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CITI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON CITIZENSHIP AND IMMIGRATION

COMITÉ PERMANENT DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 2 décembre 1998

• 1537

[Traduction]

Le président (M. Rey D. Pagtakhan (Winnipeg-Nord—St. Paul, Lib.)): La séance est ouverte.

Nous accueillons aujourd'hui comme témoins, M. LeBane, Elizabeth Tromp et Joan Atkinson. Cependant, avant d'entendre leur exposé et de permettre aux députés de poser des questions, je voudrais lire une déclaration, si vous me le permettez.

    Lors de notre réunion informelle du 26 novembre 1998, à laquelle participaient MM. Leon Benoit, John McKay et moi-même, ainsi que du personnel du comité, un consensus s'est dégagé pour que le comité se réunisse les 2, 3 et 9 décembre 1998 pour examiner la question des visas de visiteur et assister à la comparution de la ministre au sujet du rapport sur le rendement du ministère pour la période se terminant le 31 mars 1998 et des objectifs d'immigration pour les immigrants économiques. Il a également été suggéré que lorsque la Chambre se réunira de nouveau en février 1999, le comité convoque une réunion d'information «au sujet des pays où sévissent des conflits susceptibles de causer une augmentation du nombre de réfugiés politiques et où il y a violation des droits de la personne ou risque de violation des droits de la personne». Le comité pourrait également entreprendre une étude sur l'immigration économique.

    À titre d'information, le mercredi 2 décembre et le jeudi 3 décembre 1998 ont été réservés à l'étude des visas de visiteur avec des hauts fonctionnaires du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration. Le mercredi 9 décembre 1998, l'honorable Lucienne Robillard, ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, comparaîtra relativement aux questions susmentionnées.

    On prévoit qu'un projet de loi comportant des modifications à la Loi sur la citoyenneté sera renvoyé au comité par la Chambre.

J'ai lu cette déclaration parce que nous n'avons pas pu obtenir le quorum du comité directeur, mais que nous avons dû nous entendre sur un plan d'action. Je voulais donc consigner cette déclaration au compte rendu. J'espère que tout le monde sera d'accord, mais là n'est pas la question; je voulais simplement lire la déclaration.

Y a-t-il des questions au sujet de la déclaration? Oui.

[Français]

M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Est-ce qu'on prévoit que le renvoi du projet de loi sur la citoyenneté aura lieu avant l'ajournement des Fêtes ou en février ou mars?

• 1540

[Traduction]

Le président: Aux dernières nouvelles, mais cela n'a absolument rien d'officiel, cela pourrait arriver avant l'ajournement de Noël. Mais je n'ai rien reçu par écrit là-dessus.

[Français]

M. Réal Ménard: Est-ce un cadeau de Noël de Mme la ministre?

[Traduction]

Le président: C'est fort possible, parce qu'un projet de loi est toujours un beau cadeau.

[Français]

M. Réal Ménard: Vous croyez au Père Noël. C'est normal.

[Traduction]

Le président: Sur cette note, nous sommes prêts à accueillir nos témoins. Comme vous le savez sans doute, nous examinons maintenant la question des visas de visiteur. Comment voulez-vous procéder? Avez-vous une déclaration d'ouverture?

Allez-y, madame Tromp.

Mme Elizabeth Tromp (directrice générale, Exécution de la loi, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration): Merci.

Je suis heureuse de pouvoir témoigner devant votre comité aujourd'hui. Je voudrais faire une brève déclaration d'ouverture au sujet de la politique relative aux visas de visiteur. Mon collègue, M. Jeff LeBane, parlera ensuite de la façon dont on traite les visas de visiteur.

La politique concernant les visas de visiteur au Canada vise à respecter l'équilibre entre la nécessité de faciliter le mouvement de voyageurs légitimes par nos frontières et le besoin de protéger la société canadienne contre ceux qui voudraient abuser de nos systèmes d'immigration ou qui constituent une menace pour la sécurité des Canadiens.

Le visa de visiteur canadien constitue une vérification de premier niveau pour ceux qui veulent venir au Canada. C'est un moyen de vérification très efficace, mais ce n'est pas le seul. Les transporteurs aériens doivent vérifier si tous les passagers détiennent des documents véritables avant de monter à bord d'avions à destination du Canada. Nos agents aux points d'entrée sont aussi un moyen efficace de vérifier les documents des voyageurs non admissibles. Enfin, nos agents d'admission à l'intérieur, de même que nos partenaires, les services policiers et les autres agences d'exécution de la loi, constituent des moyens de vérification efficaces à l'intérieur du pays capables de retrouver les criminels qui auraient pu échapper à nos autres mécanismes de vérification.

De façon générale, le Canada a pour politique de réclamer un visa de visiteur pour les ressortissants de tous les pays et de lever cette exigence lorsque les conditions le permettent. Seuls les représentants du Canada peuvent émettre un visa à l'extérieur du Canada. Pour obtenir un visa, le demandeur doit prouver qu'il peut être admis au Canada, c'est-à-dire qu'il n'a pas d'antécédents criminels, qu'il a les moyens de venir au Canada et d'en partir et que son voyage a un but précis et durera pendant une période définie.

Personne ne s'étonnera de savoir que la politique du Canada relativement aux visas de visiteur se fonde sur les intérêts canadiens. De façon générale, on réclame un visa pour les ressortissants de pays dont les citoyens ont déjà abusé ou sont considérés comme susceptibles d'abuser de la situation si l'on ne réclame pas de visa.

La politique relative aux visas elle-même se fonde sur les facteurs généraux suivants: d'abord, le taux de refus des visas de visiteur pour un pays donné; le niveau de sécurité du document de voyage, c'est-à-dire la difficulté qu'il y aurait à faire un usage illégitime de ce document; l'intégrité des processus d'émission du document de voyage; la situation socio-économique du pays; et les intérêts du Canada relativement à l'économie et à la politique étrangère.

Nous prenons la décision d'imposer ou non l'obtention d'un visa seulement après avoir consulté les intervenants appropriés, y compris le ministère des Affaires étrangères. Nous formulons des recommandations pour le ministre, qui renvoie ensuite la question à un comité spécial du Cabinet. La renonciation et l'imposition de visas doivent cependant être faite sur la recommandation de deux ministres: le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration et le ministre des Affaires étrangères.

À l'heure actuelle, les ressortissants d'environ 130 pays doivent obtenir un visa de visiteur, et je pense que vous avez reçu une liste de tous ces pays. Une soixantaine de pays, qui représentent près de 99 p. 100 de tous les visiteurs au Canada, n'ont pas besoin de visa de visiteur.

Pour terminer, les visas de visiteur constituent selon nous un outil de politique efficace pour aider à gérer l'accès d'étrangers au Canada et visent en même temps à maintenir un équilibre approprié entre ce contrôle et la facilitation de l'accès.

Mon collègue, M. LeBane, fera maintenant quelques autres observations.

M. Jeff LeBane (directeur général, Région internationale, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration): Bonjour, monsieur le président et membres du comité.

Je sais que vous voulez discuter cet après-midi de la façon dont on traite les visas de visiteur. Le traitement des visas de visiteur à l'étranger est l'un des processus de prise de décisions les plus difficiles, exigeants et en partie subjectifs pour un agent d'immigration. Il doit prendre ses décisions rapidement et être en même temps juste et prudent. C'est l'agent des visas qui doit décider qui pourra venir au Canada de l'étranger pendant quelque temps, qu'il s'agisse d'un visiteur, d'un étudiant ou d'un travailleur temporaire.

• 1545

Bien entendu, c'est la Loi sur l'immigration et les règlements qui en découlent qui autorisent les représentants du ministère à accorder les visas de visiteur. C'est là aussi qu'on trouve les principes clés du système, de même que les notions de présomption et de fardeau de la preuve. Seulement certaines personnes doivent être autorisées à venir au Canada, en l'occurrence les citoyens canadiens, les résidents permanents qui ne sont pas assujettis à une ordonnance d'expulsion et les Autochtones enregistrés à cette fin.

Quand un agent des visas à l'étranger rencontre un demandeur, la loi est très claire. Selon l'article 9 de la loi, toute personne demandant à être admise au Canada doit être considérée comme un immigrant demandant l'admission permanente au Canada. Cela constitue une présomption. Si quelqu'un demande à être admis au Canada pendant quelque temps comme visiteur, il doit convaincre l'agent que c'est effectivement pour cela qu'il vient, qu'il ne veut passer que quelque temps au pays, et c'est à lui qu'incombe le fardeau de la preuve. Il doit prouver que l'hypothèse faite aux termes de la loi ne s'applique pas dans son cas. C'est vraiment tout un défi.

Un grand nombre de personnes présentent des demandes chaque année. En 1997, nous avons traité 726 000 demandes à nos postes à l'étranger et nous en avons accepté environ 90 p. 100. Autrement dit, neuf personnes sur dix qui ont réclamé un visa l'ont obtenu. Vous avez une pièce jointe qui montre quels sont les postes à l'étranger où la demande est la plus forte et combien de visas ont été émis.

Quand un agent reçoit une demande et rencontre un client—et cela est en partie une décision subjective—il doit examiner tous les renseignements disponibles. Quand quelqu'un se rend à un poste d'immigration pour obtenir un visa, mieux il est préparé, plus il a de chances de pouvoir prouver qu'il veut se rendre au Canada pour une raison temporaire.

Les documents que nous réclamons, ou que le client peut présenter sur sa propre initiative, comprennent des preuves qu'il a les moyens financiers de voyager, qu'il a des liens dans son pays d'origine et qu'il a un emploi rémunéré. A-t-il des parents au Canada? Compte-t-il les visiter? Va-t-il visiter une entreprise et en a-t-il des preuves? Quelles sont les raisons de son voyage? Quelles preuves peut-il donner pour prouver les raisons du voyage? Ces raisons semblent-elles logiques?

Bien entendu, il arrive que nous fassions des erreurs, quand nous devons traiter trois quarts de million de demandes. Parfois, nous sommes trop exigeants pour un client particulier; parfois, nous sommes trop généreux, mais nous essayons de maintenir l'équilibre. Cependant, lorsque la demande d'un client est refusée, il peut toujours présenter une autre demande, et, lorsque le bureau est assez grand, c'est un autre agent qui fera l'entrevue, pour être plus juste envers le client.

Il y a maintenant bien des gens à l'étranger qui essaient de se servir d'un visa de visiteur pour être admis au Canada au lieu de passer par les voies normales du système d'immigration. D'après certains, c'est un moyen plus rapide, et l'on peut ainsi contourner les lois sur l'immigration. C'est l'une des choses qui nous posent le plus de défis à l'étranger.

Merci, monsieur le président, et j'espère que nous pourrons répondre à certaines de vos questions.

Le président: Merci beaucoup.

Nous allons commencer par M. McNally.

M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Réf.): Merci, monsieur le président.

Je vous remercie d'être venus jeter un peu de lumière sur certaines de ces questions. J'ai quelques questions à vous poser.

Tout d'abord, à la fin de vos observations, monsieur LeBane, vous avez dit que vous essayez de maintenir un certain équilibre entre les cas où vous êtes peut-être trop généreux et ceux où les demandeurs sont traités plus sévèrement. Quels mécanismes existe-t- il pour que les employés à l'étranger puissent maintenir cet équilibre?

• 1550

M. Jeff LeBane: Permettez-moi de vous donner un exemple. Nous avons 79 missions à l'étranger, et quelques-unes sont très loin du Canada. Comme il y a un système de roulement pour nos agents, ils peuvent être affectés dans une région du globe tout à fait nouvelle pour eux, par exemple à Delhi, où les normes culturelles sont bien différentes des nôtres. Ainsi, tous les agents qui sont affectés à la mission de Delhi doivent suivre un programme de formation intensive d'une semaine où on leur explique la culture, les droits sociaux et religieux et pourquoi certaines personnes peuvent avoir des raisons bien particulières de venir au Canada. Nous essayons d'orienter les agents vers les besoins des clients et de faire en sorte que leurs attentes soient quelque peu différentes de ce qu'elles seraient normalement au Canada.

M. Grant McNally: Vers le milieu de votre exposé, vous avez dit que la décision d'accorder ou non un visa est souvent très subjective. Vous avez dit que les agents doivent être rapides, justes et prudents. Voulez-vous dire qu'ils ne reçoivent qu'une semaine de formation? S'agit-il d'une formation supplémentaire pour cette seule région?

M. Jeff LeBane: Tous les agents envoyés à l'étranger reçoivent une formation très rigoureuse relative à l'immigration...

M. Grant McNally: Qu'entendez-vous par rigoureuse? Que doivent-ils faire?

M. Jeff LeBane: D'habitude, ils doivent suivre un programme de formation d'un an à Ottawa, où ils reçoivent une instruction très détaillée et intensive sur la Loi sur l'immigration et les règlements. D'habitude, ils sont ensuite envoyés temporairement à l'étranger pour qu'ils puissent voir comment fonctionnent les bureaux à l'étranger et quels défis le travail dans ces bureaux représente. Ils reçoivent quelques notions de droit et voyagent à l'occasion dans le Canada pour rencontrer des représentants des provinces. Ils reçoivent une formation très intensive à Ottawa.

M. Grant McNally: Qu'en est-il de cette formation d'une semaine? Est-ce uniquement pour la région particulière où ils sont affectés?

M. Jeff LeBane: Il s'agit d'une formation pour cette affectation particulière, et cela s'ajoute à la formation régulière.

M. Grant McNally: Cela m'inquiète un peu de savoir qu'ils n'ont qu'une semaine pour se renseigner sur la situation dans cette région. Ces agents ont un rôle très important à jouer. Ils sont vraiment sur les premières lignes pour vérifier si les personnes qui viennent au pays peuvent être admises en toute sécurité.

M. Jeff LeBane: Ils sont formés selon un programme universel pour qu'ils appliquent les règles et les règlements du programme de la même façon dans toutes les régions du monde. La formation supplémentaire d'une semaine vise à garantir qu'ils comprennent les clients, les normes culturelles et les lois sociales particulières de cette région.

M. Grant McNally: Vous pensez donc que les agents peuvent apprendre tout cela en l'espace d'une semaine? Combien d'autres cas y a-t-il? Je sais que toutes les missions sont différentes, mais, une fois sur place, travaillent-ils avec un agent qui est là depuis assez longtemps pour faire une espèce de stage avant d'être chargés eux-mêmes des décisions importantes?

M. Jeff LeBane: Dans un poste comme celui de Delhi, nous avons des agents d'immigration désignés qui constituent notre groupe principal d'agents dans ce bureau. Ils sont autorisés par la loi à émettre ou à refuser des visas. Ils ont aussi les compétences voulues pour aider les nouveaux venus.

M. Grant McNally: Avez-vous des chiffres qui montrent combien de personnes qui obtiennent un visa de visiteur demandent le statut de réfugié une fois rendues au Canada?

M. Jeff LeBane: C'est très difficile. La plupart de ceux qui présentent une demande pour obtenir le statut de réfugié aux points d'entrée et à l'intérieur du pays le font d'habitude sans documents. Je me suis renseigné pour voir combien de personnes qui avaient obtenu un visa à l'étranger et qui ont ensuite présenté une demande pour obtenir le statut de réfugié au Canada ont présenté leur passeport avec le visa. Il y en avait environ 1 300.

Le président: Combien cela représente-t-il comme pourcentage?

M. Jeff LeBane: C'est un pourcentage vraiment infime du nombre total de visas émis, soit 0,002 p. 100.

Le président: Merci.

Allez-y, monsieur McNally.

• 1555

M. Grant McNally: Merci.

Vous avez dit que, quand une première demande pour obtenir un visa de visiteur est refusée à l'étranger, la même personne peut présenter une nouvelle demande.

M. Jeff LeBane: Oui.

M. Grant McNally: Dans quel délai? Doit-elle attendre?

M. Jeff LeBane: Il n'y a pas de délai. Elle peut présenter une nouvelle demande le lendemain.

M. Grant McNally: J'imagine que le processus cause certaines inquiétudes, vu qu'il n'y a pas de possibilité d'appel et que certains auront l'impression que si leur demande a été refusée une première fois, il est fort probable qu'elle le sera encore, ou du moins je suppose que c'est ce qu'ils penseront.

Je sais qu'il y a eu quelques cas à Vancouver, cette semaine, je pense, parce que certaines personnes voulaient venir assister aux funérailles de M. Heyer, qui a été assassiné, et qu'on leur a refusé un visa de visiteur. Bien entendu, pour de telles personnes, cela ne sert pas à grand-chose de présenter une nouvelle demande, vu qu'elles avaient vraiment besoin de venir pour très peu de temps.

M. Jeff LeBane: Je peux vous répondre qu'il y a bien des gens qui présentent une ou plusieurs nouvelles demandes et qui doivent donc avoir l'impression que notre système est équitable et que nous sommes prêts à réexaminer leur cas. Ils savent que, dans bon nombre de nos bureaux, lorsque nous avons un personnel suffisant, les demandes subséquentes seront examinées par un autre agent. Nous disons toujours aux demandeurs que, s'ils présentent une nouvelle demande, s'ils apportent de nouveaux renseignements, nous sommes toujours prêts à examiner leur demande et que cela peut parfois donner lieu à une décision différente.

M. Grant McNally: Très bien.

Me reste-t-il du temps?

Le président: Il vous reste quelques minutes.

M. Grant McNally: Pour revenir à la formation des agents, vu que ces agents sont probablement les employés les plus importants dans nos missions à l'étranger, car ce sont eux qui décident qui pourra venir au Canada et qui ne pourra pas venir, vous avez déjà parlé du programme de formation et vous nous avez dit que les agents recevaient de la formation relativement à la Loi sur l'immigration et aussi une certaine formation juridique. Je suppose qu'il s'agit de diplômés universitaires.

M. Jeff LeBane: Oui.

M. Grant McNally: Existe-t-il un processus d'évaluation pour examiner leur rendement non seulement à l'étranger, mais aussi pendant la période de formation, pour savoir s'ils connaissent bien la loi, les règlements et les procédures?

M. Jeff LeBane: Oui, le programme de formation est très rigoureux. Il y a des examens pendant toute la période. Il existe donc un processus d'évaluation constant.

M. Grant McNally: Très bien.

Le président: Monsieur Ménard?

[Français]

M. Réal Ménard: Avant de poser mes questions, j'aimerais d'abord qu'on ait une pensée positive pour notre collègue Mme Folco, qui vit des moments extrêmement éprouvants puisqu'elle a perdu son mari. J'espère que nous en reparlerons à la fin de la séance et que nous essaierons d'être auprès d'elle demain, aux funérailles.

Vous avez mentionné qu'il y a 60 pays dont les citoyens n'ont pas besoin de visa pour visiter le Canada. Nous avons la liste des pays dont les citoyens ont besoin d'un visa. J'en déduis donc que ces 60 pays sont tous les autres pays de la communauté internationale, mais il serait bon qu'on ait cette liste-là. Pourriez-vous nous expliquer quel est le critère qui distingue la première catégorie de la deuxième?

J'ai récemment visité les trois républiques des États baltes. Dans chacune de ces républiques, les présidents, des premiers ministres et des ministres des Affaires étrangères nous ont répété qu'ils souhaitaient que le Canada libéralise la notion de visa. Expliquez-nous ce qui fait que l'on a besoin ou pas d'un visa.

[Traduction]

Mme Elizabeth Tromp: Je reviens aux critères généraux dont j'ai parlé au début. Il s'agit des critères ou des facteurs dont on se sert pour prendre une décision, et ce sont ces critères qui déterminent quels pays du monde figurent sur la liste que vous avez en main et lesquels en sont exemptés. Cela dépend encore une fois du taux de refus des visas de visiteur.

Autrement dit, si un pays donné a un taux de refus élevé, cela laisse entendre que nous pourrions avoir d'importants problèmes de contrôle si l'exigence relative aux visas était levée et que nous verrions à nos frontières plus de gens que nous aurions sinon refusés. C'est un facteur dont nous tenons compte.

Ensuite, relativement au niveau de sécurité des documents de voyage du pays d'origine et relativement à l'intégrité des procédures d'émission de ces documents, le fait est que les documents de certains pays ne sont pas aussi sûrs que d'autres et que les ressortissants de ces pays ou les étrangers peuvent plus facilement en abuser. C'est la même chose pour les procédures d'émission des documents de voyage, qui risquent de ne pas être très sûres.

• 1600

J'ai déjà parlé de la situation socio-économique du pays d'origine. C'est l'un des facteurs de pression réciproque dont on entend parler. Dans les pays plus pauvres, où les conditions socio- économiques ne sont pas du tout les mêmes que celles qui existent au Canada, la situation peut créer un facteur d'attraction pour ceux qui voudraient venir au Canada, comme immigrant économique, si vous voulez. À ce moment-là, nous craignons qu'ils ne viennent et ne réclament le statut de réfugié alors qu'ils ne sont pas des réfugiés véritables. C'est un autre facteur de contrôle.

Enfin, nous devons aussi protéger les intérêts économiques du Canada et nos intérêts relatifs à notre politique étrangère. Je sais que c'est très vaste comme notion. Par exemple, relativement à nos intérêts commerciaux, nous voulons faciliter le commerce et le mouvement des voyageurs. Lorsque nous considérons qu'il serait avantageux de le faire, compte tenu des autres facteurs dont j'ai parlé, cela pourrait être une raison de...

[Français]

M. Réal Ménard: Récemment, on a beaucoup parlé dans la presse—je ne sais pas si on en a parlé beaucoup au Canada anglais, mais on en a certainement parlé au Québec—d'un député de l'Irlande du Nord engagé, comme la formation politique à laquelle il appartient, dans le processus de paix, qui s'est vu refuser un visa de visiteur. Il aurait apparemment été très mal dirigé dans l'appareil.

Je sais que les citoyens des pays du Commonwealth, ainsi que ceux d'une soixantaine de pays, n'ont habituellement pas besoin de visa pour venir ici. Vous nous avez dit que même si elle est citoyenne d'un pays dont les résidants n'ont pas besoin de visa, on exige évidemment qu'une personne qui a des antécédents judiciaires ou un casier criminel s'en procure un. Dans le processus d'octroi des visas, ne devrait-on pas tenir compte de certains facteurs plus que d'autres, particulièrement lorsqu'il s'agit d'un conférencier international qui est engagé et qui vient ici participer à une conférence très, très importante? Comment expliquez-vous le cafouillage de vos services dans le cas précis de M. Maskey, qui s'était rendu à Boston, où il avait été très mal servi, qu'on avait renvoyé à New York et qui s'était vu refuser un visa, malgré le fait qu'il avait été invité par le Canada à participer à une conférence internationale et ainsi de suite?

Je ne voudrais pas prendre trop de temps pour discuter de ce cas précis, mais si vous pouviez m'en dire un petit mot, je l'apprécierais.

Cet incident a beaucoup discrédité le processus.

[Traduction]

Mme Joan Atkinson (directrice générale, Direction de la sélection, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration): Merci.

Les citoyens du Royaume-Uni, y compris ceux de l'Irlande du Nord, n'ont pas besoin de visa dans leur passeport parce que c'est l'un des pays pour lesquels nous ne réclamons pas de visa. Dans le cas que vous avez mentionné, j'imagine qu'il devait y avoir des motifs pour déclarer cette personne non admissible, soit à cause d'antécédents criminels, soit pour d'autres raisons.

Comme vous le savez, dans le cas de personnes non admissibles, nous ne pouvons pas permettre à ces personnes d'entrer au Canada selon les dispositions normales de la loi. Dans un tel cas, il faut que la personne obtienne un permis de la ministre pour pouvoir entrer au Canada.

Quand des demandeurs sont jugés non admissibles pour une raison quelconque et veulent venir au Canada pour une raison comme celle que vous avez donnée, par exemple pour assister à une conférence, nous examinons ces raisons de très près. Nous évaluons les risques qu'il y aurait pour le Canada si nous permettions à cette personne autrement non admissible d'obtenir un permis de la ministre pour venir au Canada ou si nous l'autorisions à entrer à un point d'entrée quelconque, et les problèmes qu'il y aurait à permettre à cette personne de venir au Canada.

[Français]

M. Réal Ménard: Si jamais vous pouviez fouiller ça et m'écrire pour répondre à ma question, je l'apprécierais. On sait que ce monsieur avait un casier judiciaire et que son chef, le chef du Sinn Féin, était venu lui aussi, bien qu'il avait également un casier judiciaire. On n'a sûrement pas discuté de cette question à des niveaux subalternes, mais à des niveaux peut-être un peu plus élevés.

Comment traitez-vous les requêtes de députés? Vous dites que 89 p. 100 des gens qui se présentent dans les 79 points de service pour obtenir un visa l'obtiennent. C'est ce que les sous-ministres nous avaient eux aussi dit lors de leurs présentations. Mais les gens qu'on rencontre dans nos bureaux de comté font partie des familles des 10 p. 100 qui ne les ont pas obtenus.

• 1605

On a l'impression que c'est une décision très arbitraire, qui est dans un certain nombre de cas mal fondée et pour laquelle il n'y a pas d'appel. Je reviendrai à cela, mais c'est un aspect de la loi qu'il faudra corriger au mois de janvier.

Je sais que les députés de Montréal et de Toronto sont plus en contact avec vous puisque le profil des immigrants ou des visiteurs fait en sorte que c'est plutôt vers ces deux grandes villes qu'ils se dirigent. On a l'impression que les requêtes des députés et les influences—excusez-moi, je ne devrais jamais utiliser ce mot-là, monsieur le président, excusez-moi—, les représentations de députés ne pèsent pas lourd dans vos considérations, et cela est un petit peu troublant. Comment traitez-vous les requêtes des députés qui vous écrivent ou vous appellent?

[Traduction]

M. Jeff LeBane: Nous recevons beaucoup de demandes de l'étranger de députés. Vous avez raison. Nous prenons ces demandes très au sérieux. Comme je l'ai dit, le fardeau de la preuve revient toujours au demandeur. C'est ainsi que la loi est rédigée. C'est au client de prouver qu'il ne veut pas venir au Canada de façon permanente.

Quand un député nous envoie une demande, elle est communiquée au gestionnaire du programme. D'habitude, nous essayons de voir si la lettre contient des renseignements supplémentaires qui ont peut-être été omis lors de l'entrevue. C'est à vous de nous renseigner: si vous savez que le demandeur a des parents dans votre circonscription et si vous connaissez ses parents, nous examinons la demande très sérieusement.

[Français]

M. Réal Ménard: Mais il y a un problème. La loi actuelle laisse un très grand pouvoir discrétionnaire. Je comprends que dans le processus d'octroi de visas, on doive s'en remettre au jugement de l'agent; cela est certain et ce n'est pas juste une question de formation, mais aussi une question d'expérience et de jugement. Mais si j'ai toute raison, je m'engage, je donne des garanties, je dis que je sais que la personne qui est en Algérie et qui vient ici va retourner en Algérie si on le lui demande. Je me porte garant et je vous écris pour vous dire que je connais les antécédents personnels de cette personne-là, qui est en affaires, qui n'a aucune attache au Canada et qui va retourner dans son pays. Est-ce que cela va jouer dans la décision que vous allez rendre? Est-ce qu'il est possible qu'un député se porte garant, fasse ce type de représentation et soit pris au sérieux?

[Traduction]

M. Jeff LeBane: Vous pouvez dire être convaincu que les parents du demandeur au Canada sont vraiment de bonne foi et que vous êtes prêt à offrir une garantie. Si c'est ce que vous dites, nous vous écouterons certainement. Cependant, l'agent considérera malgré tout que le fardeau de la preuve revient au client. Même si un député déclarait avec la meilleure volonté du monde qu'il garantira que le demandeur rentrera dans son pays d'origine, on ne pourra pas renvoyer la personne de force. Par exemple, la loi stipule que si une personne arrive au Canada comme visiteur et présente une demande pour obtenir le statut de réfugié, elle est passée dans un système différent, et un député ne pourrait pas exiger que cette personne soit éliminée de ce système et quitte le pays.

[Français]

M. Réal Ménard: Oui, mais cela est autre chose.

[Traduction]

Le président: C'est terminé, monsieur Ménard.

[Français]

M. Réal Ménard: Je pourrai revenir. D'accord.

[Traduction]

M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Je voudrais poursuivre dans la même veine que M. Ménard.

Les demandes qui nous causent des inquiétudes sont les 10 p. 100 qui sont refusées, qui semblent toutes, les 70 000, aboutir à mon bureau. Quand mes adjoints ont appris que nous examinerions le système des visas de visiteur, ils sont allés à nos classeurs et ont sorti des boîtes pleines de dossiers qui nous posent tous beaucoup de problèmes. C'est donc pour cela que nous posons toutes ces questions, parce que nous voulons aussi en arriver à une solution un peu plus raisonnable.

Parlons un peu de votre taux de refus. Il est un peu trompeur de dire qu'il n'est que de 10 p. 100, parce que vous ne refusez à peu près personne dans certaines missions. Il me semble que les trois postes où le taux de refus est le plus élevé sont les postes de Beijing, de New Delhi et de Manila, si l'on examine les pourcentages. Dans certains cas, le taux de refus est très élevé.

• 1610

Je voudrais que vous nous parliez un peu du caractère arbitraire de certaines de ces décisions, vu que nous voyons le résultat de ces décisions à nos bureaux de circonscription quand les membres des familles des demandeurs viennent nous voir, que nous les connaissions ou non, ce qui peut nous mettre dans des situations très difficiles. Ce sont des gens qui agissent en toute bonne foi et qui nous disent qu'ils ont invité des étrangers au Canada à venir leur rendre visite pour une raison quelconque, qu'il s'agisse d'une mère malade, ou d'autre chose, et nous avons des problèmes de communication... ou plutôt je ne devrais pas dire cela, parce que nous avons d'excellentes communications avec vos postes à l'étranger. Je ne veux donc pas vous adresser de reproches à ce sujet.

À certains points de vue, l'agent à l'étranger ne voit que la moitié du tableau, puisqu'il ne peut voir que le demandeur et qu'il doit évaluer son attachement à son pays d'origine et les liens qui l'y retiennent. Comment pourrions-nous faire en sorte que la famille qui a invité le client puisse communiquer avec l'agent à l'étranger sans l'intervention du député ou d'une autre personne, pour que l'agent ait une idée plus complète de la situation et que, si l'on offre de faire une garantie, on puisse ensuite l'appliquer? Je crois savoir que l'article 18 de la loi vous permettrait d'exiger un dépôt de garantie le cas échéant.

Pourrions-nous en discuter pour savoir comment nous pourrions améliorer le système, parce que la situation nous cause énormément de problèmes.

Mme Joan Atkinson: Je pourrais peut-être vous parler alors de la question des garanties.

À l'heure actuelle, la loi ne nous permet pas de demander à un parrain de prendre un engagement pour des visiteurs, comme nous pouvons le faire, par exemple, pour les immigrants de la catégorie de la famille. Vous avez raison de dire que, selon la loi actuelle, un agent d'immigration principal à un point d'entrée peut exiger qu'un visiteur dépose une caution, mais cela ne vise qu'à garantir que les conditions qui ont été imposées à ce visiteur seront respectées.

M. John McKay: Excusez-moi, mais je voudrais vous interrompre un instant parce que je voudrais examiner tout cela point par point.

Il s'agit donc uniquement de l'agent d'immigration principal au point d'entrée.

Mme Joan Atkinson: C'est exact.

M. John McKay: Comment cette personne serait-elle arrivée jusqu'au point d'entrée?

Mme Joan Atkinson: Quelqu'un a dû considérer qu'il s'agissait d'un visiteur de bonne foi.

M. John McKay: L'agent à New Delhi, par exemple, aurait donc déjà déclaré qu'il s'agissait d'un visiteur de bonne foi.

Mme Joan Atkinson: C'est exact.

M. John McKay: Pourquoi ne peut-on pas revenir en arrière?

Mme Joan Atkinson: D'abord, parce que, pour revenir au point d'origine, nous n'avons pas de mécanisme qui permette d'obtenir une garantie que la personne à qui nous avons remis un visa de visiteur quittera le Canada à la fin de son séjour. Les cautions que l'on peut maintenant exiger selon la Loi sur l'immigration s'appliquent uniquement à ceux qui sont déjà considérés comme étant des visiteurs de bonne foi et dont on sait que leur séjour au Canada ne sera que temporaire.

Je pense que si l'on demandait une somme raisonnable à titre de caution pour garantir que quelqu'un quitte le Canada, il faudrait préciser ce qu'est une somme raisonnable, combien il en coûte à quelqu'un pour franchir toutes les étapes, tous les recours du système de détermination du statut de réfugié.

M. John McKay: Il faudrait en revenir à... Premièrement, si nous sommes au point d'entrée, il me semble que c'est un peu tard...

Mme Joan Atkinson: Tout à fait.

M. John McKay: ...et que c'est une disposition inutile. Revenons-en au moment où l'agent rencontre la personne qui demande un visa et se dit très sérieusement que cette dernière n'a pas de liens suffisants pour lui en délivrer un. Dans l'intervalle, la famille ou les parrains au Canada, selon le cas, ne sont pas d'accord avec cette évaluation et sont disposés à appuyer leurs dires en versant une certaine somme. À ce moment-là, cet argent constitue une caution judiciaire.

Premièrement, vous dites ne pas avoir le pouvoir réglementaire ou juridique de faire cela.

Mme Joan Atkinson: C'est juste.

M. John McKay: Il serait donc utile que les membres du comité déterminent s'il s'agit ou non d'une bonne idée.

• 1615

Je suppose que vous avez déjà fait le tour de cette question plus d'une fois. Pouvez-vous nous résumer l'opinion du ministère sur l'opportunité d'exiger une caution, de sorte que les députés ne soient pas appelés à sanctionner une mesure absolument inapplicable, ce qui pourrait ternir leur réputation?

Mme Joan Atkinson: D'accord. Permettez-moi maintenant de dire quelques mots avant d'inviter mes collègues à participer à la discussion.

Le problème, c'est d'élaborer un système qui puisse être applicable. Il faudrait qu'il soit applicable pour être vraiment efficace. Ça, c'est la première chose.

M. John McKay: Je suis d'accord.

Mme Joan Atkinson: La deuxième chose, c'est que dans bien des cas la difficulté est liée au fait qu'il faut jauger les intentions des gens. Ce qui complique la décision d'accorder ou non un visa pour l'agent responsable, comme M. LeBane l'a dit, c'est qu'il doit prendre en compte toute une gamme de variables mentionnées par Mme Tromp. Finalement, il s'agit de savoir si l'on estime que cette personne a l'intention de quitter le Canada. Et l'intention, c'est bien difficile à définir. Il est souvent difficile de cerner une intention.

Cela nous pose un véritable problème lorsqu'on veut mettre en place un système de garanties applicables, quelle que soit sa structure. Au bout du compte, c'est l'agent des visas qui doit évaluer la personne qu'il a en face de lui. Il doit essayer d'évaluer ce que cette personne a l'intention de faire dans l'avenir en tenant compte de tous les facteurs possibles.

M. Jeff LeBane: J'aimerais revenir en arrière. Premièrement, à la suite des instances que présentent les députés, il arrive souvent qu'un visa soit délivré. Je ne peux vous fournir de statistiques, mais je peux vous donner des renseignements additionnels. Lorsque j'étais en poste à l'étranger, nous recevions des instances très détaillées de la part de députés, parfois des affidavits, parfois des renseignements très précis au sujet d'un commettant, ce qui à croire qu'on était en présence d'une demande légitime. Nous considérions l'autre côté.

Il arrive parfois qu'on se trouve dans une situation très délicate, et c'est alors une question de jugement. C'est une décision subjective. Aux termes de la loi, l'agent essaie d'adopter une approche équilibrée.

Il existe aussi une troisième voie, dont le nom est mal approprié. C'est la voie du permis ministériel. Un agent qui estime qu'il y a sans doute de bonnes raisons d'autoriser cette personne à entrer au pays, mais qui a tout de même certaines réserves, peut communiquer avec son directeur de programme et recommander la délivrance d'un permis ministériel, ce qui autorisera la personne en question à venir au Canada temporairement, disons pour visiter un parent malade, assister à des funérailles ou à un mariage. La personne qui entre au Canada avec un permis ministériel n'a aucun droit d'appel. C'est un autre véhicule que nous utilisons. Souvent, lorsque nous recevons des instances concernant des cas difficiles, nous recourons à un permis de ce genre.

M. John McKay: Ce qui m'inquiète, c'est que même lorsque le député estime qu'il s'agit d'une demande légitime, d'un cas de détresse familiale, l'absence de tout poids de cette garantie ne semble pas évidente pour tout le monde. Je peux promettre, comme un bon petit scout, que cette personne rentrera dans son pays. Cependant, je n'ai absolument aucun moyen de m'assurer qu'elle prendra l'avion. Aucun.

Mme Joan Atkinson: C'est juste.

M. John McKay: C'est un peu un attrape-nigaud. Je voudrais nous sortir de cet attrape-nigaud pour que les instances présentées par les familles, qui affirment qu'une personne vient ici en visite, puissent être assorties de garanties applicables.

J'en reviens toujours à la question de l'applicabilité. Y a-t- il une bonne raison pour laquelle on ne pourrait pas instaurer au point d'embarquement un mécanisme de caution de la même façon qu'on le fait pour les renvois? Aux termes de l'article 18, l'agent d'immigration principal impose une caution au demandeur ou exige certaines conditions au point d'entrée, ou quelque chose de ce genre. Y a-t-il une raison valable, en théorie, qui ferait qu'un tel système ne pourrait fonctionner?

• 1620

Mme Joan Atkinson: Tout d'abord, je tiens à dire que l'approche que nous privilégions est de refuser l'entrée à quiconque ne vient pas ici pour un motif temporaire, au lieu de traiter avec cette personne après le fait, une fois qu'elle est ici. Même si nous demandions une caution, si la personne en question viole les conditions de cette caution et que nous la percevions, nous demeurons aux prises avec le même problème. Nous devons traiter avec la personne en question et, au bout du compte, essayer de faire en sorte de la renvoyer.

En principe, nous préférons toujours traiter avec la personne à l'étranger et porter le meilleur jugement possible sur la capacité de cette personne de respecter la loi telle qu'elle existe à l'heure actuelle.

M. John McKay: Je ne pense pas qu'aucun d'entre nous...

Le président: Avec votre permission, je poserais en partie votre question à Mme Tromp, parce qu'elle soulève la possibilité d'un changement de politique. Si vous pouviez y répondre, nous passerions ensuite à M. Doyle.

M. John McKay: Merci, monsieur le président.

Mme Elizabeth Tromp: En fait, Mme Atkinson et moi-même partageons la responsabilité d'élaborer la politique dans ce dossier. J'aimerais étoffer le contexte. Encore une fois, pour ce qui est de savoir comment on pourrait instaurer un système applicable, tout tourne autour du facteur coût. Quel serait un coût raisonnable? Premièrement, combien faudrait-il exiger pour compenser ce qu'il en coûterait au Canada si une personne arrive et présente une demande de statut de réfugié non légitime? Quelle somme serait raisonnable dans le contexte du trafic d'étrangers à l'heure actuelle?

Il est acquis que certains sont prêts à payer jusqu'à 50 000 $ à des passeurs pour entrer frauduleusement dans notre pays. Dans ce contexte, quelle somme supérieure à ce montant faudrait-il exiger pour stopper ce mouvement, quelle somme serait dissuasive? Il faudrait que ce ne soit pas une somme qui s'ajoute simplement au coût d'entrée ici pour ces immigrés, ce qui demeure tout de même pour eux la meilleure solution. Il s'agit de déterminer à combien il faudrait fixer cette caution pour qu'elle soit un instrument de dissuasion efficace.

M. John McKay: Je pourrais revenir là-dessus, mais je suis désolé, je n'ai plus de temps. Si j'ai une autre occasion, j'y reviendrai.

Le président: Monsieur Doyle.

M. Norman Doyle (St. John's-Est, PC): Vous aurez de nouveau la parole dans un instant, car je n'ai qu'une brève question à poser.

Qu'en est-il des ressortissants du pays qui est un de nos alliés de l'OTAN? Cela influe-t-il sur leur capacité d'obtenir un visa? Ainsi, j'ai remarqué que les citoyens grecs n'ont pas besoin de visa, contrairement aux Turcs, sauf pour les diplomates. Or, ces deux pays sont des alliés de l'OTAN. Pourquoi cette différence?

M. Jeff LeBane: Auparavant, la Turquie était un pays dont les ressortissants étaient exemptés de l'obligation de demander un visa. Il y a eu abus de ce privilège dans les années 80, et, pour cette raison, après un examen mené conjointement avec le ministère des Affaires étrangères, le gouvernement a décidé d'exiger un visa. Il y a eu des abus du système. Dans le cas de la Grèce, nous n'avons jamais eu un nombre d'abus suffisant pour justifier l'imposition d'un visa.

M. Norman Doyle: Pouvez-vous être un peu plus précis? De quel genre d'abus parlez-vous?

M. Jeff LeBane: De gens qui présentaient des demandes de statut de réfugié.

Mme Joan Atkinson: Des demandes non fondées.

M. Jeff LeBane: Il y a eu des cas de personnes qui entraient dans la clandestinité, qui travaillaient illégalement, ou qui ne voulaient entrer au Canada qu'avec l'intention d'accéder ultérieurement aux États-Unis. Il y avait tout un tas de problèmes.

Le président: Merci, monsieur Doyle.

La présidence donne la parole à Mme Augustine, et ensuite à M. Benoit.

Mme Jean Augustine (Etobicoke—Lakeshore, Lib.): Merci, monsieur le président.

J'ai bien aimé la série de questions posées par M. McKay, ne serait-ce que parce que ce sont là les problèmes auxquels nous sommes confrontés dans nos bureaux en tant que députés. Je vais d'ailleurs continuer dans la même veine.

Je voudrais revenir sur la dernière question. Comment un pays peut-il obtenir que son nom ne figure plus sur la liste? Je sais que récemment certains pays ont été inscrits sur la liste en raison d'abus, comme vous l'avez dit. Si ces abus sont corrigés ou si vous faites une analyse qui prouve que les choses ont changé, leur nom peut-il être enlevé de la liste dans un délai précis? Quel est le processus qui permet qu'un pays ne figure plus sur la liste?

• 1625

Mme Elizabeth Tromp: Encore une fois, il s'agit de voir si les conditions ou les circonstances ont changé suffisamment pour justifier une révision de la décision initiale. Si de nouveaux facteurs entrent en ligne de compte, cela déclenche un examen formel de la situation.

Mme Jean Augustine: La Guyane a été inscrite sur la liste très récemment. Était-ce la Guyane ou l'un des...

M. Jeff LeBane: Peut-être pourrais-je vous donner un autre exemple.

Mme Jean Augustine: D'accord.

M. Jeff LeBane: Prenons le cas du Chili. Ce n'est pas nécessairement le meilleur exemple, car nous avons réimposé l'obligation de demander un visa. Cette obligation existait auparavant. Un nombre considérable de personnes venaient au Canada pour des raisons autres que temporaires, de sorte que nous avons imposé un visa.

Nous continuons de surveiller la situation au Chili. Il y a eu un retour à la démocratie. Le régime démocratique s'est consolidé. La situation économique du pays s'est améliorée. Tous les facteurs d'incitation, toutes les raisons qui incitaient les gens à quitter leur pays et à essayer de contourner la loi canadienne n'avaient plus cours, du moins au début. Leur passeport était un document sûr. Toutes ces conditions ont été prises en compte, et nous avons décidé de supprimer l'obligation de demander un visa.

M. Jean Augustine: Il y a une autre question assez étonnante qui a été soulevée, soit celle de la semaine de formation interne pour préparer les gens à des situations sociales ou culturelles différentes de celles qui existent au Canada. Je me demande ce que quelqu'un peut apprendre en une semaine. Songez aux obstacles que doivent surmonter certaines personnes qui doivent se déplacer d'un bout à l'autre de leur pays pour aller au bureau des visas, où qu'il soit. Nous avons entendu des histoires de ce genre pour ce qui est de Delhi. Il faut des heures pour se rendre d'un bout à l'autre du pays, et il y a toujours le risque que la demande soit refusée. Nous avons entendu ce genre de plainte au sujet de différents endroits.

Par exemple, supposons que vous viviez au Mali et que vous soyez un étudiant qui veut un visa. Même si l'étudiant en question est titulaire d'une bourse canadienne, pour entrer au pays il lui faudra se rendre en Côte d'Ivoire, un pays lointain, pour obtenir un visa. Il est coûteux de se rendre là-bas. Et il court toujours le risque que sa demande soit refusée dans un autre pays. Il lui faudra peut-être aussi travailler pour réunir les fonds nécessaires pour rentrer dans son propre pays. Cela semble assez étrange.

Je me demande simplement comment, en une semaine de formation, les agents peuvent comprendre les problèmes auxquels se heurtent certaines personnes, notamment en ce qui a trait aux normes culturelles et religieuses. Ainsi, dans certaines communautés, le mariage est très important. Par conséquent, à cette occasion, on voudra que l'oncle, la tante, la grand-mère, etc., soient présents. Le baptême d'un enfant est aussi un événement important. Il y a toutes sortes de situations de ce genre. Dans nos bureaux, on se plaint de ce qu'on ne veut autoriser qu'une seule personne à venir pour cette cérémonie spéciale.

Je voudrais revenir sur la crédibilité des lettres des députés. Il y a des cas où les députés—et je l'ai fait moi-même plusieurs fois—réservent la salle où aura lieu le mariage, obtiennent de l'église, du prêtre, du rabbin si c'est une synagogue, ou du responsable du temple, le document qui atteste qu'un mariage aura bel et bien lieu à la date donnée. Nous connaissons la famille. Nous avons tous fait ce genre de démarches. Nous rassemblons tous les renseignements. Nous réunissons tous les documents justificatifs pour prouver que la cérémonie aura bel et bien lieu. Nous faisons tout cela, et pourtant la demande risque toujours d'être refusée à l'autre bout.

Je m'interroge au sujet de la validité de tout cela. Comme John l'a déjà dit, cela nous est arrivé cent fois. Nous adhérons à un processus qui exige beaucoup de temps et d'énergie de notre personnel, et tout cela pour un refus à l'autre bout.

Mme Joan Atkinson: Je commencerai par aborder la question de la formation que vous avez soulevée. J'ai déjà été agent de formation. Je participais à la formation des agents du service extérieur. Je travaillais localement auprès de ces agents et des agents d'immigration.

• 1630

Pour ce qui est de la sensibilité culturelle, c'est une chose à laquelle nous prêtons une attention particulière dans le contexte de nos programmes de formation à l'intention des nouveaux agents du service extérieur du Canada qui partent pour leur première mission. M. LeBane a mentionné le fait que nous offrons une formation technique concernant le contenu de la Loi sur l'immigration, ses procédures et lignes directrices, etc. Mais dans le cadre de cette formation nous tentons également de susciter une prise de conscience culturelle et d'offrir à cet égard une formation de nature générale, car les personnes en question peuvent être envoyées n'importe où dans le monde. Ils doivent être en mesure d'appliquer les lois, les procédures et les lignes directrices de façon cohérente, indépendamment de leur lieu d'affectation. Ils doivent aussi être sensibles à leur nouvel environnement culturel, encore une fois indépendamment de l'endroit où ils se trouvent dans le monde.

Comme nous le savons, la formation ou l'apprentissage de l'adulte se fait en grande partie sur le tas. Nous jetons certaines bases par le biais de nos cours théoriques, mais une bonne partie de l'apprentissage a lieu une fois que l'agent est sur le terrain. Le meilleur apprentissage, la meilleure expérience a généralement lieu une fois que l'agent est en poste. Il y a des occasions—d'ailleurs, M. LeBane en a parlé—de bénéficier de stages pratiques au cours de l'année de la formation. Chose certaine, lorsque ces agents arrivent dans leur première mission, il y a une période au cours de laquelle cet apprentissage se poursuit, une période transitoire avant qu'on s'attende à ce qu'ils puissent prendre des décisions en solo.

Nous sommes très sensibles à cette nécessité de fournir des cours de sensibilisation culturelle et nous essayons de le faire à la fois en salle de classe, à Ottawa, pour les gens qui partent à l'étranger, et aussi sur le tas, une fois que les personnes sont en poste à l'étranger. J'ajouterais que dans toutes nos missions il y a une session d'orientation pour les nouveaux venus afin de porter à leur attention les aspects culturels spécifiques auxquels ils devront être sensibles lorsqu'ils traiteront avec la clientèle de cet environnement particulier.

Le président: Je donne maintenant la parole à M. Benoit.

M. Leon E. Benoit (Lakeland, Réf.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Ma série de questions n'en sera pas vraiment une. J'ai quelques questions décousues à poser. D'ailleurs, j'ai bien apprécié les questions qui ont déjà été posées.

Je voudrais tout d'abord parler des commentaires qui ont été faits au sujet des interventions des députés, de la crédibilité des lettres des députés, soulevée par Mme Augustine. J'espère que la seule influence que peut avoir l'intervention d'un député serait de fournir des renseignements qui ont été négligés et de les ajouter au dossier. Est-ce une bonne façon de cerner cette influence?

M. Jeff LeBane: Nous regardons évidemment de très près le contenu des documents présentés, en effet.

M. Leon Benoit: Mais cela n'aurait pas tellement d'influence.

M. Jeff LeBane: Eh bien, quand un document vient d'un député, nous devons évidemment en lire le contenu avec soin.

M. Leon Benoit: Il me semble que les permis ministériels démontrent en réalité qu'il y a eu des évaluations contradictoires des mêmes renseignements ou des mêmes preuves. Est-ce bien le cas, ou existe-t-il une autre raison que de simplement permettre une décision différente à partir des mêmes renseignements? Existe-t-il une autre justification des permis ministériels?

Mme Joan Atkinson: D'une manière générale, les permis ministériels sont émis pour permettre à des personnes manifestement non admissibles de venir au Canada lorsque des raisons impérieuses le justifient et que le Canada s'expose à un risque minimal en permettant à ces personnes d'entrer. La plupart des permis ministériels sont accordés en fonction de motifs de non- admissibilité tels qu'ils sont définis dans la Loi sur l'immigration.

M. LeBane parlait de la possibilité d'attribuer un permis ministériel à des personnes à qui nous ne pouvons pas accorder de visa de visiteur. Ces personnes peuvent être non admissibles parce qu'elles n'ont pas convaincu l'agent des visas qu'elles viennent au Canada pour un séjour temporaire. Il ne s'agit donc pas d'une réfutation de la présomption législative ni d'un manquement aux exigences de la loi. Cependant, la personne en question peut avoir des raisons impérieuses de venir au Canada, et le risque présenté par l'admission de cette personne au Canada est jugé minime.

• 1635

Je dirais que le nombre de permis ministériels attribués pour des raisons autres que d'ordre technique—manquement aux exigences de la loi, activités criminelles ou autres raisons—à un visiteur qui ne peut pas nous convaincre qu'il vient au Canada pour un séjour temporaire est relativement peu élevé. Il faudrait une raison exceptionnellement impérieuse pour l'attribution d'un tel permis.

M. Leon Benoit: Lorsqu'il existe une telle raison impérieuse et qu'un permis est attribué, est-il possible de faire au moins un suivi pour s'assurer que la personne en question quitte le pays après sa visite?

Mme Joan Atkinson: Je pense que nous avons probablement déjà parlé de la difficulté que nous avons à vérifier les allées et venues des gens qui sont entrés au Canada.

M. Leon Benoit: Même les personnes qui ont obtenu un permis ministériel parce qu'elles ne répondaient pas aux exigences ne peuvent pas être localisées afin que vous puissiez vous assurer qu'elles quittent vraiment le pays?

Mme Joan Atkinson: Il est difficile de localiser ces personnes parce que nous n'avons aucune mesure de contrôle des sorties ou tout autre moyen de repérer les personnes qui quittent le pays.

M. Leon Benoit: Cela semble presque incroyable. Je peux comprendre que lorsqu'il s'agit de quelque 700 000 personnes, la création d'un processus de cette sorte—une mesure envisagée ici et dans d'autres pays—représente une tâche et des dépenses énormes. Mais vous dites qu'il s'agit d'un chiffre très peu élevé. Chaque année, combien de personnes environ obtiennent un permis ministériel quand elles demandent un visa de visiteur?

Mme Joan Atkinson: Je peux vous dire quel est le nombre total de permis ministériels et quel pourcentage environ de ces permis sont attribués pour des considérations d'ordre technique et en raison d'activités criminelles, mais je ne sais pas si ma base de données me permet de déterminer exactement combien d'entre eux sont attribués pour des considérations d'ordre technique.

M. Leon Benoit: Serait-ce environ 1 500 par année?

Mme Joan Atkinson: Non, environ 4 000 permis ministériels sont accordés annuellement, et environ 1 500 de ces permis sont attribués pour des considérations d'ordre technique. Il s'agit notamment de cas d'admission anticipée, de personnes qui n'ont pas de documents de voyage, ou d'autres cas de cet ordre. Je pense que nos visas de visiteur...

M. Leon Benoit: Vous pensez que ces personnes seraient admissibles, mais vous voulez accélérer le processus pour une raison quelconque.

Mme Joan Atkinson: Dans le cas de l'admission anticipée, par exemple.

M. Leon Benoit: Cela ramène donc le nombre à environ 2 500.

Mme Joan Atkinson: En effet.

Nous en émettons environ 1 500 dans des cas de non- admissibilité en raison d'activités criminelles. Je ne peux pas vous dire exactement combien de permis ministériels sont attribués à des personnes qui ont demandé un visa de visiteur.

M. Leon Benoit: Vous m'avez donné suffisamment...

Le président: Votre temps est expiré, monsieur Benoit. Je vous permets tout de même de terminer votre question.

M. Leon Benoit: Comme il s'agit d'un nombre relativement faible, je ne peux pas m'imaginer qu'il soit tellement compliqué de localiser ces quelques personnes qui présentent un risque plus élevé quand elles viennent dans la catégorie des visiteurs. Avez- vous envisagé la possibilité de localiser au moins ces personnes? Je pense que c'est réalisable.

Mme Joan Atkinson: Je pense que cela fait partie de la grande question qu'est la capacité de notre organisation de localiser des personnes au Canada. C'est dans ce contexte plus large que je situe la question.

M. Leon Benoit: Mais il est tout à fait différent de localiser 2 500 personnes plutôt que plus de 100 000 ou 700 000 visiteurs.

Le président: Je suis désolé, monsieur Benoit, mais je ne peux pas permettre qu'on réponde à cette question maintenant. Vous avez dépassé le temps qui vous était alloué.

M. Leon Benoit: Très bien.

Le président: Je vais donner la parole à M. Ménard ou à M. Telegdi. Normalement, je donnerais la parole à M. Ménard, mais M. Telegdi n'a pas encore eu la possibilité de poser des questions. Acceptez-vous de céder maintenant la parole à M. Telegdi?

[Français]

M. Réal Ménard: Oui, bien sûr.

[Traduction]

M. Andrew Telegdi (Kitchener—Waterloo, Lib.): Monsieur LeBane, vous dites que des lettres écrites par des députés permettent souvent d'obtenir une décision favorable. Je me demande si vous avez des statistiques à ce sujet.

M. Jeff LeBane: Nous ne tenons pas de statistiques de cette nature.

M. Andrew Telegdi: À mon bureau, nous pensons exactement le contraire, et c'est la même chose pour la plupart des députés à qui j'en ai parlé. Il y a donc un problème.

M. Jeff LeBane: Je répète que nous ne tenons pas de statistiques de cette nature. En outre, il y a peut-être eu des décisions d'accorder un permis à cause des instances présentées et des documents fournis—cela peut représenter une série de statistiques—mais une autre chose pourrait déformer un peu les résultats, et c'est le cas où votre intervention a fait modifier la décision, de sorte qu'un permis ministériel a pu par conséquent être accordé.

• 1640

Je pourrais vous donner un exemple d'un cas difficile. Nous parlions des sortes de cas où il pourrait être justifié d'accorder un permis ministériel à un visiteur. Comme le disait Mme Atkinson, quand le risque présenté est minime... Disons par exemple qu'à un bureau de l'immigration à l'étranger un client a demandé régulièrement un visa de visiteur ou la permission d'immigrer, et qu'on a rejeté sa demande à plusieurs reprises, en particulier, disons, sa demande d'immigration. On sait donc que depuis cinq ou six ans cette personne voulait constamment émigrer de son pays. On sait que toute sa famille, ou la plus grande partie de sa famille, est bien installée au Canada et qu'elle a accepté de parrainer cette personne.

Disons qu'une cérémonie très importante se déroulera dans la famille, ou une cérémonie religieuse, des funérailles ou un mariage par exemple. On est alors devant un dilemme, parce qu'il y a des considérations d'ordre humanitaire. On hésite, et on peut envisager l'attribution d'un permis ministériel.

M. Andrew Telegdi: Nous allons réviser la loi, et je sais que lorsqu'on craint qu'un accusé ne récidive ou ne se présente pas devant le tribunal à la date prévue, les tribunaux ont tout un processus à leur disposition. Ils ont notamment le cautionnement, c'est-à-dire que quelqu'un doit faire un dépôt en espèces ou prendre un certain engagement.

Il me semble—et cela nous ramène également au problème posé par M. McKay—je pense, que nous devrions envisager la possibilité que les gens déposent une garantie. Nous devrions voir comment un tel processus pourrait être mis en oeuvre, car je pense que c'est une possibilité.

Si une personne faisait un dépôt en arrivant au pays, ou si quelqu'un en faisait un en son nom, on saurait quand cette personne partirait, parce qu'elle voudrait reprendre cet argent. Quelle sorte de dispositions faudrait-il envisager pour inclure un tel système dans la loi?

M. Jeff LeBane: Je ne suis pas spécialiste en politique, et je sais que Mme Atkinson voudra ajouter quelque chose à ce sujet.

Il y aurait des paramètres et des conséquences différentes dans d'autres aspects de la loi. Si quelqu'un déposait une caution ou une garantie, une telle personne aurait-elle le droit de présenter une demande de statut de réfugié? C'est une des conséquences qu'il faut envisager. Et vous savez que le Canada offre toutes les garanties que les personnes qui craignent pour leur vie doivent avoir accès au Canada pour y présenter une demande de statut de réfugié.

Certains opposeraient des arguments à votre suggestion. Si par exemple une personne qui est persécutée dans son pays utilisait ce moyen pour venir au Canada, c'est-à-dire qu'une garantie serait déposée pour cette personne au point d'entrée, jouirait-elle du même droit qu'elle a actuellement de présenter une demande de statut de réfugié? C'est l'une des conséquences qu'il faut envisager.

Mme Joan Atkinson: Je pense que cela nous ramène à la question de Mme Tromp au sujet de la somme jugée raisonnable pour être suffisamment efficace comme moyen de dissuasion, c'est-à-dire une somme suffisante pour être efficace.

Je pense qu'il faut tenir compte de certains aspects de la Charte canadienne en ce qui concerne l'effet d'une caution. Empêcherait-elle les gens d'avoir accès au Canada, au processus de reconnaissance du statut de réfugié? Quels sont les droits en matière d'appel d'une personne qui a déposé une caution?

J'en reviens à notre problème fondamental en ce qui concerne les cautions, c'est-à-dire à notre capacité de contraindre les gens à payer les cautions, si nous devions établir un tel système.

M. Andrew Telegdi: L'appareil judiciaire fait exécuter constamment toutes sortes de mesures semblables. J'ai vu des gens verser des cautions assez importantes afin de pouvoir sortir de prison, si vous voulez, à titre de garantie.

Mme Joan Atkinson: Mais nous en revenons encore à notre autre point fondamental, c'est-à-dire que nous préférons traiter avec les gens en dehors du Canada lorsqu'il s'agit de déterminer si une personne qui s'en vient au Canada sera un visiteur temporaire au lieu de le faire une fois que la personne est ici, au risque de devoir ensuite s'assurer qu'elle partira.

On peut dire que c'est beaucoup plus clair et moins risqué lorsque nous traitons avec ces personnes en dehors du Canada, plutôt qu'après le fait, c'est-à-dire une fois qu'elles sont rendues ici.

• 1645

M. Andrew Telegdi: Je comprends vraiment ce que vous dites, mais il y a des cas tragiques. Étant donné le type de pays que nous avons, il y a des parents parfois qui devraient être ici pour des funérailles.

Si la famille présente une demande et dépose une garantie assez importante—dans certains cas, les gens sont prêts à mettre en jeu leur maison et à garantir que la personne repartira—je pense que pour des raisons de compassion nous devons prévoir quelque chose pour de tels cas.

Le fait est que le processus actuel prend trop de temps. S'il n'y a pas de mesure spéciale pour ces cas, bien des gens sont inhumés sans que leurs êtres chers puissent être présents, alors qu'ils devraient l'être.

M. Jeff LeBane: L'un des problèmes consisterait à réécrire la loi...

M. Andrew Telegdi: Eh bien, c'est faisable.

M. Jeff LeBane: ... parce que l'idée de déposer une caution, comme solution à ce problème, est contraire à la loi actuelle. Le préposé aux entrevues à l'étranger...

M. Andrew Telegdi: Monsieur LeBane, j'ai dit que nous allions réviser la loi. J'aimerais donc entendre des suggestions pour nous aider dans cette révision. C'est l'esprit dans lequel j'ai posé ces questions.

Il serait bon que le ministère puisse y réfléchir, pour voir si cela peut constituer une option, lorsque nous réviserons la loi. Je ne m'attends pas à recevoir de réponse dès maintenant, mais il y a un problème, et nous devrons tous chercher une solution.

Le président: Nous recevrons peut-être des réponses à ce sujet plus tard.

Monsieur Ménard.

[Français]

M. Réal Ménard: Ce que je voudrais surtout que nos invités comprennent, c'est qu'il y a quelque chose de profondément aberrant dans la façon dont le système fonctionne. Ce qui est profondément aberrant, c'est qu'une seule personne, homme ou femme, ait le pouvoir totalement discrétionnaire de décider si une autre personne, vivant dans des circonstances souvent très pénibles, pourra s'établir au Canada ou non. Cela n'a pas de bon sens.

Il devrait y avoir un mécanisme d'appel, et je vais m'engager très fortement, très vigoureusement et avec conviction à faire inscrire cela dans la loi au moment de sa révision. Il faut qu'il y ait un mécanisme d'appel, comme il y en a dans plein d'autres circonstances au niveau administratif. Il n'est pas normal que cela dépende d'un agent de visa qui, dans certains cas, le fera avec beaucoup de jugement et un grand esprit d'ouverture, mais pas toujours.

J'ai vraiment l'impression qu'il y a des endroits dans le monde dont les habitants sont totalement interdits de séjour. J'ai vu des cas de décès en Algérie, de gens qui avaient voulu venir au Canada. Systématiquement la réponse avait été non. Même si certaines personnes étaient prêtes à donner des garanties, même si le député était prêt à s'engager, même s'il s'agissait d'un businessman qui devait retourner dans son pays, il n'y avait rien à faire.

Il y a donc des ratés dans le système. Il y a des endroits un peu partout dans le monde où ça ne fonctionne pas du tout, absolument pas. Il n'est pas normal que, parce qu'un pays connaît des difficultés et qu'on pense que des gens n'y retourneront pas, les gens soient refusés systématiquement. Au contraire, quand il y a des difficultés, il faut que des facteurs et des considérations humanitaires jouent.

Évidemment, je comprends que vous appliquez une loi, que vous gérez une loi. Ce n'est pas vous qui l'avez rédigée. Vous vous conformez à ce qui est dans la loi. Ce n'est pas avec vous que nous devons tenir ce genre de débat.

La question que je veux vous poser est celle-ci: quel est le rôle de l'autorité ministérielle, lorsque vient le moment de déterminer quels citoyens de quels pays auront ou n'auront pas l'obligation d'avoir un visa? Tout à l'heure, vous avez dit que les fonctionnaires avaient pris la décision. Est-ce que ce sont les fonctionnaires qui décident pour qui le Canada va lever ou non l'obligation de détenir un visa, ou est-ce une décision qui, en définitive, relève de la ministre?

[Traduction]

M. Jeff LeBane: Le ministère examine la situation dans le pays. Il analyse les circonstances. On tient des réunions interministérielles. On invite souvent des fonctionnaires du ministère des Affaires étrangères, après quoi les fonctionnaires du ministère font une recommandation à la ministre.

C'est la ministre qui prend la décision finale, mais elle consulte souvent dans ces cas le ministre des Affaires étrangères.

[Français]

M. Réal Ménard: Une dernière question. Vous savez qu'il y a eu récemment beaucoup d'émoi autour de la question du Chili, parce qu'entre janvier 1995 et juin 1996, le gouvernement du Canada a levé unilatéralement l'obligation pour les Chiliens de détenir un visa. Cela a entraîné la venue de 3 000 Chiliens, dont 80 p. 100 se sont établis au Québec et dont très peu ont été acceptés par la CISR.

• 1650

Évidemment, c'est là une autre étape qui ne vous concerne pas du tout, et je le conçois. Mais cela veut dire que lorsque l'on décide de lever l'obligation de détenir un visa, il y a des conséquences; ce faisant, on crée des attentes et il se produit un afflux de gens au Canada.

Est-ce que la loi fait une obligation à la ministre de consulter les provinces lorsqu'on détermine les pays dont les ressortissants auront ou n'auront pas l'obligation de détenir un visa, ou si c'est une décision strictement fédérale?

[Traduction]

Mme Joan Atkinson: D'après le libellé actuel de la loi, et d'après la façon dont nous l'appliquons, il s'agit d'une décision du gouvernement fédéral. La loi n'oblige aucunement le gouvernement fédéral à consulter les provinces lorsqu'il s'agit de décider d'imposer à des gens l'obligation de détenir un visa de visiteur ou de lever cette obligation.

Le président: Monsieur McKay.

M. John McKay: Je vous remercie de cet échange. Je pense que nous faisons avancer les choses.

Je veux revenir à notre dernière conversation au sujet du trafic d'étrangers, et d'autres problèmes de cette nature, dont nous nous occupons.

J'ai demandé à mon personnel de trouver quelques dossiers qui, à mon avis, semblent donner un aspect humain à notre problème. C'est de ce point de vue que je préfère parler, plutôt que de toute la question du trafic d'étrangers, bien que je comprenne qu'il y a là une question de politique.

Une électrice est ici depuis 22 ans. Elle est citoyenne canadienne, tout comme son mari, sa mère et d'autres membres de sa famille élargie. Dernièrement, sa mère est tombée malade. La famille s'est réunie et a décidé de donner comme cadeau de Noël à la mère une visite surprise au Canada d'une autre soeur et d'un autre frère du Guatemala, le fils et la fille de la mère malade. Après toute une pile de paperasses et le dépôt de garanties—de sorte que maintenant la visite n'est plus une surprise—le frère a obtenu un visa, mais pas la soeur. Nos électeurs sont bouleversés et très surpris.

Il y a un deuxième dossier. La mère est très malade et veut voir sa soeur qui vit en Jamaïque. Le voyage est refusé parce que son revenu canadien est trop faible pour lui permettre de faire vivre une visiteuse pendant deux semaines. Le revenu de sa fille canadienne est de 1 700 $ toutes les deux semaines; on l'a signalé dans les documents. Le revenu du mari de la fille est de 64 000 $; on n'en a pas tenu compte. La mère, qui est maintenant confinée à un fauteuil roulant, a réservé un moyen de transport adapté pour lundi, afin d'apporter les documents à l'appui. C'est certainement un revenu suffisant pour faire vivre une personne pendant une visite de deux semaines.

De quelque point de vue qu'on regarde la chose, la décision semble tout à fait arbitraire. Je me trouve dans l'obligation de réunir des renseignements pour que le ministère revoie la décision, et je dois même écrire une lettre disant que j'offre une certaine garantie.

Je pratique le droit depuis maintenant 22 ou 23 ans et je n'ai jamais garanti quelque chose pour personne. Je ne le fais tout simplement pas, parce que ma garantie de référence, c'est comme le cas où un juge m'accuse d'outrage au tribunal pour avoir dit dans un affidavit une chose qui n'est pas vraie.

Mon bureau ne peut pas accepter un tel niveau de garantie. Je n'ai pas les ressources ni le désir voulus pour assurer un tel niveau de «garantie».

Je veux me tirer de ce dilemme. Je veux vraiment me sortir de ce dilemme. Je suis persuadé que vous le voulez également.

Il y a différents niveaux d'engagements qui peuvent être pris. Nous avons sauté un peu trop vite au concept de la caution.

Je me demande si vous avez réfléchi aux niveaux d'engagements que nos citoyens canadiens qui seraient les hôtes de ces visiteurs pourraient donner au ministère pour le satisfaire. Ces engagements n'élimineraient pas la nécessité de fournir des renseignements—ce n'est pas ce que je veux dire—mais ils satisferaient le ministère. On n'exigerait pas nécessairement le dépôt d'une garantie, mais cela représenterait, si vous voulez, une première étape dans un tel processus.

Je veux me retirer de ce triangle. Je veux que les rapports s'établissent entre le ministère, la personne qui fait l'invitation et le visiteur même. Ce sont eux qui peuvent constituer le triangle.

• 1655

Je veux vraiment me retirer de tout cela. Quels engagements sérieux pourraient être demandés? Vous pourriez faire monter l'engagement nécessaire en fonction de la garantie disponible, et le niveau de garantie pourrait changer. Avez-vous envisagé une telle façon de procéder?

Mme Joan Atkinson: Je vais répondre en premier. En ce qui concerne la question des engagements, mon premier commentaire serait que lorsque nous considérons des engagements dans le contexte d'une visite temporaire, c'est très différent de ce que nous envisageons dans le cas des immigrants.

Dans le cas des engagements pris pour un immigrant, on examine la situation financière des parrains éventuels, leur revenu, tous les éléments que vous avez mentionnés. Mais on examine ces éléments pour déterminer leur capacité de subvenir aux besoins des personnes qui viennent ici en vue de s'y établir en permanence.

Lorsque nous examinons exactement les mêmes types d'éléments en ce qui concerne le parrain éventuel d'un visiteur, c'est totalement différent. Nous leur demandons de nous montrer quelles garanties ils ont, combien d'argent ils ont, combien leur maison vaut, quel est leur revenu. Nous leur demandons de garantir les intentions de l'autre personne.

M. John McKay: Oui, je comprends qu'il est difficile de garantir les intentions de quelqu'un, parce que les intentions changent d'une journée à l'autre...

Mme Joan Atkinson: Justement.

M. John McKay: Les circonstances changent. Je le comprends, mais je vous demande s'il y a un faible niveau d'engagement... Vous effectuez votre analyse, et personne ne s'oppose à cela. Le bureau d'un député contribue ou non à l'analyse, selon le cas. Existe-t-il un niveau d'engagement qui permet qu'on puisse exercer un recours? La personne s'engagerait à s'assurer que le visiteur sera dans l'avion de retour dans son pays à l'expiration du visa. C'est assez simple. En cas de manquement à l'engagement, le ministère pourrait exercer un recours.

Je comprends que vous n'avez pas de garantie à ce moment-là. Mais le ministère pourra exercer un recours si le visiteur ne monte pas à bord de l'avion.

Mme Joan Atkinson: Allons même un peu plus loin. Disons que nous procédons ainsi et que nous exerçons un recours contre la personne qui avait pris un engagement. Nous avions permis à l'un de ses parents de venir visiter sa mère très malade, ou de venir assister aux funérailles d'un membre de sa famille. Disons que le visiteur ne part pas, mais présente une demande de statut de réfugié, ou quoi que ce soit. Le gouvernement fédéral va-t-il saisir la maison du résident, parce que c'est la garantie qui a été donnée pour cautionner les intentions du visiteur?

M. John McKay: Eh bien, je n'étais pas allé jusqu'à cette question de la garantie.

Mme Joan Atkinson: Mais si nous poursuivons le raisonnement jusqu'à sa conclusion logique, faisons-nous face à un dilemme de cette nature? Voulons-nous faire face à un dilemme de cette nature?

M. John McKay: Je me suis occupé pendant des années de recours fondés sur des obligations hypothécaires.

Le président: John, pouvez-vous...?

M. John McKay: Très bien, je vais préciser cette question.

Je serais parfaitement satisfait de voir le gouvernement fédéral exercer un recours parce que la personne en question a conclu un marché pour acheter une maison. La personne a trouvé un avocat pour faire une recherche de titre. La personne a conclu un contrat d'hypothèque, elle a fait toutes sortes de démarches afin de pouvoir posséder sa propre maison.

Mme Joan Atkinson: Mais la personne ne faisait pas tout cela en vue de cautionner les intentions de quelqu'un d'autre.

M. John McKay: Mais si on les force à...

Le président: Monsieur McKay.

M. John McKay: Je suis désolé, Rey.

Une voix: Oh, oh!

M. John McKay: Vous pouvez les faire penser spécifiquement à ce visiteur.

Le président: Je pense que nous devrions en rester là.

Monsieur Benoit.

M. Leon Benoit: J'aimerais obtenir une réponse à la question posée par M. McKay.

M. John McKay: C'est toujours angoissant lorsque les députés de l'opposition font preuve d'objectivité politique.

Des voix: Oh, oh!

M. John McKay: Eh bien, voyez-vous, nous devons remplir les deux rôles. Nous devons accomplir la tâche du gouvernement et ensuite celle de l'opposition.

Le président: Ce temps vous sera compté.

Des voix: Oh, oh!

M. Leon Benoit: Je veux avoir une réponse à la question de M. McKay.

Mme Joan Atkinson: Et la question était...?

M. Leon Benoit: C'était une question assez longue et décousue. Je comprends pourquoi elle vous donne un peu de difficulté.

M. John McKay: Je pense que c'est parce qu'il s'agit d'une façon de penser assez différente. Lorsqu'on prend un engagement, cet engagement a force de loi. L'engagement qui a force de loi entraîne des conséquences et des recours. C'est un recours que le gouvernement doit avoir le courage d'exercer.

• 1700

Et il ne doit pas accepter de piètres excuses comme: «Je ne savais pas vraiment ce qu'ils faisaient ici.» Je suis persuadé que vous avez toute une liste d'excuses que vous avez entendues à mille reprises. Lorsque je m'occupais de recours en droit fondés sur une obligation hypothécaire, j'entendais souvent dire: «Je ne savais pas ce que je signais, ou je ne connaissais pas les taux d'intérêt, ou encore je ne savais pas que je devais faire des versements mensuels.» Et cela pour arrêter les banques d'exercer leurs recours.

M. Leon Benoit: Je voulais moi aussi poser des questions au sujet des engagements. Vous avez dit tout à l'heure que lorsqu'il s'agit d'un engagement au sujet d'un visiteur temporaire, plutôt que pour quelqu'un qui veut venir en permanence, vous examiniez la situation différemment. Pourriez-vous expliquer rapidement en quoi consistent exactement ces différences?

Mme Joan Atkinson: Lorsque je parle du parrainage ou d'un engagement en ce qui concerne un immigrant, je veux évidemment parler de la catégorie de la famille. Le principe qui sous-tend l'immigration de membres de la catégorie de la famille est qu'il y a un résident ou un citoyen canadien désirant qu'un membre de sa famille vienne vivre en permanence avec lui au Canada—un conjoint, des enfants à charge, un parent, un grand-parent, un orphelin, un frère, une soeur, tous les membres de la famille qui entrent dans la catégorie de la famille.

L'engagement pris est une garantie que le parrain au Canada subviendra aux besoins essentiels—soit les soins, les aliments et l'appui financier—de la personne qui vient au Canada pour s'y établir en permanence. L'engagement que la personne prend est donc d'être responsable du bien-être de la personne au Canada.

M. Leon Benoit: Bien, mais pourquoi l'engagement devrait-il être moindre dans le cas d'une personne qui parraine un visiteur?

Mme Joan Atkinson: Dans le cas de la personne qui veut «parrainer» un visiteur, nous ne voulons pas nécessairement savoir si elle a les ressources financières nécessaires pour s'occuper du visiteur et subvenir à ses besoins. Ce que nous voulons en réalité, c'est une garantie que la personne en question quittera le Canada. Si je comprends bien ce dont nous parlons ici, vous voulez que nous demandions le dépôt d'une garantie pour assurer que le visiteur a bien l'intention de quitter le Canada à la fin de son séjour. C'est très différent.

M. Leon Benoit: Comment pourriez-vous le savoir? On ne fait pas de suivi. Comment pourriez-vous vraiment savoir si la personne part ou non? C'est à cela que je pensais en posant ma question. C'est un engagement plutôt sérieux, et vous n'avez aucun moyen de savoir si l'engagement a été respecté ou non.

M. John McKay: S'il s'agit d'un engagement en bonne et due forme, peu vous importe.

Mme Joan Atkinson: Il faudrait quand même que nous sachions si les visiteurs ont quitté ou non le pays, afin de pouvoir déterminer si nous devons exercer un recours. Mais je vous rappelle la statistique que nous avons donnée plus tôt, selon laquelle le pourcentage de personnes qui ont reçu un visa de visiteur et qui demandent ensuite le statut de réfugié est de 0,002 p. 100.

M. Leon Benoit: Mais ce ne sont pas eux qui me préoccupent. Cela me semble franchement un chiffre raisonnable, sur 700 000 cas environ, mais vous n'avez aucun moyen de savoir combien parmi ces quelque 700 000 visiteurs par année quittent vraiment le pays.

Mme Joan Atkinson: Nous présumons, d'après ces statistiques, que la plupart d'entre eux le font.

M. Leon Benoit: Mais pourquoi? Il y a des visiteurs qui viennent certainement avec l'intention d'établir une base permanente dans notre pays—je veux parler par exemple de membres du crime organisé. Et les gens qui participent à des activités criminelles savent sûrement comment très bien utiliser le système. Ils sauront certainement comment le faire si vous n'avez absolument aucun moyen de savoir s'ils partent ou non.

Mme Joan Atkinson: Je l'ai déjà dit, nous n'exerçons pas de contrôle de sortie. Nous ne vérifions pas les allées et venues des visiteurs au Canada et nous ne savons pas à quel moment ils quittent le pays. Mais il faut faire énormément d'efforts pour rester clandestinement au Canada et s'y établir sans passer par le processus de reconnaissance du statut de réfugié. Ce n'est pas facile.

M. Leon Benoit: Je veux aborder la question sous un angle un peu différent.

Le taux de visiteurs qui obtiennent un visa est d'environ 90 p. 100 au Canada. Comment cela se compare-t-il avec le taux d'acceptation aux États-Unis ou en Australie?

M. Jeff LeBane: Nous n'avons pas de telles statistiques.

M. Leon Benoit: Vous devez les avoir examinées, cependant.

Mme Joan Atkinson: Oui. Nous verrons si nous pouvons vous les fournir.

M. Leon Benoit: Vous devez avoir une assez bonne idée. Même si vous n'avez pas les renseignements exacts, j'aimerais avoir une approximation, étant donné que vous travaillez constamment avec de tels chiffres. Le Canada a-t-il un taux d'approbation plus élevé ou plus faible?

Mme Joan Atkinson: Je ne pense pas que nous le sachions vraiment. Nous vous donnerons une réponse plus tard.

M. Leon Benoit: Je suis un peu surpris que vous ne le sachiez pas comme ça.

Mme Joan Atkinson: Nous ne connaissons pas les chiffres par coeur.

• 1705

M. Leon Benoit: Bien. Cela ne me facilite pas les choses pour mes autres questions.

Je voulais avoir des renseignements sur l'écart entre les taux d'acceptation pour différents pays, pour quels pays le taux d'acceptation est le plus faible; et parmi les pays pour lesquels un visa de visiteur est exigé, quel est le taux d'acceptation le plus élevé, par exemple? Nous avons la liste ici, mais je voudrais connaître les taux pour les pays dont le nom ne figure pas sur la liste.

M. Jeff LeBane: Si vous le permettez, on a fait une observation tout à l'heure au sujet de la Chine, mentionnant que le taux de refus était très élevé. Le taux de refus pour la Chine est d'environ 13 p. 100 de toutes les demandes présentées, et pour l'Inde, il est de 26 p. 100.

M. Leon Benoit: Bien, je crois que nous avons les renseignements concernant les pays dont le taux est le plus élevé.

M. Jeff LeBane: Et ceux dont le taux est le plus bas?

M. Leon Benoit: Je voudrais connaître les taux d'acceptation dans le cas des pays dont le nom ne figure pas sur la liste. Je m'intéresse particulièrement aux pays pour lesquels le taux de rejet est extrêmement élevé, et j'aimerais savoir pourquoi.

Le président: Vous voulez donc savoir quel pays a le taux de rejet le plus élevé.

M. Jeff LeBane: C'est le Bangladesh.

M. Leon Benoit: Pourquoi?

M. Jeff LeBane: C'est parce que nous savons par expérience qu'un nombre important de personnes qui viennent ici restent dans la clandestinité, font l'objet d'une ordonnance de renvoi, ou demandent le statut de réfugié.

En ce qui concerne le pays numéro deux, par exemple, Colombo, ou plutôt le Sri Lanka, notre taux de refus est très élevé. Il y a de gros problèmes de trafic d'étrangers liés au Sri Lanka. En ce qui concerne les revendications du statut de réfugié au Canada, le Sri Lanka a le taux le plus élevé...

M. Leon Benoit: Qu'en est-il des anciens pays du Bloc soviétique, et de la Russie en particulier?

M. Jeff LeBane: Le taux de rejet de demandes provenant de Moscou, ou de la Russie en général, est de 12 p. 100.

L'un des défis sur le plan des statistiques, cependant—et c'est un problème avec lequel nous nous débattons—vient du fait que dans le cas d'un bureau comme la Nouvelle-Delhi, par exemple, nous supposons que la grande majorité des requérants sont Indiens, mais en réalité des personnes pourraient y présenter une demande à partir d'Islamabad ou de Colombo. Et dans le cas des grands bureaux comme celui de Londres, en Angleterre, lorsque nous disons que le taux de refus est de 5 p. 100, par exemple, il faut se rappeler que les Britanniques n'ont pas besoin de visa pour venir au Canada; il s'agit donc de ressortissants d'autres pays du monde. Il faut faire preuve de prudence dans le cas des statistiques.

M. Leon Benoit: Je remarque qu'à New York, par exemple, il y a eu 40 000 demandes, dont 37 000 ont été acceptées. Il ne s'agit évidemment pas d'Américains.

M. Jeff LeBane: Vous avez raison.

M. Leon Benoit: Je suis surpris...

Le président: Monsieur Benoit, je dois vous interrompre.

Monsieur Telegdi.

M. Andrew Telegdi: Pour continuer dans la même veine, je pense que M. McKay sait, d'après son expérience devant les tribunaux, qu'il existe différents types d'engagements et qu'on demande différents niveaux de garantie. Si quelqu'un offre une maison à titre de garantie, celle-ci peut être saisie.

Il serait utile, à mon avis, que diverses options existent, dans les cas où quelqu'un vient—et cette personne est habituellement parrainée par plusieurs autres; il s'agit habituellement d'un groupe formé de divers membres de la famille—et ces gens prendraient ensemble un certain type d'engagement, mais effectueraient également un dépôt, de sorte que nous saurons vraiment quand le visiteur quittera le pays, parce que les parrains pourront alors reprendre leur dépôt, de sorte que nous serions au courant. Établissons un processus qui ne coûte rien aux contribuables, c'est-à-dire que si le visiteur décide de présenter une demande de statut de réfugié, nous pourrions avoir ainsi une garantie financière semblable à celle que nous avons dans le cas des membres de la catégorie de la famille.

Il serait utile d'avoir une telle option, car elle contribuerait à résoudre certains de nos problèmes. C'est un problème qui survient régulièrement dans ma région. Il y a des gens qui sont tout à fait prêts à faire toutes sortes de choses pour amener ces personnes ici, parce qu'ils savent qu'elles vont retourner dans leur pays. Ils pensent que les décisions sont rendues de façon arbitraire et sont erronées. Ils n'iront pas jusqu'à miser leur ferme, mais ils devraient avoir le droit de faire ce qu'ils veulent, à condition de connaître tous les risques auxquels ils s'exposent.

• 1710

M. Jeff LeBane: Pour offrir une telle solution, il faudrait peut-être redéfinir de façon significative ce qu'est un visa de visiteur, en établissant peut-être une sous-catégorie de visite par des membres de la famille, en exigeant un affidavit, et tout pourrait être bien spécifié. Il faudrait cependant faire bien comprendre clairement que le processus n'inclut pas de droit d'appel. Il peut y avoir des cas extrêmes de compassion, mais il s'agit là d'un remaniement très fondamental de définitions acceptées depuis longtemps pour les visas, en ajoutant par exemple une sous-catégorie pour les membres de la famille, ce qui représente un changement très important dans la loi.

M. John McKay: Est-ce faisable par voie de règlement, ou faudrait-il une initiative législative?

Mme Joan Atkinson: Je dirais qu'il faudrait modifier la loi et, comme l'a dit M. LeBane, faire une révision fondamentale de la façon dont nous définissons le visa de visiteur. Je pense que l'établissement d'un tel processus requerrait des ressources importantes au gouvernement. Il y a certainement de grandes questions en jeu.

Le président: Monsieur Telegdi, avez-vous terminé?

M. Andrew Telegdi: Je ne voudrais pas que tout à coup tous les visiteurs soient mis dans cette catégorie. Je veux une catégorie spéciale pour ces personnes à qui l'on ne permet pas d'entrer sans que quelqu'un de ce côté-ci se porte garant pour elles.

M. John McKay: Dans 90 p. 100 des cas, le processus fonctionne.

M. Andrew Telegdi: Oui, mais je ne veux pas que tout à coup ces 90 p. 100 de visiteurs utilisent le même processus.

M. John McKay: Non, c'est de cela qu'il parle. Il parle de...

Mme Joan Atkinson: N'oublions pas que sur les 10 p. 100 de cas de refus, il y a également les gens qui sont refusés non seulement pour une question de bonne foi, mais aussi parce qu'il existe des préoccupations réelles et légitimes en matière de sécurité, de criminalité, de santé, par exemple. M. LeBane l'a dit, il faudrait essayer de définir une catégorie spéciale de visa pour les membres de la famille, ce qui nous obligerait à repenser fondamentalement notre approche.

Le président: Le président aimerait poser quelques questions pour la gouverne des membres.

M. John McKay: On ne vous en accorde pas la permission.

Des voix: Oh, oh!

Le président: Êtes-vous convaincus que les agents des visas dans le même bureau ont une approche uniforme de la façon dont ils s'occupent des demandes des visiteurs?

M. Jeff LeBane: Oui, j'en suis convaincu. Dans les gros bureaux comme celui de Delhi et de Hong Kong, nos agents font une rotation et occupent différents postes de façon à être exposés à tous les aspects du programme. La durée moyenne d'une affectation à l'étranger est de trois ans. Nous aimons leur faire faire la rotation, car ce n'est pas bon pour l'agent et ce n'est pas bon pour le programme. Lorsqu'il y a ce que nous appelons des problèmes au niveau de la qualité de la préoccupation, le gestionnaire du programme examine au besoin le rendement de l'agent. Comme nous l'avons dit, lorsqu'un visa de visiteur est refusé, monsieur le président, nous demandons à un autre agent de passer une seconde entrevue s'il y a une deuxième demande; lorsqu'il y a une troisième demande, c'est un troisième agent qui s'en occupe. Nous tentons donc de nous assurer que tous les agents sont exposés le plus possible à tous les aspects du programme, qu'ils travaillent à tous les aspects du programme et que le gestionnaire du programme—et dans les bureaux plus importants, le gestionnaire adjoint du programme—surveille leur travail.

Le président: Étant donné que vos bureaux à l'étranger ont reçu à plusieurs reprises des demandes au sujet de cette question et à la lumière des préoccupations qui ont été soulevées par les députés au cours de nos entretiens d'aujourd'hui, est-ce que votre bureau a songé à fournir une directive sur la procédure, que vous pourriez nous remettre par écrit pour nous aider à mieux représenter les intérêts de ces gens qui demandent notre aide?

M. Jeff LeBane: Si cela peut vous aider, la première question que je poserais à un commettant serait la suivante: «Êtes-vous certain que votre parent, votre client, a fourni tous les renseignements possibles? Est-il au courant des renseignements que vous avez en tant que commettant?» Voilà une façon de vous aider.

• 1715

Une deuxième façon de vous aider, si vous ne savez absolument pas pourquoi la demande a été refusée dans le cas que vous citez, je m'adresserais au gestionnaire du programme et je lui dirais: «J'ai un commettant qui a présenté une demande. Voici les faits dont je dispose dans cette affaire. Je ne comprends absolument pas pourquoi il n'a pas obtenu de visa. J'aimerais avoir vos commentaires à ce sujet—spécifiques ou généraux—ou est-ce que vous avez envisagé d'autres options?»

Le président: Pour ce qui est de l'uniformité, j'ai posé une autre question à ce sujet. L'autre question que je voudrais poser est la suivante: êtes-vous certains que les bureaux à l'étranger ont besoin d'une certaine documentation spécifique dont tous les autres bureaux ont besoin?

M. Jeff LeBane: Lorsqu'une personne fait une demande de visa de visiteur, on l'invite à fournir le plus de preuves possible pour appuyer sa demande, car le fardeau de la preuve lui incombe.

Dans les lettres que nous envoyons dans le monde entier, nous disons que les documents suivants pourraient être utiles: une lettre d'invitation et des relevés bancaires. Le fait que l'on fournisse ou non ces documents ne mène pas directement au refus du visa; ce sont des documents que nous invitons les demandeurs à présenter pour appuyer leur demande.

Le président: Est-ce que cette demande même et le fait d'avoir produit la documentation demandée ne créent pas un certain cynisme au sujet du processus?

Des commettants nous disent que lorsqu'ils fournissent un affidavit d'appui à la lettre d'invitation qu'on leur demandait de fournir, leur demande est quand même refusée. Avez-vous examiné les conséquences négatives de telles demandes, qui, en même temps, ne jouent pas un rôle crucial?

Mme Joan Atkinson: Encore une fois, je pense que nous devons revenir aux principes et au fait que le fardeau de la preuve incombe au client, et à l'autre côté de la médaille, c'est-à-dire qu'il incombe à l'agent des visas de tenir compte de toutes les preuves présentées par le client.

Il y a donc une liste de documents que les gens sont invités à présenter avec leur demande. Il incombe à l'agent des visas d'examiner toute la documentation qui est présentée comme preuve et de prendre une décision en se fondant sur toute cette preuve documentaire, plus, dans de nombreux cas, une entrevue personnelle, une entrevue face à face. N'oublions pas que dans le traitement d'une demande de visa de visiteur, dans bien des cas il y a une entrevue face à face avec le décideur, de façon à ce que le client ait la possibilité de présenter sa preuve documentaire et tout son dossier, et de façon à ce que l'agent des visas ait la possibilité d'éclaircir toute information qui est fournie dans cette documentation, de poser des questions supplémentaires et de tenir compte de tous ces renseignements avant de prendre sa décision.

Le président: Quelle est la valeur d'un affidavit d'appui notarié par un commissaire aux affidavits ou par un avocat ou un notaire public lorsque le contenu de ce document ne peut être exécutoire?

M. Jeff LeBane: Tout d'abord, l'affidavit établit qu'il y a une personne apparentée au Canada et fournit des renseignements au sujet de cette personne.

N'oubliez pas que l'agent qui travaille à l'étranger rencontre des milliers et des milliers de personnes au cours d'une année dans un bureau achalandé. Cela l'aide à prendre la décision la plus éclairée possible.

Le président: Est-ce qu'il faut la signature d'un avocat sur cet affidavit?

M. Jeff LeBane: Non.

Le président: Très bien.

Les membres ont déjà posé cette question de différentes façons, et je vais donc moi aussi poser la question à Mme Atkinson et à Mme Tromp: est-il nécessaire de faire une étude? Je ne demande pas si nous devrions ou non faire une étude; je demande s'il est valable de faire une étude et d'examiner les cas qui ont été refusés par le bureau des visas soit la première fois, soit la deuxième fois, soit la énième fois, et qui, à la suite d'observations présentées par un député, se voient accorder soit un visa de visiteur normal, soit un permis ministériel, et combien ne respectent pas la promesse. Est-ce qu'il vaut la peine à votre avis de faire une telle étude?

Deuxièmement, pour que cette étude soit encore plus valable sur le plan de la recherche, il faudrait savoir—je pense que M. Benoit a posé la question—en fait combien de ces personnes, aidées par les bureaux des visas, ont pu entrer au pays sans représentation de la part de tous les autres, et ce qui leur est arrivé. Cela montrera la qualité et la certitude de la subjectivité qui existe et qui continuera d'exister.

• 1720

Est-ce qu'à votre avis il serait utile de faire une telle étude pour assurer une plus grande objectivité de la subjectivité, si je puis m'exprimer ainsi?

Mme Joan Atkinson: Eh bien, je pense que si nous avions le genre de système qui nous permettrait d'aller chercher ces renseignements, il vaudrait la peine de faire une telle étude. Ce que je crains, c'est, comme nous en discutions avec M. Benoit, que nous n'ayons pas les systèmes qui nous permettent d'extraire ces renseignements.

Le président: C'est exact. Écoutez, tout d'abord...

Mme Joan Atkinson: Nous avons cependant la capacité de savoir lorsque nous avons émis un visa de visiteur si cette personne a demandé le statut de réfugié. Ces renseignements sont disponibles, et ils sont renvoyés au bureau qui a émis le visa afin que l'on puisse examiner la décision qui a été prise dans le cas en question et voir s'il y a des leçons à tirer. Souvent, nous nous apercevons qu'il n'y a pas de leçon générale à tirer d'un cas particulier. Comme toujours, il s'agit d'un cas individuel qui a été décidé en toute objectivité dans des circonstances précises. Nous avons fait la meilleure évaluation possible de l'intention de cette personne à ce moment-là, et l'intention a changé, ou nous nous sommes trompés dans l'évaluation de l'intention de cette personne.

Le président: Mais vous seriez d'accord pour dire—et je crois vous l'avoir entendu dire—que lorsqu'on constate une certaine tendance dans le traitement des cas dans un bureau des visas ou de la part d'un agent dans un bureau donné, lorsqu'on a de telles données devant soi, les experts en méthodologie de la recherche vous diront qu'il est possible d'aller chercher là de nombreux renseignements qui permettront d'améliorer le système.

Or, vous y avez fait allusion et vous avez dit qu'il n'y avait pas de structure à l'heure actuelle. Ma première question, c'était... J'ai dit au début de ma question: «S'il vaut effectivement la peine de faire une telle étude.» Nous pouvons progresser s'il vaut la peine de faire une telle étude. Ce n'est peut-être pas faisable du point de vue des coûts, etc., mais si cela vaut la peine, alors nous devons examiner la prochaine étape: c'est faisable, etc.

Êtes-vous d'accord avec moi à cet égard?

Mme Joan Atkinson: Eh bien, je dirais que de façon générale nous sommes certainement en faveur d'un contrôle de la qualité générale au sein du programme d'immigration. Il y a naturellement des problèmes de ressources, des problèmes au niveau des systèmes, etc., mais de façon générale en principe, oui, nous avons dit que les études d'assurance de la qualité sont quelque chose que nous voulons faire.

Le président: Je m'arrête donc ici pour laisser les autres poser des questions. N'oubliez pas, cependant, que les témoins peuvent revenir demain. Est-ce que nous aurons besoin qu'ils reviennent demain?

M. Leon Benoit: Oh, oui.

Le président: Je pense que vous avez une invitation permanente.

Qui est le suivant? Monsieur McNally.

M. Grant McNally: Merci, monsieur le président.

Monsieur LeBane, vous avez dit que nous savons que des gens deviennent clandestins. Je pense que c'est une observation que vous avez peut-être...

M. Jeff LeBane: Certaines personnes.

M. Grant McNally: Est-ce que vous tirez cette conclusion en vous fondant sur le fait que certaines personnes présentent des demandes de statut de réfugié, ou est-ce qu'il y a d'autres indicateurs qui révèlent que des gens deviennent clandestins?

M. Jeff LeBane: Il s'agit en partie d'informations anecdotiques, mais certaines enquêtes révèlent qu'il y a des gens qui travaillent dans des restaurants sans permis, sans avoir un statut légal au Canada.

M. Grant McNally: Donc ces gens sont découverts d'une autre façon que par le système d'immigration?

M. Jeff LeBane: D'autres façons, oui. Parfois des informateurs disent: «Êtes-vous au courant que M. X travaille illégalement?»

M. Grant McNally: Très bien. J'ai une autre question. Vous avez mentionné que pour qu'un pays soit ajouté à la liste des visas obligatoires il était nécessaire d'avoir constaté un certain niveau d'abus du système de la part de gens provenant de cette région, ce qui semble indiquer qu'il y a un niveau acceptable d'abus avant qu'on en arrive à un niveau inacceptable. Comment arrive-t-on à la décision de passer du point A au point B, d'ajouter le nom d'un pays à la liste des pays pour qui on exige un visa?

Mme Elizabeth Tromp: Je ne pense pas qu'il y ait une réponse simple à cette question. Il n'y a pas de chiffre magique qui déclenche une telle décision, car chaque cas doit être évalué dans son contexte individuel pour déterminer exactement quelle est la situation et quels autres facteurs, quels autres critères entrent en ligne de compte, et si l'imposition d'un visa serait justifiée.

M. Grant McNally: C'est donc une seule personne qui prend cette décision. Comme vous l'avez déjà mentionné, c'est quelqu'un du ministère des Affaires étrangères et du ministère de l'Immigration. Ensemble, ces personnes déterminent s'il y a un problème. Il n'y a cependant pas de processus clair en place pour préciser de quelle façon on arrive à cette décision; c'est presque comme si plutôt que d'évaluer chaque cas individuel on décide au cas par cas quel pays sera ajouté à la liste.

• 1725

Mme Elizabeth Tromp: Non, encore une fois il faudrait un nombre important... Nous surveillons les choses et nous avons des systèmes qui nous permettent de suivre de près...

M. Grant McNally: Vous mentionnez le mot «important» encore une fois. J'essaie de vous faire dire ce qui est un nombre important. Pour que cette décision soit prise, même si c'est une décision en quelque sorte subjective, il semble y avoir... J'espère que quelqu'un a une idée de ce qui constitue un nombre «important». Quelle est la définition opérationnelle de ce terme?

M. Jeff LeBane: Ce serait un afflux considérable de personnes provenant de pays dont on n'exige pas de visa de visiteur—un afflux important, imprévu et soudain de personnes, comme dans le cas du Chili, comme dans le cas, l'an dernier, de la République tchèque.

M. Grant McNally: Il semblerait cependant que si on levait l'exigence du visa, il serait alors plus facile pour une personne d'entrer au Canada. Il y aura donc évidemment sans aucun doute un afflux de personnes provenant de ce pays pour lequel l'exigence du visa obligatoire a été levée. Cela ne peut certainement pas être le seul facteur déterminant.

Mme Joan Atkinson: Non, je pense qu'on parle ici d'un afflux de demandes de statut de réfugié de mauvaise foi.

M. Grant McNally: Très bien; donc le nombre de décisions...

Mme Joan Atkinson: Par rapport à un cas.

M. Grant McNally: Enfin, madame Tromp, vous avez mentionné que vous étiez au courant du trafic d'étrangers et vous avez dit que vous étiez au courant que cela se faisait. Vous avez dit, je pense, que les gens payaient jusqu'à 50 000 $. Savez-vous si cette pratique est très répandue, et est-ce que votre ministère a de l'information au sujet de ce très grave abus du système?

Mme Elizabeth Tromp: Il s'agit d'un abus très grave du système. C'est un problème mondial, et c'est une priorité pour notre ministère et pour le gouvernement.

Nous travaillons en très étroite collaboration avec d'autres pays pour mettre en commun l'information et avec nos propres systèmes de renseignements pour déterminer la migration illégale de gens, leurs mouvements et leurs déplacements importants, et pour mieux cibler les passeurs grâce à nos activités d'interdiction.

Nous travaillons par ailleurs sur la scène multilatérale—par exemple, avec les Nations unies. À l'heure actuelle, nous travaillons très activement à élaborer deux protocoles aux termes de la Convention des Nations unies sur le crime organisé—un sur le trafic d'étrangers et l'autre sur le trafic des femmes et des enfants. Nous sommes très actifs dans ce domaine.

M. Grant McNally: Je pense que nous avons entendu parler des interceptions l'an dernier, et j'ai parlé à certains agents de la GRC qui y ont participé, ce qui est une façon très positive de... Il me semble que vous nous dites aujourd'hui que ce qui est le plus avantageux sur le plan du processus, c'est d'intervenir au début en s'assurant qu'il y a des ressources disponibles avant que ces gens arrivent au Canada, car il devient très complexe et très difficile de renvoyer quelqu'un si cette personne n'est pas jugée comme étant admissible au Canada.

Quels sont les programmes d'interception qui sont en place à l'heure actuelle? Je sais que nous avons entendu parler du programme de deux semaines à Kuala Lumpur. Y a-t-il des programmes d'interception régulièrement prévus à des endroits particuliers pour une durée particulière?

Mme Elizabeth Tromp: Tout d'abord, nous avons un réseau de contrôleurs de l'immigration...

M. Grant McNally: Est-ce 12 contrôleurs ou 20?

Mme Elizabeth Tromp: Non, il y en a plus que cela. Il y en a 27.

M. Grant McNally: Dans le monde entier, de sorte que dans les 79 bureaux...

Mme Elizabeth Tromp: Il y a 27 contrôleurs de l'immigration qui ont chacun la responsabilité d'une région spécifique. Ils doivent travailler en étroite collaboration avec les lignes aériennes sur le plan de la formation et de l'interception, et pour reconnaître les documents frauduleux ou les documents qui ont été faussés d'une façon ou d'une autre.

Ils ont beaucoup de succès à cet égard et sont très actifs, et en fait un certain nombre d'autres pays suivent maintenant cet exemple et sont en train de mettre sur pied leur propre réseau.

M. Grant McNally: Combien de plans d'interception sont prévus pour l'an prochain? Avez-vous décidé que pour l'année prochaine vous auriez tant de programmes d'interception dans tant de régions ou tant de...

Mme Elizabeth Tromp: En plus de la formation permanente en interception qui est offerte par nos contrôleurs de l'immigration, nous avons par ailleurs, je suppose, pris des initiatives d'interception spécifiques ou entrepris des activités spécifiques en ciblant un endroit bien précis, en allant à l'étranger et en travaillant avec les lignes aériennes à un endroit particulier où il y a eu un problème important.

• 1730

Le président: Je vais permettre à M. Benoit de poser une petite question si la réponse est courte.

M. Leon Benoit: C'est une question complémentaire à celle qu'a posée M. McNally.

Vous savez que des gens sont prêts à payer 50 000 $. Je me demande d'où vient ce chiffre. Il doit y avoir une raison pour laquelle vous avez parlé de 50 000 $. Je me demandais tout simplement d'où provient ce chiffre et comment vous le connaissez.

Mme Elizabeth Tromp: Encore une fois, c'est à partir de nos efforts pour chercher des renseignements. Nous obtenons ces informations au moment de mettre la main sur des passeurs ou des particuliers. Souvent ces renseignements sont de nature anecdotique; la personne explique comment elle est arrivée au Canada et ce qu'elle a fait pour se rendre ici. Par exemple, une personne qui arrive sans documents explique qu'elle a donné ses documents à telle ou telle personne. Parfois elle nous donne le nom de cette personne, parfois elle ne le donne pas, et peut-être mentionne-t-elle le montant qu'elle a payé. Donc, souvent nous obtenons ces renseignements des clients, des passeurs et d'autres sources.

Le président: J'aimerais lever la séance et vous demander de revenir demain. Comme vous le voyez, les membres s'intéressent beaucoup à cette question.

Au nom du comité, je tiens à vous remercier d'être venus témoigner.

Quand vous reviendrez demain, je ne vous demanderai qu'une chose: pourriez-vous nous donner la liste des pays qui ont les taux de refus les plus élevés—les cinq premiers ou les dix premiers—ainsi que les taux de refus eux-mêmes, si possible?

Je rappelle aux membres du comité que la réunion aura lieu demain à 9 heures dans la salle 362 de l'édifice de l'Est.

Merci beaucoup.

La séance est levée.