Passer au contenu
Début du contenu

CHER Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain

STANDING COMMITTEE ON CANADIAN HERITAGE

COMITÉ PERMANENT DU PATRIMOINE CANADIEN

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 16 février 1999

• 1107

[Français]

Le président (M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.)): Je déclare ouverte la réunion du Comité permanent du patrimoine canadien, qui siège aujourd'hui pour effectuer une étude du projet de loi C-48, Loi concernant les aires marines de conservation.

[Traduction]

Nous étudions aujourd'hui le projet de loi C-48, Loi concernant les aires marines de conservation.

Notre témoin ce matin, du Fonds mondial pour la nature, est M. Josh Laughren, qui en est le directeur principal; et, représentant le NMCA Feasibility Study Advisory Committee, nous avons

[Français]

M. John Melindy, coordonnateur de projets,

[Traduction]

ainsi que M. Quinton et M. Marc Kielley, qui ont comparu devant nous la semaine dernière.

À vous de parler. Nous commencerons par M. Laughren, que je prie de se limiter à une quinzaine de minutes afin que les autres intervenants puissent prendre la parole et qu'il y ait du temps pour que les membres du comité posent des questions.

M. Josh Laughren (directeur principal, Fonds mondial pour la nature): Bien sûr.

Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, de l'occasion qui nous est donnée de comparaître aujourd'hui.

D'abord, parlons un peu de ce que nous sommes. Le Fonds mondial pour la nature est le plus grand organisme de conservation au Canada. Il fait partie d'un organisme mondial ayant des programmes et des bureaux dans plus de 90 pays et comptant plus de 4,7 millions de partisans. Notre principal mandat est la conservation de la diversité biologique.

FMN Canada administre actuellement nos travaux au moyen de quatre programmes: les espèces en péril, les espaces en danger, les travaux de toxicologie et notre programme international. Certains d'entre vous connaissent peut-être notre programme sur les espaces en danger. Il a été lancé en 1989, pour établir, d'ici à l'an 2000, un réseau représentatif de zones terrestres protégées et, d'ici à l'an 2010, un réseau de zones marines protégées. Le programme des espaces en danger est profondément ancré aux niveaux régional et communautaire; il s'appuie sur des coordonnateurs dans chaque province et territoire, oeuvrant à la création de zones protégées, tant marines que terrestres, à l'échelle locale et avec l'appui des collectivités.

• 1110

Le Fonds mondial a une longue expérience en matière de conservation marine. Depuis 15 ans, nous appuyons la collectivité de Clyde River, de la Terre de Baffin dans ses tentatives d'établir une aire protégée pour les baleines boréales à Igaliqtuuq, ou Isabella Bay. Nous avons participé activement à la prise d'un engagement visant à établir un parc marin à Gwaii Haanas en 1989 et nous continuons d'être actifs dans cette région aujourd'hui. Nous participons également de très près au processus visant à protéger le Sable Gully de la plate-forme Scotian.

Depuis un bon nombre d'années, le Fonds mondial finance des initiatives locales et communautaires liées à la conservation marine. Nous nous sommes engagés à long terme à travailler avec les collectivités, le secteur industriel, les gouvernements et les premières nations pour mener à bien l'établissement d'un réseau d'aires marines protégées.

FMN Canada appuie en principe le projet de loi C-48, outil jugé nécessaire et tardif en matière de conservation marine. Toutefois, notre expérience des travaux relatifs aux aires protégées nous porte à croire que quelques amendements cruciaux seront nécessaires pour assurer que le projet de loi respecte ses objectifs en matière de conservation.

Commençons par dire pourquoi nous appuyons le projet de loi en principe. Le meilleur moyen de faire cela, c'est de parler de certaines des préoccupations qui ont été soulevées jusqu'à présent, tant à la Chambre des communes qu'autour de cette table. Je présenterai ensuite ce que je considère être les principaux éléments positifs de la loi, et je passerai ensuite à nos principales sources de préoccupation.

Tout d'abord, on a affirmé que le projet de loi C-48 est inutile, qu'il fait double emploi, et qu'il vaudrait mieux laisser tout cela à la Loi sur les océans. Parlons-en un peu; je ne suis pas du tout d'accord. Je pense que chaque programme du ministère des Pêches et des Océans, du Service canadien de la faune et de Parcs Canada joue un rôle différent et important en matière de conservation marine. Le Service canadien de la faune établit principalement des aires de protection des oiseaux marins et, à l'occasion, des mammifères marins. Le ministère des Pêches et des Océans a pour mandat d'établir des zones marines protégées pour diverses raisons, et principalement pour protéger des choses essentielles telles que l'habitat d'espèces en péril, d'extinction, les frayères et certaines caractéristiques physiques uniques. Parcs Canada est le seul organisme ayant vraiment pour mandat de conserver de grandes aires représentatives des régions marines canadiennes de vaste étendue, pour assurer que les générations futures puissent profiter de toute la diversité marine du Canada.

La Loi sur les océans ne visait pas éliminer l'intervention d'autres ministères dans les milieux marins, mais plutôt à établir des rôles de leadership et de coordination pour assurer que les ministères n'interviennent qu'après s'être concertés. Prétendre que la Loi sur les océans signifie désormais que Parcs Canada n'a pas le mandat d'intervenir en milieu marin, c'est simplement mal interpréter la signification de cette loi. En fait, je pense que Parcs Canada a fait beaucoup de travail pour éviter les doubles emplois dans le projet de loi C-48, et qu'il faut l'en féliciter. La réglementation des pêches, la navigation et la sécurité maritime ont toutes été laissées aux ministres appropriés.

Dans ce projet de loi, on déploie des efforts sans précédent pour reconnaître la nécessité de s'accorder avec d'autres ministères, ministres et organismes, d'autres sphères de compétence ainsi qu'avec les premières nations. Les paragraphes 9(1), 10(1), 11(1), 11(2) et 11(3) prévoient des consultations avec des organismes, des collectivités côtières et de pêche ainsi qu'avec le public, pour l'élaboration, la mise en oeuvre et l'examen des plans de gestion. Cela ne représente pas la volonté d'un ministre de s'accaparer de certains pouvoirs. Selon moi, ce projet de loi révèle une volonté sincère de collaborer avec les autres ministères et toutes les parties concernées.

Le deuxième reproche que l'on fait au projet de loi, c'est que Parcs Canada n'a ni le mandat, ni la capacité ou les connaissances nécessaires pour travailler dans le milieu marin. Je ne pense pas que ces critiques soient justifiées non plus. Parcs Canada élabore et raffine la politique marine faisant partie du plan de réseau depuis 1978. Il dispose d'une politique marine des parcs et d'un plan de réseau depuis 1986. La politique a été reformulée en 1984 pour tenir compte des connaissances que Parcs Canada a acquises. Au cours des 20 dernières années, Parcs Canada a organisé trois colloques nationaux de consultation sur sa politique des parcs marins. Il a pris des engagements et établi des précédents à Gwaii Haanas, au parc national Pacific Rim, au parc Fathom Five et au Saguenay. Il poursuit ses études dans la baie de Bonavista, qui est représentée ici, au sud des Îles du Golf et à l'ouest du Lac Supérieur. L'étude portant sur le sud des Îles du Golf vient à peine de commencer.

Ce ne sont pas des novices en matière de conservation marine. Ils ont une meilleure politique de protection des zones marines de conservation que tout autre organisme, y compris le ministère des Pêches et des Océans. Le libellé du projet de loi C-48 se fonde sur une vaste et longue consultation du public et sur les années d'expérience en matière de gestion de projets pilotes dans diverses régions. Franchement, aucun autre organisme ne saurait égaler Parcs Canada quant à la réflexion et au travail investis pour la planification du réseau des zones protégées. Dire donc de Parcs Canada que c'est un nouveau venu en matière de conservation marine et d'aires marines protégées est tout simplement faux. Cela ne témoigne pas de la vérité.

Passons donc aux principaux éléments positifs. Il y a des éléments positifs que nous considérons très importants dans le projet de loi C-48. En fait, s'ils devaient changer, nous remettrions en question l'appui que nous accordons en principe à ce projet de loi.

L'un des éléments positifs du projet de loi C-48, c'est qu'il établit clairement le pouvoir de protéger les zones marines extracôtières dans l'ensemble de la zone économique exclusive de 200 milles du Canada, chose qui n'existait pas auparavant.

Le préambule établit clairement le principe de prudence et précise que les AMC doivent être configurées de façon que «l'étendue et les caractéristiques assurent le maintien d'écosystèmes marins sains».

• 1115

Le paragraphe 4(3) précise que les aires marines de conservation et les réserves doivent être gérées «sans compromettre les éléments et fonctions de leurs écosystèmes». C'est une déclaration très importante.

Les AMC peuvent être établies par décret mais ne peuvent être réduites en dimension, sauf au moyen d'une loi adoptée par le Parlement.

Le ministre doit, au moins tous les deux ans, présenter un rapport sur la situation des AMC et sur la progression vers la constitution d'un réseau représentatif complet.

Le paragraphe 9(3) précise qu'en matière d'établissement et de modification des plans de gestion, la priorité doit être accordée à la gestion des écosystèmes et au principe de la prudence. Cette disposition est cruciale.

La prospection et l'exploitation dans des zones naturelles aux ressources non renouvelables ainsi que l'immersion de substances en milieu marin sont interdites—sauf dans le cas d'immersion sans permis.

Parcs Canada a clairement la responsabilité de consulter à fond les personnes, les organismes et les collectivités concernés relativement à l'établissement et à la révision des plans de gestion.

Je pense que ces éléments devraient être reconnus comme des points forts du projet de loi.

Nous avons préparé un mémoire, que j'espère vous avez tous reçu. Nous y faisons 14 recommandations qui, à la lumière de notre expérience en matière de zones protégées, devraient renforcer le projet de loi. Nous pensons qu'elles sont importantes et utiles et nous vous exhortons à les prendre en considération.

Je voudrais maintenant me consacrer aux éléments les plus importants, aux trois parties, qui selon nous, nuisent sérieusement à la capacité de la loi de faire respecter son mandat en matière de conservation.

Tout d'abord, il y a le contrôle exercé par le ministre. Comme je l'ai dit plus tôt, Parcs Canada a fait beaucoup de travail pour tenir compte des responsabilités des autres ministères dans ce projet de loi et pour permettre que les activités telles que la pêche et la réglementation de la pêche soient contrôlées par le ministère des Pêches et des Océans. En fait, nous trouvons que Parcs Canada est allé un peu trop loin. Il devrait garder la responsabilité ultime de gestion des aires marines de conservation.

Actuellement, si l'on envisage les dispositions relatives à l'effort de pêche, par exemple, faute d'un accord entre le ministre de Patrimoine canadien et le ministre des Pêches et des Océans, le statu quo est maintenu. Des restrictions ne peuvent être imposées que lorsque les deux ministres sont d'accord. J'estime qu'il faudrait plutôt dire que les activités ne devraient avoir lieu que si les deux ministres sont d'accord.

En dehors des aires protégées, on laisse entendre que tout peut se produire «sauf»; l'obligation est de prouver qu'une chose ne doit pas se produire. À l'intérieur des zones protégées, des aires de conservation, il faudrait que l'obligation soit invertie de sorte que rien ne puisse se passer tant qu'il n'y a pas accord et tant qu'il n'est pas manifeste que cette activité est conforme à l'esprit de la loi.

J'estime donc que le ministre devrait garder le pouvoir ultime de prise de décision et—nous avons écrit cela dans le mémoire—qu'au lieu de dire que des restrictions ne peuvent être imposées que lorsqu'il y a accord, il faudrait indiquer que toutes les activités de pêche sont assujetties à l'obtention d'un accord, de sorte que l'obligation repose sur les autres organismes. Cela est très important.

Le deuxième aspect important est celui des activités externes et de la surveillance à exercer. Ce qui distingue essentiellement les écosystèmes marins des écosystèmes terrestres, c'est la nature fluide du milieu aquatique. De ce fait, les activités externes, en amont de la zone de conservation, que ce soit sur terre ou en milieu aquatique, peuvent avoir des répercussions énormes sur l'écosystème de la zone protégée.

Nous estimons qu'il faut que le libellé soit modifié afin d'empêcher qu'une substance soit immergée ou déposée, non seulement dans l'aire marine de conservation, mais également dans toute zone qui pourrait clairement avoir une incidence sur l'aire marine de conservation. Il faut qu'il y ait des moyens de contrecarrer ces dommages. C'est pourquoi il est également crucial que de la surveillance s'effectue au sein de l'aire de conservation. Je pense que cela devrait se retrouver dans le texte de la loi.

Le principal message de notre mémoire, et ce sera également le principal message de mon exposé, c'est qu'il faut élargir la liste des activités interdites qui figurent au projet de loi. Actuellement, les seules activités interdites sont l'immersion, sauf dans le cas d'un permis en vertu de la LCPE, ainsi que l'exploitation et la prospection en milieu de ressources non renouvelables. Ce sont effectivement des activités importantes, qui doivent être sur la liste, mais elles ne suffisent pas à elles seules.

Nous reconnaissons que les aires de conservation sont là pour que les gens en tirent de l'agrément et que les êtres humains y ont leur place, mais je pense qu'il est important de tenir compte des incidences de certaines activités sur le milieu marin. Nous recommandons fortement que le chalutage, le dragage et l'aquiculture des poissons soient ajoutés à la liste des activités interdites. Je tiens à faire la distinction entre les poissons, les crustacés et les autres types d'aquiculture. C'est une distinction importante. Nous estimons que les activités d'aquiculture des poissons devraient être exclues des aires marines de conservation parce qu'à long terme, on sait qu'elles provoquent des destructions étendues de l'habitat naturel et qu'elles sont incompatibles avec l'esprit du projet de loi.

• 1120

Ces activités suscitent beaucoup d'inquiétudes diverses, trop, en fait, pour que je les passe en revue dans le peu de temps qui nous est accordé aujourd'hui. Toutefois, je vais rapidement dresser une liste des principaux problèmes associés à chacune de ces activités, et plus particulièrement l'aquiculture des poissons et le chalutage par le fond.

Pour ce qui est de l'aquiculture des poissons, les principales préoccupations portent sur l'augmentation des taux de pesticides chez les espèces sauvages et les espèces non ciblées, la transmission de maladies aux espèces sauvages, que ce soit à l'intérieur d'une même espèce ou d'une espèce à l'autre, l'eutrophisation des zones côtières, l'accroissement des risques de prolifération de la fleur d'eau, l'augmentation de la turbidité, la perte de l'habitat benthique essentiel pour les espèces marchandes et les changements dans la composition des sédiments.

Le chalutage de fond est au moins aussi inquiétant. Les preuves s'accumulent rapidement au sujet de son impact sur le milieu benthique. Ses effets incluent: la diminution de la complexité de l'habitat par le lissage du fond marin et la disparition d'espèces qui fournissent un habitat à d'autres, telles que les coraux et le varech; le retour en suspension des fonds et l'augmentation de la turbidité, la modification de la structure des peuplements et de la composition des espèces; la diminution de l'abondance, de la biomasse et de la diversité des espèces, surtout des invertébrés benthiques; enfin, la disparition des organismes longévifs, à croissance lente, tels que les coraux de mer. Certains coraux d'eau froide peuvent prendre 500 ans à se développer, et le chalutage constant de ces zones ne leur permet certainement pas de se rétablir.

Je tiens à souligner encore une fois que je ne prétends pas que ces activités ne peuvent se produire nulle part. Par contre, j'estime qu'elles ne devraient pas se produire dans une aire protégée.

Si nous voulons sérieusement protéger et conserver des exemples représentatifs, je pense que nous devons être conscients de ce que Daniel Pauley, de la côte Ouest, appelle la base mouvante. Essentiellement, nous tenons pour naturel ce que nous avons connu lorsque nous étions jeunes. Nous devons nous rappeler qu'au Canada, le milieu marin a subi les lourds contrecoups de la pêche et d'autres activités depuis plus de 500 ans dans beaucoup de zones. Je ne prétends pas que nous puissions ou que nous devions éliminer l'impact des être humains, mais je pense que nous devons être conscients de l'impact que nous avons et que nous devons raisonnablement tâcher de l'atténuer, même si ce n'est que pour notre propre bien-être économique.

Nous parlons des aires marines de conservation et des zones marines protégées. Si nous n'interdisons pas les activités qui ont, sur l'habitat et les espèces, des effets nuisibles à long terme, considérables et prouvés, je me demande contre quoi nous protégerons ces régions. Notez bien que je ne prétends pas que nous devrions empêcher les êtres humains de s'en servir; je dis simplement que nous devrions les protéger des grandes activités industrielles qui se sont révélées particulièrement nuisibles à l'habitat naturel.

Le Fonds mondial pour la nature ne se détourne pas des préoccupations humaines ou sociales à l'endroit des zones protégées. Les aires marines de conservation et les zones protégées ne sont pas des mesures punitives. Elles sont une partie nécessaire de la solution et, si elles sont correctement utilisées, peuvent aider à rétablir et devraient aider à rétablir la salubrité des écosystèmes, fondamentale pour la santé des pêches, fondamentale à son tour pour la santé des collectivités côtières.

Nous avons constaté dans le milieu marin, bien mieux que nous n'avons pu le faire dans le milieu terrestre, le coût des erreurs de gestion. Nous avons constaté le coût social et économique lorsque nous ne tenons pas compte des préoccupations en matière de conservation. Nous n'avons certainement pas besoin de plus de preuves en ce sens.

Le président: Monsieur Laughren, vous en reste-t-il pour longtemps?

M. Josh Laughren: Non, une trentaine de secondes.

Je pense qu'il appartiendra aux localités de décider si elles veulent une aire marine de conservation et d'établir le plan de gestion, mais comprenons bien que ce qu'elles décident c'est l'acceptation d'une aire de conservation dans leur région. Il s'agit bien de conservation.

Nous avons vu les pêcheries s'effondrer. Nous avons vu les changements survenus ces dernières années. Parcs Canada prépare ce plan depuis plus de 20 ans. Il y a eu beaucoup de consultations à ce sujet, y compris ces consultations-ci qui, espérons-le, donneront lieu à certains amendements. Il est temps d'agir, d'adopter ce projet de loi et de le mettre en oeuvre.

Merci de nous avoir permis de nous exprimer. Nous espérons que le comité acceptera les amendements que nous proposons.

Le président: Merci.

Monsieur Melindy, êtes-vous prêt à nous parler?

M. John Melindy (coordonnateur de projet, NMCA Feasibility Study Advisory Committee): Ce sera M. Quinton qui fera l'exposé.

Le président: Monsieur Quinton.

M. Marlon Quinton (NMAC Feasibility Study Advisory Committee): Tout d'abord, monsieur le président, permettez-moi de vous remercier et de remercier le comité permanent de nous donner l'occasion de traiter du projet de loi C-48.

Nous vous présentons ce mémoire au nom du comité consultatif de l'aire marine nationale de conservation de la baie de Bonavista et de la baie de Notre-Dame. Notre comité compte 20 membres—11 spécialistes professionnels de la récolte du poisson, des représentants de l'aquiculture, de la transformation du poisson, des conseils de développement économique et des habitants des baies de Bonavista et de Notre-Dame. Le conseil a été nommé par le secrétaire d'État Andy Mitchell et par l'honorable Sandra Kelly, ministre du Tourisme, de la Culture et des Loisirs.

• 1125

Le comité consultatif a pour responsabilité d'examiner la faisabilité d'établir une aire marine de conservation dans la région de la côte de Terre-Neuve qui s'étend de la baie de Bonavista à la baie Notre-Dame. Le rôle du comité consultatif est essentiellement de déterminer si l'aire marine nationale de conservation proposée est bien compatible avec les utilisations marines traditionnelles et actuelles et de voir si les intervenants appuient suffisamment une initiative de ce type.

Dans notre analyse, nous avons tenu compte de chacun des articles du projet de loi C-48, des directives et du manuel des politiques de fonctionnement de Parcs Canada, qui constituent la toile de fond de la mesure législative, ainsi que de la Loi sur les parcs nationaux et la Loi sur les Océans.

Notre comité a tenu une série de réunions des intervenants pour échanger des renseignements et obtenir des réactions sur l'opportunité de créer le parc marin proposé. Nous avons organisé des ateliers portant sur la pêche commerciale, l'aquiculture, le tourisme, la méfiance à l'endroit du gouvernement et les façons d'établir la confiance.

Dans nos délibérations, nous avons soigneusement examiné l'incidence que cette initiative aurait sur la population de Terre-Neuve qui tire ses revenus du milieu marin. Nous nous sommes demandé si le projet de loi C-48 et l'aire marine nationale proposée pourraient avoir des effets négatifs sur les modes de vie traditionnels et actuels, les revenus, les droits de propriété et les droits et libertés. La tâche confiée au comité a été particulièrement ardue du fait qu'il n'existe aucun modèle au monde où des activités traditionnelles de pêche, l'aquiculture et d'autres activités telles que la chasse et la pêche sportives coexistent en harmonie avec un parc marin.

Nous pensons que l'expérience et les connaissances acquises par notre comité seront utiles à votre comité pour ce qui est d'analyser les conséquences du projet de loi C-48.

Pour ce qui est de notre profil industriel dans la zone de la baie Notre-Dame et la baie de Bonavista, il est important que le comité permanent se rende compte qu'il existe une importante industrie commerciale dans les limites de l'aire marine proposée. Cette aire marine s'étend sur une zone côtière mesurant de 25 000 à 30 000 kilomètres carrés.

Dans cette zone, il existe une grande activité de pêche côtière touchant environ 2 000 détenteurs de permis, 35 aquiculteurs détenteurs de permis, ainsi que des emplacements d'élevage de morue qui pourraient s'établir très bientôt et seraient d'un excellent rendement.

Au nombre des espèces exploitées dans la zone proposée, on trouve: le crabe-araignée, le crabe commun et le crabe des neiges; le turbot; le homard; la crevette; le hareng; le maquereau; la morue; la lompe; le calmar; l'oursin vert; le buccin; le varech; diverses espèces de poisson plat; et le caplan.

Pour ce qui est de l'aquiculture, les principales espèces cultivées sont les moules, les pétoncles et la morue. Environ 85 à 90 p. 100 de la production de moules de Terre-Neuve s'effectue dans l'aire marine proposée et dans les zones tampons.

Malgré ce qu'en disent les médias, l'industrie de la pêche reprend de la vigueur à Terre-Neuve. Au total, l'industrie de la pêche et de l'aquiculture de la côte du nord-est représente un chiffre d'affaires d'environ 600 millions de dollars.

La conservation est un principe sacro-saint. Notre comité tient absolument à souligner qu'il appuie la nécessité fondamentale de faire de la conservation. En fait, les secteurs de la pêche et de l'aquiculture sont de grands défenseurs du développement durable. Les pêcheurs ne comprennent que trop la nécessité de la conservation et nous n'avons pas besoin de rappeler l'incidence du moratoire sur la pêche à la morue sur les localités côtières de Terre-Neuve. Depuis ce temps-là, des changements considérables à la façon de gérer la pêche sont survenus.

Actuellement, en vertu de la Loi sur les océans, le ministre des Pêches et des Océans a le pouvoir de désigner des zones de protection marine pour conserver les espèces menacées. Compte tenu de cela, nous sommes stupéfaits de voir que le ministère du Patrimoine canadien veuille adopter une mesure parallèle de conservation, relevant d'une loi différente.

Dans la baie de Bonavista, par exemple, les pêcheurs participent directement à un programme d'amélioration des stocks de homard, en vue de conserver des espèces pour les générations actuelles et futures. Les pêcheurs et le ministère des Pêches et des Océans collaborent pour déterminer le statut des stocks de poisson au moyen d'un programme de pêche indicatrice.

En fait, la pêche de toutes les espèces de poisson et l'industrie de l'aquiculture sont assujetties à des régimes de gestion stricts et clairement établis. Il est donc inévitable de poser la question: Qu'essayons-nous de protéger, qui ne soit pas déjà assujetti à un régime de gestion et de conservation? Pourquoi Patrimoine canadien essaie-t-il de reproduire le mandat et la responsabilité de Pêches et Océans?

Notre position fondamentale est que, dans l'ensemble, le projet de loi C-48 devrait être retiré. Nous ne voyons aucune raison qui justifie que ce projet de loi soit adopté. Nous trouvons qu'il minerait le pouvoir du ministre des Pêches et des Océans et qu'il transférerait les pouvoirs de conservation marine et de protection de l'habitat à Parcs Canada, qui n'a aucune compétence en gestion ou connaissance scientifique du milieu marin. Cela préoccupe énormément le secteur de la pêche et de l'aquiculture et il ne faut pas permettre que cela se produise.

D'un point de vue financier, il est hautement irresponsable de la part du gouvernement du Canada d'envisager de créer une autre bureaucratie alors que les pouvoirs relatifs à la pêche et à l'aquiculture ont déjà été accordés au ministre des Pêches et des Océans, en vertu de la Loi sur les océans et de la Loi sur les pêches. Non seulement cela représente un gaspillage de l'argent du contribuable, mais cela va en outre créer un conflit important entre Patrimoine canadien et Pêches et Océans; et ce seront les parties intéressées qui se trouveront prises dans le feu croisé.

• 1130

En ce qui concerne lÂaire marine nationale de conservation proposée pour la baie de Bonavista et la baie Notre-Dame, les membres du conseil consultatif estiment qu'il y a risque considérable de perte économique et de déplacement d'emplois dans les secteurs de la pêche et de l'aquiculture. Si l'on approuve cette zone marine pour Terre-Neuve, le climat de réglementation qui en résulterait susciterait une incertitude énorme et découragerait l'investissement privé et public dans les secteurs de la pêche et de l'aquiculture.

En résumé, nous sommes opposés à la création d'une aire marine de conservation entre les baies de Bonavista et Notre-Dame. Nous n'adoptons pas cette position à la légère. La conservation est importante pour tous les intervenants. Toutefois, il est primordial que l'incidence sur les populations soit également prise en ligne de compte. Malheureusement, les préoccupations des gens sont devenues moins importantes que le mandat d'un ministère fédéral d'établir un programme d'aires marines de conservation. Nous estimons que la constitution d'aires marines de conservation devrait être envisagée dans le cadre de l'article 35 de la Loi sur les océans.

Nous voulons maintenant traiter particulièrement d'articles précis du projet de loi C-48 qui font problème et sont à la base de notre position.

Le préambule laisse entendre que les gens, les êtres humains, n'ont pas leur place dans les écosystèmes marins. Dans la région concernée, il y a plus de 60 000 habitants, dans plus de 130 localités. Les principes de Parcs Canada ont préséance sur les gens. Dans l'article qui contient les définitions, l'article 2, on définit «écosystème» comme étant une «unité fonctionnelle constituée par le complexe dynamique résultant de l'interaction des communautés de plantes, d'animaux et de micro-organismes qui y vivent et de leur environnement non vivant». Cette définition ne reconnaît pas le droit légitime des êtres humains à exister au sein d'un écosystème.

Selon le paragraphe 5(1), «Constitution et agrandissement des aires marines», ainsi que le paragraphe 5(3), «Interdiction», les aires marines de conservation sont permanentes. Notre comité note que le projet de loi C-48 prévoit la constitution et l'agrandissement des aires marines, mais qu'on ne prévoit la suppression d'aucune partie d'une aire marine, une fois qu'elle est établie.

Étant donné que les aires marines nationales de conservation sont un phénomène nouveau au Canada, nous nous préoccupons du caractère irréversible de leur constitution. On demande à des gens d'accepter un concept qui se fonde sur leur interprétation de libellés législatifs qui pourront s'appliquer à des circonstances futures. Il est parfaitement probable que les administrateurs d'une aire marine nationale de conservation puissent être un groupe de gens nouveaux, tout à fait différents de ceux qui auront participé à la constitution de la zone. La loi devrait prévoir la possibilité d'abolition d'une aire marine nationale de conservation une fois qu'elle ne satisfait plus aux objectifs prévus.

L'administration apparaît à l'article 8 et au paragraphe 9(1). Le comité consultatif estime que la période d'attente de cinq ans avant l'élaboration d'un premier plan de gestion est trop longue. Les collectivités côtières et les utilisateurs des ressources doivent connaître les aspects du plan de gestion avant que l'on crée une aire marine de conservation. L'incertitude engendre le risque. L'incertitude concernant les règlements gouvernementaux engendre un risque encore plus grand. De façon générale, la perspective d'un plan de cinq ans n'est pas de nature à attirer l'investissement indispensable pour assurer la croissance des pêches et de l'aquiculture.

Quant au paragraphe 9(2), le comité est d'avis que la période de cinq ans prévue pour la révision du plan de gestion d'une aire marine de conservation est trop longue. Il faut que ces plans soient précis dès le départ et qu'ils soient révisés chaque année.

En ce qui concerne le paragraphe 9(3), la priorité devrait être accordée à la viabilité des collectivités côtières.

Le paragraphe 9(4) est important pour Terre-Neuve et le Labrador. Dans tous les cas, la province où est située l'aire marine de conservation devrait être indiquée dans cette disposition.

Le rapport mentionné au paragraphe 10(2) devrait être présenté chaque année.

En ce qui concerne les paragraphes 11(1), 11(2) et 11(3), le comité consultatif ne voit pas l'intérêt de créer des comités consultatifs supplémentaires pour étudier et évaluer les questions de politique ou d'administration relatives aux aires marines de conservation et pour conseiller le ministre à ce sujet. Si ces mesures relevaient de la Loi sur les océans, conformément à la recommandation présentée, il y est prévu des commissions consultatives pour chacune des espèces récoltables. Cette structure aiderait à prévenir les influences extérieures qui pourraient perturber la gestion de l'environnement marin local.

• 1135

L'article 12 interdit d'aliéner les terres domaniales. À l'article 2 du projet de loi, les «terres domaniales» sont définies comme étant des terres immergées ou non, notamment le fond marin. Cette disposition interdit donc l'aliénation des terres domaniales situées dans une aire marine de conservation.

Elle inquiète considérablement les pêcheurs, les aquiculteurs et les résidents des aires de conservation envisagées. Du fait de cette disposition, nous envisageons une situation dans laquelle certaines personnes ne seront pas autorisées à utiliser, à vendre ou à aliéner l'entreprise de pêche ou d'aquiculture qu'elles possèdent. Après avoir créé une entreprise, un propriétaire pourrait se voir refuser le droit de réaliser le produit de la vente de son entreprise. Par ailleurs, il n'a pas la possibilité de céder la propriété de l'entreprise à un membre de sa famille, ce qui a toujours été une pratique courante dans les milieux ruraux de Terre-Neuve, où la pêche s'est toujours pratiquée d'une génération à l'autre. Du point de vue des propriétaires, il semble qu'on leur refuse le droit de vendre leur bien, que ce soit une cabane ou un quai, lorsqu'il est situé dans une aire marine de conservation. Les résidents y voient une atteinte à leurs droits de propriété individuels.

L'article 12 interdit également d'utiliser ou d'occuper les terres domaniales situées dans une aire marine de conservation. Il risque donc de contraindre des pêcheurs et des aquiculteurs à se retirer des affaires. Selon notre interprétation, il interdit aux pêcheurs et aux aquiculteurs d'utiliser les fonds marins comme ils doivent impérativement le faire dans leurs activités. Il serait donc interdit de déployer des filets pour la pêche au homard, au pétoncle, au crabe, au hareng et à l'oursin, ou d'installer des corps morts pour l'aquiculture.

Nous nous opposons fermement à l'adoption de l'article 12 et nous contestons les intentions de Parcs Canada et sa connaissance du secteur marin commercial. Nous avons l'impression que Parcs Canada a pour objectif d'exclure la pêche traditionnelle et l'aquiculture des aires marines de conservation. Nous nous inquiétons des restrictions envisagées dans le projet de loi C-48 qui, si elles sont approuvées, vont avoir force de loi. De surcroît, nous trouvons contradictoire le mandat de Parcs Canada. D'un côté, le ministère prétend avoir pour mandat de protéger et de conserver la culture et le patrimoine, alors que la formulation de l'article 12 risque de détruire la culture de Terre-Neuve en niant des droits et des libertés traditionnels en milieu marin.

À propos de l'article 13 consacré à la prospection et à l'extraction, le comité croit comprendre qu'avant toute création d'une aire marine de conservation au Canada, cette aire fera l'objet d'une étude approfondie, visant à déterminer sa valeur potentielle en pétrole, en gaz, en minéraux, en agrégats et autres matières inorganiques. Le comité croit comprendre également que l'aire marine de conservation ne peut être créée si la valeur économique de l'utilisation de ces terres pour la prospection de minéraux est supérieure à la valeur qu'elle aurait en tant qu'aire marine de conservation. Cependant, que se passe-t-il si les possibilités de prospection minéralière ne sont réalisées qu'après la création de l'aire marine de conservation? D'après le paragraphe 4(3) de la loi, l'aire marine de conservation une fois créée devient une entité permanente aux termes de la loi.

Nous voulons également commenter le paragraphe 7 de l'article 16, consacré aux règlements. Selon ce paragraphe, les directeurs sont autorisés à modifier les exigences des règlements concernant les aires marines de conservation. Il y a donc un transfert de pouvoir du ministre des Pêches et des Océans à un directeur de Parcs Canada. Une telle disposition est ridicule et sans précédent; il faut la supprimer du projet de loi.

Formule de zonage incompatible: La gestion de zonage proposée dans les lignes directrices de Parcs Canada et dans les politiques opérationnelles est incompatible avec l'usage actuel et traditionnel. Elle provoquerait des déplacements d'emplois, des pertes de revenu et des conflits entre les ministères et leurs administrés.

L'accord de zonage proposé par Parcs Canada dans son énoncé de politique prévoit trois aires de gestion. La première aire est une aire de conservation ou toute activité, notamment l'exploitation des ressources renouvelables, est interdite. La deuxième aire est une zone tampon entourant la première aire et constituée de l'environnement naturel. Des activités de loisir, la chasse, la pêche et l'aquiculture y sont interdites. La troisième aire est l'aire de conservation. La pêche et l'aquiculture relèvent de cette catégorie. Cependant, la plaisance et les activités éducatives ont préséance sur l'aquiculture.

• 1140

Selon ce régime, la pêche et l'aquiculture sont interdites dans les aires un et deux. Par conséquent, des personnes qui y travaillent actuellement vont devoir se relocaliser et vont subir une perte de revenu. Les projets de développement dans cette aire ne pourront être réalisés à cause de ces incompréhensibles restrictions de zonage.

L'aquiculture nécessite des caractéristiques de site particulières pour être réalisable et elle doit bénéficier de possibilités d'accès à des zones de croissance présentant les caractéristiques biophysiques souhaitées pour permettre ces activités de production aquicole. Ce régime anéantit toutes possibilités à cet égard.

On pourrait discuter à l'infini des stocks de poissons migrateurs. Par exemple, il serait inconcevable d'appliquer un certain niveau de conservation à un stock qui migre dans une aire de conservation désignée, et de l'assujettir à un niveau différent d'exploitation lorsqu'il sort de l'aire de conservation.

Les conséquences éventuelles d'un tel scénario sont considérables et pourraient entraîner une extension de l'aire de conservation au-delà de ses limites initiales, ce qui ne ferait qu'aggraver une situation déjà inacceptable.

Partie 3.3 du manuel des politiques. Nous nous préoccupons gravement de la formule utilisée dans cette partie du manuel de Parcs Canada pour décrire les activités autorisées dans la troisième aire. Pour l'essentiel, toutes les activités de pêche sportive, de navigation, de loisirs de plein air et d'éducation du public ont une priorité sur l'aquiculture. Cette formulation traduit un préjugé défavorable à l'aquiculture et contrevient à la stratégie fédérale de développement de l'aquiculture ainsi qu'à la politique provinciale de développement du littoral. De surcroît, elle ignore le droit d'accès des aquiculteurs aux ressources marines et ne tient pas compte de la présence historique des activités d'aquiculture commerciale dans la région. Cette formule de zonage est totalement inacceptable et irréaliste pour les secteurs de la pêche et de l'aquiculture.

Le principe du zonage est très litigieux. Les habitants de la région à l'étude posent les questions supplémentaires suivantes en matière de zonage: quand et comment ces aires vont-elles être délimitées; quelles en seront les frontières; quels types d'engins de pêche seront autorisés; la pêche sera-t-elle interrompue si des espèces menacées sont repérées à l'intérieur d'une aire marine de conservation; la chasse aux phoques sera-t-elle autorisée dans toutes les aires; quelles seront les restrictions à la chasse traditionnelle dans les différentes aires; y aura-t-il des tarifs différents pour les différentes aires; la pêche sportive et la navigation y seront-elles permises, et dans ce cas, dans quelles aires; les cabanes privées devront-elles être enlevées de certaines îles? Les aquiculteurs veulent savoir où leurs activités sont autorisées, et où elles sont interdites.

Menace au droit au maintien dans les lieux, partie 1.4.2, 4.4 du manuel des politiques. Les aquiculteurs pensent que ces dispositions vont permettre un transfert au gouvernement fédéral des droits provinciaux sur les terres de la Couronne. La Couronne fédérale aura l'autorité suprême sur l'utilisation des terres et des eaux et pourra empêcher la reconduction des baux, ce qui risque d'avoir de graves conséquences pour les aquiculteurs actuels qui ont déjà des droits acquis de propriété.

Voilà quelques-unes des nombreuses préoccupations que nous inspire la formule de zonage. De toute évidence, cette formule est irréalisable, inadmissible et risque de perturber une partie importante de l'économie du littoral de Terre-Neuve, qui s'efforce de se diversifier pendant le moratoire sur la morue. En outre, aucune indemnisation n'est prévue pour les personnes ou les activités qui devraient se relocaliser dans le cadre de ce régime de zonage.

En conclusion, de façon générale, notre comité est favorable à la conservation, et un certain nombre de ses membres participent activement à des initiatives de conservation dans leur secteur industriel. Cependant, nous estimons que le projet de loi C-48 présente de graves imperfections, comme nous l'avons montré dans ce mémoire.

En apportant de modestes modifications à la Loi sur les océans, on pourrait inclure les aires marines de conservation dans le mandat du ministère des Pêches et des Océans, ce qui éliminerait les chevauchements et les doubles emplois entre le projet de loi C-48 et la Loi sur les océans et préviendrait le risque d'une érosion des pouvoirs du ministre des Pêches et des Océans. Par ailleurs, on rétablirait la responsabilité du ministère des Pêches et des Océans en matière de gestion sectorielle de l'habitat marin et de la protection des espèces, car c'est ce ministère qui connaît le mieux les espèces.

• 1145

Nous considérons comme un mauvais choix l'aire marine de conservation envisagée pour Terre-Neuve, compte tenu des exigences opérationnelles imposées aux industries de la pêche et de l'aquiculture et du mandat et des principes de Parcs Canada. La formule et le mandat des aires marines de conservation sont incompatibles avec les activités marines commerciales actuelles. Les intervenants actuels n'auront pas la possibilité de vendre ou d'aliéner leurs entreprises ou leurs baux, ni de réaliser le produit de leur entreprise, comme peuvent le faire les autres Canadiens. La mise en oeuvre d'une aire marine de conservation à Terre-Neuve entraînerait une disparition du droit au maintien dans les lieux, des relocalisations d'emplois et une perte de revenu et de possibilités d'investissement dans une province qui s'efforce de reconstruire et de diversifier l'économie de son littoral.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Quinton.

Je trouve cette matinée particulièrement intéressante. Le Fonds mondial pour la nature trouve que les interdictions de certaines activités ne vont pas assez loin, qu'il faudrait renforcer les pouvoirs du ministre du Patrimoine et que le projet de loi confère trop de pouvoir au ministre des Pêches et des Océans. Quant au comité consultatif, il estime que le projet de loi C-48 va trop loin, que le dossier devrait rester entre les mains du ministre des Pêches et des Océans, que le projet de loi n'a pas de raison d'être et que les interdictions d'activités sont beaucoup trop étendues. Nous avons donc ici un contraste très intéressant.

Nous allons maintenant passer aux questions, en commençant par M. Mark.

M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Réf.): Merci, monsieur le président.

Merci, messieurs, de comparaître devant le comité ce matin.

Je voudrais poser ma première question à M. Laughren. Selon le Fonds mondial pour la nature, quelle proportion du littoral canadien faudrait-il protéger, qui devrait le faire et où faudrait-il implanter les aires de conservation?

M. Josh Laughren: Gardons-nous de préconiser un certain pourcentage de côtes ou de zones marines qu'il faudrait protéger. Nous considérons qu'il faut protéger toute la gamme des environnements marins, comme on le fait pour les zones terrestres. C'est un principe accepté pour les zones terrestres.

C'est du reste une théorie et une pratique qui sont de plus en plus acceptées dans le monde entier. Depuis quatre ans, nous travaillons beaucoup à la mise au point d'un système de cartographie fondé sur les caractéristiques physiques et océanographiques, qui découpe l'environnement marin en unités à peu près équivalentes aux différents habitats. Nous considérons que chacune de ces unités doit faire l'objet d'un échantillonnage. Il est cependant impossible de déterminer le pourcentage de la superficie terrestre ainsi couverte.

Pour ce qui est de la façon de procéder, je considère, comme le Fonds mondial pour la nature, que les trois ministères qui s'occupent de conservation des océans, à savoir Parcs Canada, le ministère des Pêches et des Océans et le Service canadien de la faune, devraient collaborer à la création d'un ensemble d'aires protégées au Canada. Chacun des trois devrait intervenir dans son domaine pour créer les aires de conservation, les aires marines et les aires nationales de protection de la faune, en fonction des particularités de son mandat. On obtiendrait ainsi un ensemble d'aires protégées couvrant tous les habitats et assurant des zones tampons lors des changements de gestion et des changements environnementaux qui surviennent de façon naturelle.

M. Inky Mark: Comme vous l'avez vu ce matin, il y a toujours un autre point de vue sur la même question.

Est-ce que votre organisme a envisagé un mécanisme de résolution des différends qui faciliterait la détermination des secteurs à protéger?

M. Josh Laughren: Non. Ce débat risque d'être difficile jusqu'à la fin. Nous avons beaucoup travaillé sur les secteurs terrestres, par exemple, pour éviter les conflits. Nous considérons fondamentalement que les aires de conservation ne réussiront que si elles sont acceptées par les communautés locales. Nous avons beaucoup travaillé avec les industriels, en particulier ceux des secteurs pétroliers et gaziers. Nous avons travaillé pendant des années pour aboutir à des accords en vertu desquels nous travaillons ensemble pour déterminer les aires à protéger et celles qui ne doivent pas l'être. Nous jouissons d'une certaine latitude dans nos choix, mais nous devons décider après pleine consultation de l'industrie, des communautés et, le cas échéant, des premières nations. Si l'on impose des décisions contre la volonté des gens de la région concernée, ces décisions seront inefficaces.

Le président: Une dernière question.

• 1150

M. Inky Mark: Je voudrais demander au comité consultatif sur l'étude de faisabilité de nous donner son avis sur les consultations qui ont eu lieu.

M. Marlon Quinton: Nous avons organisé quatre ateliers. J'ai assisté à une réunion publique qui a réuni 500 personnes, ce qui est tout à fait remarquable à Terre-Neuve. Ces personnes voulaient se renseigner sur la nécessité du projet de loi C-48.

Ce projet de loi risque de détruire le mode de vie culturel de Terre-Neuve. Je suis un partisan de la conservation. Je travaille au coude à coude avec les scientifiques. Tout le monde comprend la nécessité de la conservation. Ce n'est plus comme il y a 10 ou 12 ans. Les gens comprennent que leur vie dépend de la conservation, mais pourquoi créer une autre forme de bureaucratie? Pourquoi créer un nouvel ensemble de règles, pourquoi détruire un mode de vie? Les habitants de Terre-Neuve risquent de devoir se relocaliser. Les conséquences du projet de loi risquent d'être dramatiques. Il faut avoir vécu sur place pour s'en rendre compte.

Le président: Monsieur Crête.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Je suis très heureux des présentations de ce matin. D'un côté, le Bloc québécois ne comprend pas vraiment pourquoi le Fonds mondial pour la nature Canada tente de donner au ministre du Patrimoine canadien un pouvoir absolu de décision en ce qui concerne tous les aspects de la gestion des aires marines. Je pense que l'autre groupe vient de nous donner la réponse. Son mémoire est bien rempli et parle de la vraie vie. Par contre, dans son texte, le Fonds mondial pour la nature dit qu'il veut absolument que le ministre ait tous les pouvoirs, mais il y a tout de même une phrase où il dit:

    Le Fonds n'est pas opposé à une autre solution à condition qu'elle ne compromette pas le pouvoir de la Loi de créer des AMC...

Est-ce que, finalement, entre le point de vue du fonds et le point de vue du comité consultatif, la solution ne repose pas dans le modèle qui a été élaboré pour le parc Saint-Laurent—Saguenay? Dans le cas de ce parc qui longe ma circonscription, la province demeure propriétaire du fond marin et il y a un comité conjoint de gestion qui permet à chacune des deux parties de faire connaître son point de vue. On ne leur donne pas un pouvoir absolu, comme celui qui serait donné dans la loi. Est-ce que, pour un groupe ou l'autre, ce n'est pas une voie d'avenir qui devrait être explorée et est-ce qu'on ne devrait pas modifier la loi en conséquence?

[Traduction]

M. Marc Kielley (NMCA Feasability Study Advisory Committee): Je peux essayer de répondre. La situation à Terre-Neuve est beaucoup plus compliquée. Comme M. Quinton a essayé de l'expliquer, on trouve à Terre-Neuve un groupe d'utilisateurs de longue date. Cette zone compte plus de 2 000 pêcheurs et 34 aquiculteurs, qui bénéficient de perspectives d'expansion considérables.

C'est une situation tout à fait particulière, compte tenu de l'historique du secteur. Je ne pense pas qu'il existe un autre endroit au monde où l'on ait créé une aire marine de conservation avec un tel groupe d'utilisateurs qui, jusqu'à maintenant, a toujours travaillé dans le respect des principes et du mandat de Parcs Canada. En toute franchise, cela ne me plaît beaucoup.

Nous avons considéré l'exemple de la Nouvelle-Zélande parce que nous savons qu'il présente des points communs avec notre situation. La Nouvelle-Zélande a créé un grand nombre d'aires marines de conservation. Ce qui nous inquiète, c'est que la Nouvelle-Zélande a interdit la pêche dans la quasi-totalité de ses aires de conservation. La pêche est considérée comme une infraction et toute exploitation des fonds marins est interdite. Inutile de dire que ce genre d'interdiction nous inquiète considérablement.

• 1155

[Français]

Le président: Monsieur Crête.

M. Paul Crête: J'aimerais que les gens du fonds réagissent aussi au mémoire qui nous a été présenté par le comité consultatif. Comment réagissez-vous à cette situation?

[Traduction]

Le président: Comment réagissez-vous aux arguments du mémoire du comité consultatif?

M. Josh Laughren: Je comprends parfaitement ses préoccupations et ses craintes. Terre-Neuve a été frappée très durement et il serait étonnant que le projet de loi ne suscite aucune appréhension chez ses habitants. Je crois que leur réaction est très saine et tout à fait opportune.

Y a-t-il des exemples de situation où les choses se sont passées de façon harmonieuse? Je crois qu'on peut citer à cet égard la Grande Barrière, en Australie. Elle s'étend sur plusieurs milliers de kilomètres le long du littoral de plusieurs États australiens et elle a donné lieu à un zonage très semblable à celui dont nous parlons aujourd'hui. Dans certains secteurs, la réglementation est moins restrictive que celle que je propose, mais elle couvre toute la côte de l'Australie. Elle va de l'interdiction absolue, pour les prises et l'accès, même pour les scientifiques, jusqu'à l'autorisation de pratiquement toute activité. Il y a donc des exemples de coexistence harmonieuse des différents intérêts.

La Nouvelle-Zélande a un excellent régime d'aires marines protégées. Les zones où toute prise est interdite ont été mises en place après de vastes consultations. Personne, pas même moi, ne prétend que les prises devraient être totalement interdites dans la totalité des aires marines de conservation, ni même dans la majorité d'entre elles. Je ne pense pas que ce soit là l'objectif visé, du moins dans mon esprit, ni d'après ce que j'ai vu dans les parcs.

[Français]

M. Paul Crête: Oui, mais ma question portait plus spécifiquement sur le modèle qu'on a élaboré pour le parc Saint-Laurent—Saguenay. Est-ce que cela ne vous apparaîtrait pas plus pertinent? Le comité consultatif parle de multitudes de communautés qui vivent là depuis plusieurs dizaines d'années. Il n'y a peut-être pas de précédents marins, mais il y a des précédents terrestres, notamment au parc Forillon où on a vécu la même situation dans le passé. On a vidé une région de sa population et on a installé les gens de façon artificielle. Une même réalité pourrait résulter d'une application stricte comme celle que vous demandez.

[Traduction]

M. Josh Laughren: Je ne suis pas certain d'avoir bien compris la question, à cause de la traduction.

[Français]

M. Paul Crête: Je vous demande si l'application stricte de la loi que vous demandez, avec des pouvoirs absolus pour le ministre, ne résultera pas en des situations identiques à celles qu'on a vues dans le cas des aires terrestres où des populations ont été obligées de déménager. Dans le cas mentionné, à Terre-Neuve, est-ce qu'on ne sera pas dans une situation où on voudra vider une région de sa population parce qu'on aura décidé que les êtres humains ne font pas partie de l'écosystème en question?

[Traduction]

M. Josh Laughren: C'est une bonne question. Je ne pense pas qu'on puisse trouver dans le projet de loi des dispositions qui obligeraient qui que ce soit à se relocaliser, et ce n'est pas non plus le but visé. On s'est efforcé de bien faire comprendre que les aires marines de conservation ne sont pas une stricte transposition dans l'environnement marin de la formule des parcs nationaux terrestres. On s'est efforcé de bien faire comprendre que ce sont deux formules bien différentes, que l'utilisation humaine n'est pas incompatible avec une aire de conservation et qu'elle peut se poursuivre. Je ne pense donc pas que le gouvernement fédéral ait prévu, dans le projet de loi, de s'approprier des terres ou de contraindre des administrés à déménager. Personnellement, j'y serais même opposé, et c'est aussi l'avis du FMN. À mon avis, une telle possibilité n'apparaît pas dans la version actuelle du projet de loi.

Le président: Monsieur Laliberte.

M. Rick Laliberte (Churchill River, NPD): On a fait référence à la nécessité des aires marines de conservation au même titre que des aires de conservation des parcs. Je voudrais demander au FMN de nous parler des deux, car d'après ce qu'ont dit les représentants de Terre-Neuve le ministère des Pêches et des Océans jouit d'une grande confiance.

Les aires marines de conservation ont un caractère plus permanent que leur confère le projet de loi C-48. Vous ne semblez pas vouloir d'une aire permanente de conservation à Terre-Neuve. J'aimerais savoir quelle différence vous faites entre la compétence du ministère des Pêches et des Océans et celles du ministère du Patrimoine, et j'aimerais savoir ce que vous pensez de la permanence de la conservation dans votre région.

• 1200

M. Josh Laughren: Voulez-vous parler des différentes compétences au sein de l'aire de conservation ou entre les aires de conservation des parcs et les aires de protection relevant de Pêches et Océans? Est-ce que vous voulez savoir quelle est la différence entre ces deux entités?

M. Rick Laliberte: Oui.

M. Josh Laughren: Le ministère des Pêches et des Océans a pour mandat l'application de la Loi sur les océans telle qu'elle est formulée actuellement. Il gère des mécanismes essentiels à la protection des espèces menacées, à la protection de l'habitat des espèces commerciales, et des phénomènes géologiques uniques. Il s'occupe très concrètement de l'environnement marin.

Le mandat de Parcs Canada est bien différent, mais son mandat en matière d'aires marines est semblable à son mandat terrestre. Nous mettons de côté de vastes secteurs représentatifs de notre patrimoine marin, qui doivent être préservés et rester à l'abri des altérations, de façon que les générations futures puissent profiter d'écosystèmes sains fonctionnant naturellement.

Le ministère des Pêches et des Océans envisage généralement de gérer des aires plus petites concernant des caractéristiques uniques bien identifiées. Je pense que ces deux types d'aires sont bien différentes, mais que les deux contribuent à la réalisation d'un mandat plus vaste de conservation des océans.

Est-ce que cela répond à votre question?

M. Rick Laliberte: Donc, le MPO s'occupe d'aires plus petites à court terme, pour permettre à l'habitat et aux espèces de se rétablir. Ensuite, il se retirera de ces aires protégées.

M. Josh Laughren: Je ne le pense pas. Le MPO dispose de nombreux outils concernant la fermeture de la pêche—fermeture saisonnière ou fermeture à court terme—qui relèvent de la Loi sur les pêches. L'idée des aires protégées relevant de la Loi sur les océans concerne une protection à long terme. Je prétends même qu'il s'agit de protection à perpétuité, même si la loi ne parle que de protection à long terme, mais l'objectif est différent de celui de Parcs Canada.

M. Rick Laliberte: Pour revenir sur la notion de permanence du projet de loi C-48, est-ce que c'est une préoccupation importante à Terre-Neuve?

M. Marc Kielley: C'est une partie du problème. Nous ne sommes pas hostiles à une certaine permanence, mais je ne pense pas que ces mécanismes doivent être maintenus à perpétuité, comme on semble l'avoir proposé.

En ce qui concerne la distinction entre les aires marines protégées (AMP) et les aires marines de conservation (AMC), il n'y a pas de grande différence entre les deux. Il y a une différence au niveau de la permanence. Les aires marines protégées peuvent assurer une protection à court terme, mais, encore une fois, tout cela est subjectif et dépend des mesures correctives dont on parle et de leur durée. Je crois que les AMP peuvent avoir une origine et une gestion plus locale, tandis que les aires marines de conservation constituent davantage une initiative nationale.

La permanence des aires marines de conservation ne nous pose pas vraiment de problème, mais il s'agit avant tout de leur trouver un emplacement satisfaisant. Comme nous l'avons dit, nous craignons qu'elles n'aient pour effet d'obliger des gens à se relocaliser et de détruire leur mode de vie.

Est-ce que vous envisageriez de créer une aire marine de conservation dans un quartier de Toronto? C'est pourtant essentiellement ce que vous faites à Terre-Neuve. Vous essayez d'imposer cette aire dans une partie de Terre-Neuve où la pêche et l'aquaculture sont très présentes. Cela n'a aucun sens.

Je connais assez bien le cas du parc Forillon, et ce que j'en ai entendu a confirmé toutes mes craintes. Je sais que les gens de ce territoire ont opposé une vive résistance. On les a forcés à déménager ou à vendre leurs propriétés à des prix dérisoires. Certains ont été ruinés. Tout cela en vaut-il la peine? Va-t-on véritablement faire la même chose avec les aires marines de conservation?

Le président: Monsieur Muise.

M. Mark Muise (West Nova, PC): Merci, monsieur le président; je remercie également nos témoins.

Comme vous le dites, il est fort intéressant d'avoir aujourd'hui des points de vue opposés sur la question. Je m'intéresse particulièrement aux commentaires des gens de Terre-Neuve. Nous avons reçu la semaine dernière des représentants de Parcs Canada, auxquels on a demandé si l'agence allait procéder unilatéralement pour créer des AMC. Ils ont répondu par la négative.

• 1205

Je voudrais donc savoir si les préoccupations que vous évoquez dans votre exposé d'aujourd'hui en ce qui concerne les fonctionnaires de Parcs Canada ont été soumises au groupe que vous représentez à Bonavista.

M. Marlon Quinton: Nous faisons preuve d'ouverture d'esprit. Les gens de Bonavista ne sont pas contre la conservation, bien au contraire, mais la question qui reste sans réponse concerne ce qu'il va nous en coûter.

Au début, on a sans doute eu l'impression qu'il s'agissait d'une entreprise coopérative entre Parcs Canada, Pêches et Océans, les pêcheurs, les intervenants et l'aquaculture.

M. Mark Muise: Je n'ai peut-être pas été assez précis dans ma question.

D'après votre exposé, j'ai l'impression que vous êtes hostiles à la création d'une aire marine de conservation dans le secteur envisagé. Est-ce que vous avez fait part de vos commentaires aux représentants de Parcs Canada en leur disant que vous n'en vouliez pas? D'après ce qu'ils nous ont dit la semaine dernière...

M. Marlon Quinton: Ce n'est pas à moi d'en juger. Je me contente d'écouter les préoccupations des gens et j'en tire mes conclusions. En tant que représentant siégeant au sein du conseil, je dois prendre une décision sur ce que j'entends. C'est la procédure normale.

M. Marc Kielley: C'est la procédure normale. Un comité consultatif nous a chargés d'étudier ce dossier et de voir si la proposition était acceptable. Nous avons constaté qu'elle soulève toute une gamme de problèmes.

M. Mark Muise: Bien.

M. Marc Kielley: Dans l'état actuel des choses, nous ne pouvons être favorables à la création de cette zone dans le secteur envisagé. De façon générale, notre point de vue est celui qui a été formulé par les différents représentants au sein du conseil consultatif et par tous les intervenants de l'extérieur qui se sont exprimés lors des différents ateliers organisés dans la région.

Le président: La question que M. Muise vous posait, c'est est-ce que les fonctionnaires de Parcs Canada connaissent bien votre position?

M. Marc Kielley: Maintenant, sûrement; et ils auraient dû la connaître avant. C'est un des problèmes... et vous vous souviendrez que j'étais ici la semaine dernière. On a soulevé ces questions à de multiples reprises; elles ne disparaîtront pas. Le risque de conflit est infini: on peut essayer de fermer les yeux ou d'y faire face. Il y a peut-être des choses qui ne peuvent pas être corrigées. À notre avis, en tout cas, cela ne peut pas être corrigé parce qu'on n'a vu aucun effort pour le corriger.

M. Mark Muise: Monsieur le président, ma question découlait de la première. La voici: d'après ce que l'on nous a dit la semaine dernière, si le groupe ne veut pas que cela se réalise, je pense que cela ne devrait pas se faire. Si d'après ce que vous savez de l'avis de la population touchée, cela ne devrait pas se faire, pour moi le processus devrait être stoppé. Je me trompe peut-être, mais c'est ce que j'ai compris de ce que les témoins de Parcs Canada nous ont dit la semaine dernière.

M. Marc Kielley: C'est juste. On nous a dit la même chose. Je ne conteste pas ce que vous avez dit. Mais je pense qu'il faut que nous ayons la possibilité d'exprimer notre avis. Nous occupons une place unique. C'est la première fois qu'ils essaient de créer une aire de conservation dans une région de Terre-Neuve ayant ces caractéristiques. Je pense qu'il est bon pour les membres du comité permanent de comprendre notre point de vue et je pense qu'il sera bon pour vous d'y revenir plus tard.

M. Mark Muise: C'est très utile pour nous, et je suis tout à fait d'accord. Je n'essayais pas d'être antagoniste, j'essayais seulement de comprendre ce qui nous a été dit la semaine dernière. Si c'est la vérité, alors il me semble que si votre groupe estime que ce n'est pas faisable et que vous le dites aux fonctionnaires, le processus devrait s'arrêter là.

M. Marlon Quinton: Ce qui va détruire le processus de création de sociétés comme les NMCA au pays, c'est le projet de loi C-48. Nous nous sommes rencontrés et nous avons eu des discussions franches dans une atmosphère de donnant-donnant, mais dès que le projet de loi C-48 est entré dans le tableau, le processus était enclenché depuis trois ou quatre mois, et on a fait marche arrière. C'est ce que j'ai vu dans les consultations.

• 1210

Le président: Monsieur McWhinney.

M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): Je vais reposer la question de M. Muise autrement. Sachez d'abord que j'étais secrétaire parlementaire lorsque la Loi sur les océans a été déposée. Bien sûr, elle renferme implicitement des pouvoirs de conservation, même s'ils ne sont pas aussi importants que ceux qui existeront lorsque la Convention sur le droit de la mer sera ratifiée.

Si l'on donne à Parcs Canada ces pouvoirs, c'est en reconnaissance du fait que la conservation fait intervenir plus d'un seul ministère et que ceux-ci doivent collaborer et se consulter. L'objectif n'est pas toutefois de donner plus d'importance à l'un ou à l'autre. De fait, dans une déclaration faite lors de la dernière session, le président a bien dit que la mise en oeuvre des pouvoirs touchant les pêches exige l'approbation du ministère des Pêches au moyen de ses règlements.

Ma question se rapproche donc de celle de M. Muise. Avez-vous exprimé vos inquiétudes au ministère des Pêches? Lui avez-vous dit que vous êtes touchés et lui avez-vous demandé d'exercer ses pouvoirs?

Autrement dit, vous n'avez pas à vous adresser uniquement à Parcs Canada. Ce n'est pas Dieu le Père. Son rôle est de coordonner son intervention avec celle du ministère des Pêches et d'autres ministères. C'est une façon d'appliquer au niveau intergouvernemental et entre les provinces le fédéralisme coopératif.

Qu'en pensez-vous? Vous êtes-vous adressés au ministère des Pêches?

M. Marlon Quinton: Oui, à un atelier la semaine dernière, il y avait des représentants du ministère des Pêches et des Océans.

M. Ted McWhinney: Oui.

M. Marlon Quinton: Ils nous ont un peu expliqué le concept des zones: quelles zones on peut obtenir; qu'est-ce qu'il peut y avoir dans la zone I, la zone II et la zone III; quelle partie de l'aire serait la zone I, laquelle serait la zone II et laquelle serait la zone III. Est-ce que tout pourrait être dans la zone I? Est-ce que tout pourrait être dans la zone II? Il y a beaucoup de questions.

Mais dans le projet de loi C-48, je conteste l'autorité du surintendant du parc.

M. Ted McWhinney: Mais ils ne vous ont pas dit d'abandonner tout espoir, comme dans l'enfer de Dante.

M. Marlon Quinton: Non.

Comme pêcheur professionnel, il faudrait que je demande un permis au MPO. Il faudrait que je fasse ma demande au bureau du secteur; le permis est délivré à St. John's, qui le renvoie au bureau du secteur. Si je comprends bien la filière, en vertu du projet de loi C-48, il faudrait que je m'adresse au bureau du secteur, qui renverrait la demande au bureau de St. John's. C'est habituellement ainsi qu'on procédait. Mais le MPO pourrait approuver la demande, et la demande pourrait aller au surintendant du parc, qui déciderait ou non de me délivrer un permis.

Deuxièmement, d'après ce que j'ai lu du texte, le surintendant a le pouvoir de m'informer du nombre de permis qu'il va délivrer. S'il y a 500 détenteurs de permis dans une aire donnée, est-ce que le surintendant va me dire à moi ou à un autre qu'ils vont délivrer dix permis d'une semaine, puis en délivrer dix autres? C'est très confus.

M. Ted McWhinney: C'est peut-être plus complexe que ce pourrait l'être si on avait une bonne rédaction de droit administratif. Pour en revenir sur ce que Kevin a dit la semaine dernière, puisque le ministre des Pêches doit approuver les règlements qui touchent les pêches, je me demande ce qui vous pêche de vous adresser à votre député et de lui dire: «C'est une question qui porte sur les pêches, et nous ne pensons pas que la collaboration et la planification ministérielles dans le domaine soient efficaces.» Pourquoi ne vous adressez-vous pas à votre député?

M. Marc Kielley: Avez-vous essayé?

M. Ted McWhinney: Oui. Je l'ai fait avant de venir au Parlement, et cela a marché. Vous êtes très bon communicateur, monsieur Kielley. Où est la difficulté?

M. Marc Kielley: C'est la réalité. Le problème, c'est que nous traitons beaucoup avec Ottawa dans notre métier, et c'est très frustrant.

M. Ted McWhinney: Je sais que c'est frustrant, mais cela peut s'arranger.

M. Marc Kielley: Il est très difficile de régler les problèmes en peu de temps.

• 1215

M. Ted McWhinney: Il y a un équilibre entre les ministères, et Patrimoine Canada n'occupe pas de position dominante. Il faut bien le comprendre.

Le président: Monsieur Bonwick, monsieur Godfrey et monsieur Bélanger.

M. Paul Bonwick (Simcoe—Grey, Lib.): Ma question s'adresse au FMN. J'ai lu votre mémoire. J'ai vu quelles aires vous approuvez, et celles à propos desquelles vous avez des réserves ou formulez des recommandations, et c'est sur une de ces recommandations que porte ma question. Vous dites vouloir renforcer le texte de loi. Cela touche la question du ministère ou du ministre qui a la prépondérance.

À votre avis, appartient-il au comité de faire en sorte que le texte prévoie de tenir compte des conséquences économiques et culturelles des dispositions?

M. Josh Laughren: Oui.

M. Paul Bonwick: Dans ce cas, si je me reporte à votre mémoire—désolé de ne pas avoir entendu ce que vous avez dit, mais cela s'en rapproche peut-être—nulle part je ne vois de mention des questions économiques et culturelles. De fait, vous renforcez l'aspect environnemental dans les recommandations au point que Patrimoine Canada serait le ministère prépondérant. L'approbation du MPO n'est pas nécessaire. Au bout du compte, c'est le ministre du Patrimoine, et non pas le MPO, qui prendrait la décision finale, et d'après votre mémoire cela atténue le problème. Ils ne pourraient peut-être pas en discuter en passant par le MPO, si l'on adoptait votre recommandation, parce que ce ne serait pas le MPO qui aurait le dernier mot. Ce serait plutôt Patrimoine Canada.

D'une part vous dites qu'il faut tenir compte de l'effet économique et culturel de la loi, mais d'autre part vous n'en parlez pas dans vos recommandations. Il y a peut-être quelque chose qui m'échappe. Peut-être pourriez-vous me l'expliquer.

M. Josh Laughren: Volontiers. Pour commencer, je ne me suis pas beaucoup attardé aux considérations économiques parce que je savais que mes collègues allaient s'en occuper. Je devrais être plus clair: je ne veux pas que le ministre du Patrimoine canadien ait le seul pouvoir de décider dans la NMCA. Je reconnais...

M. Paul Bonwick: Qui devrait avoir le dernier mot?

M. Josh Laughren: La décision devrait être prise ensemble. Actuellement, le ministre ne peut prendre une décision que si le ministre des Pêches et des Océans est d'accord. Cela revient à donner le pouvoir et un droit de veto au MPO. Je voudrais qu'ils donnent tous les deux leur approbation avant qu'une décision soit prise, et s'il faut que cela se fasse avant l'adoption du plan de gestion, qu'il en soit ainsi. S'il faut un mécanisme de règlement des différends, créons-en un. Je voudrais que ce soit une prise de décision mixte. Actuellement, le MPO est le seul à décider quelle activité peut avoir lieu ou quelle restriction peut être imposée, et je voudrais que la décision soit prise à deux, et non pas seulement par le MPO.

M. Paul Bonwick: Voulez-vous dire maintenant, et non pas après l'adoption du projet de loi C-48?

M. Josh Laughren: Oui, j'ai dit que cela devrait être précisé.

M. Paul Bonwick: Mais après l'adoption du projet de loi sous sa forme actuelle, le ministère responsable serait le MPO en ce qui concerne...

M. Josh Laughren: En ce qui concerne la pêche, oui, c'est certain.

M. Paul Bonwick: Vous préféreriez que ce ne soit pas le ministère responsable, mais qu'il y en ait un autre doté des mêmes pouvoirs de décider.

M. Josh Laughren: Oui. Il faudrait que ce soit clair. L'administration des pêches devrait relever du MPO. Il est équipé pour cela, il l'a fait et il devrait le faire. Mais les décisions devraient être approuvées par les deux ministres.

M. Paul Bonwick: Je reviens sur l'aspect économique et culturel du projet de loi. Vous dites que ceux qui sont contre le projet de loi vont en parler. Mais je trouve que celui qui vient nous faire des recommandations devrait nous dire qu'il l'approuve, mais cela ne figure pas dans votre exposé.

M. Josh Laughren: Écoutez, ce n'est pas que je veuille faire le malin, mais je suis convaincu que ces questions font l'objet de nombreuses consultations dans les diverses localités. Aujourd'hui, je serais contre la désignation de Bonavista comme AMC. À mon avis, il n'y a pas eu assez de consultations. Il n'y a pas suffisamment d'appuis, et il en faut.

• 1220

C'est ici qu'intervient l'aspect économique... les comités consultatifs locaux et les appuis sur place. C'est ici que cela intervient. Je suis convaincu que c'est à la population de Terre-Neuve dans la région de Bonavista de décider s'il faut aller de l'avant ou non. Ils participeront à la préparation du plan de gestion, et c'est là qu'il sera question des considérations économiques.

Je n'en dirai pas plus, surtout en ce qui concerne Bonavista, parce que je ne connais pas assez la région pour dire exactement ce qui devrait se faire ou pas. Les considérations économiques seront étudiées dans des comités consultatifs et dans les consultations que prévoit déjà le projet de loi.

Le président: D'accord, merci. Je veux seulement préciser, pour qu'il n'y ait pas de malentendu, que le ministre désigné dans le texte est le ministre du Patrimoine canadien.

Monsieur Godfrey.

M. John Godfrey (Don Valley-Ouest, Lib.): Je voudrais faire deux observations pour commencer. Premièrement, il y a une grosse faiblesse dans la façon dont nous organisons nos travaux, parce qu'il est évident qu'il serait intéressant d'entendre en même temps que nos témoins des représentants de Parcs Canada, qui pourraient répondre sur-le-champ aux préoccupations qui ont été exprimées. Il faudra à la place mémoriser tous ces points. J'espère que les représentants du ministère, qui sont dans la salle, ainsi que l'attaché de recherche prendront bien tout en note et pourront nous donner des réponses précises.

Ma deuxième observation, c'est que ce texte ne parle pas nommément de Terre-Neuve. Il porte sur les aires marines de conservation dans tout le pays. Cela signifie que s'il y a un problème particulier concernant la création d'une aire marine précise, il n'appartient pas au comité de bloquer tout le processus, mais plutôt de voir si le processus tel que décrit dans la loi, ou tel qu'il pourrait être amélioré, peut apaiser les inquiétudes de M. Quinton. M. Crête nous a rappelé que l'expérience a été fructueuse au Québec la première fois que l'on en a créé une, ce qui montre qu'il est possible d'obtenir l'adhésion de beaucoup d'intervenants.

On verra si le projet de loi est une réussite ou non si, au bout du compte, la population n'aime pas ce qui se fait... et je crois avoir entendu des témoins dire qu'ils pourraient stopper le processus même si le texte reste tel quel. C'est peut-être un des points forts du texte. Il faut donc comparer le particulier qui nous a été présenté et le général du texte. Il faut voir.

Ce que je voudrais vérifier auprès de M. Laughren, et même de M. Quinton... Si je vous enfermais dans une salle en vous disant que vous ne pourrez pas sortir tant que vous n'aurez pas trouvé un libellé acceptable... Ne vous en faites pas, nous n'allons pas le faire...

M. Marlon Quinton: Je sortirais le premier.

M. John Godfrey: Vous êtes plus costaud, je l'ai remarqué.

Je voudrais essayer de trouver un terrain d'entente. M. Laughren a dit qu'il ne vous forcerait pas à créer une aire marine de conservation avant d'être convaincu qu'elle n'aurait pas tous les aspects néfastes que vous craignez.

Vous avez entendu vos arguments respectifs. À part une entente sur les vertus de la conservation, où est le terrain d'entente? Je vais d'abord poser la question à M. Laughren.

M. Josh Laughren: Et bien, il y a déjà un grand terrain d'entente—et je ne vais pas essayer de sermonner le groupe qui est à mes côtés—à propos de ce que peut coûter la mauvaise gestion des ressources. La population de Terre-Neuve l'a vécu bien plus que moi, qui ai grandi dans le Nord de l'Ontario. Voilà un point d'entente.

Un autre, c'est que les méthodes du passé n'ont pas été aussi efficaces qu'on l'aurait cru, et que les choses sont en train de changer et qu'elles doivent changer. Il faut que je les croie lorsqu'ils disent comprendre l'importance de la conservation. C'est au mécanisme de montrer qu'il peut tenir compte de leurs inquiétudes.

• 1225

Mais, essentiellement, une zone de conservation ou de protection suppose une réduction de l'activité humaine et une interdiction dans certains cas. C'est ce qu'on entend par aire protégée.

Il n'y a pas de quoi se surprendre que l'industrie soit soupçonneuse et inquiète dès le début. Dès qu'on parle d'une aire protégée—ou d'une aire de conservation, pour employer l'expression juste—l'industrie qui se trouve dans ce secteur va d'abord s'élever contre l'idée. La réaction initiale est: pas dans ma cour. L'entreprise n'a rien à gagner par la création d'une aire de conservation et a beaucoup à perdre.

Il faut donc d'abord s'entendre sur le fait qu'une aire de conservation est nécessaire; deuxièmement, sur ce à quoi elle va ressembler; troisièmement, voir si on peut s'entendre sur son emplacement et sa structure. Il faut donc d'abord s'entendre au sommet pour voir si elle est nécessaire; ensuite voir ce qui est nécessaire et enfin déterminer son emplacement.

Le président: M. Godfrey veut poser une courte question, mais auparavant, comme il nous reste une demi-heure et que beaucoup de députés veulent poser des questions, j'invite les députés et les témoins à être brefs.

Monsieur Godfrey, ce sera votre dernière question.

M. John Godfrey: J'aimerais savoir s'il y a des possibilités d'entente ou pas. Ma question est de nature scientifique. M. Quinton dit que les Terre-Neuviens connaissent beaucoup mieux les écosystèmes depuis 10 ans. M. Laughren, dans son mémoire, dit clairement ce qu'il reproche à diverses pratiques. Par exemple, il a parlé de l'aquiculture.

Ma question s'adresse aux Terre-Neuviens. Est-ce que de part et d'autre vous vous entendez sur les données scientifiques? Autrement dit, êtes-vous d'accord avec ce que dit M. Laughren des problèmes causés par l'aquaculture et reconnaissez-vous qu'il faut s'en occuper?

M. Marc Kielley: Comme je suis aquiculteur, je vais répondre.

Il n'y a pas de terrain d'entente à ce que je vois. Nous estimons que nous devrions avoir le droit de pratiquer l'aquiculture. Certaines des choses que M. Laughren a dites ont l'air très plausibles, mais elles ne sont pas étayées par des données scientifiques solides. Ce n'est évidemment pas l'endroit ici pour débattre des avantages et des inconvénients de l'aquiculture, mais ses propos ne font que confirmer les réserves que j'ai à l'endroit des lignes directrices et des politiques de fonctionnement de Parcs Canada. Ils ont mis l'aquaculture à la toute fin des priorités, derrière la pêche, la navigation, l'activité marine de plein air et la sensibilisation de la population. Il n'est pas facile de trouver un terrain d'entente quand on part avec une attitude comme celle-là, avec des préjugés sur la validité de l'aquaculture.

[Français]

Le président: Monsieur Bélanger.

M. Mauril Bélanger (Ottawa—Vanier, Lib.): Merci, monsieur le président.

[Traduction]

Tout d'abord, je tiens à vous remercier, vous et le greffier, d'avoir donné suite aussi rapidement aux souhaits du comité d'entendre ces personnes. Ce n'est que jeudi dernier que vous avez dit que les membres du comité consultatif devraient être invités, et vous avez donc fait vite. Félicitations.

J'aimerais revenir sur votre mémoire, si vous me le permettez. À la première page, vous dites que le conseil que vous représentez est composé:

    de 19 membres: 11 pêcheurs et représentants de l'aquaculture, des transformateurs de poisson, des conseils de développement économique... Le conseil a été nommé par le secrétaire d'État, M. Andy Mitchell, et Mme Sandra Kelly, ministre du Tourisme, des Loisirs et de la Culture de Terre-Neuve et du Labrador.

    Le comité consultatif

...c'est vous...

    est chargé d'examiner la faisabilité de créer une aire marine nationale de conservation sur une portion du littoral de Terre-Neuve allant du Cap Bonavista, baie de Bonavista, jusqu'à North Head, baie Notre-Dame. Le rôle du comité consultatif est de déterminer si l'aire proposée est compatible avec l'utilisation traditionnelle et actuelle de la mer et s'il y a suffisamment d'appui chez les parties prenantes en faveur de cette initiative.

Doit-on conclure que vous avez terminé votre travail?

M. Marlon Quinton: Eh bien, j'imagine que cela dépend du projet de loi C-48.

M. Mauril Bélanger: Non, non. Avez-vous fait votre travail? Avez-vous présenté votre rapport?

• 1230

M. Marlon Quinton: Non, nous n'avons pas encore présenté notre rapport.

M. Mauril Bélanger: Doit-on considérer votre témoignage d'aujourd'hui comme votre rapport?

M. Marlon Quinton: Je pense que cela vous donne une idée de ce qu'a fait le conseil jusqu'à présent.

M. Mauril Bélanger: Je le comprends. Avez-vous achevé vos consultations?

M. Marlon Quinton: À ma connaissance, le conseil n'a pas encore terminé. Il doit préparer un rapport final.

M. Mauril Bélanger: Mais vos consultations, elles sont à peu près achevées?

M. Marlon Quinton: Les ateliers et le processus de consultation sont terminés. La prochaine étape sera de voir s'il y a plus d'appui de la population. S'il n'y a pas moyen...

M. Mauril Bélanger: Si je vous pose la question, monsieur Quinton, c'est parce qu'à mon avis le système marche. Si après les consultations du comité consultatif créé par un ministre fédéral et un ministre provincial celui-ci recommande de ne pas créer une aire marine de conservation dans ce secteur, j'imagine qu'il n'y en aura pas. On cherchera ailleurs, parce que le littoral est très grand. Je pense que l'on envisage une zone III, c'est-à-dire la plate-forme de Terre-Neuve, en quelque sorte. C'est un littoral très étendu, et on peut donc chercher ailleurs.

Là où je veux en venir, c'est ceci: êtes-vous en train de dire à ceux qui vous ont nommés que vous ne voulez pas d'aire marine de conservation dans ce secteur? C'est ce que je vous entends dire. Il faut que ce soit clair parce que...

M. Marlon Quinton: Nous avons des choses à redire contre le projet de loi C-48. Le texte est arrivé pendant que nous faisions notre travail, et nous avons dit au secrétaire d'État que le projet de loi pourrait poser des difficultés dans le secteur en question, et c'est ce que nous étudions.

M. Mauril Bélanger: Excusez-moi, cela, je le comprends. J'ai lu votre mémoire et je vous ai écouté. Oui, vous avez fait des suggestions. Il y a des choses qui vous inquiètent: vous ne seriez pas ici si ce n'était pas le cas.

Néanmoins, le gouvernement du Canada—et certains partis d'opposition—souhaite créer des aires marines de conservation. Vous avez dit qu'en général, c'est l'expression consacrée, vous n'êtes pas contre ces aires marines de conservation. La question que je vous pose est la suivante: que cela se fasse en vertu du projet de loi C-48 ou de l'autorité d'un autre ministère, êtes-vous...? Êtes-vous le président de ce groupe?

M. Marlon Quinton: Non.

M. Mauril Bélanger: Qui est le président?

M. Marlon Quinton: C'était M. Melindy.

M. Mauril Bélanger: Êtes-vous autorisé à parler au nom du groupe?

M. Marlon Quinton: Oui, j'ai été envoyé par le conseil.

M. Mauril Bélanger: En tant que quelqu'un autorisé à parler au nom du groupe, êtes-vous arrivé à la conclusion que, quelle que soit l'autorité invoquée, qu'il s'agisse du projet de loi C-48, du MPO ou de toute autre autorité, vous ne voulez pas d'une aire marine de conservation dans ce secteur? Est-ce que c'est votre conclusion et est-ce que l'on peut officiellement communiquer votre décision aux deux ministres qui ont créé votre groupe?

M. Marlon Quinton: C'est pour ça que nous sommes ici, et c'est ce que nous disons.

M. Mauril Bélanger: Donc, la population ne veut pas d'une aire marine de conservation là-bas? C'est bien ça?

M. Marlon Quinton: Cela touche beaucoup de monde, et après en avoir discuté dans la communauté, la réponse est non.

M. Mauril Bélanger: Les gens n'en veulent pas.

M. Marlon Quinton: Non. Ils ont examiné le projet de loi C-48, ils y ont réfléchi et disent qu'ils n'en veulent pas.

M. Mauril Bélanger: Je comprends.

Je vais essayer une dernière fois, monsieur le président, si vous me le permettez.

Supposons que l'on mette au rancart le projet de loi C-48, qu'on vous écoute et qu'on dise: vous avez raison, mettons tout cela à la poubelle. Supposons un instant que l'on fasse cela. Il n'en demeure pas moins qu'il y aura à un moment donné au Canada quelque 20 aires marines de conservation dans les secteurs qui ont été identifiés et qu'il y en aura une quelque part sur la côte de Terre-Neuve. Voici la question que je vous pose: devons-nous comprendre qu'à la suite de vos consultations la collectivité là-bas a décidé qu'en aucune circonstance, peu importe qui est responsable, que ce soit le MPO, Environnement Canada, ou qui que ce soit d'autre, ils ne veulent absolument pas d'une aire marine de conservation dans leur coin? Est-ce la conclusion?

M. Marlon Quinton: Oui.

M. Mauril Bélanger: D'accord. Merci.

Le président: Monsieur Mark.

• 1235

M. Inky Mark: Je n'ai qu'une seule question, monsieur le président. Encore une fois, c'est le reflet de ce qui se passe actuellement.

Vous participez au processus de consultation. C'est ironique qu'il soit question de consultation de la communauté dans le projet de loi, alors même que nous avons justement des problèmes dans le processus de consultation. Alors comment pourrions-nous à votre avis changer ce processus?

M. Marc Kielley: Le projet de loi a été déposé après la mise sur pied du groupe de consultation et la désignation du secteur, donc après le fait, et cela a beaucoup compliqué les choses. Voilà ce qui s'est passé. Les gens avaient beaucoup de préoccupations auparavant, mais les seuls véritables documents que nous avions étaient des documents de discussion rédigés par Parcs Canada. De plus, nous avons fait quelques recherches sur les lignes directrices et les principes directeurs de Parcs Canada. C'était notre principale source d'information pour évaluer si ce projet était bon ou mauvais. Une fois que le projet de loi a été déposé, il a fait disparaître toute velléité que nous pouvions avoir d'appuyer le projet.

M. Inky Mark: Les organismes ont-ils écouté ce que vous aviez à dire dans le cadre de ce processus de consultation?

M. Marc Kielley: Je dois reconnaître que oui, ils ont écouté. Vous vous étonnerez peut-être de m'entendre dire cela, mais que peuvent-ils y faire? Le projet de loi a été rédigé et maintenant il doit cheminer à toutes les étapes parlementaires. Alors ils doivent faire leur travail de fonctionnaires et essayer de présenter sous le meilleur jour possible la position du ministère et lui faire rapport sur divers problèmes. Chose certaine, au niveau local, la plupart des gens ne sont pas habilités à prendre des décisions importantes dans ces matières.

Mais je pense qu'il y a beaucoup à apprendre de l'expérience de Terre-Neuve, parce que si vous voulez essayer de convaincre d'autres Canadiens dans d'autres régions d'accepter ce projet, vous devez obtenir l'assentiment des collectivités, surtout si vous voulez implanter cela dans des secteurs où le gagne-pain des gens en sera affecté. Je pense que peut-être...

Le président: Mais c'est justement le but de tout cet exercice. C'est votre raison d'être. S'il y a un comité consultatif chargé de sonder le public, n'est-ce pas justement ce que vous voulez? N'est-ce pas ce que l'on vous a accordé?

M. Marc Kielley: Bien sûr, et c'est la raison de notre présence ici; cela nous donne une autre occasion d'exprimer notre point de vue devant vous...

Le président: Oui, exactement.

M. Marc Kielley: ...parce que c'est vous qui êtes les décideurs.

Le président: Donc, tout le monde devrait être...

M. Paul Bonwick: Heureux que le processus fonctionne.

Le président: Monsieur Mark.

M. Inky Mark: Je voudrais faire une brève observation. Monsieur le président, le seul problème, c'est que si nous sommes empêtrés dans ces anicroches aujourd'hui, alors que la mesure n'est pas encore en vigueur, imaginez ce qui se passerait si la loi était en vigueur. À qui ces gens-là pourraient-ils s'adresser? Ils ne peuvent pas s'adresser à notre comité.

M. Paul Bonwick: C'est le processus prévu.

M. Inky Mark: Je le sais, mais nous disons que si...

[Français]

Le président: Monsieur Dumas.

M. Maurice Dumas (Argenteuil—Papineau, BQ): Bonjour, messieurs. J'ai bien aimé les arguments que nous a soumis M. Quinton. Je veux d'abord faire un commentaire sur son mémoire: pour démolir un projet de loi, on ne pourrait pas trouver mieux.

Je suis bien d'accord sur la remarque qu'il fait au sujet du ministre des Pêches et des Océans, dont l'autorité sera minée par ce projet de loi. Il y a déjà Parcs Canada; il y a Pêches et Océans et il y a Patrimoine canadien. Il y a un dicton qui dit en français que trop de chefs gâtent la sauce. Ce sera peut-être le cas avec ce projet de loi.

Ma question s'adresse à M. Laughren. Vous parlez à la page 3 de votre mémoire, au point 5, de «l'insistance sur la possession par le Canada d'un titre incontestable sur les terres visées». J'aimerais vous entendre parler des relations que vous avez avec le Québec. Quelle sera votre position face aux revendications du Québec dans ce domaine?

[Traduction]

M. Josh Laughren: Je réponds à cela que je ne suis pas constitutionnaliste, je ne prétends pas l'être, et je ne peux vraiment pas dire qui a raison et qui a tort et qui a compétence en la matière.

Je me retranche dans mon domaine de compétence, et ma préoccupation, c'est qu'une autorité soit clairement responsable de la gestion d'une aire de conservation, et le seul moyen de faire cela, à mes yeux, c'est de faire en sorte que Parcs Canada ait un titre incontestable. S'il y a une autre façon de procéder pour assurer la protection à long terme, je suis disposé à l'envisager, mais je ne vois pas d'autres moyens.

[Français]

M. Maurice Dumas: Merci.

[Traduction]

Le président: Je donne maintenant la parole à M. Jordan, et ensuite à M. Muise. Cela mettra fin à la période des questions.

• 1240

M. Joe Jordan (Leeds—Grenville, Lib.): J'ai seulement deux ou trois questions à poser à M. Quinton.

Vous dites—et il me semble que cette discussion est hypothétique—qu'à l'intérieur de l'aire qui a été identifiée, il y avait 2 000 détenteurs de permis de pêche et 35 détenteurs de permis d'aquaculture. Pouvez-vous me donner une idée, juste un chiffre approximatif, du pourcentage de l'activité économique qui provient des pêcheurs traditionnels et du pourcentage qui provient de l'exploitation d'entreprises d'aquaculture? Est-ce à peu près moitié-moitié?

M. Marlon Quinton: Eh bien, Marc peut vous donner un chiffre approximatif sur l'aquaculture.

M. Joe Jordan: D'accord.

M. Marc Kielley: Eh bien, dans l'aquaculture, il y a 35 entreprises qui font surtout l'élevage de la morue, des moules et peut-être des pétoncles. L'aire envisagée, si l'on y inclut la zone tampon, comprend environ 90 ou 95 p. 100 de la production de moules de Terre-Neuve. La valeur actuelle de cette production est probablement d'environ cinq millions de dollars. Je répète que c'est une industrie très jeune et en développement. Elle a le potentiel voulu pour connaître une forte croissance.

M. Joe Jordan: Elle a un potentiel de croissance. Bien, mais je ne veux pas patauger—si l'on peut dire—dans les aspects écologiques de l'aquaculture.

M. John Godfrey: Vous en auriez par-dessus la tête.

M. Joe Jordan: Mais je veux seulement signaler que quand vous réclamez que le MPO ait la primauté, pour éviter qu'il n'y ait trop de cuisiniers, comme le dit mon collègue... je rappelle que le MPO administre également la stratégie fédérale de développement de l'aquaculture. Le ministère a un mandat de développement économique. Alors quand vous dites que le fait de confier cela à Patrimoine Canada fait tomber le dossier au bas de la pile des priorités, je rétorque que le fait de mettre le MPO en charge du dossier le remet au sommet de la pile. C'est bien beau d'avoir trop de cuisiniers, mais ici vous avez quelqu'un qui ne se contente pas de cuisiner; il mange également.

Percevez-vous un problème quelconque—c'est d'ailleurs un problème qui va se poser de toute manière, indépendamment de cela—dans le fait que le MPO ait cette espèce de mandat schizophrénique, puisqu'il essaie de favoriser le développement économique de cette industrie, tandis qu'il est par ailleurs chargé d'en réglementer les conséquences écologiques? À votre avis, est-ce un problème qui va se poser à l'avenir?

M. Marc Kielley: Je ne sais pas trop par où commencer pour répondre à cela. Oui, c'est une organisation qui est quelque peu schizophrène; je pense qu'on peut le dire sans se tromper. C'est une expression très galvaudée.

Du point de vue de l'industrie, nous ne leur demandons pas vraiment de nous aider à assurer le développement de l'industrie. Nous leur disons seulement: enlevez-vous de notre chemin. Nous sommes conscients qu'il faut bien avoir certains règlements. Veillons à ce que les règlements soient raisonnables et fondés sur des travaux scientifiques solides, le cas échéant, et sur une logique inattaquable.

Pour l'essentiel, le MPO n'a pas les ressources voulues pour livrer la marchandise pour ce qui est de la stratégie fédérale de l'aquaculture. Vous êtes probablement au courant de cela.

M. Joe Jordan: Oui.

M. Marc Kielley: Cela a été reconnu. Ce qui manque, notamment, dans cette stratégie générale, c'est un champion de l'industrie; or on a récemment nommé un commissaire de l'aquaculture. De plus, on met actuellement sur pied un fonds de développement pour favoriser l'essor de l'industrie, mais ce fonds n'aidera pas directement en finançant des entreprises; il apportera son aide d'autres manières.

Je ne sais pas si cela répond à votre question.

M. Joe Jordan: Non, je pense qu'il faudra aborder tout cela de façon très responsable.

M. Marc Kielley: Oui, bien sûr.

M. Joe Jordan: Je ne prends pas parti, mais je crois simplement que la croissance de l'industrie et le potentiel de croissance sont tels que nous devrions peut-être reconsidérer cette attribution des tâches.

M. Marc Kielley: Ce mandat, oui.

Le président: Monsieur Muise, dernière question.

M. Mark Muise: Je m'intéresse notamment aux conséquences négatives que pourrait avoir la création d'une AMC pour certaines localités. Si cela empêche de pêcher ou impose des contraintes quelconques susceptibles d'avoir une incidence économique négative sur une localité, cela me préoccupe vivement.

Je suis assez content que vous soyez au milieu de cet exercice pendant que nous étudions ce projet de loi. Voici où je voulais en venir avec mes questions de tout à l'heure. J'en reviens donc à ce que je disais tout à l'heure. Si l'une des parties ne veut pas que cela se fasse et si c'est vraiment votre position définitive et que vous dites: non, nous ne voulons pas d'AMC dans la baie de Bonavista, dans le secteur délimité ici, et si cela stoppe le processus et nous amène à envisager un autre secteur, cela pourrait dissiper en partie mes craintes et les craintes que vous avez probablement.

Je voudrais entendre vos commentaires là-dessus.

M. Marlon Quinton: Du point de vue de Terre-Neuve, je pense que cela ne changerait rien. Si on décide de ne pas faire cela à Bonavista et dans la baie Notre-Dame et si l'on va plutôt vers la baie Fortune et la baie Sainte-Marie, à la pointe sud de l'île, je pense que nous serions toujours confrontés aux mêmes problèmes. Même si l'on passait de la côte nord-est de Terre-Neuve à la côte ouest de Terre-Neuve, les mêmes problèmes se poseraient toujours. Et même sur la côte nord du Québec, je pense que ce ne serait pas différent.

• 1245

M. Mark Muise: Mais si les comités qui étudient tout cela en viennent à la même conclusion que vous et que l'on décide que dans ces secteurs il ne faut pas créer d'AMC... Monsieur Kielley, peut-être avez-vous des commentaires à faire.

M. Marc Kielley: Je devrais peut-être commenter cela.

À mon avis, ce qui manque dans le processus, c'est une présélection. Je pense qu'il faut d'abord faire un inventaire complet de la côte pour voir quels groupes d'utilisateurs habitent dans tel ou tel secteur. Premièrement, y a-t-il possibilité de conflit, à la lumière de ce que l'on veut réaliser dans ce projet de loi et les politiques proposées?

Si l'on faisait un tel examen préalable, on verrait qu'il y a un certain potentiel ici ou là, qu'il y a des activités de pêche ou d'aquaculture à tel ou tel endroit, et l'on examinerait cela à la lumière de ce qu'on veut réaliser avec le projet de loi, et l'on pourrait alors assez rapidement dire s'il y a lieu d'aller de l'avant ou bien si l'on devrait plutôt procéder à certaines consultations.

M. Mark Muise: Je vois.

M. Marc Kielley: Si l'on avait fait cela dès le début à Terre-Neuve, nous ne serions probablement pas ici aujourd'hui. Mais c'est facile à dire pour nous, en rétrospective.

M. Mark Muise: Personnellement, je suis content que vous soyez ici, parce que ce dont nous discutons est très pertinent et nous aidera à décider si cette mesure législative est valable ou pas. Et si nous pouvons établir que tout cela fonctionne bien, que le processus donne de bons résultats et permet de protéger vos intérêts, je pense que c'est bon.

M. Marc Kielley: Oui, bien sûr.

Mais je sais par ailleurs que le gouvernement a pris des engagements à l'égard de 29 de ces aires. Je ne sais pas comment on en est arrivé à ce chiffre, mais je pense que vous ne devriez pas autant mettre l'accent sur le grand nombre et que vous devriez plutôt chercher à établir des aires de conservation de qualité qui ne vont pas créer de conflit et déplacer des gens, comme nous disons que cela arrivera à Terre-Neuve. Ne soyons pas obnubilés par l'objectif de créer 29 de ces machins d'ici à une certaine date.

Le président: Avant d'aller plus loin, je voudrais signaler, comme je l'ai fait l'autre jour, qu'à mon avis notre discussion aujourd'hui est marquée par un malentendu sur de nombreux aspects du projet de loi, et je tiens à tirer les choses au clair.

Premièrement, vous avez dit que le projet de loi C-48 a été présenté en plein milieu des consultations et que cela a nui. Mais si le projet de loi C-48 est adopté, le ministre ne peut pas choisir de faire ou de ne pas faire des consultations; il n'y a pas à discuter, il ou elle doit le faire. En effet, on dit bien au paragraphe 10(1) que le ministre:

    favorise la consultation des parties...—notamment les ministres ou organismes fédéraux ou provinciaux et les communautés côtières ou organisations autochtones touchées...

Le ministre n'a donc pas le choix.

Deuxièmement, une fois qu'elle a décidé de constituer une AMC, elle doit s'adresser à tous les comités, non seulement de la Chambre des communes mais aussi du Sénat, qui s'occupent de la question, ce qui comprend le Comité des pêches et des océans.

Ensuite, aux termes du paragraphe 7(2):

    Le comité saisi

...et l'on précise au paragraphe précédent que c'est le comité de la Chambre des communes et le comité du Sénat...

    peut présenter à la Chambre, dans les 20 jours de séance suivants,

...c'est-à-dire suivant la proposition visant à constituer une aire ou à en modifier les limites...

    un rapport de rejet de la proposition.

Si le comité rejette la proposition, il doit en faire rapport à la Chambre.

Quand une aire de conservation est visée par un plan de gestion, aux termes du paragraphe 9(1), le plan de gestion lui-même doit faire l'objet de consultations de toutes les communautés touchées. Les dispositions du plan relatives à la pêche, l'aquaculture, la gestion des pêches et la navigation maritime sont assujetties à l'accord non seulement du ministre du Patrimoine canadien, mais aussi du ministre des Pêches et des Océans.

Quand on prend des règlements aux termes du paragraphe 16(2):

    Les règlements visés au présent article qui ont trait à la gestion et à la protection des pêches ou qui limitent ou interdisent la pêche, l'aquaculture, la navigation maritime ou toutes autres activités liées à la sécurité maritime sont pris sur la recommandation du ministre et du ministre des Pêches et des Océans.

• 1250

Je vous fais remarquer, monsieur Quinton, puisque vous semblez inquiet au sujet du paragraphe 16(7), que ce paragraphe stipule que:

    Les règlements visés au présent article

...c'est-à-dire l'article 16...

    peuvent autoriser les directeurs à modifier, dans les circonstances et la mesure qu'ils précisent, les exigences qu'ils comportent.

Donc, si le ministre des Pêches ne veut pas confier ces pouvoirs au directeur d'une AMC, il n'a qu'à ne pas en faire la recommandation. Si vous dites qu'il faudrait donner le pouvoir au ministère des Pêches et des Océans pour résoudre votre problème et vous mettre plus à l'aise... Le règlement lui donne déjà un droit de veto, de sorte que s'il ne veut pas que le directeur dispose de ces pouvoirs, il n'a qu'à ne pas les lui donner.

Il y a donc deux comités, un de chaque Chambre, et chacun de ces comités se penche sur un aspect particulier. Il y a des plans de gestion. Il y a des consultations qui sont obligatoires, et puis il y a un règlement qui donne un droit de veto au ministère des Pêches et des Océans. J'ai trouvé qu'il fallait que je dise cela clairement, parce qu'il me semble que nous parlions comme s'il n'y avait aucune sauvegarde et comme si le ministère des Pêches et des Océans n'existait pas. C'est un fait que les consultations sont obligatoires. On ne peut pas s'y soustraire, et si cela ne fonctionne pas et que vous refusez d'y participer, il faudrait un ministre stupide pour les imposer tout simplement. Il me semblait que je devais expliciter tout cela.

Monsieur Bélanger.

M. Mauril Bélanger: Je m'interroge au sujet d'une réponse que l'on a faite à une question. Si j'ai bien compris, vous avez déjà conclu, bien que le rapport n'ait pas encore été présenté au ministre, que l'on ne doit pas créer d'aire marine de conservation à l'endroit envisagé, mais vous ajoutez ensuite que la conclusion serait la même n'importe où ailleurs le long de la côte. J'ai de la misère à admettre cela. Nous avons par exemple entendu un argument selon lequel 95 p. 100 de l'aquaculture est concentrée dans ce secteur; alors il ne peut pas en être de même ailleurs.

Personne dans cette salle n'appuierait la constitution d'une aire marine de conservation sans avoir consulté les gens sur place. S'ils sont contre, j'espère que l'on retirera complètement le projet. Mais je me demande pourquoi le gouvernement de Terre-Neuve, dans le cas qui nous occupe, appuie le projet. Nous n'avons pas eu réponse à cela. Et puis nous devrions laisser les gens qui seraient visés par la création d'une aire marine de conservation ailleurs le long de la côte décider eux-mêmes de la question et ne pas préjuger de leur décision.

Le président: Monsieur Muise, je crois que nous avons...

M. Mark Muise: Ce n'est pas une question. Je voudrais m'adresser à la présidence et au comité quand nous en aurons terminé.

Le président: Je sais. Je pense que nous devrions en terminer maintenant. Nous devons tenir une brève réunion au sujet de nos travaux.

Je vous remercie beaucoup d'avoir comparu aujourd'hui. Nous vous en sommes vraiment reconnaissants. Cela démontre que dans tout dossier il y a du pour et du contre. Je pense qu'il a été très important pour nous d'entendre les deux parties opposées. Je vous remercie beaucoup d'être venus.

Si les députés veulent bien rester, nous devons étudier certaines motions d'affaires courantes au sujet de nos plans de voyage.

M. Mark Muise: Avant cela—j'ignore si mon intervention est recevable ou non, mais si je dois donner préavis de ma motion, je vais le faire en prévision de la prochaine réunion ou des réunions qui suivront. Je me demande si vous seriez disposés à entendre une motion visant à faire comparaître à la prochaine réunion un représentant des Parcs ou du Patrimoine, afin que nous puissions tirer au clair certaines de ces préoccupations qui, parfois,...

Le président: Monsieur Muise, il y a constamment plusieurs représentants de Parcs Canada ici présents, mais nous voulons qu'ils soient...

M. Mark Muise: À la table.

Le président: Si vous voulez qu'ils prennent place à la table pour témoigner, je suis sûr que les députés ne s'y opposeront pas, et nous veillerons à ce que cela se passe ainsi. Il n'est pas nécessaire de présenter une motion. Nous pouvons simplement leur demander de prendre place à la table.

M. Mark Muise: Merci, monsieur le président.

Le président: Nous devons adopter certaines motions au sujet de notre étude de la culture.

Premièrement, la rédaction du document a pris plus de temps que prévu. C'est toujours la même chose. Nous avons approuvé certains montants et... C'est fondé sur le nombre de jours que diverses personnes ont travaillé à cette ébauche. C'est un document considérable.

• 1255

La motion est donc la suivante. Sous réserve de la disponibilité des fonds, que les contrats de Wanda Noel, Kevin Burns et David Black soient modifiés de la façon suivante: pour Wanda Noel, le montant passe de 15 000 $ à 26 900 $; pour M. Kevin Burns, le montant passe de 10 000 $ à 15 000 $; et pour M. David Black, le montant passe de 12 500 $ à 17 500 $; et que la présidence demande les fonds nécessaires au Sous-comité du budget du Comité de liaison.

Approuvez-vous ces nouveaux montants et demandes en ce sens?

Le greffier du comité: Monsieur le président, je crois qu'il faudrait ajouter: «et que le nombre de jours de travail des experts-conseils soit modifié en conséquence». En effet, leur rémunération est une allocation journalière, et il faudra donc modifier le nombre de jours.

    (La motion est adoptée)

Le président: La deuxième motion est nécessaire parce qu'il n'y a plus de places au tarif excursion sur les vols que nous voulions prendre, et nous devrons donc prendre des vols directs dans certains cas.

La motion est la suivante: Que la présidence demande une somme supplémentaire de 10 000 $ pour les déplacements des sous-comités pendant la semaine du 21 février 1999.

M. Mark Muise: Monsieur le président, je m'interroge à ce sujet, car je crois que nous utiliserons nos points pour nos déplacements.

Le président: C'est seulement pour le personnel.

    (La motion est adoptée)

Le président: La motion suivante est celle-ci: Qu'en conformité avec l'article 108(1) du Règlement, le comité se divise en deux sous-comités pour tenir des audiences durant la semaine du 21 février 1999—nous avons déjà donné notre accord à cela; il s'agit seulement de consigner le tout par écrit—que les sous-comités soient chacun composés de cinq députés, trois des partis d'opposition et deux du parti ministériel; que le président du comité permanent désigne les présidents des sous-comités; et que les sous-comités aient tous les pouvoirs du comité permanent, à l'exception du pouvoir de faire rapport à la Chambre.

C'est une motion standard.

M. Mauril Bélanger: Monsieur le président, si nous approuvons cela, mais que nous n'avons pas suffisamment de députés, qu'arrive-t-il?

Le président: Je pense que nous n'aurons pas en effet le nombre voulu de députés. Nous n'avons pas précisé un nombre minimum de députés dans la motion; il faudra simplement réduire le quorum pour le fixer peut-être à deux personnes.

C'est un point valable, monsieur Bélanger. Peut-être pourrions-nous ajouter la possibilité d'un quorum réduit.

M. Mauril Bélanger: Non, je pensais plutôt au contraire à augmenter le nombre de députés. À St. John's, monsieur le président, il n'y aura que trois députés, et les ministériels ne seront pas représentés. À Halifax, trois députés seulement, et le gouvernement n'est pas représenté. À Moncton, il y en a deux, et le gouvernement n'est pas représenté. J'ose dire que cela pose un problème.

Le président: Le whip s'en occupe. Il y a plusieurs comités qui se déplacent en même temps. Comme c'est une semaine de relâche et à cause des votes à la Chambre, tous ces comités doivent voyager en même temps. Dans le cas de M. Bonwick, par exemple, il aurait pu participer à trois comités différents en même temps. Le whip lui a demandé de siéger au Comité de l'agriculture, et nous avons donc un problème. Si nous augmentons le nombre, mais que nous ne trouvons pas de députés...

M. Mauril Bélanger: Je ne parle pas d'augmenter le nombre; je voudrais seulement qu'on ait au moins le nombre que nous avons fixé.

Le président: Je sais. C'est pourquoi j'ai suggéré de fixer un quorum de seulement deux.

M. Mark Muise: Notre caucus compte 19 députés, et quand je regarde en face je vois qu'ils en ont 155. Je trouve très difficile à croire que le whip ne pourrait pas utiliser son fouet pour obliger quatre ou cinq députés à assister à ces réunions.

Le président: Le greffier et moi-même avons communiqué avec le whip à plusieurs reprises pour trouver des députés. Ce n'est pas mon rôle.

M. Paul Bonwick: Ne pouvons-nous pas prendre quelqu'un des finances pour assister à une séance d'une journée du Comité du patrimoine à Moncton? Quant aux réservistes que nous avons pour le patrimoine, contrairement aux partis de l'opposition, nous devons veiller à avoir un nombre majoritaire de députés à tous les comités en déplacement. C'est pourquoi nous avons des conflits d'horaires. C'est une responsabilité propre au gouvernement...

Le président: Monsieur Mark.

M. Inky Mark: Monsieur Bélanger, je peux vous assurer que rien d'extraordinaire ne va se passer. Nous devons écouter les gens qui comparaissent devant le comité, et je ferai certainement de mon mieux pour m'assurer qu'ils puissent le faire.

Le président: Je m'en remets à vous: vous pouvez adopter la motion telle quelle ou bien ajouter un quorum réduit. Si vous voulez réduire le quorum, il n'en tient qu'à vous; si c'est ce que les députés veulent faire, nous le ferons.

• 1300

On précise déjà un quorum. Peut-être devrions-nous laisser la motion telle quelle.

M. Paul Bonwick: Nous devrions le réduire. Si nous arrivons quelque part et qu'il n'y a que deux députés et que nous n'avons tpas le quorum, nous ne pourrons pas tenir la réunion, et tout le monde repartira bredouille.

M. Mauril Bélanger: La règle pour entendre des témoins est de trois, n'est-ce pas?

Le greffier: Pour le comité plénier.

Le président: Oui, dans un sous-comité nous pouvons fixer nos propres règles.

Je vais mettre la motion aux voix.

    (La motion est adoptée)

Le président: La séance est levée.