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AGRI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON AGRICULTURE AND AGRI-FOOD

COMITÉ PERMANENT DE L'AGRICULTURE ET DE L'AGROALIMENTAIRE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 23 octobre 1997

• 0900

[Traduction]

Le président (M. Joe McGuire (Egmont, Lib.)): La séance est ouverte.

Nous allons reprendre l'examen du projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi sur la commission canadienne du blé et d'autres lois en conséquence.

Nous souhaitons la bienvenue aux représentants des United Grain Growers, M. Ted Allen, président, et M. Blair Rutter, directeur, Développement des politiques.

Bienvenue, messieurs.

M. Ted Allen (président, United Grain Growers): Merci, monsieur le président.

Le président: Vous avez sans doute été avisés de nos procédures. Nous allons entendre votre déclaration pendant 10 minutes et passer ensuite directement aux questions. Nous disposons de 45 minutes seulement, si bien que nous devons être le plus concis et efficaces possible. Comme vous le savez, nous avons cinq partis maintenant et n'avons donc pas le temps de faire trop d'effets théâtraux ou d'apartés.

Des voix: Oh, oh!

Le président: Nous allons entendre M. Allen.

M. Ted Allen: Merci, monsieur le président. C'est un honneur pour les United Grain Growers de pouvoir aujourd'hui faire part de leurs points de vue au comité.

La structure des UGG a toujours été telle que le choix est notre principe directeur pour toute question de cette nature. Cela nous amène donc à conclure à regret que le projet de loi entier est fondamentalement défaillant, étant donné que les producteurs ne disposent pas d'un tel choix. Selon nous, on cherche par ce projet de loi à arrêter le temps, voire même à revenir en arrière. Par conséquent, à long terme, ce projet de loi est voué à l'échec et nous allons continuer à assister à un débat irritant parmi les producteurs de l'Ouest canadien au sujet des moyens de commercialisation qu'ils préféreraient.

Depuis que le comité s'est réuni au printemps, plusieurs entreprises commerciales d'État se sont vues retirer leurs pouvoirs de monopole. Il vaut également maintenant la peine de revenir un peu au passé pour voir ce que nos ancêtres, pionniers du mouvement coopératif, avaient à dire au sujet du choix. Nous avons cité dans notre mémoire plusieurs d'entre eux et ils sont véritablement consumés, si ce qualificatif n'est pas trop fort, par l'idée que la participation à ces genres d'entités doit être volontaire pour en assurer le succès.

Par conséquent, ceux qui qualifient ce projet de loi de «coopératif» ne sont pas vraiment en accord avec les fondateurs du mouvement coopératif au sujet des principes directeurs fondamentaux de toute coopération, soit le choix et la liberté.

Je vais maintenant passer à quelques-uns des aspects du projet de loi qui nous préoccupent.

Tout d'abord, la question de la responsabilité à l'égard des agriculteurs. Il suffit de lire la définition dans la loi de l'objectif de la Commission pour s'apercevoir que nulle part il n'y est fait mention de maximiser les revenus des agriculteurs ou des syndicats. La commercialisation, de façon ordonnée, représente le mandat de la Commission. Cela nous inquiète énormément. Il suffit d'examiner le mandat du Conseil des grains du Canada pour s'apercevoir qu'il est beaucoup plus convivial à l'égard des producteurs; il doit agir dans l'intérêt des producteurs de céréales.

• 0905

Le modèle d'organisation sociale présente également de gros défauts. Essentiellement, ce soi-disant conseil d'administration n'en est pas vraiment un selon la définition que nous connaissons. C'est un autre conseil consultatif. C'est un conseil consultatif du gouvernement, plutôt qu'un conseil consultatif de la Commission du blé, mais c'est néanmoins un conseil consultatif. Le pouvoir d'embaucher et de congédier le premier dirigeant n'y figure pas, alors que c'est le seul pouvoir important de tout conseil d'administration.

Il est instructif de voir ce qui s'est passé récemment à propos d'un modèle semblable. Il en a été question dans les journaux. L'Office de commercialisation du poisson d'eau douce du Manitoba est doté d'une structure semblable. C'est une création du gouvernement, qui cependant fonctionne complètement comme coopérative. Pourtant, cet office a vu récemment son premier dirigeant, en poste depuis 16 ans, compétent selon tous les critères, congédié sommairement, sans que le président du conseil d'administration et les pêcheurs qui le composent n'en soient conscients. C'est le principal risque que l'on court lorsque les pouvoirs du gouvernement l'emportent sur ceux du conseil et qu'il est en mesure d'embaucher et de congédier le premier dirigeant du conseil. En outre, ce conseil doit mettre en oeuvre les instructions données par le gouvernement au moment où ce dernier le décide. Son indépendance est donc pratiquement inexistante.

Plutôt que de trop m'étendre, je vais simplement aborder la question du fonds de réserve, qui nous préoccupe également beaucoup, en raison de sa nature obligatoire. Ce fonds a beaucoup de mérite s'il est à participation volontaire, mais il choquera beaucoup de personnes s'il représente un prélèvement obligatoire.

En ce qui concerne la clause d'exclusion, il est complètement irréaliste de s'attendre à ce qu'un conseil dont le mandat est d'agir dans les intérêts de la Commission plutôt que dans ceux des agriculteurs recommande une diminution de ses pouvoirs, une diminution des récoltes qu'il gère. Par conséquent, il s'agit de nouveau d'une proposition irréalisable.

La clause d'inclusion également a le potentiel de susciter beaucoup de débat. Toutes sortes de questions se posent au sujet des pouvoirs prévus par cette clause, laquelle produira plus de colère que de lumière. Là encore, nous disons que si la Commission était à participation volontaire, cette question ne se poserait pas, car ceux qui souhaiteraient participer à l'entreprise pourraient le faire et ceux qui ne le voudraient pas ne seraient pas tenus de le faire.

Je vais maintenant céder la parole à mon collègue qui va faire quelques observations très rapides. M. Rutter souhaite peut-être ajouter quelques éléments à ce que je viens de dire.

M. Blair Rutter (directeur, Développement des politiques, United Grain Growers): Le problème que pose ce projet de loi, d'après nous, c'est qu'il restreint les choix des agriculteurs canadiens; or, nous croyons que le blé appartient aux agriculteurs et que ces derniers devraient être libres d'en faire ce qu'ils veulent. Dans une société libre et démocratique, les gens devraient pouvoir jouir de leurs biens et en faire ce qu'ils veulent.

Ce projet de loi vise en fait à permettre à un groupe d'agriculteurs d'imposer sa volonté à un autre. Comme l'a dit M. Allen, cela va à l'encontre des principes de coopération bien compris et défendus par les premiers leaders du mouvement coopératif.

• 0910

Permettez-moi de souligner que les UGG appuient et respectent absolument les agriculteurs qui souhaitent mettre en commun leurs céréales et les commercialiser collectivement en ayant recours aux services de la Commission canadienne du blé. Nous nous opposons par contre à ce que tous les agriculteurs soient tenus de le faire.

Ce projet de loi n'apaise absolument pas la mauvaise humeur que l'on retrouve dans les Prairies. Sous son libellé actuel, ce projet de loi consacre cette mauvaise humeur et fait tout pour que la bataille se poursuive à la campagne, alors qu'il faudrait traiter de ce problème au Parlement, le résoudre à cet endroit et faire de la Commission une organisation à adhésion volontaire.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci, monsieur Rutter.

Nous allons passer directement à M. Hill qui dispose de sept minutes.

M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.): Merci, monsieur le président.

Bienvenue, monsieur Allen et monsieur Rutter. Je vous remercie d'être venus si tôt ce matin pour faire votre exposé devant le comité. Je vais commencer par une question et céder ensuite la parole à mon collègue de Vegreville.

Il est intéressant de noter que votre exposé met essentiellement l'accent—et je remarque que c'est un exposé très fouillé—sur l'option de choix; en d'autres termes, donner aux agriculteurs plus d'options de commercialisation ainsi que la liberté de choix. C'est certainement ce qui a été le thème central de l'opposition officielle au sujet de ce projet de loi en particulier.

J'aimerais passer à une question dont vous avez traité très brièvement, à savoir celle de la nomination du président et du premier dirigeant. Selon nous, les 15 administrateurs devraient être élus par les agriculteurs afin d'assurer une plus grande responsabilité. Nous avons fait remarquer au gouvernement qu'il suffirait seulement que trois des dix administrateurs élus se rangent du même côté que les cinq non élus pour que le vote de la majorité des administrateurs élus par les agriculteurs soit annulé. En d'autres termes, même si sept des 10 administrateurs élus votaient d'une façon, leur vote pourrait être annulé par les huit autres.

Je me demande si vous pourriez me donner un peu plus de détails. J'ai lu aussi l'article dans le Globe and Mail d'hier à propos de la récente nomination de M. Fewchuk—selon moi, il s'agit de toute évidence d'une nomination politique à un poste doté de pouvoirs étendus. Je comprends bien que les agriculteurs s'inquiètent du fait que la même chose pourrait se produire dans le contexte de la Commission canadienne du blé.

M. Ted Allen: Nous partageons cette inquiétude.

Nous pensons cependant que le gouvernement a le droit d'être représenté au sein de ce conseil tant qu'il utilise l'argent des contribuables pour garantir le paiement d'acompte et les emprunts de la Commission. Nous pensons qu'il a le droit d'être représenté. Par contre, nous croyons qu'il suffirait probablement de ne lui donner qu'une seule voix au conseil.

Il est intéressant de noter, par exemple, que le gouvernement australien va cesser de garantir les emprunts de l'Australian Wheat Board en 1999. On peut se demander quand notre gouvernement prendra une mesure du même genre.

Tant que le contribuable a un intérêt direct dans les opérations et le risque financier, il a le droit d'être représenté; par contre, neutraliser complètement le pouvoir du conseil en se réservant le pouvoir d'embaucher et de congédier le premier dirigeant est une grossière erreur.

M. Leon E. Benoit (Lakeland, Réf.): J'aimerais revenir sur la question de l'Office de commercialisation du poisson d'eau douce. Une personne de ma circonscription m'a tenu au courant à cet égard et s'est montrée extrêmement inquiète depuis les rumeurs relatives à la nomination de M. Fewchuk.

L'ancien premier dirigeant et président du conseil avait la confiance des membres du conseil et des 3 500 pêcheurs. M. Fewchuk va maintenant être nommé à la Commission et en même temps le gouvernement a annoncé qu'il allait conserver l'ancien premier dirigeant, lequel pourra continuer à diriger le conseil. C'est ce que l'on nous a laissé entendre.

• 0915

On dit que le premier dirigeant actuel continuera à diriger le conseil. M. Fewchuk n'aura pas véritablement de rôle à jouer.

M. Gerry Byrne (Humber—St. Barbe—Baie Verte, Lib.): J'invoque le Règlement, monsieur le président. Ces témoins experts sont ici pour débattre...

Une voix: Peut-être ont-il une pêcherie dans leur cour.

M. Gerry Byrne: À moins que nous ne soyons ici pour débattre de l'Office de commercialisation du poisson d'eau douce, j'aimerais débattre de la question posée. Nous avons des témoins experts qui sont ici pour répondre aux questions.

M. Jay Hill: Je peux réfuter ce rappel au Règlement en disant que vous prenez notre temps. Ce sont eux qui ont soulevé cette question et nous ne faisons qu'y répondre.

M. Gerry Byrne: Je ne savais pas que vous aviez un témoignage d'experts.

Le président: À l'ordre, s'il vous plaît.

M. Leon E. Benoit: Merci, monsieur le président d'essayer de ramener l'ordre au comité.

Je fais cette remarque pour une raison fort importante. On peut établir une comparaison directe entre ce qui s'est produit à l'Office de commercialisation du poisson d'eau douce et les coûts supplémentaires, de l'ordre de 100 000 $, imposés à ces producteurs, parce que cette nomination politique, faite par M. Axworthy, ne va pas se traduire par des avantages supplémentaires pour l'office en question, mais plutôt par des coûts entièrement supportés par les pêcheurs. Tous les coûts de fonctionnement de la Commission du blé seront supportés par les agriculteurs canadiens de l'Ouest.

Je crois donc qu'il s'agit d'une excellente comparaison qui démontre clairement la validité de l'inquiétude que nous avons manifestée à ce sujet.

Au-delà du coût que représente la présence de M. Fewchuk, ce que j'ai dit craindre, c'est que cette personne puisse en fait s'occuper du fonctionnement de la Commission. C'est notre plus grande préoccupation. Si le gouvernement décide de nommer à la Commission canadienne du blé un président et un premier dirigeant qui n'est pas vraiment compétent, qui n'agit pas dans le meilleur intérêt des agriculteurs—quand bien même, comme vous l'avez fait remarquer dans votre exposé, monsieur Allen, la loi ne prévoit pas que la Commission du blé doive nécessairement agir dans le meilleur intérêt des agriculteurs—cela ne peut pas être bon pour les agriculteurs canadiens de l'Ouest.

Je crois que cette question a été posée dans un contexte très réel par rapport à ce qui s'est passé à l'Office de commercialisation du poisson d'eau douce.

Monsieur Allen, vous n'avez pas parlé directement de ce point. Pensez-vous que cela pourrait se produire à la Commission canadienne du blé...

Le président: Excusez-moi, monsieur Benoit. Nous n'avons pas le temps d'entendre sa réponse. Nous devons passer à l'intervenant suivant.

Monsieur Chrétien.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac—Mégantic, BQ): Ce matin, je suis énormément surpris d'entendre nos premiers témoins dénoncer avec assez de vigueur le projet de loi C-4. Ils ont dit que ce projet de loi était vicié, voué à l'échec, qu'on allait mettre un processus en marche de façon peu ordonnée, que le conseil d'administration ne serait qu'un conseil consultatif et que l'indépendance de la commission était presque inexistante. Ils ont même dit, vers la fin, que ce projet de loi ne faisait qu'approfondir les discordes entre la Commission canadienne du blé et les producteurs céréaliers.

Je représente le Bloc québécois et, habituellement, je suis le seul député du Québec qui siège au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire. Mon parti avait donné son accord, du moins en première lecture, au projet de loi C-4. À l'étape de la deuxième lecture, cela devrait arriver aussi, sauf qu'on était très hésitants quant aux nominations du président-directeur général et des cinq... Souvent on arrive avec des nominations qui ne sont pas nécessairement farfelues mais, ce matin, on parle de M. Fewchuck qui a été nommé président-directeur général d'une commission importante. C'est quelque chose de sérieux. On parle de 7 milliards de dollars de ventes par année. Ce n'est pas une petite quincaillerie qu'on ouvre pour dépanner dans un petit village isolé.

Donc, 7 milliards de dollars, c'est beaucoup d'argent et il y a plusieurs centaines de milliers de producteurs qui ont les mains et les pieds liés face à ce monopole qu'on va créer. J'ai dit en Chambre que nous allions approuver le projet de loi et donner notre accord au Parti libéral, mais nous dénonçons toujours les nominations.

• 0920

J'ai encore en mémoire la nomination de l'ambassadeur en Haïti, mon voisin, qui était député indépendant. Pour avoir sa circonscription, on l'a nommé ambassadeur. Ce sont des choses comme celle-là qui me déplaisent. Il s'agit souvent de personnes qui sont nettement incompétentes et qu'on nomme à des postes majeurs.

J'aimerais que vous me donniez des points précis que je pourrais suggérer au comité ou à la Chambre des communes en guise d'amendements pour que ce projet de loi devienne plus acceptable pour votre organisme.

[Traduction]

M. Ted Allen: Merci.

Nous faisons plusieurs recommandations dans notre exposé. Celle qui a reçu le plus d'attention est bien sûr celle relative à l'embauche et au congédiement du premier dirigeant. Un conseil d'administration qui ne peut ni embaucher ni congédier un premier dirigeant n'est pas vraiment un conseil. C'est très clair et nous le soulignons dans notre exposé.

Il y a un autre aspect du projet de loi qui nous inquiète: le conseil doit en fait observer les instructions du gouvernement selon le bon vouloir de ce dernier. Là encore, le concept de l'indépendance du conseil n'est qu'une imposture.

Ce sont les deux points qui à notre avis doivent être examinés. Le fait que la Commission agisse dans les meilleurs intérêts des agriculteurs est le troisième point à soulever; il n'en est nullement question dans ce projet de loi. On ne peut pas dire que le gouvernement n'a jamais jugé bon de le faire; en effet, la Commission canadienne des grains a ce mandat et nous ne voyons pas pourquoi la Commission du blé ne l'aurait pas.

Ce sont plusieurs points qu'il est essentiel d'après nous de régler pour que ce projet de loi soit réalisable à court terme.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien: Je vais vous interrompre parce que cela m'intéresse beaucoup. Vous prenez le temps de dire que le conseil doit agir dans l'intérêt des producteurs. On ne devrait même pas être obligé de dire cela, car ce devrait être une condition sine qua non. Le jour où un témoin nous prouvera qu'on peut avoir de sérieux doutes quant à cette prémisse que le conseil pourrait agir à l'encontre de l'intérêt des producteurs, je vais retirer mon appui, je vous le promets. Mais vous ne pouvez pas me convaincre.

[Traduction]

M. Ted Allen: Bien évidemment, comme nous le faisons remarquer, cela se trouve dans le projet de loi. Il n'est nullement indiqué dans le mandat qu'il faut agir dans l'intérêt des agriculteurs. Je peux vous faire une citation:

    La Commission a pour mission d'organiser, dans le cadre du marché interprovincial et de l'exportation, la commercialisation du grain cultivé au Canada.

Il n'est pas fait mention de l'impact éventuel sur les producteurs.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien: Vous marquez un point. Je vous remercie.

[Traduction]

Le président: Merci, monsieur Chrétien. Nous passons maintenant à M. Easter.

J'aimerais faire une observation. J'accueillerais favorablement un éclaircissement au sujet de la nomination de M. Fewchuk, mais c'est une question qui relève davantage des décrets et du Comité permanent des pêches et océans. Cela relève de leur mandat, non du nôtre.

Nous passons maintenant à M. Easter.

M. Wayne Easter (Malpeque, Lib.): Merci, monsieur le président. En réalité, la discussion sur l'Office de commercialisation du poisson d'eau douce, vous le savez probablement mieux que la plupart d'entre nous, monsieur le président, est ici une discussion factice. Je crois bien que vous avez étudié la question au dernier Comité des pêches. Il s'agit de deux entités entièrement différentes en ce qui concerne la structure.

J'aimerais m'attarder tout d'abord sur le dernier point, suite à la discussion avec M. Chrétien. La Commission sert-elle les intérêts des agriculteurs ou non? Ce projet de loi ne renferme rien de nouveau en ce qui concerne le mandat de la Commission.

Toutefois, comme je l'ai dit lors de la dernière séance, les résultats de la Commission canadienne du blé sont excellents et nous pensons qu'ils le resteront dans l'avenir. J'aimerais simplement vous lire un extrait de son rapport annuel:

    D'après une évaluation de performance effectuée au cours de la campagne agricole 1995-1996, le Canada jouit d'une bonne réputation auprès de ses clients dans des domaines comme ceux de la qualité du produit, du service à la clientèle, du soutien technique et de la fiabilité des approvisionnements.

Une autre étude faite par trois économistes démontre que le système à guichet unique de la Commission canadienne du blé rapporte 265 millions de dollars supplémentaires par année aux agriculteurs. Il s'agit à mon avis d'assez bons résultats.

• 0925

Les agriculteurs peuvent-ils véritablement contrôler le conseil? Monsieur Allen, vous mentionnez dans votre mémoire l'article 3.05 au sujet de la responsabilité.

Je ne pense pas que vous soyez allé plus loin. Il suffit d'examiner cet article du projet de loi pour s'apercevoir qu'il se compose des paragraphes a) à g), qui décrivent de façon assez complète ce que peuvent faire le conseil et le président du conseil. Le président du conseil est nommé par le conseil. Le président du conseil exerce beaucoup de contrôle sur le premier dirigeant également et je vous renvoie à l'article 3.11 proposé:

    3.11(1) Le président est le premier dirigeant de la Commission; à ce titre, il assure,... la direction et la gestion des activités courantes de celles-ci.

—et voici la partie essentielle—

    Sous réserve des résolutions du conseil, il est investi à cet effet des pouvoirs qui ne sont pas expressément réservés au conseil ou au président de celui-ci par la présente loi ou les règlements administratifs de la Commission.

Cela décrit donc de façon assez complète le contrôle exercé par le conseil, lequel se compose en majorité de producteurs.

Dans tous les cas, je crois que dans une certaine mesure, nous ne voyons pas le débat et la philosophie sous le même angle. Au sujet du premier dirigeant, comme vous l'avez indiqué, monsieur Allen, le gouvernement garantit les paiements initiaux et offre également les garanties financières, lesquelles, je pense, se sont chiffrées les années précédentes à 60 millions de dollars et l'année dernière à près de 80 millions de dollars.

Les UGG sont-ils prêts à échanger ces genres de garanties contre le retrait du gouvernement qui ne procéderait alors plus à la nomination du premier dirigeant? Quel est le compromis?

M. Ted Allen: Je ne pense pas qu'il soit utile de prévoir un échange ou un compromis.

Tout d'abord, en ce qui concerne ce que vous avez dit au sujet du président du conseil, effectivement, les membres du conseil élisent le président d'un comité quasi-consultatif. Qu'ils le fassent eux-mêmes ou que le gouvernement s'en charge est sans intérêt si les pouvoirs de ce conseil sont profondément limités. Par ailleurs, les pouvoirs du gouvernement relatifs à la protection des deniers publics sont prévus par d'autres dispositions de la loi.

Dans tous les cas, un plan doit être transmis au gouvernement et approuvé par lui, avant que le conseil ne se lance dans diverses activités, y compris les emprunts. Par conséquent, ce n'est pas la protection des deniers publics qui est en question ici, que ce soit le gouvernement ou le conseil qui nomme le premier dirigeant.

Nous nous retrouvons en fait avec un conseil quasi-consultatif qui conseille le gouvernement au sujet de la Commission du blé et de sa structure. Il est intéressant de noter que le gouvernement ne délègue ses pouvoirs au conseil que dans un seul secteur, alors que selon nous, il devrait s'en abstenir; il s'agit de la définition du mandat.

Nous croyons que c'est au gouvernement de définir le mandat. Après tout, la Commission est constituée en vertu d'une loi du Parlement; par conséquent nous pensons que c'est au gouvernement d'en définir le mandat. Une fois le mandat défini, le conseil d'administration devrait pouvoir fonctionner de façon indépendante.

Je ne crois pas que la protection des deniers publics soit la question, car elle est très bien prévue par d'autres parties de la loi. Je le répète, le gouvernement doit savoir ce qui se passe et nous croyons donc qu'il a le droit d'être représenté à ce conseil d'administration.

M. Wayne Easter: Lorsque vous parlez d'une Commission qui s'occupe de l'une des industries clés... On a pu constater qu'elle maximise les revenus des producteurs, Ted,... L'engagement financier du gouvernement—le gouvernement doit assurément nommer l'un des principaux dirigeants de la Commission.

La protection est prévue. Tout se fait sous réserve des résolutions du conseil. Si le conseil n'est pas satisfait de cette personne, il peut fixer sa rémunération à un dollar.

C'est la raison pour laquelle je vous ai posé la question directement. Si vous ne voulez pas que le gouvernement nomme le premier dirigeant, il faut alors renoncer aux engagements financiers. Je ne crois pas qu'il y ait d'autre choix.

• 0930

M. Ted Allen: Avec tout le respect que je vous dois, je ne suis pas d'accord lorsque vous dites que les intérêts financiers du gouvernement ne sont pas protégés par les autres dispositions du projet de loi. Je crois fermement le contraire.

Je crois également que nous ne parlons pas uniquement de l'organisation sociale. Qu'il s'agisse d'un organisme de charité ou d'une autre entité, il y a toujours un premier dirigeant qui doit directement répondre de ses actes devant le conseil.

Je crois qu'il est incroyablement naïf de suggérer que le conseil puisse exercer ses pouvoirs en fixant la rémunération du premier dirigeant à un dollar. Je suis désolé de m'exprimer ainsi, mais en droit, les employés jouissent de toutes sortes de protections contre ce genre de mesures que pourraient prendre les conseils d'administration et la gestion. Il y a ce que l'on appelle en droit le licenciement détourné. Si un conseil d'administration choisissait une telle option, j'imagine que le premier dirigeant consulterait immédiatement son avocat au sujet d'un licenciement détourné.

M. Wayne Easter: Je veux juste faire remarquer que cette protection à l'égard du conseil se trouve dans l'article proposé 3.11. Il s'agit d'une loi différente. Elle assure une protection au conseil, puisque le premier dirigeant est investi de pouvoirs sous réserve des résolutions du conseil.

M. Ted Allen: Puis-je répondre très brièvement, monsieur le président?

Le président: Nous n'avons pas le temps d'entendre votre réponse. Nous devons passer à M. Proctor.

M. Dick Proctor (Palliser, NPD): J'aimerais passer à autre chose, soit la clause d'inclusion, puisque vous la traitez de façon assez détaillée dans votre mémoire écrit. Au cours des audiences de l'année dernière sur le projet de loi C-72, on a beaucoup discuté de la question suivante: s'il y a une clause d'exclusion, devrait-il y avoir une clause d'inclusion? Je voulais simplement connaître vos préoccupations ou vos points de vue à propos de cette clause.

M. Ted Allen: Certainement. Plusieurs aspects de la clause d'inclusion nous semblent représenter le meilleur moyen de s'attirer de gros ennuis. J'imagine toutefois que je devrais commencer par dire que toute la question des clauses d'inclusion et d'exclusion ne se poserait pas si le système était à participation volontaire.

Cela étant dit, le projet de loi et les représentants du ministère de l'Agriculture n'ont pas indiqué clairement quelles seraient les organisations qui pourraient, de façon légitime, demander l'inclusion. En fait, je crois que l'un des représentants du ministère a signalé qu'au cas où on ne s'entendrait pas pour savoir quelle organisation pourrait légitimement représenter les producteurs à propos d'une inclusion, il appartiendrait aux tribunaux de trancher. Cette façon de procéder n'est certainement pas acceptable.

M. Dick Proctor: Dans votre mémoire, vous indiquez que vous préférez une commission à participation volontaire. Plusieurs sont d'avis que si tel est le cas, on ne peut pas avoir de Commission canadienne du blé, que cette commission est vouée à l'échec. Qu'en pensez-vous?

M. Ted Allen: Pas du tout. Dans notre mémoire, nous faisons mention d'un précédent historique au Canada, de l'existence d'une commission à participation volontaire. Le désastre qui s'est produit n'a pas été causé par le caractère volontaire de cette participation, mais plutôt par des décisions prises en matière de fixation des prix, de paiements initiaux qui, à cette époque, étaient ridicules.

Nous pensons donc qu'il existe un précédent au Canada.

En Australie, il y a également un précédent: l'Australian Wheat Board fait concurrence à d'autres entités sur le marché intérieur. En fait, l'Australian Wheat Board s'en tire très bien.

Il est possible en Australie de faire une analyse comparative qui permet de savoir comment la commission s'en sort et elle s'en sort très bien. Elle détient de 70 à 75 p. 100 de la part du marché grâce à ce processus qui marche très bien.

• 0935

Le président: Monsieur Borotsik.

M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC): Merci.

Monsieur Allen, je vais être bref et j'espère que vous le serez aussi, car je ne dispose que de cinq minutes.

Tout d'abord, qu'il me suffise de dire que je suis d'accord avec vous au sujet de l'organisation sociale. Je crois fermement que l'organisation sociale prévue par ce projet de loi est le meilleur moyen de s'attirer de gros ennuis. Je ne crois pas qu'il puisse y avoir de responsabilité si le premier dirigeant est nommé par le gouvernement.

J'ai quelques questions. J'aimerais aborder celle de l'exclusion. Dans votre rapport, vous dites qu'il ne devrait pas y avoir d'inclusion, et je suis d'accord. On me dit que l'inclusion est prévue parce que l'exclusion l'est aussi. À votre avis, faudrait-il supprimer les deux, l'exclusion et l'inclusion?

M. Ted Allen: Je pense que l'on peut défendre le concept d'équilibre, mais en fait il est tellement difficile d'invoquer la clause d'exclusion qu'en vertu de ce projet de loi, nous savons qu'elle ne le sera jamais. Les mesures qui doivent être prises sont trop liées à certains intérêts particuliers.

M. Rick Borotsik: On prétend, monsieur Allen, que l'inclusion doit être prévue, puisque l'exclusion fait déjà partie du projet de loi. D'après vous, si les deux étaient supprimées, les UGG ne s'y opposeraient pas?

M. Ted Allen: Je ne vois pas de problème en ce qui concerne l'exclusion compte tenu de la façon dont elle est actuellement structurée. Je le répète, nous voulons une commission à participation volontaire. Tous ces débats n'auraient alors pas lieu.

M. Rick Borotsik: Je le comprends. Je ne crois pas que cela va se produire.

M. Ted Allen: À propos de l'exclusion... Tant que ceux qui veulent maintenir le système sont ceux qui vont prendre la décision à ce sujet, cela ne va bien sûr pas changer.

M. Rick Borotsik: D'accord. Pouvez-vous me donner des éclaircissements. Si la seule façon de sortir de l'inclusion consiste à supprimer l'exclusion, vous y opposeriez-vous?

M. Ted Allen: Non, rien ne serait perdu.

M. Rick Borotsik: J'ai quelques questions supplémentaires; je ne crois pas que la clause d'indemnisation du projet de loi soit vraiment bonne.

Toutefois, l'attaché de presse de M. Goodale s'est exprimé en ces termes:

    Le nouveau projet de loi CCB renferme la même disposition que celle applicable à beaucoup de sociétés si elles font du commerce à l'étranger... Une entité comme les UGG (United Grain Growers) a la même disposition, j'imagine...

Il s'agit de la clause d'indemnisation. Est-ce effectivement exact? Votre clause d'indemnisation est-elle la même que celle prévue par ce projet de loi?

M. Ted Allen: Non, et il y a un mot qui change tout. La Loi sur les sociétés par actions qui s'applique en majeure partie à notre société, stipule que la société «peut» indemniser. Je crois que c'est le mot employé. Ce projet de loi, je crois, stipule simplement «indemnise». Aucune latitude n'est prévue au sujet du moment et de l'endroit où les employés seront indemnisés.

M. Rick Borotsik: Merci. J'aimerais bien parler de l'Australian Wheat Board, mais je n'en ai pas le temps.

Dernière question: dans votre liste des priorités, s'il y avait un aspect du projet de loi que nous pourrions changer—à l'exception de la participation volontaire par opposition au monopole—quelle serait cette priorité?

M. Ted Allen: Vous commencez par énoncer ma priorité et dites ensuite que je ne peux en parler.

M. Rick Borotsik: Ce serait bien d'être réaliste, mais...

M. Ted Allen: C'est une question difficile. J'imagine que je regrouperais deux points: le gouvernement exerce un contrôle excessif, puisqu'il décide de l'embauche et du licenciement des premiers dirigeants et qu'il a le pouvoir de donner des instructions à la commission selon son bon vouloir—ce sont les deux points qui me préoccupent.

M. Rick Borotsik: Dernière question. Nous passons d'une société d'État à ce que l'on appelle une «société mixte». Dans votre cas particulier, est-ce un sujet d'inquiétude?

M. Ted Allen: Nous essayons de comprendre, car je n'ai pas vu dans le projet de loi une définition de l'expression «société mixte». J'ai déjà entendu cette expression, mais je ne sais pas légalement ce que cela veut dire. Je ne sais pas ce qu'est une société mixte.

M. Rick Borotsik: Est-ce inquiétant pour les UGG en tant que société?

M. Ted Allen: J'imagine que c'est inquiétant uniquement parce que nous ne savons pas ce que cela veut dire et qu'il n'est pas fait mention de cette expression dans la loi. De quoi s'agit-il?

M. Rick Borotsik: Je ne le sais pas. Merci, monsieur Allen.

• 0940

Le président: Madame Ur, il nous reste quatre minutes.

Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.): Sur ce dernier point, vous dites que vous ne connaissez pas la différence entre société mixte et ce que nous avons à l'heure actuelle; je dois dire que lorsque nous sommes allés dans l'Ouest, il est apparu très clairement que dans une société mixte, certains des administrateurs sont élus. Par contre, il y en a qui sont nommés. D'où l'équilibre dans une société mixte. C'est ce que l'on nous a dit.

J'ai trouvé intéressant de passer d'une province à l'autre lors de nos déplacements dans l'Ouest dans le cadre de notre étude sur la Commission canadienne du blé. Il ne se dégage certainement pas de consensus dans l'Ouest au sujet de la CCB.

Vous voulez une participation volontaire. Pendant combien de temps—un an et c'est tout?

M. Ted Allen: Non. Vous posez une bonne question au sujet de la participation volontaire. Je crois que la plupart des intéressés s'accordent pour dire qu'il faudrait prévoir une participation de trois à cinq ans.

Puis-je poser une question à des fins d'éclaircissement? Est-ce une société ou une entreprise mixte et y a-t-il une différence entre les deux?

Mme Rose-Marie Ur: Je parlais d'une société mixte. Si je me souviens bien, c'est ainsi que l'on nous en a parlé et cela voulait dire que les administrateurs étaient élus et nommés, tandis qu'à l'heure actuelle ils ne sont que nommés. Ce n'est peut-être pas tout à fait exact, mais c'est ce dont je me souviens.

Vous avez dit que le fait qu'une organisation d'agriculteurs puisse imposer à une autre son bon vouloir était préoccupant. Ne vous sentez-vous pas en sécurité? J'ose croire que nous allons avoir 10 administrateurs élus à ce conseil, qu'ils ont probablement beaucoup d'expérience dans le domaine de l'agriculture, sans toutefois avoir toutes les connaissances voulues pour agir au nom de tous les agriculteurs. Je suis sûre que les agriculteurs ne vont pas nommer d'administrateurs qui ne sont pas en mesure de faire ce travail.

Comme c'est le gouvernement qui va s'occuper des fonds, pensez-vous vraiment que beaucoup de gens vont se présenter aux élections au conseil? Devraient-ils se porter garants du financement de la CCB?

M. Ted Allen: Nous n'avons pas dit qu'ils devraient se porter garants. Nous avons dit par contre que la Commission devrait avoir la latitude de décider quand et qui elle va indemniser et que cette latitude devrait être la même que celle qui est accordée à n'importe quelle autre société. Au lieu de dire de façon rigide que vous devez indemniser les gens, je crois que le conseil d'administration devrait pouvoir dire que vous pouvez le faire.

Pour revenir à votre question au sujet du conseil d'administration, je crois qu'il représentera très bien ceux qui sont en faveur de la centralisation des ventes. Ceux qui n'acceptent pas que ce genre d'activité soit obligatoire ne seront pas représentés, car ils sont déjà arrivés à la conclusion que le processus est vicié.

Mme Rose-Marie Ur: Je me souviens d'une déclaration fort intéressante de l'un des témoins dans l'Ouest; je me souviendrai toujours de ce qu'il a dit avec beaucoup d'éloquence: prévoir une commission à participation volontaire équivaut à permettre à 2 p. 100 de la population de conduire en sens inverse. Qu'est-ce que cela donnerait?

M. Ted Allen: C'est très facile, puisque nous reconnaissons tous que, pour vivre en société, il faut limiter des droits individuels et imposer des mesures à certains égards. La question que j'ai toujours posée est de savoir si la vente de blé et d'orge est d'un intérêt national si crucial qu'il faut la régir. Nous reconnaissons tous qu'il faut limiter certaines libertés individuelles dans l'intérêt collectif. Est-ce l'une d'entre elles?

Le président: Vous avez épuisé le temps qui vous était alloué. Je vous remercie, madame Ur.

Messieurs Allen et Rutter, je vous remercie de ce débat et de votre mémoire très intéressants.

M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Monsieur le président, j'invoque le Règlement. À la Chambre, on m'a donné l'assurance que, lorsque le projet de loi serait étudié par le comité, j'aurais le temps de poser des questions. Ces personnes pourront-elles revenir pour que j'aie le temps de les interroger? On ne m'a pas encore permis de le faire. Voilà une demi-heure que je vous signale que j'ai des questions à poser, mais la procédure est telle que j'en suis empêché. Ces témoins pourront-ils revenir pour répondre à mes questions? J'aimerais le savoir parce que ces questions sont très importantes.

• 0945

Le président: Ils ne reviendront pas. Le comité s'est entendu pour accorder à ces témoins 45 minutes chacun. Il appartient à chaque parti de décider qui posera des questions durant le temps alloué. C'est ainsi que fonctionne le comité. C'est la procédure adoptée pour la durée du mandat. Cependant, c'est vous qui décidez qui posera les questions au nom de votre parti. Ce n'est pas moi qui prends les décisions, mais bien vous.

M. Garry Breitkreuz: C'est vrai, mais on nous a alloué sept ou huit minutes...

Le président: Vous le saviez au départ.

M. Garry Breitkreuz: Estimez-vous que c'est suffisant?

Le président: C'est ce dont le comité a convenu.

M. Garry Breitkreuz: Ce n'est pas vrai, monsieur.

Le président: Je vous remercie beaucoup.

Nous entendons maintenant comme témoins M. Larry Maguire, président du Western Canadian Wheat Growers Association, et M. Paul D. Earl, gestionnaire de l'élaboration des politiques au Manitoba.

Messieurs, vous connaissez la procédure. Vous disposez de 10 minutes pour faire vos exposés, après quoi nous vous poserons autant de questions que nous permettra le temps dont nous disposons.

M. Larry Maguire (président, Western Canadian Wheat Growers Association): Je vous remercie beaucoup, monsieur le président. Je suis ravi de voir à quel point l'Île-du-Prince-Édouard s'intéresse à ce qui se passe dans l'ouest du Canada.

J'ai une exploitation agricole à Elgin, dans la partie sud-ouest du Manitoba. M. Paul Earl est le gérant des politiques à notre bureau du Manitoba. Notre siège social se trouve à Regina, en Saskatchewan, qui au cours des derniers jours est devenu le dernier bastion de la libre entreprise.

Je vous remercie vivement de nous avoir invités à témoigner. Nous ne lirons pas notre mémoire en entier puisqu'il est trop long. Par contre, nous avons certaines observations et des points à faire valoir ce matin.

Tout d'abord, il faut que votre comité reconnaisse que le mouvement en faveur d'un changement à la Commission canadienne du blé est né dans l'ouest du Canada parce que les agriculteurs souhaitaient avoir plus de choix, il y a quelques années, quant à la façon dont les céréales seraient mises en marché. Ils ne souhaitaient pas que plus de grains soient touchés par un monopole. Le projet de loi qui est à l'étude aujourd'hui et qui prévoit l'inclusion d'autres céréales est donc tout à l'opposé de la réforme de la commission amorcée depuis au moins dix ans au Canada.

En résumé, le projet de loi à l'étude ne cadre pas avec les mesures que réclament les agriculteurs progressistes et novateurs. Ceux qui prônent le statu quo et l'inclusion de plus de récoltes dans le monopole de la commission s'ancrent dans le passé plutôt que de se tourner vers l'avenir. Ce sont les mêmes qui se sont opposés à tout changement au tarif de la Passe du Nid-de-Corbeau et qui ont inutilement bloqué le changement pendant des années. Votre gouvernement fédéral a reconnu les répercussions favorables que le changement au tarif a eues sur la valeur ajoutée, particulièrement de la production et du conditionnement du bétail. La réforme de la politique de mise en marché des grains aurait pu être aussi importante et aussi favorable, mais pour la réaliser, il faut de l'audace et du leadership, ce que nous attendons de votre comité.

Nous reviendrons plus tard à la disposition prévoyant l'inclusion, mais nous tenons à souligner qu'aucun autre groupe de producteurs spécialisés n'a demandé que d'autres grains soient inclus. Les seuls à le réclamer sont des groupes de gauche extrémistes. Nous faisons aussi remarquer qu'en raison de l'ambiguïté du libellé quant à qui peut représenter les producteurs d'une céréale, la disposition prévoyant l'inclusion pourrait être invoquée par tout groupe prétendant représenter les agriculteurs. Si un groupement de producteurs spécialisés, par exemple des producteurs de colza canola, était opposé à l'inclusion de sa culture, mais qu'un autre groupe demandait son inclusion, le seul recours dont disposeraient les producteurs de colza serait de faire appel aux tribunaux. Nous ne croyons pas que cela contribuera beaucoup à favoriser un climat de coopération dans l'ouest du Canada. Le processus continuerait d'être source de beaucoup de division.

Le thème principal de notre mémoire, le message central que nous souhaitons donner à votre comité, est double. Tout d'abord, il faut que le gouvernement fédéral reconnaisse le niveau très élevé d'insatisfaction auquel donne lieu le statu quo, comme je l'ai déjà fait remarquer. Ensuite, le projet de loi C-4 ne satisfera pas les agriculteurs de l'ouest du Canada qui ont besoin d'une réforme complète du système de mise en marché des grains en vue de pouvoir gérer comme il convient leur exploitation agricole. Le projet de loi ne mettra pas fin à la controverse que suscite, dans l'ouest du Canada, la politique de mise en marché.

Les producteurs de blé recommandent donc que l'on apporte trois changements au projet de loi à l'étude. Ces recommandations représentent l'absolu minimum dont ils ont besoin pour rendre la loi acceptable aux agriculteurs partisans du progrès. Nous les expliquerons après vous en avoir fait l'énumération. Voici donc les trois recommandations: que soit retranchée la disposition prévoyant l'inclusion, que l'orge ne relève plus de la Commission canadienne du blé et que l'on prévoie la possibilité pour les agriculteurs d'obtenir les prix ayant cours sur le marché libre du blé.

• 0950

En ce qui concerne la disposition prévoyant l'inclusion, nous estimons qu'il conviendrait de la retrancher du projet de loi, comme je l'ai dit, parce qu'aucun groupement de producteurs spécialisés n'en a fait la demande. En fait, la Alberta Canola Producers Commission et le Canadian Canola Growers Association ont tous deux manifesté leur opposition officielle à cette mesure dans des lettres envoyées au ministre.

Ensuite, la menace que fait planer pareille disposition aura des répercussions sur nos échanges commerciaux. Elle va à l'encontre de l'esprit et de la lettre des ententes commerciales dont nous sommes signataires et envoie le mauvais signal à nos partenaires internationaux. Le gouvernement fédéral a certes reconnu l'importance des signaux envoyés à nos partenaires commerciaux et aux entreprises canadiennes quand il a récemment aboli le contingent tarifaire appliqué à l'orge.

Parmi les autres mesures favorables qui ont été prises, vous avez déréglementé l'industrie de l'aviation, privatisé le CN et signé l'Accord du GATT qui permet de conclure plus d'ententes commerciales, donnant ainsi aux agriculteurs de toutes les régions du Canada la possibilité de négocier plus librement.

Le processus prôné dans le projet de loi à l'étude semble donc aller à l'encontre de certaines bonnes mesures prises par le gouvernement.

De plus, le président du Canadian Canola Oilseed Processors Association a affirmé, dans une lettre adressée au ministre Goodale, qu'en adoptant une pareille disposition, le Canada indique clairement qu'il n'entend pas s'en tenir à la position énoncée en matière de commerce, ce qui pourrait nuire à l'investissement dans l'activité à valeur ajoutée.

Fait plus important encore, la présence de la disposition prévoyant l'inclusion continuera d'indisposer ceux qui souhaitent une réforme et attisera le mécontentement déjà vif dans l'ouest du Canada.

Les dispositions prévoyant l'exclusion nous préoccupent également. Elles pourraient s'avérer tout aussi nocives que celles qui prévoient l'inclusion, parce qu'elles entravent l'exercice du pouvoir discrétionnaire du gouvernement en matière d'élaboration de la politique de mise en marché des grains, empêchant le ministre de soustraire certaines céréales du monopole de la commission du blé, à moins que le conseil d'administration n'en fasse la demande. De la sorte, le conseil d'administration de la commission se transformera en tribune où débattre de la politique céréalière plutôt qu'en organisme susceptible de voir aux affaires courantes de la commission. Les élections à la Commission canadienne du blé se transformeront en joute idéologique entre partisans et pourfendeurs d'un marché centralisé plutôt que de servir à choisir qui est le mieux qualifié pour administrer la Commission canadienne du blé.

C'est dans l'arène politique que doit se faire le débat sur la commercialisation des céréales, débat auquel le projet de loi C-4 ne mettra pas fin, plutôt que dans la salle du conseil d'administration de la commission. À proprement parler, ce refus du gouvernement d'assumer ses responsabilités, c'est un peu comme donner à General Motors un droit de veto concernant la politique relative à la concurrence dans l'industrie automobile.

Nous prions instamment votre comité de considérer quel effet ces dispositions auront sur les opposants au statu quo, si le conseil élu n'est pas modifié—dans un sens comme dans l'autre. De quel recours disposeront-ils? La majorité ne peut ignorer les intérêts d'une très grande minorité, particulièrement quand cette minorité est responsable de la plus grande partie de la production.

Notre deuxième recommandation vise à soustraire l'orge du monopole de la Commission canadienne du blé. De nombreuses raisons militent en faveur d'une pareille mesure.

Tout d'abord, il faut tenir compte des résultats du vote sur l'orge, quand 40 p. 100 presque des agriculteurs ont répondu, en dépit de la question posée, qu'ils ne souhaitaient plus que la mise en marché de l'orge dans l'ouest du Canada soit centralisée.

Deuxièmement, cette recommandation cadre avec celles du Groupe d'experts sur la mise en marché des grains de l'Ouest avec lequel votre gouvernement a travaillé pendant un an et demi et selon lequel il faudrait retirer de la liste des grains inclus l'orge fourragère. Les malteurs ont signalé qu'il ne pouvait y avoir deux marchés; c'est soit l'un, soit l'autre. Aussi, comme le montrent les résultats du sondage, il ne reste qu'une seule option, soit de retrancher l'orge de la liste des grains.

Enfin, cette mesure améliorerait nos relations commerciales. L'abolition des contingents tarifaires signifie que les malteurs devront rivaliser avec les producteurs étrangers. Il faut clairement indiquer à nos partenaires commerciaux et aux agriculteurs de l'ouest du Canada que nous prenons ces questions au sérieux.

La question qui nous tient le plus à coeur est la formule de fixation des prix que nous rendons publique ce matin, à une conférence de presse qui a lieu à Regina. Cette proposition permet aux agriculteurs de vendre à terme 25 p. 100 de leur production de blé sur les bourses de Minneapolis, de Chicago et de Kansas, c'est-à-dire de bourses reconnues. Ainsi, les producteurs pourraient écouler une partie du quart de leur production sur le marché à terme. À un certain moment donné avant l'échange comme tel, le producteur livrerait son blé à un silo de collecte ou à un terminal et, dès livraison du blé, la commission pourrait prendre en charge la production de l'agriculteur sur le marché à terme.

Nous soulignons que rien de moins que ce genre de formule transparente et libre de fixation des prix ne sera acceptable aux agriculteurs. La méthode de fixation des prix employée par la commission du blé suscite de plus en plus de doutes profonds. Un simple mécanisme de prix au comptant liés aux perspectives de rendement ou aux estimations de rendement de la commission ne sera pas suffisant.

Nous estimons que cette proposition fournirait un outil de gestion des risques réel et efficace aux agriculteurs et contribuerait énormément à répondre aux besoins de ceux qui prônent une réforme de la mise en marché. Elle désamorcerait aussi la crise frontalière, parce qu'elle donnerait aux agriculteurs accès aux prix américains et internationaux.

• 0955

Nous avons comme position que ces trois propositions représentent les changements minimaux qu'il faut apporter au projet de loi C-4 pour le rendre acceptable à notre organisme et à de nombreux autres agriculteurs de l'ouest du Canada qui souhaitent avoir plus de choix pour la mise en marché de leurs produits. Le mécontentement au sein de nos membres et des agriculteurs en général est tout simplement trop fort pour que nous puissions accepter moins. Si le gouvernement fédéral ne plie pas à cet égard et qu'il refuse de donner à ces agriculteurs les outils de gestion des risques dont ils ont besoin, il ne fera qu'alimenter la dissension, voire l'agitation. C'est inutile. Les agriculteurs ont besoin de pouvoir profiter des occasions qui se présentent sur le marché si l'on veut qu'ils réussissent à gérer les risques et leurs entreprises.

C'est ici que prend fin mon exposé, monsieur le président. Je répondrai volontiers à vos questions. Nous faisons aussi, dans notre mémoire, d'autres observations plus détaillées concernant les élections et l'organe prévu en Ontario pour la commercialisation du blé.

Le président: Le sujet pourrait être abordé durant la discussion.

M. Larry Maguire: Fort bien. Je vous remercie beaucoup.

Le président: Monsieur Hill.

M. Jay Hill: Monsieur Maguire, je tiens à vous remercier d'être venu témoigner aujourd'hui.

Pour en revenir au sujet qui nous occupe, soit le fait que la commission ne soit pas modifiée pour en faire en quelque sorte un organisme à participation volontaire, le gouvernement prétend que le projet de loi permettra au conseil d'administration composé essentiellement de producteurs élus d'agir en ce sens. Pourtant, à la lecture du projet de loi, je ne vois pas comment. Au contraire, la disposition prévoyant l'inclusion est pour moi source d'exclusion. En d'autres mots, c'est tout ou rien. Soit que l'on peut exclure certaines catégories ou certains genres de blé ou d'orge, soit qu'on peut inclure d'autres récoltes. Je ne vois pas, dans le projet de loi, comment un conseil d'administration pourrait amorcer un changement en faveur d'une Commission canadienne du blé à véritable participation volontaire. C'est ce que vous dites, vous aussi, je crois.

M. Larry Maguire: C'est certes ce que nous avons dit au Groupe d'experts sur la mise en marché du grain de l'Ouest, il y a un an et demi. Nous lui avons dit que nous avions besoin d'une commission à adhésion facultative. Nous avons même décrit un éventuel mécanisme de fonctionnement. C'est ce qu'il faut dans l'ouest du Canada. Si les agriculteurs n'étaient pas obligés de passer par la commission pour vendre leurs produits, nous nous serions évité bien des discussions et des préoccupations.

M. Jay Hill: L'opposition officielle estime certes que c'est le rôle du gouvernement et que le gouvernement abdique ses responsabilités à l'égard des producteurs, en ce sens qu'il ne fait rien pour y donner suite. J'aimerais que vous nous en disiez un peu plus et que vous nous parliez des élections qui sont censées avoir lieu l'année prochaine. Que se passera-t-il, quel genre de débat y aura-t-il si la Commission n'est pas habilitée à se transformer en organisme à participation volontaire?

M. Larry Maguire: Comme je fais moi-même partie depuis huit ans du comité consultatif de la commission en tant que représentant de l'ouest du Manitoba, je puis vous dire que le dernier débat portait sur le bien-fondé d'un monopole. Selon moi, ce sera l'objet des débats futurs, sauf que la dernière fois, il s'agissait de blé et d'orge. Si la clause d'inclusion n'est pas retranchée du projet de loi, elle sera source de beaucoup plus de division parce qu'il sera alors question des autres récoltes dont la mise en marché ne pose aucun problème aujourd'hui et que nul ne demande à faire inclure dans le monopole. Le projet de loi a donc des effets beaucoup plus graves.

C'est pourquoi, durant la dernière série de réunions qui ont eu lieu au printemps dernier, vous ne nous avez pas beaucoup entendu. Nous avons fait deux exposés, un à Winnipeg et un autre à Peace River. Nous représentons 6 000 agriculteurs de ces régions et nous n'estimions pas nécessaire de tous les amener à la barre des témoins. La disposition visant l'inclusion ne figurait pas dans le projet de loi à ce moment-là, de sorte que vous n'avez jamais entendu parler de groupes qui voulaient témoigner à son sujet, par exemple des bourses de marchandises ou du Canadian Oilseed Processors, qui ont maintenant dit très clairement que cela représente une entrave à leur système de mise en marché.

M. Leon E. Benoit: J'aimerais vous poser une question au sujet de la structure de gestion, savoir ce que vous pensez du conseil d'administration élu et du fait qu'il faudrait que huit des dix administrateurs élus par les producteurs votent en faveur des agriculteurs, peut-être, dans un dossier pour que ceux-ci voient leurs souhaits se réaliser. J'aimerais que vous nous donniez votre avis concernant toute la structure de gestion et que vous nous disiez si elle est efficace en termes de responsabilité à l'égard des agriculteurs.

M. Larry Maguire: Non. Nous ne croyons pas que ce processus assurera aux agriculteurs la reddition de comptes que nous demandions. Notre organisme souhaitait un conseil élu au sein d'une Commission canadienne du blé à participation volontaire. Nous y tenons beaucoup.

Si vous souhaitez vraiment doter l'ouest du Canada d'une commission responsable, il faut d'après nous la décrire, lui donner les mêmes pouvoirs et l'assujettir aux mêmes règlements que l'Office de commercialisation du blé de l'Ontario, un conseil entièrement élu qui offre un prix initial garanti, qui n'a pas à soumettre de plan financier au gouvernement fédéral et au sein duquel aucun administrateur n'est nommé. Si vous souhaitez vraiment agir avec cohérence, prévoyez pour l'ouest du Canada ce qui existe déjà en Ontario. Cet organisme donne entière satisfaction.

• 1000

M. Leon E. Benoit: Nous avons entendu M. Allen, le témoin qui vous précède, dire qu'à son avis, il fallait au moins qu'un administrateur soit nommé. Nous avons entendu d'autres membres dire que si des agriculteurs en élisent 10 sur 15, cela devrait faire l'affaire et rendre le conseil comptable aux agriculteurs.

M. Larry Maguire: Selon le processus suivi en Ontario qui leur permet d'avoir quand même des prix initiaux garantis, c'est qu'une fois les prix initiaux établis, le gouvernement a la possibilité d'indiquer s'il appuiera ces prix initiaux ou non, et s'il décide de ne pas le faire, ils sont alors rajustés. S'il dit qu'il les appuiera, alors ils sont garantis pour l'année. On pourrait faire la même chose dans l'Ouest canadien.

Il n'est donc pas vraiment nécessaire que le conseil d'administration compte deux personnes nommées si le règlement est appliqué de façon uniforme dans l'ensemble du Canada.

M. Paul D. Earl (gérant des politiques (Manitoba), Western Canadian Wheat Growers Association): L'autre chose, c'est que ce projet de loi ne renferme aucune disposition qui rend ce conseil d'administration comptable aux agriculteurs. Le conseil est principalement comptable à la Commission. La Commission, comme nous l'avons indiqué dans notre mémoire, est principalement comptable au gouvernement puisque le PDG est nommé et pour toutes les autres raisons que nous avons énoncées. Il est, à mon avis, trompeur de prétendre que ces élections rendront le conseil comptable aux agriculteurs.

M. Leon E. Benoit: En fait, la loi énonce que la responsabilité du conseil est envers le gouvernement et non envers les agriculteurs et un jugement récent du tribunal l'a pratiquement confirmé.

J'ai une question concernant la disposition relative aux achats au comptant, qui permettrait les achats au comptant par la Commission du blé. Certains producteurs de provendes m'ont fait part de leurs préoccupations à cet égard, car ils craignent que cela fausse le marché des provendes au Canada. Avez-vous des commentaires à faire à ce sujet?

M. Larry Maguire: Au lieu de permettre aux agriculteurs de vendre leur propre grain?

M. Leon E. Benoit: Non. Mon commentaire porte sur...

M. Larry Maguire: L'option au comptant que nous sommes en train d'examiner?

M. Leon E. Benoit: Pardon?

M. Larry Maguire: Oh, ici.

M. Leon E. Benoit: Oui. Ce projet de loi permettrait à la Commission du blé de pénétrer le marché au comptant des provendes et les producteurs de provendes ont exprimé de sérieuses réserves à cet égard en indiquant que cela risquait de fausser le marché. Partagez-vous cette préoccupation?

M. Larry Maguire: Absolument. Cela risque de fausser aussi le marché des céréales. Ce qui nous préoccupe, c'est que nous ignorons le type de niveaux de base qui seront établis, puisqu'ils ne sont pas affichés.

Le processus que nous décrivons consiste à permettre à l'agriculteur de pénétrer le marché quand il le souhaite. Que la Commission établisse le niveau de base si elle le souhaite mais il appartient alors à l'agriculteur de décider s'il peut vendre ou non ce produit. Nous proposons, premièrement, qu'il se limite à vendre 25 p. 100 de son blé et deuxièmement qu'il le livre à la Commission qui lui paiera la position du marché à terme.

Cela se ferait en dehors du syndicat. La Commission recevrait donc la position du marché à terme en même temps que le grain et ne courrait aucun risque puis qu'elle compenserait la position sur le marché à terme immédiatement. Il ne lui resterait ensuite que ses coûts administratifs, qui pourraient sans doute être les plus bas de toute organisation dans l'Ouest canadien.

M. Murray Calder (Dufferin—Peel—Wellington—Grey, Lib.): Lorsque nous sommes allés dans l'Ouest, si la question d'inclusion a été soulevée, c'est parce qu'on nous a demandé pourquoi, s'il existe un mécanisme au sein de la Commission pour exclure un produit du blé, ne pas y prévoir aussi un mécanisme pour inclure un produit.

Je viens de lire votre rapport et il y a un aspect qui m'intéresse. Vous dites à la page 7, «De même, pour maintenir l'équilibre entre l'inclusion et l'exclusion, il n'est pas nécessaire non plus que les dispositions d'exclusion s'appliquent dans une situation de tout ou rien». Pourriez-vous nous donner des éclaircissements à ce sujet?

Juste en dessous, vous parlez de regroupements volontaires. Le mot volontaire revient souvent. Êtes-vous en train de proposer que si les prix ne sont pas intéressants, les agriculteurs devraient continuer de faire affaire avec la Commission et qu'une fois que les prix deviennent très intéressants, ils pourraient aller vendre leur produit sur le marché libre et revenir ensuite sous la garantie gouvernementale?

Vous pourriez peut-être éclaircir ces deux points pour moi.

M. Larry Maguire: Nous avons apporté certains éclaircissements à propos de la garantie, monsieur Calder, en ce qui concerne le blé. Cela semble assurément bien fonctionner pour d'autres produits, surtout dans l'industrie du porc au Manitoba, où 85 p. 100 du porc continue d'être commercialisé par l'office de commercialisation de cette province.

Nous croyons que la Commission canadienne du blé est en mesure de se restructurer. En fait, il y a un an et demi, dans notre mémoire sur la réforme de la Commission canadienne du blé, nous avons indiqué par bien des moyens que cela pourrait bien fonctionner dans le cadre d'un mécanisme remanié et volontaire.

• 1005

Nous n'irons pas dans les détails pour l'instant mais les mises en commun volontaires fonctionnent dans de nombreux secteurs. Lorsque je faisais partie du comité consultatif, nous avons envisagé des périodes plus courtes de mise en commun pour les agriculteurs et un certain nombre d'autres options. La Commission veut établir un mécanisme direct d'établissement des prix à l'intention des agriculteurs. Tout ce que nous proposons ici, c'est qu'au lieu que la Commission détermine quel sera le prix fixe chaque semaine, l'agriculteur soit autorisé d'indiquer la proportion du grain qu'il veut vendre à la Commission.

Nous soulignons simplement qu'aujourd'hui les mises en commun volontaires sont des options pour les sociétés céréalières. Rien n'empêche la Commission canadienne du blé d'agir ainsi aujourd'hui. Par le passé, cette option a fonctionné dans d'autres pays, dans d'autres provinces ainsi que dans l'ouest et l'est du Canada. Cela n'a rien de nouveau. Nous proposons simplement qu'on s'en serve.

M. Murray Calder: J'ai certaines réserves à cet égard mais je n'ai pas suffisamment de temps pour approfondir la question.

M. Paul Earl: Puis-je ajouter quelque chose? Vous avez demandé si nous proposons qu'un agriculteur puisse décider de faire affaire avec la Commission ou de faire affaire ailleurs selon le prix. La réponse est un non catégorique. L'objection qui a été soulevée à la mise en commun volontaire est complètement fallacieuse. Nous avions présenté une proposition au Western Grain Marketing Panel selon laquelle des contrats pourraient être établis en vertu desquels l'agriculteur s'engagerait à livrer une certaine quantité de grain, indépendamment du prix, pendant une période de temps donnée.

Ce n'est donc pas ce que nous proposons. C'est une définition ridicule de la double commercialisation et de la mise en commun volontaire.

M. Murray Calder: Ce sont des questions qu'il faut poser. À cet égard, si nous avions une disposition d'exclusion semblable à celle prévue par l'ancienne loi et que quelqu'un l'invoquait pour être exclu de la Commission canadienne du blé, disons, pendant cinq ans, et constatait par la suite qu'il a fait erreur, comment pourrait-il être inclus à nouveau?

M. Larry Maguire: Si vous aviez un conseil volontaire pour commercialiser ce produit, il faudrait qu'il fasse le nécessaire. La Commission canadienne du blé devrait faire le nécessaire pour obtenir le produit dont ces gens ont besoin.

Nous proposons qu'ils passent effectivement des contrats pour la livraison du grain à la Commission chaque automne. Les agriculteurs doivent pouvoir gérer leurs risques. Il faut qu'ils puissent couvrir le coût des intrants aujourd'hui. Ils savent quel est leur bénéfice net. Lorsqu'ils ont l'occasion de couvrir un profit dans leurs opérations, ils doivent pouvoir recourir à d'autres mécanismes que les options du marché au comptant qui existent aujourd'hui car ils perdent des débouchés sur les marchés internationaux et cela influe de façon quotidienne sur leur cash-flow.

Je suis sûr que vous savez qu'en agriculture, comme dans tout autre secteur, les besoins en cash-flow de tous les membres d'un secteur en particulier varient tout au long de l'année. La situation est un peu trop serrée aujourd'hui en vertu du mécanisme actuel et nos membres aimeraient assurément avoir recours à un mécanisme volontaire. C'est pourquoi nous préconisons un mécanisme volontaire.

M. Murray Calder: Je céderai la parole à mes collègues.

M. Larry McCormick (Hastings—Frontenac—Lennox et Addington, Lib.): Monsieur Maguire, vous dites que vous perdez des débouchés à l'étranger, mais je suis sûr que la disposition relative aux achats au comptant... On a reconnu que nous avons également perdu des débouchés par le passé.

Mais j'aimerais revenir au fait que vous recevez une garantie financière du gouvernement pour toutes les transactions financières de la Commission du blé. C'est une situation dans laquelle beaucoup d'autres groupes de produits et d'autres producteurs aimeraient bien se trouver. Si la Commission pouvait s'orienter vers la mise en commun volontaire, tiendriez-vous quand même à conserver cette garantie pour toutes vos transactions?

M. Larry Maguire: Nous avons indiqué dans notre mémoire il y a un an et demi que nous n'étions pas opposés à ce qu'un prix initial garanti soit établi, en l'occurrence, et pour les agriculteurs qui veulent faire partie d'un conseil volontaire, nous aimerions que cette garantie de prix initial soit établie et reste en vigueur si elle représente une sécurité pour eux. Nos membres disent que si nous avons la possibilité de vendre 25 p. 100 de notre grain selon le prix au comptant dans le cadre d'un contrat à terme, cela ne relèverait pas du régime de mise en commun du conseil et n'aurait donc aucune répercussion sur les agriculteurs qui continuent à en faire partie. Ils géreront leur propre risque pour ce qui est de couvrir leur grain sur un marché à terme de marchandises qui reflète peut-être mieux le prix mondial avec lequel ils sont à l'aise à ce moment-là.

• 1010

Ils ne se trouveraient donc pas dans une situation de garantie. Si vous aviez un contrat selon lequel vous deviez établir le prix de 25 p. 100 de votre gain par rapport au marché à terme, vous ne profiteriez pas de cette garantie.

M. Paul Earl: J'aimerais ajouter un très bref commentaire. Même maintenant, la Commission canadienne du blé se prévaut très rarement de la disposition de garantie.

Les propositions que nous avons présentées au groupe de commercialisation du grain prévoyaient également d'autres outils de gestion du risque à l'intention de la Commission canadienne du blé. Les syndicats du blé ont fait faillite en 1929 parce qu'ils n'ont pas couvert leur grain. Ils pensaient que la bourse des grains était un repère de bandits, et s'en tenaient loin.

Les propositions que nous avons présentées offrent à la Commission du blé des options en matière de gestion du risque. Elle aurait la possibilité de fermer les syndicats en cas de baisse soudaine et très défavorable des prix, de sorte qu'une garantie ne serait pratiquement plus nécessaire. Elle ne l'est pratiquement plus pour l'instant mais nous pourrions prévoir aussi d'autres mesures.

Le président: Nous passerons maintenant à M. Chrétien.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien: J'aimerais intervenir sur deux points, soit le mode électoral et l'inclusion. Comme j'ai droit à sept minutes, monsieur le président, je préférerais qu'on prenne à peu près trois minutes pour le premier point et quatre minutes pour l'autre.

Allons-y pour les élections. Cela m'intéresse grandement.

Donc, vous nous suggérez, dans votre mémoire, deux représentants au Manitoba, trois en Alberta et cinq en Saskatchewan. Je constate que vous ignorez la partie importante de la Colombie-Britannique qui était incluse dans la Commission canadienne du blé. J'aimerais savoir si c'est un oubli ou si c'est volontaire.

J'aimerais connaître votre position sur la façon de voter. Qui sera électeur ou électrice? Au point 3, vous parlez des producteurs vendeurs à la Commission canadienne du blé. Vous laissez sous-entendre que quelqu'un qui cultive 1 000 hectares pourrait avoir droit à 10 votes, tandis que celui qui n'en aurait que 100 aurait droit à seulement un vote. Celui qui n'aurait que 50 hectares aurait droit à un demi-vote ou je ne sais trop. Ne serait-ce pas antidémocratique que la grosseur du portefeuille ou de la terre détermine l'importance du vote de cet électeur? Je présume que, pour être admissible à un poste, il faut d'abord et avant tout être électeur.

Soyez bref, puisque je voudrais revenir par la suite sur l'inclusion.

[Traduction]

M. Larry Maguire: Merci beaucoup; ce sont de bonnes questions. Nous n'avons certainement pas oublié le cas de la Colombie-Britannique. Nous avons des membres—d'ailleurs un directeur—dans la région de Peace River, et nous représentons les agriculteurs dans la zone désignée qui s'étend du Manitoba jusqu'à la région de Peace River.

Il s'agissait en fait de deux représentants au Manitoba, trois en Alberta et cinq en Saskatchewan. Comme c'est le cas à l'heure actuelle avec le comité consultatif de la Commission du blé, cela inclut également le district de Peace River en Colombie-Britannique, qui est la seule zone incluse dans la région désignée.

Les électeurs seraient les producteurs céréaliers—de blé et d'orge—de l'Ouest canadien. Nous croyons qu'il est tout à fait équitable de permettre aux agriculteurs de voter en fonction de l'intérêt qu'il possède dans l'industrie; après tout, la version anglaise du projet de loi parle de «corporation». C'est donc une pratique commerciale normale que de voter selon l'intérêt que vous possédez dans l'industrie, comme c'est le cas pour toutes les corporations du monde libre.

Nous avons proposé en particulier de calquer la méthode utilisée en Australie, à savoir que lorsqu'il y a un vote minimum, peut-être pour un certain tonnage au cours des prochains... Jusqu'à 500 tonnes vous donneraient droit à un autre vote et peut-être que toutes les 500 tonnes par la suite vous donneraient droit à un vote supplémentaire.

Au moins les chiffres que vous proposez permettraient de faire en sorte qu'un agriculteur qui cultive 100 acres, et qui a peut-être un ou deux autres emplois non reliés à l'exploitation agricole dans une autre région, n'annule pas le vote d'une exploitation agricole familiale sur trois générations, qui représente le gagne-pain de trois familles. Nous considérons cela juste. Ce n'est sûrement pas antidémocratique.

• 1015

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien: En tout cas, ce n'est pas trop démocratique puisque, si on exagère un petit peu, quelqu'un d'extrêmement puissant pourrait acheter une quantité industrielle de lopins de terre et contrôler, à toutes fins utiles, la Commission canadienne du blé. Vous allez me dire que j'exagère, mais ce ne serait pas impossible.

Je voudrais revenir sur l'inclusion. Le groupe qui vous a précédé, les United Grain Growers, avait peur de l'inclusion et vous semblez aussi en avoir une peur viscérale. Plus tôt, dans votre exposé, vous suggériez de l'enlever. Du mémoire du groupe qui vous a précédé, je cite une phrase qui m'a frappé:

    Les dispositions d'inclusion auront pour effet de miner les investissements. Les sociétés hésiteront à investir dans des installations de transformation, si la denrée visée risque d'être mise sous la tutelle de la Commission.

Si je comprends bien, des intérêts privés auraient des craintes à investir dans le canola, par exemple, sous prétexte qu'il se pourrait peut-être bien que, dans un avenir prévisible, la production de canola soit mise sous la tutelle de la Commission canadienne du blé. À ce moment-là, ils se verraient obligés de transiger avec celle-ci. Ces investisseurs auraient des craintes à cet égard. Est-ce que je comprends bien votre position et la position du groupe qui vous a précédé? Si oui, voulez-vous me la vulgariser pour mon bénéfice personnel et peut-être aussi pour celui de mes collègues?

[Traduction]

M. Larry Maguire: Comme l'ont souligné les témoins qui m'ont précédé, cela risquerait de créer un climat d'incertitude dans l'industrie quant à la possibilité de pouvoir traiter directement avec ceux qui cultivent le produit et qui le transforment. Les transformateurs ne seraient pas en mesure d'y accéder directement. Ils devront peut-être procéder comme on le fait à l'heure actuelle dans le cas du blé.

Je dois vendre mon blé à la Commission du blé, le racheter au prix mondial, puis le vendre à un transformateur, à moins que je le transforme dans ma propre exploitation agricole ou que je le fasse en coopération avec d'autres. Puis, il y a des restrictions quant aux endroits où ce produit peut être vendu. Ce type d'incertitude ne permet certainement pas aux membres d'autres industries de prendre des décisions claires en matière d'investissement.

Prenons le blé, par exemple. Il y a environ huit moulins à blé dur dans le Dakota du Nord et aucun au Manitoba et en Saskatchewan, capable de traiter la même quantité. Certains de ces moulins sont exploités en coopérative par les agriculteurs et certains sont dirigés par des multinationales. Tous réussissent assez bien. Ils achètent notre blé canadien et en ramènent une partie chez eux.

On est en train d'envisager la construction d'une nouvelle usine à Ames au Iowa au coeur même de la région du blé et des fèves. Le blé dur viendrait de Moose Jaw. Nous ne comprenons pas pourquoi ce genre de situation devrait continuer et pourquoi on n'arrive pas à attirer un plus grand nombre de ce type d'usines ici.

Les sociétés construisent beaucoup de terminus intérieurs dans le sud du Manitoba à l'heure actuelle pour pouvoir exporter leurs produits vers ces régions. Par conséquent, nous exportons aussi les emplois.

C'est pourquoi nous estimons qu'il existe un climat d'incertitude dans tout ce secteur. Nous serions également étonnés que vous appuyiez ce projet de loi en raison des incidences qu'il risque d'avoir sur l'inclusion de grain d'autres régions du Canada dans le cadre d'une Commission du blé réelle canadienne. En fait, il est possible qu'un jour le blé du Québec ou de l'Ontario soit vendu dans le cadre d'un monopole qui serait en fait inclus dans le genre de monopole que nous avons dans l'Ouest canadien, plutôt que dans le cadre du type d'organisation qui existe à l'heure actuelle en Ontario.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien: Merci, monsieur le président.

[Traduction]

Le président: Je vous remercie beaucoup. Nous passons maintenant à M. Proctor qui a cinq minutes.

M. Dick Proctor: Je vous remercie, monsieur le président.

Messieurs, bonjour. J'aimerais poursuivre la discussion concernant la disposition d'inclusion. Monsieur Maguire, je crois que dans votre déclaration préliminaire vous avez indiqué que l'inclusion des grains irait à l'encontre de nos ententes commerciales. Pourriez-vous me donner un peu plus de précisions à cet égard?

M. Larry Maguire: Oui. Nous croyons comprendre que les sociétés en mesure de prouver qu'elles ont subi un certain tort financier par suite d'un changement dans la gestion de ces types de grain pourraient en fait demander une indemnisation au gouvernement canadien si elles ont été touchées par un changement de juridiction de la commercialisation.

Le gouvernement en est tout à fait conscient. Par conséquent, nous ne croyons pas qu'il soit dans l'intérêt des contribuables de payer la note pour ces types d'indemnisation versée peut-être à des multinationales étrangères, ou à nos propres fournisseurs ou transformateurs.

• 1020

Cela n'est certainement pas dans l'intérêt des agriculteurs qui comptent sur nos clients étrangers pour qu'ils achètent ce produit, parce qu'ils ont d'autres options. Il existe d'autres pays où ils peuvent acheter leurs produits.

Je songe particulièrement au canola. La culture du canola est de plus en plus importante en Australie, en partie parce qu'il y a quelques années, on nous considérait comme un fournisseur et un transporteur peu fiable au large de la côte Ouest.

Les États-Unis en produisent davantage, notamment plus au sud de mon exploitation, dans le Dakota du Nord. En fait, ils ont doublé leur production de canola cette année.

Donc, les clients peuvent s'approvisionner chez de nombreux autres fournisseurs s'ils ne sont pas satisfaits de notre service de distribution.

M. Paul Earl: Monsieur Proctor, nous précisons au début de notre mémoire que la tendance veut qu'on délaisse les sociétés commerciales d'État, les monopoles, au profit du marché libre. C'est ce qui se fait à l'échelle planétaire.

Nous indiquons à tous nos partenaires commerciaux, par ce projet de loi, que nous effectuons un retour en arrière. Nous sommes en train de maintenir et de renforcer notre monopole, notre emprise monopolistique. Au lieu d'aller de l'avant avec les réformes entreprises il y a 10 ans, nous nous trouvons dans une situation où nous devons expliquer aux autres pourquoi ce monopole est en train d'être renforcé et non réduit.

Voilà pourquoi nous affirmons que cette mesure aura des répercussions sur le commerce.

M. Dick Proctor: Il y a aussi la question du retrait de l'orge. Vous avez parlé, bien entendu, du vote qui a eu lieu l'hiver dernier, où 40 p. 100 des agriculteurs ont dit qu'ils n'en voulaient pas, qu'il fallait supprimer cette denrée. Or, ce résultat laisse entendre que 60 p. 100 des agriculteurs sont contre cette décision.

Nous vivons dans un monde démocratique. Les députés d'en face ont obtenu environ 40 p. 100 du vote cette fois-ci. Ils constituent le parti ministériel. M. Chrétien aurait aimé obtenir, il y a deux ans, 0,5 p. 100 de plus, mais cela n'a pas été le cas, et le Québec fait toujours partie de ce pays.

J'aimerais savoir pourquoi 40 p. 100 des agriculteurs—et cela représente, en effet, une minorité—devraient pouvoir imposer leur volonté dans ce domaine.

M. Larry Maguire: C'est pour cette raison que nous soutenons qu'il est essentiel que les agriculteurs puissent voter en fonction de leur participation dans l'industrie. À l'époque où je siégeais au comité consultatif, il y avait 20 p. 100 des agriculteurs qui produisaient 80 p. 100 des céréales. J'ai fait partie du comité qui a mis au point le nouveau régime de passation des marchés pour les agriculteurs de l'Ouest canadien. Ce régime fonctionne très bien.

La barre, à l'époque, était donc fixée à 80 p. 100. On peut, à partir de cela, conclure qu'environ 70 p. 100 de la production d'orge dans l'Ouest canadien pourrait être vendue sur le marché libre—et cela comprend aussi l'orge de brasserie, même si la question était tendancieuse.

Nous n'affirmons pas que ces données pourraient être appliquées directement au blé, mais nous savons que cette question inquiète les producteurs. Nous représentons les agriculteurs qui cultivent le blé de même que ces autres denrées. C'est pourquoi nous jugeons essentiel de supprimer la disposition d'inclusion.

M. Paul Earl: Il y a un autre facteur. Vous ne pouvez pas, dans un système comme celui-ci, maintenir le statu quo quand vous savez qu'il suscite un tel mécontentement.

Le Comité de commercialisation du grain de l'Ouest avait, à notre avis, proposé de très bonnes solutions pour venir à bout de ce problème. Elles ont été laissées de côté, de sorte que nous nous retrouvons maintenant avec un système qui ne fait que maintenir et renforcer le statu quo.

Mais c'est peine perdue. Si vous pensez que ce projet de loi va apaiser les agriculteurs de l'Ouest, vous vous trompez. Il risque d'aggraver la situation à long terme.

Le président: Merci, monsieur Earl.

Monsieur Borotsik.

M. Rick Borotsik: J'ai bien droit à cinq minutes, n'est-ce pas, pour poser quelques brèves questions? Sauf que je connais très bien M. Maguire. Il peut prendre cinq minutes pour répondre à une question.

J'aimerais vous parler brièvement des dispositions d'inclusion et d'exclusion. M. Goodale a dit que nous devrions, en tant que comité, écouter ce que les gens—les producteurs et les transformateurs—ont à dire, et ensuite communiquer ces vues au ministre.

En ce qui concerne l'inclusion, on m'a dit que si cette mesure figure dans le projet de loi, c'est uniquement parce qu'on y trouve aussi une disposition d'exclusion. D'après votre association, devrait-on supprimer ces deux mesures, ou seulement la disposition d'inclusion?

M. Larry Maguire: Nous sommes d'avis que la disposition d'inclusion ne devrait pas figurer dans le projet de loi. Elle n'a jamais fait l'objet de discussions. Elle a été ajoutée à la dernière minute, au printemps dernier—il y a un an de cela—lorsque bon nombre des membres du comité se sont rendus dans l'Ouest. Cette disposition n'est pas nécessaire. Personne ne l'a réclamée.

• 1025

M. Rick Borotsik: Et la disposition d'exclusion?

M. Larry Maguire: Nous voulons pouvoir choisir la façon dont le grain est commercialisé. Si, en fait, la disposition d'exclusion n'est pas vraiment nécessaire... Mais il faut prévoir un mécanisme.

C'est pourquoi nous affirmons dans notre mémoire que ces questions de tout ou rien ne sont peut-être pas celles qui devraient être posées. Essayons de trouver un mécanisme qui permettra aux agriculteurs de commercialiser leurs produits comme ils l'entendent.

M. Rick Borotsik: M. Earl a dit que ce projet de loi ne réglera pas le problème dans l'Ouest canadien. Je suis tout à fait d'accord avec vous. Cette question soulève beaucoup de controverse.

J'aimerais par ailleurs savoir si le projet de loi aura des répercussions sur le commerce. L'ONC doit se réunir en 1999. J'aimerais avoir votre avis là-dessus. Comment ce nouveau projet de loi sera-t-il perçu?

M. Larry Maguire: Je vais demander à M. Earl de répondre à cette question.

M. Paul Earl: Le projet de loi risque de compromettre notre position au cours des négociations de l'OMC. Nous savons que la question des sociétés commerciales d'État va être abordée. Nous avons proposé une mesure législative qui maintient et renforce le statu quo. Nous envoyons un message contradictoire, surtout en ce qui concerne l'établissement du prix de l'orge de brasserie. Il pourrait y avoir des problèmes de ce côté-là.

M. Rick Borotsik: Vous avez piqué notre curiosité lorsque vous avez parlé de l'option de 25 p. 100 sur les contrats à terme. À votre avis, monsieur Earl, est-ce que le projet de loi permet à la Commission de mettre en oeuvre un tel programme?

M. Paul Earl: Qu'il le permette ou non, là n'est pas la question. Ce que nous avons dit, c'est que le temps presse. Nous savons que le débat sera animé et que les élections ne se passeront pas en douceur. Nous savons qu'il va y avoir des discussions au sein de la Commission, et au sujet de son rôle.

C'est pourquoi nous voulons que cette proposition soit incluse dans le projet de loi. Si vous voulez donner des outils aux agriculteurs de l'Ouest pour qu'ils puissent gérer les risques et apaiser un peu le mécontentement qui existe, vous devez inclure cette option dans le projet de loi et lui donner un caractère exécutoire.

M. Rick Borotsik: Ce programme devrait être non pas facultatif, mais obligatoire?

M. Paul Earl: Absolument.

M. Larry Maguire: Il n'y a peut-être qu'un petit groupe d'agriculteurs qui ont recours aujourd'hui à cette option.

M. Rick Borotsik: C'était ma prochaine question, monsieur Maguire. En ce qui concerne les autres cultures, le canola, le lin, ainsi de suite, est-ce que vous utilisez ce genre d'outils pour gérer les risques dans ces secteurs?

M. Larry Maguire: Tous les jours.

M. Rick Borotsik: Et la plupart des producteurs utilisent ces options?

M. Larry Maguire: Bon nombre le font. Il y en a beaucoup aussi qui n'utilisent pas les marchés à terme. C'est pourquoi je dis qu'il n'y a peut-être qu'un petit groupe d'agriculteurs qui ont recours à cette option dans le cas du blé. Mais ils concluent souvent des contrats de livraison différée, ce qui leur permet de négocier le prix comptant de leur produit, disons, au printemps ou dès maintenant pour l'automne prochain.

M. Rick Borotsik: Il me reste encore une minute, monsieur le président.

Vous avez parlé des transformateurs de blé dur du Dakota du Nord. Il y a plusieurs usines de trituration dans l'Ouest canadien. Si ces usines se retrouvaient, en vertu d'un stratagème quelconque, en situation de monopole, croyez-vous qu'elles quitteraient l'Ouest canadien?

M. Larry Maguire: Eh bien, elles ont investi des sommes énormes dans leurs installations. Certaines n'existent que depuis un ou deux ans—et ce n'est pas moi qui ai répondu à la question de M. Chrétien—elles évoluent dans des conditions de pleine concurrence.

M. Rick Borotsik: C'est pour cette raison que j'ai posé la question.

M. Larry Maguire: Elles hésitent beaucoup. Elles ne se prononcent pas en faveur de la disposition d'inclusion.

M. Rick Borotsik: S'il y avait...

M. Paul Earl: Les membres de la Canadian Oilseed Processors Association ont dit que cette mesure leur nuirait. Ce sont eux les spécialistes.

M. Rick Borotsik: Je suis certain qu'ils vont nous dire ce qu'ils en pensent.

Si le blé dur était vendu sur le marché libre, croyez-vous qu'il y aurait un plus grand nombre d'usines de transformation au Canada?

M. Larry Maguire: Oui, les possibilités seraient plus nombreuses. Le Canada et les États-Unis essaient d'établir un contrat à terme pour la vente de blé dur entre les bourses de Winnipeg et de Minneapolis. La Commission couvre une partie de ces ventes intérieures, du moins, par l'entremise des bourses de Minneapolis et de Chicago.

M. Rick Borotsik: Avez-vous dit que la Saskatchewan a éliminé son Office de commercialisation des produits du porc?

M. Larry Maguire: Avant hier.

M. Rick Borotsik: Merci beaucoup pour ce renseignement.

Le président: Monsieur Byrne, vous avez trois minutes.

M. Gerry Byrne: Merci beaucoup, monsieur le président, pour ces trois minutes.

Une voix: Oh, Oh!

M. Gerry Byrne: Je voudrais tout simplement avoir quelques précisions. Votre exposé me laisse un peu perplexe car j'ai du mal à comprendre l'idée que vous vous faites du processus démocratique.

D'après mon collègue, vous souhaiteriez que le comité recommande le retrait de l'orge de la juridiction de la Commission canadienne du blé, parce que 40 p. 100 des agriculteurs se sont prononcés en faveur de ce changement, ce qui veut dire qu'il y en a 60 p. 100 qui sont contre. Je me demande tout simplement comment vous rattachez cela... vous avez dit aussi que vous voulez que le comité s'engage davantage sur le plan politique, ce qui va à l'encontre des principes démocratiques, et qu'on dépolitise la Commission canadienne du blé. Pouvez-vous nous en dire plus là-dessus?

• 1030

M. Larry Maguire: Nous disons, M. Byrne, que le conseil devrait être constitué de volontaires. C'est ce que nous souhaitons.

Nous utilisons aussi d'autres exemples. Et je vous signale, au passage, que c'était 37 p. 100 des agriculteurs. En Alberta, 66 p. 100 des agriculteurs ont dit souhaiter avoir accès à diverses options de commercialisation. Plus de la moitié des agriculteurs de la Saskatchewan seraient en faveur d'un tel changement, d'après une étude réalisée par le gouvernement. Le gouvernement du Manitoba, lui, s'est rangé du côté du Groupe de commercialisation du grain de l'Ouest. La question posée par le ministre... L'industrie est restée surprise quand elle a appris que 37 p. 100 des agriculteurs ne voulaient pas que l'orge de brasserie tombe sous la juridiction de la Commission. C'est pour cette raison, en fait, que la question a été formulée de cette façon.

Nous aimerions que le conseil soit constitué de volontaires. Pour ce qui est de l'orge, nous aimerions tout simplement avoir la possibilité de choisir. Mais ce sont les producteurs de malt qui disent que cela n'est pas faisable. Compte tenu du volume d'orge, comme je l'ai déjà mentionné, qui pourrait être vendu sur le marché libre, nous sommes d'avis que le retrait de l'orge constitue la seule solution.

La Commission ne vend qu'une petite fraction de la production d'orge, et elle en vendra de moins en moins. La restructuration de la subvention du Nid-de-Corbeau et du système de transport des marchandises fait qu'il n'y aura plus aucun agriculteur de l'Ouest qui exportera, dans les années à venir, de l'orge de provende, du moins pas en grande quantité, surtout s'il existe un monopole.

J'ajouterais que, en ce qui concerne le prix initial, si le gouvernement ou la Commission accepte de garantir ce prix, nous allons assister au même scénario que cette année: la Commission fixera tout simplement un prix initial très bas par rapport à ce que l'industrie recherche. Est-ce que cette façon de procéder sert les intérêts des agriculteurs? C'est un très mauvais signal à envoyer aux agriculteurs, surtout si l'on tient compte du nombre d'acres de blé d'hiver et de seigle d'automne qui ont été cultivés cette année.

M. Gerry Byrne: Mais si un appui de 37 p. 100 suffit pour obtenir le retrait d'un produit en particulier, est-ce qu'un pourcentage de 37 p. 100 suffit aussi pour obtenir l'inclusion d'une denrée?

M. Larry Maguire: Nous avons dit, tout au long des discussions, qu'il faudrait suivre l'exemple de l'Ontario. Les agriculteurs de l'Ouest n'ont maintenant aucune raison de faire confiance aux résultats des votes. Il devait y avoir cet automne un vote en Ontario, mais il a été annulé. Si nous avions appliqué, dans l'Ouest, les mêmes règles qui ont, ou qui auraient, été appliquées en Ontario, nous aurions déjà un régime de double commercialisation pour l'orge. Nous sommes donc entièrement d'accord avec les règles que l'Office de commercialisation de l'Ontario a mises en place.

Le président: Je vous remercie d'avoir comparu devant le comité. La discussion a été fort intéressante.

Je présume que vos ancêtres n'ont pas quitté l'Irlande de leur gré.

M. Larry Maguire: Absolument pas. Ils se sont installés dans le sud et le nord de l'Ontario, et au Manitoba.

Le président: Merci d'être venus.

J'invite maintenant Marvin Shauf, Brian Saunderson et Patty Townsend, de la Prairie Pools Inc., à prendre la parole. Vous aurez dix minutes pour présenter votre exposé, après quoi nous passerons aux questions.

M. Marvin Shauf (vice-président, Prairie Pools Inc.): Merci, monsieur le président.

Monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité, je tiens à vous remercier de nous avoir donné l'occasion de comparaître devant vous aujourd'hui. Je m'appelle Marvin Shauf. Je suis le vice-président de la Prairie Pools Inc. Je suis également le vice-président du syndicat du blé de la Saskatchewan. Je suis accompagné aujourd'hui de Brian Saunderson, directeur de la Prairie Pools Inc., qui est également directeur du syndicat du blé du Manitoba. Patty Townsend travaille à Ottawa, au bureau du groupe PPI.

Le président: Nous avons eu l'occasion de la rencontrer.

M. Marvin Shauf: Le syndicat du blé de l'Alberta regrette de ne pouvoir être ici aujourd'hui. Les coopératives sont très occupées en ce moment, car elles préparent les assemblées annuelles des délégués. Elles doivent rencontrer les membres de toutes les régions du pays, et c'est ce qu'elles sont en train de faire en Alberta. Mais je tiens à vous dire que l'Alberta est entièrement d'accord avec le point de vue que nous allons vous exposer aujourd'hui.

• 1035

Comme vous le savez, les syndicats du blé de l'Alberta, de la Saskatchewan et du Manitoba forment le groupe PPI et s'occupent des questions qui touchent tous les membres. L'exposé d'aujourd'hui est présenté au nom de ces trois groupes.

Je suis certain que la plupart d'entre vous connaissent les syndicats du blé des Prairies. J'aimerais quand même vous les présenter.

Les syndicats du blé de l'Alberta, du Manitoba et de la Saskatchewan figurent parmi les plus grosses coopératives du Canada. Ils comptent en tout plus de 100 000 membres sociétaires. Plus de la moitié des céréales, oléagineux et cultures spéciales qui sont acheminés vers les silos-élévateurs au Canada transitent par nos installations. Nous employons plus de 5 000 Canadiens. Ensemble, les syndicats exploitent plus de 700 silos-élévateurs. Ils exploitent aussi, que ce soit seuls, ensemble ou en collaboration avec d'autres intervenants, les silos d'expédition des ports de Vancouver, de Prince-Rupert et de Thunder Bay.

Les syndicats et leur société d'exportation, la XCAN Grain Pool Ltd., agissent comme intermédiaires de la Commission canadienne du blé auprès de divers pays. Nous estimons que le partenariat qui existe entre les syndicats et la Commission sert les intérêts de nos membres sociétaires.

Les syndicats s'occupent activement de la transformation des céréales, des oléagineux et des cultures spéciales. Nous avons des intérêts dans la plus grande usine de trituration et de transformation du Canada, et nous participons aussi activement aux opérations de vente de bétail de l'Ouest canadien, considérées comme les plus importantes au Canada. Les syndicats exercent également des activités dans divers autres secteurs: mouture, boulangerie, maltage, production d'éthanol, fabrication et distribution d'engrais, assurances et édition., pour n'en nommer que quelques-uns.

Nous vous avons fait parvenir notre mémoire à l'avance et je suis convaincu que vous l'avez tous entre les mains.

Nous avons essayé non seulement d'y exprimer nos inquiétudes à l'égard du projet de loi C-4 mais aussi de proposer des changements constructifs. Nous ne lirons pas intégralement notre mémoire. Nous voulons plutôt en exposer les faits saillants et prendre le temps de discuter avec vous de nos propositions.

Les syndicats du blé reconnaissent la valeur que représente la Commission canadienne du blé pour les producteurs de blé et d'orge des Prairies. Plus particulièrement, les trois piliers qui sous-tendent son système de commercialisation—la vente par comptoir unique, la mise en commun des prix et les garanties gouvernementales—sont tout aussi valables aujourd'hui pour les producteurs qu'elles l'étaient il y a plus de cinquante ans lors de la création de la commission. Cependant, nous reconnaissons également que le monde évolue et que notre organisme de commercialisation doit s'adapter pour saisir les nouvelles possibilités qui s'offrent. Nous appuyons l'objectif stratégique du gouvernement qui, pour paraphraser, consiste à tabler sur les points forts éprouvés du système de commercialisation de la Commission canadienne du blé tout en améliorant sa responsabilité à l'égard des producteurs et en lui conférant davantage de souplesse. Le projet de loi C-4 constitue selon nous une étape positive vers l'atteinte de ces objectifs.

Certains des changements apportés à la dernière session parlementaire ont permis d'améliorer sensiblement le projet de loi qui nécessite toutefois encore quelques remaniements. Nous traitons dans notre mémoire de deux grands thèmes: l'objectif visant à accroître la responsabilité à l'égard des producteurs et, deuxièmement, la souplesse accrue et le renforcement des trois piliers essentiels du système de commercialisation de la Commission canadienne du blé.

Premièrement, je vais vous parler de la très importante question de la responsabilité.

Nous comprenons que la Commission canadienne du blé doit être comptable de ces décisions envers les contribuables canadiens puisqu'il s'agit d'une société dont les emprunts, le crédit et les acomptes sont garantis par l'État. Le projet de loi C-4 prévoit cette responsabilité en exigeant la présentation et l'approbation de plans d'entreprise annuels ainsi que l'approbation des décisions financières par le ministre et, dans certains cas, par l'ensemble du cabinet. Cependant, il reste beaucoup de modifications à apporter au projet de loi pour assurer la responsabilité de la Commission à l'égard des agriculteurs.

Pour assurer une plus grande responsabilité, les administrateurs élus devraient disposer d'un mécanisme officiel leur permettant de rendre des comptes et de communiquer avec les producteurs. Nous nous réjouissons que le projet de loi C-4 crée un conseil d'administration dont la majorité des membres sera élue par les agriculteurs. Cette mesure permettra aux agriculteurs de vraiment influencer les orientations de la Commission canadienne du blé. Nous souscrivons aussi à la décision de s'en remettre directement à un conseil d'administrateurs élus plutôt qu'à un conseil provisoire dont les membres sont nommés.

Nous avons proposé que tous les postes soient comblés à l'occasion de la première élection pour s'assurer que les mandats ne prennent pas tous fin en même temps. Cinq administrateurs devraient être élus pour un mandat de deux ans et cinq autres pour un mandat de trois ans. Après la première élection, tous les administrateurs pourraient être élus pour une durée de trois ans, comme le prévoit le projet de loi.

• 1040

Nous sommes d'accord pour que tous les administrateurs exercent leurs fonctions à temps partiel. Nous ne voulons pas dire que tous les postes devraient être à temps partiel. Bien que nous approuvions la nomination d'un premier dirigeant à temps plein, ou du président, comme on le désigne dans le projet de loi, nous ne croyons pas que le président devrait faire partie du conseil d'administration. Pour presque toutes les activités à caractère agricole, le premier dirigeant est pleinement comptable de ses actes au conseil d'administration mais n'en est pas membre.

Nous avons entendu dire que le gouvernement estime qu'il devrait continuer de nommer le président en raison du risque financier que représente la garantie des prix initiaux, du crédit et des emprunts. Cependant, je le répète, le projet de loi protège plus qu'amplement les contribuables. Par contre, il ne prévoit aucun mécanisme pour que la Commission soit comptable envers les agriculteurs.

Le président doit être entièrement comptable envers le conseil et, par son entremise, envers les agriculteurs. Un président nommé par le gouvernement peut se sentir davantage comptable envers le gouvernement qu'envers le conseil d'administration. Nous vous prions de recommander que le président soit nommé par le conseil d'administration. Par l'entremise des cinq membres qu'il a nommés, le gouvernement participera au processus de nomination.

Dans notre mémoire, nous proposons des amendements précis à certains articles du projet de loi C-4 pour régler les problèmes que nous avons soulevés. J'aimerais maintenant céder la parole à Brian Saunderson qui vous parlera du deuxième thème: une souplesse accrue et le maintien des piliers du système de commercialisation de la Commission canadienne du blé.

Le président: Vous avez trois minutes.

M. Brian Saunderson (directeur, Prairie Pools Inc.): Je vais essayer de faire vite. Je suis heureux d'être ici, monsieur le président et membres du comité.

Le système de commercialisation de la Commission repose sur les trois principes fondamentaux dont mon collègue Marv a parlé: la vente par comptoir unique, la mise en commun des prix et les garanties gouvernementales. La vente par comptoir unique permet aux agriculteurs de concentrer leurs pouvoirs de commercialisation sur les marchés internationaux. Quant à la mise en commun des prix, elle leur permet de saisir tous les débouchés commerciaux—ventes au prix fort et ventes subventionnées par nos concurrents—et de partager les profits. Au Canada, nous n'avons pas recours aux subventions à l'exportation. La mise en commun est un des moyens dont disposent les agriculteurs pour concurrencer les pays où il y a des subventions. Enfin, les garanties gouvernementales assurent la stabilité aux agriculteurs.

Certaines dispositions du projet de loi C-4 sont positives, comme celles qui permettent à la Commission de verser un montant aux producteurs pour compenser les coûts d'entreposage à la ferme, de délivrer des certificats négociables et de recourir à des outils de gestion des risques. Elles aident à accroître la souplesse et la marge de manoeuvre tout en renforçant les trois piliers du système de commercialisation de la Commission. Cependant, nous devons signaler que certaines mesures du projet de loi, tel qu'il est rédigé actuellement, vont compromettre inutilement les trois principes fondamentaux.

Il y a d'abord la proposition visant à supprimer la garantie fédérale à l'égard des ajustements des acomptes à la livraison. Selon le gouvernement, la suppression de ces garanties permettra à la Commission de faire des ajustements plus opportuns et de payer les agriculteurs plus rapidement. L'objectif est louable, mais nous croyons qu'il serait plus facile de l'atteindre si on exigeait simplement que les ajustements soient approuvés par le ministre de l'Agriculture et le ministre des Finances.

À notre connaissance, aucun compte de mise en commun n'a jamais été déficitaire par suite d'un ajustement de cette nature. Cependant, nous craignons fortement que la suppression de ces garanties ne finisse par entraîner celle de la garantie des acomptes à la livraison.

Les dispositions du projet de loi C-4 qui permet à la Commission d'acheter du blé et de l'orge au comptant directement des producteurs soulèvent de vives inquiétudes au sein de notre organisme. Si la CCB est habilitée à effectuer des achats de grain au comptant, les comptes de mise en commun risquent davantage alors d'être déficitaires, ce qui entraînerait des prix initiaux plus modérés et des comptes de mise en commun moins attrayants. En bout de ligne, c'est tout le système de mise en commun des prix qui s'effondrerait. En tant que coopératives d'agriculteurs, nous aurions tort de ne pas signaler nos préoccupations au sujet des achats au comptant de ce point de vue.

Le système d'acquisition du grain dans les Prairies vient compléter le système de commercialisation de la Commission canadienne du blé. L'efficacité du système de manutention de la ressource permet à la Commission de se concentrer sur la commercialisation. Cependant, si la Commission a la possibilité d'acheter le grain au comptant des producteurs, cela pourrait influer au bout du compte sur la configuration du système des élévateurs. Cela non seulement se répercuterait sur nos investissements dans les installations mais pourrait finalement réduire les options de livraison qui s'offrent aux producteurs.

Nous comprenons qu'il faut mettre le plus d'argent possible entre les mains des agriculteurs et ce, dans les plus brefs délais. Les dispositions du projet de loi C-4 comme la possibilité d'écourter les périodes de mise en commun et plus particulièrement la délivrance de certificats de producteurs négociables permettrait d'atteindre cet objectif sans compromettre le système de mise en commun.

Après avoir fait valoir notre argument en faveur du maintien de la garantie fédérale des acomptes à la livraison et contre les achats au comptant, nous avons traité des raisons invoquées par le gouvernement en faveur de la création d'un fonds de réserve. Comme le fardeau des agriculteurs est déjà alourdi par un prélèvement sur les produits traités et par les droits d'utilisation, et étant donné que le fonds n'est pas nécessaire, nous exprimons notre opposition à la création d'un fonds de réserve et demandons l'abrogation des articles du projet de loi qui la prévoit.

• 1045

Si le gouvernement rejetait nos suggestions et souhaitait mettre sur pied un fonds de réserve, nous devons à tout le moins insister pour qu'il ne le fasse pas avec l'argent des producteurs. Si ce fonds est jugé nécessaire, le gouvernement devrait injecter un montant unique, puisé dans le Trésor et suffisant pour couvrir les risques.

Je passe maintenant la parole à Marvin.

M. Marvin Shauf: Un nouvel article du projet de loi C-4, appelé la disposition d'inclusion, permettrait au gouverneur en conseil d'étendre à d'autres grains l'application de toutes les parties de la Loi de la Commission canadienne du blé, ou de l'une d'elles. Le libellé de cette disposition nous préoccupe, car il pourrait donner lieu à des demandes non fondées. Cela non seulement placerait le ministre dans la position embarrassante de devoir décider quel organisme représente les producteurs, mais ouvrirait également la porte à des conflits juridiques et engendrerait de l'incertitude chez les clients et les exportateurs actuels d'autres cultures.

Le libellé de cet article doit être quelque peu remanié pour que seul l'organisme pouvant démontrer qu'il est le principal représentant des producteurs concernés puisse présenter une demande en vertu de la disposition d'inclusion. Notre mémoire contient une proposition à cet égard.

Nous nous rendons compte que nous avons pris beaucoup de temps pour expliquer nos préoccupations, mais le comité nous donne là une excellente occasion d'intervenir relativement au projet de loi C-4 pour que celui-ci réponde aux besoins des agriculteurs des Prairies. Nous voulions donc aborder la question sérieusement et de façon approfondie.

En résumé, nous voulons qu'il soit clair que nous appuyons les objectifs du projet de loi C-4 et que nous considérons qu'il constitue dans son ensemble un pas dans la bonne direction. Toutefois, nous répétons que les piliers fondamentaux du système de commercialisation de la Commission canadienne du blé—soit la vente à guichet unique, la mise en commun des prix et les garanties gouvernementales—sont encore aussi importants qu'ils l'étaient à l'époque où la Commission a été créée. Ils ne doivent pas être compromis.

Je vous remercie encore une fois de nous avoir permis de formuler quelques propositions qui visent à remanier légèrement ce projet de loi pour mieux protéger les intérêts des agriculteurs des Prairies.

Le président: Merci, monsieur Shauf. Je vous remercie également de nous avoir envoyé votre mémoire la veille de votre comparution, car cela nous a permis de l'étudier.

Nous passons maintenant à M. Breitkreuz.

M. Garry Breitkreuz: Merci beaucoup. Je vous remercie de comparaître devant le comité.

Nous avons beaucoup de questions, mais le temps ne nous permettra probablement pas de toutes les poser. Je commencerai donc par les principales questions que les agriculteurs de ma région m'ont demandé de poser devant le comité.

Que pensez-vous du fait que les agriculteurs des Prairies sont traités différemment de leurs homologues des autres provinces? Je vais vous donner un exemple que vous pourrez commenter. Vous connaissez probablement très bien la déclaration statutaire à laquelle ont recours les agriculteurs des sept autres provinces, mais non ceux des Prairies, en ce qui a trait aux exportations. Aux termes de cette déclaration, les agriculteurs peuvent exporter leur blé sans frais. Qu'en pensez-vous? Les agriculteurs des Prairies n'ont pas accès à ce mécanisme.

M. Marvin Shauf: Les agriculteurs des Prairies peuvent mettre leurs ressources ensemble et commercialiser leurs produits par le biais d'un guichet unique. Cette façon de procéder fonctionne très bien pour eux depuis de nombreuses années et, avec quelques remaniements, elle continuera de répondre très bien aux besoins des producteurs des Prairies.

M. Garry Breitkreuz: Je veux parler de l'aspect équitable de la question. Pourquoi les agriculteurs des Prairies ne pourraient-ils pas avoir les mêmes droits que les agriculteurs des autres provinces?

M. Marvin Shauf: Cela est probablement en partie attribuable à la situation des Prairies et au fait que nous arrivons à coordonner nos efforts et à commercialiser nos produits collectivement. Je ne crois pas que nos droits soient en jeu. Je pense que les agriculteurs des Prairies ont accès à un organe de commercialisation très utile.

M. Garry Breitkreuz: Faites-vous référence à l'isolement géographique des Prairies?

M. Marvin Shauf: En partie, mais les producteurs des Prairies ont regroupé leurs forces en commercialisant leurs produits par l'entremise de la Commission canadienne du blé.

M. Garry Breitkreuz: Sauf votre respect, je ne crois pas que vous répondiez à ma question. Pourquoi un agriculteur de la Colombie-Britannique ou du Québec devrait-il avoir le droit d'exporter ses céréales sans frais, mais pas celui des Prairies? Vous ne répondez pas à l'essentiel de ma question.

Merci. Je partagerai le temps qui m'est alloué avec M. Benoit.

M. Leon E. Benoit: J'aimerais revenir à cette question de la vente à guichet unique et à l'appui que vous avez manifesté envers le monopole de la Commission. Le mouvement coopératif repose en entier sur le principe de l'adhésion volontaire, tout particulièrement pour les coopératives chargées de la commercialisation des grains. L'une des exigences fondamentales d'une coopérative, c'est que l'adhésion soit volontaire. Les personnes qui veulent vendre leurs produits par l'entremise d'une coopérative peuvent le faire. Les personnes qui veulent adhérer à un syndicat du blé peuvent le faire et celles que cela n'intéresse pas peuvent vendre leurs produits d'une autre façon.

• 1050

Quand les syndicats du blé ont-ils abandonné cette philosophie et quand les membres ont-ils décidé que les agriculteurs seraient obligés de passer par la Commission du blé et que le principe de l'adhésion volontaire n'existait plus? Y a-t-il eu un vote? Les syndicats ont-ils procédé de façon démocratique en demandant à leurs membres s'ils étaient d'accord pour rejeter le principe de l'adhésion volontaire ou ce changement de cap est-il tout simplement survenu à un moment quelconque?

M. Brian Saunderson: Si l'opinion des producteurs à cet égard est en train de changer, comme vous le laissez entendre, nous ne pouvons que nous réjouir de la proposition voulant que les deux tiers des membres du conseil d'administration soient élus. Cet instrument permettra de satisfaire aux désirs des agriculteurs si leurs attentes à l'égard de la Commission changent. Je ne crois pas que le projet de loi aille aussi loin que vous l'aimeriez, mais un conseil d'administration élu permettra peut-être de répondre aux nouveaux besoins des agriculteurs.

M. Leon E. Benoit: Ce que je voulais souligner, c'est que l'adhésion des agriculteurs était autrefois volontaire. Les syndicats du blé et le mouvement coopératif reposaient sur le principe de l'adhésion volontaire. Vous venez maintenant nous dire, en tant que représentants des syndicats du blé, que le monopole de la Commission doit être maintenu. Cela va à l'encontre des principes qui ont présidé à la naissance des syndicats du blé. Je me demande tout simplement quand les membres ont décidé d'être en faveur d'un monopole.

M. Marvin Shauf: Si vous revenez en arrière, vous constaterez que des décisions ont été prises pour commercialiser les produits de façon collective. Ces décisions ont été confirmées par des votes plus récents. Nous avons nous-mêmes tenté d'appliquer le principe de la mise en commun volontaire, mais cela n'a pas fonctionné. Quand les prix augmentent, les gens partent. Quand les prix baissent, ils reviennent chercher des garanties. Vous n'arrivez à satisfaire ni vos clients, ni les gens qui veulent leur livrer des produits. Nous avons tenté l'expérience à maintes reprises, mais elle ne fonctionne pas à long terme.

M. Leon E. Benoit: Je ne suis pas d'accord avec vous quand vous dites que la mise en commun volontaire n'a pas fonctionné. Ce principe a bien fonctionné par le passé, même pour la commercialisation de l'orge, où il y avait un double marché.

Le sous-ministre de l'Agriculture, M. Migie, a indiqué, quand il a comparu plus tôt cette semaine, que rien n'empêcherait les membres, élus ou nommés, du conseil d'administration de soustraire certaines catégories de grains du champ d'application de la Loi sur la Commission canadienne du blé si c'était là leur souhait. Le sous-ministre a déclaré que cela pourrait être fait, et que le conseil d'administration ne rencontrerait aucun obstacle à cet égard. En théorie, le conseil d'administration pourrait soustraire tous les types de grain de ce champ d'application si tel était son désir. C'est à tout le moins ce que le sous-ministre, M. Migie, nous a donné comme impression—c'est en fait ce qu'il nous a déclaré.

Croyez-vous que ce projet de loi pourrait permettre au conseil d'administration d'agir de la sorte s'il le souhaitait? Je veux tout simplement dire qu'il est malheureux que ce projet de loi ne prévoit pas une adhésion volontaire qui permettrait aux producteurs de vendre ou non leurs grains par l'entremise de la Commission, mais ce n'est pas le cas. Le ministre a toutefois déclaré que certains types de grain pourraient être exclus.

Mme Patty Townsend (gestionnaire, Communications et Affaires publiques, Prairie Pools Inc.): Je pense que le projet de loi prévoit également un système de mise en commun volontaire. La disposition d'exclusion permettrait au gouvernement, par décret, de soustraire n'importe quel type de grain à l'application de toute disposition relative à la Commission canadienne du blé. Cela signifie que vous pourriez soustraire une culture de la vente à guichet unique tout en continuant à l'inclure dans la mise en commun, ce qui constituerait essentiellement un système de mise en commun volontaire.

M. Leon E. Benoit: C'est ce que le ministre a dit. Mais, dans les faits, croyez-vous que cela pourrait avoir lieu compte tenu de la structure que prévoit ce projet de loi?

Mme Patty Townsend: Oui, parce que les membres du conseil d'administration sont élus—enfin, la majorité d'entre eux—et reçoivent leurs instructions des agriculteurs, lesquels pourraient faire une recommandation au ministre qui agirait pour donner suite à cette recommandation et, par le fait même, au vote des agriculteurs.

Le président: Merci. Vous accordez une promotion à M. Migie, mais je suis persuadé qu'il préférerait qu'on parle de lui comme étant un sous-ministre.

M. Leon E. Benoit: Oh, non. Je parlais en fait des deux.

• 1055

Le président: Monsieur Chrétien, vous avez sept minutes.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien: Je m'interrogeais sur quatre points. Avec l'intervention de M. Benoit, on en a élucidé un, soit l'inclusion. Mais avant de commencer à vous faire part de mes interrogations, j'aimerais obtenir une précision. Vous nous disiez plus tôt que vos organismes regroupaient 100 000 membres. C'est beaucoup, mais le même producteur pourrait-il être membre de trois, quatre ou cinq coopératives différentes, de sorte que ce chiffre de 100 000 pourrait se réduire à 40 000?

[Traduction]

Le président: Monsieur Chrétien, nous éprouvons quelques problèmes avec l'interprétation. Le système ne semble pas fonctionner.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien: Souhaiteriez-vous que je recommence, monsieur le président?

Le président: Oui.

M. Jean-Guy Chrétien: J'aimerais obtenir une précision sur le nombre de membres que comptent vos organismes. Au début de votre témoignage, vous avez dit que vos organismes comptaient 100 000 membres. C'est beaucoup. Avant d'aller plus loin, j'aimerais savoir si le même producteur céréalier pourrait être membre de quatre ou cinq coopératives différentes, de sorte que ce chiffre de 100 000 membres pourrait se réduire à 50 000 ou 60 000 producteurs céréaliers différents.

[Traduction]

M. Brian Saunderson: Je crois que le chiffre de 100 000 correspond au nombre total de membres des syndicats du blé du Manitoba, de l'Alberta et de la Saskatchewan. Il ne correspond donc pas au chiffre que nous avons pour chacun d'entre eux séparément, car rien n'empêche un agriculteur qui habite près de la frontière d'une autre province d'être membre du syndicat des deux provinces. Il n'y a aucune restriction à cet égard.

Mme Patty Townsend: Pardonnez-moi, mais je veux simplement souligner que ces chiffres correspondent au nombre de membres actifs. Le nombre de personnes qui détiennent des actions est beaucoup plus élevé. Comme les membres des syndicats sont calculés en fonction de leurs actions, le chevauchement ne devrait pas être trop important. Ce chiffre de 100 000 membres est plutôt conservateur.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien: Écoutez, je donne un exemple. Cela va faire sûrement plaisir à mon collègue, M. Coderre. Moi, je suis membre de six caisses populaires différentes. Donc, quand on dit qu'au Québec, il y a six millions de membres de caisses populaires, eh bien, il y a six fois Jean-Guy Chrétien. Je suis toujours le même, mais je ne peux participer aux six assemblées générales. J'espère que, si on prenait un vote global pour le mouvement Desjardins, je n'aurais droit qu'à un seul vote.

Donc, je me pose la question. Les 100 000 membres sont-ils 100 000 producteurs différents ou ne sont-ils que 60 000 ou 99 000? Madame me dit que cela pourrait arriver, mais pas systématiquement.

Aucun de vous trois n'a insisté, dans son mémoire et dans sa présentation, sur le mode d'élection. Un groupe qui est passé avant vous nous en suggérait justement trois pour le Manitoba, cinq pour la Saskatchewan et trois pour l'Alberta, alors que vous n'avez pas fait de suggestion sur ceux qui devraient avoir le droit de vote. Pourriez-vous prendre seulement une minute pour répondre, parce que j'aurai d'autres questions par la suite?

[Traduction]

M. Marvin Shauf: Nous sommes d'avis que les producteurs de grains affiliés à la Commission canadienne du blé—les détenteurs de permis—devraient avoir un droit de vote et que les votes devraient être répartis en fonction du volume de production et du nombre de producteurs.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien: Vous aussi, vous y allez avec la production. Donc, quelqu'un qui produit 100 fois plus qu'un autre aurait 100 fois plus de bulletins de vote en poche, un peu comme dans le cas des actions à la bourse.

• 1100

[Traduction]

M. Marvin Shauf: Non, nous ne proposerions pas une pondération des votes sauf s'il y a davantage de producteurs qui peuvent voter dans des secteurs de production plus importants. Ce que nous suggérons, c'est que seulement les détenteurs de permis puissent voter et que leur vote ait autant de poids que tous les autres.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien: On appliquerait donc le principe qu'on utilise dans les coopératives, soit une personne, un vote.

[Traduction]

M. Marvin Shauf: C'est exact.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien: Vous avez suggéré un amendement afin que le président-directeur général soit nommé par le conseil d'administration et ne fasse pas partie du conseil d'administration. Donc, ce serait une seizième personne. Est-ce bien ce que vous souhaitez comme amendement au projet de loi C-4?

[Traduction]

M. Marvin Shauf: Nous suggérons que le premier dirigeant, ou président, de la Commission ne soit pas membre du conseil d'administration. Nous privilégions un conseil d'administration de 15 membres, mais le premier dirigeant, ou président, n'en ferait pas partie et serait plutôt un employé.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien: À ce moment-là, réduirait-on cela à 13 ou si on l'augmenterait à 17? Le président et le président-directeur général vont participer aux réunions, bien sûr. Y aurait-il 15 membres du CA plus les deux qui n'en font pas partie?

[Traduction]

M. Marvin Shauf: Non, le conseil d'administration compterait au total 15 membres, dont le président du conseil. Le premier dirigeant, ou président, de la Commission serait un employé embauché pour gérer les activités de la Commission canadienne du blé. Il assisterait aux réunions du conseil d'administration mais n'en serait pas membre. Il serait chargé par le conseil d'administration de gérer la Commission. C'est de cette façon que les trois syndicats du blé des Prairies fonctionnent.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien: Ma dernière question portera sur les paiements comptants. Je suis content que vous soyez le premier groupe. C'est vrai que ce matin, c'est la première séance complète que nous tenons avec des témoins sur le projet de loi C-4, et les deux premiers groupes n'étaient pas tellement favorables à l'idée de ce projet de loi. Je constate que dans votre mémoire, vous nous faites plusieurs suggestions, mais que vous épousez les idées principales du projet de loi C-4.

Entre autres, vous vous prononcez contre le paiement comptant. Personnellement, si j'étais producteur céréalier, j'aimerais bien être payé comptant. Vous n'êtes pas tellement d'accord et j'ai vu les raisons qui vous poussent à ne pas être d'accord sur le paiement comptant. Je pense à mes collègues du Québec qui produisent du sirop d'érable et qui aiment bien avoir un versement comptant dès la livraison, peut-être pas à 100 p. 100, mais à plus de 60 p. 100.

Pourriez-vous me vulgariser rapidement votre opposition au paiement comptant?

[Traduction]

M. Brian Saunderson: Tout comme les producteurs de sirop d'érable dont vous avez parlé, nos producteurs reçoivent un paiement initial qui peut probablement être supérieur à 60 p. 100 du revenu net réalisé avant la fin de la période de mise en commun. C'est donc une comparaison, comme vous l'avez suggéré.

Je tiens à vous donner une petite précision au sujet des risques liés selon nous aux achats au comptant. Lorsque ce mécanisme a été demandé, il visait à permettre à la Commission canadienne du blé d'obtenir de nouveaux stocks de grain lorsqu'elle en manquait. Il s'agissait donc d'une solution prévoyant un paiement comptant. Le prix versé pour ces grains devait nécessairement être plus élevé quel le prix initial ou le prix initial rectifié.

Nous craignons donc que certains producteurs, pour bénéficier d'un prix plus élevé, retiennent leurs produits afin d'inciter la Commission à recourir à cette solution. De cette façon, un volume plus faible de grains serait assujetti au système de contrats de la Commission et, par le fait même, au système de mise en commun. Si celui-ci dispose d'un volume moindre de grains, la mise en commun pourrait être compromise, car les recettes seraient moins élevées.

• 1105

Le président: Merci beaucoup.

Nous passons maintenant à M. Calder.

M. Murray Calder: Merci beaucoup, monsieur le président.

J'aimerais revenir à la page 8 de votre mémoire, où il est question de la disposition d'inclusion. Comme je l'ai déjà dit aux autres témoins, cette disposition établit un certain équilibre. Si une disposition permet de soustraire un produit et qu'on veut inclure celui-ci de nouveau, comment pourrait-on y parvenir sans disposition d'inclusion?

Vous recommandez un amendement à l'article 47.1 proposé, qui était autrefois l'article 26, et, pour être franc, le libellé proposé me plaît bien. Il permet de préciser certaines choses et de répondre à deux questions que j'ai posées plus tôt cette semaine.

En premier lieu, qui représente un groupe de producteurs? Comment cela peut-il être déterminé? Qui représente les producteurs canadiens de canola? L'un des témoins précédents a posé la question suivante: s'il faut rallier 37 p. 100 des producteurs pour soustraire un produit, cela signifie-t-il qu'il faut aussi en rallier 37 p. 100 pour l'inclure à nouveau? Quel pourcentage correspondrait à la majorité de ce groupe de producteurs? J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

M. Marvin Shauf: Nous avons pour politique de laisser les producteurs décider de la façon dont leurs produits seront commercialisés. Il est difficile de savoir exactement le pourcentage de personnes qui seraient en mesure de prendre ce genre de décision. Il me semble que lorsque 50 p. 100 des gens en cause veulent que leurs grains soient commercialisés dans le cadre d'un tel système, ils constituent la majorité. Il serait très difficile d'exiger une majorité des deux tiers.

Je ne vais pas tenter d'être plus précis aujourd'hui, parce que, selon nous, une majorité de producteurs devrait être en mesure de choisir son propre système de commercialisation.

Mme Patty Townsend: Nous avons débattu longuement du libellé de la disposition d'inclusion, parce qu'il est très difficile pour le ministre, ou pour quiconque d'ailleurs, de déterminer quel est l'organisme qui représente vraiment la majorité des producteurs.

L'ajout du mot «principal»—il vous faut démontrer que vous êtes le principal organisme—nous a permis d'aller aussi loin que nous le pouvions parce qu'un très grand nombre d'agriculteurs n'appartiennent à aucun organisme. Si les producteurs de canola ne représentent que 40 p. 100 des producteurs, ils font toutefois partie du seul organisme qui représente la plupart des producteurs de canola.

Il aurait été très difficile de préciser un pourcentage et je ne crois pas que le ministre ou le gouvernement aurait voulu être lié par un pourcentage des membres d'un organisme demandant l'inclusion d'un produit.

M. Murray Calder: Très bien.

Le président: Êtes-vous en faveur de la disposition d'inclusion?

M. Marvin Shauf: Nous ne nous y opposons pas, parce qu'elle prévoit un mécanisme qui permettrait aux producteurs de dire si oui ou non leurs produits doivent être ajoutés à l'organe de commercialisation qu'est la Commission canadienne du blé.

Le président: Vous appuyez donc la disposition d'inclusion.

Mme Patty Townsend: Nous ne nous y opposons pas.

M. Marvin Shauf: En effet, nous ne nous y opposons pas.

Des voix: Oh, oh!

M. Marvin Shauf: Nous appuyons le fait que les producteurs puissent choisir la façon de commercialiser leurs produits.

Le président: Très bien. Monsieur Proctor.

M. Dick Proctor: Merci beaucoup.

J'aurais trois brèves questions sur la structure de gestion. Pourriez-vous nous parler un peu de l'échelonnement des mandats? Nous avons entendu le ministre Goodale à ce sujet plus tôt cette semaine. Votre organisme a-t-il une opinion à ce sujet?

M. Marvin Shauf: Nous l'avons mentionné plus tôt dans notre exposé. Nous avons suggéré qu'une moitié des administrateurs soient élus pour un mandat de deux ans et l'autre moitié, pour un mandat de trois ans afin que tous les mandats n'arrivent pas à échéance en même temps.

• 1110

M. Dick Proctor: Monsieur Goodale a dit qu'il serait peut-être possible d'avoir des mandats d'un an. Cela ne m'a pas semblé raisonnable, et je suis donc heureux de vous entendre dire—je présume que c'est pour la même raison que moi—qu'une année ne suffit pas pour faire quelque chose. Il faudrait donc des mandats plus longs.

Monsieur Saunderson, dans votre mémoire, vous avez parlé du fonds de réserve et précisé que ce mécanisme serait plus efficace que l'injection d'un montant unique. Avez-vous une idée de la somme qui serait nécessaire pour avoir un fonds de réserve acceptable?

M. Brian Saunderson: Si je ne m'abuse, nous avons commencé par indiquer que, d'après nous, le fonds de réserve n'était pas nécessaire, mais que si le gouvernement insistait pour en avoir un, il devrait injecter un seul montant puisé à même le Trésor.

Ce montant devrait être fixé selon les objectifs du fonds de réserve. Nous nous opposons aux achats au comptant ainsi qu'à la suppression de la garantie des ajustements, et c'est à cela qu'est censé servir le fonds de réserve. Il m'est donc difficile de répondre à cette question.

M. Dick Proctor: Les deux groupes que nous avons entendus ce matin se sont vivement prononcés en faveur du principe de l'adhésion volontaire au guichet unique. D'après vous, la Commission pourrait-elle survivre si l'on appliquait ce principe? Je sais que la vente à guichet unique constitue actuellement l'un des piliers du système de commercialisation du blé et de l'orge. La Commission pourrait-elle survivre si elle empruntait la voie de l'adhésion volontaire?

M. Brian Saunderson: Notre opinion—du moins la mienne—, c'est qu'un double marché entraînerait la perte de la Commission. Ainsi, les sociétés céréalières feraient souvent concurrence à la Commission pour acheter des stocks. Mais, comme Marvin l'a signalé plus simplement, les agriculteurs favoriseront certainement un marché ouvert lorsque les prix seront à la hausse et une mise en commun lorsque les prix seront à la baisse. D'après nous, il faut choisir l'un ou l'autre.

M. Dick Proctor: Très bien.

M. Brian Saunderson: Je pourrais peut-être ajouter quelque chose au sujet du fonds de réserve. Nous avons signalé que les agriculteurs en avaient assez de contribuer et de voir le gouvernement appliquer le principe de l'utilisateur-payeur à partir de leurs résultats financiers, lesquels, soit dit en passant, sont moins bons cette année. Que cet argent provienne d'un fonds de réserve construit à même les contributions des agriculteurs, de la mise en commun des paiements finals aux producteurs ou des recettes réalisées sur le marché financier, il sort toujours des poches des producteurs.

M. Dick Proctor: Ainsi, ce fonds de réserve ne constituerait qu'une de ces contributions supplémentaires...

M. Brian Saunderson: Oui.

M. Dick Proctor: ... qui déplaisent tant aux agriculteurs. Je suis d'accord.

Merci.

Le président: Monsieur Borotsik.

M. Rick Borotsik: Merci, monsieur le président.

Si je ne m'abuse, monsieur Shauf, votre organisme appuie complètement le principe de la vente à guichet unique actuellement appliqué par la Commission canadienne du blé. De cette façon, les syndicats du blé des Prairies et d'ailleurs ressemblent davantage à un système de libre entreprise.

Nous parlons de la diversification du syndicat du blé de la Saskatchewan, des parcs d'engraissement, du commerce de détail, de la transformation. En fait, si je ne me trompe pas, les syndicats s'intéressent beaucoup aux usines de trituration d'oléagineux. Êtes-vous donc d'avis que le canola devrait être ajouté à la liste des produits faisant l'objet d'une vente à guichet unique?

M. Marvin Shauf: Seulement si les producteurs de...

M. Rick Borotsik: Votre organisme est-il d'avis que le canola devrait être un produit visé par la vente à guichet unique?

M. Marvin Shauf: Non, ce n'est pas le cas. Notre politique...

M. Rick Borotsik: Si vous êtes autant en faveur de la vente à guichet unique dans le cas du blé, pourquoi ne l'êtes-vous pas pour le canola?

M. Marvin Shauf: Le blé et le canola ont des marchés très différents l'un de l'autre.

Mme Patty Townsend: Monsieur Borotsik, il est vraiment important de signaler que les syndicats du blé suivent les instructions que leur donnent les agriculteurs par l'entremise de délégués, lors de réunions de comité ou sur leur lieu de travail, et les agriculteurs confirment qu'ils sont en faveur de la vente à guichet unique...

M. Rick Borotsik: Je suis désolé, madame Townsend, mais on ne m'a pas alloué beaucoup de temps. J'aimerais bien passer à ma prochaine question.

Si je comprends bien, vous ne voulez pas que le canola soit vendu par le biais d'un guichet unique?

Mme Patty Townsend: À moins que les agriculteurs le demandent.

M. Marvin Shauf: Si c'est ce que veulent les agriculteurs, nous les appuierons.

M. Rick Borotsik: Je vois. Nous avons déjà entendu ça.

M. Murray Calder: C'est une réponse légitime. Elle ne va peut-être pas dans le sens où vous le voudriez.

M. Rick Borotsik: Non, non, elle correspond exactement à ce que j'avais prévu. Merci, monsieur Calder. Cela ne fait aucun doute.

Il est évident que vous n'appuierez pas le principe du guichet unique pour le canola à moins que les producteurs signalent que c'est ce qu'ils veulent.

Votre organisme croit-il que ce principe pourrait être avantageux pour les usines de trituration d'oléagineux? Ne parlons plus des agriculteurs et des producteurs. Votre organisme est-il d'avis que la vente à guichet unique pourrait être avantageuse pour ces fabricants d'huile? Préféreriez-vous acheter uniquement par l'entremise de la Commission?

• 1115

M. Marvin Shauf: Il m'est difficile de répondre à cette question, parce que nous n'avons pas connu cette situation. Je peux toutefois établir un parallèle avec les entreprises qui s'approvisionnent auprès de la Commission canadienne du blé. Elles sont très heureuses d'acheter leurs produits de la Commission, parce que celle-ci leur offre deux avantages très importants, à savoir la stabilité de l'approvisionnement et une qualité constante.

M. Rick Borotsik: Je conclus de ce que vous dites que les fabricants d'huile préféreraient la vente à guichet unique.

M. Marvin Shauf: Comme je l'ai déjà dit, le canola est un produit très différent qui a un marché également très différent. Alors, sans renseignement supplémentaire, je ne crois pas que c'est ce que je vous répondrais.

M. Rick Borotsik: Très bien.

Vous n'êtes pas tellement en faveur du fonds de réserve. Celui-ci peut être constitué à n'importe quel niveau maintenant. Selon vous, prévoit-on que ce fonds servira un jour à garantir les paiements initiaux. Je parle d'un avenir pas très rapproché.

M. Brian Saunderson: Cette possibilité existe certainement, surtout si ce fonds atteint une somme importante. Le ministre des Finances l'envisagerait sûrement de cette façon.

M. Rick Borotsik: Croyez-vous que cela est susceptible de se produire?

M. Brian Saunderson: Tout à fait.

M. Rick Borotsik: Croyez-vous que c'est ce que cache ce projet de loi?

M. Brian Saunderson: Oui. La suppression de la garantie des ajustements, qui, nous l'avons déjà souligné, présente vraiment très peu de risques, n'est qu'un pas vers la suppression de la garantie du paiement initial. Comme nous l'avons dit, il s'agit là d'un des piliers de la Commission canadienne du blé.

M. Rick Borotsik: J'en suis à ma dernière question. À l'heure actuelle, l'adhésion à une coopérative, qu'il s'agisse des syndicats du blé du Manitoba, de la Saskatchewan ou de l'Alberta, est-elle volontaire?

M. Brian Saunderson: Tout à fait.

M. Rick Borotsik: Vous pouvez devenir membre, mais vous n'y êtes pas obligé. Lorsque vous adhérez à un de ces syndicats, pouvez-vous continuer à vendre vos produits à d'autres entreprises du secteur privé?

M. Marvin Shauf: Oui.

M. Brian Saunderson: Tout à fait.

M. Rick Borotsik: L'adhésion n'est donc pas obligatoire. Vous n'êtes donc pas obligés de vendre vos produits au syndicat du blé du Manitoba?

M. Brian Saunderson: Non.

M. Marvin Shauf: Mais on ne peut faire de comparaison avec...

M. Rick Borotsik: C'était seulement une question.

M. Marvin Shauf: On ne peut faire de comparaison avec les activités de la Commission.

M. Rick Borotsik: Mais l'adhésion n'est pas obligatoire.

Le président: Madame Ur.

Mme Rose-Marie Ur: Merci, monsieur le président.

J'aimerais tout d'abord vous féliciter pour le mémoire que vous avez présenté. Il est facile à lire et j'aime les documents où les idées sont bien exprimées.

Dans votre exposé, vous avez indiqué que les nouvelles dispositions législatives ne prévoyaient pas une reddition de comptes à l'égard des agriculteurs. Je crois que c'est ce que vous avez dit. Si je ne m'abuse, dix des administrateurs élus seront des agriculteurs et ils auront accès à tous les renseignements sur les activités de la Commission. Ils auront accès à absolument tous ces renseignements. Les administrateurs élus par les producteurs feront partie d'un comité de vérification, chargé de superviser les vérifications internes, et ils pourront demander tous les renseignements souhaités sur les activités de la Commission. Ces administrateurs seront les yeux et les oreilles des producteurs de grain de l'Ouest canadien.

N'êtes-vous pas d'avis que cette solution est très favorable aux céréaliculteurs de l'Ouest et assure une bonne reddition de comptes?

M. Brian Saunderson: Nous voulions souligner qu'aucun mécanisme n'a été prévu pour que les agriculteurs élus au conseil d'administration rendent des comptes aux personnes qui les ont élus. Ils ne sont par exemple même pas tenus de présenter un rapport annuel à leurs membres. C'est ce lien avec la base qui manque dans le projet de loi.

Mme Rose-Marie Ur: Vous n'êtes pas d'accord avec un mandat d'un an. Comme je sais que certains d'entre vous n'étiez pas ici lorsque le ministre a comparu l'autre jour, je vous signale qu'il a également suggéré que cinq administrateurs soient nommés pour deux ans et cinq, pour quatre ans. Il n'a donc pas uniquement parlé de quatre mandats de trois ans, trois de deux ans et trois d'un an. Nous avons donc différentes options à examiner en ce qui concerne la durée des mandats.

Je tenais à faire une remarque. La disposition d'inclusion que vous recommandez d'ajouter au projet de loi C-4 est vraiment appréciée. Elle rétablit un certain équilibre. Si l'on peut soustraire certains produits... Tant de choses au gouvernement—et je fais partie du gouvernement—semblent être mal équilibrées. Je pense que cette disposition stabilise la situation pour nos agriculteurs. En limitant les demandes au principal organisme, nous éviterons que tout un chacun demande qu'on rajoute son produit. Cette disposition précise les grandes lignes en ce qui a trait aux personnes qui pourront présenter une demande et à quel titre.

Merci.

• 1120

Le président: Monsieur Hill, vous avez cinq minutes.

M. Jay Hill: Merci, monsieur le président.

J'aimerais dissiper le malentendu qui semble exister au sujet de la reddition de comptes, parce que le gouvernement affirme que ce nouveau conseil d'administration sera entièrement comptable envers les agriculteurs qui l'élisent. Je me reporte à l'article 3.9 du projet de loi:

    Le président exerce ses fonctions à titre amovible pour la durée que fixe le gouverneur en conseil.

Je passe maintenant au paragraphe 3.11(1):

    Le président est le premier dirigeant de la Commission...

Autrement dit, on parle de la même personne. Voyons donc maintenant le paragraphe 3.11(2):

    En cas d'absence ou d'empêchement du président ou de vacance de son poste, le ministre peut désigner un intérimaire...

Si vous examinez les dispositions proposées, il apparaît clairement que c'est le ministre et le Cabinet, donc le gouvernement, qui exercent un pouvoir ultime sur le président ou premier dirigeant. Je tenais à cette précision depuis que j'ai entendu certains exposés de témoins qui ont comparu devant le comité ainsi que les références de M. Easter à ces articles.

J'aimerais revenir à ce qu'a dit M. Benoit plus tôt. Avez-vous déjà procédé à un vote pour savoir si la majorité de vos membres étaient toujours en faveur de l'adhésion obligatoire à la Commission canadienne du blé? Oui ou non?

Mme Patty Townsend: Presque chaque année, lors de l'assemblée annuelle, les syndicats du blé discutent de la vente à guichet unique et de leur appui à la Commission canadienne du blé. Je suis persuadée qu'on peut dire que les membres confirment leur appui à cet égard presque à chaque assemblée annuelle.

M. Jay Hill: Autrement dit, les délégués qui assistent à ces réunions, qui votent au nom des membres qu'ils représentent et qui leur rendent des comptes se prononcent toujours en faveur de la vente à guichet unique et c'est pour cette raison que vous continuez à appliquer ce principe?

M. Marvin Shauf: Ce principe est appuyé par nos délégués, et l'adhésion obligatoire constitue l'un des éléments essentiels qui contribuent au succès de ce mécanisme.

M. Jay Hill: Si je ne me trompe pas, l'adhésion à la Commission canadienne du blé était à l'origine volontaire. Est-ce exact? Est-ce que ce sont les producteurs qui ont demandé que cette situation change? Selon vous, les producteurs ont-ils demandé que l'adhésion devienne obligatoire ou est-ce le gouvernement qui a pris des mesures en ce sens durant la Deuxième Guerre mondiale dans l'intérêt national?

M. Marvin Shauf: Si je ne m'abuse, ce sont les producteurs qui en ont fait la demande.

M. Jay Hill: Ce n'est pas ce que j'avais compris, mais j'apprécie votre réponse et elle a été versée au compte rendu.

Vos commentaires sur le mode d'élection et sur votre opposition à un système de vote pondéré m'ont bien intéressé. Cette question me préoccupait énormément, malgré l'intervention du ministre l'hiver dernier. Un agriculteur amateur qui produit 100 acres d'orge et qui détient un permis peut annuler le vote de l'exploitant d'une ferme familiale. Dans mon cas, nous avions un permis pour notre société qui comprenait mon frère, mon père et moi. Nous exploitions 3 000 acres dans la région de Peace River en Colombie-Britannique. Un agriculteur amateur pourrait annuler notre vote même si ce projet de loi et les décisions de ce conseil d'administration avaient très peu d'incidence sur son gagne-pain.

En tant que représentant de vos membres, est-ce là votre position officielle?

M. Marvin Shauf: Oui. Nous vivons dans un pays démocratique, ce qui devrait être très important pour un certain nombre de personnes assises autour de cette table. Il me semble que s'il y a une pondération des votes, on pourrait faire une comparaison et exiger qu'une personne dont le salaire annuel est de 100 000 $ dispose de cinq votes alors qu'une autre dont le salaire est de 20 000 $ en ait un seul. Si nous commençons à pondérer le vote de cette façon, nous risquons de nous trouver dans un pays où il ne ferait plus très bon vivre.

M. Jay Hill: Sauf votre respect, je considère qu'il s'agit là d'une comparaison plutôt ridicule.

M. Murray Calder: Pas du tout, c'est la politique du Parti réformiste. Celle-là est ridicule.

Le président: À l'ordre.

M. Marvin Shauf: J'aimerais savoir ce qui est ridicule...

M. Jay Hill: Dans votre comparaison?

M. Marvin Shauf: Oui.

M. Jay Hill: Toutes sortes de raisons peuvent justifier le principe «Une âme, une voix» lorsqu'il s'agit d'élire un député. Les Canadiens n'élisent pas le dirigeant d'une société qui oblige les producteurs à y adhérer et à y vendre leurs produits, ce que vous avez vous-même précisé, et qui constitue la seule façon de vendre ces produits. C'est pour cette raison que j'ai fait cette déclaration. Je ne crois pas qu'il soit exact ou juste de comparer cette élection à l'élection d'un député.

• 1125

Le président: Si vous voulez faire une comparaison, je sais qu'on a déjà exigé par le passé qu'un électeur soit propriétaire, mais cette exigence a été éliminée il y a de nombreuses années. Pour voter à la Chambre haute, vous deviez être propriétaire...

M. Leon E. Benoit: Nous parlons ici d'une entreprise, d'une structure corporative.

Le président: ... mais cette exigence n'existait pas pour la Chambre basse.

Mais nous nous écartons du sujet.

M. Jay Hill: Tout à fait. Nous parlons d'une structure corporative. Les gros agriculteurs et les personnes qui détiennent plus d'actions sont davantage intéressés.

[Français]

Le président: Monsieur Coderre.

M. Denis Coderre (Bourassa, Lib.): Je ne continuerai pas dans la foulée totalitaire de mon collègue réformiste. J'aimerais vous parler de démocratie.

On sait que dans 83 p. 100 des firmes canadiennes, les présidents font partie du conseil de direction. Il y a deux éléments que j'aimerais comprendre.

Dans un premier temps, étant donné que le gouvernement canadien a un rôle extrêmement important à jouer en termes de garanties financières pour la Commission canadienne du blé, pourquoi, dans un contexte de partnership ou de collégialité, ne serait-il pas correct que le gouvernement canadien procède à la nomination de ce président?

Deuxièmement, je vous ai dit que dans 83 p. 100 des firmes canadiennes, le président faisait partie du conseil d'administration. Pourquoi, selon vous, le président ne doit-il pas faire partie du conseil de direction étant donné que, de toute façon, ce conseil est déjà mené aux deux tiers par les producteurs ou les fermiers?

[Traduction]

M. Marvin Shauf: Je pense que c'est surtout une question de reddition de comptes. À qui le premier dirigeant doit-il rendre des comptes? L'un des buts déclarés de ce projet de loi est d'améliorer la reddition de comptes à l'égard des producteurs. Le premier dirigeant se retrouverait dans une position très difficile s'il relevait d'un conseil d'administration tout en devant rendre des comptes au gouvernement. Pour maximiser la responsabilisation, il serait préférable que le premier dirigeant, ou président, exerce ses fonctions à titre amovible et rende des comptes au conseil d'administration.

[Français]

M. Denis Coderre: Cependant, on doit faire une sorte d'équilibre. Nous sommes tenus de rendre des comptes aux contribuables mais, d'autre part, deux tiers des administrateurs sont des agriculteurs et des producteurs. Nous parlons donc de collégialité et de partenariat. Ne pensez-vous pas que nous devons également rendre des comptes aux contribuables et que c'est pour cette raison que le premier dirigeant, ou président, devrait être nommé par le gouvernement?

M. Marvin Shauf: En nommant un tiers des administrateurs du conseil, le gouvernement détient une influence importante au sein du conseil d'administration. Je crois que cela est suffisant pour les responsabilités qu'assume le gouvernement.

Mme Patty Townsend: L'article 19 du projet de loi précise que la Commission doit présenter annuellement un plan d'entreprise qui doit être approuvé par le gouvernement, tout comme ses emprunts. Même si le plan est approuvé par le gouvernement, la Commission ne peut contracter des emprunts sans son approbation. Nous croyons donc que la responsabilité à l'égard du contribuable est garantie parce qu'elle est inscrite dans le projet de loi. C'est pour cette raison que nous tentons d'améliorer la responsabilisation envers les agriculteurs.

Le président: Merci. Je remercie les trois personnes qui sont ici aujourd'hui. Vos commentaires ont été très utiles et nous en tiendrons dûment compte.

Chers collègues, j'ai une information à vous transmettre. Une délégation ukrainienne sera à Ottawa le mercredi 19 novembre et elle a exprimé le désir de nous rencontrer. Nous pourrons vous donner d'autres détails à ce sujet un peu plus tard.

M. Jay Hill: Monsieur le président, j'invoque le Règlement. En ce qui concerne le point soulevé plus tôt par mon honorable collègue concernant le temps alloué pour les questions, je ne voulais pas qu'on ait l'impression que tous les membres du comité étaient d'accord avec le nombre de témoins convoqués ou avec le fait qu'ils ne disposent que de 45 minutes, y compris le temps alloué pour les questions et les réponses. Si je ne m'abuse, ces décisions n'ont été prises que par le comité directeur ou par le sous-comité et n'ont jamais fait l'objet de discussions devant le comité en entier. Je voulais soulever ce point. Nous n'avons jamais discuté du temps que nous devrions accorder aux témoins pour présenter leurs points de vue ni du nombre de témoins que nous pouvons entendre. Cela n'a jamais été fait devant le comité au complet et je tiens à le souligner.

• 1130

Merci.

Le président: Merci.

En ce qui concerne les témoins, je suis à votre disposition. Si vous voulez que les réunions durent plus longtemps, on peut certainement le faire. Le comité doit toutefois m'en faire part pour que je puisse prendre les dispositions nécessaires. D'ici là, nous continuerons de prévoir deux heures ou deux heures et demie pour les réunions de comité.

M. Jay Hill: Monsieur le président, je veux qu'on sache que c'était et c'est encore ma position. Je suis plus que prêt à siéger aussi longtemps et aussi souvent que cela sera nécessaire pour que nous puissions entendre les témoins qui souhaitent comparaître afin de faire connaître leurs points de vue sur cette importante mesure législative très controversée, parce que certaines dispositions du projet de loi C-4 ne figuraient pas dans le projet de loi précédent, le C-72. C'est ma position depuis le début et je veux qu'on le sache.

Merci.

Le président: Très bien. Je crois que la greffière a distribué le calendrier des réunions avec la liste des témoins. Vous pourrez consulter ce calendrier au cours de la fin de semaine et me faire part de vos suggestions mardi prochain.

La séance est levée jusqu'à mardi matin.