidumping devrait être modifié dans une zone de libre-échange où il existe des industries très intégrées. Nous avons travaillé très fort avec nos associés de l'ALENA, avec un certain soutien de la part du Mexique, pour atteindre cet objectif. Il y a eu des groupes de travail sur les droits compensateurs pour le dumping et les subventions qui se sont réunis pendant deux ans afin d'envisager de changer nos régimes antidumping. On est parvenu à quelques modifications modestes, surtout dans le domaine de la consultation et de la transparence. Mais je peux confirmer ce que Mme Van Loon a dit, à savoir qu'il n'y a aucun soutien politique aux États-Unis pour adopter un régime d'exemption contre le dumping dans le cadre de l'ALENA.

• 1020

M. Charlie Penson: Monsieur le président, si j'ai posé la question, c'est parce que dans le texte de loi que nous avons sous les yeux aujourd'hui... Il semble, étant donné que l'essentiel des échanges au Canada et aux États-Unis se fasse entre les deux pays, et que la plupart de ces industries sont intégrées—l'acier, l'automobile, le boeuf, par exemple et sans doute le bois d'oeuvre dans une grande mesure également—que tout cela serait en grande partie inutile si nous pouvions faire avancer ce dossier.

Et je proposerais en outre que l'on essaie, à mon avis, de faire avancer la législation commerciale ou la libéralisation du commerce partout où c'est possible, réalisant ainsi des progrès que l'on pourrait faire valoir à la prochaine série de négociations de l'OMC ou aux futures négociations de l'ALENA. Mais j'imagine que nos tentatives se sont heurtées à une résistance de l'autre côté et que nous avons plus ou moins abandonné la partie. Est-ce que...

M. Terry Collins-Williams: Non, je ne dirais pas que nous avons abandonné la partie. Nous continuons à travailler avec les groupes concernés aux États-Unis—et il y en a qui sont de notre avis—ainsi qu'avec le gouvernement américain. Mais c'est un processus en évolution.

M. Charlie Penson: Il me reste une seule autre question qui s'adresse à Mme Van Loon...

Le président: Puis-je vous poser une question sur ce sujet? Dans le cadre de l'Association parlementaire canado-américaine, dont vous faites généralement partie, êtes-vous membre du comité qui discute de la question de savoir si le congrès...

M. Charlie Penson: Non.

Madame Van Loon, j'allais justement vous poser l'autre question. En ce qui concerne l'acier, vous avez parlé d'un nouvel environnement qui existe et qui fait qu'il y a énormément d'acier qui vient de marchés extérieurs à l'Amérique du Nord. Quelle est l'ampleur du problème pour votre industrie en ce moment, combien de cas effectifs ou éventuels y a-t-il de produits vendus à bas prix qui arrivent au Canada?

Mme Jean Van Loon: Je pense que c'est un problème grave. Certaines de nos entreprises membres ont publié un communiqué de presse fin septembre indiquant qu'elles s'occupaient de trois cas, et je pense qu'elles continuent à préparer ces dossiers.

Nous voyons une augmentation énorme des importations. Les importations correspondaient traditionnellement à 20 ou 25 p. 100 du marché canadien. L'année dernière, il s'est agi de 35 p. 100. En juillet, nous étions à 48 p. 100. Une grande partie de ce produit vient de régions qui vivent une dépression économique et qui imposent des pressions à la baisse très nettes sur les prix du marché.

M. Charlie Penson: Voulez-vous dire qu'on est en train de vendre du produit à bas prix en ce moment?

Mme Jean Van Loon: Eh bien, M. Clark nous dit que tout se fait à bas prix.

Le président: Cela dépend de votre revenu net. Il a fait cette réserve.

M. Charlie Penson: Envisagez-vous des revendications?

Mme Jean Van Loon: L'industrie a indiqué qu'elle allait le faire.

Le président: Merci.

Monsieur Sauvageau.

[Français]

M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Messieurs et mesdames, je vous souhaite la bienvenue et vous remercie de venir nous rencontrer à nouveau. Lors de l'étude du sous-comité mixte des finances, nous avions accueilli et entendu nombre des intervenants qui sont ici présents ce matin. J'ai donc le plaisir de vous saluer à nouveau.

Je tiens à souligner que nous sommes nombreux autour de cette table ce matin; de nombreux députés de notre formation politique sont venus vous accueillir et vous entendre, et nous sommes tout aussi nombreux que les députés du parti au pouvoir. Bien qu'il ne soit pas approprié de souligner les quelques absences, on peut quand même noter le manque de représentation d'un certain parti politique.

• 1025

Comme vous le savez bien, le Bloc québécois a suivi avec beaucoup d'intérêt le déroulement des travaux du sous-comité mixte et l'étude de cette loi, qui est très technique. Ceux et celles qui ont suivi de près nos travaux et pris connaissance de certaines recommandations, que ce soit personnellement ou par personne interposée, auprès de collègues et des consultants qui vous représentaient, ont pu remarquer les efforts du Bloc québécois en vue d'améliorer le rapport et les dispositions de la Loi sur les mesures spéciales d'importation.

Ma première observation portera sur la recommandation 2, que nous avons tenté d'améliorer. Ma question s'adressera à mon voisin de gauche. La recommandation se lit comme suit:

    Les Sous-comités recommandent, d'abord, que Revenu Canada prenne des mesures concrètes pour que les petits et moyens producteurs canadiens aient un accès juste et équitable aux recours prévus par la LMSI.

Dans sa réponse, le gouvernement indique qu'il accepte cette recommandation 2. J'aimerais donc savoir ce qu'on a fait depuis ce temps pour améliorer concrètement cet accès. J'ai discuté avec M. Stobo du cas d'un petit manufacturier de vêtements qui travaille dans le comté de Mme Debien et qui a dû faire face au processus du Tribunal du commerce extérieur. J'aimerais savoir quelles améliorations concrètes vous avez apportées à l'intention de ces petits et moyens producteurs.

Mes autres questions s'adresseront à Mme Van Loon ou aux autres intervenants. Le Bloc québécois éprouve des réserves quant à certains aspects qu'il aurait souhaité qu'on améliore dans la loi, mais qu'on n'a pas améliorés. Par exemple, nous aurions vraiment voulu que les représentations spontanées exposées par des parties autres que la partie plaignante soient exclues du processus avant le début d'une enquête. Quelle serait votre position si la loi était adoptée telle quelle, sans qu'on y tienne compte des réserves que nous avons exprimées?

À moins que les informations qu'on m'a transmises soient fausses, on aurait demandé qu'on définisse l'expression «dommage sensible», puisqu'elle ne semble pas être définie dans la loi et qu'elle pourrait porter à interprétation. Est-ce qu'on a l'intention de mieux définir l'expression «dommage sensible»?

Mon avant-dernière question porte sur la méthode prospective. Je crois me souvenir qu'à la suite d'un commentaire des producteurs d'acier, on avait proposé que Revenu Canada puisse utiliser la méthode rétroactive d'imposition de droits lors de situations exceptionnelles. J'aimerais savoir où en est rendue cette recommandation no 10, où l'on recommandait le statu quo et où on ne parlait que d'une méthode prospective, bien que nous ayons proposé une méthode rétroactive.

Ma dernière question porte sur le principe de droits moindres, dont a parlé M. Herman, qui imposerait, à notre avis, des contraintes supplémentaires à nos voisins américains. Nous agirions de façon équivoque, nous dotant nous aussi de contraintes supplémentaires. Nous voudrions soustraire ce principe de droits moindres de l'article 45.

C'étaient mes quatre recommandations, dont la première porte sur PME et les autres, sur la loi. Je vous remercie.

[Traduction]

M. Tony Valeri: Monsieur le président, j'aimerais répéter que dans mon exposé j'ai parlé d'un certain nombre de questions concernant l'accès et le soutien s'agissant des petites et moyennes entreprises de façon très générale, c'est-à-dire en leur offrant des séminaires, une aide technique, une formation du personnel et la préparation des documents liés à la loi. Mais je demanderais à Revenu Canada de répondre de façon plus détaillée à la question de M. Sauvageau. Quant au sujet des dommages sensibles, je demanderais aux représentants du ministère des Finances d'y répondre.

Le président: Et également à la question des droits moindres.

[Français]

Vous avez aussi parlé des droits moindres.

[Traduction]

M. Séguin, puis M. Collins-Williams.

[Français]

M. Robert A. Séguin (directeur général par intérim, Division des droits antidumping et compensateurs, Revenu Canada): Effectivement, la question d'un plus grand accès pour les petites et moyennes entreprises était l'une des priorités de notre ministère.

• 1030

En premier lieu, nous avons sensibilisé nos agents qui fournissent des services aux petites et moyennes entreprises afin de nous assurer qu'ils soient bien conscients des besoins particuliers de ces secteurs. Depuis la mi-1987, nous avons fait des présentations à l'intention de différents groupes, dont tout particulièrement des fonctionnaires des gouvernements fédéral et provinciaux et des associations et groupes qui maintiennent des contacts réguliers avec les petites et moyennes entreprises, pour qu'ils se familiarisent avec la loi et le processus, y compris la façon dont on entre en contact avec le ministère et dont on dépose un plainte relative au dumping ou à une question de subvention.

En plus de ces présentations-là, nous avons accru l'aide technique que nous accordons aux petites et moyennes entreprises qui ont communiqué avec nous. Par exemple, bien qu'il s'agisse habituellement de renseignements publics, nous les avons appuyées au niveau de la recherche pour les aider à identifier les différents membres de l'industrie canadienne et pour qu'elles sachent de quels appuis elles auront besoin lorsqu'elles décideront de déposer une plainte. Nous leur fournissons aussi de l'aide pour identifier les marchandises qui entrent, leur niveau, leur volume et leur prix, afin qu'elles soient en mesure d'établir si le dommage qui leur est causé découle du fait que ces marchandises sont importées à des prix qui résultent d'un dumping.

Nous effectuons un suivi auprès des petites entreprises qui ont passé par ce processus de dépôt d'une plainte pour déterminer comment nous pourrions améliorer ce processus et les aider à déposer des plaintes.

Comme nous l'avons mentionné, nous avons aussi essayé de diffuser davantage d'information et affiché une page sur l'Internet afin que ces entreprises puissent obtenir plus de renseignements sur tout le processus, y compris la façon dont on dépose une plainte.

Même si on parle de bifurcation entre le tribunal et le ministère du Revenu, il est important de se souvenir qu'au niveau du dépôt de la plainte, les petites et moyennes entreprises ne font affaire qu'avec un seul organisme, soit Revenu Canada. À mon avis, il est important de souligner ce fait.

Un député: Combien cela coûte-t-il?

M. Robert Séguin: Comme nous l'avons déjà mentionné, lorsque les petites et moyennes entreprises font leur contact initial avec notre ministère, elles n'ont pas, la plupart du temps, retenu les services d'un avocat ou d'un expert-conseil, ce qui prouve qu'elles peuvent certainement se rendre jusqu'au dépôt de la plainte et même jusqu'à l'ouverture de l'enquête sans avoir eu recours à un expert-conseil ou à un avocat.

[Traduction]

Le président: Votre adresse sur Internet est wwwdump.com?

Une voix: C'est http:www.rcggc.ca/lmse.

Le président: Cela fait trop bureaucratie d'Ottawa pour nous. Nous voulions quelque chose de plus enlevée.

Monsieur Collins-Williams.

M. Terry Collins-Williams: Je demanderai à Pat Saroli de répondre à la question de la norme en matière de dommage et je répondrai à celle concernant les dispositions relatives aux droits moindres.

M. Pat Saroli (économiste principal, Recours commerciaux et relations économiques générales, ministère des Finances): Merci.

Pour la définition du dommage sensible, nous avons envisagé d'inclure la définition dans le projet de loi et bien franchement, il nous a semblé que l'importance du dommage dépendait des circonstances de chaque cas. Il est très difficile de proposer une définition précise et concise étant donné les variations et les permutations qui peuvent se produire entre les différents cas.

• 1035

Les États-Unis ont essayé de le faire et tout ce qu'ils ont pu réaliser a été de définir l'importance du dommage par toute une série d'adjectifs—c'est-à-dire un dommage qui est sans conséquence ou sans importance. Je ne crois pas que ce soit très utile.

Le fait est que le TCCE est l'organisme responsable. Il s'est constitué tout un ensemble de décisions jurisprudentielles et cela n'a pas vraiment constitué de problème. Étant donné ces facteurs, le fait que les cas puissent varier si grandement, le fait que la définition américaine, par exemple, ne soit pas tout à fait satisfaisante, et étant donné que nous avons un ensemble de décisions jurisprudentielles, nous avons estimé plus indiqué de conserver le statu quo.

Le président: Est-il possible d'en appeler de la décision de dommage sensible dans n'importe quel cas devant la Cour fédérale pour des raisons jurisprudentielles si l'on estime que le tribunal s'est écarté de façon importante des décisions jurisprudentielles précédentes, ou est-ce que cela relève entièrement de la discrétion du tribunal et ne pourrait pas faire l'objet d'une révision?

M. Pat Saroli: Je laisserai mon collègue, M. Gerry Stobo du tribunal, répondre à cela.

M. Gerry Stobo (avocat général, Services juridiques, Tribunal canadien du commerce extérieur): Merci, monsieur le président.

Oui, si les partis estiment que nous nous sommes trompés, ils peuvent porter l'affaire devant la Cour fédérale, ce qu'ils font souvent, en disant que nous nous sommes trompés. Mais la cour a été très généreuse envers nous à cet égard puisqu'elle s'en remet généralement à nous en disant que cela relève essentiellement de notre domaine et de notre compétence.

Le président: Pour pousser les choses un peu plus loin et on va entrer dans le domaine qui intéresse M. Penson, une décision de dommage sensible pourrait-elle donner lieu à un appel en vertu du chapitre 19 ou 20, peu importe, auprès du tribunal de l'ALENA?

M. Gerry Stobo: Oui.

Le président: Selon les mêmes règles que pour la Cour fédérale?

M. Gerry Stobo: Oui.

Le président: Merci. Monsieur Collins-Williams.

M. Terry Collins-Williams: En ce qui concerne la question de l'introduction de la notion de droits moindres dans ce texte de loi, je dirais que l'amendement correspond à une recommandation faite dans les rapports des sous-comités, c'est-à-dire de votre comité et de celui des finances. Cet amendement introduit la notion de droits moindres de façon très limitée, dans la mesure où ces droits constituent une solution que le TCCE peut envisager et recommander au ministre dans une affaire d'intérêt public. La notion de droits moindres ne s'applique pas aux droits relatifs au dumping proprement dits.

Je crois que cette notion est justifiée dans le contexte de l'intérêt public. Elle permet, s'il y a une raison à cela, selon la décision du TCCE et à la suite de l'autorisation du ministre, de réduire les droits; dans des circonstances exceptionnelles, les droits moindres constituent une façon d'y parvenir. Ce n'est pas exclusif et ce n'est pas obligatoire, mais cela fournit un moyen d'y parvenir lorsqu'il est question d'intérêt public.

[Français]

Le président: Monsieur Turp, est-ce que vous avez des questions?

M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Non, mais me sera-t-il possible de revenir plus tard?

Le président: Oui, si vous le voulez. J'ai pour ma part quelques questions.

M. Benoît Sauvageau: J'ai une question pour M. Stobo. J'ai cru comprendre que les décisions du Tribunal canadien du commerce extérieur étaient non exécutoires, qu'elles étaient plutôt des avis que vous rendez au ministre des Finances.

[Traduction]

M. Gerry Stobo: Je vous demande pardon, de quelles décisions parlez-vous?

[Français]

M. Benoît Sauvageau: Les décisions que rend le Tribunal canadien du commerce extérieur sont des avis que vous envoyez au ministère des Finances. Elles ne sont pas exécutoires.

[Traduction]

M. Gerry Stobo: Les seules décisions qui ne sont pas exécutoires sont en fait celles qui sont rendues dans l'intérêt public; ce sont des recommandations faites au ministre des Finances. Comme dans le cas du secteur des textiles, ces recommandations sont faites au ministre des Finances. De ce fait, ce ne sont pas des décisions exécutoires.

[Français]

M. Benoît Sauvageau: D'accord. Est-ce que les recommandations que vous avez rendues depuis plusieurs années ont toujours été respectées par le ministère des Finances ou si ce dernier dit occasionnellement qu'il n'est pas d'accord?

• 1040

[Traduction]

M. Gerry Stobo: Oui. Dans la plupart des cas, les recommandations faites par le tribunal... Il faut se rappeler que jusqu'ici nous avons en fait tenu seulement trois auditions d'intérêt public, et pour deux d'entre elles, nous avons recommandé une réduction du montant des droits. Dans un cas, une réduction a en fait été appliquée, et dans l'autre cas, celui de la bière, qui s'est produit dans le milieu des années 90, la décision a finalement été annulée, il n'a donc pas été nécessaire de réduire les droits.

Dans l'affaire plus récente du sucre raffiné qui date de 1997, le tribunal n'a pas fait de recommandation de réduction des droits.

Le président: La décision concernant la bière a été annulée par le panel de l'ALENA, n'est-ce pas?

M. Gerry Stobo: Non.

Le président: Il s'agissait d'une autre décision concernant la bière.

[Français]

M. Daniel Turp: Monsieur le président, merci. J'ai une question à l'intention de M. Herman, mais si d'autres participants veulent y répondre, j'apprécierai aussi leurs commentaires.

M. Herman a dit très généralement que le projet de loi et les amendements qui étaient apportés à la Loi sur les mesures spéciales d'importation étaient conformes à nos obligations internationales. Ce commentaire vaut-il pour l'ensemble de nos obligations, autant l'accord sur les subventions que l'accord sur le dumping et l'ALENA, ou si vous avez des réserves? Est-ce que votre opinion est très ferme lorsque vous affirmez que nous sommes en conformité avec l'ensemble de nos obligations? Je vous ai remis une copie du règlement d'application. Est-ce que vous considérez que le règlement ou le projet de règlement qui est en cours d'examen est aussi en conformité avec nos obligations internationales? C'est ma première question.

Ma deuxième question porte sur les modifications sur la question de l'intérêt public et des facteurs pertinents qui sont maintenant évoqués au paragraphe 45(3) de la Loi et au paragraphe 40.1(3) des articles du règlement d'application. Est-ce que ceux qui ont pris connaissance du projet de règlement considèrent que les facteurs qui sont actuellement énumérés dans le règlement sont une traduction correcte de la recommandation qui a été faite par le sous-comité? On semble vouloir ajouter quelques facteurs autres que ceux qui ont été recommandés. Je sais que c'est là une préoccupation de l'Association canadienne des producteurs d'acier, entre autres. Dans le mémoire que vous déposiez ce matin, vous indiquiez que votre préoccupation était de savoir si le règlement d'application de la loi serait justement conforme aux recommandations qui ont été présentées.

Voilà mes deux questions, monsieur le président.

Le président: Monsieur Herman.

M. Lawrence Herman: En réponse à votre première question, je suis d'avis que la Loi sur les mesures spéciales d'importation est conforme aux obligations du Canada énoncées dans l'accord sur l'antidumping. Il faut comprendre que l'accord sur l'antidumping est écrit d'une façon générale et non pas très précise. On n'y précise donc pas la façon dont chaque pays doit mettre en vigueur ses obligations. Je ne vois aucun alinéa ou aucune disposition qui ne soit pas en conformité avec les obligations du Canada en matière de droit international.

[Traduction]

Je ne pense pas qu'il y ait quoi que ce soit dans la loi ni dans les amendements proposés dans le projet de loi qui mette le Canada dans une position difficile face à ses obligations internationales, mais comme je l'ai dit, ces obligations internationales qui figurent dans la partie de l'accord sur l'OMC relative aux dispositions antidumping sont définies en termes assez généraux.

Je crois que la question la plus importante est de savoir s'il y a quoi que ce soit dans la loi ou dans les textes d'application qui mette le Canada dans une position difficile face à ses partenaires commerciaux. Autrement dit—et c'est seulement une question que je pose—si les mesures n'étaient pas aussi efficaces que des mesures comparables aux États-Unis, ou si certaines dispositions étaient excessives ou plus généreuses que les mesures correspondantes aux États-Unis, je crois que le Canada devrait se demander si cela a des conséquences.

• 1045

Je réponds en fait à votre question en posant une autre question, d'une certaine façon, mais je crois...

M. Charlie Penson: On a l'impression d'être à la période des questions.

M. Lawrence Herman: Je ne veux pas dire par là que cela constitue un problème, mais permettez-moi de vous donner un exemple. M. Stobo et M. Saroli ont parlé de la définition du dommage sensible. S'il se trouvait que l'on envisage de façon beaucoup plus généreuse la définition du dommage sensible, et que l'on ait une norme beaucoup plus sévère au Canada, je crois que les législateurs canadiens, les députés, devraient se demander s'il faut faire quelque chose à ce sujet, car il est clair que dans le contexte nord-américain il y aurait des recours disponibles chez nos voisins qui seraient plus généraux que ceux que nous avons ici.

Je ne veux pas dire que ce soit le cas, mais je vous donne un exemple de cas où les législateurs canadiens et ceux qui appliquent la législation avec le règlement doivent se poser des questions, comme je l'ai dit dans mes remarques préliminaires, sur la position du Canada au sein du continent nord-américain. Et que cela nous plaise ou non, l'essentiel de ce que nous faisons ou de ce que nous pouvons faire en matière de législation sur les recours commerciaux dépend des lois américaines.

[Français]

M. Daniel Turp: Monsieur le président, on n'a répondu que de façon partielle à ma question. Est-ce que la loi et le règlement sont en conformité avec l'accord sur les subventions, et non seulement avec l'accord antidumping?

M. Lawrence Herman: À mon avis, oui.

M. Daniel Turp: Y compris sur cette question du préjudice matériel?

M. Lawrence Herman: Oui.

M. Daniel Turp: C'est un petit peu plus compliqué. Est-ce que la façon dont nous concevons le préjudice matériel, y compris l'interprétation qu'en font le Tribunal canadien du commerce extérieur et la Cour fédérale, est conforme à nos obligations internationales ou est-ce que le refus, par exemple, de définir ce qu'est un préjudice matériel est une façon de ne pas déranger nos partenaires américains?

M. Lawrence Herman: J'allais dire tout à l'heure que M. Turp, qui est un des grands experts en droit international public au Canada, pourrait répondre lui-même à cette question. Je suis convaincu qu'il a vraiment étudié cette question, mais puisqu'il m'a posé la question, je dirai qu'il n'y a aucune définition internationale, y compris dans l'accord d'antidumping, de l'expression «dommage sensible» ou «material injury».

Vous m'avez posé certaines questions concernant les projets de réglementation dont j'ai pris connaissance il y a quelques instants.

[Traduction]

Je constate que dans les facteurs d'intérêt public qui sont énumérés dans le paragraphe 45(3) proposé, il y a tout un ensemble de choses y compris tous les autres facteurs qui sont pertinents. Je crois que le tribunal, comme l'ont indiqué M. Saroli et les autres, a mis au point un processus et s'est doté d'une jurisprudence—la jurisprudence est encore mince, mais elle existe- -pour ce qui est des enquêtes d'intérêt public. Et je pense qu'en examinant très rapidement les facteurs qui ont été indiqués dans le règlement, y compris le fait que l'on puisse prendre en compte tout autre facteur pertinent, garantira que le tribunal tiendra compte de toutes les questions pertinentes qui touchent l'intérêt public dans une telle enquête.

L'effet du règlement est limité. Les règlements sont des textes législatifs subsidiaires et ils peuvent exiger un certain nombre de choses, mais je crois qu'il nous faut aussi compter sur la capacité de nos instances commerciales d'administrer la loi de façon juste et équilibrée, conformément à l'esprit de la loi.

• 1050

Dans l'exercice de mon métier d'avocat spécialisé dans les questions commerciales, j'ai pu constater, comme la plupart des autres personnes qui sont assises autour de la table sans doute et qui sont probablement aussi plus expertes que moi en la matière, que l'application des dispositions de la loi conformément à son intention et à son esprit a remarquablement bien fonctionné au Canada. Je crois qu'elle va continuer à bien fonctionner, y compris pour la question de l'intérêt public.

Le président: Cela vaut-il pour les cas où vous avez gain de cause aussi bien que pour ceux où c'est le contraire qui se produit?

M. Lawrence Herman: Lorsque je n'ai pas gain de cause, ce n'est pas nécessairement ce que je pense le lendemain, mais après mûre réflexion, je me rends à l'évidence, monsieur Graham.

Le président: C'est ce que vous espérez réussir à faire de toute façon.

M. Lawrence Herman: Vous pourrez me citer lorsque la période d'appel de 30 jours sera expirée.

Le président: Comme le disait toujours mon ancien associé, M. Sopinka, c'est pour cela qu'il ne faut pas écrire d'articles ni être cité publiquement.

Monsieur Clark, vous voulez ajouter quelque chose.

M. Peter Clark: Étant donné que j'ai participé au début des négociations de Tokyo, nous avons du mal à essayer de définir le dommage sensible car c'est quelque chose qu'il nous faut évaluer dans chaque cas, mais pour chaque industrie, ce qui importe est différent, simplement à cause de la nature des diverses industries.

Nous en avons débattu longuement. Nous voulions une définition variable et l'Union européenne voulait une définition quantitative. Nous ne sommes jamais parvenus à nous entendre. Il est très difficile de quantifier, de façon générale, ce qu'est un dommage sensible car cela va être différent selon le cas. Il y aura même des différences au sein d'une même industrie, selon la situation économique en jeu au moment où on étudie la question.

Quant aux règles contenues dans la loi et à celles du dumping et des droits compensateurs, elles sont toutes aussi conformes que celles des autres pays, et peut-être plus que celles de certains pays, avec les accords internationaux prévus dans le cadre de l'OMC.

Le président: Voilà des renseignements utiles pour tous les membres du comité. Merci, monsieur Clark.

J'ai deux autres députés sur ma liste, M. Penson et Mme Debien, mais peut-être me permettrez-vous de poser quelques questions d'abord, après quoi je donnerai la parole à M. Penson.

Monsieur Stobo, je me demande si vous avez des remarques à faire sur les observations de M. Herman au sujet des coûts engagés lorsqu'on s'adresse au tribunal. Il me semble qu'il y a un facteur de coût qui est pertinent dans la question que M. Sauvageau a posée à M. Séguin et qui portait sur le coût de l'accès au tribunal pour les petites et moyennes entreprises. Il y a aussi le coût des auditions du tribunal qui constitue une sorte de barrière non tarifaire en soi.

Il y a de nombreux pays, surtout des pays pauvres, qui, dès qu'on intente des poursuites contre eux, ont pour habitude de se retirer. Il suffit de penser à l'affaire du bois d'oeuvre aux États-Unis; les honoraires des avocats se sont élevés à 4 millions de dollars. Il y a bien des pays qui se retireraient avant de lancer un tel processus. Étant donné qu'il semble que nous ayons de plus en plus recours aux avocats et que tout ce processus s'accompagne d'un nombre plus grand d'experts-conseils, d'avocats, etc., c'est l'escalade des coûts et du reste.

La commission est-elle sensible à cela, tente-t-on d'uniformiser les procédures pour réduire les coûts pour nos propres producteurs et fournisseurs, mais aussi dans l'intérêt des pratiques commerciales loyales et de ceux qui veulent venir vendre leurs marchandises dans notre pays?

M. Gerry Stobo: C'est une question importante, monsieur le président. Je peux répondre très simplement en disant que c'est quelque chose qui tient à coeur au tribunal. M. Gosselin, notre président, nous indiquait clairement, à nous et aux groupes intéressés qu'il a rencontrés, que l'un de ses principaux objectifs est évidemment de rendre le processus aussi efficace et aussi abordable que possible.

Je vous expliquerai comment nous avons atteint certains de ces objectifs, mais je veux tout d'abord dire que notre processus a été décrit comme complexe, très coûteux et très lourd. Nous avons cependant constaté au cours des deux ou trois dernières années, que de très petits producteurs canadiens se sont présentés devant le tribunal. Comme exemple de secteur qui s'est manifesté, je pourrais vous citer celui des panneaux de béton qui est constitué dans notre pays de deux personnes, qui ont comparu lorsque nous avons étudié leur revendication de dumping.

Nous avons aussi traité de cas concernant un tout petit secteur national, celui de l'ail. Nous nous sommes occupés d'un cas portant sur les moyens de culture bactériologique, qui représente vraiment un tout petit secteur dans notre pays.

• 1055

Nous ne sommes pas tout à fait convaincus de l'inaccessibilité de tous les processus. Nous avons essayé de les rendre plus accessibles en entreprenant un examen de toutes les procédures prévues dans notre loi. Nous essayons d'obtenir davantage d'information avant de commencer l'audition. Comme l'a dit M. Herman, une fois que l'audition commence, c'est là que la machine à sous se met en marche pour tout le monde. Nous avons donc essayé vaillamment de donner davantage d'information aux parties avant l'audition pour que celle-ci se déroule plus rapidement que dans le passé.

Je crois pouvoir dire, monsieur le président, que le tribunal a réussi à réduire la durée des auditions dans le passé. Je ne vais pas prétendre qu'elles sont simples ou que ce sont des affaires simples. Toute cause de dumping a toujours des éléments complexes, mais nous avons essayé de raccourcir la durée de l'audition. En gérant mieux les étapes qui précèdent l'audition, nous avons aussi essayé d'aider tout le monde pour que le processus se déroule plus en douceur et de façon plus efficace.

Nous croyons fermement que les changements proposés dans le projet de loi C-35 nous aideront, je le répète, surtout parce que nous pourrons intervenir à l'étape de la décision provisoire concernant le dommage. Nous pourrons nous occuper des faits de l'affaire beaucoup plus tôt et nous nous attendons à pouvoir raccourcir les auditions encore davantage après la mise en oeuvre du projet de loi C-35 car nous aurons alors traité de questions générales comme la définition de l'industrie nationale ou des marchandises similaires. Ce sont des sujets sur lesquels on se bat couramment très fort pendant l'audition et nous aurons pu les régler dès le début, ils n'auront donc plus à être abordés pendant l'audition. Nous espérons donc réduire encore davantage la durée de l'audition.

Le président: Merci, voilà qui est très utile.

Mesdames et messieurs, avant de passer à d'autres questions, je dois indiquer que certains membres du comité vont devoir partir parce qu'ils ont d'autres obligations. Nous avons le quorum, je tiens donc à profiter de l'occasion pour traiter de la question de la formation de nos sous-comités à nouveau. Tâchons de résoudre cela maintenant.

Avec votre permission, j'aimerais vous lire quelques résolutions. On y propose de revenir là où nous en étions auparavant; il n'y a que quelques noms qui diffèrent. La première résolution veut que le Sous-comité des droits de la personne et du développement international soit composé de neuf membres ou membres associés, dont cinq du parti ministériel—à savoir Colleen Beaumier comme présidente, Jean Augustine, Paul Bonwick, Claudette Bradshaw et Sheila Finestone—et quatre de l'opposition, un de chaque parti d'opposition.

Sommes-nous prêts à proposer des noms?

M. Charlie Penson: Oui. Keith Martin représentera notre parti.

Le président: Keith Martin du Parti réformiste en plus de Mme Debien, M. Svend Robinson et Diane St-Jacques.

Des voix: D'accord.

Le président: La deuxième résolution veut que le Sous-comité du commerce international, des différends commerciaux et des investissements soit composé de neuf membres ou membres associés, dont cinq du parti ministériel—à savoir Sarmite Bulte comme président, Murray Calder, Raymonde Folco, Sarkis Assadourian et Bob Speller—et quatre des partis d'opposition, un de chaque parti d'opposition.

Avons-nous déjà les noms? M. Penson, M. Sauvageau, M. Blaikie et M. Bachand.

[Français]

M. Benoît Sauvageau: Puis-je poser une question, monsieur le président?

Le président: Oui.

M. Benoît Sauvageau: Est-ce que Mme Folco est membre ou membre associée du Comité des affaires étrangères?

Le président: Mme Folco est membre associée de notre comité.

M. Benoît Sauvageau: Je vous remercie.

[Traduction]

Le président: Ai-je l'approbation des membres du comité?

[Français]

M. Benoît Sauvageau: Mais M. McWhinney n'est pas membre?

Le président: M. McWhinney est membre du Comité des finances et il s'est rallié à M. Valeri.

[Traduction]

Le président: Sommes-nous d'accord?

Des voix: D'accord.

Le président: Merci, mesdames et messieurs les membres du comité. Je vous prie de m'excuser d'avoir interrompu les questions.

J'ai une question de plus à poser à M. Séguin, après quoi nous redonnerons la parole à M. Penson et à Mme Debien.

M. Séguin, je croyais que M. Clark avait donné un argument très convaincant sur le problème des droits rétroactifs dont il a été question. Pour ceux d'entre nous qui ont exercé dans ce domaine, c'est un gros problème. Cela se produit souvent avec Revenu Canada. Ce n'est pas seulement dans ce domaine que l'on peut tout d'un coup apporter quelque chose. Avec les importations, comme vous le savez, même les droits d'importation font souvent leur chemin et viennent vous frapper par la suite, une fois que l'affaire a été réglée, et ils peuvent avoir des répercussions malheureuses. Se pourrait-il que la définition de la valeur normale constitue un moyen de remédier à ce problème de façon à répondre à l'inquiétude de M. Clark?

• 1100

M. Robert Séguin: Je crois que la question soulevée par M. Clark portait sur une situation très précise, dans le cas d'un appel. Il faudrait qu'il s'agisse d'un appel d'une décision de non- dommage ou d'une annulation d'une décision pour laquelle il n'y a pas à exécuter les revendications ou pour laquelle nous avons cessé de les exécuter à la suite de la conclusion de non-dommage et les producteurs nationaux en appellent de la décision de non-dommage. Et dans ce cas, étant donné que nous n'exécutons pas les revendications, il n'y a pas de décision concernant la valeur normale.

L'inquiétude de M. Clark est que ses clients, qu'il s'agisse d'importateurs ou d'exportateurs, ont une responsabilité éventuelle si à un moment donné, disons un an ou un an et demi plus tard, la décision de non-dommage est annulée et qu'il y a une responsabilité éventuelle pour la période allant du moment de la décision à son annulation.

J'imagine que ma réponse à M. Clark serait que nous avons indiqué, surtout dans nos mémoires aux deux sous-comités la première fois, que l'une de nos principales préoccupations est celle de rendre le processus plus efficace et en ce qui concerne les coûts pour tous les intéressés, y compris les ministères, nous devons veiller à utiliser à bon escient les ressources dont nous disposons pour mettre en application le programme. Les ressources que nous avons doivent être en gros divisées entre les conseils et l'aide que nous fournissons aux producteurs canadiens, s'ils souhaitent déposer une plainte, entre le moment où nous recevons la plainte et le moment où nous l'étudions.

Il est justifié de lancer l'enquête et de mener ces enquêtes. Mais lorsqu'il existe des conclusions, nous devons veiller à ce qu'elles soient exécutées comme il se doit. Par exemple, nous nous occupons actuellement de l'exécution d'environ 40 décisions. Pour un certain nombre d'entre elles, nous devons pratiquement faire des enquêtes annuelles pour être sûrs de pouvoir donner des instructions précises aux exportateurs étrangers quant aux valeurs normales.

En l'occurrence, lorsque la conclusion est qu'il n'y a pas eu dommage ou qu'elle a été annulée, nous nous sommes engagés à les orienter de façon générale et à leur donner des instructions générales concernant ces valeurs, mais nous ne sommes pas vraiment en mesure pour l'instant de faire davantage.

Le président: Vous n'allez donc pas prendre des mesures exécutoires, mais vous allez donner des conseils concernant les paramètres.

M. Robert Séguin: C'est exact. C'est en gros la position que nous avons adoptée.

La question a été soulevée aujourd'hui, et j'imagine que jusqu'à un certain point c'est regrettable qu'elle ne l'ait pas été plus tôt au cours du processus ou même la première fois. C'est certainement un domaine où, comme pour le reste de la législation, vous essayez d'arriver à un équilibre entre la protection des producteurs canadiens et l'accès permanent pour les importateurs. C'est un sujet important pour les deux parties et vous avez certainement une idée des avantages et des inconvénients que comporte la façon de régler éventuellement ce problème.

Le président: Très bien. Merci. Voilà qui est utile.

J'imagine que vous souhaitez rédiger une réplique?

M. Peter Clark: Je sais ce que stipule la législation. Lorsqu'on dépose des renseignements auprès de Revenu Canada, on calcule les valeurs normales pour nos clients. Nous savons quelles devraient être les valeurs normales, mais nous ne pouvons jamais garantir que 18 mois plus tard Revenu Canada sera d'accord avec nous à nouveau parce qu'il peut se produire des choses entre-temps. Voilà le problème.

Le président: Oui, nous comprenons.

M. Lawrence Herman: Très rares sont les cas où l'on a conclu à un non-dommage. J'essaie de me rappeler la dernière fois où cela s'est produit et où cette décision du tribunal a été annulée à la suite d'un appel.

Le président: Laissons cela de côté.

Monsieur Penson.

M. Charlie Penson: Merci, monsieur le président.

Il y a en fait deux choses que j'aimerais dire et sur lesquelles j'aimerais obtenir une réponse. La première revient à la question de la situation de pénurie.

Le comité a conseillé dans la recommandation 16 que le ministre des Finances envisage de modifier la LMSI, de manière à ce qu'il soit possible, temporairement, d'exempter certaines marchandises des ordonnances de droits antidumping ou compensateurs, lorsqu'il y a pénurie de ces marchandises à l'intérieur du pays. À l'époque, les fabricants de pièces d'automobile et l'alliance des fabricants et des exportateurs avaient présenté des arguments assez solides pour indiquer que ce devrait être le cas. Techniquement, je crois qu'il y a pour cela certaines dispositions, mais M. Clark a indiqué ainsi que M. Brush, qu'il doit y avoir entente ou consensus pour que cela puisse se faire.

Je me demande, monsieur Collins-Williams, pourquoi cette recommandation n'a pas été retenue. J'ai constaté que M. Clark et ses associés, dans leur exposé d'aujourd'hui, ont indiqué qu'ils auraient préféré que cette recommandation soit acceptée et mise en oeuvre. À ce que je crois, et je me trompe peut-être, je suis prêt à l'admettre, il est difficile d'obtenir cette entente ou ce consensus et il y a des moments de pénurie nationale où nous utilisons en fait le produit pour le transformer et le réexporter; il est donc nécessaire d'avoir certaines exemptions. Je me demande pourquoi cette recommandation n'a pas été retenue.

• 1105

M. Terry Collins-Williams: Si j'ai bonne mémoire, la recommandation demandait que le ministre des Finances voie s'il était nécessaire de changer la loi pour traiter des situations de pénurie. Nous avons conclu que le ministre des Finances a le pouvoir, en vertu d'une autre loi, la Loi sur le tarif des douanes, d'accorder une remise des droits antidumping dans les cas où il estime que c'est justifié. Une pénurie—et cela a en fait été le cas—pourrait constituer un tel cas. Cette dernière année, il y a eu des cas où les droits antidumping ont été remis à la suite de déclarations faites par les importateurs d'acier, par exemple, selon lesquels il y avait pénurie.

Nous sommes donc convaincus que ce pouvoir législatif existe. Il se trouve simplement qu'il figure dans une autre loi. Il n'est donc pas nécessaire de modifier précisément la LMSI pour donner ce pouvoir au ministre des Finances.

M. Charlie Penson: Mais ne doit-il pas y avoir consensus, monsieur Williams?

M. Terry Collins-Williams: Ce n'est pas nécessaire parce que c'est une décision du ministre des Finances et qu'il la prend sur la foi de l'information dont il dispose.

Bien évidemment, lorsque les importateurs, c'est-à-dire les utilisateurs canadiens du produit en question, soulèvent la question de la pénurie, c'est à nous qu'il revient, en étudiant l'affaire et en donnant des conseils au ministre, de voir quelle est la situation du marché national de sorte que nous devons aller consulter toutes les parties concernées par ce marché, y compris bien sûr les producteurs canadiens de la marchandise en question. Nous tenons compte de leurs points de vue dans les conseils que nous donnons au ministre et dans la décision que le ministre prend ensuite.

M. Charlie Penson: L'autre question que l'on a déjà abordée à quelques reprises aujourd'hui—et je sais que certains députés l'ont soulevée au moment de la deuxième lecture du projet de loi— est l'élément intérêt public de la législation sur les mesures spéciales d'importation. La partie consacrée à l'intérêt public est assortie de meilleures directives.

Voilà ce qui nous inquiète. Je crois que M. Stobo en a parlé un peu lorsqu'il a mentionné les cas où il peut en fait se produire une situation de monopole. C'est ce qui se passe parfois lorsqu'il n'y a que quelques producteurs—et ils peuvent être très peu efficaces—au Canada. Il est clairement prouvé qu'il y a dumping. Il peut donc être prouvé que ce producteur subit un préjudice. Mais est-ce dans l'intérêt public? C'est la question avec laquelle je me débats. Il me semble qu'il y a des cas où il faudrait peut-être réétudier cette législation plus tard pour voir si l'intérêt public est vraiment bien défendu.

Un autre exemple est l'affaire Gerber qui s'est produite après l'étude de ce texte par notre comité il y a deux ans. En l'occurrence, il semble qu'une situation de monopole se soit produite du fait des droits qui ont été imposés après une conclusion de préjudice.

Je me demande s'il ne pourrait pas y avoir un meilleur processus pour empêcher ce genre de choses? Techniquement, il est tout à fait vrai qu'il y a eu dumping et dommage, mais est-ce dans l'intérêt public? C'est ce qui me pose un problème pour l'instant. Je me demande s'il n'y aurait pas de meilleure solution que l'on puisse envisager pour résoudre le problème de l'intérêt public.

Je crois que nous sommes en quelque sorte en avance par rapport aux États-Unis dans ce domaine, mais si j'ai bien compris, l'Union européenne estime que cela va de soi. Avez-vous des remarques à faire à ce sujet?

M. Terry Collins-Williams: Je vais peut-être commencer par faire des remarques et je demanderais ensuite à M. Stobo et peut- être aussi aux délégués du Bureau de la concurrence qui sont ici avec nous aussi.

Les dispositions de la loi concernant l'intérêt public, puisqu'elles figurent maintenant dans la loi, y ont été placées dans un but plutôt particulier et extraordinaire, c'est-à-dire pour voir si, dans les cas où il a été prouvé qu'il y a eu dumping et préjudice pour l'industrie nationale, il n'y aurait pas d'autres circonstances qui devraient être prises en compte lorsqu'on applique les droits antidumping et compensatoires. Cette disposition a été introduite en 1984.

• 1110

Dans la loi en vigueur, on ne donne vraiment aucune indication au TCCE concernant les facteurs qui pourraient être pris en compte. Il a donc agi à l'aveuglette jusqu'ici. Cela ne vaut pas uniquement pour le TCCE, mais également pour toutes les parties concernées. On ne dit pas explicitement quels facteurs pourraient concerner l'intérêt public et comment on devrait décider que l'intérêt public est bien concerné. C'est pourquoi, à la suite des recommandations des comités, nous avons proposé de donner dans le texte de loi des facteurs précis qui ne soient pas inclusifs, mais qui pourraient être pris en compte lorsqu'on essaie de voir s'il s'agit d'une question d'intérêt public.

Je peux préciser que l'un des facteurs que nous avons proposés et qui figurera dans le règlement provisoire sur lequel nous demandons l'avis du public, est de savoir si l'imposition de droits antidumping ou compensateurs correspondant au montant total a été éliminée, nettement réduite ou risque d'être éliminée ou de réduire en gros la concurrence sur le marché intérieur. C'est un facteur que nous jugeons pertinent et qui devrait être pris en considération.

M. Gerry Stobo: Monsieur le président, j'aimerais compléter très brièvement la réponse de M. Collins-Williams. Sans entrer dans le détail des affaires Gerber et Heinz, je puis garantir au comité que la question a été soulevée. Il était possible qu'un monopole soit créé si le tribunal concluait au dommage. Cette question a suscité un débat très animé pendant les auditions sur l'intérêt public. Et mon ami du Bureau de la concurrence pourra certainement vous en parler aussi, mais c'est quelque chose que le tribunal doit prendre en compte, étant donné son importance dans le cadre de l'audience proprement dite.

Le président: Monsieur Lancop.

M. Robert G. Lancop (sous-directeur adjoint, Enquêtes et recherches, ministère de l'Industrie): Comme l'ont très justement fait remarquer MM. Collins-Williams et Stobo, nous avons participé activement à l'affaire Gerber. Nous avons en effet craint en l'occurrence qu'un monopole soit créé au Canada et nous avons présenté des arguments dans ce sens.

Je crois que M. Penson s'est demandé pourquoi nous n'avions pas soulevé ce point plus tôt dans tout ce processus concernant les droits imposés qui seraient plus importants que nécessaire pour remédier aux dommages subis en fait par l'industrie nationale.

Notre plus grosse inquiétude cependant concerne les secteurs où nous n'avons pas de marché concurrentiel au Canada. On s'inquiète beaucoup moins des utilisateurs de l'aval et des consommateurs, et des répercussions que ces droits pourraient avoir sur les consommateurs, pour les industries de ces secteurs. On risque beaucoup moins de voir une augmentation du prix ou un effet néfaste sur les deux groupes que sont les consommateurs et les utilisateurs de l'aval. Mais pour les situations où un monopole risque d'apparaître, ou du moins un certain pouvoir sur le marché, cela nous inquiète beaucoup.

Nous pensons que la loi, le projet de loi proposé, répond à cette préoccupation de deux façons en faisant en sorte qu'il y ait une norme qui soit comprise en droit pour des motifs raisonnables ainsi qu'un fondement pour une question d'intérêt public soumise au TCCE.

Deuxièmement—et c'est certainement quelque chose que nous avons dit au comité mixte car nous avons des sentiments très forts à cet égard—il devrait y avoir certaines instructions à l'intention du TCCE pour les questions d'intérêt public. Nous pensons que le règlement provisoire, dont plusieurs personnes ont parlé aujourd'hui, résout assez bien les problèmes que nous jugeons importants.

À cet égard, si nous pensons qu'il y a des arguments en faveur de l'instauration d'un modèle semblable à celui de l'Union européenne, nous estimons aussi que le projet de loi est assez bien équilibré dans la mesure où il protège les intérêts des deux groupes dont j'ai parlé, à savoir les consommateurs et les utilisateurs de l'aval, tout en permettant de protéger les producteurs nationaux. À cet égard, nous sommes donc très favorables au projet de loi.

• 1115

M. Charlie Penson: Puis-je poser une autre question?

Étant donné que vous pensez que la partie du projet de loi qui est consacrée à l'intérêt public va être efficace à cet égard, en quoi instaure-t-elle un environnement différent de celui dans lequel vous fonctionniez pour l'affaire Gerber puisque le projet de loi n'était pas entré en vigueur? Le projet de loi va-t-il vous donner plus de pouvoir dans ce domaine?

M. Robert Lancop: J'hésiterais beaucoup à parler de la situation Gerber pour l'instant, car l'affaire est encore devant le TCCE mais je pense pouvoir répondre à la question plus générale que vous avez posée et qui est de savoir comment ce projet de loi va changer la situation par rapport à celle que nous avons maintenant.

Actuellement, les parties à une affaire peuvent demander une audition d'intérêt public. Dans le passé, le tribunal prenait sa décision en essayant de voir si les circonstances la justifiaient. Il a instauré une norme que l'on a interprétée comme des circonstances exceptionnelles. Une demande d'enquête d'intérêt public a été présentée dans le cas d'un établissement domestique de mise en conserve et elle a été rejetée par le tribunal parce qu'il a estimé que les circonstances n'étaient pas suffisamment exceptionnelles pour justifier une telle enquête.

La question est maintenant traitée dans le projet de loi et nous pensons que la norme des motifs raisonnables est une norme qui est bien comprise et bien définie en droit. Nous pensons donc que cela représente une grosse amélioration.

Et comme l'a dit un témoin, jusqu'à un certain point, le tribunal agissait à l'aveuglette car il n'y avait pas de situations antérieures où de telles décisions avaient été prises concernant des droits moindres pour la bière et le maïs. Ce genre de situation ne s'est pas reproduite récemment. En effet, dans le cas de la bière, les indications données au ministère des Finances étaient de ne pas appliquer cette exception car il n'y avait pas de preuves suffisantes pour la justifier. J'imagine que je vais droit au fait en vous disant cela.

Le tribunal a maintenant des indications quant à ce qu'il doit prendre en considération, et nous pensons que cela constitue une amélioration énorme. Tout de même, si on décide que le montant total des droits n'est pas justifié, on pourrait demander à ce que des droits moindres soient imposés. Dans cette mesure donc, le tribunal sait maintenant précisément quel est son rôle dans le cas d'une audition d'intérêt public.

Nous estimons que cela constitue une amélioration importante. Je pense que cette disposition permettra d'éviter la constitution de monopoles au Canada, ce qui pourrait avoir des conséquences néfastes. Nous sommes donc très satisfaits du projet de loi tel qu'il est actuellement libellé.

Le président: Merci beaucoup. Cela nous sera très utile.

[Français]

Madame Debien, je crois que vous êtes la dernière.

Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Merci, monsieur le président.

Vous avez abordé tout à l'heure la question du système bifurquant d'enquête à l'étape préliminaire. Ma question s'adresse possiblement au secrétaire parlementaire. J'aimerais connaître les raisons qui ont motivé le transfert des pouvoirs d'autorité de l'enquête préliminaire de Revenu Canada au Tribunal canadien du commerce. Je pense ici au mémoire que nous a présenté l'Association canadienne des producteurs d'acier, dans lequel cette préoccupation semble être importante. J'aimerais savoir si vous êtes en mesure de nous garantir qu'il n'y aura pas un alourdissement du processus et une augmentation des coûts pour les PME, donc une réduction de l'accès des PME, si jamais ces pouvoirs sont transférés au Tribunal canadien du commerce. Ce sont mes deux questions.

[Traduction]

M. Tony Valeri: Je demanderais à M. Williams de répondre à la question.

M. Terry Collins-Williams: Merci.

Les raisons qui justifient la bifurcation, si on peut utiliser ce terme, c'est-à-dire l'enquête préliminaire et le transfert de la décision préliminaire de dommage de Revenu Canada au tribunal représentent un effort pour utiliser au mieux le savoir-faire qui existe dans ces deux organismes tout au long de l'enquête. Cela veut dire que le rôle de Revenu Canada consiste en gros à décider s'il y a eu dumping ou subvention et que le rôle du TCCE consiste à voir s'il y a eu dommage.

• 1120

En vertu de la législation existante, cela se fait à l'étape finale. Ce que nous proposons de faire avec ces amendements, c'est de faire intervenir le TCCE dès le début de l'enquête lorsqu'il s'agit de décider s'il y a eu dommage ou non. Nous pensons que cela va permettre au TCCE—et je crois que M. Stobo en a déjà parlé—de participer à une étape plus précoce afin d'avoir un meilleur dossier, d'obtenir l'information auprès des participants au cours de l'enquête et de transmettre ensuite cette information aux participants à l'enquête à une étape antérieure. Ainsi, lorsqu'il en est à l'étape de la décision définitive, qui est l'étape à laquelle se déroulent les auditions publiques—et qui est, selon les dires de plusieurs témoins, l'étape la plus coûteuse de tout le processus prévu dans la loi, car dans la plupart de ces auditions, dans les affaires compliquées, les parties doivent se faire représenter par un avocat, des experts-conseils et éventuellement par tout un ensemble de témoins-experts—le TCCE estime pouvoir réduire la durée de l'audition parce qu'il aura eu davantage de temps pour mettre au point le dossier, pour en discuter et pour le faire comprendre par les parties concernées.

M. Gerry Stobo: Monsieur le président, si vous me permettez d'ajouter une chose, et c'est une question qui a été abordée plus tôt par M. Herman, et j'estime qu'elle est importante, la modification de la loi ne devrait pas entraîner des dépenses énormes pour les parties, étant donné les conséquences pour l'accessibilité. Nous faisons très attention à cela. Lorsque nous en discutons au ministère, bien que le processus que nous envisagions soit plus transparent et permette à davantage de personnes d'avoir accès à l'information concernant la plainte, nous ne pensons pas que ce processus sera lourd. Nous allons essayer d'en faire un processus aussi sommaire que possible tout en garantissant la plus grande transparence au cours d'une période de 60 jours. C'est le délai dont nous disposons; il nous faut donc agir très rapidement.

Le président: Merci.

Monsieur Valeri.

M. Tony Valeri: Je veux ajouter que l'objet de cette modification est évidemment de permettre au TCCE de participer pour pouvoir en gros fournir l'information, se faire une idée avant que les parties doivent assumer des coûts importants, c'est-à-dire au moment où commencent les comparutions devant le TCCE. De ce point de vue, il y a une réduction des coûts pour les parties qui vont arriver jusqu'au TCCE. Tel est bien évidemment l'objet de cette modification.

Le président: Et on peut aussi supposer que, contrairement aux affaires précédentes où la conclusion provisoire de dommage était faite par Revenu Canada et pour laquelle il pouvait y avoir désaccord, la moitié du travail au moins a déjà été fait par le TCCE avant que vous comparaissiez devant lui.

M. Gerry Stobo: C'est exact.

Le président: Et ensuite les coûts seront réduits et les parties sauront mieux où elles vont, du moins c'est ce que l'on peut espérer, en ayant affaire à une seule instance. Je crois que c'est la grosse question qui avait été débattue par le comité et l'un des changements de procédure les plus importants qui ait été recommandé, à mon avis.

[Français]

Ça va, madame Debien?

[Traduction]

Très rapidement, monsieur Herman.

M. Lawrence Herman: À mon avis, c'est l'une des conséquences les plus importantes de ce changement. Il faudra suivre les choses de très près car en tant que juriste en exercice, je sais qu'une modification comme celle-ci peut avoir la capacité de rendre les choses plus complexes et plus coûteuses. Je crois que cela pourrait être un problème si les parties chargées de l'application de la réglementation ne faisaient pas preuve d'un certain doigté.

[Français]

Le président: Nous sommes toujours très conscients du problème des effets pervers dans ce comité; il y en a pas mal.

Madame Van Loon.

Mme Jean Van Loon: Monsieur le président, permettez-moi d'ajouter que notre association a éprouvé des réserves très sérieuses à cet égard dès le départ. Nous avons depuis eu de nombreuses discussions à ce sujet et nous sommes maintenant conscients des bénéfices possibles, mais aussi des risques. Cependant, la lettre que nous avons reçue du tribunal nous porte à croire que le seuil de risque est tolérable.

• 1125

[Traduction]

Le président: Au nom des membres du comité, je tiens à remercier tous les témoins de ce matin. La séance a été tout à fait utile et instructive.

Au nom de tout le comité, nous pouvons aussi, je crois, remercier M. Speller, M. Assadourian, M. Sauvageau et M. Penson pour le travail qu'ils ont fait au sein du sous-comité. Je crois que c'est ce travail d'il y a un an et demi qui a donné lieu au texte de loi bien équilibré que nous avons sous les yeux aujourd'hui.

Il y a deux choses de plus. Tout d'abord, on avait proposé, M. Assadourian, une séance d'information sur la Turquie et la Syrie. Comme vous le savez, ces deux pays ont réussi à résoudre leurs problèmes. Nous pouvons donc peut-être attendre étant donné que l'état de tension...

M. Sarkis Assadourian: Je crois que le 5 novembre était la date limite pour la soumission.

Le président: Oui, mais étant donné qu'ils ont maintenant annoncé qu'ils s'étaient entendus sur leurs problèmes, ne pourrions-nous pas mettre cela de côté? Ce n'est plus...

M. Sarkis Assadourian: Je crois que le problème existe, mais...

Le président: Dans ce cas, nous pourrons en discuter plus tard. Merci.

Notre prochaine réunion aura lieu le 3 novembre à 9 heures, salle 209, édifice de l'Ouest, pour l'étude article par article du projet de loi.

Merci beaucoup.

La séance est levée.