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AGRI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON AGRICULTURE AND AGRI-FOOD

COMITÉ PERMANENT DE L'AGRICULTURE ET DE L'AGROALIMENTAIRE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 20 novembre 1997

• 0903

[Traduction]

Le président (M. Joe McGuire (Egmont, Lib.)): Bonjour, mesdames et messieurs. La séance est ouverte.

Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous allons étudier l'importation de mélanges d'huile de beurre et de sucre.

La présente séance est une séance d'information. Il y a beaucoup de confusion autour de la question de l'importation de mélanges d'huile de beurre, laquelle concerne divers ministères. Nous allons entendre les témoins dans l'ordre où ils figurent sur l'avis de convocation. D'abord, nous allons entendre les représentants du ministère du Revenu national, M. Phil McLester et Mme Anna Doucet.

Nous allons essayer d'entendre autant de gens que possible. Il y aura une période de questions et réponses pendant laquelle vous pourrez vous poser des questions. Nous souhaitons que cet échange se fasse principalement entre les membres du comité et les témoins.

Nous pouvons commencer par entendre les témoins du Revenu national. Nous aimerions connaître l'origine de ce problème concernant l'importation des huiles de beurre, quelle en serait la solution, et quelle est son incidence sur la communauté que nous représentons ici: la communauté agricole et, bien sûr, les transformateurs et d'autres qui font partie du secteur agricole au Canada.

Commençons d'abord par M. McLester, si vous le voulez bien.

M. Phil McLester (directeur intérimaire, Politique de la nomenclature et du traitement tarifaire, ministère du Revenu national): Merci, monsieur le président.

Tout d'abord, si vous le permettez, j'aimerais donner une brève description de la classification de ce produit.

J'aimerais donc donner une brève description de la classification de façon générale, du tarif, et...

• 0905

Le président: Faites comme bon vous semble, pourvu que vous nous éclairiez sur ce sujet et que nous comprenions pourquoi cela vous pose un problème, pourquoi ce produit est ainsi classifié, etc.

M. Phil McLester: Merci beaucoup. À cette fin, je vais d'abord décrire les grandes lignes de la classification.

La classification est une discipline très stricte. Nous commençons par le tarif douanier, qui est notre principal outil. Le tarif lui-même est essentiellement un catalogue de denrées avec des descriptions, des numéros et des taux de droit de douane. Ce catalogue va généralement des matières premières, en passant par les produits intermédiaires, jusqu'aux produits finals. Il contient 98 chapitres, des rubriques à quatre chiffres, des rubriques à six chiffres, et les numéros tarifaires à huit chiffres. C'est au niveau du numéro tarifaire que nous discutons de ce produit, parce que c'est à ce moment-là que le taux de droit de douane est attribué. C'est un système hiérarchique, ce qui veut dire qu'il faut d'abord trouver la rubrique à quatre chiffres qui convient parmi toutes celles qui existent et descendre dans la classification à partir de là.

Notre système tarifaire n'est pas unique. Il se fonde sur le système harmonisé de désignation et de codification des marchandises de l'Organisation mondiale des douanes. Nous l'avons adopté le 1er janvier 1988. Nous devons utiliser leurs numéros à six chiffres, auxquels le Canada ajoute deux autres chiffres. Nous devons utiliser leurs règles et leur système de classification, auquel nous ajoutons nos chiffres supplémentaires de numéros tarifaires.

Les notes du chapitre du système harmonisé, qui, soit dit en passant, sont les notes qui vont de pair avec le système harmonisé de tarification, ont force de loi au Canada, et nous devons les appliquer intégralement. Le système harmonisé présente des faits à l'appui sur lesquels nous nous guidons—c'est-à-dire les notes explicatives. C'est un recueil d'avis de classification. Bien simplement, il y est question de produits qui ont fait l'objet d'un examen à Bruxelles, à l'Organisation mondiale des douanes, et qui ont été classifiés. Selon l'article 11 de la Loi canadienne sur les douanes, nous devons tenir compte de ces notes explicatives et de ces avis de classification.

La classification commence par une description complète et exacte du produit. Le facteur le plus important que j'aimerais souligner ici, c'est que les marchandises sont classifiées dans l'état où elles sont apportées, et non pas en fonction de ce qu'elles auraient pu être ou de ce qu'elles pourraient un jour être. C'est un facteur très important.

Puis nous utilisons le texte de loi—les notes, les règles, les notes explicatives, et les avis de classification—dans le but de trouver l'endroit le plus approprié où classifier ces produits donnés. Je dois aussi dire que les taux de droit de douane ne sont pas un facteur dans notre classification, car nous devons assurer la cohérence et nous ne pouvons pas nous laisser influence par cela. Naturellement, les taux de droit de douane sont établis par le ministère des Finances.

Le produit en question est un mélange d'huile de beurre et de sucre, contenant 49 p. 100 d'huile de beurre et 51 p. 100 de sucre. Nous en sommes arrivés à la conviction—et je pense d'ailleurs qu'à un moment donné Les Producteurs Laitiers du Canada, je crois, le pensaient aussi—que ces produits correspondaient à la description de la sous-rubrique du numéro 2106.90. La rubrique même vise des «préparations alimentaires non dénommées ni comprises ailleurs», et c'est une autre catégorie, autre que celle des protéines susmentionnées. Je pense qu'on s'entendait sur ce point.

La question alors est de voir où les classifier au niveau du numéro à huit chiffres, étant donné qu'une fois qu'on en est au niveau du numéro à six chiffres et qu'on est d'accord, on passe au niveau du numéro à huit chiffres. Nous avons les numéros 95 et 33 et 34. Or les numéros 2106.90.33 et 34 sont ceux qui ont été retenus par Les Producteurs Laitiers du Canada, et notre ministère a toujours classifié ces marchandises sous le numéro 95.

Nous ne contestons pas que le produit corresponde au numéro 95. C'est dans notre premier examen de la classification. Naturellement, bien sûr, nous avons d'abord commencé par examiner les numéros 2106.90.33 et 34. Dans ces descriptions, que je veux bien vous lire brièvement, c'est à peu près la même chose:

    préparations autres que celles correspondant aux numéros tarifaires 2106.90.31 et 2106.90.32, contenant plus de 15 p. 100 en poids de matières grasses du lait, mais moins de 50 p. 100 en poids de contenu laitier, pouvant servir de succédanés du beurre.

Il y a essentiellement quatre facteurs, à l'exclusion de cette référence aux numéros tarifaires. Deux de ces facteurs concernent la teneur du produit, lequel contiendrait plus de 15 p. 100 en poids de matières grasses et moins de 50 p. 100 en poids de contenu laitier.

• 0910

Que ce produit respecte ou non ces critères, il importe d'abord de voir s'il s'agit d'un succédané du beurre. C'est ce qui nous préoccupe dans la classification de ces denrées. Pour le faire, nous nous reportons à la jurisprudence courante, ce qui veut dire qu'en l'absence de définition législative, ce que nous avons fait et ce que les tribunaux ont fait—nos décisions sont soumises aux tribunaux—c'est que nous retenons le sens courant ou ordinaire de différents mots.

En l'occurrence, nos recherches ont relevé que le beurre avait trois grandes applications. Naturellement, nous étudions le cas d'un succédané du beurre.

On utilise d'abord le beurre pour tartiner. Deuxièmement, c'est un gras de cuisson. Troisièmement, c'est un ingrédient de cuisson. Un succédané devrait pouvoir, à notre avis, répondre à ces trois critères.

Dans le premier cas, nous concluons que ce produit n'est pas tartinable. C'est un produit cireux et granuleux. Par conséquent, nous ne pouvons pas le considérer comme un produit à tartiner.

Il ne peut pas non plus servir de gras de cuisson en raison de la présence de sucre. Il se produirait une caramélisation. On ne pourrait pas, à cette fin, s'en servir comme s'il s'agissait de beurre.

Le mélange d'huile de beurre et de sucre respecte toutefois le critère d'ingrédient de cuisson, mais seulement quand il faut une très forte teneur en sucre. On ne peut pas penser pouvoir utiliser ce mélange pour remplacer le beurre dans des recettes.

Il y a d'autres facteurs. L'un dÂeux était qu'il ne s'agit pas d'un produit commercialisé ou vendu en tant que beurre. Nous avons demandé à nos conseillers juridiques de se pencher sur cette question. Ils ont estimé qu'il y avait beaucoup plus de raisons pour classer ce produit sous le numéro tarifaire 2106.90.95.

Par ailleurs, nous avons préparé un examen extrêmement détaillé de la classification et l'avons soumis aux Producteurs Laitiers du Canada, aux importateurs et aux producteurs. Il n'y a pas eu la moindre réfutation. En fait, on n'a pas le moindrement tenté d'opposer une réfutation. On n'a pas reçu de rapports de témoins experts des Producteurs Laitiers du Canada alors qu'on en a reçu des importateurs. Ils appuyaient la classification sous le numéro 95. C'est celui qui n'est pas un succédané du beurre.

Le président: C'était en quelle année?

M. Phil McLester: En juillet de cette année.

Je suis sûr qu'il y aura des questions sur la classification, mais avant j'aimerais aborder un autre point. Il s'agit de notre système de classification.

La Loi sur les douanes prévoit un mécanisme de règlement des différends en cas d'appel des classifications. À l'interne, il y a au moins deux façons pour les importateurs d'en appeler d'une classification d'un produit qu'ils importent. Ils peuvent s'adresser à un agent désigné. Ils peuvent aussi s'adresser au sous-ministre, qui est en fin de compte responsable de tout changement qui pourrait survenir en raison d'un appel. Ce n'est pas une attribution du ministre; il y a eu dévolution.

À l'externe, et selon notre Loi sur les douanes, si quelqu'un s'estime lésé par une classification établie par notre sous-ministre, il peut en appeler au Tribunal canadien du commerce international. S'il n'accepte pas cette décision, il peut alors s'adresser à la Cour fédérale, puis à la Cour suprême du Canada. C'est prévu dans la Loi sur les douanes.

De façon générale, même si c'est défendable au Canada, il reste que le Canada est signataire du système harmonisé de désignation et de codification des marchandises de l'Organisation mondiale des douanes. Ce qui fait qu'un pays peut soumettre cette question, pour seule raison de classification, à titre de différend à l'Organisation mondiale des douanes, et nous devrions alors présenter une défense devant cette organisation.

Bien sûr, chez nous, il y a la possibilité de l'aspect tarifaire. Cela entraînerait un différend à l'Organisation mondiale du commerce, mais je laisserai le soin à nos collègues du secteur du commerce international de s'en occuper.

Je pense que nous avons exposé à peu près tout ce que nous avions à dire. Je suis maintenant disposé à répondre à vos questions.

Le président: Merci. Nous allons d'abord entendre les autres témoins, et nous poserons ensuite des questions.

Du ministère des Finances, MM. Darwin Satherstrom et Paul Robichaud.

• 0915

M. Darwin Satherstrom (chef, Division de la politique et du commerce international, ministère des Finances): Merci, monsieur le président, et honorables membres du comité. Je devrais peut-être reprendre une observation de M. McLester. Le tarif douanier établit les taux de droit de douane applicables aux produits importés, et le tarif douanier relève du ministre des Finances.

Les taux de droit de douane qui sont fixés dans le tarif sont approuvés par le Parlement, et dans certains cas le gouvernement a délégué le pouvoir d'abaisser les taux.

De façon générale, le pouvoir de hausser les taux est assujetti à nos obligations internationales. Dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce, le Canada et tous les autres pays ont accepté de soumettre leurs tarifs sur les produits agricoles à ces hausses.

Autrement dit, une partie ou un pays ne peut pas augmenter ses tarifs douaniers à moins de se soumettre à la procédure prévue à l'Organisation mondiale du commerce pour renégocier ce taux de droit de douane.

La règle veut que, pour y arriver, on doive négocier avec tous les fournisseurs et offrir une indemnité. Selon la pratique adoptée, cette indemnité est demandée et négociée dans des secteurs étroitement liés et doit être jugée acceptable par les pays fournisseurs. Si on ne respecte pas ces conditions préalables et qu'on augmente le taux de droit de douane sans avoir réussi à le renégocier, il pourrait y avoir rétorsion de la part des pays fournisseurs.

En ce qui concerne l'importation de marchandises provenant des États-Unis ou des partenaires de l'ALENA, on n'a pas le pouvoir de hausser les taux de droit de douane. L'ALENA ne le prévoit pas. À compter du 1er janvier, tous les produits visés par l'ALENA seront importés en franchise.

Je devrais peut-être m'en tenir là, et si vous avez des questions je me ferai un plaisir d'y répondre.

Le président: Nous voulons simplement connaître votre point de vue et le rôle que joue votre ministère dans cette question tant sur le plan général que sur le plan spécifique.

Nous allons maintenant entendre M. Jean Saint-Jacques, du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international.

M. Jean Saint-Jacques (directeur, Direction de la politique de réglementation du commerce, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Merci, monsieur le président, et honorables membres du comité.

Le ministère des Affaires étrangères est essentiellement responsable de la mise en oeuvre et de la gestion des contingents tarifaires qui ont été négociés par le Canada au cours de l'Uruguay Round et qui sont inclus dans notre liste tarifaire qui a été approuvée par le Parlement puis déposée à l'Organisation mondiale du commerce.

L'administration des contingents tarifaires est une responsabilité partagée. Revenu Canada classifie les produits; il administre aussi les importations à la frontière.

Le ministère est responsable de l'attribution des contingents tarifaires aux importateurs, puis il contrôle les importations à ce niveau. Les importateurs qui veulent bénéficier du taux de droit de douane réduit prévu par les contingents tarifaires doivent obtenir une allocation accordée par le ministre et demander des permis d'importation.

Essentiellement, c'est là la fonction des Affaires étrangères, et je suis disposé à répondre à vos questions à ce sujet. Merci, monsieur le président.

Le président: Nous allons maintenant entendre M. Mike Gifford et M. Steve Verheul, du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire.

M. Mike Gifford (directeur général, Direction de la politique de commerce international, Direction générale des services à l'industrie et aux marchés, ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire): Merci beaucoup, monsieur le président, et mesdames et messieurs les membres du comité.

La politique commerciale agricole est une responsabilité partagée entre les ministères concernés à Ottawa. C'est-à-dire que sur la question du tarif, c'est le ministère des Finances; sur la politique commerciale, c'est le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international; et pour les aspects agricoles, ces questions relèvent du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire. C'est là le cadre interministériel depuis 1947, année de la création du GATT.

J'aimerais simplement dire, monsieur le président, que pour ce qui est de notre connaissance particulière de cette question, M. Verheul et moi-même avons directement participé aux négociations de l'OMC au cours de l'Uruguay Round. Il était question de la conversion des quotas d'importation que nous avions à l'époque en équivalents tarifaires et en tarifs.

Nous sommes disposés à répondre à toutes les questions que le comité voudra bien nous poser, en ce qui concerne notamment l'histoire des négociations sur cette question. Merci.

Le président: Nous allons maintenant accueillir MM. Barron Blois, John Core et Richard Doyle, des Producteurs Laitiers du Canada.

• 0920

M. Barron Blois (président, Les Producteurs Laitiers du Canada): Merci, monsieur. Nous avons un mémoire à vous remettre, mais auparavant j'aimerais faire quelques déclarations.

M. Core fera l'exposé. M. Core travaille sur cette question à titre de représentant des producteurs depuis de nombreux mois. Cette question n'est donc pas nouvelle. Elle remonte à avril 1996, au moment où nous avons commencé à nous en préoccuper.

Tout au long des mois qui ont suivi, nous nous dirigions vers la contestation devant le groupe spécial de l'ALENA, et nous avons accepté de réserver notre avis jusqu'à ce que le groupe spécial ait rendu sa décision sur la question. À ce que nous sachions, les producteurs de tout le pays sont très préoccupés par la question. Cela leur a coûté des millions de dollars jusqu'à maintenant, même cette année. Ce qui est sans doute encore plus préoccupant, c'est que les transformateurs et les utilisateurs de ce produit qui ne s'en servent pas aujourd'hui vont très probablement se mettre à l'utiliser si l'on ne fait rien pour remédier à la situation.

Récemment, j'en ai fait l'expérience personnellement. Un transformateur de l'Est m'a dit que si la question n'est pas réglée bientôt, il n'aura d'autre choix que de renoncer à utiliser des céréales fraîches pour opter pour quelque chose de ce genre afin de pouvoir concurrencer sur le marché les autres compagnies qui s'en servent.

Les données que nous avons montrent donc en quoi consiste le problème maintenant, mais il risque aussi de s'aggraver considérablement dans les mois qui viennent à mesure que d'autres transformateurs commenceront à faire de même.

Nous croyons que dans notre exposé il y a un secteur que vous devriez voir. D'après notre expérience au groupe spécial de l'ALENA, nous aimerions dire qu'il y a une bonne raison pour laquelle cette question devrait être examinée et réglée.

Je vais céder la parole à M. Core pour l'exposé, puis nous pourrons répondre à vos questions.

M. John Core (premier vice-président, Les Producteurs Laitiers du Canada): Merci, monsieur le président. Tout d'abord, j'aimerais réitérer ce que Barron a dit.

Dans tout le pays, quand on tient une réunion de producteurs de lait, l'une des grandes questions qu'on nous pose est celle de savoir si le gouvernement du Canada a pris des mesures en ce qui concerne la question des mélanges d'huile de beurre et de sucre. C'est une question brûlante pour les producteurs, et ils attendent une réponse. Nous sommes ici aujourd'hui pour essayer de fournir de l'information afin de pouvoir enfin recevoir des réponses pour régler cette question cruciale.

Les Producteurs Laitiers du Canada représentent 25 000 producteurs laitiers canadiens qui essuient actuellement chaque année des pertes de revenus approchant les 50 millions de dollars en raison de l'importation de cette denrée. Depuis plus de 18 mois, nous demandons au gouvernement fédéral de mettre un terme à l'importation de ce type de produit.

Il ne fait aucun doute que ces mélanges ont été inventés—«inventés» est bien le mot—afin de contourner les contrôles actuellement imposés sur l'importation des produits laitiers. Mentionnons deux faits très simples: d'une part, l'huile de beurre ne constitue pas un ingrédient traditionnel dans la fabrication de la crème glacée; d'autre part, la proportion de 49 p. 100 d'huile de beurre et de 51 p. 100 de sucre ne répond pas aux besoins de cette fabrication. Cela suffit à prouver que la véritable intention des importateurs est bien de contourner les contrôles frontaliers, et non pas d'améliorer les processus de fabrication.

À la suite de la création de l'OMC, le Canada a décidé de soutenir ses systèmes de gestion de l'approvisionnement par le biais de l'attribution de numéros tarifaires aux marchandises auparavant désignées dans la liste de marchandises d'importation contrôlée et aux marchandises conçues pour échapper à l'objectif de ces contrôles.

L'huile de beurre fait présentement l'objet d'un contingent tarifaire. Quant au sucre, il est également assujetti à certaines mesures de contrôle des importations. Revenu Canada a décidé de classer les mélanges à base d'huile de beurre et de sucre à une ligne tarifaire omnibus, qui ne prévoit aucun contrôle à l'importation de préparations alimentaires; une telle décision est contraire à toute logique, et elle ne tient pas compte des négociations antérieures concernant les lignes tarifaires applicables aux produits laitiers.

Quand je me tiens devant un groupe de producteurs laitiers et qu'ils me demandent comment il se fait que l'huile de beurre n'est pas importée en franchise, ou presque en franchise, et comment il se fait que le sucre n'est pas admis en franchise, et comment il se fait qu'on peut mélanger les deux produits et soudainement les importer... Cela dépasse l'entendement; aucun producteur laitier n'arrive à comprendre pourquoi. On n'a pas besoin d'arguments juridiques et on n'a pas besoin de manoeuvres bureaucratiques pour l'expliquer. Cela n'a tout simplement aucun sens. On ne peut pas prendre deux choses qu'on ne peut pas admettre en franchise, les mélanger, puis les admettre en franchise. C'est contre toute logique.

Les producteurs laitiers ne peuvent plus supporter de voir leurs marchés et leurs revenus rognés par ces importations en raison d'un laxisme de la part du gouvernement fédéral. Par le passé, les tentatives des fabricants de crème glacée d'importer des mélanges similaires faits de crème et de sucre ont été mises en échec sous prétexte que ces mélanges étaient contraires à l'esprit des contrôles.

• 0925

Mais lorsque notre organisme a demandé que l'on prenne des mesures semblables pour ces produits-là, nous avons constaté que Revenu Canada n'avait aucunement l'intention d'agir. On nous a fait rebondir de Revenu Canada à Agriculture Canada et au bureau du premier ministre, en passant par le Commerce international et les Finances, pour nous renvoyer à Agriculture Canada. Entre-temps, l'inaction du gouvernement a permis une augmentation de 488 p. 100 de ces importations depuis 1995.

Si ces choses sont si formidables, pourquoi ne s'en servait-on pas en 1995 et auparavant? Je pense que si vous pouvez répondre à cette question vous pouvez répondre à toute la question du contournement des règlements.

Il en est résulté une cannibalisation du marché national du lait industriel de 2,6 p. 100 l'année dernière. L'accélération de cette tendance continue à coûter aux producteurs plusieurs milliers de dollars en manque à gagner pour chaque journée d'immobilisme gouvernemental. Les discussions techniques sur cette question doivent prendre fin. Tous les arguments présentés par notre organisme ont été ignorés ou rejetés. Nous avons retenu les services d'un avocat spécialisé en droit commercial et présenté aux ministres de l'Agriculture, du Commerce international, du Revenu et des Finances un mémoire qui, d'après nous, contient des arguments solides pour une action immédiate.

Le gouvernement fédéral a déjà établi que de tels produits devraient faire l'objet de contrôles à l'importation, car ils sont conçus pour miner la stabilité des prix, qui forme l'objectif des programmes canadiens de gestion des approvisionnements. Cela faisait partie de la discussion et de l'argumentaire du groupe spécial de l'ALENA. Avec la mise en place des nouveaux contingents tarifaires du Canada, notre pays a introduit de nouvelles lignes tarifaires empêchant de tels produits mélangés de contourner les règlements. Ces lignes ont été intégrées à la liste finale des engagements présentée par le Canada lors de l'Uruguay Round et acceptée par tous les signataires.

La méthode et les justifications invoquées par le Canada pour établir ces lignes tarifaires ont été combattues par les États-Unis lors de la dernière séance du groupe spécial de l'ALENA. Or, le groupe a accepté l'approche canadienne, qui consiste à convertir en tarifs les contrôles d'importation relevant de la Liste de marchandises d'importation contrôlée et à établir des lignes tarifaires afin d'empêcher les mesures de contournement. Comme le gouvernement fédéral l'a dit au groupe spécial de l'ALENA, Les Producteurs Laitiers du Canada réclament que les mélanges à base d'huile de beurre et de sucre soient immédiatement reclassés à la ligne tarifaire 0404.90.

La ligne tarifaire 0404.90 concerne:

    les produits se composant de constituants du lait naturel, qu'ils contiennent ou non du sucre ajouté ou tout autre type d'édulcorant, et qui ne sont ni précisés, ni inclus ailleurs.

Les États-Unis ont affirmé que cette ligne tarifaire ne reflétait pas les contrôles d'importation qui existaient avant l'accord de l'Uruguay Round, mais le Canada a fait valoir de façon convaincante que le retrait du seuil précédent de 50 p. 100 de cette ligne tarifaire était conçu pour permettre au Canada, et je cite le mémoire du Canada:

    pour permettre au Canada de répondre à un problème qui était apparu au moment même de l'Uruguay Round: les efforts concertés de certaines entreprises privées d'importer des mélanges spécialement conçus pour contourner les contrôles à l'exportation de produits laitiers.

Par conséquent le gouvernement a déjà soutenu que cette ligne tarifaire avait été conçue pour lutter contre l'importation de mélanges similaires aux produits à base d'huile de beurre et de sucre qui nous concernent actuellement.

Je dois ajouter que quand nous avons commencé à discuter de la question, quand nous avons soumis le problème aux différents ministères, nous avons discuté des succédanés du beurre et des différentes lignes tarifaires, et on nous a en fin de compte mis au défi d'intenter une poursuite sur cette question. Nous avons intenté une poursuite relative à la ligne tarifaire 0404,90 et il s'est donc passé des choses pendant que nous poursuivions ces discussions pour essayer de trouver quelle était la ligne tarifaire appropriée pour ces produits.

Il existe trois façons d'aborder cette situation. En premier lieu, Les Producteurs Laitiers du Canada peuvent présenter leur cas directement au Tribunal canadien du commerce extérieur, et l'atteinte d'une solution peut prendre trois années. Sinon, le gouvernement fédéral peut demander au TCCE de donner une interprétation, processus qui peut également prendre trois années. Enfin, le gouvernement fédéral peu reclasser ce produit à la ligne 0404.90, ce qui mettrait immédiatement fin aux importations; alors, ceux qui veulent contourner les contrôles frontaliers canadiens pourront se défendre devant le TCCE pendant trois ans.

Les deux premières façons d'agir ne devraient même pas être considérées, car elles mèneraient à une érosion continue et injustifiée des marchés canadiens et représenteraient bien plus de 150 millions de dollars en manque à gagner sur les revenus des producteurs.

• 0930

Le gouvernement aurait tout à fait raison d'agir immédiatement contre ces exportations, et ce, pour les raisons suivantes: l'historique des négociations commerciales indique clairement que de tels produits auraient été inclus à la ligne 0404.90; deuxièmement, les États-Unis ont déjà mis en doute la validité de cette ligne tarifaire devant le groupe spécial de l'ALENA, et ils ont perdu; troisièmement, la politique gouvernementale consiste à soutenir la gestion des approvisionnements de produits laitiers, qui justement est minée par de telles importations; quatrièmement, les importations de ces produits ne servent qu'à contourner les contrôles frontaliers du Canada afin de trouver des solutions de rechange plus économiques aux matières grasses du beurre, même si les produits de crème glacée ne font en fait aucune concurrence à ces importations; cinquièmement, le prix des matières grasses du beurre n'a pas augmenté depuis que ces mélanges sont importés; et enfin les consommateurs n'ont tiré aucun avantage de l'importation de matière grasse du beurre à prix réduit, comme le montre le fait que l'indice des prix à la consommation pour la crème glacée a augmenté de 4,3 p. 100 depuis janvier 1995, malgré le fait que les importations de mélanges à base d'huile de beurre et de sucre ont augmenté de 488 p. 100 pendant cette période, et que les coûts nationaux de la matière grasse du beurre n'ont pas bougé.

Par conséquent, Les Producteurs Laitiers du Canada demandent respectueusement au comité permanent de faire tout ce qui est en son pouvoir pour persuader le gouvernement d'utiliser les outils dont il dispose. Les Producteurs Laitiers du Canada sont lésés, et ils attendent une action rapide pour mettre fin à cette situation.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup.

Nous passons maintenant aux transformateurs et au représentant d'Unilever Canada, M. Don Jarvis.

M. Don Jarvis (conseiller commercial, Unilever Canada Limited): Merci, monsieur le président, et honorables membres du comité. Je représente aujourd'hui les fabricants de crème glacée. Je suis conseiller commercial chez Unilever Canada. Je suis accompagné de Mme Kathryn Rowan, vice-présidente chez Nestlé Canada, et de M. Jim Summers, directeur de la recherche, du développement et de l'assurance de la qualité à la division de la crème glacée chez Good Humor-Breyers. S'il y a des questions auxquelles je ne peux pas répondre au cours de la table ronde, je suis sûr que vous me permettrez de les appeler à l'aide.

Nestlé ou Unilever ne sont pas les seuls fabricants de crème glacée. Il y en a plusieurs autres qui s'intéressent à cette question.

Unilever Canada fait partie du groupe de sociétés Unilever. Sa division Good Humor-Breyers fabrique de la crème glacée emballée, des friandises glacées, du yogourt glacé et des desserts glacés, et elle distribue ces produits à l'échelle nationale sous les noms commerciaux de Good Humor, Popsicle, Breyers, Dickee Dee et Richard D's.

La société Unilever emploie plus de 3 500 personnes dans tout le Canada, et plus de 2 000 d'entre elles s'occupent de la transformation des aliments. Nestlé Canada a des effectifs très semblables. Je crois qu'elle emploie 4 000 personnes, presque toutes dans la transformation des aliments. Good Humor-Breyers emploie plus de 600 personnes uniquement dans la fabrication de crème glacée.

Au cours des trois dernières années, la société Good Humor a investi considérablement dans la fabrication de crème glacée au Canada. Il y a plusieurs années, elle achetait la division de la crème glacée de Beatrice Foods, et depuis trois ans elle a investi plus de 25 millions de dollars dans son usine de Simcoe, en Ontario, pour l'améliorer et en faire une installation de classe mondiale.

Des investissements similaires témoignent de l'engagement continu des fabricants de crème glacée au Canada. De plus, ces sociétés sont les principaux acheteurs d'ingrédients chez Les Producteurs Laitiers du Canada.

Les fabricants de crème glacée s'opposent fortement à tout changement qui augmenterait les droits d'importation sur cet important ingrédient. Ils appuient les arguments énoncés notamment par Revenu Canada en ce qui concerne la classification tarifaire actuelle.

Cette initiative des Producteurs Laitiers du Canada visant à modifier la classification tarifaire a pour but d'empêcher les fabricants de crème glacée d'accéder à cet ingrédient important et peu coûteux. Si elle est acceptée, elle équivaudra à une mesure unilatérale de la part du Canada pour imposer une nouvelle restriction commerciale, car ces produits n'étaient pas assujettis au contrôle des importations avant la mise en oeuvre de l'Accord sur l'Organisation mondiale du commerce en 1996.

Plus précisément, se rendre à la requête des producteurs laitiers augmenterait sensiblement les coûts de production des fabricants de crème glacée, car il existe une différence d'au moins 1 $ par kilogramme de matière grasse butyrique entre ce que nous payons actuellement pour l'huile de beurre et ce que nous coûte normalement le beurre.

• 0935

En somme, telle est la position des fabricants de crème glacée, et nous avons hâte de participer à la table ronde.

Je vous remercie.

Le président: Merci, monsieur Jarvis.

Enfin, les importateurs, monsieur Donald Kubesh.

M. Donald Kubesh (représentant intérimaire et associé, Stikeman-Elliott; International Dairy Ingredients Inc.): Monsieur le président et honorables membres du comité, je représente les importateurs, c'est-à-dire l'International Dairy Ingredients Inc.

La société International Dairy Ingredients—que j'appelle «l'importateur»—est gérée par M. Douglas McEwen, qui s'occupe du commerce, de l'importation et de la distribution de produits alimentaires depuis 10 ou 15 ans. Comme son nom l'indique, la société se spécialise dans l'importation et la distribution de produits laitiers au Canada.

L'importateur a fait en sorte que le mélange, constitué à 49 p. 100 d'huile de beurre et à 51 p. 100 de sucre, soit fabriqué en Nouvelle-Zélande et importé au Canada. Il est importé essentiellement comme ingrédient pour les fabricants de crème glacée. C'est un produit de qualité, assujetti aux mesures de contrôle néo-zélandaises et aux contrôles des importations canadiennes. Son principal avantage est d'être un ingrédient peu coûteux pour la crème glacée et de représenter pour le transformateur une solution de rechange aux produits nationaux à faible coût.

D'où provient ce produit? Contrairement à ce que certains producteurs laitiers ont déclaré, il a été conçu au début des années 90 parmi d'autres types de mélanges utilisés comme solution de rechange aux produits nationaux. La faiblesse des quantités au début des années 90 est due au fait qu'il y avait un certain nombre de mélanges concurrents qui étaient importés au Canada à l'époque. Comme l'a dit M. Gifford, en 1995 l'OMC a mis fin à l'importation de certains de ces mélanges concurrents en imposant des contingents tarifaires élevés, que le Canada a acceptés. Cependant, ce produit, placé sous le numéro tarifaire 2106.90.95, n'a pas obtenu un contingent tarifaire élevé. Autrement dit, la situation n'a pas changé en 1995.

À l'époque, étant donné que l'on a cessé d'importer un certain nombre des mélanges concurrents, les transformateurs et les importateurs ont recouru à la classification tarifaire intacte portant le numéro 2106.90.95. Depuis 1995, comme l'a indiqué M. Core, nous avons constaté une augmentation du volume d'importation de ce mélange.

Voici quelques chiffres approximatifs relatifs aux importations. Avant 1995, nous importions un peu moins de 1 000 tonnes, selon les cours mondiaux; parfois, les importations dépassaient 1 000 tonnes, mais elles étaient généralement inférieures. En 1995, elles avoisinaient les 2 000 tonnes; en 1996, près de 4 000 tonnes; et en 1997, c'est-à-dire cette année, nous prévoyons un maximum s'établissant entre 8 500 et 10 000 tonnes. La demande de ce produit pour la fabrication de crème glacée au Canada est probablement de 10 000 tonnes au maximum. La raison en est que cet ingrédient ne compte que pour 25 p. 100 dans la fabrication de la crème glacée. Nous estimons que chaque année on utilise à peu près 48 000 tonnes d'huile de beurre au Canada pour produire de la crème glacée. Le quart de ce chiffre s'élève à 12 000 tonnes. Nous n'en importons pas autant.

• 0940

Il y a plusieurs raisons à cela. Certains transformateurs n'utilisent pas le mélange. Une partie de leur clientèle exige certains types de crème glacée. Le Canada ne peut produire que 10 000 tonnes au maximum, et plus probablement entre 8 000 et 9 000 tonnes.

Qu'est-ce que cela signifie pour le secteur laitier au Canada? Vous savez que ce secteur a un chiffre d'affaires de 8 ou 9 milliards de dollars. Nous avons calculé ce que coûte la matière grasse du beurre pour ce mélange. En prenant le pire des scénarios, ou le meilleur scénario pour les producteurs laitiers, voici nos chiffres.

Si l'on remplace les 10 000 tonnes d'huile de beurre par les importations et si l'on estime que le produit canadien coûte à peu près 6,30 $, cela représente une perte de 31 millions de dollars pour les producteurs laitiers. Comme je l'ai dit, c'est le meilleur scénario pour eux. Il faudrait faire un autre calcul en ce qui nous concerne.

Si nous remplaçons cette quantité de matière grasse canadienne par les importations, nous exportons notre production au prix mondial. L'exportation du produit canadien rapporterait probablement aux producteurs laitiers près de 18 millions de dollars. En soustrayant ensuite les 18 millions de dollars de la perte de 31 millions de dollars, on obtient la perte réelle nette pour les transformateurs canadiens.

Il ne s'agit donc pas ici d'un important déficit commercial—pas du tout—quand on sait que la production de ce secteur au Canada avoisine les 8 ou 9 milliards de dollars.

Je vais dire quelques mots sur la classification. Comme je l'ai dit, nous avons commencé à ajouter du sucre dans ce mélange au début des années 90 pour desservir les transformateurs canadiens et leur fournir des produits de rechange peu coûteux. Pour ce faire, nous devons être prudents. Mon client, International Dairy Ingredients, doit être prudent.

Nous avons consulté Revenu Canada pour obtenir la confirmation que les produits que nous importions étaient correctement classifiés d'après les règles canadiennes et internationales en vigueur. C'est grâce à cette confirmation que nous avons importé ce mélange d'huile de beurre au début des années 90.

Après la conclusion de l'Organisation mondiale du commerce, avec tous les changements, tous les contingents tarifaires et toutes les interdictions qui ont été ajoutées à ce moment-là pour protéger l'industrie nationale... Il s'agissait de protections substantielles, car, comme je l'ai mentionné, on a empêché l'importation au Canada de tout un ensemble de mélanges concurrents après 1995, et il ne restait plus que notre mélange d'huile de beurre qui n'était pas assujetti à un contingent tarifaire élevé.

Après 1995, j'ai conseillé à mon client de retourner à Revenu Canada pour obtenir deux autres confirmations que ce mélange d'huile de beurre était correctement placé sous le numéro 2106.90.95. À ce moment-là, j'ai avisé mon client qu'il avait le droit d'importer ce mélange au Canada. C'est ainsi qu'il a contribué à importer, comme je l'ai dit tout à l'heure, de 8 000 à 9 000 tonnes au total, dont sa part est d'environ 3 000 à 4 000 tonnes par an. D'autres importateurs et transformateurs importent la différence.

Nous avons donc respecté toutes les exigences. Nous avons développé une activité, nous avons fourni une solution de rechange peu coûteuse, et ce n'est pas un secteur important.

• 0945

À notre avis, voici ce que les producteurs laitiers tentent de faire avec la reclassification. De toute évidence, si l'on reclassifie ce produit pour leur donner un contingent tarifaire élevé, il deviendra absolument impossible d'importer ce mélange du point de vue commercial.

Selon les cours mondiaux, selon la demande de dollars canadiens au Canada, la marge—comme l'a dit mon collègue, M. Jarvis—est d'un dollar. Actuellement, la différence entre la fabrication d'un produit national, qui est exactement le même que notre mélange importé... et notre mélange importé est de 50c. canadiens en raison de la baisse de notre dollar et de la hausse du prix des produits laitiers sur le marché international.

Ainsi donc, les marges ne sont pas énormes; les bénéfices non plus. Il s'agit de petits bénéfices que l'on réalise normalement sur toute importation. La reclassification dans quelque contingent tarifaire que ce soit, comme l'ont demandé les producteurs laitiers, éliminerait complètement cette solution de rechange qu'est l'importation.

Quelles en seraient les conséquences? Si l'on procède à la reclassification en ce moment, nous aurons des difficultés avec certains de nos principaux partenaires commerciaux au sein de l'ALENA et de l'OMC. Pourquoi? Parce que ce produit est fabriqué en Nouvelle-Zélande, aux États-Unis et en Europe. Tous suivent le recours américain à l'OMC au sujet des produits laitiers, dont M. Gifford a parlé. C'est un défi pour le nouveau système canadien de gestion des approvisionnements.

Si nous y ajoutons une nouvelle interdiction, je suis convaincu que les Américains la prendront au sérieux et l'examineront dans le cadre de leur objection générale aux obstacles qu'érige le système canadien de gestion des approvisionnements face à leurs produits. Il en est probablement de même pour la Nouvelle-Zélande. Autrement dit, nous risquons d'avoir un problème commercial.

Tout compte fait, nous avons une importation légitime; elle est correctement classifiée. Elle est peu coûteuse. Elle représente de 15 à 20 p. 100 des matières grasses du beurre utilisé dans la crème glacée canadienne. Elle est économique pour les consommateurs. Si l'on fait obstacle à son importation, cela pourrait entraîner des problèmes commerciaux.

Je vous remercie.

Le président: À titre d'éclaircissement et avant de donner la parole à M. Penson, ce produit n'est pas importé à 100 p. 100 de la Nouvelle-Zélande. Provient-il également des États-Unis?

M. Donald Kubesh: Il provient des États-Unis, du Mexique, de l'Europe et de la Nouvelle-Zélande.

Le président: Cela concerne donc l'Organisation mondiale du commerce et l'Accord de libre-échange nord-américain.

M. Donald Kubesh: Absolument.

Le président: Une partie du produit que vous importez provient-elle du Canada?

M. Donald Kubesh: Non.

Le président: Je vous remercie.

Allez-y, monsieur Penson.

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Merci, monsieur le président. Je souhaite la bienvenue à tous les témoins. Vous représentez différents secteurs, et je pense que cela va rendre le débat intéressant.

N'en déplaise à nos producteurs laitiers, il n'est pas vraiment étonnant que l'on assiste à ce genre de recours, vu notre système de gestion des approvisionnements. Je me demande comment nous allons utiliser notre temps de façon constructive.

À la veille des prochaines négociations de l'Organisation mondiale du commerce sur l'agriculture, nous devrions utiliser notre temps de façon un peu plus constructive en examinant l'accès au marché des États-Unis. Nous devrions parler des restrictions afin de déterminer la façon de commercer librement de part et d'autre du 49e parallèle, au lieu d'envisager le genre d'initiative que nous entreprenons ici.

Nous avons des obligations en matière de commerce international. Le Canada a déposé ses tarifs, et je voudrais en savoir un peu plus de la part des ministères des Finances et du Revenu.

Nous avons déposé nos tarifs à l'Organisation mondiale du commerce, à l'instar de tous les autres pays. Si nous essayons de les modifier maintenant, cela va causer d'autres frictions.

À cet égard, je voudrais demander à M. McLester, du ministère du Revenu national, et à M. Satherstrom, du ministère des Finances, ce qu'il en est de nos obligations internationales une fois que nous avons déposé nos tarifs. Si tous les pays décidaient de s'y pencher, qu'arriverait-il? Cela ne compromet-il pas l'accord international? J'aimerais connaître le processus.

• 0950

Tout d'abord, quels sont nos engagements dans le cadre de l'OMC après l'adoption de ce tarif et son examen par d'autres pays? Quelle est la procédure à suivre pour le modifier maintenant et quelles en sont les conséquences? Je voudrais que les représentants des ministères des Finances et du Revenu répondent à ces questions.

M. Darwin Satherstrom: Essentiellement, si nous voulions augmenter un tarif qui n'était pas censé augmenter en vertu de l'OMC—et c'est le cas de tous les produits agricoles—nos partenaires commerciaux prendraient des mesures de représailles, à moins que nous n'ayons d'abord renégocié une telle augmentation. Pour renégocier, il faut suivre une procédure établie par l'OMC. Il faut en aviser l'organisation. Il faut indemniser les fournisseurs. Il faut s'asseoir et négocier effectivement.

En cas d'échec de la renégociation, si l'on met en oeuvre les changements voulus, les partenaires commerciaux peuvent demander d'avoir le droit de prendre des mesures de représailles contre vos exportations. D'après mon expérience, les autres pays ciblent d'habitude des produits dans des domaines connexes s'il y a lieu.

M. Charlie Penson: Dans des domaines connexes comme le secteur laitier dans ce cas-ci?

M. Darwin Satherstrom: D'après mon expérience, c'est ce que d'autres pays font lorsqu'ils sont touchés par des mesures adoptées par une autre partie. S'ils estiment être lésés et s'ils sont incapables de régler le problème, ils usent de rétorsion. Ils le font dans un domaine connexe et tentent ainsi d'attirer l'attention de la partie contrevenante.

M. Charlie Penson: Dans le même ordre d'idées, je pense que c'est vous, monsieur Satherstrom, qui avez dit que nous n'avons essentiellement pas de tarif dans l'ALENA en ce moment. Qu'adviendrait-il à cet égard si nous devions modifier notre contingent tarifaire? Cela exposerait-il le secteur agricole dans le cadre de l'ALENA?

M. Darwin Satherstrom: Je présume que oui. L'ALENA, comme vous le savez, exclut certains produits. Ces produits ont été défendus par le groupe spécial sur la gestion des approvisionnements. Tous les autres produits visés par l'ALENA et provenant des États-Unis ne sont assujettis à aucun tarif ou sont assujettis à des tarifs très faibles en 1997, et à compter du 1er janvier 1998 ils seront admis en franchise. Si vous changez le statut d'un produit en le faisant passer d'un tarif faible ou d'une franchise au statut d'exclusion, cela change les règles du jeu en ce qui concerne les États-Unis et n'importe quel autre pays, j'en suis sûr.

Le président: Voulez-vous que les producteurs laitiers vous répondent?

Monsieur Core.

M. John Core: Monsieur le président, nous ne demandons pas au gouvernement du Canada de faire ce que M. Penson a laissé entendre. Tout ce que nous demandons, c'est que le gouvernement donne une classification différente au produit. Nous ne préconisons pas le changement de notre structure tarifaire ni des tarifs que nous avons soumis à l'OMC, etc. Nous disons simplement que le produit n'est pas classé dans la bonne catégorie.

La réponse a porté sur la modification de notre offre tarifaire, et ce n'est pas ce que nous demandons.

Pour ce qui est de l'ouverture d'esprit et de l'examen d'autres questions relatives à l'avenir de la gestion des approvisionnements, Les Producteurs Laitiers du Canada font des progrès considérables dans la modification du système. Nous demandons au gouvernement du Canada de respecter l'accord commercial qu'il a signé. Nous ne parlons pas des conséquences du prochain accord commercial; nous parlons de celui qui a été signé. Il est en place. Le Canada doit défendre ce qu'il a négocié.

Si ce débat avait lieu aux États-Unis et si un groupe de producteurs laitiers comparaissaient devant un comité du Sénat, on commencerait par fermer la frontière et poser des questions. Voilà ce à quoi nous pensons. Nous voulons que le Canada applique ce qui a été négocié, et non pas ce qui va se négocier la prochaine fois.

Dans le secteur laitier, nous avons apporté des changements considérables afin d'accroître notre compétitivité, notre flexibilité, etc. En ce qui concerne l'accès au marché américain, lorsque les États-Unis cesseront de subventionner leur agriculture, les producteurs canadiens de lait seront en mesure de soutenir la concurrence.

M. Charlie Penson: Monsieur Core, j'estime que nous utiliserions notre temps de façon plus constructive en essayant d'obtenir cet accès au lieu de mener un combat d'arrière-garde. Vous dites que vous voulez simplement changer la classification tarifaire. Cela mène au même résultat que j'ai mentionné. Il me semble que votre initiative est vouée à l'échec et qu'elle ne représente pas un usage constructif du temps des personnes concernées.

• 0955

M. John Core: Monsieur Penson, je respecte votre position, mais ma préoccupation est la suivante. Vous avez entendu les fabricants de crème glacée dire que leurs importations sont passées à 10 000 tonnes. J'ai appris hier qu'un fabricant canadien de fromage fondu utilise maintenant un mélange d'huile de beurre et de sucre importé du Mexique.

M. Charlie Penson: Cela ne devrait pas vous étonner.

M. John Core: La question est beaucoup plus vaste. Qu'en sera-t-il demain?

Je reviens aux propos de M. Kubesh. Il a dit qu'il est allé à Revenu Canada au début des années 90 pour demander si la proportion de 49 p. 100 ou de 51 p. 100 était acceptable. S'il avait effectivement demandé si un mélange composé à 51 p. 100 d'huile de beurre et à 49 p. 100 de sucre était acceptable, on aurait dit non, mais puisqu'il s'agissait d'un mélange à 49 p. 100 et 51 p. 100 respectivement, on a dit oui. A-t-il fait exprès pour contourner les règles? Absolument. On a contourné sciemment les règles en 1990. Il en est de même en 1997.

Le président: Merci, monsieur Core.

Monsieur Benoit.

M. Leon Benoit (Lakeland, Réf.): Monsieur Core, je pense que c'est vous qui avez dit que les arguments techniques invoqués dans ce dossier ne signifient rien pour les producteurs laitiers, et je peux comprendre. Vous dites que c'est absurde d'importer sous forme de mélange des produits que l'on ne peut pas importer séparément.

Bien des fois, j'ai été déçu de l'inaction du gouvernement quand on lui présente un argument logique. Cependant, dans ce cas-ci, la situation est compliquée par les accords commerciaux internationaux—l'ALENA et l'OMC—que le gouvernement a signés. Il a signé des accords. Cela complique davantage les choses et rend le changement plus difficile, même si la volonté existe.

Je pense que nous avons déjà mentionné ce produit. Les importateurs disent que c'est le seul produit qui puisse être importé sous forme de mélange. Craignez-vous qu'il puisse y avoir d'autres produits que les transformateurs peuvent mélanger afin de les importer? Si ce produit est le seul, en le contestant, ne vous exposez-vous pas à une vive contestation de la part des États-Unis et d'autres pays, contestation qui pourrait causer plus de tort que le fait de permettre le maintien de ce seul produit?

Le président: Soyez bref, monsieur Core, et nous passerons ensuite à M. Chrétien.

M. John Core: Le gouvernement du Canada avait déjà présenté ces arguments en déposant son offre tarifaire à l'OMC; il a présenté ces arguments lors des négociations relatives à l'ALENA, et il a déposé les offres tarifaires en comprenant bien qu'elles visaient à empêcher que l'on contourne les règles. Ce produit est un contournement des règles. Le gouvernement du Canada a soutenu cet argument au sein du groupe spécial de l'ALENA; celui-ci lui a donné raison et a rejeté la demande des États-Unis.

De toute évidence, nous craignons l'importation d'autres mélanges semblables. Quand nos négociateurs sont revenus du GATT, ils nous ont dit qu'ils avaient clairement mis en place les mesures de contrôle nécessaires pour empêcher le contournement des règles par l'utilisation de mélanges. Voilà ce qu'ils nous ont dit à leur retour. Maintenant, nous demandons au gouvernement de respecter l'engagement qu'il a pris.

Le président: Monsieur Chrétien, vous avez 10 minutes.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac—Mégantic): Oui, merci beaucoup, monsieur le président.

Monsieur le président, ce matin nous sommes confrontés à un problème majeur qui frappe de plein fouet des producteurs laitiers de tout le Canada. Lorsque nous regardons les quantités qu'on a importées au cours des trois dernières années sous le biais de ce mélange d'huile de beurre, on constate qu'en 1995-1996, on a doublé les importations, et que de 1996 à 1997—et l'année 1997 n'est pas terminée, monsieur le président—on fait plus que doubler les importations. Alors, si je fais une projection, d'ici quatre à cinq ans, on aura grugé quelque 20 p. 100 du quota des producteurs laitiers. C'est très inquiétant et ceux-ci sont inquiets. La valeur de leurs quotas risque de diminuer et leur production et leurs revenus, bien sûr, en seront grandement affectés.

Monsieur le président, lorsque le Canada a adhéré à l'OMC en décembre 1993, nous avions fixé des tarifs pour conserver notre marché interne, ce qu'on appelle communément la gestion de l'offre.

• 1000

Le premier ministre la défend avec beaucoup de vigueur semble-t-il. Le ministre de l'Agriculture de la 36e législature, Lyle Vanclief, s'est également engagé hier à défendre l'intégrité et le ministre du Commerce extérieur va dans la même voie. Et on se rend compte, par un subterfuge, d'une mauvaise classification qui ne nous aide pas du tout nous, les agriculteurs.

Là, on est rendus à un point tel qu'on double depuis trois ans, année après année, l'importation de l'huile de beurre. Je m'étonne ce matin, monsieur le président, de voir d'imminents fonctionnaires de quatre ministères. Et c'est quand même étonnant que le ministère de la Santé ne soit pas représenté ce matin.

Il y a 18 mois, l'association des transformateurs disait devant le Comité de l'agriculture qu'elle ne voulait pas de STBr dans les produits. L'Association des consommateurs du Canada ne souhaitait pas elle non plus voir de STBr dans ses produits. Quelles garanties nous donnez-vous ce matin que lorsque vous importez 8 500 tonnes d'huile de beurre, qu'il n'y a pas de STBr? Est-ce que vous nous enfoncez dans la gorge de la crème glacée contenant de la STBr? Est-ce que vous l'indiquez sur les contenants?

J'ai trois enfants et nous sommes donc cinq chez nous. On achète différentes sortes de crème glacée. Parfois, on achète des produits maison portant l'identification de la chaîne de magasins et trois fois sur quatre, ça se dirige vers les poubelles. Ça coûte un peu moins cher, bien sûr, mais on nourrit la poubelle qui ne nous dit jamais merci. Et pour quelques sous de plus, on va acheter une marque reconnue; ça c'est de la bonne crème glacée.

Je ne sais pas si cette crème glacée à un prix moindre est faite avec de l'huile de beurre, mais je peux vous certifier qu'il y a certaines crèmes glacées sur le marché qui sont de qualité médiocre. Et je suis convaincu que l'Association des consommateurs, donc les premiers intéressés, vont vous désavouer; j'en suis convaincu.

Alors, voici ma question: est-ce que vous pouvez nous garantir que la crème glacée que vous nous faites manger quotidiennement depuis quelques années est absolument indemne de STBr?

[Traduction]

M. Don Jarvis: Oui, je crois que je comprends la question relative à la STBr, mais je pense qu'il faudrait faire venir quelqu'un de Santé Canada pour y répondre en détail.

Le président: Nous éliminerons le beurre.

M. Don Jarvis: Je pense qu'il le faut.

Le président: Cependant, la question...

Monsieur Chrétien.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien: Je vous pose à nouveau ma question: est-ce que vous pouvez nous garantir que dans l'huile de beurre que vous importez, qu'il n'y a pas de STBr? Oui ou non? J'aurai d'autres questions.

[Traduction]

M. Don Jarvis: Qu'entendez-vous par sans STBr?

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien: Au Canada, on n'a pas le droit d'utiliser l'injection de la somatotrophine bovine à nos vaches pour obtenir plus de lait, sous prétexte que Santé Canada n'est pas encore fixé sur les normes de qualité totale sur le lait. Nos producteurs laitiers se sont disciplinés et on n'utilise pas la somatotrophine bovine pour augmenter nos revenus. Mais si, en contrepartie, on importe des produits qui contiennent de la STBr, Santé Canada pourrait les bloquer aux douanes.

[Traduction]

M. Don Jarvis: Monsieur Chrétien, je pense qu'il s'agit d'une hormone naturelle que l'on retrouve dans tous les produits laitiers; je ne comprends donc pas très bien votre question. C'est un sujet complètement différent.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien: Mais, il y a 18 mois, les représentants des transformateurs s'objectaient à ce qu'on utilise la STBr.

• 1005

Je crois que vous représentez les mêmes transformateurs.

[Traduction]

Le président: M. Gifford va peut-être apporter quelques éclaircissements.

M. Mike Gifford: Merci, monsieur le président.

Si je ne m'abuse, l'utilisation de la STBr est interdite dans la production laitière aussi bien dans la Communauté européenne qu'en Nouvelle-Zélande. Elle est permise aux États-Unis.

Le président: Monsieur Chrétien.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien: Monsieur le président, je vais m'adresser maintenant aux deux représentants de Revenu Canada.

Le problème qui surgit, c'est évidemment la classification, donc une question de virgules et de points. Vous semblez dire qu'il serait possible de ramener la classification de l'huile de beurre à un point—je n'ai pas les chiffres exacts, mais je crois que ce sont 90 et 35—et que la tarification serait nettement supérieure. À ce moment-là, selon M. Jarvis, il serait moins intéressant pour le groupe qu'il représente d'en importer.

Est-ce que c'est une volonté politique qui vous empêche d'agir? Si c'est une volonté politique, dites-le nous aussi clairement que vous êtes capable de vous exprimer, et on va voir à faire bouger nos producteurs laitiers dans ce sens et à faire le travail qui s'impose.

Depuis plusieurs mois, je suis assailli presque hebdomadairement lorsque je descends dans ma circonscription par les producteurs laitiers. C'est un problème majeur; il faut le régler et ça presse parce que je vous rappelle que cela double tout le temps. C'est votre ministère qui en est le grand responsable. Lorsqu'en décembre 1993 on a signé l'entente qui est devenue l'OMC, il était entendu qu'on sauvait la gestion de l'offre dans le poulet, les produits laitiers et les oeufs.

[Traduction]

M. Phil McLester: Merci, monsieur Chrétien.

En ce qui concerne la classification du produit, notre politique consiste à respecter la loi. Je me souviens que M. Core, à qui j'ai parlé plusieurs fois auparavant, a indiqué qu'en raison du mélange il y avait contournement des règles et de nos obligations en vertu de l'OMC. En même temps, je signale que nous sommes un ministère administratif et qu'un phénomène de cette nature n'est contraire aux règles qu'en cas d'infraction à la loi.

Par exemple, c'est un phénomène assez inhabituel, mais il arrive que nous ayons un produit composé d'un transporteur et de trois polymères différents en petites proportions, et qu'il soit classifié selon l'ingrédient prédominant dont le tarif douanier est plus élevé. Si l'importateur peut créer un produit à partir d'un polymère différent à un taux inférieur, il le fera. Il fabriquera ce produit et l'importera.

Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, nous devons classifier les produits selon leur composition au moment de l'importation. Malheureusement, ou heureusement, nous ne pouvons pas tenir compte des intentions.

Pour ce qui est de la classification 2106.90.95, nous avons indiqué que nous y tenons beaucoup, et je note que Les Producteurs Laitiers du Canada ont mentionné qu'ils recherchent maintenant la classification 0404. Nous venons de recevoir à ce sujet un important mémoire des PLC, et nous comptons l'examiner très attentivement. Toutefois, je puis indiquer qu'un autre pays a déjà soulevé la question du 0404 devant l'Organisation mondiale des douanes, et cette organisation a décidé que les produits en question n'étaient pas des éléments naturels du lait parce qu'on les transforme pour obtenir du beurre et de l'huile de beurre. Par conséquent, ce n'est donc pas un constituant de base si on le sépare de la façon normale.

Il a donc été décidé qu'il s'agissait de biens visés par 2106.90. Cela étant, nous allons examiner cette question très attentivement, mais je dois vous dire qu'il y aura une décision qui sera prise à Bruxelles et que le Canada devra respecter en conformité avec ses obligations en vertu de la convention sur le SH.

Le président: Monsieur Core.

• 1010

M. John Core: J'ai deux observations à faire. Nous aimerions bien voir cet accord qui sera conclu à Bruxelles. On en a parlé à bien des reprises, mais nous ne l'avons jamais vu. Nous ne savons pas de quoi il s'agit.

Ma deuxième observation est que, s'il ne s'agit pas d'un constituant ou d'un composant du lait, pourquoi alors voit-on la mention «composants du lait» sur tous les emballages de crème glacée vendus au Canada? On n'y parle pas d'huile de beurre. Je vous mets au défi de trouver un contenant de crème glacée au Canada où la mention mélange d'huile de beurre et de sucre est incluse dans la liste des ingrédients. Il n'y en a pas. On dit «composants du lait»; alors ce doit être un composant du lait.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien: Monsieur le président, je voudrais rappeler qu'on fait indirectement ce qu'on n'a pas le droit de faire directement. Alors si, par exemple, on n'avait pas le droit d'importer une bouteille de 40 onces et qu'on en importe deux de 20 onces, alors on respecte la loi. Ça me fait penser un peu à cela.

Maintenant, je reviens encore à mes transformateurs, puisque c'est vous ma tête de Turc ce matin. Comment pouvez-vous expliquer, par exemple, que vous économisez beaucoup en important de l'huile de beurre et que le prix de la crème glacée a quand même augmenté de 4,3 p. 100 au cours de ces dernières années, alors qu'au contraire, il aurait dû diminuer?

[Traduction]

Le président: Brièvement, monsieur Jarvis.

M. Don Jarvis: Je ne peux pas vous dire ce qu'il en est du prix de certaines crèmes glacées en particulier, mais je puis vous assurer que le marché est très compétitif.

Vous vous demandez si les transformateurs cherchent à vendre leur produit au plus bas prix possible. Le mieux que je puisse vous dire pour répondre à votre préoccupation, c'est que beaucoup de fabricants de crème glacée se servent actuellement de ce mélange. S'ils s'en servent, c'est parce qu'il s'agit de composants plus économiques; comme il a été expliqué.

Le président: Le prix de la crème glacée augmente-t-il effectivement?

M. Don Jarvis: Je ne le sais pas.

Le président: Vous ne le savez pas?

Monsieur Harvard.

M. John Harvard (Charleswood—Assiniboine, Lib): Merci, monsieur le président. J'apprécie la présence des témoins ici aujourd'hui. Je considère que la séance d'aujourd'hui est une séance d'information, et j'espère pouvoir poser deux ou trois questions qui nous aideront à mieux comprendre le problème dont nous sommes saisis et peut-être aussi certaines des solutions possibles. Je dis bien «possibles», parce que le problème semble être complexe.

Ma première question s'adresse à un des représentants du gouvernement—je ne sais pas si ce sera M. Gifford ou quelqu'un d'autre—et elle fait suite à une déclaration faite par M. Core, des Producteurs Laitiers. J'espère que je le citerai correctement. M. Core a dit qu'il y avait une ligne tarifaire dont le gouvernement pouvait se servir. Autrement dit, il disait finalement que le gouvernement utilisait simplement la mauvaise ligne tarifaire et qu'il suffirait d'utiliser une autre ligne tarifaire pour régler le problème.

Pourriez-vous répondre à cela, monsieur Gifford ou monsieur McLester?

M. Phil McLester: Il y a bien sûr cette autre ligne tarifaire dont Les Producteurs Laitiers parlent et qui se trouve au chapitre 04, le chapitre sur les produits laitiers. Il y a aussi celle que nous avons nous-mêmes mentionnée, à savoir la 2106.90.33/34. Cette ligne tarifaire est assortie d'une description qui doit correspondre aux produits en question. Nous devons donc nous assurer de la compatibilité avec tous les éléments de la description, qui précise que les produits doivent être des succédanés du beurre.

Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, tous les avis juridiques que nous avons reçus, de même que notre interprétation et les notes explicatives de l'Organisation mondiale des douanes, qui nous servent de guide et que nous devons respecter dans notre interprétation du tarif, nous mènent à croire que le produit en question n'est aucunement un succédané du beurre. Il n'existe donc pas de ligne tarifaire que nous pouvons utiliser. Comme vous l'avez laissé entendre, je crois qu'il faudrait créer une ligne tarifaire par voie législative.

M. John Harvard: Monsieur McLester, dans le cas de certains produits laitiers...

Le président: John, vous voulez une autre réponse à cela?

M. John Harvard: Si elle est courte.

M. Barron Blois: Nous demandons simplement qu'on tienne compte des conclusions découlant de la décision du groupe spécial de l'ALENA. Nous demandons qu'on en tienne compte à la lumière du fait que le Canada a soutenu avec succès que, dans les cas où des produits étaient constitués de manière à contourner un tarif, ils pouvaient être classés sous le numéro tarifaire 0404.90. Nous avons demandé au ministère d'examiner cette possibilité.

• 1015

M. John Harvard: Monsieur McLester, si je comprends bien, dans le cas de certains produits laitiers, comme le lactosérum et le babeurre, les lignes tarifaires précisent que ces sous-produits du lait doivent continuer à être considérés comme tels même quand on y ajoute du sucre. Pourquoi alors la réglementation tarifaire ne contient-elle pas la même précision dans le cas du beurre et des sous-produits du beurre?

M. Phil McLester: En ce qui concerne la classification du beurre et des produits du beurre, nous avons déjà au chapitre 21 une rubrique résiduelle indiquant des succédanés du lait, de la crème ou du beurre aux numéros 31 jusqu'à 33 et 34 et d'autres préparations au numéro 95. Il est précisé ici que les préparations alimentaires non ailleurs dénommées sont incluses, de sorte qu'il s'agit en quelque sorte d'un classement résiduel pour ces produits. La mention au chapitre 04 vise en fait l'inclusion du sucre, et il s'agit à ce moment-là d'une mention juridique aussi bien.

M. John Harvard: Dans son témoignage, M. Core a exprimé une certaine incrédulité, disant que nous avons des contrôles qui s'appliquent à l'importation des produits laitiers, que nous en avons qui s'appliquent au sucre, et que ces mélanges contiennent des produits laitiers et du sucre, mais que pour une raison quelconque ils ne sont pas visés. Pouvez-vous répliquer à cette incrédulité qu'il a exprimée?

M. Phil McLester: Ce que vous dites est parfaitement exact, monsieur Harvard. Nous avons des produits du beurre qui, en eux-mêmes, seraient inclus comme produits soumis à un contingent tarifaire, de sorte que le tarif de douane serait extrêmement prohibitif. Par ailleurs, les importations de sucre sont aussi soumises à un certain nombre de contraintes.

Comme je l'ai dit au départ, nous classifions les marchandises en fonction de l'état dans lequel elles sont importées. Ainsi, dans le cas de ces deux produits qui sont un mélange, par exemple, si on en modifie la composition et qu'on y ajoute du chocolat, ce serait sans doute un chapitre différent du système harmonisé qui s'appliquerait d'après la loi actuelle et d'après nos accords internationaux. Je suis désolé, mais c'est ce que prévoit la loi dans pareil cas.

Si, pour contourner le tarif, on importait des mélanges qui étaient destinés à être séparés, ou quelque chose de ce genre, le ministère de l'Agriculture interviendrait alors pour faire enquête.

Ce n'est toutefois pas le cas ici. L'huile de beurre est utilisée telle quelle dans le processus. Aussi on ne peut pas conclure que le mélange constitue une tentative de fraude du fait qu'on mélange deux produits qui seraient difficiles à importer pour en faire un produit moins difficile à importer. Ce serait là une autre question.

M. John Harvard: Vous avez dit tout à l'heure qu'on ne peut pas se fier aux intentions. Ne peut-on pas y voir cependant le signe qu'on viole l'esprit d'un traité, d'un accord commercial? Si on fait quelque chose d'une façon qui ne viole pas les articles de la loi, mais qui, aux yeux de personnes sensées, viole manifestement l'esprit d'un accord, n'y a-t-il aucun recours possible?

M. Jean Saint-Jacques: Monsieur Harvard, si je comprends bien, et je m'en remets ici aux connaissances de mes collègues, l'engagement exécutoire se trouve contenu dans le tarif qui a été soumis à l'Organisation mondiale du commerce.

Comme l'a expliqué M. McLester en ce qui a trait à la classification, le Canada est aussi partie à l'Organisation mondiale des douanes, qui détermine les règles de la classification des produits.

Je ne sais pas si l'un ou l'autre de mes collègues souhaite répondre à cela.

M. Mike Gifford: Monsieur le président, pour ce qui est de contourner le tarif, nous avons déjà eu des cas de produits qui n'étaient pas des produits en tant que tels—balles de golf et poudre de lait. Manifestement, il s'agissait d'importer le mélange de balles de golf et de poudre de lait, d'extraire les balles de golf pour se servir de la poudre de lait et de renvoyer les balles de golf.

Vous pensez qu'il s'agit là d'un exemple artificiel et amusant, mais je vous en donne un qui est encore meilleur et qui est tout à fait réel. Il y avait autrefois ce qu'on appelait un mélange à soupe qui était constitué de sel marin et de poudre. Le mélange était importé. Le sel en était physiquement séparé et renvoyé. Le sel retournait donc de l'autre côté de la frontière.

• 1020

Il s'agissait là d'un produit artificiel qui visait à contourner le tarif et que Revenu national considérait comme tel. D'après ce que j'en sais, cependant, les règles d'interprétation des douanes stipulent que tout produit qui n'est pas artificiel doit être classifié selon les pratiques habituelles de classification. Voilà le dilemme.

Prenons un autre exemple, celui des pizzas surgelées. Le fromage qui se trouve sur la pizza surgelée est manifestement soumis à un tarif élevé en vertu d'un contingent tarifaire, mais quand le fromage est importé comme garniture de la pizza surgelée, il est classifié comme pizza surgelée. Voilà le dilemme auquel nous nous heurtons aujourd'hui, monsieur le président.

Le président: Merci.

Nous passons maintenant à M. Bachand, pour cinq minutes.

[Français]

M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC): Merci beaucoup, monsieur le président.

Monsieur M. Jarvis, finalement, doit-on comprendre que le fameux mélange dont on parle ce matin entre uniquement dans la fabrication de la crème glacée et qu'il n'a absolument aucune autre application que celle qu'on connaît aujourd'hui? Est-ce que c'est vrai?

[Traduction]

M. Don Jarvis: Oui. Unilever Canada, par exemple, utilise ce mélange uniquement dans la fabrication de la crème glacée. Je dois bien insister là-dessus: il s'agit d'une faible proportion des ingrédients. Il ne s'agit que d'un faible pourcentage de tous les ingrédients qu'on utilise dans la fabrication de la crème glacée. La plupart des ingrédients qu'on trouve dans la crème glacée d'Unilever Canada sont en fait achetés ici au Canada.

[Français]

M. André Bachand: Plus tôt, on avait cru comprendre qu'il y avait un maximum par rapport à ce qui se produit présentement au Canada. On parle d'un maximum du mélange de l'ordre de 10 000 tonnes. Est-ce vrai aussi?

[Traduction]

M. Don Jarvis: M. Kubesh a donné le chiffre global, mais je sais qu'Unilever a accumulé cette année une réserve de ce produit. Tout dépend du moment auquel on l'achète. La compagnie a effectivement l'intention d'en acheter moins l'an prochain, de sorte qu'en moyenne le maximum se situerait entre 8 000 et 10 000 tonnes.

[Français]

M. André Bachand: D'accord. Il y a beaucoup de travail à faire au niveau des douanes, des tarifs douaniers et du commerce extérieur. Est-ce que l'industrie qui importe ce produit pourrait s'engager aujourd'hui à importer une quantité maximale, par exemple un maximum de l'ordre de 10 000 tonnes? Est-ce que vous seriez prêt à vous engager aujourd'hui selon les témoignages que vous avez reçus?

[Traduction]

M. Don Jarvis: Je ne peux pas parler au nom de l'industrie.

Le président: Il n'y a sans doute pas de réponse.

[Français]

M. André Bachand: Je ne suis pas un spécialiste de la crème glacée et des produits laitiers. Mais lorsqu'on a des chiffres sur la table, il faut être confiants qu'ils sont bons. On parle d'une quantité maximale de 10 000 tonnes. Des importations de l'ordre de 10 000 tonnes ont un effet direct sur nos producteurs laitiers au Canada, et plus précisément au Québec. Alors, ce que je veux savoir, c'est si ce chiffre-là est sérieux ou pas, ou si dans cinq ans, on va trouver d'autres utilités et hausser cette quantité maximale à 15 000 ou à 20 000 tonnes. En attendant,—et là-dessus, je lève mon chapeau—il y a des wise kids qui trouvent des façons de détourner le système douanier; c'est un fait qu'il faut constater.

Mais ce que je veux savoir, c'est si l'industrie est prête à vivre avec ces chiffres et dire qu'elle s'engage à importer une quantité maximale de 10 000 tonnes, en attendant que d'autres solutions soient trouvées, que ce soit au niveau de Revenu Canada, des producteurs laitiers et du commerce extérieur.

[Traduction]

M. Donald Kubesh: Monsieur Bachand, c'est moi qui ai donné ce chiffre; alors je devrais sans doute répondre.

J'ai dit que mon client importait au nom des fabricants de crème glacée. Nous avons examiné le volume total de matière grasse butyrique, qui s'élève à environ 48 000, et à l'utilisation qu'en font actuellement les transformateurs, et nous avons déterminé qu'ils n'en utilisaient pas plus de 25 p. 100 dans un lot donné. Nous avons dit qu'un certain nombre de transformateurs ne s'en servaient pas pour diverses raisons. Nous avions donc un maximum de 12 000 tonnes. Nous avons ramené cela à un plafond de 10 000 tonnes. Cette année, les importations se chiffreront à environ 8 000 tonnes. Ce nombre pourrait passer à 8 500, mais sans doute pas si les prix actuels se maintiennent.

• 1025

Pouvons-nous le garantir? Non, nous ne pouvons pas le garantir. J'aurais tort de dire que nous pouvons le garantir.

Nous ne pouvons pas garantir non plus que le volume ne baissera pas. Si les cours mondiaux augmentent, l'utilisation du mélange ne sera plus rentable. Par conséquent, si les cours des produits laitiers augmentent sur le marché mondial, les importations baisseront. Nous ne pouvons pas savoir s'il y aura un changement à la hausse ou à la baisse. Tout dépend des forces du marché. C'est simple.

Le président: Nous passons maintenant à M. Calder.

M. Murray Calder (Dufferin—Peel—Wellington—Grey, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Peut-être que M. Chrétien trouverait utile d'examiner les statistiques de Statistique Canada.

Pour ce qui est des chiffres actuels en ce qui concerne les importations, l'huile de beurre est comprise dans le volume cité. De janvier 1996 à juin 1997, près de 15 000 tonnes ont été importées. Le chiffre exact était de 14 911 tonnes. La plus grande part, soit 9 621 tonnes, est venue des États-Unis. Je dis cela pour que vous le sachiez.

Je voudrais toutefois parler ici d'une lettre que j'ai reçue d'Unilever Canada. La lettre est datée du 30 septembre 1997. Elle porte la signature de M. Bruce Mactaggart, vice-président, avocat général et secrétaire d'Unilever. C'est la dernière moitié du dernier paragraphe qui m'intéresse. On peut y lire ceci.

    De plus, se rendre à la requête de PLC entraînerait une augmentation considérable de nos coûts de production puisqu'il y a une différence d'environ un dollar par kilogramme de matière grasse butyrique entre le prix auquel nous achetons actuellement l'huile de beurre et ce que nous coûte normalement le beurre. Cette augmentation serait éventuellement transférée au consommateur.

À l'heure actuelle, vous achetez un ingrédient qui est moins cher que ce que vous pourriez acheter ici. Pourtant, j'ai du mal à comprendre. Si je me reporte au mémoire des Producteurs Laitiers du Canada, vous importez cet ingrédient depuis janvier 1995. Les importations ont augmenté d'environ 488 p. 100, et pourtant le prix a aussi augmenté de 4,3 p. 100 depuis janvier 1995.

Vous achetez en fait ce produit à l'heure actuelle à un prix qui serait inférieur d'environ 1,50 $ le kilogramme à celui de la matière grasse butyrique, et pourtant l'indice des prix est passé de 116,3 à 121,3 de janvier 1995 à septembre 1997.

Ma question est la suivante: s'il en coûtait davantage aux consommateurs que le produit soit acheté ici au Canada, comment se fait-il que le prix de la crème glacée ne cesse d'augmenter alors que vous avez déjà accès à un produit qui coûte très peu cher? J'ai comme l'impression qu'il pourrait y avoir une certaine collusion ici.

M. Don Jarvis: Vous posez là une excellente question, monsieur Calder. Dans le cas particulier de Good Humor-Breyers, c'est seulement cette année qu'on a commencé à utiliser ce mélange. Le prix de 1995 et de 1996 et l'accroissement du prix de la crème glacée dépendaient donc des produits laitiers entièrement canadiens qu'on utilisait pour fabriquer le produit.

M. Murray Calder: Monsieur le président, je me demande si je pourrais obtenir la réaction des Producteurs Laitiers du Canada.

M. Barron Blois: D'après nos chiffres, le prix de la crème glacée a augmenté de 4,3 p. 100 ces derniers temps, alors que le prix de la matière grasse butyrique au Canada est demeuré inchangé pendant la même période. Il est donc clair, à notre avis, que le produit importé ne s'est pas traduit par un bénéfice pour le consommateur.

• 1030

Je voudrais revenir rapidement, si vous m'accordez un moment pour le faire, à cette question et vous dire que nous avons deux transformateurs qui sont ici aujourd'hui, mais qu'il y en a bien d'autres au Canada qui ne sont pas là pour parler du dossier. Comme je l'ai dit dans mes remarques préliminaires, je me suis entretenu personnellement avec quelques-uns de ceux qui trouvent la situation très difficile, qui font partie du système et qui se servent de crème fraîche dans leur crème glacée et qui doivent soutenir la concurrence sur le marché, vendant à des détaillants qui offrent aussi un produit fait d'un mélange d'huile de beurre et de sucre. Ils ont de plus en plus de mal à soutenir la concurrence.

Ils me disent que si la situation ne peut pas être corrigée, ils n'auront d'autre choix que de tenter d'obtenir eux aussi le produit. Nous aurons donc des importations massives de ce produit, ce qui conduira finalement à une réduction des contingents. Le volume de lait disponible se trouvera donc abaissé. Ce ne sont pas seulement les fabricants de crème glacée qui en seraient touchés, mais tous les autres fabricants canadiens, notamment les fabricants de fromage.

Le président: Merci beaucoup.

M. Don Jarvis: Monsieur le président, puis-je finir de répondre à M. Calder?

Le président: D'accord.

M. Don Jarvis: Il faut comprendre que la matière grasse butyrique qui entre dans la fabrication de la crème glacée pèse très peu dans le coût total du produit. Je crois savoir qu'elle représente de 10 à 15 p. 100 environ du coût total du produit.

Il y a les autres ingrédients qui entrent dans la fabrication du produit. Il y a l'emballage; il y a aussi le coût de la distribution. Il y a sans doute une dizaine d'autres facteurs qui déterminent le coût. On ne peut pas prendre le coût du produit laitier et faire des extrapolations en ce qui a trait au coût du produit fini.

Le président: Merci beaucoup. Comme vous pouvez le constater, la sonnerie se fait entendre pour un vote qui n'était pas prévu. Il s'agit d'une sonnerie de 30 minutes, et il nous reste 25 minutes, de sorte que nous pouvons continuer pendant deux tours avant que nous ne soyons obligés de partir.

Monsieur Benoit.

M. Leon Benoit: Merci, monsieur le président.

Les producteurs laitiers semblent dire que le problème résulte en quelque sorte d'une erreur qui a été commise quand le GATT a été signé et que c'est à cause de cette erreur que la classification en question a pu être utilisée pour importer le mélange. Est-ce bien le cas?

M. John Core: Nous ne pensons pas qu'il y a eu erreur au moment où l'accord du GATT a été signé. Nous croyons que l'erreur est plutôt survenue quand le produit a été inclus dans la ligne tarifaire. La structure tarifaire est là et elle prévoit la tarification qui convient à ce produit. C'est tout simplement parce que le produit a été ajouté après coup.

Je constate qu'on avait demandé à deux reprises au nom de M. Kubesh de vérifier si, après 1995, le produit répondait aux exigences. C'était l'occasion rêvée pour Revenu Canada de préciser à ce moment-là que le produit aurait dû être inclus à la ligne tarifaire 0404.90.

M. Leon Benoit: Oui, et il semble que le produit était importé avant cela. Si les fonctionnaires de Revenu Canada étaient conscients de la classification, est-il possible qu'ils aient pensé qu'elle était celle qui convenait?

M. John Core: Je crois, comme je l'ai dit tout à l'heure, que, si M. Kubesh était venu les voir au début des années 90 pour leur demander si un mélange 50:50 était autorisé, la réponse aurait été non. Il leur a donc demandé si un mélange 49:50 était autorisé, et la réponse est oui.

Quand nous avons par la suite négocié l'accord de l'OMC et présenté notre proposition tarifaire, qui comprenait le 0404.90, les fonctionnaires de Revenu Canada auraient dû comprendre que le produit aurait dû figurer sur cette ligne tarifaire, surtout quand M. Kubesh avait à deux reprises demandé une confirmation.

La question n'est pas de savoir s'il s'agit d'un constituant du lait. J'invite les membres du comité à se reporter à ce que je crois être le manuel de la science laitière au Canada, qui s'intitule Dairy Science and Technology: Principles and Suggestions. À la page 229, on trouve la définition suivante de l'huile de beurre: «L'huile de beurre est le terme utilisé pour désigner la matière grasse pure extraite du lait.» S'il ne s'agit pas là d'un constituant du lait aux termes du 0404.90, je ne sais pas ce qui pourrait l'être. Il s'agit de matières grasses butyriques à plus de 99 p. 100. Si l'huile de beurre n'est pas un constituant du lait, à vrai dire, je ne sais pas ce qui pourrait être un constituant du lait.

M. Leon Benoit: J'ai une question complémentaire. Vous dites que les fonctionnaires de Revenu Canada étaient déjà au courant de la situation quand ils ont examiné la procédure de classification et opté pour la classification en cause. Si la classification a été changée et que les Américains contestent le changement, comme ils le feront sans doute, et s'ils obtiennent gain de cause, ne pourraient-ils pas prendre des mesures de représailles à l'égard d'autres produits? Quel tort ces mesures de représailles pourraient causer à l'industrie laitière?

• 1035

M. John Core: Soyons clairs. Si le gouvernement canadien change sa classification, je suis sûr que ceux qui sont représentés ici seront à l'audience du TCCE pour contester cette nouvelle classification. Ce serait là la première étape. Nous disons que nous pensons pouvoir avoir gain de cause devant le TCCE. Le seul argument que les Américains pourraient invoquer est celui qu'ils ont invoqué devant le groupe spécial de l'ALENA, et ils ont perdu. Nous ne croyons donc pas qu'il y aurait des mesures de représailles de la part des États-Unis, parce que le Canada n'aurait qu'à présenter le même argument qu'il a présenté au dernier groupe spécial de l'ALENA.

M. Leon Benoit: Je crois que c'est là un élément crucial...

Le président: Nous devrons passer à Jean-Guy Chrétien.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien: Monsieur le président, je vous remercie beaucoup.

Notre comité de ce matin qui s'est réuni pour discuter de l'importation de l'huile de beurre est extrêmement important pour les producteurs laitiers, dont la majorité se trouvent en Ontario et au Québec. Mais malheureusement, monsieur le président, en raison d'un appel au vote, on a suspendu notre séance.

[Traduction]

Le président: Je crois que la sonnerie s'est arrêtée. Il semble que le vote a lieu en ce moment. Je ne sais pas trop ce qui se passe là-bas. Il semble que le vote soit déjà en cours, donc nous allons simplement continuer.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien: C'est une cloche de 30 minutes. Mais, ce que je voulais dire tout particulièrement s'adresse aux producteurs laitiers. On a présenté une motion d'urgence pour souhaiter nos bons voeux à la Reine d'Angleterre à l'occasion de son 50e anniversaire de mariage. J'aurais souhaité qu'on ait pu attendre à la fin de ce comité puisque nos délibérations sont d'une importance capitale, notamment pour les producteurs laitiers.

Alors, je prie mes collègues qui représentent tous les agriculteurs laitiers de nous excuser, ou enfin d'excuser une partie de notre députation.

Je voudrais reprendre, à l'intention de M. Calder, le tableau que m'ont fourni les producteurs laitiers du Canada et qui indique clairement que depuis 1995 on fait plus que doubler les importations. Alors, comme j'ai déjà enseigné les mathématiques, je sais que lorsqu'on double année après année, ça ne prend pas de temps qu'on devient millionnaires, mais ça peut prendre également peu de temps pour se retrouver le cul sur la paille. Alors, c'est très inquiétant pour les producteurs laitiers, très inquiétant.

Mon collège, M. Bachand, avait posé une question assez claire, à savoir si on était prêts à se plafonner et s'autodiscipliner. Vous n'avez pas osé prendre position au nom des personnes que vous représentez.

Moi, je vais vous poser une question parce qu'il faudra agir et agir rapidement. M. Core a demandé tout à l'heure quelle indication vous inscriviez sur le contenant de la crème glacée fabriquée à partir de l'huile de beurre. Moi, je procéderai de façon plus précise: voulez-vous m'indiquer les marques de commerce qui sont produites à partir de l'huile de beurre? Et on va vous organiser un boycott terrible; vous n'aurez même pas besoin de vous autodiscipliner, vous n'en vendrez plus!

[Traduction]

M. Don Jarvis: Tout ce que je puis dire, c'est que les produits de crème glacée fabriqués au Canada se conforment à la Loi sur les aliments et drogues et aux règlements pris en application de cette loi. Les ingrédients y sont indiqués en conformité avec cette loi, et Santé Canada veille à ce que tous les produits fabriqués au Canada se conforment à toutes les normes canadiennes. Les usines sont toutes inspectées et font l'objet d'une surveillance constante, et les Canadiens se voient offrir la crème glacée la meilleure et la plus sûre au monde.

• 1040

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien: Voulez-vous m'indiquer le nom de la marque de commerce de la crème glacée que vous produisez? Vous devriez le savoir; s'il y en a sept, nommez-moi les sept. Ce sera inscrit dans les comptes rendus du comité. Si vous refusez de me les donner, je demanderai à mes attachés de recherche de les trouver et ça va faire plus mal. Tout ce qui se dit ici est consigné dans les comptes rendus de notre comité.

[Traduction]

M. Don Jarvis: Je crois avoir énuméré dans mes remarques préliminaires certaines des marques qui sont produites par au moins un fabricant de crème glacée.

Le président: Voulez-vous envoyer la liste au comité?

M. Don Jarvis: Je crois que vous pourrez la voir dans la lettre dont M. Calder a déjà parlé.

Le président: Monsieur McCormick.

M. Larry McCormick (Hastings—Frontenac—Lennox et Addington, Lib.): Merci, monsieur le président. Je tiens à remercier tous les témoins de leur présence à cette séance d'information, dont nous avons sans doute tous besoin pour en être au même point.

Avant de prendre la parole, je voudrais une précision au sujet de la sonnerie, monsieur le président.

Le président: Le vote est en cours. Il y aura peut-être des élections la semaine prochaine, mais le vote est déjà en cours.

M. Larry McCormick: Il y aura un parti qui... En tout cas, nous verrons ce qu'il en est de la gestion de l'offre.

J'inviterais chacune des parties représentées à répondre à ma question, sauf peut-être les importateurs. Pourquoi ce produit, le mélange d'huile de beurre et de sucre, aurait-il été aussi intouchable au moment de la signature de la procédure de tarification? Il me semble que chacune des parties représentées ici, y compris les PLC, étaient à la table. C'est comme si chacun blâmait le voisin. Pourquoi n'a-t-on pas examiné la chose quand ces gens-là ont demandé s'ils pouvaient importer le produit?

Il me semble que, dès qu'on a 51 p. 100 contre 49 p. 100, cela devrait être le signal qu'une vérification s'impose. Qu'arriverait-il si les proportions étaient modifiées légèrement et qu'elles devenaient 50:50 ou 49:51? Il ne s'agit pas d'un changement énorme et pourtant nous, ceux qui étaient là, avons tout simplement laissé faire et n'y avons pas touché ou n'en avons pas tenu compte.

C'est là ma première question. J'en ai deux autres, monsieur le président.

M. Mike Gifford: Monsieur le président, il faut remonter un peu dans le temps pour comprendre l'importance de cette proportion de 49:51. Avant l'avènement de l'Organisation mondiale du commerce le 1er janvier, le Canada limitait l'importation de produits laitiers en vertu de la Loi sur les licences d'exportation et d'importation. Le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international se fiait à un avis juridique qu'il avait reçu pour la Liste de marchandises d'importation contrôlée qu'il avait ne pouvait pas comprendre de produits dont la proportion d'ingrédients laitiers était inférieure à 50 p. 100. C'est ce qui explique qu'on se soit retrouvé avec 49 p. 100 et 51 p. 100.

Même en vertu de l'ancienne loi, la Loi sur les licences d'exportation et d'importation, le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international ne pouvait pas, aux termes de sa propre loi, appliquer de restriction à un produit composé à 49 p. 100 de produits laitiers et à 51 p. 100 d'autres choses.

Dans le processus de conversion de ces contingents d'importation que nous avions avant 1995 à des équivalents tarifaires, nous avons rencontré nos conseillers du secteur privé, notamment des producteurs laitiers, pour examiner chaque ligne tarifaire et obtenir leur avis sur la conversion de l'ancienne Liste de marchandises d'importation contrôlée, qui ne faisait que nommer les produits sans pour autant leur attribuer un numéro tarifaire, à un nouveau système fondé sur une description tarifaire. Je crois pouvoir raisonnablement dire que nous avons discuté longuement de cette question avec un représentant de l'industrie laitière. Au bout du compte, nous nous sommes retrouvés avec une liste de produits et de descriptions tarifaires qui était censée correspondre aux restrictions relatives aux importations qui existaient avant la tarification. C'est ce que nous avons soumis à l'OMC en 1994, monsieur le président.

Vous vous demanderez ce qu'on pourrait faire sur le plan de la tarification. Essentiellement, le principe qui a guidé les pays qui ont conclu cet accord agricole sous l'égide de l'OMC était qu'on avait le droit d'imposer des tarifs à l'égard des mesures qu'on avait en place avant la conclusion des négociations,

• 1045

Nous avons soutenu avec succès devant le groupe spécial de l'ALENA que le Canada avait fait un peu plus que cela. L'argument a été retenu, mais il me semble, monsieur le président, qu'il faut être très prudent quand il s'agit de tirer des conclusions de la décision du groupe spécial de l'ALENA. Le groupe spécial a confirmé le droit du Canada de maintenir ses contingents tarifaires sur les importations de produits laitiers des États-Unis aux termes de l'ALENA, mais il ne s'est pas prononcé sur la question de la composition de ces contingents. Il appartiendrait à un autre groupe spécial d'en décider.

En l'absence d'autres instruments, les États-Unis s'attendraient à ce que le Canada classifie l'entrée de marchandises au Canada en fonction des lignes directrices internationales qui s'appliquent, comme celles du Conseil mondial de coopération douanière.

Il y a essentiellement deux questions qui se posent ici, monsieur le président. La première est de savoir si la classification de la marchandise en question est bien celle qui convient. Il ne s'agit pas d'une marchandise artificielle, mais bien d'un produit légitime qui peut être utilisé en tant que tel, conformément aux règles, dans la fabrication, mettons, de la crème glacée. Il faut donc se demander quelles sont les obligations du ministère du Revenu national relativement à la classification de cette marchandise en particulier.

Si le gouvernement prend la décision politique d'accorder une protection supplémentaire à cette denrée, et si le ministère du Revenu décide de ne pas l'assujettir à un contingent tarifaire, le gouvernement n'a qu'une solution, comme l'ont signalé nos collègues du ministère des Finances. Si le gouvernement veut élargir l'application du système de contingents tarifaires, le Canada devra déclencher des négociations au titre de l'article 28 auprès de l'Organisation mondiale du commerce, afin de faire augmenter la protection tarifaire qui s'appliquerait à cette denrée.

Mais, comme on l'a également signalé, il faudrait pour ce faire négocier avec nos partenaires commerciaux et être prêts à indemniser. Plus important encore, il s'agit là d'une obligation imposée par l'OMC, mais en vertu de l'ALENA, nous n'aurions pas le droit d'augmenter la protection tarifaire sur une denrée qui ne fait pas actuellement l'objet d'un contingent tarifaire.

Le président: Merci, monsieur Gifford.

Monsieur McCormick, nous devons maintenant passer à M. Coderre.

M. Denis Coderre (Bourassa, Lib.): Monsieur le président, votre question s'adressait aux représentants du gouvernement et aux Producteurs Laitiers du Canada.

Le président: Notre comité avait convenu de s'organiser...

M. Larry McCormick: Mais puis-je avoir la réponse?

Le président: Nous aimerions bien entendre la réponse, mais il ne reste que cinq minutes au deuxième tour de questions. Comme M. Gifford a parlé bien plus longtemps, il a empiété sur le temps réservé aux membres du comité.

M. John Core: M. Gifford a mentionné qu'il avait communiqué avec les représentants de l'industrie laitière pendant les discussions. Comme il s'agit en l'occurrence de quelqu'un qui est ici, M. Doyle, j'allais lui demander de répondre.

M. Larry McCormick: Un rappel au Règlement.

Le président: Nous reviendrons à M. Doyle. Si M. Doyle veut s'asseoir à la table, nous reviendrons à lui après le tour de M. Coderre.

[Français]

M. Denis Coderre: Dans un premier temps, j'aimerais vous remercier. Vous avez donné un point de vue extrêmement important pour le Québec. C'est un dossier qui demande évidemment une étude très approfondie.

Il y a certains aspects que je ne comprends pas. Monsieur Gifford, est-ce qu'en 1993, à l'époque où l'on signait l'accord de l'OMC, nous étions au courant de l'huile de beurre et de sucre? Ou est-ce que ce qui nous est arrivé en 1995 l'a été complètement par surprise? Lorsqu'on a dressé la liste et établi la classification des produits, est-ce qu'on connaissait déjà l'huile de beurre? Et par la suite, très brièvement, j'aimerais que les producteurs de lait me répondent également.

• 1050

[Traduction]

M. Mike Gifford: Monsieur le président, je crois que c'est peu après la fin des négociations en 1993 que nous avons dû convertir nos engagements pris lors des négociations en une liste tarifaire conforme à la loi.

Nous nous sommes donc mis à la tâche et avons essayé de voir comment il était possible de faire la conversion, c'est-à-dire de passer d'une liste de marchandises d'importation contrôlée non fondée sur des lignes tarifaires, à des lignes tarifaires. Le plus grand obstacle, c'était que nous n'étions pas censés convertir en équivalents tarifaires les denrées qui n'avaient pas jusqu'alors fait l'objet de restrictions d'importation.

Chaque fois qu'il fallait marquer la différence, nous avons tenté de le faire de façon à favoriser l'industrie laitière canadienne. Il a fallu bien souvent faire appel à notre jugement, et si je me rappelle bien, nous avions informé le représentant du groupe de consultations sectorielles sur le commerce extérieur qui était notre vis-à-vis, que chaque fois qu'il fallait marquer la différence, nous voulions le faire de façon à favoriser nos producteurs laitiers tout en honorant nos obligations internationales.

Je ne puis en dire plus, monsieur le président.

Le président: Monsieur Doyle.

M. Richard Doyle (directeur exécutif, Les Producteurs Laitiers du Canada): Merci, monsieur le président. Étant donné que j'étais à Genève à l'époque, je pourrais peut-être partager avec vous mes souvenirs de ce qui s'est passé.

Le fait que le Canada soit lié par une définition qui porte à 50 p. 100 la proportion de produits laitiers dans un mélange, définition que lui avait imposée une autre loi, et qui ne s'applique pas dans les autres pays ne constitue pas un problème nouveau. Aux États-Unis, on s'accommode très bien d'une proportion de 15 p. 100 de produits laitiers dans un mélange, mais le Canada est coincé du point de vue juridique et nous essayons de nous sortir de ce piège.

La façon dont notre réflexion a évolué jettera peut-être un éclairage intéressant sur la discussion. Au moment des négociations, nous avions clairement l'intention de nous débarrasser de tous ces produits dont la proportion était 49 à 51 p. 100. De fait, nous avons même introduit une nouvelle ligne tarifaire, pour la crème et le sucre. C'était d'ailleurs ce qui était importé à l'époque, puisque ce sont là les deux denrées principales entrant dans la fabrication de la crème glacée. On a mis fin à ces importations essentiellement parce que le Canada avait introduit une nouvelle ligne tarifaire.

Pour ce qui est du groupe d'experts de l'ALENA, si nous avons demandé l'inclusion à la ligne tarifaire 0404.90, c'est strictement parce que—comme l'a dit le MAECI—l'historique des négociations indique clairement que ces produits auraient été inclus à la ligne 0404.90. Cette ligne tarifaire n'est pas soumise au seuil de 50 p. 100, mais aujourd'hui on prétend que l'huile de beurre n'est pas un constituant du lait. Je ne sais pas à quoi s'applique la ligne tarifaire 0404, si elle ne s'applique pas à l'huile de beurre et au sucre.

Ce n'est pas que soyons coincés par la ligne fourre-tout 2106, préparations alimentaires non ailleurs dénommées. De grâce, lisez la ligne 0404.90, car c'est autour d'elle que tourne tout l'historique des négociations. Elles ont tout à voir avec elle.

[Français]

M. Denis Coderre: Je ne veux pas entendre un monologue de ce qui s'est passé à l'époque. J'ai posé une simple question et j'aurai d'autres questions par la suite, monsieur le président. Je ne voudrais pas que l'on s'attarde trop.

À l'époque, monsieur Doyle, est-ce que les producteurs de lait savaient que le mélange de l'huile de beurre et de sucre allait nous arriver en pleine face, comme on le dit?

M. Richard Doyle: Je vous dirais que non, bien que l'intention des mélanges existait. J'essaie de vous expliquer qu'en particulier l'huile de beurre n'était pas là, sauf que les mélanges de produits laitiers, les 49 p. 100 et les 51 p. 100 avec du sucre, du sel ou autre produit, étaient au plein coeur des discussions qu'on tenait avec les négociateurs du temps.

M. Denis Coderre: Parfait. Deuxième question, monsieur Doyle. Est-ce qu'au moment où on a établi la ligne des 50 p. 100 et plus on visait effectivement à protéger les producteurs de lait du Canada? Est-ce qu'à l'époque où a établi la tarification et la classification, pour sauver les meubles et pour protéger justement la gestion de l'offre, on décidé d'établir cette ligne de 50 p. 100? Ai-je bien compris?

M. Richard Doyle: Non. La ligne des 50 p. 100 existait avant la négociation du GATT. L'application des tarifs ou des lignes tarifaires soumises par le Canada résolvait en fait cette limitation qu'imposaient nos lois avant le GATT.

[Traduction]

Le président: Merci beaucoup. Nous passons maintenant à M. Penson, puis nous reviendrons à M. McCormick.

M. Charlie Penson: Monsieur le président, on nous a expliqué clairement à quel point cette question était importante pour les agriculteurs. Je suis tout à fait d'accord.

Si nous nous tournons vers le gouvernement—lorsque je dis «nous», c'est que ma famille et moi exploitons une céréaliculture de 200 acres en Alberta—c'est parce que nous avons besoin d'aide pour faire certaines choses qui sont hors de notre portée. Nous, nous produisons des céréales et du lait. Voilà ce que nous faisons. Nous sommes des producteurs. Mais pour ce qui est de protéger nos intérêts lors des transactions commerciales, c'est vers le gouvernement que nous nous tournons.

C'est donc pour protéger notre avenir à long terme—et je dis bien à long terme—qu'il faut nous assurer que quelqu'un veille aux intérêts de nos industries.

• 1055

Nous avons également notre crédibilité à protéger en tant que pays, et pas seulement dans le secteur de l'agriculture. Le Canada a de nombreux partenaires commerciaux partout dans le monde. Le Canada a conclu au GATT un énorme pacte commercial qu'administre aujourd'hui l'OMC. Le Canada a signé l'ALENA. Notre crédibilité est en jeu. Si nous avons adhéré à ces ententes, nous devons les honorer.

Nous avons eu la possibilité de mettre carte sur table et de laisser les autres pays examiner nos tarifs. Nous pourrions en profiter pour aller encore plus loin—dans le secteur des céréales, des oléagineux et du boeuf—pour essayer d'avoir accès à d'autres marchés et faire baisser les subventions en Europe. C'est pour faire ce genre de chose que je m'attends à ce que le gouvernement nous aide.

Aujourd'hui, les producteurs laitiers nous ont expliqué qu'ils voulaient que certaines denrées soient reclassifiées pour figurer à une autre ligne tarifaire. M. Gifford, je crois, a répondu que la ligne tarifaire existait avant et qu'il n'était pas question de faire figurer dans de nouvelles lignes tarifaires des denrées déjà dénommées dans d'autres lignes tarifaires.

Je m'adresse aux fonctionnaires du Revenu, du Commerce international et aux autres pour leur demander ceci. Si nous inscrivions ces denrées dans une nouvelle ligne tarifaire, quelles en seraient les conséquences?

M. Phil McLester: Si nous changeons la ligne tarifaire au hasard aujourd'hui pour satisfaire Les Producteurs Laitiers du Canada, nous pouvons nous attendre à ce que les importateurs qui ont besoin d'une petite quantité de ce produit interjettent immédiatement appel auprès du TCCE. D'après nos conseillers juridiques et d'autres encore, et d'après des témoins experts des deux parties, il est peu probable que nous ayons gain de cause.

Comme on l'a déjà mentionné, il faut parfois trois ans pour faire interpréter quoi que ce soit par le TCCE, et entre-temps il faut protéger... Un appel auprès du TCCE pourrait prendre de trois à six mois. Toute action de ce genre devient publique dès qu'elle est soumise au TCCE, puisqu'elle est publiée dans la Gazette du Canada. Dès lors, par conséquent, nos partenaires commerciaux et les organisations internationales auxquelles nous adhérons ont la possibilité de suivre l'évolution du dossier.

Voilà tout ce que nous pouvons faire.

M. Charlie Penson: M. Benoit a posé essentiellement la même question. Les Affaires étrangères n'ont pas répondu et nous n'avons pas...

M. John Core: Puis-je intervenir?

M. McLester a admis plus tôt ne pas avoir lu notre intervention sur la ligne 0404.90; comment peut-il affirmer que, de l'avis d'experts, nous allions perdre notre cause? Il n'a même pas lu notre texte.

Le président: Si j'ai bien compris sa réponse, votre intervention est toujours à l'étude.

Monsieur Satherstrom, voulez-vous répondre?

M. Darwin Satherstrom: Je voulais simplement signaler que si un pays exportateur estime que nous avons augmenté le droit d'importation contrairement à nos obligations, il a le droit de nous traîner devant le GATT. Si nous perdions devant le GATT, les pays membres pourraient nous imposer des représailles ou nous demander de retirer la mesure et de verser une indemnisation. Vous voyez que l'on ne peut pas impunément augmenter les droits de douane, si c'est contraire à nos obligations.

M. Charlie Penson: Si nous changions l'autre ligne tarifaire, ce sont les conséquences auxquelles nous pourrons nous attendre?

M. Darwin Satherstrom: L'exportateur pourrait affirmer qu'il s'attendait à ce que les denrées soient assujetties à un certain taux de douane et que si le gouvernement devait augmenter ce taux de quelque façon, leurs droits seraient violés.

M. Charlie Penson: Les Affaires étrangères pensent-elles...?

M. Jean Saint-Jacques: Monsieur Penson, je répondrais comme mon collègue des Finances.

Le président: Vous avez reçu une demande des Producteurs Laitiers du Canada, mais aucune décision n'a été prise, que je sache. Donc, pour le moment, vous avez reçu une demande de clarification ou plutôt une demande pour que vous changiez votre description précédente, mais vous n'avez pas encore pris de décision. Ai-je bien résumé la situation?

M. Phil McLester: J'imagine que c'est affaire d'interprétation, étant donné qu'il a été révélé que nous n'avions pas changé la classification. On peut également interpréter la situation d'une façon différente, à savoir que nous avons décidé en tout état de cause de maintenir le statu quo.

Pour revenir à ce qu'a dit M. Core, je comprends son point de vue et la raison d'être de sa dernière intervention. Un des mes collègues a lu la demande, et nous sommes donc au courant de la situation. J'ai dit plus tôt que nous n'avions pas étudié la demande en détail, mais une lecture cursive nous a néanmoins permis de commenter brièvement la classification de la ligne 04. Mais nous avons évidemment l'intention de nous pencher plus longuement sur la question.

• 1100

Le président: Donc, si je comprends bien, certaines entreprises canadiennes vous ont demandé de modifier votre décision précédente.

M. John Core: Le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire nous a demandé de façon spécifique de déposer nos arguments juridiques là-dessus. Nous avons envoyé nos arguments au sujet du poste tarifaire 0404.90 le 7 novembre dernier, mais nous n'avons reçu aucune réponse du gouvernement, outre un accusé de réception.

Le président: Bien.

Monsieur McCormick, vouliez-vous poser une question à M. Doyle?

M. Larry McCormick: Une ou deux questions toutes brèves.

Je m'adresse aux Producteurs Laitiers: vous affirmez avoir envoyé vos arguments juridiques aux ministres intéressés. Avez-vous fait part de vos demandes à vos administrateurs qui voulaient avoir des détails? J'aimerais bien en avoir copie, si possible.

J'ai une autre brève question à l'intention des producteurs. Faute d'avoir ce produit, que pouvez-vous utiliser?

Quelqu'un a parlé du fromage. Il se trouve que récemment, des gros porteurs en provenance du Texas sont venus livrer à un fabricant de fromage de l'est de l'Ontario cinq camionnées du produit en question. Que je sache, on a mis fin à ces importations, mais vous pouvez comprendre à quel point cette situation peut être inquiétante. Pensez-vous que l'on puisse utiliser ce produit dans la fabrication du fromage? J'en doute. Je voudrais savoir, par conséquent, si toutes les cargaisons sont vérifiées lorsqu'elles traversent la frontière.

Je pense que pour nous, aujourd'hui, la partie prenante la plus importante c'est la fabrique de crème glacée Ben et Jerry du Vermont. Les propriétaires ont commencé avec 5 $ en poche. Or, la question de la STBr est maintenant rendue à Bay Street. Et mesdames et messieurs, on commence tout juste à en entendre parler.

Je suis favorable à l'industrie, et nous pouvons même être tous gagnants. J'achète vos produits, mais j'aimerais savoir si nous sommes disposés à accepter la STBr au Canada alors que Ben et Jerry s'apprêtent à lancer une campagne publicitaire de plusieurs millions de dollars contre la STBr.

Merci, monsieur le président.

Le président: Voulez-vous répondre?

M. Phil McLester: Je ne peux répondre à la question sur le fromage, parce que je ne sais pas si ce produit peut être utilisé dans la fabrication d'un fromage de qualité inférieure, comme on le fait pour la crème glacée.

Pour ce qui est des camions qui traversent la frontière, nous ne pouvons évidemment pas vérifier toutes les cargaisons qui entrent au Canada, mais nous vérifions certaines marchandises expédiées, par exemple lorsqu'il y a changement dans les quantités de certains produits destinés à certains endroits. Parfois, nous ciblons nos activités de surveillance. De temps en temps, nous prélevons des échantillons de produits, mais uniquement pour vérifier si les proportions indiquées dans la fabrication du produit sont respectées.

Par exemple, nous vérifions si tel produit contient bien 49 p. 100 d'huile de beurre et 51 p. 100 de sucre. Mais nous ne faisons pas nos vérifications pour des raisons de santé, par exemple.

Le président: Bien.

Monsieur Chrétien.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien: Moi, je vais poser plusieurs petites questions qui vont nécessiter, je l'espère, de petites réponses. Mais avant, monsieur le président, je me permettrais de vous suggérer qu'on organise une autre séance de ce comité la semaine prochaine pour vider cette question. Nous pourrions inviter le ministère de l'Agriculture, le ministère de la Santé et les représentants de l'Association des consommateurs du Canada à y participer. J'espère, monsieur le président, que vous écouterez ma demande avec beaucoup d'intérêt.

Je vais m'adresser aux deux représentants des producteurs laitiers et ma question rejoindra peut-être les propos de M. McCormick. Est-ce qu'il serait possible—et j'envisage cette possibilité avec crainte—qu'on fasse passer cette huile de beurre—qui, selon mon ami ici du ministère du Revenu, est importée en toute légalité—dans un système centrifuge ou centripète—je ne me souviens pas trop de mes cours de physique—pour extraire d'un côté le sucre, et de l'autre côté la crème. Avec la sucre, on pourrait faire de la poudre de Jell-o, et avec la crème, du fromage ou du beurre. Est-ce que ce serait possible avec la technologie moderne?

• 1105

[Traduction]

M. John Core: Que je sache, c'est possible avec les techniques d'aujourd'hui.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien: Donc, avec les importations d'huile de beurre, on pourrait éventuellement faire du vrai beurre, de la crème glacée, bien sûr, du fromage, du yogourt et à peu près n'importe quoi?

[Traduction]

M. John Core: Que je sache, il est possible de faire la séparation avec les techniques actuelles, et une fois les éléments séparés, ils peuvent être envoyés n'importe où.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien: Alors, mes amis...

[Traduction]

Le président: Monsieur Chrétien, M. Kubesh voudrait répondre lui aussi.

M. Donald Kubesh: Brièvement, il est possible de le faire, mais c'est illégal. D'après la jurisprudence de la Cour fédérale du Canada, on n'a pas le droit de le faire. Par conséquent, personne ne le fait, pour cette simple raison. Voilà tout.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien: Je me réjouis grandement de voir en vous un homme très respectueux de la loi. Mes amis et collègues de la députation, si mes craintes se réalisaient, la gestion de l'offre dans le lait serait sérieusement mise en branle et en doute. Nos producteurs laitiers seraient voués à changer de vocation ou à se diriger directement vers l'aide sociale. Ce n'est pas compliqué, c'est ça qui va arriver. Je vous vois faire un signe de la tête approbateur, ce qui est très inquiétant. Monsieur le président, le problème de l'importation de l'huile de beurre est plus inquiétant que je ne le croyais lorsque nous l'avions abordé au comité directeur.

Je crois qu'il est urgent que, dès la semaine prochaine, notre comité se réunisse. J'inviterais l'Association des producteurs de lait du Canada à secouer le pommier et à secouer ses membres, parce qu'aujourd'hui, six mois représentent peut-être ce que 20 ans représentaient au début du siècle. Alors pressons-nous, parce qu'on va perdre notre gestion de l'offre dans la production laitière.

Je vous remercie, monsieur le président.

Le président: Monsieur Coderre.

M. Denis Coderre: Merci, monsieur le président. J'aimerais qu'un représentant du côté gouvernemental puisse me dire rapidement si, du point de vue de la gestion de l'offre, en signant l'entente Uruguay Round, on a vraiment pu obtenir le maximum et réussi à protéger les producteurs de lait au Canada.

[Traduction]

M. Mike Gifford: Oui, je puis vous l'assurer. Nous avons juger, après avoir consulté le milieu de l'agriculture et de l'agroalimentaire, que nous avions fait de notre mieux pour protéger la gestion de l'offre, étant donné nos droits et obligations internationales.

[Français]

M. Denis Coderre: Est-ce qu'à ce moment-là, le fait de changer la classification aurait un effet direct sur les autres produits laitiers, et que dans le fond ce qu'on essaie de faire, c'est de vouloir gagner une bataille, mais il faudrait peut-être aussi gagner la guerre? Est-ce que le fait de dire qu'on va s'attaquer de façon précise à la question de l'huile de beurre aurait un impact sur l'ensemble des autres produits et s'avérerait vraiment désastreux dans le contexte économique des producteurs de lait?

[Traduction]

M. Mike Gifford: Si le Canada changeait unilatéralement sa classification tarifaire en vue d'inclure ce mélange dans un contingent tarifaire, les autres pays pourraient théoriquement soumettre la question à un organe de règlement des différends de l'OMC, en tant que membres de l'OMC. Autrefois, avant que la règle de droit ne régisse le commerce agricole, certains gouvernements ont agi unilatéralement, sans respecter la règle de droit.

Il vaut la peine de signaler que nous sommes maintenant en mesure de défendre notre système de gestion de l'offre devant l'ALENA et aujourd'hui devant l'OMC, puisque nos partenaires commerciaux ont signé des ententes contractuelles commerciales. C'est la règle de droit qui nous permet de nous défendre contre des superpuissances économiques. Mais si nous faisons fi de la loi, nous nous rendons extrêmement vulnérables.

[Français]

M. Denis Coderre: Dans le contexte de l'ensemble des questions que j'ai posées, j'aimerais poser une question aux producteurs de lait. Quand on parle de sauver les meubles, je suis d'accord avec mes amis Chrétien et Bachand qu'il faut effectivement sauver nos producteurs de lait, mais il faut aussi être réalistes.

• 1110

À ce moment-là, les producteurs de lait ne devraient-ils pas mettre de l'avant ce débouché et devenir aussi producteurs d'huile de beurre, parce que c'est du beurre fondu? Monsieur Jarvis, compte tenu que vous allez chercher cette huile de beurre ailleurs, est-ce que vous seriez prêt à prendre celle qui serait produite ici?

[Traduction]

M. John Core: Nous avons évidemment beaucoup d'usines de première transformation au Canada. Par conséquent, si la demande d'un mélange d'huile de beurre et de sucre existait, nous pourrions la produire sur place. La question du prix, voilà le problème.

À vrai dire, les fabricants de crème glacée préféreraient la crème. Ce serait leur premier choix. La seule raison pour laquelle ils utilisent le mélange d'huile de beurre et de sucre, c'est, comme on l'a mentionné, que cela coûte 1 $ de moins par kilo de matière grasse butyrique.

C'est une question de prix. Ce n'est pas...

M. Denis Coderre: Avez-vous jamais envisagé la fabriquer vous-mêmes?

M. John Core: Nous pouvons la fabriquer, mais nous la vendrons au prix canadien.

M. Denis Coderre: Vous seriez prêts à le faire?

M. John Core: Au prix du Canada.

M. Denis Coderre: Monsieur Jarvis, vous allez peut-être pouvoir faire une affaire.

Une voix: Quand?

M. Don Jarvis: Monsieur Coderre, dès que le prix canadien pourra faire concurrence au prix auquel nous pouvons obtenir en toute légalité un produit ailleurs, alors nous achèterons ce produit chez vous.

Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.): Justement, je vais commencer par cet aspect-là: l'achat d'un produit à bon prix et en toute légalité. J'étais moi-même un petit entrepreneur, et je sais que ce qui compte, c'est l'argent. Mais en tant que consommatrice, la qualité à mes yeux est prioritaire et c'est ce qui devrait nous intéresser.

Toujours à ce sujet, vous avez dit plus tôt que vous constituiez des réserves. Des réserves de quoi?

M. Don Jarvis: Pour répondre d'abord à la dernière question. Je crois que «constituer des réserves» est une expression mal choisie. En fait...

Mme Rose-Marie Ur: C'est vous qui l'avez utilisée.

M. Don Jarvis: ... ou achète le produit en quantité; voilà tout. Ou effectue ses achats en fonction des changements dans le prix mondial. Comme les achats se font également en fonction de plusieurs autres facteurs, ou achète en quantité.

Comme nous sommes déjà à la fin de 1997, nous avons une idée assez exacte de la quantité qu'on va acheter en 1997, combien on a en stock maintenant et quelle quantité sera utilisée.

Mme Rose-Marie Ur: Quand je vous ai entendu dire «constituer des réserves»... j'avais l'impression que quelque chose pourrait survenir et que vous tentiez de contourner une catastrophe que vous envisagiez. Ce n'était pas tellement parce que vous en aviez besoin pour fabriquer votre produit.

M. Don Jarvis: Dans le cas qui nous occupe, ce n'est pas pour cela que nous le faisons.

Quant à votre première question, je ne crois pas que cela soit un problème de qualité.

Mme Rose-Marie Ur: Puis-je vous interrompre? Cela me préoccupe beaucoup, surtout depuis que mon honorable collègue du Bloc a soulevé la question de la STBr, qui ne m'était jamais venue à l'esprit jusqu'à tout à l'heure.

Les agriculteurs de ma circonscription ont des opinions qui divergent là-dessus. Les États-Unis utilisent la STBr. Quel pourcentage de vos importations représente ce produit en provenance des États-Unis?

M. Don Jarvis: Je ne puis répondre que pour Good Humour-Breyers, et le mélange que cette entreprise utilise provient non pas des États-Unis mais de la Nouvelle-Zélande.

Mme Rose-Marie Ur: Et les autres fabricants?

M. Don Jarvis: Je ne sais pas.

Mme Rose-Marie Ur: Monsieur Gifford.

M. Mike Gifford: Pour 1997, ce produit représente 6 p. 100 des importations en provenance des États-Unis, 52 p. 100 des importations en provenance de la Nouvelle-Zélande, 30 p. 100 des importations en provenance du Mexique—importations qui sont surtout de produits de la mer—et 12 p. 100 d'importations de l'Union européenne. Les importations des États-Unis ont chuté de 82 p. 100 en 1996 à 6 p. 100 en 1997. On a délaissé les États-Unis au profit de fournisseurs plus abordables.

Mme Rose-Marie Ur: On a dit et répété aujourd'hui que les producteurs laitiers veulent qu'on augmente le tarif. Mais cela ne semble pas être le noeud du problème, d'après ce qu'ont dit à maintes reprises les fonctionnaires.

Je vais céder à M. Core le reste de mon temps, puisqu'il voulait réagir et n'a pas pu. Je suis une personne généreuse, monsieur Core, et je vous cède la place.

C'est un de mes électeurs.

• 1115

Des voix: Oh, oh!

M. John Core: Merci, Rose-Marie, mais je crois que M. Doyle a déjà donné sa réponse en répondant à une question subséquente.

Le président: Les Producteurs Laitiers du Canada sont-ils d'accord avec le montant des pertes citées plus tôt par M. Kubesh dans son exposé? Il parlait de 23 millions de dollars.

M. John Core: Pour ce qui est de la matière grasse butyrique, cela se chiffre entre 20 et 30 millions de dollars. Dès que nous réduisons nos quotas parce que nous avons moins de matière grasse, cela nous donne moins de produits solides. Si vous ajoutez la valeur perdue des solides et de la matière grasse, cela représente près de 50 à 55 millions de dollars de moins sur le marché canadien.

Nous ne sommes pas en désaccord avec ce que disait M. Kubesh sur la matière grasse, mais nous réduisons pour notre part nos quotas à l'échelle mondiale, si bien qu'il faut tenir compte de tous les constituants du lait, ce qui représente de 50 à 55 millions de dollars.

Le président: Le dernier intervenant sera M. Bonwick.

M. Larry McCormick: J'invoque le Règlement, monsieur le président.

Je suis d'accord pour aider Les Producteurs Laitiers du Canada, car cette diminution de 2,5 à 3 p. 100 du quota représente 2 millions de dollars de moins que l'on dépense dans ma circonscription.

M. Core voulait-il répondre à ma question et me dire s'il peut me faire parvenir ses arguments juridiques pour que je les lise?

Le président: Et les transmettre aussi au comité?

M. Larry McCormick: Bien sûr. Merci.

Le président: On vous demande de déposer votre document auprès du comité.

M. John Core: Monsieur le président, nous pouvons vous en donner des extraits. Mais le hic, c'est que lorsque le ministre nous a demandé de lui envoyer le document, nous avons par le fait même établi une cause juridique qui pourrait être portée devant le TCCE si le gouvernement du Canada décidait d'agir. Or, si je déposais aujourd'hui cet argument devant le comité, ce serait bien avant que le TCCE en soit saisi et cela pourrait modifier la façon dont la cause serait présentée aux audiences du tribunal.

Nous sommes tout disposés à vous donner les parties qui touchent directement aux arguments déposés devant le comité d'experts de l'ALENA. Ce ne sont que quelques pages choisies que nous fournirons aux membres du comité.

Le président: Ce document est-il considéré comme public ou est-il toujours privé?

M. John Core: Il est confidentiel.

Le président: C'est actuellement un document confidentiel, mais vous pouvez tout de même nous donner les arguments généraux que vous avez invoqués?

M. John Core: Certains extraits, seulement.

Le président: Vous pouvez donner cette information au comité?

M. John Core: Oui. Nous le ferons.

Le président: Monsieur Bonwick.

M. Paul Bonwick (Simcoe-Grey, Lib.): Merci, monsieur le président.

J'aimerais que M. Gifford précise la réponse qu'il a donnée à M. Coderre. Je ne vous ai pas bien compris, et peut-être que les autres membres du comité ne vous ont pas compris non plus.

Avez-vous dit que, advenant la reclassification, cela pourrait mettre tout l'accord en péril au sens strict de la loi? De grâce, ne me dites pas que d'autres pays feront fi de la loi. À mes yeux, c'est une vaine menace, et c'est vouloir faire peur au monde que de laisser entendre que d'autres pays pourraient s'aligner les uns sur les autres, faire fi du texte juridique et parler de l'effondrement de l'accord. Dans le sens juridique le plus strict, une reclassification met-elle en péril tout l'accord?

M. Mike Gifford: Il y a deux volets à cette affaire. Le premier volet, c'est la façon dont le ministère du Revenu classe les produits, en fonction du droit canadien et du droit international. La loi canadienne porte que ce ministère doit classer les produits en suivant certaines procédures. Cette décision peut être contestée par les producteurs laitiers devant le Tribunal canadien des importations. Le ministère du Revenu a laissé entendre qu'un délai raisonnable pour traiter de l'affaire pourrait être de trois à six mois ou bien de trois à quatre ans. Revenu national ne fait qu'administrer le tarif de douanes. Il décide de la classification.

Le deuxième volet, c'est le volet politique, en regard duquel le ministère des Finances et d'autres ministères doivent prendre des décisions. Sommes-nous disposés à mieux protéger ce mélange si le ministère du Revenu conclut, d'une part, qu'il est classé de façon appropriée mais que, d'autre part, le gouvernement souhaite le protéger contre les importations? Comme membre de l'OMC, notre seule option est d'invoquer l'article 28, qui permet au fond d'augmenter la protection tarifaire et d'indemniser les autres pays. Nous pouvons appliquer cette règle à tous sauf aux États-Unis. Aux termes de l'ALENA, nous sommes obligés de laisser entrer en franchise de droits ce mélange en provenance des États-Unis, tel qu'il est classifié aujourd'hui.

• 1120

M. Paul Bonwick: Je ne semble pas avoir de réponse claire. C'est peut-être que je ne comprends pas. La reclassification va-t-elle mettre en péril tout l'accord? Oui ou non? Cela peut-il faire tomber l'accord ou pas? La question est très simple.

M. Mike Gifford: Si le gouvernement agit en ne tenant pas compte de nos obligations internationales, il devra en subir les conséquences, comme l'ont laissé entendre nos collègues des Finances.

M. Paul Bonwick: Vous dites donc que cela pourrait mettre en péril l'accord.

M. Mike Gifford: Lequel? L'Accord de l'Uruguay Round?

M. Paul Bonwick: Oui.

M. Mike Gifford: Cela ne met pas en péril tout l'accord, mais le Canada prêterait le flanc à la contestation et à la riposte...

M. Paul Bonwick: Sur ce point-là en particulier.

M. Mike Gifford: sur cette question précise.

M. Paul Bonwick: Voilà la réponse que je cherchais. Merci.

Le président: M. Coderre voudrait avoir un petit...

[Français]

M. Denis Coderre: Je suis d'accord avec mon collègue de Frontenac que nous devrons également nous pencher sur la question de la santé.

Comme conclusion, j'aurais une question sur la composition même de la crème glacée. Le ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire exige des normes précises pour la fabrication de la crème glacée. Est-ce que le fait d'utiliser ce nouveau mélange d'huile de beurre et de sucre, qui est composé en plus grande partie de sucre, influe sur la composition même de la crème glacée? Et finalement, est-ce qu'Agriculture Canada surveille de plus près la fabrication de la crème glacée depuis que l'utilisation de ce mélange est devenue monnaie courante?

[Traduction]

M. Mike Gifford: Monsieur le président, comme on l'a déjà mentionné, la définition des éléments constitutifs de la crème glacée se trouve dans les règlements de Santé Canada. Agriculture Canada, maintenant l'Agence d'inspection des aliments, est chargée de contrôler et de garantir la qualité des produits laitiers fabriqués au Canada, ainsi lorsqu'un produit entre au Canada à destination d'une usine de crème glacée, il sera soumis à l'inspection de l'Agence canadienne d'inspection des aliments.

Je crois, comme on l'a déjà remarqué mais peut-être aussi oublié, il y a différents marchés pour la crème glacée au Canada. Il y a les crèmes glacées de qualité, qui se vendent à des prix relativement élevés, les fabricants de ces crèmes glacées-là n'utiliseront tout simplement rien de moins que de la crème pure qui serait de la crème. Ce produit-ci pénètre, en autant que nous pouvons le déterminer, les échelons les plus bas du marché; ce sont des crèmes glacées, au fond, qui se vendraient en spécial et à rabais dans les supermarchés. Par le passé, avant l'introduction de ce mélange en particulier, ces types de crèmes glacées ne se faisaient jamais avec du lait frais, mais avec des poudres de lait et d'autres produits de remplacement.

Donc, il existe plusieurs marchés différents pour la crème glacée au Canada. Le sommet de l'échelle continue à utiliser le lait frais et la crème fraîche et le bas de l'échelle utilise toutes sortes de combinaisons et de mélanges de poudres, d'huile de beurre, de sucres, et Dieu sait quoi d'autre. Tous ces ingrédients sont conformes à la définition de la crème glacée telle que définie par Santé Canada.

Le président: M. Harvard voudrait poser une dernière question.

Monsieur Bonwick, quel était votre rappel au Règlement?

M. Paul Bonwick: Mon rappel au Règlement portait sur ma dernière question. Je voulais tout simplement m'assurer que ce que M. Gifford a dit était clairement consigné au procès-verbal. Il a déclaré qu'à son avis le fait de reclasser ou de corriger une erreur ne compromettrait aucun autre aspect de l'entente, et que la contestation ne pouvait porter que sur ce point particulier.

Le président: Merci.

M. John Harvard: Merci, monsieur le président. J'essaierai d'être extrêmement bref. Cette question est pour M. Core.

Monsieur Core, je cherche des précisions. Je pense que cette séance a été riche en information pour nous. J'ai besoin de votre aide sur ce point-ci.

Il est assez normal que les produits, qu'ils soient à l'intérieur de la gestion de l'offre ou à l'extérieur de la gestion de l'offre, se présentent sous des formes différentes avec différentes normes de qualité. Il semblerait, en l'occurrence, que vous, les producteurs laitiers, préféreriez servir le sommet de l'échelle de ce marché mais vous avez choisi pour une raison quelconque de ne pas servir le bas de l'échelle.

M. Gifford nous a dit que pas plus tard que l'année dernière—et je suppose que tout cela est motivé par les prix—l'importation de ces mélanges en provenance des États-Unis a baissé d'un sommet qui dépassait 80 p. 100 à 6 p. 100. Si vous, en tant qu'industrie, en tant que producteurs laitiers décidiez de servir le bas de l'échelle de ce marché... Je pense qu'il y a ici deux questions. Premièrement, pourquoi ne le faites-vous pas? Deuxièmement, ne pourriez-vous pas simplement battre les Néo-Zélandais et les Mexicains?

• 1125

M. John Core: Votre question touche à l'essentiel, à savoir si le gouvernement va continuer ou non à donner son soutien à la gestion de l'offre dans notre pays. Si j'ai bien compris, la politique du gouvernement consiste à offrir du soutien à la gestion de l'offre. Ce soutien est accompagné d'un engagement de la part du gouvernement d'appliquer les tarifs qui ont été négociés à la frontière.

M. John Harvard: Je pense que j'ai bien compris ça, monsieur Core. Je voudrais savoir pourquoi les agriculteurs—malgré la gestion de l'offre, et moi je suis en faveur de la gestion de l'offre—pourquoi en tant qu'industrie, vous ne vous chargez pas simplement de ces importations et vous ne vous emparez pas de ce commerce?

M. John Core: C'est parce que si on continue à concevoir des produits destinés à éluder la protection à la frontière, on va finir par conclure que si tout est question de concurrence avec les États-Unis parce que personne ne veut appliquer les règles frontalières, il va falloir réduire tous nos prix au niveau des prix américains. Si vous poussez cet argument jusqu'à son ultime conclusion, on renonce simplement au soutien pour la gestion de l'offre.

Dans le cadre de la gestion de l'offre le gouvernement a dit que si les producteurs canadiens pratiquent la régulation des approvisionnements, le gouvernement du Canada leur donnera deux choses en retour. Premièrement il accordera une protection à la frontière, comme cela a été négocié à l'OMC—nous ne demandons rien de plus ou de moins que ce que nous avons négocié—et deuxièmement, il leur donnera l'occasion d'avoir un produit au prix interne au Canada. C'était là l'engagement du gouvernement du Canada. Nous sommes tout à fait prêts à fournir le beurre pour ces crèmes glacées de qualité inférieure que nous fournissions autrefois. La seule raison pour laquelle les fabricants n'utilisent pas le beurre c'est que le prix de celui-ci est fixé au niveau interne. Ils ont contourné ces restrictions aux importations et ils ont mis au point un produit qui coûte 1 $ de moins le kilogramme.

Je vais vous poser la question suivante. Qui est propriétaire de l'industrie de la crème glacée au Canada aujourd'hui? Si les exploitations laitières de notre pays fournissent les matières grasses pour la crème glacée, le profit va à l'industrie laitière canadienne. Les grandes sociétés de crème glacée de notre pays sont maintenant la propriété de deux sociétés étrangères. Et les profits, où vont-ils, si ces sociétés peuvent gagner quelques cents de plus par litre de crème glacée? Ils quittent le Canada.

Qui défendons-nous ici, l'industrie laitière canadienne, ou bien les propriétaires étrangers de sociétés qui sont propriétaires de l'industrie de la crème glacée canadienne? Je pense que cette question est simple.

Le président: Merci.

Merci à vous tous d'être venus ce matin. C'était une séance d'information, et on a recueilli beaucoup d'information. Je pense que nous devrons étudier la transcription, et attendre la décision de Revenu Canada à la requête des Producteurs Laitiers du Canada.

Merci à vous tous. Nous nous reverrons peut-être encore.

La séance est levée.