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AGRI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON AGRICULTURE AND AGRI-FOOD

COMITÉ PERMANENT DE L'AGRICULTURE ET DE L'AGROALIMENTAIRE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 11 mars 1998

• 1458

[Traduction]

Le sénateur Eugene Whelan (ouest de l'Ontario, Lib.): Encore combien de membres attendez-vous?

Le président (M. Joe McGuire (Egmont, Lib.)): Allez-y.

Le sénateur Eugene Whelan: Bon. Vous me remplacerez quand je m'en irai?

Le président: Ça va.

Le sénateur Eugene Whelan: Parce que je dois me rendre à un autre... contrairement à ce que l'on pourrait penser, les sénateurs travaillent; ils ne passent pas tout leur temps au Mexique.

Le président: Du moins pas celui-ci.

Le sénateur Eugene Whelan: Quoi qu'il en soit, je dois me rendre à une réunion intéressante cet après-midi. Il s'agit d'une réunion du Comité des affaires étrangères où nous devons entendre le vice-président de la Banque Canadienne Impériale de Commerce, le vice-président de la Banque Royale et le vice-président de la Banque de Montréal qui doivent venir nous expliquer ce qui s'est passé en Asie du Sud, avec l'APEC. L'an dernier, ils nous ont conté monts et merveilles, et nous avons déposé un rapport enthousiaste sur toutes les possibilités qu'offrait l'APEC. Nous avons eu tort. Vous vous souvenez de ce qui s'est passé depuis dans les pays du Pacifique.

• 1510

Je vous présente Murray Calder qui est agriculteur et député d'une des régions lointaines de l'Ontario. Il habite à Holstein, qui n'est rien de plus qu'un carrefour. Il est aviculteur, et il réussit très bien. Si votre femme était ici, elle dirait probablement que vous êtes un ancien aviculteur et qu'elle est avicultrice.

M. Murray Calder (Dufferin—Peel—Wellington—Grey, Lib.): Elle est avicultrice. C'est exact. Moi je suis pensionnaire maintenant.

Le sénateur Eugene Whelan: Quoi qu'il en soit, vous vouliez savoir ce que fait le Comité sénatorial de l'agriculture.

Tout d'abord, permettez-moi de vous souhaiter la bienvenue dans cet édifice. C'est le plus ancien sur la Colline et sa construction avait causé un scandale. Sir John A. Macdonald a failli perdre la majorité à cause de cet édifice; en effet, sa construction devait coûter 600 000 $ et elle en a coûté 1,2 million de dollars, soit le double. Il a failli perdre la majorité à cause de l'énorme dépense que cela représentait en 1851, sauf erreur. Mais vous comprenez qu'avec ce qui se passait dans sa vie à ce moment-là, cet édifice...

La pièce qui se trouve juste en dessous de celle-ci était aussi une salle de comité. C'est là qu'a eu lieu la réunion du Groupe des Sept, je ne sais plus quand, mais rien n'a changé depuis. C'est ici que se trouve le bureau du Conseil privé, comme à l'époque de Sir John A. Macdonald. Les bureaux sont situés au deuxième étage, juste au-delà du coude que fait le couloir. Le bureau de Sir John A. Macdonald est intact, ainsi que celui de Cartier, Georges Étienne Cartier, et ceux du premier gouverneur général, qui sont juste un peu plus loin, et qui n'ont pas été touchés.

Cet édifice, comment dire—avant que Murray ne dise quelque chose—est réservé aux antiquités. Mais quand je regarde ces édifices, je ne comprends pas qu'on puisse rester indifférent devant l'imagination dont ont fait preuve les Pères de la Confédération et tous ceux qui ont édifié la nation, voici 150 ans. Ils ont su imaginer pour ce pays, qui fait maintenant l'envie du monde entier, un grand avenir. Selon une étude des Nations unies, 91 p. 100 des personnes ont dit qu'elles vivraient au Canada si elles le pouvaient, à cause de la qualité de vie que nous y avons.

En ce qui concerne la différence des rôles entre la Chambre des communes et le Sénat, il y a tout d'abord le fait, bien sûr, que le Sénat n'est pas élu. Il est à la fois à l'image de la Chambre des Lords en Angleterre, et à la fois différent.

Le Sénat reçoit les lois qui ont été adoptées à la Chambre et il y réfléchit mûrement.

Tout d'abord, je dois signaler que les sénateurs ne sont pas nommés à vie, mais bien jusqu'à l'âge de 75 ans.

On vient d'en nommer trois. L'un vient de l'Île-du-Prince-Édouard. Certains d'entre vous le connaissent peut-être. Je l'ai rencontré il y a des années lorsqu'il était très actif au sein de la Fédération canadienne de l'agriculture. Comme il a à peu près mon âge, il ne restera pas au Sénat très longtemps. Il a 72 ans, sauf erreur, et il y restera donc trois ans. Mais il a énormément d'expérience. Il était dans l'aviation pendant la guerre, comme pilote, et il a fait toutes sortes de choses.

Et puis il y a Ross Fitzpatrick, qui est un homme d'affaires à qui tout réussit. Il vient de la Colombie-Britannique. Je le connais depuis 1963. À l'époque, il était assistant spécial auprès du ministre de l'Immigration, sauf erreur, Jack Nicholson, qui était aussi de la Colombie-Britannique. Ross Fitzpatrick a fait une brillante carrière dans les affaires.

Et puis il y a Mme Cook, de Terre-Neuve, qui est âgée de 65 ans mais qui a énormément d'expérience.

Au Sénat il y a donc des gens de tous âges, de tous milieux, etc.

On m'avait offert un siège de sénateur en 1984, et je l'avais refusé. Je ne voulais pas être sénateur; je voulais faire quelque chose qui corresponde à mon expérience, à ma formation, qui m'avait permis d'apprendre tant de choses, même si certains en doutent. J'ai dit alors au premier ministre que j'étais intéressé à travailler dans le domaine de l'agriculture, et j'ai donc été nommé ambassadeur auprès de la Food and Agriculture Organization. Mais je n'y suis jamais allé. Joe Clark m'a retiré ma nomination trois mois plus tard, par souci d'économie; c'est du moins ce qu'il m'a dit à l'époque. Mais je ne suis jamais allé à la FAO.

J'ai terminé mon mandat comme président du Conseil mondial de l'alimentation, mais il a fallu que je leur signe un papier, pour qu'ils me permettent de terminer mon mandat à ce Conseil qui réunit les ministres de l'Agriculture du monde entier. Je devais promettre de ne pas engager de poursuites contre le gouvernement pour m'avoir retiré ma nomination d'ambassadeur. Alors, comment dire? C'était un drôle de point d'orgue à une carrière politique.

• 1515

Le Sénat siège pratiquement en parallèle à la Chambre des communes. Cette semaine il ne siège pas, mais ses comités se réunissent sur des questions comme celles que je viens de mentionner à propos des affaires étrangères.

Je suis membre de deux comités. Je suis membre du Comité des affaires étrangères et coprésident du Comité de l'agriculture. Celui-ci va probablement passer deux semaines dans l'ouest du pays sur le projet de loi C-4, qui modifie la Loi sur la Commission du blé. Nous tiendrons des audiences à Brandon, Winnipeg, Regina, Saskatoon, Calgary et Edmonton.

Cela fait partie de nos responsabilités. Nous devons revoir ce qu'a fait la Chambre des communes. J'ai été député pendant 22 ans et je dois dire que je voyais d'un assez mauvais oeil que ces sénateurs viennent mettre le nez dans ce que nous avions fait. Je ne sais pas si Murray Calder a le même sentiment ou non.

Le Sénat est censé réviser sobrement les lois. Il peut appeler des témoins, etc. Parfois, si le texte de loi ne prête pas à controverse, il n'en fait rien. Il ne fait presque rien. Nous entendons des témoins, le ministre, etc.

Le Sénat peut se constituer en comité plénier, comme il l'a fait avant Noël pour un projet de loi. Il a convoqué des témoins, comme le ministre des Finances, à comparaître devant le Sénat tout entier. Nous avons fait de même lors des amendements constitutionnels pour Terre-Neuve et le Québec. Les audiences ont eu lieu devant le comité plénier. Dans ce cas, le président quitte le fauteuil et les sénateurs nomment leur propre président, choisi parmi leurs membres.

Le Comité des affaires étrangères et le Comité de l'énergie abattent une tâche énorme, sans que personne ne s'en rende compte—je crois que je peux le dire ainsi—parce qu'ils ne sont pas élus. Un député, comme Murray Calder... Comme je l'ai dit, j'ai passé 22 ans à la Chambre des communes, mais j'avais occupé une charge publique pendant 16 ans avant d'y venir. On est toujours conscient des désirs des électeurs. Ils remettent en question ce que vous faites, vous devez toujours les tenir informés du mieux que vous pouvez, avec les moyens à votre disposition.

Vos journées et les miennes sont probablement un peu différentes de celles de certains sénateurs, mais pas tous. Certains, mieux connus, sont très occupés. Je reçois des lettres et des demandes en provenance du Canada tout entier, parce que les gens se souviennent de moi depuis l'époque où j'occupais une charge publique.

Je vous ai parlé plus tôt de la Colombie-Britannique; j'ai été secrétaire parlementaire auprès du ministre des Pêches et Forêts pendant deux ans. J'ai parcouru le pays d'est en ouest, allant partout où il y avait une scierie, une usine de pâtes et papiers, une frayère. J'ai ainsi vraiment pu connaître mon pays et mieux le comprendre.

Ensuite, en tant que ministre de l'Agriculture, il y a peu de recoins du Canada que je n'aie eu l'occasion de visiter. J'ai découvert un secret... Vous parliez de votre Programme canadien de leadership en agriculture. Et bien, beaucoup de ministres se refusaient à aller dans les petites localités, mais j'avais très vite découvert que dans chacune d'entre elles, il se trouvait quelqu'un qui travaillait pour l'agence de presse CP et qui était payé au pouce. Donc, si vous arriviez à Morden au Manitoba, ou à Neepewa, en Saskatchewan, ou ailleurs, le soir même ils envoyaient douze pouces à l'agence de presse. Le lendemain matin, vous aviez des chances de trouver un entrefilet d'un pouce en première page du Globe and Mail: Whelan a déclaré telle et telle chose à Come by Chance (Terre-Neuve), ou à Port Hardy (Île de Vancouver). Mais si vous alliez à Winnipeg ou à Toronto, personne ne faisait attention à vous.

Les communications, cela s'apprend par association, en participant à toutes sortes de choses, comme ce que vous faites aujourd'hui. Votre programme de leadership, le PCLA, Programme canadien de leadership en agriculture—je pense pouvoir dire que c'est ce que j'ai fait toute ma vie, depuis l'adolescence avec les coopératives, les caisses d'épargne, la Fédération canadienne de l'agriculture, et d'autres. De nos jours, on me qualifierait de militant. Nous n'avions pas la télévision. Nous avions tout juste la radio quand j'ai commencé. Il fallait communiquer directement avec les gens. Et cela reste un mode de communications très important.

• 1520

Une autre façon importante de communiquer, c'est de se faire reconnaître. Aujourd'hui je ne suis pas venu avec mon chapeau vert, mais comme vous le savez, j'ai reçu mon premier stetson vert à Swan River, au Manitoba, à l'occasion de l'inauguration d'une foire-exposition. Si vous avez regardé l'émission Country Canada l'autre jour, vous aurez pu voir qu'on y trouve un des meilleurs rodéos au pays.

On m'a donc offert un chapeau vert à l'occasion de cette inauguration et je leur ai demandé ce que cela représentait. Même si je suis un peu daltonien, Whelan reste un nom irlandais. Ils m'ont dit que le vert c'était la couleur de l'amour, l'espoir, la charité, la fertilité, la fécondité—toutes les choses de la vie. Et j'ai ajouté, «et c'est la couleur de l'argent et de l'Irlande».

J'ai porté ce chapeau partout dans le monde. Quand je sortais de l'avion, on ne craignait jamais de ne pas me reconnaître, car il ne pouvait y avoir qu'une seule personne sous ce chapeau-là. Certains ont même été dessus, mais...

Des voix: Oh, oh.

Le sénateur Eugene Whelan: Il y a tant de choses à dire sur notre merveilleux pays, sur le sens du leadership et de la démocratie. Je m'inquiète de voir que les gens ne participent pas suffisamment.

J'ai lu vos biographies dans la brochure et dans les publications qui nous ont été remises. Vos expériences et vos antécédents sont variés. Vous représentez une large tranche du pays, et c'est une bonne chose, mais c'est aussi important de bien connaître et comprendre le pays.

J'ai demandé plus tôt au sénateur Beaudoin s'il savait où se trouvait la Canard River, ou La Salle, ou encore Belle River, Emeryvile, Pointe-aux-Roches, Saint-Joachin, Paincourt. Et il m'a répondu, bien sûr, ils sont dans la belle province, au Québec. J'ai dit non, ils sont dans l'extrême sud-ouest de l'Ontario, dans le comté d'Essex, ville de Windsor. À Windsor, un tiers des rues ont des noms français. La rue principale de Windsor s'appelle avenue Ouellette.

Ce que je veux dire par là, c'est que si nous prenons des décisions qui touchent notre pays, nous devrions le connaître.

Comme je l'ai dit plus tôt, je suis allé partout dans le monde et je n'ai jamais vu un pays comme le nôtre. Je n'ai jamais vu un pays comme le nôtre. Ce qu'il y avait de plus beau dans tous les voyages que j'ai faits en tant que président du Conseil mondial de l'alimentation, quand j'ai visité tous les pays frappés par la famine, les pays les plus pauvres au monde, c'était le retour au Canada. J'étais tellement heureux de rentrer au Canada. Que l'atterrissage ait lieu à Terre-Neuve, à Vancouver, ou ailleurs, je savais que je venais d'arriver dans le meilleur pays du monde, ce pays qu'ont construit des gens venus du monde entier, qui l'ont créé ensemble. C'est un des rares pays au monde qui soit né sans bain de sang. Nous n'avons jamais versé une goutte de sang pour construire le Canada.

Baldwin et Lafontaine en 1839 ou 1841, lorsqu'ils travaillaient ensemble—et c'était bien avant la Confédération—savaient qu'ils voulaient un pays différent des États-Unis. Ils voulaient un régime parlementaire qui soit différent de celui des États-Unis. Ils voulaient un régime qui garantisse la liberté de religion et les droits culturels, et ainsi de suite. C'est ce qu'ils ont fait et, comme je l'ai dit, nous continuons leur oeuvre aujourd'hui.

J'ai largement dépassé mes dix minutes, mais quand je parle du pays que nous avons construit, je peux parler longtemps, car je suis tellement fier de ce que nous avons accompli.

Des questions? Attendez que je mette mon appareil auditif. Je ne m'écoute pas parler. J'ai grandi à la fin des années 20, début des années 30, alors que nous n'avions pas d'assurance-santé. C'est pourquoi je porte une prothèse auditive.

Oui, madame.

Mme Elspeth McLean-Wile (Programme canadien de leadership en agriculture): Monsieur Whelan, je m'appelle Elspeth McLean-Wile, et je viens de Nouvelle-Écosse.

Nous avons beaucoup appris sur le leadership et le leadership en agriculture. Pourriez-vous nous dire quelle est la chose la plus importante qu'il faut savoir sur le leadership en agriculture au Canada?

• 1525

Le sénateur Eugene Whelan: Ciel, je n'en sais rien! Je me souviens que le premier ministre Trudeau m'avait dit lorsque j'étais ministre de l'Agriculture: «L'agriculture est tellement complexe, je ne prétends pas y comprendre grand-chose. Je ne sais pas ce que vous faites ni comment vous le faites, mais continuez.» Il ne m'a jamais beaucoup dérangé à l'Agriculture.

Je crois qu'il faut comprendre l'agriculture même. Si les choses vont mal dans l'agriculture canadienne aujourd'hui... Quand je suis devenu ministre de l'Agriculture, tous les fonctionnaires de mon ministère étaient des fonctionnaires de l'agriculture. Ils ne venaient pas du ministère des Finances ou du Conseil du Trésor; ils avaient une formation axée sur l'agriculture.

Sydney Williams venait de l'Estrie, au Québec; il n'avait jamais travaillé ailleurs qu'à Agriculture Canada, depuis l'âge de 18 ans et il était allé à McGill ou Macdonald, sauf lorsqu'il est allé à l'étranger pendant quatre ans et demi durant la guerre. C'était un véritable ordinateur ambulant. L'agriculture le passionnait. C'était toute sa vie. Et ses sous-ministres adjoints étaient tous des économistes ou des scientifiques agricoles; c'était aussi le cas des directeurs. Je n'ai jamais rencontré personne qui n'aie pas eu une formation dans le domaine de l'agriculture.

Certains pensent qu'on peut prendre des décisions sur l'agriculture sans la connaître. C'est comme si demain j'allais à l'aéroport d'Ottawa et que, si le pilote ne se présente pas, je prenne les commandes de l'avion. Mais ne vous inquiétez pas, même si je sais piloter un Cessna, je ne me risquerais pas avec un de ces gros avions à réaction.

Mais certains pensent qu'il suffit de connaître la gestion pour gérer l'agriculture. Je crois qu'il faut aussi connaître l'agriculture—bien la connaître—pour apporter ce type de leadership. Ça ne s'apprend pas seulement dans les livres.

M. Patrick Van Haren (Programme canadien de leadership en agriculture): Bonjour, monsieur Whelan. Je m'appelle Patrick Van Haren et je viens de Ridgetown.

Vous avez une expérience énorme et variée. Il me semble que le leadership, cela veut aussi dire protéger, aider les gens à faire face à leurs craintes. Qu'est-ce que vous craignez le plus pour le Canada, dans le domaine de l'agriculture?

Le sénateur Eugene Whelan: Je pourrais vous citer Churchill: la plus grande peur c'est la peur elle-même.

Murray secoue la tête; je dois donc avoir fait erreur dans ma citation, mais je sais que quelqu'un a dit cela.

Je suis de près ce qui se passe en agriculture. Je lis à peu près trois revues spécialisées par semaine, qui viennent de l'est, de l'ouest et du centre du pays. Quand je lis ce qu'on y publie, je sais que c'est faux. Quand je regarde la télévision, je sais que c'est faux. Et pourtant notre société est censée être mieux informée.

Je crois que nous n'approfondissons pas suffisamment les choses, que nous ne les étudions pas d'assez près et que nous ne nous impliquons pas suffisamment. Nous nous laissons orienter par un clip de quinze secondes à la télévision, ou par quelques lignes dans un journal. En tant que sénateur, par exemple, je trouve qu'il me faudrait un employé juste pour contrer cela.

J'ai été votre ministre de l'Agriculture pendant un peu plus de onze ans. Il ne s'est pas passé un jour sans que je fasse la promotion de l'agriculture. On en parlait sans cesse. Nous l'avons gardée sur l'avant-scène. Le fait même que la télévision...

Les citadins sont préoccupés. Selon un sondage publié l'autre jour par notre journal local, ce qui inquiète le plus les gens au Canada aujourd'hui, par exemple, c'est la sécurité des aliments. C'était la grande priorité pour 82 p. 100 d'entre eux, car ils sont inquiets de ce qui se passe dans l'industrie alimentaire. Ils craignent d'être—comment dire?—déconnectés, trop loin de ce qui se passe dans l'agroalimentaire.

Je crois que c'est malheureusement aussi ce que vivent nos leaders de l'agriculture. J'ai le sentiment que l'industrie agricole se fait égoïste, mais ce n'est pas comme cela que nous avons réussi à la construire. Nous avons partagé, collaboré, et nous avons mis sur pied l'une des meilleures industries agricoles au monde, si l'on tient compte du climat de l'hémisphère Nord. Nous l'avons fait en travaillant ensemble.

• 1530

Les gens disent qu'il faut éliminer la réglementation, les contrôles, etc. Je ne suis pas du tout de cet avis.

M. Conrad Toner (Programme canadien de leadership en agriculture): Monsieur Whelan, c'est dommage que nous n'ayons pas plus de temps. Plus je vous entends parler, plus j'ai du plaisir à écouter. C'est vraiment un grand plaisir pour nous tous que de vous rencontrer à nouveau. Nos meilleurs voeux vous accompagnent. Merci beaucoup.

Le sénateur Eugene Whelan: Merci, vous êtes très aimable.

Je voulais simplement dire ceci. Je vois arriver toutes sortes de députés très compétents, mais il y a tellement de défis aujourd'hui dans l'agriculture, avec les nouvelles cultures, la technologie, la biotechnologie.

Certains vous diront que je suis contre la biotechnologie. Je suis tout à fait contre certaines techniques qui ne me paraissent pas sans danger.

On n'a jamais fait autant de recherches en agriculture qu'à l'époque où j'étais au ministère. Je suis probablement le plus ardent défenseur de la recherche que le Canada aie jamais eu. Je me souviens d'avoir pris la parole à Manille, devant un groupe de scientifiques venus du monde entier. Ils n'en revenaient pas qu'un agriculteur puisse défendre la recherche avec tant d'ardeur. La recherche est notre meilleur produit, mais je parle de la bonne recherche, sécuritaire.

Vous avez parlé de crainte. L'une de mes plus grandes craintes actuellement c'est qu'il n'y ait pas suffisamment de recherche publique. Elle va être laissée à des intérêts privés qui prendront des décisions pour toute la société. Nous dépendrons de grandes entreprises comme Monsanto et autres.

J'ai écrit à dix universités en leur demandant si elles participaient à divers programmes de recherche et d'échange. Je voulais savoir combien de participations elles refusaient parce que les gens qui les financent imposent trop de contraintes. Je n'ai pas encore pu colliger tout cela, mais je vous assure que c'est surprenant. Pour chaque dollar dépensé en recherche, je peux vous montrer que le rapport minimum est de sept dollars.

Certains d'entre vous viennent de l'Ouest. Parlons du canola. Qu'en serait-il aujourd'hui si un ministre un peu cinglé n'avait pas consacré des milliards de dollars à la recherche sur les lentilles pour faire de vous le centre mondial de la lentille? Nous avions même engagé des scientifiques des États-Unis qui sont venus travailler au Canada.

Je pourrais vous parler aussi du maïs à cycle court, du soja, etc., qui ont été créés par des Canadiens, grâce à la recherche scientifique d'Agriculture Canada. Je pourrais parler à M. Toner des pommes de terre du Nouveau-Brunswick, notamment.

La recherche et l'agriculture m'ont passionné et me passionnent encore, mais je regarde autour de moi dans notre société et je vois des gens qui prétendent pouvoir mieux faire seuls, ne pas avoir besoin de leurs voisins ni de travailler dans cet esprit de collaboration qui a fait le Canada.

Voilà. Vous voyez? De toute manière, je ne me suis pas occupé de vous.

Des voix: Bravo, bravo.

• 1535

Le président: Maintenant, permettez-moi de souhaiter la bienvenue aux membres du Programme canadien de leadership en agriculture, le PCLA.

Allons droit au but. Si vous voulez bien vous présenter, aux fins du procès-verbal, nous dire qui vous êtes, ce que vous faites, qui vous finance; ensuite, le porte-parole de chacun des partis vous présentera rapidement la position de son parti sur l'agriculture.

M. Vic Bruce (Programme canadien de leadership en agriculture): Je m'appelle Vic Bruce et je viens de Moose Jaw, en Saskatchewan. Je suis un producteur primaire. Je cultive les semences sélectionnées: semences sauvages, légumineuses à grains et blé dur.

Mme Wendy Durand (Programme canadien de leadership en agriculture): Bonjour. Je m'appelle Wendy Durand et je viens de Carman, au Manitoba. Je suis représentante agricole au ministère de l'Agriculture du Manitoba et je continue de travailler à notre ferme familiale.

Mme Pauline Duivenvoorden (Programme canadien de leadership en agriculture): Je m'appelle Pauline Duivenvoorden et je suis vétérinaire pour le bétail à Terre-Neuve. Avec mon mari nous avons également une exploitation laitière.

Vous vous demandiez d'où venait notre financement. Il vient principalement des secteurs soumis à la gestion des approvisionnements.

Mme Alanna Koch (Programme canadien de leadership en agriculture): Bonjour. Je m'appelle Alanna Koch et je viens d'Edenwald, en Saskatchewan. Je suis directrice exécutive de la Western Canadian Wheat Growers Association. Et avec mon mari nous avons une toute, toute petite exploitation céréalière.

M. Patrick van Haren (Programme canadien de leadership en agriculture): Je m'appelle Patrick van Haren. Je viens de Ridgetown, en Ontario. Nous produisons du porc, et plus précisément nous faisons de l'élevage et de l'insémination artificielle en vue d'exporter le plus possible aux États-Unis.

Mme Wendy Bulloch (Programme canadien de leadership en agriculture): Bonjour. Je m'appelle Wendy Bulloch. Je viens de Brandon, au Manitoba. Je suis représentante de district aux silos-élévateurs du pool du Manitoba et j'ai mon propre cabinet de consultation. Merci beaucoup de nous avoir invités.

Mme Linda Braun (Programme canadien de leadership en agriculture): Bonjour. Je m'appelle Linda Braun et je viens de Saskatoon, en Saskatchewan. Je suis consultante en agroalimentaire et je compte parmi mes clients la Saskatchewan Flax Development Commission.

M. Conrad Toner (Programme canadien de leadership en agriculture): Je m'appelle Conrad Toner. Je viens de Grand Falls, au Nouveau-Brunswick. Je cultive les pommes de terre de semence.

M. Vernon Crawford (Programme canadien de leadership en agriculture): Je m'appelle Vernon Crawford et je viens de l'Alberta. Mon épouse et moi avons deux fils et nous avons une ferme avicole en Alberta.

M. Robert Ross (Programme canadien de leadership en agriculture): Je suis Bob Ross, du sud de l'Ontario. J'exploite une ferme laitière dans le comté de Perth où je suis voisin de Murray.

M. Steve Twynstra (Programme canadien de leadership en agriculture): Je m'appelle Steve Twynstra et je viens du sud-ouest de l'Ontario où je gère une exploitation de cultures commerciales. Nous exportons des haricots secs depuis 20 ans.

Le président: Je vous remercie. Quelqu'un souhaite-t-il expliquer au comité votre philosophie et votre raison d'être?

M. Scott McLean (Programme canadien de leadership en agriculture): Nous nous présentons devant le comité demain matin et nous expliquerons alors plus en détail ce qu'est le Programme canadien de leadership en agriculture. Essentiellement, notre mission est de préparer des leaders efficaces pour l'industrie agroalimentaire canadienne. Demain matin nous pourrons vous faire une présentation plus détaillée.

Le président: Très bien. Merci beaucoup.

Nous allons passer tout droit aux porte-parole des partis, en commençant par M. Murray Calder, de l'Ontario, pour le Parti libéral.

M. Murray Calder: Merci beaucoup, monsieur le président.

Comme le disait le sénateur Whelan, j'ai autrefois été agriculteur. C'est maintenant mon épouse, Brenda, qui dirige l'exploitation. Nous avons un élevage avicole dans le centre de l'Ontario. Nous vendons actuellement environ 350 000 poulets par an. Nous avons également une entreprise de soudage et de fabrication car j'ai d'abord fait un apprentissage de mécanicien monteur et je suis donc soudeur de formation.

Ce qui m'a attiré à la politique, et nous nous sommes probablement tous un jour ou l'autre trouvés dans cette situation, ce sont les discussions que nous avions au café local: «Si j'étais député, voilà ce que je ferais.» Les électeurs de ma circonscription m'ont donné la possibilité de le faire, en m'élisant deux fois de suite.

• 1540

J'estime que le gouvernement libéral peut être fier de sa fiche de résultats. Il a derrière lui quatre ans de programmes raisonnables et de réalisations solides en faveur des producteurs agricoles des régions rurales.

J'ai ici un livre intitulé Au service des communautés rurales et quelques autres livrets. Celui-ci est publié par Revenu Canada; c'est un guide à l'intention des petites entreprises canadiennes. Il y a aussi cette publication d'Industrie Canada: L'exportation: Le succès en 10 étapes et le Guide des services et des programmes du gouvernement du Canada à l'intention de la petite entreprise.

Vous vous demandez peut-être pourquoi nous produisons ces publications. Je dois vous dire que je suis membre du Comité du développement économique et l'une des choses dont je trouve à me plaindre, en tant que député et en tant que petit entrepreneur, c'est que le gouvernement a toutes sortes d'excellents programmes, mais personne ne les connaît. Les gens ne savent pas à qui s'adresser. C'est un des problèmes auxquels notre gouvernement essaie de remédier. Ce livre, par exemple, va être publié en version condensée. En tant que député, quand je visite ma circonscription, j'en ai toujours quelques-uns dans mon camion. J'ai distribué plus de 1 500 exemplaires de celui-ci, 1 700 de celui-là, et environ 1 800 de celui-ci. Ce sont de bons documents d'information.

Nos politiques visent à améliorer les débouchés pour les produits agricoles canadiens, à aider les producteurs dans les régions rurales à s'adapter au changement, à créer un climat propice aux affaires et à améliorer l'accès à l'information, et au capital, ainsi qu'à investir dans l'éducation. Le gouvernement a également fourni des informations plus solides et plus efficaces sur les marchés et les services de soutien à l'exportation.

Afin d'aider les exportateurs canadiens à soutenir la concurrence étrangère, le mécanisme de crédit agroalimentaire prévoit jusqu'à un milliard de crédits supplémentaires et d'assurance-crédit sur les ventes à l'étranger.

Le service d'exportation agroalimentaire aide l'industrie à s'adapter à un marché mondial toujours plus compétitif en offrant des programmes de formation pour les exportateurs et une mine d'informations sur le commerce et les programmes gouvernementaux.

Grâce à tous les efforts du gouvernement, les exportations agricoles ont augmenté de 50 p. 100 entre 1993 et 1997, pour atteindre une valeur record de plus de 20 milliards de dollars. En même temps, le gouvernement n'a pas cessé de défendre avec vigueur notre système de gestion des approvisionnements. C'est là une chose qui me tient à coeur.

La gestion des approvisionnements a permis de donner une solide base économique aux collectivités rurales et des produits de qualité, à prix raisonnables pour les consommateurs. Durant les négociations de l'Uruguay, le gouvernement a obtenu de l'Organisation mondiale du commerce des dispositions qui protègent nos industries sous le régime de la gestion des approvisionnements.

En 1995, les États-Unis ont contesté notre structure tarifaire dans le cadre de ce régime. Notre gouvernement a repoussé les prétentions américaines à chaque étape et nous avons eu gain de cause quand une commission de règlement des différends s'est prononcée à l'unanimité en faveur du Canada.

Dans le même temps, le gouvernement a éliminé les subventions réservées à des denrées spécifiques qui faussent le marché. Les seules subventions qui demeurent en place sont celles destinées à l'industrie laitière, et elles seront progressivement éliminées d'ici 2002.

D'autres vous diront qu'ils sont en faveur de l'élimination des subventions, mais les libéraux estiment que le gouvernement a aussi la responsabilité d'aider ces secteurs à traverser la difficile période de transition vers l'élimination des subventions. Par exemple, le gouvernement a créé le Fonds d'adaptation à la réforme du transport des grains de l'Ouest, doté d'un budget de 300 millions de dollars, afin d'aider le secteur à s'adapter à l'élimination des subventions en matière de transport.

Le gouvernement a également aidé de manière pratique et tangible les producteurs qui ont dû adapter leurs opérations au nouveau climat économique mondial et aux nouvelles technologies.

Le gouvernement a travaillé de concert avec des centaines de collectivités rurales en vue d'assurer leur viabilité, de diversifier leur base économique et d'en faire des endroits où les gens ont envie de vivre et de travailler.

Je pourrais citer en exemple le Fonds canadien d'adaptation et de développement rural. Il finance des initiatives visant à encourager la diversification, les activités à valeur ajoutée, l'expansion du marché, l'innovation et la création d'emplois dans les secteurs de l'agriculture et de l'agroalimentaire. Les 240 millions de dollars dont il dispose aideront ce secteur à gérer les changements que lui imposent l'austérité financière, les nouvelles règles commerciales internationales et les nouvelles technologies.

• 1545

Le gouvernement libéral reconnaît que les petites entreprises créent de très nombreux emplois dans les régions rurales. Vu ce qu'elles contribuent aux économies rurales, il est important d'aider les petites entreprises autant que possible. Instituée par une administration libérale précédente, la Banque fédérale de développement soutient la création et l'expansion des petites et moyennes entreprises en leur fournissant capitaux et services de gestion.

Ce gouvernement s'est également efforcé d'améliorer le climat commercial. Le budget fédéral est équilibré, les taux d'intérêt sont faibles et les primes d'assurance-emploi ont diminué chaque année depuis 1995. Le gouvernement a également allégé le fardeau administratif pour les petites entreprises.

Depuis l'arrivée au pouvoir des libéraux, plus de 320 règlements ont été revus ou abrogés. La création d'une agence canadienne d'inspection des aliments est un exemple de ce qu'a fait le gouvernement pour accroître l'efficacité des règlements. Créée l'an dernier, cette agence assure toutes les activités d'inspection alimentaire qui étaient autrefois réparties entre trois ministères distincts. Elle permet de réduire le double emploi et économise au contribuable canadien 44 millions de dollars par an. En outre, les importateurs et exportateurs d'aliments ont l'avantage d'avoir un seul point d'accès, et il est ainsi plus facile pour eux de faire certifier la sécurité de leurs produits.

Le gouvernement s'est aussi efforcé d'aider les agriculteurs à trouver des capitaux. Dans le budget de 1997, il a alloué 50 millions de dollars de plus à la Société du crédit agricole. La SCA soutient la croissance et la diversification rurale. Elle offre des services financiers spécialisés et personnalisés aux exploitants agricoles, y compris aux exploitations familiales et aux entreprises rurales reliées à l'agriculture. Nous avons donc étendu son mandat aux activités à valeur ajoutée.

Pour assurer notre succès à l'avenir, nous devons continuer d'améliorer nos produits et nos méthodes de production. Afin que le Canada demeure un chef de file dans le domaine de l'agriculture, le gouvernement apporte un financement stable à la R-D en agriculture. Le sénateur en parlait, et c'est un élément très important pour notre avenir. De fait, le gouvernement fédéral est le plus gros contributeur à la recherche agricole au Canada, dans laquelle il investit plus de 300 millions de dollars par an.

Le gouvernement veut aussi s'assurer que les Canadiens qui vivent en milieu rural puissent avoir accès à la technologie informatique et à l'enseignement supérieur. Grâce au Programme d'accès communautaire, toutes les localités qui comptent entre 4 000 et 50 000 habitants auront des sites publics d'accès à l'Internet. D'ici 2000, 5 000 collectivités rurales seront ainsi reliées à Internet. Un programme semblable, Rescol, a pour objectif de relier toutes les écoles canadiennes—et on en compte environ 16 000—à l'autoroute de l'information, d'ici la fin de cette année.

Mesdames et messieurs, je me souviens de la première fois où j'ai pris la parole devant un conseil municipal, en 1994. Je parlais de l'autoroute de l'information, et les conseillers municipaux me regardaient sans trop d'intérêt, avec l'air de penser «Mais de quoi parle-t-il donc?»

Nous voici en 1998, et songez à quel point l'Internet fait maintenant partie intégrante de la vie des exploitants agricoles. Tous les abonnés au DTN, par exemple, ont à portée de la main toutes les données sur les opérations à terme, les marchés des denrées et la météo, grâce au Doppler. Tout cela est de plus en plus relié à cause de l'Internet.

Autrefois, les distances représentaient un obstacle pour les habitants des régions rurales qui aspiraient à l'enseignement supérieur. Dans le cadre de la priorité accrue qu'il accorde à l'éducation, le gouvernement leur facilitera l'accès à l'enseignement. La Fondation canadienne du millénaire aidera les habitants des campagnes canadiennes à faire face aux coûts supplémentaires qu'ils encourent s'ils quittent leurs collectivités pour poursuivre des études.

Parce que la qualité de vie dans les campagnes est importante pour nous, le budget de 1998 confirmait un fonds de 20 millions de dollars pour l'initiative des partenariats ruraux, qui s'appuie sur un vaste éventail de programmes et services existants. L'initiative financera des projets pilotes qui, par exemple, amélioreront l'accès aux soins de santé et aux capitaux dans les régions rurales. Le gouvernement accordera une assistance financière et technique en vue de stimuler les initiatives locales qui aideront les collectivités rurales à s'adapter aux nouvelles conditions et à trouver de nouvelles possibilités de développement durable. Le Canada ne pourra pas maintenir une économie saine sans un secteur agricole robuste.

• 1550

Mesdames et messieurs, en tant qu'agriculteur et citoyen qui a toujours défendu les intérêts du Canada rural, je tiens à rappeler que notre industrie est essentielle et que son importance économique pour le Canada vient au deuxième rang après l'industrie automobile. Nous pouvons en être fiers. Compte tenu du fait que d'ici 2025 on prévoit que la terre portera neuf milliards d'habitants, la R-D pour le dynamisme de l'agriculture est impérative. J'estime que les députés ont la responsabilité de s'assurer que les gouvernements ne se contentent pas de répondre aux besoins de l'agriculture, mais les devancent. En tant qu'aviculteur, ayant eu l'honneur et le privilège de servir le gouvernement du Canada, c'est ce que j'ai activement essayé de faire.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, Murray.

Pour la majorité, nous avons également M. John Harvard, du Manitoba, secrétaire parlementaire, M. Vanclief et, du Québec, M. Denis Coderre.

Maintenant, pour le Parti réformiste, nous avons parmi nous MM. Leon Benoit et Jake Hoeppner.

Leon, je crois que vous allez parler au nom du Parti réformiste. Allez-y.

M. Leon Benoit (Lakeland, Réf.): Merci, monsieur le président et merci à vous tous de nous avoir invités. Nous en sommes ravis. C'est vraiment une excellente initiative.

Je crois que vous noterez certaines différences entre la plate-forme gouvernementale et ce que nous proposons. Par exemple, en ce qui concerne le Fonds du millénaire, qui a été mentionné, il faut bien comprendre que 94 p. 100 des étudiants n'y auront jamais accès. Il faut donc se méfier de ce qui est annoncé et voir ce qu'il en est en réalité.

Cela nous amène à une question importante qui ne concerne pas seulement les agriculteurs, mais les agriculteurs aussi, et c'est celle de l'impôt, qui est trop lourd. Ce sont précisément les programmes de ce type qui font augmenter les impôts. Il est évident que les impôts sont trop élevés. Les gouvernements, à un palier ou l'autre, dépensent actuellement 50 p. 100 de ce que nous gagnons. C'est vrai pour les agriculteurs comme pour tout le monde.

Il y a deux catégories de questions: celles qui touchent tous les agriculteurs, et celles qui ont des effets plus spécifiques. Comme je n'ai pas beaucoup de temps, je serais très succinct.

Pour ce qui est des questions d'intérêt général, je crois qu'on peut dire d'abord qu'il y a trop d'ingérence gouvernementale dans plusieurs domaines. Par exemple, il y a trop de paperasserie, et je suis sûr que vous me comprenez. Quand on exploite une entreprise, agricole ou autre—et bien sûr vous êtes tous dans l'agriculture—on doit consacrer plus de temps que de raisons à la paperasse. Il y a trop de règles, de réglementation superflue qui n'est pas vraiment utile.

Les impôts sont trop élevés, et je ne parle pas seulement des impôts sur le revenu, mais aussi des taxes d'accise—par exemple sur le combustible—des charges sociales, telles les primes du RPC, qui vont d'ailleurs augmenter de 73 p. 100 au cours des prochaines années, des primes d'assurance-chômage, et ainsi de suite. Si vous avez des employés, tout cela vous concerne.

Bien entendu, dans le cas du RPC, les travailleurs autonomes—que sont généralement les agriculteurs—doivent payer les deux parts. Cela représente une cotisation énorme à un programme qui, au maximum, vous versera un jour 8 800 $.

J'aimerais maintenant parler de programmes qui touchent plus spécifiquement l'agriculture. Mais auparavant, à propos d'impôt, je rappelle que nous avons assisté au cours des dernières années à une très forte hausse des frais d'utilisation. Je ne suis pas contre ces frais, mais avant de les instaurer, il faut qu'il y ait une réduction correspondante dans les dépenses ministérielles, et cela ne s'est pas produit. On n'a pas noté de réduction correspondante dans les dépenses, dans les frais de fonctionnement du ministère, mais il y a eu une très forte hausse des frais aux usagers. C'est une autre forme d'imposition qui a des répercussions très négatives sur les industries de transformation en particulier, mais aussi sur la production agricole primaire.

Une des questions qui concerne tous les agriculteurs ou presque, c'est le manque de rationalisation du régime de réglementation des pesticides. Les Américains ont accès à certains pesticides, ils peuvent les utiliser sur leurs cultures, qu'ils exportent ensuite vers le Canada, mais il faut toujours attendre très longtemps avant que les exploitants canadiens ne puissent utiliser ces mêmes produits. Bien souvent, cela donne aux Américains un avantage concurrentiel injuste, ou cela nous défavorise. C'est à mon avis un des problèmes qui touche la plupart des agriculteurs.

• 1555

Il y a également les problèmes environnementaux, et je crois que là presque tous les agriculteurs sont concernés. Par exemple, il est maintenant beaucoup plus compliqué de se lancer dans l'élevage intensif du bétail. Et même les élevages existants rencontrent de nombreux problèmes.

Il y a la question des engrais et des pesticides appliqués aux cultures qui pénètrent dans le sol, l'eau, et ainsi de suite.

Il y a également d'autres lois environnementales, telles la législation sur les espèces menacées d'extinction qui, je crois... Si l'on ne fait pas attention à ce qui se passe dans ce domaine, il risque d'y avoir des conséquences pour tous les propriétaires terriens, mais certainement davantage pour les agriculteurs, au-delà de ce qu'on peut imaginer. Si vous n'y avez pas vraiment regardé de près... C'est extrêmement important. Il faut mettre en place un système volontaire de protection des espèces menacées, plutôt que de lourdes mesures législatives qui risquent de coûter très cher aux agriculteurs. Et puis il y a également la menace de poursuites. Il y a donc certainement matière à inquiétude dans ce domaine.

Il y a aussi le problème du coût élevé des intrants, attribuable bien sûr en grande partie aux taxes. C'est un problème pour presque tout le monde en agriculture. Or la part des taxes dans le coût des intrants ne cesse de croître.

Et maintenant, passons du général au particulier, et entre autres à la gestion des approvisionnements. Malheureusement, j'estime que ces dix dernières années les gouvernements n'ont pas été honnêtes quant à ce que l'avenir nous réserve, aux changements qui vont intervenir et qui, dans une certaine mesure, sont déjà intervenus en matière de gestion des approvisionnements. L'évolution au cours des cinq à dix prochaines années promet d'être spectaculaire. Je ne crois pas que les gouvernements aient vraiment été honnêtes. Et pourtant ils savent sûrement ce qui se prépare.

En ce qui concerne les contestations de la part des Américains, j'en ai observé quelques-unes. Le Canada pourrait facilement perdre une cause. La plus grande menace vient selon moi des négociations du GATT en 1999 et des nouvelles règles qui en résulteront pour l'OMC, règles qui obligeront le secteur soumis à la gestion des approvisionnements à soutenir la concurrence américaine. Bien entendu, par ailleurs, cela nous donnera un meilleur accès au marché américain.

Le secteur de la gestion des approvisionnements subit donc certainement des pressions. Il ne fait aucun doute que les choses vont changer. Le changement aura des aspects positifs et négatifs. Parmi ces derniers, il y aura probablement une baisse des prix. Cela ne fait pratiquement aucun doute. Parmi les aspects positifs, il y a bien sûr la baisse des coûts et, en particulier, l'élimination, à terme, du coût des quotas.

Comme le savent tous ceux d'entre vous qui travaillent actuellement dans les secteurs soumis à la gestion des approvisionnements, les quotas représentent sans doute votre coût le plus élevé. Bien entendu, le changement est négatif pour tous les détenteurs de ces quotas qui perdront leur valeur. C'est certainement là une question très délicate qu'il va falloir régler. Mais je crois qu'on a déjà un précédent avec l'élimination du tarif du Nid-de-Corbeau: les personnes touchées ont été au moins partiellement indemnisées pour la perte de valeur de leur subvention. On pourrait envisager la même chose pour les quotas.

Parmi les questions particulières, il y a aussi celle de la Commission canadienne du blé. Cela concerne principalement les gens de l'Ouest, et c'est une des raisons de l'injustice. La question revient à laisser les agriculteurs libres de choisir comment vendre leurs produits au lieu de leur imposer un monopole d'État. Un grand nombre des agriculteurs de l'Ouest canadien réclament cette liberté de choix. Je crois qu'il faut la leur donner.

Dans le domaine du transport et de la manutention des céréales, qui est encore une fois une question spécifique à l'Ouest, on a introduit des changements clés dans le système avant d'avoir modifié celui-ci de manière à lui permettre de fonctionner... Je songe notamment à l'élimination de la subvention du Nid-de-Corbeau. Elle était nécessaire. Nous avons appuyé le gouvernement dans cette initiative, mais nous avions dit qu'il devait d'abord s'assurer que le système soit plus économe. Cela n'a pas été fait.

En ce qui concerne les modifications à la loi sur les transports nationaux, là aussi, les répercussions ont été considérables, mais on ne les a pas fait précéder des mesures qui auraient permis le bon fonctionnement de la loi.

La privatisation du CN a eu des répercussions énormes, mais l'on n'a pas introduit des modifications nécessaires pour assurer son succès. Nous voyons qu'il y a des problèmes, notamment avec l'abandon des lignes secondaires.

Il y a en outre de nombreuses interruptions du travail dans le système de manutention et du transport du grain. Non seulement cela cause-t-il des frais supplémentaires, mais cela nous fait aussi perdre des marchés.

En ce qui concerne les programmes de sécurité du revenu, il y a eu des changements au cours des dernières années. D'après mon expérience, cette question préoccupe surtout les gens de l'Ontario et de l'Est canadien. Les agriculteurs de l'Ouest s'intéressent moins au programme de sécurité du revenu agricole, mais le gouvernement a proposé des changements et nous verrons ce que cela donnera.

• 1600

Je vais conclure comme j'ai commencé. Vous constaterez probablement une différence de ton entre ce que disent les députés de la majorité et ceux du Parti réformiste, car nous attendons du gouvernement qu'il se retire de certains domaines, et certainement qu'il fasse moins d'ingérence. C'est vraiment important pour nous.

Si vous voulez la preuve qu'un gouvernement moins actif et moins interventionniste sur le marché est une chose positive, regardez simplement du côté de l'industrie de l'élevage dans l'Ouest, et particulièrement dans le secteur des bovins. En Alberta, en 12 ans environ, le secteur a doublé. En 1975, les gouvernements d'un bout à l'autre du pays se battaient pour offrir le plus de subventions aux agriculteurs pour qu'ils fassent de l'élevage et maintiennent les troupeaux, et l'industrie périclitait. Ils avaient sans doute de bonnes intentions, mais ils ont en fait détruit l'industrie bovine.

Actuellement, le gouvernement n'intervient plus véritablement dans ce secteur, qui est vraiment devenu un modèle de marché libre. Or cette industrie se porte très bien. Il y a eu un léger fléchissement il y a un an et demi ou deux, de courte durée, mais dans l'ensemble, une période d'expansion de 13 à 14 ans. Je sais que les éleveurs de l'Alberta en sont très satisfaits.

Voilà un cas qui montre bien qu'il faut laisser les agriculteurs s'occuper eux-mêmes de leurs affaires et que le gouvernement doit rester aussi discret que possible. Je ne veux pas dire qu'il ne faut aucune réglementation—pas du tout—mais elle doit être limitée au strict minimum, ne pas être trop lourde, et permettre aux agriculteurs de faire leur travail.

Le président: Merci.

Nous devrions maintenant entendre M. Jean-Guy Chrétien, du Bloc québécois, mais il semble qu'il ne soit pas des nôtres aujourd'hui. Nous allons donc entendre le porte-parole du Nouveau Parti démocratique, M. Dick Proctor, qui vient de la Saskatchewan.

M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Merci beaucoup, monsieur le président.

Bonjour tout le monde. C'est un plaisir que de vous rencontrer tous cet après-midi.

J'ai pensé prendre quelques petites minutes pour vous parler de certaines questions que notre caucus, et même ce comité permanent, voient se profiler à l'horizon. Je ne vais pas m'en tenir strictement à ce que perçoit notre parti.

Permettez-moi de vous mentionner d'abord quels sont ces problèmes dont je vais parler: l'OMC, Organisation mondiale du commerce; le recouvrement des coûts et le coût élevé des intrants; et le transport du grain.

En ce qui concerne l'Organisation mondiale du commerce, je crois pouvoir dire que le Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire est inquiet de l'état de préparation du Canada en vue des prochaines négociations qui devraient débuter vers la fin de l'an prochain. Notre comité a fait savoir qu'il tenait à participer aux préparatifs. Nous avons le sentiment que pour les négociations d'Uruguay dans le cadre de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce, nous n'étions pas vraiment préparés à voir venir les changements en agriculture. Nous ne voulons pas que cela se reproduise.

À ma connaissance, il y a eu au moins une réunion là-dessus l'automne dernier, à Saskatoon, pour commencer à préparer les agriculteurs. Nous estimons qu'il y a encore beaucoup plus à faire dans ce domaine. Notre comité y travaille. La sécurité de l'alimentation est reliée à cela. On a également mentionné la gestion des approvisionnements.

Je crois que si M. Jean-Guy Chrétien, du Bloc québécois était présent il vous parlerait du problème que pose actuellement le mélange sucre-huile de beurre, dossier que le Canada essaie actuellement de résoudre.

Voilà le genre de choses que nous voyons se profiler à l'horizon de l'OMC.

Quant au recouvrement des coûts et au coût élevé des intrants, je dirai ceci. Au cours des dernières années, le gouvernement a effectivement réduit, puis éliminé, le déficit, et les exportations agricoles ont considérablement contribué à l'assainissement de notre balance des paiements et à l'élimination du déficit. Maintenant, je me demande où sont les récompenses pour le secteur agricole? Le ministre des Finances, lorsqu'il a annoncé son budget il y a 15 jours, a parlé pendant à peu près une heure et demie, et pendant tout ce temps, il n'a pas prononcé le mot «agriculture».

• 1605

Comme on l'a dit, l'Ouest canadien voit diminuer les programmes de stabilisation du revenu. Nous savons que les agriculteurs sont des gens solides. À notre avis, les agriculteurs canadiens sont les meilleurs au monde, mais il reste qu'ils paient leurs intrants très cher.

Quand j'étais dans ma circonscription de Palliser, dans la région de Regina et Moose Jaw, à Noël, j'ai rencontré des gens qui m'ont dit franchement que l'époque des lobbys agricoles et des grands rassemblements d'agriculteurs était terminée et que les gens ne s'intéressaient plus à cela. Ils regardaient plutôt froidement leur situation financière. Ceux qui ont entre 45 et 55 ans essaient généralement de quitter l'agriculture. Malgré la jeunesse que nous voyons ici dans ce groupe aujourd'hui, il faut bien savoir que dans ma région en tout cas, l'âge moyen des agriculteurs est en hausse. Ceux qui ont entre 55 et 65 ans s'efforcent de tenir le coup jusqu'à ce qu'ils puissent vendre leur exploitation et se retirer avec un minimum de confort.

En particulier, un monsieur de Swift Current me disait qu'il y a un an, son épouse et lui-même essayaient de voir s'ils pourraient convaincre un de leurs fils de venir reprendre l'exploitation. Mais au cours des douze derniers mois, ils ont décidé qu'ils ne pourraient pas le «condamner»—et c'est exactement le mot qu'ils ont utilisé—à mener la vie qui était désormais la leur.

John Solomon, un collègue qui représente une circonscription de la région de Regina, était la semaine dernière à Semans où il a vu que 100 quarts de section étaient à vendre. Actuellement, le prix des denrées est très bas et le coût des intrants est très élevé, mais nous n'avons plus les programmes officiels de stabilisation qui permettaient généralement de mieux passer les périodes de crise en agriculture. Je voudrais maintenant dire quelques mots du transport du grain avant de revenir à cette question en conclusion.

Le problème du transport du grain concerne bien sûr principalement les provinces des Prairies. Nous assistons au démantèlement accéléré des voies de chemin de fer. Nous voyons augmenter le nombre d'élévateurs de tête de ligne à l'intérieur, et avec cela l'abandon des lignes secondaires. Cela veut dire que les céréaliculteurs de l'Ouest doivent transporter leurs produits plus loin, avec des conséquences très négatives pour l'état des routes.

Depuis la fin de la subvention du Nid-de-Corbeau, il y a trois ans, les tarifs marchandises ont doublé, et même parfois triplé. À la fin de décembre, le gouvernement a finalement nommé M. Willard Estey, juge à la retraite de la Cour suprême, à la tête d'un comité d'étude qui est censé présenter un rapport préliminaire en mai et un rapport final d'ici décembre. Notre caucus estime qu'en attendant le rapport Estey, il faut cesser le démantèlement des lignes de chemin de fer. Sinon, il est bien possible que les voies de chemin de fer aient toutes disparu et que le rapport n'ait plus aucun sens.

En conclusion, permettez-moi d'essayer de répondre à la question qu'on a posée au sénateur Whelan, à savoir «Quelle est votre plus grande crainte?». Ma plus grande crainte pour l'avenir de l'agriculture, c'est le négoce agricole. J'ai grandi dans une ferme laitière et pour moi il n'y avait rien de plus beau. J'ai vraiment apprécié cette époque-là de ma vie. Mais avec le coût des intrants, la baisse des prix des denrées, et le fait qu'il ne semble plus y avoir assez de jeunes qui s'intéressent à faire carrière dans l'agriculture, pour toutes sortes de raisons que vous connaissez au moins aussi bien que moi, je crains vraiment qu'au cours des dix prochaines années environ nous n'assistions à une véritable expansion du négoce agricole au Canada. Et cela est inquiétant.

Merci beaucoup, monsieur le président.

• 1610

Le président: Merci, Dick.

Et enfin, mais pas des moindres, Rick Borotsik, du Manitoba, pour les conservateurs.

M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC): Merci, monsieur le président.

La première chose que je dois dire, monsieur le président, c'est que je suis furieux contre Dick Proctor. Il n'arrête pas de regarder mes notes et de faire mes discours. Je ne veux plus être assis à côté de lui.

Le président: Jake, allez vous asseoir entre ces deux-là.

M. Rick Borotsik: Non, je ne veux pas être assis à côté de Jake non plus. Il va falloir que je règle cela moi-même.

M. Murray Calder: Est-ce que vous essayez d'unir la droite?

M. John Harvard (Charleswood—Assiniboine, Lib.): Je comprends maintenant pourquoi vous parlez de plus en plus comme un néo-démocrate.

Des voix: Oh, oh.

M. Rick Borotsik: Pas du tout.

Le président: Allez-y, Rick.

M. Rick Borotsik: Tout d'abord, je tiens à souhaiter la bienvenue à tous les délégués, mais en particulier à ceux du Manitoba, Wendy, Wendy et Grant. Nous sommes ravis de vous avoir ici à Ottawa, et plus particulièrement devant le Comité de l'agriculture. J'espère que nous pourrons vous faire profiter un peu de notre expérience et vous faire comprendre peut-être quelles sont selon nous les grandes questions qui se posent à l'agriculture non seulement cette année, mais aussi dans les années à venir.

Pour ceux d'entre vous qui ne me connaissent pas, je viens de Brandon, au Manitoba. Brandon était—et demeure—la ville du blé. Ne vous y trompez pas, nous sommes bien la capitale du blé.

Je n'ai malheureusement pas travaillé dans l'agriculture, bien que j'aie une expérience et des antécédents agricoles puisque ma famille est encore à la ferme. J'ai été maire de Brandon pendant quelques années et je vous assure que l'économie de la ville toute entière dépend de l'agriculture. Celle-ci est la clé de notre économie, et j'en suis conscient.

En tant qu'élu municipal, je peux vous assurer que j'ai souvent rencontré les mêmes conseillers et les mêmes maires que M. Calder compte dans sa circonscription, les maires et les conseillers de ces localités qui vivent de l'agriculture. J'ai très vite compris que sans l'agriculture ma ville n'existerait pas, tout simplement. Je comprends donc parfaitement l'importance de ce secteur.

Cela dit, si elle s'appuie sur l'agriculture, Brandon a également un grand secteur industriel, bien que dans la plupart des cas ces industries soient directement reliées à l'agriculture. Une usine d'engrais, Simplot, vient de terminer une expansion de 250 millions de dollars. Elle venait s'ajouter à une immobilisation de 250 millions déjà, et bien entendu c'est principalement à l'agriculture qu'est destinée la production d'ammoniac anhydre.

Monsieur le président, je suis très fier du fait que nous ayons la seule industrie de ce type au monde—pas seulement au Canada, mais au monde, et certains d'entre vous dans l'Ouest canadien en profitent—avec la présence d'une entreprise pharmaceutique du nom de Ayerst. Ayerst utilise comme matériau l'urine de jument gravide. Il est évidemment difficile de présenter sous un jour romantique le fait que Brandon soit la capitale mondiale du pipi de cheval, mais c'est le cas. Nous en sommes très fiers, car cela apporte quelque 80 millions de dollars à notre économie agricole, pas seulement à Brandon, mais aussi en Saskatchewan et en Alberta.

Et nous avons un autre pivot industriel auquel le président a fait allusion. Nous venons d'annoncer la construction, cette année et l'an prochain, avec ouverture à l'automne 1999, d'une nouvelle usine de transformation du porc de la Maple Leaf Foods qui emploiera 2 000 personnes. On y transformera environ 2,5 millions de porcs, la majorité en provenance de notre région, du Manitoba, de la Saskatchewan et de l'Alberta.

Alors voilà ce que nous sommes: nous sommes l'agriculture. Ne vous y trompez pas.

Monsieur le président, est-ce que j'ai cinq ou dix minutes? Vous n'avez interrompu personne.

Le président: Je ne vous ai pas non plus interrompu.

M. Rick Borotsik: Je sais, mais vous m'inquiétez.

M. John Harvard: Nous avons déjà entendu votre discours de la bouche de M. Proctor.

M. Rick Borotsik: Alors je ne suis pas obligé de parler des problèmes, n'est-ce pas?

Des voix: Oh, oh.

M. Rick Borotsik: Je ne sais pas si vous êtes au courant, et je vais donc vous expliquer un peu comment fonctionne le comité. Le comité est composé de sept libéraux, trois réformistes, deux bloquistes, Proctor et moi-même. C'est ici que le travail se fait, en théorie et en pratique. D'après mon expérience, aussi limitée soit-elle, je dois admettre que j'aime beaucoup le travail en comité, parce qu'on peut collaborer sans sectarisme politique. Même si vous pouvez difficilement vous en douter à entendre les discours de Murray ou de Leon, le fait est que nous pouvons aussi être non sectaires ici. Nous pouvons en fait travailler à ce qui nous paraît important pour l'agriculture.

• 1615

Notre président a été élu par le groupe. Ce n'était pas lui que j'avais choisi, mais il a été élu quand même. Il vient de l'Île-du-Prince-Édouard.

M. Murray Calder: Vous pouvez l'interrompre maintenant.

M. John Harvard: C'est lui que vous aviez choisi.

M. Rick Borotsik: Je sais.

Je vais maintenant parler des problèmes, car le président va vouloir m'interrompre après ce que je viens de dire.

Encore une fois, Dick m'a volé mon paragraphe d'ouverture. La question qui a été posée est une excellente question: Que faut-il craindre pour l'avenir de l'agriculture? Ma réponse est un peu différente de celle de Dick, qui s'inquiète avant tout du négoce agricole. Quant à moi, ma plus grande crainte c'est le fait qu'on craigne le changement. Tous les intervenants du secteur agricole, fermiers, producteurs, négociants, doivent faire face aux changements qui interviendront au cours des prochaines années. Nous savons que l'agriculture aujourd'hui n'est plus ce qu'elle était il y a dix ans. Elle n'est certainement plus ce qu'elle était il y a 25 ans. Nous voyons actuellement des choses en agriculture que nous n'aurions même pas imaginées. Il nous faut donc être capables de nous adapter aux changements, à ce que nous réserve l'avenir.

J'ai toujours dit qu'il valait mieux gérer le changement que de se faire gérer par lui. C'est cela la plus grande crainte. Nous l'avons constaté lors du débat sur la Commission canadienne du blé, sur le projet de loi C-4. Nous avons vu alors des gens qui sont incapables d'assumer les changements qui se produiront de toute manière.

Nous savons maintenant—et je suis sûr qu'en tant que leaders, futurs ou actuels, de l'agriculture, vous en êtes conscients—les changements sont tout autour de nous. Il y a encore cinq ans, les services publics étaient des monopoles. Cela a changé. Les organisations ont su s'adapter aux changements et dans certains cas elles ont même très bien réussi et sont devenues très efficaces.

Le changement prend plusieurs formes. Nous avons parlé de la biotechnologie. Nous avons parlé de la génétique. Ce sont des mots qui font très peur à bien des gens. Mais ne vous y trompez pas, ces choses-là existent. Et elles sont le futur de l'agriculture. Nous avons tout intérêt, et vous avez tout intérêt à faire face au changement, à le gérer, car il faudra sans cesse rester à la page.

Nous avons des craintes, et même des craintes très fortes, face à la mondialisation et au commerce mondial. Nous avons des impulsions protectionnistes, mais nous voulons en même temps participer au commerce mondial. Nous ne savons pas si nous serons capables de soutenir la concurrence et nous devons veiller à bien nous y préparer.

J'aimerais maintenant parler de quelques lacunes. J'aborderai quatre sujets. Premièrement—et Dick en a déjà parlé—il y a le budget que Murray a encensé, les positions de son gouvernement...

M. Murray Calder: Vous n'allez pas être sectaire, n'est-ce pas?

M. Rick Borotsik: Ce n'est pas ce que je souhaite, Murray, vraiment, mais Dick a encore une fois volé mes notes.

Le budget n'a même pas mentionné l'agriculture. Nous l'avons remarqué parce que cela fait partie de notre travail. Nous nous efforçons de faire de notre mieux pour nous assurer que l'on n'oublie pas l'agriculture. Mais il n'y avait rien dans le budget.

J'ai remarqué une petite ligne. On prévoit un programme de 20 millions de dollars sur quatre ans pour le «développement rural» qui doit permettre la réalisation de projets pilotes auxquels travailleront tous les ministères ensemble. C'est pur symbolisme, si vous voulez que je vous dise la vérité. Mais le budget ne prévoyait strictement rien pour l'agriculture, et cela m'inquiète.

Je voudrais parler de trois grands sujets. Il y a d'abord l'OMC. On a déjà parlé. Lorsque les négociations commenceront en 1999, les agriculteurs canadiens ont intérêt à être prêts. Je crois que nous avons fait un assez bon travail dans ce comité en convoquant les négociateurs en chef à venir nous expliquer leur position et à venir régulièrement nous faire rapport sur l'état de la situation afin que nous puissions être sûrs qu'ils seront prêts et que l'agriculture canadienne ne sera pas un simple pion à la table des négociations.

Ce sont là mes priorités pour l'année.

On a également mentionné le transport du grain. La situation est vraiment pourrie. Tout à fait. Il y a Willard Estey qui fait actuellement un excellent travail. J'ai tout à fait confiance en lui. Je suis convaincu que son comité consultatif va présenter d'excellentes recommandations. Ma crainte—pour la deuxième fois je serai un peu sectaire—c'est qu'il n'y aura pas la volonté politique nécessaire pour prendre les mesures indispensables afin que nous soyons concurrentiels sur les marchés mondiaux.

Il faut pour cela une volonté politique. Le système actuel n'est pas efficace. Les problèmes sont systémiques. Pour changer cela, il faut une volonté politique. C'est pour cela que nous sommes ici et je suis sûr que nous pourrons collaborer là-dessus.

• 1620

Le dernier sujet, qui n'a pas été mentionné, est celui de la protection du revenu. Le CSRN doit être renégocié en 1998. Je suis un partisan convaincu du CSRN. C'est un bon programme. Il faut le prolonger.

Le gouvernement doit aussi faire face aux problèmes extraordinaires qui ont frappé l'agriculture, et il y en a eu plusieurs. Il y a eu les catastrophes naturelles—comme par exemple dans la vallée de la Rouge. Il y a eu la catastrophe de la tempête de verglas. Il y a d'autres événements naturels qui ne sont pas inclus dans le CSRN et qui doivent être à part, mais il devrait y avoir un programme bien pensé, logique, qui prévoie des mesures en cas de catastrophe naturelle.

La biotechnologie est sans aucun doute la plus grande question à laquelle nous aurons à faire face au cours des trois à quatre prochaines années. Nous devons savoir exactement ce que nous voulons dans ces domaines, non seulement au Canada—il y a une question d'éducation, d'information—mais également avec nos partenaires commerciaux qui n'ont peut-être pas la même vision de la biotechnologie et de la génétique, choses qui vont devenir réalité dans un avenir proche. Et pour moi, je dois dire que c'est passionnant. C'est un changement positif, mais il faut l'aborder positivement.

Monsieur le président, je vous remercie du temps qui m'a été accordé. Je sais que vous allez m'interrompre. Il y aurait mille autres choses, mais je crois avoir mentionné les principales sur lesquelles le comité devra se pencher au cours des douze prochains mois.

Le président: Merci.

Je vais maintenant accepter des questions de nos invités. Veuillez les poser au président, à l'intention de la personne que vous souhaitez. Je ne veux pas que nous nous engagions dans un véritable débat, mais si une question ou une réponse nécessite une réplique, je l'autoriserai. Je veux qui nous puissions entendre le plus grand nombre de questions possibles. Si vous avez une question à poser, faites-moi signe, ou indiquez-le au greffier.

M. Vernon Crawford: Monsieur le président, j'ai beaucoup de questions.

Nous avons récemment eu la possibilité de faire un voyage aux États-Unis où nous avons posé beaucoup de questions sur leurs programmes, les programmes de soutien interne, notamment, pour un total de quelque 64 milliards de dollars. Nous avons à peu près 10 p. 100 de la taille des États-Unis, ce qui fait que 6,4 milliards ne seraient pas déraisonnables.

La question que j'aurais, à l'intention de qui voudra bien y répondre—et comme je ne suis pas un producteur laitier, je vous prie de m'excuser si ma question est posée très simplement alors que l'industrie laitière est complexe. Il s'agit des matières grasses du lait. Je crois que la question a été portée devant le TCCE. C'est bien cela? En tant qu'agriculteur, je me demande pourquoi. C'est ma question. Pourquoi les députés que nous élisons, et qui ont autorité pour régler des problèmes aussi importants que celui-là pour l'industrie laitière, laissent-ils la décision à, disons, des bureaucrates?

Merci.

Le président: Monsieur Harvard.

M. John Harvard: Merci beaucoup. Je vais essayer de répondre.

Ce n'est pas un dossier facile. C'est peut-être une des raisons pour lesquelles il a été confié au TCCE. L'industrie laitière a fait savoir, au moins jusqu'ici, qu'elle ne se fera pas représenter devant le TCCE. Il nous semble que ce serait pourtant utile qu'elle le fasse.

On peut dire ceci: le commerce international est désormais basé sur des règles. Avec l'OMC, nous sommes devenus partie à un traité international qui nous oblige à respecter certaines règles. Nous avons désormais des obligations internationales, et les autres pays ont bien sûr des obligations semblables. Le gouvernement estimait donc que nous ne pouvions pas agir unilatéralement. C'est ce que demandait la Fédération canadienne de producteurs de lait. La Fédération estimait que nous pouvions tout simplement mettre les huiles de beurre dans une catégorie et un niveau donnés, et le tour était joué. Mais si nous faisons cela, nous nous exposons à des mesures de représailles et nous risquons de ne pas respecter nos obligations en vertu du traité.

• 1625

Alors, s'il est vrai qu'à court terme cela ne règle pas complètement le problème, le TCCE peut peut-être examiner la question sous tous ses angles, et nous donner, sinon la solution ultime, au moins de bonnes indications. Il devrait rendre sa décision d'ici la fin juin; attendons de voir ce qu'il en sera.

J'admets que c'est une question difficile, et nous verrons ce qui se passera après la décision du TCCE. Il faudra peut-être alors prendre une décision au niveau politique. Vous demandiez pourquoi ne pas prendre cette décision tout de suite? Il faudra peut-être en prendre une—et je ne sais pas ce qu'elle sera—après la décision du TCCE, mais cette démarche nous mettra peut-être dans une meilleure position. C'est un dossier épineux.

Le président: Ça va?

M. Vernon Crawford: Merci.

Le président: Au suivant.

M. Niels Holbek (Programme canadien de leadership en agriculture): Je m'appelle Niels Holbek et je viens de Colombie-Britannique.

Aucun des députés n'a parlé de la possibilité pour la collectivité agricole d'aider le Canada à respecter ses obligations en vertu de l'Accord de Kyoto. Je me demande si vous avez une opinion là-dessus, et en particulier en ce qui concerne l'autoretrait de gaz carbonique.

Le président: John, vous voulez essayer de répondre?

M. John Harvard: Je vais essayer.

Comme vous le savez, l'Accord de Kyoto fixe une cible, avec un échéancier, mais ne donne aucun détail. Nous n'avons pas encore les outils qui nous permettraient d'atteindre ces cibles. Et cela vaut non seulement pour l'agriculture, mais pour tous les secteurs de l'économie. J'espère que nous pourrons sans trop tarder mettre sur pied une sorte de programme pour l'agriculture, afin que nous puissions tous ensemble examiner ce qu'il convient de faire.

Il faudra donc nous accorder encore un peu de temps. Comme vous le savez sans doute, les éléments internes relèveront du ministère de l'Environnement. Pour ce qui est de nos obligations internationales, elles seront la responsabilité de M. Goodale, le ministre des Ressources naturelles.

Donnez-nous un peu de temps et vous verrez ce que nous proposerons. Je suis sûr qu'à ce moment-là il y aura un débat, et c'est très bien. Nous vivons en régime démocratique et au bout du compte, il est dans notre intérêt à tous qu'il y ait débat.

Le président: M. Benoit et M. Borotsik voudraient ajouter quelque chose.

Allez-y, monsieur Benoit.

M. Leon Benoit: Tout d'abord, vous avez raison de dire qu'il y aura là une possibilité de contribuer, notamment grâce au travail réduit du sol. Nous savons qu'une grande quantité de gaz carbonique s'échappe avec la perte des matières organiques dans le sol. On a pratiquement mis fin au problème, et il y a un redressement lent de la situation grâce à la réduction des travaux du sol.

À propos de l'éthanol, certains proposent qu'on en fasse une plus grande utilisation. Il faut être très prudent là-dessus et s'assurer que l'on ait bien tous les arguments scientifiques nécessaires.

Le malheur dans tout cela c'est que l'Accord de Kyoto n'aurait jamais dû être signé, et qu'il pourrait bien ne jamais être mis en vigueur. Il semblerait que les États-Unis n'aient pas l'intention de l'appliquer. Le Canada non plus. Le gouvernement fédéral aura besoin de l'appui de toutes les provinces, et nous savons qu'il y en a trois ou quatre qui ne donneront pas leur soutien, même si récemment il a été question qu'elles le fassent, mais cela a encore une fois changé. Il faut que toutes les provinces participent, et il se peut donc bien qu'il ne soit pas mis en oeuvre.

L'accord traite d'une question environnementale sur laquelle on n'a pas vraiment beaucoup d'informations scientifiques. Nous contestons donc la signature même de l'accord.

Il y a tellement de problèmes environnementaux graves qu'il faut régler en agriculture. Il y a beaucoup de questions très graves, et j'en ai mentionnées quelques-unes: il y a certainement l'élevage intensif dans les zones de culture; les pesticides, les engrais, leurs effets sur les nappes souterraines; la loi sur les espèces menacées d'extinction.

Les agriculteurs sont écologistes de nature. Ils l'ont toujours été, je crois. Ils ont parfois commis des erreurs, mais l'environnement leur tient à coeur et ils veulent bien faire.

• 1630

Le président: Monsieur Borotsik.

M. Rick Borotsik: Merci, monsieur le président.

Tout d'abord, permettez-moi de dire qu'il est facile de se cacher la tête dans le sable et de prétendre qu'il n'y a pas de problème environnemental. Je n'y crois pas. Je crois que le problème existe et que nous en avons les preuves scientifiques. À ce propos...

M. Leon Benoit: Qui a dit cela?

M. Rick Borotsik: Vous venez de dire que nous n'avons aucune preuve scientifique qu'il y ait effectivement un problème d'émissions de dioxyde de carbone. Je ne suis pas de votre avis. Je crois qu'il y a un problème.

Je ne pense pas que notre gouvernement et notre pays soient arrivés à Kyoto particulièrement bien préparés et qu'ils aient bien présenté leurs positions et leurs engagements. J'aurais souhaité que l'on pose toutes ces questions avant d'aller à Kyoto afin de savoir comment l'agriculture allait être touchée, de manière positive ou négative. Leon en a parlé très brièvement.

J'ai rencontré en Saskatchewan et au Manitoba des défenseurs des semis directs et ils m'ont dit qu'avec la méthode de semis sans labour, on peut obtenir une réduction de 7 p. 100 à 8 p. 100. C'est une possibilité à envisager. C'est une méthode de travail différente. Il faut être prêt à accepter les changements. Je crois que c'est très positif. Nous devons examiner cette possibilité.

Il y a aussi d'autres éléments très positifs actuellement pour l'agriculture dans l'environnement. Je suis désolé que le gouvernement ne l'ait pas mieux compris avant d'aller prendre des engagements à Kyoto. C'est tout ce que je veux dire par là. Le problème existe et il est évident qu'il va falloir le régler.

Le président: Bon. Murray, rapidement.

M. Murray Calder: Lorsque nous négocions avec d'autres pays en matière d'environnement, il nous faut aussi penser à la possibilité d'un système de crédits.

Le Canada exporte actuellement du gaz naturel aux États-Unis où il est utilisé dans la production d'électricité. Si nous n'exportions pas ce gaz naturel vers les États-Unis, on y utiliserait des combustibles fossiles, comme le charbon, et les émissions seraient beaucoup plus importantes. C'est donc là un avantage. Actuellement, nous faisons les frais de la transaction. Honnêtement, je crois qu'il faudrait avoir un meilleur système de crédits.

Deuxièmement, nous venons de soumettre notre propre exploitation agricole en Ontario à une évaluation environnementale afin de voir où nous en étions. C'est quelque chose que les agriculteurs devraient faire. Ça été une expérience enrichissante pour mon épouse et moi-même, car nous avons eu quelques surprises agréables, du point de vue environnemental. Il y a d'autres choses qu'il faut revoir et des petites modifications à apporter.

Tout cela peut être intéressant. Un système de crédits, par exemple, serait très utile pour encourager les biocombustibles comme le diesel vert, l'huile à deux temps et l'essence verte fabriquée à partir du canola. Je sais que ce n'est pas économiquement viable avec le marché actuel, mais si nous traversons une autre crise énergétique comme celle de 1997, nous ne serions plus dans la même position.

Le président: Merci.

Monsieur Shauf.

M. Marvin Shauf (Programme canadien de leadership en agriculture): Merci, monsieur le président, je m'appelle Marvin Shauf et je viens de la Saskatchewan.

Pendant les présentations, un certain nombre de choses ont été dites concernant les prochaines négociations de l'OMC.

Les États-Unis ont un programme qui, actuellement, verse environ 11 milliards de dollars par an aux producteurs, et bien qu'il soit découplé de la production directe, il n'est pas découplé de l'agriculture. Il faut être producteur pour en bénéficier. Dans le cas du blé, cela représente 72 cents ou 73 cents par boisseau de production antérieure. Au cours des prochaines années, le programme diminuera de 11 milliards à environ 4 milliards de dollars, mais il reste que les producteurs américains recevront tout de même des sommes considérables au cours des prochaines années.

J'ai donc deux questions. Premièrement: puisque nous devons être concurrentiels sur le marché mondial et sur le continent nord-américain, que fait le Canada pour aider ses producteurs à demeurer compétitifs pendant cette période? Deuxièmement: quelle sera la position du Canada concernant les programmes boîtes bleues et les programmes verts lors des prochaines négociations?

Le président: Monsieur Harvard.

M. John Harvard: Marv soulève là des questions très intéressantes, ce qui n'est pas surprenant. J'ai eu le plaisir de faire sa connaissance lorsque je suis allé au Saskatchewan Wheat Pool l'an dernier.

• 1635

Je dirai ceci. Le gouvernement fédéral se rend bien compte que les prochaines négociations de l'OMC seront difficiles. Les négociations d'Uruguay avaient été difficiles. On n'est pas allé jusqu'au bout de ce qu'il y avait à faire et nous aurons donc une prochaine ronde, comme je pense d'ailleurs qu'il y aura toujours une nouvelle ronde, si l'on peut dire. Je suis sûr que ces négociations ne vont pas régler tous les différends et tous les problèmes.

La position du gouvernement est très simple, en ce sens que nous n'avons pas arrêté de position pour l'instant et que nous ne le ferons pas tant que nous ne serons pas face à face. Nous n'arrêterons notre position que juste avant l'ouverture des négociations, et ce pour une bonne raison. Il nous faut profiter de chaque instant jusqu'à l'ouverture des négociations pour bien cerner les problèmes et comprendre quels sont ceux que perçoit le secteur de l'agriculture et de l'agroalimentaire—vous en avez déjà mentionnés quelques-uns—et quelles peuvent être les solutions envisageables.

Nous avons mis en place un processus. Nous avons invité les secteurs à venir exprimer leurs préoccupations, présenter leurs plans et leurs solutions. Le ministère a organisé des journées de discussion, des séances informelles, afin d'engager les gens dans le débat. Nous estimons que c'est par ce processus—et nous le faisons ici, en comité, mais le ministère le fait également à vaste échelle—que vers la fin de l'an prochain le gouvernement sera en mesure d'arrêter sa position de négociation.

Je suis sûr que lorsque nous la lancerons, nous ne ferons pas que des heureux. C'est la nature des négociations, surtout lorsqu'elles sont relativement publiques. Mais ce que nous avons prévu et nous pensons que c'est la bonne manière de procéder.

Plus il y aura de débats et de consultations avec tous les intervenants du secteur agricole au sens large, et mieux nous serons placés pour négocier.

Le président: Monsieur Benoit.

M. Leon Benoit: Je crois que vous avez touché là un sujet très important, pas seulement, mais surtout pour la gestion des approvisionnements. On s'inquiète de la possibilité qu'avec l'ouverture des marchés et l'accroissement de la concurrence, le commerce ne soit pas toujours équitable.

Les Américains sont de grands protectionnistes. Il y a les subventions; il y a les obstacles commerciaux qui n'ont pas tous bien été identifiés. On en a repéré un bon nombre, lors des dernières négociations du GATT, de l'ALENA, et ainsi de suite, mais on ne les a pas encore tous recensés. C'est pourquoi le Parti réformiste demande la création d'un sous-comité mixte de l'agriculture et du commerce international qui serait chargé justement de recenser toutes ces subventions cachées et autres pratiques commerciales déloyales qui ont cours aux États-Unis, afin d'être bien informés. Nous n'allons pas attendre pour cela le début des négociations en 1999. Nous saurons ce que nous pouvons exiger, et nous pouvons déjà commercer à en parler aux Américains, en leur faisant savoir quelles sont les choses que nous voulons régler.

Malheureusement, le comité a jusqu'ici refusé la création d'un sous-comité mixte. Le Comité du commerce international est d'accord. Cela me paraît important et j'espère que notre comité finira par accepter l'idée. Je crois que ce serait vraiment utile.

Le président: Si vous me permettez d'ajouter quelques mots, le comité a décidé l'automne dernier de rencontrer le plus grand nombre possible de représentants du secteur agricole au cours de l'année afin d'obtenir leurs points de vue sur l'Organisation mondiale du commerce et la position que devrait adopter le Canada. Nous transmettrons cette information au ministre et au ministère. C'est ce à quoi le comité se consacrera au cours des prochaines années.

En outre, sur la question qu'a mentionnée Leon, nous avons demandé au ministère de nous informer de toutes les subventions que les Américains accordent à leurs producteurs. Nous pourrons alors décider s'il y a lieu d'approfondir, de rechercher davantage d'information.

Jake, vouliez-vous ajouter quelque chose ou pouvons-nous passer à une autre question?

• 1640

M. Jake Hoeppner (Portage—Lisgar, Réf.): Je voulais simplement ajouter que nous devrions examiner la question de l'équité au niveau fiscal. Si vous considérez les taxes sur le combustible, et quelques autres...

J'habite à proximité de la frontière américaine. Quand vient le moment de sécher les grains, je sais que le propane me coûterait à peu près la moitié moins cher aux États-Unis qu'à Brandon.

Il faut résoudre ces problèmes-là, car les règles ne sont pas équitables pour les agriculteurs. C'est tout aussi important que vos subventions et vos programmes verts. Il faut bien accepter le fait que nous n'avons pas les moyens qu'a le Trésor américain.

Le président: Allez-y.

Mme Alanna Koch: Merci.

Ma question s'adresse aux députés de la majorité. Nous parlons sans cesse de changement. Le fait est que le monde change constamment, et que cela est probablement vrai pour toutes les industries, comme pour l'agriculture. Les agriculteurs ont probablement été les premiers à s'adapter—ils ont certainement devancer les négociations agricoles et sûrement le gouvernement.

Ma question a trait à la Commission canadienne du blé. Il est certain que le changement est inévitable. Ce qui nous frustre c'est que le gouvernement semble refuser le changement, refuser de voir qu'il est inévitable que les structures de commercialisation canadiennes changent.

Nous sommes frustrés par les obstacles qui semblent se dresser sur notre chemin vers une solution canadienne aux problèmes des agriculteurs. Nous avons vu récemment que la Commission ontarienne de commercialisation du blé a l'intention d'offrir un choix à ses producteurs. Nous n'avons pas ce choix dans l'Ouest. Je voudrais que les députés de la majorité nous disent pourquoi nous ne nous adaptons pas, pourquoi nous n'adoptons pas de solutions canadiennes aux problèmes que connaissent les producteurs de l'Ouest qui ne sont pas libres de choisir comment vendre leur blé et leur orge.

Il faut agir rapidement, car la Commission canadienne du blé va finir par s'auto-détruire; nous risquons en fait de perdre une très importante structure de marketing au Canada. Il faut pouvoir choisir. La décision doit être libre. Nous devons sans tarder adapter nos structures de marketing dans l'Ouest canadien. Sinon, nous risquons de tout perdre.

M. John Harvard: Madame, permettez-moi de penser que vous sous-estimez les modifications prévues par le projet de loi C-4. Si vous examinez ce projet de loi objectivement et attentivement, vous constaterez qu'il introduit toutes sortes de changements.

Je ne vais pas essayer de les énumérer tous ici, mais il y a par exemple les changements concernant la direction. Je sais que certains ont voulu ridiculiser cette modification qui donne la majorité des sièges au conseil d'administration aux agriculteurs, mais le fait est que c'est exactement de cela qu'il s'agit. Le conseil d'administration comptera 15 personnes, dont 10 élus par les agriculteurs. Ce sont donc eux qui contrôleront le nouveau conseil—et non le gouvernement. Il sera entre les mains des agriculteurs.

J'ai la plus grande confiance dans la communauté agricole. J'ai mentionné le nom de Marvin Shauf il y a quelques minutes. Les agriculteurs administrent les syndicats du blé des Prairies depuis des années, et ils ont fait un excellent travail à mon avis. Ils élisent leurs délégués, leur conseil d'administration. Je ne vois pas pourquoi ils ne pourraient pas en faire autant avec la Commission du blé.

Il se trouve que je suis l'un des défenseurs de la Commission. Il est possible, j'imagine, qu'à un moment donné le conseil d'administration décide qu'il ne veut plus de cet organisme, qu'il veut essayer autre chose. Qui sait? J'imagine qu'ils en auront le droit.

Vous avez parlé d'un système volontaire. Nous pensons—sauf votre respect, que cela ne peut pas fonctionner. Ce que prévoit le projet de loi C-4, lorsqu'il sera adopté, c'est un partenariat avec le gouvernement fédéral. Ce sera différent de toutes les agences de commercialisation du grain du secteur privé.

J'aimerais vous poser une question. La Commission, actuellement et en vertu du projet de loi C-4, du nouveau régime législatif, recevra du Trésor 6 milliards de dollars par an. Maintenant, pensez-vous que si le régime était volontaire, les agences du secteur privé accepteraient cela un instant? Et pourquoi le feraient-elles? Pourquoi les Cargills de ce monde devraient-elles recevoir l'aide du gouvernement fédéral, et d'autres non? Ne pensez-vous pas que nous serions très vite devant les tribunaux? Je dirais que oui, probablement dès le lendemain.

• 1645

Le fait est que, dans notre sagesse, nous avons estimé que les agriculteurs des Prairies souhaitent ce type de mécanisme de marketing et qu'ils veulent un partenariat avec le gouvernement fédéral.

Le projet de loi C-4 prévoit toutes sortes de nouveaux moyens de commercialisation que les administrateurs pourront décider d'utiliser ou non. J'aimerais simplement dire, et je répète ce que j'ai dit au départ: je crois que vous sous-estimez les changements qu'entraînera le projet de loi. De fait, ceux que par respect j'appellerai les traditionalistes pensent qu'il va trop loin. Vous savez probablement que le projet de loi C-4 a en fait divisé la collectivité agricole.

Il y a d'une part ceux qui veulent voir disparaître complètement la Commission—c'est-à-dire ceux qui disent «Il faut des systèmes parallèles, une commission volontaire». Et à notre avis, cela reviendrait dans la pratique à signer l'arrêt de mort de la Commission. Mais il y a d'autre part ceux qui ne veulent pas de gros changements parce qu'ils pensent que cela va finir par détruire la Commission.

Le gouvernement a essayé de trouver une solution de compromis et nous espérons que cela marchera. Je dirais que cela vaut la peine d'essayer et de voir ce que cela donnera. Je suis sûr que les agriculteurs sauront très bien le gérer.

Le président: Il y a encore quatre personnes qui voudraient poser des questions.

Mme Alanna Koch: Je sais. Disons simplement que nous restons chacun sur nos positions. Malheureusement, c'est le gagne-pain des producteurs de l'Ouest canadien qui est en jeu. Mais je vous remercie de cette réponse.

Le président: Bien. De plus, le Sénat va tenir des audiences dans l'Ouest.

Mme Alanna Koch: J'en suis informée. Merci.

M. Peter Volk (Programme canadien de leadership en agriculture): Bonjour. Je m'appelle Peter Volk, de la Saskatchewan.

On a parlé plus tôt du vieillissement des agriculteurs. Que voulons-nous faire du mode de vie rural? Ce n'est pas seulement une question de le préserver, mais voulons-nous que la terre soit travaillée par des agriculteurs ou par des grandes entreprises?

À mon avis, en Saskatchewan, et dans la plupart des régions des Prairies, la période pendant laquelle nous pouvons faire notre travail est très limitée. C'est différent de la situation aux États-Unis où les négociants ont un mois de plus pour gérer leurs cultures. Il faut savoir comment nous allons nous organiser et qui va gérer tout cela? Nous avons sauté une génération; les gens sont partis, du moins dans ma région.

Nous allons examiner la question de la recapitalisation de l'agriculture. Ce que les jeunes agriculteurs, ou même les moins jeunes, ne peuvent surtout pas se permettre, c'est de s'endetter. J'aimerais savoir ce que fait ou ce que va faire le comité pour régler le problème futur, ou actuel, de la recapitalisation de l'agriculture?

Le président: Laissons l'opposition répondre à cela.

M. Jake Hoeppner: C'est une question difficile, mais je peux essayer de répondre très rapidement. Laisser les agriculteurs gérer leurs propres affaires, comme ils l'ont fait dans le secteur des cultures spéciales, et ils pourront alors rester sur leurs terres.

J'ai reçu aujourd'hui une télécopie m'informant que l'orge de brasserie se vend à 2,60 $US le boisseau, soit 3,60 $. Cet agriculteur a reçu 1,72 $ et il est à distance de camionnage. Il pourrait le faire prendre à la ferme. Ça lui donnerait 1 $ de plus dans sa poche. C'est ce qui permettrait de garder les agriculteurs sur leurs terres.

Il faut aussi que le gouvernement accepte enfin que nous devons avoir des programmes verts. Il ne peut pas simplement nous enlever nos subventions pour le transport et s'attendre ensuite à ce que nous soyons compétitifs face aux Américains qui, eux, reçoivent 45 $ de l'acre. C'est ridicule. S'il ne permet pas aux agriculteurs de gérer eux-mêmes leurs affaires, alors il faut qu'il leur vienne en aide et qu'il leur offre le même genre de programmes qu'offrent les États-Unis, parce que ce sont eux nos concurrents. C'est aussi simple que cela, selon moi.

Le président: Monsieur Borotsik.

M. Rick Borotsik: Merci, monsieur le président.

C'est une excellente question, et je ne suis pas sûr qu'il y ait véritablement de réponse. Je crois que personne ne voit l'avenir dans une boule de cristal et la meilleure chose que l'on puisse répondre, c'est que la situation évolue. Nous parlons des changements en agriculture, dans les méthodes agricoles. C'est une évolution, et je ne crois pas que l'on puisse intervenir artificiellement pour l'influencer. Je ne crois pas que l'on puisse arrêter la progression des négoces agricoles ou des grandes entreprises par des mesures législatives.

Je me souviens que mon oncle exploitait 160 acres. Cela n'est plus possible aujourd'hui. Les exploitations sont très grandes. La production se fait à grande échelle. Les chiffres d'affaires et les investissements sont importants.

• 1650

Un certain nombre de petites exploitations ont été vendues récemment dans ma région. Elles vont être intégrées à des grandes entreprises commerciales. On ne peut pas intervenir artificiellement pour empêcher cela. Cela fait partie de l'évolution des choses. Il serait très difficile d'essayer d'arrêter cela par des mesures législatives.

Le gouvernement peut certainement adopter une politique en ce qui concerne la fiscalité et les possibilités de commercialisation. Il s'occupe de toutes ces autres choses positives, mais cela ne garantit pas nécessairement la survie de ces petites exploitations.

Peut-être que dans 20 ans nous reviendrons à des petites exploitations. Peut-être qu'il y aura davantage d'exploitations mixtes, au lieu d'avoir de grandes entreprises de céréaliculture. Je suis désolé, monsieur le président, mais personne ne peut lire l'avenir dans une boule de cristal.

Mme Wendy Bulloch: Tout d'abord, monsieur Borotsik, je manquerais à mon devoir si je ne mentionnais l'expansion de Westco, qui fait partie de ma compagnie.

M. Rick Borotsik: Oh oui, je suis désolé.

Mme Wendy Bulloch: Nous sommes quelques-uns ici autour de cette table à avoir des parts dans cette entreprise.

M. Rick Borotsik: À propos, Westco, 25 millions de dollars.

Mme Wendy Bulloch: Oui, merci.

Voici ma question à l'intention du comité. Au cours des dix derniers jours, ces participants du PCLA que vous avez devant vous aujourd'hui ont eu la chance extraordinaire de se rendre à Montréal, Albany (New York), Washington (D.C.) et Guelph. De toutes les discussions, il se dégage un fil conducteur, celui de la nécessité de faire face à la mondialisation, à la technologie et aux alliances stratégiques. J'aimerais savoir quels sont les alliances stratégiques ou les partenariats qu'envisage ce comité, surtout avec les consommateurs et les producteurs.

M. Rick Borotsik: C'est au président de répondre.

Le président: C'est une bonne question. Nous n'y avons pas vraiment beaucoup réfléchi.

Si l'on considère la situation globale au Canada, pour tout ce qui touche l'agriculture et les consommateurs, qu'il s'agisse de biotechnologie ou autre, cela fait partie du mandat de notre comité.

Cela va de soi. Ce n'est pas quelque chose qu'un autre comité n'a pas fait ou ne fera pas. Le producteur et le consommateur vont de pair, dans toute cette affaire, du moins en ce qui concerne le Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire.

M. Murray Calder: Je dirais que Wendy fait probablement partie de la réponse. C'est la raison pour laquelle vous participez à ce programme qui est très semblable au programme de leadership avancé.

Si nous voulons vendre nos produits dans le prochain millénaire, il nous faudra tout d'abord apprendre l'art des petites phrases. Évitons les acronymes. Il faut communiquer.

Si je dis cela, c'est parce que nous sommes maintenant au moins à trois ou quatre générations de ceux qui travaillaient véritablement la terre. Autrement dit, grand-père et grand-mère ne sont même plus à la ferme.

Prenez, par exemple, la question de la STB, dans le secteur laitier. Nous l'avons étudiée en comité. Nous avons obtenu un moratoire. Et il faut dire que nous l'avons obtenu parce que la recherche a porté sur le produit, et non sur la résistance des consommateurs.

Comme il y a actuellement moins de 3 p. 100 de la population qui travaillent la terre, il nous faudra apprendre à communiquer de manière concise et claire pour les consommateurs qui vont acheter leurs oeufs et leurs poulets et tout le reste à l'épicerie. Ils s'imaginent que c'est de là qu'ils viennent.

Ils voient des constructions. Vern pourra vous en parler à propos de l'aviculture. Les gens se demandent ce que nous faisons dans ces granges. Nous parlons de la biosécurité de nos fermes. Les consommateurs se demandent ce que cela veut dire. Ils se demandent pourquoi ils n'ont pas le droit d'entrer dans ces édifices. Ils nous voient encore en bleus de travail, avec chapeau de paille et un brin de foin au coin de la bouche. Ce fermier-là a disparu il y a 45 ou 50 ans. Vous faites donc aussi partie de la réponse.

M. Robert Ross: Je m'appelle Bob Ross et je suis producteur laitier dans le sud-ouest de l'Ontario. Mon produit est soumis à la gestion des approvisionnements. C'est une évidence.

La mondialisation n'est pas favorable à la gestion des approvisionnements. Si nous voulons assurer l'expansion de notre industrie, il va falloir beaucoup de quotas et d'investissements.

J'aimerais savoir si le gouvernement actuel envisage des politiques de gestion du risque qui permettraient de compenser la perte de valeur des quotas qui s'annonce à cause de la mondialisation.

Le président: Murray.

• 1655

M. Murray Calder: Pas actuellement. Pas que je sache. Mais en ce qui concerne l'industrie laitière, le problème des mélanges, par exemple, qui est devant le TCCE, si nous voulons protéger le régime de gestion des approvisionnements—et en tant qu'élu, c'est ce que je souhaite, car c'est dans mon intérêt: je suis aviculteur—il faut que les offices me donnent des arguments. Cela revient à cela. Les offices doivent aussi prendre la responsabilité d'agir.

À propos du TCCE, par exemple, si nous avons opté pour cette méthode, c'est que si l'on songe au yogourt et à la crème glacée, lorsque ces produits ont été inscrits sur la liste de contrôle des importations... Ils ont été rayés en 1989. Nous les y avons remis. Cela représente 10 p. 100 à 15 p. 100 de l'industrie laitière. Et disons-le, les États-Unis ne s'en sont pas rendus compte. Quand ils nous ont demandé de retirer cela, nous avons refusé, puisqu'ils avaient déjà signé. Ils ont porté l'affaire devant la Commission de règlement des différends qui nous a donné raison.

Dans l'affaire des mélanges, les torts sont partagés. Les négociateurs étaient là. La FPL était là; Richard Doyle y était. Personne ne s'en est rendu compte. C'est cela, la vraie réponse.

Et qui aurait pu penser que si l'on importait un mélange à 49 p. 100 d'huile de beurre au lieu de 51 p. 100, qui serait couvert par le 21.05...

M. John Harvard: Ce n'est plus un produit laitier.

M. Murray Calder: C'est exact.

Que je sache, il n'y a pas de plantation sucrière en Nouvelle-Zélande, et c'est donc quelque chose qu'il va falloir examiner. Et il n'y a pas seulement les mélanges d'huile de beurre, mais qui sait quoi d'autre?

Il est bon que l'affaire soit examinée par le TCCE. Jusqu'ici, nous avons toujours gagné, et nous voulons donc savoir quels sont les paramètres juridiques de cette affaire avant de la porter devant les tribunaux. Nous ne voulons pas avancer à l'aveuglette.

C'est vrai que la gestion des approvisionnements va être durement attaquée; je ne le nie pas. Mais les négociations d'Uruguay ont duré sept ans. Qui sait combien de temps il faudra cette fois-ci.

Ce que je souhaite, en tant qu'agriculteur, c'est que l'agriculture fasse l'objet de négociations séparées. Je crois que ce serait à notre avantage.

Le président: Monsieur Hoeppner.

M. Jake Hoeppner: Je voulais simplement ajouter quelque chose à cela. M. Calder a raison jusqu'à un certain point, mais au Parti réformiste nous avons prévenu le gouvernement qu'il fallait mettre en place un programme de transition en vue, spécialement, de retenir les jeunes producteurs laitiers. Les États-Unis sont bien plus gros. Le monde est bien plus gros que nous. Ils vont avoir toutes sortes de cartes de négociation que nous n'aurons pas.

C'est pour cela qu'il est tellement important d'harmoniser nos programmes agricoles avec ceux des États-Unis, car ils sont nos meilleurs défenseurs. Ils représentent probablement le plus gros bâton que nous puissions brandir devant les Européens, ou même les Asiatiques. Il est très important que nous ayons en place des programmes pour traverser la période de transition. Sinon, nous aurons vraiment des problèmes.

Le président: Sheldon Cooper.

M. Sheldon Cooper (Programme canadien de leadership en agriculture): Merci. Je suis céréaliculteur en Saskatchewan.

Monsieur Harvard, au risque de m'appesantir sur le projet de loi C-4, je sais que vous pensez que nous sous-estimons les changements que prévoit ce projet de loi, mais je vous répondrais que vous sous-estimez les besoins des agriculteurs de l'Ouest.

Mais je voudrais surtout que nous parlions du transport. Nous savons tous que le juge Willard Estey est en train de mener son enquête. Ce que j'attends de vous et de votre gouvernement, c'est que vous vous engagiez à agir lorsque le juge Willard Estey présentera des recommandations en faveur du changement du régime de transport, contrairement à ce que vous avez fait avec les conclusions du groupe d'étude sur la commercialisation des grains de l'Ouest.

Le président: Monsieur Harvard.

M. John Harvard: Je ne veux pas jouer les plaisantins, mais je présume que vous parlez de recommandations qui seront positives à vos yeux. J'imagine que vous trouverez certaines de ses recommandations positives et d'autre négatives. Le gouvernement devra exercer son choix. Cela fait partie de nos responsabilités.

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J'espère que le plus souvent nous serons du même avis que vous, que nous trouverons positif ce qui vous paraît l'être et que nous pourrons appuyer et adopter les recommandations du juge Estey. Je ne sais pas ce qu'il va recommander. Je sais qu'il jouit d'une grande estime. Les gens semblent avoir une grande confiance en lui. Il a beaucoup d'expérience, une excellente réputation. Espérons qu'il pourra nous proposer des solutions auxquelles personne n'avait pensé.

Au cours des deux ou trois prochaines années, les transports deviendront sans doute le thème numéro un dans les Prairies, et c'est normal. Maintenant que la LTGO a été abrogée, le système de transport du fret est plus important que jamais. J'ai grandi dans une ferme. Je n'ai pas gagné ma vie comme agriculteur, mais je crois être suffisamment informé de la diversité d'opinions qui règne dans les milieux agricoles, et je sais qu'il est difficile d'obtenir l'unanimité sur la question. Mais espérons que M. Estey nous présentera un excellent rapport, que nous pourrons appuyer ses recommandations et agir rapidement, avec votre soutien également.

Le président: Une dernière question, à la dame qui est au fond.

Mme Lee Pengilly (Programme canadien de leadership en agriculture): Je m'appelle Lee Pengilly et je viens du sud de l'Alberta.

Vous avez raison, monsieur Calder, qu'il est politiquement correct d'être éloigné de deux ou trois générations de ceux qui ont travaillé la terre et qui ne la labourent plus. Mais j'aimerais savoir, pour ma part, quelle est la position du comité concernant l'étiquetage des aliments génétiquement modifiés avec le Codex Alimentarius.

Des voix: Oh, oh.

Le président: Monsieur Harvard, savez-vous si le gouvernement va avoir une position?

M. John Harvard: Les spécialistes parlent d'OGM, organisme modifiés génétiquement. C'est un dossier qui est en cours. Comme vous le savez, nous avons eu un différend avec les Européens. Nous avons récemment obtenu quelques succès auprès des Français, mais il y a encore énormément à faire. Les progrès sont lents, mais nous estimons que les choses vont dans la bonne direction et que nous obtiendrons d'autres succès.

Mme Lee Pengilly: En tant que productrice certifiée de produits biologiques, je tiens à dire qu'il y a aussi des débouchés pour ceux d'entre nous qui souhaiteraient cet étiquetage.

M. John Harvard: Bon, d'accord.

Le président: Cela se fait aussi maintenant aux États-Unis; on y vend du lait marqué sans STB.

M. Murray Calder: Je voudrais apporter une précision. Actuellement, les producteurs biologiques n'ont pas de norme nationale, seulement des normes provinciales. Il serait bon pour votre industrie qu'il y ait une norme nationale reconnue, si vous envisagez l'exportation.

Mme Lee Pengilly: Oui. Merci.

Le président: Je tiens à vous remercier tous pour cet après-midi fort intéressant. Nous retrouverons quelques-uns d'entre vous demain matin.

Je tiens à rappeler aux membres du comité que le comité directeur se réunit demain pour parler de mes travaux futurs. Il y aura en outre une réception à 17 h 30 à la pièce 200. Les membres du PCLA invitent tous les membres du comité qui souhaiteraient y aller.

M. Rick Borotsik: Monsieur le président, la réunion de demain aura-t-elle lieu à l'Édifice de l'Ouest?

Le président: Pièce 269, Édifice de l'Ouest.

La séance est levée.