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INAN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires autochtones et du Nord


NUMÉRO 129 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 19 novembre 2018

[Énregistrement électronique]

  (1535)  

[Traduction]

    Bienvenue à tous. Commençons.
    Nous sommes sur le territoire non cédé du peuple algonquin au Parlement, à Ottawa. C'est un élément modeste de l'hommage de tous les Canadiens et de l'effort qu'ils déploient pour la vérité et la réconciliation. J'encourage tout le monde à consulter des traités, à effectuer des recherches sur nos relations et à se mobiliser afin de progresser vers la réconciliation.
    Il s'agit de notre 129e réunion, et conformément à l'article 108(2) du Règlement, nous menons une étude sur les stratégies et projets d'infrastructure dans le Nord.
    Nous accueillons aujourd'hui Glenn Campbell et Lisa Mitchell, du Bureau de l'infrastructure du Canada. Bienvenue.
    Nous recevons Pierre Lavallée de la Banque de l'infrastructure du Canada. Bienvenue.
    Selon le processus, vous disposez de 10 minutes au maximum. Si vous utilisez moins de temps, cela nous donnera l'occasion de vous poser des questions qui appellent des réponses plus approfondies. Il reste donc 10 minutes pour chaque exposé. Nous passerons ensuite aux séries de questions des députés.
    Nous allons commencer par le Bureau de l'infrastructure du Canada.
    Je vous remercie de nous avoir invités à prendre la parole au sujet des infrastructures, surtout dans le Nord. Je suis heureux d'être accompagné aujourd'hui par M. Pierre Lavallée, président et chef de la direction de la Banque de l'infrastructure du Canada, qui vous parlera lui-même du rôle de cette nouvelle société d'État pour répondre aux besoins en infrastructures du Canada.
     En tant qu'ancien dirigeant du Bureau de transition à Infrastructure Canada, j'ai été heureux d'avoir l'occasion de contribuer à l'élaboration des politiques et à la mise sur pied de la Banque, en décembre 2017. Depuis, en tant que sous-ministre adjoint d'Investissement, partenariats et innovation, le rôle de mon équipe s'est déplacé vers le soutien ministériel à cette nouvelle société d'État qui relève du ministre de l'Infrastructure et des Collectivités et la collaboration avec M. Lavallée et son équipe.
    D'une manière plus générale, nous cherchons et appuyons des moyens de promouvoir davantage l'investissement privé dans les infrastructures publiques grâce à des partenariats et à des modèles d'investissement dans les infrastructures. La Banque de l'infrastructure du Canada est un outil parmi d'autres qui aide les gouvernements partenaires à construire davantage d'infrastructures; elle joue un rôle important dans le plan Investir dans le Canada du gouvernement.
    Permettez-moi de souligner brièvement certains points que mes collègues du ministère, qui se sont présentés devant vous le 15 octobre dernier, ont abordés, en particulier les programmes et activités qui appuient l'établissement des infrastructures et qui abordent les répercussions de ces dernières sur le Nord.
    Le plan Investir dans le Canada prévoit 2 milliards de dollars pour un large éventail de projets d'infrastructure dans les collectivités rurales et nordiques répondant à leurs besoins particuliers. L'approche est conçue pour tenir compte des priorités des collectivités rurales, éloignées et autochtones, tout en aidant à faire croître les économies locales, à bâtir des collectivités fortes et inclusives, et à protéger l'environnement et la santé des Canadiens.
    Reconnaissant l'engagement du gouvernement fédéral à l'égard des infrastructures publiques dans les collectivités rurales et nordiques, le gouvernement a augmenté la part du financement fédéral des projets à 60 % pour les collectivités de moins de 5 000 habitants. Les projets réalisés dans les territoires et les collectivités autochtones sont admissibles à une contribution fédérale supérieure, pouvant aller jusqu'à 75 %. Les investissements du gouvernement fédéral comprennent 400 millions de dollars fournis par l'entremise du Fonds pour l'énergie dans l'Arctique afin de promouvoir la sécurité énergétique dans les collectivités du Nord. La semaine dernière, les gouvernements du Canada et des Territoires du Nord-Ouest ont annoncé le premier investissement dans le cadre du Fonds pour l'énergie, qui est destiné au projet d'énergie éolienne à Inuvik, une source d'énergie efficace, plus fiable et plus propre pour les résidants d'Inuvik.
    Selon le partage des coûts habituel et dans le cadre du financement prévu par les ententes bilatérales — financement couvert par le volet rural et nordique et par le Fonds pour l'énergie dans l'Arctique, que j'ai mentionné —, les trois territoires recevront près de 1,6 milliard de dollars sur 10 ans pour une vaste gamme de projets d'infrastructure, qui créeront des emplois et amélioreront la qualité de vie des personnes vivant et travaillant dans les régions nordiques.
    De plus, le gouvernement fédéral aide à améliorer l'infrastructure de transport dans le Nord par l'entremise du Fonds national pour les corridors commerciaux, qui prévoit des investissements de l'ordre de 2 milliards de dollars sur 11 ans, dont jusqu'à 400 millions de dollars pour des initiatives de transport au Yukon, dans les Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut.
    Ces programmes tiennent compte des défis qui peuvent se poser lorsque l'on essaie d'appliquer divers modèles de création de services d'infrastructure aux conditions du Nord. Voilà pourquoi certains programmes du plan Investir dans le Canada comportent des conditions plus souples, comme une part de contribution fédérale plus élevée pour les collectivités rurales et du Nord.
    Bien que la prestation des services d'infrastructure pose des défis, en particulier dans les régions rurales et du Nord, d'autres modèles de financement, destinés à attirer des investissements privés, sont maintenant déployés de façon active. Plus précisément, le modèle de partenariats public-privé ou PPP a déjà été appliqué avec succès à l'implantation d'infrastructures importantes dans le Nord, comme l'aéroport international d'Iqaluit. Le modèle est également en cours de déploiement pour la réalisation du projet de route toutes saisons Tlicho dans les Territoires du Nord-Ouest. Ces deux projets sont financés par Infrastructure Canada. Ma collègue, Lisa Mitchell, qui m'accompagne aujourd'hui, y a participé directement et s'est rendue récemment dans les Territoires du Nord-Ouest pour les aider à lancer ce projet.
    Le projet hydroélectrique de la rivière Kokish, en Colombie-Britannique, est un exemple de la participation d'un gouvernement des Premières Nations à un projet de PPP à titre de partenaire investisseur. La Première Nation Namgis s'est associée à Brookfield Renewable Energy pour la conception, la construction, le financement et l'exploitation d'une centrale hydroélectrique de 45 mégawatts d'une valeur de 200 millions de dollars. Ces projets ne sont que quelques exemples de l'intérêt du secteur privé à travailler en partenariat avec les gouvernements pour atteindre des résultats dans l'intérêt public.
    Plus tôt cette année, j'ai participé, à l'Université de Toronto, à la conférence Arctic 360 sur les investissements dans l'Arctique, qui a réuni des intervenants de l'ensemble du gouvernement, du milieu universitaire, de l'industrie, du secteur financier et des experts internationaux, pour discuter de stratégies visant à susciter davantage d'intérêt pour les investissements dans le Nord, afin de soutenir l'infrastructure et le développement économique et social en général.

  (1540)  

    Pour ce qui est des autres activités de mobilisation, j'ai eu le plaisir de me rendre au Yukon pour des réunions sur la Première Nation de Carcross, afin de discuter des défis énergétiques dans le Nord avec l'Association canadienne de l'électricité. En fait, ces réunions se sont déroulées dans des installations nouvellement achevées et financées par Infrastructure Canada.
    J'ai aussi récemment visité dans la région de Kivalliq, au Nunavut, des collectivités comme Baker Lake et Rankin Inlet, et les mines d'or Agnico Eagle — je crois comprendre que les représentants étaient ici récemment —, pour parler avec les dirigeants communautaires et les représentants de sociétés minières des besoins en infrastructures dans le Nord.
    Nous reconnaissons que le Nord présente des défis uniques, mais nous continuerons à collaborer avec les gouvernements et les dirigeants locaux, le milieu universitaire et le secteur privé en vue de dégager des solutions et de susciter davantage d'intérêt pour la création d'infrastructures dans le Nord.
    La Banque de l'infrastructure du Canada est bien placée pour aider à relever ce défi, qu'il s'agisse de donner des conseils aux gouvernements et aux commanditaires, de structurer des projets, d'investir dans ces projets ou de contribuer à la prise de décisions fondées sur des données probantes, grâce à son rôle de centre d'excellence en matière de données et d'information. La Banque vise à transformer la manière dont les infrastructures sont planifiées, financées et développées au Canada et elle peut utiliser stratégiquement l'aide fédérale afin que les fonds publics servent à construire davantage d'infrastructures dont le Canada a besoin. Le modèle de la Banque peut également libérer les ressources limitées que les gouvernements peuvent consacrer à des projets qui ne conviennent pas aux modèles d'entreprises et de partenariats à but lucratif.
    Il existe de nombreux outils pour attirer les investissements dans les projets d'infrastructures dans les collectivités rurales, nordiques et autochtones; les nombreux intervenants travaillent ensemble pour favoriser la construction de plus d'infrastructures dans ces collectivités. Le gouvernement fédéral fournit les outils nécessaires pour aider les collectivités locales à prendre les décisions qui leur conviennent en matière d'infrastructure.
    Je vous remercie encore de m'avoir donné l'occasion de m'adresser à vous aujourd'hui. Je cède maintenant la parole à M. Lavallée. Je serai heureux de répondre à vos questions, tout comme Lisa pourrait le faire, après l'exposé.
    D'accord. Merci beaucoup.
    S'il vous plaît, allez-y quand vous êtes prêt.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Bonjour à vous et à tous les membres du Comité.
    Je suis heureux d'être parmi vous aujourd'hui. Je souhaite commencer par souligner que nous nous réunissons aujourd'hui sur le territoire non cédé des Algonquins.
    Je vous remercie de m'avoir donné cette occasion de parler de la Banque de l'infrastructure du Canada et de nos efforts pour appuyer la construction de nouvelles infrastructures d'un bout à l'autre du pays.
    Voici quelques observations sur notre organisation et notre rôle, pour bien situer le contexte en vue de la discussion que nous aurons ensuite.
    Je me suis joint à la Banque à la mi-juin 2018 et, depuis, tout s'est déroulé à un rythme étourdissant. Nous avons emménagé dans nos bureaux permanents, rencontré des ministres provinciaux et territoriaux de l'infrastructure afin de lancer un dialogue sur les priorités futures en la matière et établi un contact avec des promoteurs éventuels pour parler d'occasions d'investissement au Canada.

[Traduction]

    La Banque de l'infrastructure du Canada est une société d'État. Elle a pour mandat d'investir 35 milliards de dollars de concert avec les investisseurs privés dans de nouveaux projets d'infrastructure générant des revenus et qui sont construits dans l'intérêt public. Notre mandat porte également sur la collecte et le partage de l'information concernant les projets d'infrastructure et les pratiques. Cette façon de faire est favorable à une meilleure planification et prise de décisions au Canada et à notre capacité de fournir des conseils à tous les ordres de gouvernement.
    Qu'on parle des territoires, du Nord ou des zones éloignées des provinces, je comprends bien que plusieurs des obstacles qui freinent le développement économique sont liés à l'infrastructure du transport, des communications et de l'énergie.
    L'expérience m'a appris que les meilleurs conseillers sont de très bons auditeurs. Nous allons écouter ce que ce les chefs autochtones et territoriaux ont à nous dire sur les priorités des collectivités du Nord et en tirer un précieux apprentissage. Puis, nous allons déterminer comment la Banque peut apporter son aide, soit grâce à ses conseillers qui contribueront à ce que les projets soient plus attrayants pour les investisseurs du secteur privé, soit en tant que co-investisseurs dans des projets qui satisfont à nos critères, ou en aidant des promoteurs du secteur public à trouver d'autres sources de financement.
    Voyons d'un peu plus près certains des principaux éléments de notre mandat.
    Sur le plan de l'investissement, nous cherchons fondamentalement à combler une lacune qui empêche un projet de voir le jour. La Banque a été créée pour compléter les approches actuelles en matière de construction d'infrastructure. La réalisation de projets d'infrastructure classiques financés par le gouvernement ou selon un partenariat public-privé, ou PPP, ne va certainement pas cesser. Certains projets d'infrastructure continueront d'être entièrement financés par le secteur privé. Mais il existe encore d'autres possibilités. Nombre de responsables de projet peuvent réunir une partie des capitaux nécessaires dans le secteur privé, mais pas la totalité. C'est dans ce secteur que la Banque peut jouer le plus efficacement son rôle décisif.
    Depuis juin, j'ai entendu maintes fois de la part d'investisseurs institutionnels qu'ils sont prêts à examiner des occasions d'infrastructures nouvelles ou d'infrastructures comportant des éléments nouveaux. Nous promouvons des modèles de financement d'infrastructure innovateurs avec l'administration fédérale et les administrations provinciales, territoriales, municipales et autochtones ainsi que leurs organismes. Pour soutenir cet objectif, nous offrons une nouvelle option pour les aider à structurer et à financer partiellement de nouveaux projets d'infrastructure. Nous offrons également un moyen pour avoir accès à l'expertise, aux solutions novatrices et aux capitaux du secteur privé.

  (1545)  

[Français]

    Nos secteurs prioritaires sont les infrastructures vertes, le transport en commun ainsi que le transport et le commerce. Nous pouvons également investir dans d'autres segments du secteur des infrastructures, s'ils sont soutenus par des politiques gouvernementales.
    Chaque projet doit répondre au critère de l'intérêt public, si l'on veut s'assurer qu'il cadre bien avec les priorités et les politiques des gouvernements compétents, tout en contribuant à la croissance économique et à la durabilité.
    Chaque projet doit également avoir une composante de production de revenus, qui pourrait prendre la forme de péage réel ou virtuel, de droits, de titres de transport ou de mécanismes fondés sur l'appréciation de la valeur des terrains. La production de revenus est importante pour la structure financière, car nous prévoyons que les investisseurs privés assumeront une partie du risque associé aux revenus ou à l'utilisation.
    Nous sommes conscients que les besoins en infrastructures sont immenses dans les collectivités du Nord et les communautés éloignées. En fait, l'énoncé des priorités et des responsabilités que le ministre de l'Infrastructure et des Collectivités a transmis à notre présidente du conseil d'administration stipule ceci:
Au moment d'évaluer les projets potentiels situés dans des collectivités rurales et nordiques, la Banque devrait tenir compte des défis particuliers liés au développement des infrastructures dans ces régions. La Banque devrait également envisager une façon de contribuer à l'engagement du gouvernement [de parvenir] à [une] réconciliation avec les peuples autochtones en renouvelant les relations de nation à nation, de gouvernement à gouvernement, et entre les Inuits et la Couronne.
    Nous nous employons vivement à structurer le soutien pour de nombreux projets dans l'ensemble du pays.
    Au cours de rencontres récentes, nous avons parlé des difficultés à attirer des capitaux privés pour les projets de plus petite taille. En effet, les investisseurs les plus actifs dans les nouveaux projets d'infrastructure sont, en général, à l'affût de très grands projets. Nous cherchons donc des moyens de soutenir des projets qui, individuellement, sont trop petits pour attirer des capitaux privés, mais qui sont susceptibles de retenir l'attention des investisseurs une fois regroupés avec l'appui de la Banque de l'infrastructure du Canada.
    Nous établissons une équipe d'élaboration de projets, dont l'un des principaux aspects du rôle est de rencontrer les représentants des gouvernements et d'organismes du secteur public dans l'ensemble du Canada, y compris dans le Nord.
    Mon équipe et moi allons voyager dans le Nord au cours de l'année pour mieux comprendre les besoins des collectivités et les possibilités pour la Banque de conseiller les promoteurs et d'investir.

[Traduction]

    Comme je l'ai mentionné un peu plus tôt, nous avons un rôle important à jouer dans la cueillette et le partage d'information sur les projets d'infrastructure à l'échelle nationale. Notre équipe d'élaboration de projets aidera à donner aux projets une plus grande visibilité et fournira de l'information dans l'ensemble du Canada, en gérant le nouvel Inventaire des projets d'infrastructure canadiens. Il sera un outil précieux pour la planification à long terme ainsi que le développement d'une réserve de projets pour la Banque.
    Les données de l'Inventaire seront fondées sur les renseignements glanés auprès d'un vaste éventail de promoteurs du secteur public, notamment auprès du gouvernement fédéral, des gouvernements provinciaux, territoriaux et autochtones et des administrations municipales. Nous prévoyons produire la première version en 2019.
    De concert avec les promoteurs, la Banque de l'infrastructure du Canada se prépare à construire davantage d'éléments d'infrastructure nouvelle pour les Canadiens. Au cours des prochains mois, nous serons prêts à accélérer nos efforts sur le plan des investissements, de notre engagement et des conseils à prodiguer.
    Nous sommes tout à fait conscients du fait que l'infrastructure dans le Nord pose des défis, mais ouvre également des possibilités uniques. Nous nous réjouissons d'en apprendre plus sur les priorités régionales afin de trouver des moyens de réaliser le mandat de la Banque d'un océan à l'autre.
    Merci. Si vous avez des questions, je serai heureux d'y répondre.

  (1550)  

    Merci beaucoup.
    Les questions commencent avec la députée Jones.
    Merci, madame la présidente, et merci à nos invités d'être ici aujourd'hui. Nous vous souhaitons la bienvenue au Comité pour cette importante étude sur les infrastructures du Nord.
    J'aimerais simplement vous dire que je représente une région du Nord du Canada, que j'ai travaillé dans le Nord du pays et parcouru tous les territoires. Je comprends à quel point les travaux accomplis dans le Nord peuvent coûter cher.
    Mes premières questions s'adressent à M. Campbell. Vous avez récemment visité plusieurs territoires et rencontré des dirigeants communautaires. Quelles ont été les réactions de ces régions concernant les nouveaux programmes d'infrastructure conçus par le gouvernement du Canada? Les personnes rencontrées considèrent-elles que ce programme est adéquat pour satisfaire à certaines de leurs demandes et répondre à certains de leurs besoins au sein des collectivités?
    Merci de poser la question, par votre entremise, madame la présidente.
    Je pense que mon premier sentiment, ce serait qu'il y a beaucoup de dirigeants municipaux, d'aînés et de gens participant au secteur de l'infrastructure qui continuent de prendre connaissance de l'ensemble de programmes offerts dans le cadre du plan.
    Comme vous le savez, durant les premières années d'un plan décennal, on prend connaissance des modalités, puis on informe tout le monde des diverses sources de financement. Je pense qu'il y a beaucoup d'enthousiasme par rapport aux diverses catégories, particulièrement chez celles qui visent précisément les conditions dans le Nord. Je suis allé récemment au Yukon, puis dans les Territoires du Nord-Ouest, et je suis heureux de constater que des modalités permettent une certaine latitude à l'égard d'un investissement fédéral plus important afin de reconnaître certains des coûts associés aux affaires dans le Nord.
    Enfin, dans le cadre des discussions que j'ai eues, par exemple dans la région de Kivalliq, au Nunavut, j'ai appris que certaines des sociétés minières qui, par le passé, attendaient ou se tournaient vers les gouvernements pour obtenir du financement établissaient leurs propres chemins d'accès aux ressources et leur propre système d'énergie propre et s'investissaient pleinement auprès de la collectivité afin de réaliser des avantages économiques communautaires. Je dois avouer que, en tant que représentant fédéral, j'ai été assez ravi de voir comment elles y arrivaient.
    Nous avons reçu certaines d'entre elles à notre comité, et je crois que nous étions tous surpris par la quantité d'investissements qu'elles ont faits dans le passé.
    Nous avons également entendu de nombreux témoins d'administrations nordiques durant les derniers temps, particulièrement des sociétés directement liées à la mise en valeur des ressources. Elles ont soulevé l'existence de leurs besoins en infrastructure pour soutenir la mise en valeur de nouvelles ressources.
    Comment ces sociétés s'inscrivent-elles dans les programmes qui existent peut-être en ce moment? Quelles occasions ont-elles d'exploiter de nouvelles ressources? Les sociétés minières en particulier faisaient partie des groupes. Comment pouvons-nous les appuyer pour qu'elles puissent faire ce travail?
    J'ai deux commentaires par rapport à cette question.
    Le premier suppose un promoteur potentiel de ressources. Parlons de façon générique. Dans le passé, avant de prendre une décision relative à un investissement, celui-ci allait habituellement dire au gouvernement: « Voici ce dont j'ai besoin comme mesures de soutien pour accéder à une mine ou à un certain développement. » Dans le cadre du programme existant, les territoires, par exemple, ont plus de temps et obtiennent plus d'argent que par le passé pour travailler avec ces promoteurs de ressources et les collectivités locales afin de classer par ordre de priorité des projets qui contribueraient à exploiter cette ressource en plus d'aider les collectivités de soutien à classer les décisions par ordre de priorité.
    Par ailleurs, nous avons des outils comme la Banque de l'infrastructure du Canada, lorsque nous sommes en pourparlers avec ces sociétés d'exploitation des ressources, qui sont prêtes à participer, en partie, au modèle de partage des coûts ou de revenus si vous avez besoin d'aménager une route ou d'exploiter une ressource, ou d'obtenir un certain autre accès. C'est un nouvel outil qui nous permet, à tout le moins, de dialoguer pour essayer de combler cette lacune relativement à certains de ces projets de mise en valeur des ressources.
    Entre ces deux entités, on a, à tout le moins, plus d'outils dans le coffre pour tenir ces conversations avec des sociétés qui sont sur le point de prendre des décisions d'investissement à court terme.
    Ma prochaine question s'adresse à M. Lavallée.
    Je m'interroge au sujet de l'intérêt dans le Nord pour la Banque de l'infrastructure. Je suis toujours un peu préoccupée quand je vois de vastes projets gouvernementaux qui ne ciblent pas du financement ou un budget précis pour le Nord. C'est toujours l'endroit le plus cher où investir, et on dirait que c'est toujours plus difficile pour nous de livrer concurrence à la grande communauté urbaine du Canada.
    Je vous demande d'abord si on envisage de diviser le programme de façon à ce qu'il renferme un volet pour les investissements dans le Nord.
    Ensuite, par rapport à l'intérêt que vous avez vu, où se dirige la plus grande partie de cet intérêt? Est-ce dans l'infrastructure routière? Est-ce dans l'infrastructure énergétique?
    J'essaie seulement de me faire une idée des secteurs d'où proviennent les demandes.

  (1555)  

    Avec votre permission, je pourrais établir un lien entre la première et la dernière partie de votre question. Nous avons en fait reçu beaucoup de manifestations d'intérêt.
    Sans entrer dans les chiffres précis, si vous examinez la proportion à laquelle vous pourriez vous attendre entre le Nord — une activité économique donnée par rapport au reste du Canada — et le nombre de projets dont nous avons discuté avec des promoteurs possibles au cours des six derniers mois, on pourrait fait valoir que la juste part du Nord est peut-être un peu supérieure.
    Beaucoup d'idées différentes circulent à des échelles différentes, bien sûr. Comme on peut s'y attendre, ces idées se concentrent sur deux de nos trois secteurs prioritaires — le commerce et le transport et l'infrastructure verte sur le plan de l'énergie propre.
    Comme vous l'avez dit, l'énergie est un domaine d'intérêt et elle s'inscrit évidemment dans ce que nous essayons de faire.
    Passons maintenant au député Jeneroux. Bienvenue au Comité.
    Merci, madame la présidente. Je suis ravi d'être ici.
    Je remercie les témoins d'être ici aujourd'hui.
    J'aimerais commencer par vous, monsieur Lavallée. Je vous le demande au nom de nombreux intervenants: « Que diable avez-vous fait au cours des derniers mois? » Parce qu'un projet annoncé dans le cadre du projet du REM à Montréal était une répétition de l'annonce d'un projet de juin 2017. Ai-je raison?
    Eh bien, c'était un projet auquel la Banque a participé dès que nous sommes devenus opérationnels, soit à la fin de 2017. Je me suis joint à l'équipe au milieu de 2018. Nous avons d'abord annoncé...
    C'était toutefois dans l'Énoncé économique de l'automne 2016.
    Excusez-moi?
    C'était dans l'Énoncé économique de l'automne 2016. La Banque figurait également dans la plateforme du Parti libéral, donc ce n'est pas une surprise qu'elle allait s'en venir, et pourtant, il n'y a qu'un seul projet, qui était essentiellement une répétition de l'annonce d'un projet initial. Ai-je raison de dire que c'était une répétition de l'annonce d'un projet initial?
    Je le décrirais comme un projet que la Banque a soumis au processus de diligence raisonnable dès le début de 2018. Il nous a fallu plusieurs mois pour le mener à bien, y compris des négociations détaillées avec le promoteur et le gouvernement du Québec, qui ont duré plusieurs mois avant que nous puissions nous entendre sur un investissement, un prêt d'une durée de 15 ans, comme vous le savez. Nous avons annoncé cette entente entre le milieu et la fin août.
    Cela me paraît une manière éloquente de dire « oui ».
    Toutefois, vous avez soulevé le prêt à terme. Il commence à un taux de 1 % et augmente jusqu'à un taux de 3 %. On a entendu des critiques importantes selon lesquelles, essentiellement, c'est le contribuable qui est à risque au bout du compte. Pouvez-vous expliquer comment ce taux a été déterminé pour ce projet particulier?
    Il a été déterminé pour ce projet particulier de la même façon que nous examinons chaque projet. Nous commençons par comprendre les aspects économiques du projet lui-même, et nous devons nous convaincre nous-mêmes, bien franchement, que le projet ne peut pas être pleinement financé dans le secteur privé, n'est-ce pas? Nous sommes ici pour combler une lacune et concrétiser un projet. Si nous n'intervenons pas, le projet ne sera pas réalisé.
    Le fait de nous convaincre nous-mêmes qu'il ne pourrait pas être pleinement financé par le secteur privé, ce qui veut dire qu'il n'est pas assujetti aux conditions du marché, nous amène à nous demander quel serait le bon instrument. S'agit-il d'un financement par emprunt ou d'un financement par actions ou encore de variations de ceux-ci?
    Dans le cas d'un financement par emprunt, nous demandons à quel taux nous pouvons en fait accepter le prêt sans compromettre le projet et sans fournir la possibilité aux bailleurs de financement par actions, de l'autre côté du bilan, d'obtenir un rendement disproportionné par rapport aux risques qu'ils assument.
    Autrement dit, nous essayons de comprendre le bilan dans l'optique de procéder au mieux du projet et savoir où nous pouvons combler la lacune existante et comment en tirer le meilleur pour faire en sorte que tout le monde absorbe le risque pour lequel on s'attendra à obtenir un rendement.

  (1600)  

    Vous dites que le but, c'est de concrétiser les projets. Encore une fois, cela demeure un projet qui n'a toujours pas été concrétisé, qui était essentiellement déjà prévu avant même que vous repreniez le rôle.
    Dans votre lettre de mandat, particulièrement à l'annexe A, il y a un en-tête intitulé: « Possibilités d'investissements prospectives », où on dit ceci:
À mesure que sa capacité et son expertise mûrissent, la Banque devrait déterminer si elle peut soutenir les investissements dans des projets de plus petite envergure ou dans des regroupements de projets qui pris individuellement n'ont pas une envergure suffisante permettant d'attirer des investisseurs...
    Est-il juste de dire que la création de projets d'infrastructure dans le Nord serait une stratégie envisagée par la Banque?
    Je pense que certaines parties de l'infrastructure dans le Nord seraient agrandies et ne feraient pas partie de ce groupe des projets de petite envergure auquel vous faites allusion, je crois. Comme je l'ai dit dans mes commentaires précédents, le fait de trouver une façon de regrouper les petits projets sous une forme qui serait attirante pour les investisseurs du secteur privé est quelque chose que nous...
    Avez-vous une stratégie pour le Nord en ce moment? La Banque a-t-elle une stratégie pour le Nord?
    Voulez-vous dire une stratégie précisément pour le Nord? Nous n'avons pas élaboré de stratégie distincte pour le Nord. Nous considérons davantage les choses par projet ou par groupes de projet.
    Vous avez 35 milliards de dollars. Vous n'avez pas de stratégie pour le Nord. Vous avez répété l'annonce d'un projet qui avait déjà été annoncé.
    Je reviens à ma question initiale, c'est-à-dire: qu'avez-vous fait depuis ce moment? Je m'excuse d'être dur avec vous, monsieur Lavallée. Vous êtes le représentant, mais je crois qu'il y a beaucoup de confusion avec de nombreux intervenants quant à savoir où la Banque s'inscrit dans l'investissement global concernant l'infrastructure du Canada.
    Nous n'avons pas élaboré de stratégie pour le Nord parce que nous n'avons pas d'affectations géographiques particulières. Nous nous concentrons sur trois secteurs. Nous examinons ces secteurs d'un océan à l'autre.
    En ce qui concerne le niveau d'activité de la Banque, la réalisation de bons investissements...
    Peut-être pour vous aider...
    ... prend du temps.
    Quand les Canadiens peuvent-ils s'attendre au prochain investissement?
    Je ne vais pas y accoler une date limite ou un délai particulier.
    Vous avez dit « dans les mois à venir ». Y a-t-il...
    Au cours des six derniers mois, nous avons participé à des discussions sur plus de 50 projets, dont 10 auxquels nous participons activement aujourd'hui. Les autres poursuivent leur chemin jusqu'à la maturité.
    « Participer activement » — cela veut-il dire qu'ils ont déjà été présentés au Cabinet à des fins d'approbation?
    Non.
    D'accord.
    Notre conseil d'administration prend les décisions d'investissement.
    C'est maintenant au tour de la députée Blaney de poser les questions.
    Je vous remercie tous d'être ici avec nous aujourd'hui.
    Je vais aussi commencer par vous, monsieur Lavallée.
    Je suis curieuse. Pourriez-vous m'expliquer un peu comment vous vous y prenez pour savoir quel sera le rendement sur l'investissement pour le secteur privé? Comment cela est-il négocié?
    Nous adoptons le point de vue d'un rendement raisonnable, ajusté en fonction du risque par rapport à d'autres projets comparables qui se sont déroulés dans l'industrie ailleurs dans le monde.
    Pour ce qui est de l'obtention par le secteur privé d'un rendement sur l'investissement, cela sera-t-il communiqué au public, aux Canadiens, afin qu'ils comprennent quelle partie de l'investissement provenait du gouvernement, quelle partie de l'investissement provenait de sociétés privées et quelle partie de ce rendement ils ont reçue?
    Je ne peux parler que d'un exemple précis. L'investissement que nous avons effectué dans le projet du REM et les bénéfices de l'investisseur privé lié à ce projet sont rendus publics et sont accessibles.
    En ce qui concerne les travaux qui doivent être effectués en matière d'infrastructure dans les régions comme l'Arctique et dans les collectivités nordiques très éloignées, nous savons qu'il y a depuis longtemps un déficit d'infrastructure. De quelle façon la Banque de l'infrastructure du Canada participera-t-elle au soutien et à la mise en oeuvre de projets afin que les membres de ces collectivités aient la capacité de faire des progrès par eux-mêmes sur le plan économique?

  (1605)  

    Dans le cadre de notre participation à l'effort global — car il s'agit bien d'un effort global, et nous ne prétendons pas fournir 100 % de la solution —, il y aura des situations, d'après ce qui est ressorti de discussions que nous avons déjà tenues, où la participation de différents ordres de gouvernement et d'investisseurs privés, jumelée à la capacité de la Banque de l'infrastructure du Canada d'adapter sa contribution au bilan d'un projet, signifiera que nous pourrons constituer un élément de la solution.
    Nous avons entendu à maintes reprises que le logement constitue un obstacle immense et important, et, quand je pense aux projets d'infrastructure, je conclus que le logement constituerait aussi un autre obstacle. Comment la Banque de l'infrastructure du Canada réussira-t-elle à mettre en oeuvre des projets s'il n'y a pas assez de logements pour que les personnes puissent travailler sur les lieux, ni de logements pour accueillir les travailleurs?
    Le logement ne figure pas parmi nos trois secteurs prioritaires. D'autres entités possèdent une expertise dans ce domaine et sont mieux placées pour traiter ce problème spécifique, vu qu'il s'agit d'un enjeu qui est, de toute évidence, lié à l'ensemble de l'écosystème, lequel sert à assurer une économie dynamique.
    Le fait que des acteurs du secteur privé cherchent à régler ces problèmes et examinent la viabilité de projets présente un risque. Je me demande si, quand vous collaborez avec le secteur privé dans le cadre de propositions, vous examinez ce type de projet dans l'optique de régler le problème de logement, parce que cela augmente le risque.
    Si quelqu'un d'autre souhaite intervenir, je n'ai aucune objection.
    Faites-vous référence à la capacité de loger les gens près de l'infrastructure, disons dans le Nord?
    Nous voulons loger les gens, mais nous examinons aussi la façon dont nous allons soutenir les personnes qui vivent dans des logements qui sont surpeuplés, où l'infrastructure menace de s'effondrer et où les gens deviennent malades. Quand il s'agit de projets, les responsables d'entreprises évaluent le risque. Cet élément fait partie du risque dans leur évaluation. Je me demande de quelle façon vous traitez cette question.
    La question générale du logement occupe assurément beaucoup l'attention des fonctionnaires. À titre d'entité désignée, la Société canadienne d'hypothèque et de logement consacre beaucoup de temps à l'examen de ce problème. Dans le cadre de leurs discussions avec le secteur privé, les responsables examinent le développement de l'infrastructure. Peu importe les outils qu'ils utilisent, en particulier dans le Nord, ils portent une grande attention à leurs travailleurs.
    Dans le cadre des projets dont j'ai récemment visité les installations à Kivalliq, les responsables ont consenti beaucoup d'efforts pour trouver comment embaucher des travailleurs de la région et les transporter de leur domicile au site, afin que le choc culturel causé par la durée de la période d'éloignement ne nuise pas à leur capacité à prendre part aux travaux. Aux fins de l'hébergement, on a installé des logements modulaires qui pouvaient être enlevés par la suite si la mine venait à fermer, pour faire en sorte de ne pas créer d'impacts environnementaux à long terme. Je dois dire que j'ai été assez impressionné par la réflexion effectuée par les responsables à propos de la façon de transporter des travailleurs vers le site et vers leur domicile et des moyens pour les héberger plus près de l'infrastructure qu'ils construisent. Je crois qu'on les incite à inclure ces éléments dans l'ensemble du dossier d'analyse.
    Merci.
    Monsieur Lavallée, une des choses que vous avez abordées dans le rapport que vous nous avez fourni concernait le soutien pouvant être apporté à l'égard de projets qui sont trop petits pour attirer des investisseurs du secteur privé grâce au regroupement de ces projets avec l'aide de la BIC, et portait sur la possibilité que cette initiative permette de trouver des investisseurs. Avez-vous des exemples de regroupement de projets que vous examinez ou que vous êtes en train de créer actuellement?
    Nous n'avons pas encore annoncé d'investissement en ce sens, mais je peux vous donner quelques exemples de projets qui, habituellement, ne satisferaient pas aux critères. Il ne s'agit pas de projets qui ne sont pas importants pour les collectivités; leur envergure est tout simplement trop petite selon les exigences des investisseurs privés. De tels projets pourraient toucher le traitement des eaux et des eaux usées ou la production d'électricité décentralisée et des miniréseaux. Nous sommes d'avis que ces deux domaines présentent un certain potentiel de regroupement ou d'agrégation — je ne sais pas exactement quel est le mot juste, mais je crois que vous comprenez l'idée —, ce qui les rendrait attrayants aux yeux des investisseurs privés.
    Merci.
    Ma dernière question s'adresse à M. Campbell. D'après ce que j'ai compris, la Banque de l'infrastructure du Canada est maintenant sur pied, et PPP Canada, la société de la Couronne, sera dissoute. Pouvez-vous m'expliquer la différence entre ces deux sociétés d'État?
    PPP Canada était une société d'État dont les activités visaient à soutenir des partenariats public-privé établis suivant le modèle du contrat axé sur la disponibilité. On applique ce modèle lorsqu'on collabore avec une administration et qu'on utilise le modèle de contrat qui englobe la conception des projets, la construction, le financement, l'exploitation et l'entretien. Il s'agit d'un modèle traditionnel d'approvisionnement qui comprend une grande participation des gouvernements à titre de bailleur de fonds de l'ensemble de l'actif en question, et ce modèle est lié au soutien financier des contribuables pendant une période de temps. Ce modèle présente des avantages sur le plan de la construction, de la conception, de l'exploitation et de l'entretien. Après 10 ans, c'est maintenant le modèle qui prévaut partout au pays. De nombreuses provinces ont maintenant créé leur propre organisme à cet égard. Cela fait partie du fonctionnement. Même à l'échelle fédérale, bon nombre des ministères utilisent leur propre modèle de partenariat public-privé.
    Le gouvernement fédéral a décidé qu'il n'y avait pas lieu qu'il participe à ce type de modèle. Les anciens éléments de PPP Canada font maintenant partie d'Infrastructure Canada — le Fonds PPP Canada, tous ces projets...

  (1610)  

    Merci.
    ... et un grand nombre des employés y ont été mutés.
    Veuillez m'excuser, madame la présidente.
    Je sais qu'il y a beaucoup à dire à ce sujet.
    C'est maintenant au député Robillard de poser des questions.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Je remercie les témoins de leurs excellents témoignages et de l'excellente traduction des textes en français.
    Mes questions seront en français, bien sûr. La première s'adresse à M. Campbell.
    Quelle stratégie le gouvernement fédéral devrait-il adopter à long terme pour corriger les problèmes liés au déficit d'infrastructure qui nuit au développement de l'Arctique?

[Traduction]

    Du point de vue du gouvernement, le plan Investir dans le Canada tient compte du fait qu'il existe un déficit d'infrastructure à l'échelle nationale et dans différentes régions du pays. Le gouvernement a mis sur pied un plan sur 12 ans et y a affecté des sommes importantes qui sont incluses dans les 186 milliards de dollars alloués par province, par priorité et par territoire, et il a consenti des sommes supplémentaires pour appuyer la prise de décisions locales concernant la meilleure façon de régler ce déficit d'infrastructure.
    Le gouvernement a affecté ce qui, à ses yeux, constitue une somme imposante, qui a été triplée sur10 ans, et a utilisé différents outils pour combler le plus possible ce déficit d'infrastructure. Le gouvernement reconnaît, toutefois, qu'il s'agit d'un fardeau insoutenable pour les contribuables que de régler l'entièreté de ce déficit. C'est pourquoi le gouvernement a eu recours à des PPP et à la Banque de l'infrastructure du Canada pour essayer d'évaluer s'il peut, quand cela est approprié, faire appel au secteur privé pour l'aider à combler les lacunes en matière d'infrastructure, que ce soit au sud ou au nord du 60e parallèle, dans l'Arctique ou n'importe où au Canada, pour être franc.

[Français]

    Merci, monsieur Campbell.
    Ma prochaine question s'adresse à M. Lavallée.
    La Banque de l'infrastructure du Canada dispose-t-elle d'une équipe qui se penche précisément sur les questions relatives à l'Arctique ou aux peuples autochtones?
    Aujourd'hui, l'équipe de la Banque est toujours en formation et en croissance. Comme elle est toute petite, nous ne l'avons pas scindée par dossiers, mais plutôt par projets.
    J'ai fait allusion au nombre de projets d'intérêt provenant du Nord et des régions éloignées. Nos équipes s'affairent à une combinaison de projets de ce genre qui sont établis dans le Nord et d'autres projets, sans que les équipes soient scindées et qu'elles aient des mandats différents. Cela nous permet d'être plus flexibles et d'affecter les ressources à des projets d'intérêt, plutôt que d'avoir certaines équipes ayant moins de projets à réaliser et étant donc moins occupées, et d'autres étant débordées. Répartir les tâches par projets selon la disponibilité des équipes nous permet de réagir plus rapidement.
    Comment l'organisation établira-t-elle l'ordre de priorité des investissements dans l'Arctique afin de répondre aux besoins des collectivités?
    Au fil des ans, nous chercherons à bien comprendre les priorités locales, régionales, provinciales et territoriales afin d'orienter nos activités et de les arrimer aux priorités des gouvernements, à tous les niveaux. Ce n'est pas la Banque qui, dans sa grande sagesse, va déterminer et imposer ce dont a besoin le Canada ou une région donnée. C'est l'approche inverse que nous essayons d'instaurer.
    Quelles sources de revenus le gouvernement du Canada s'attend-il à recevoir de la Banque? Ces revenus seront-ils transférés aux citoyens ou au secteur privé? Y a-t-il des éléments que vous n'avez pas eu le temps de mentionner lors de votre témoignage?
    Les revenus perçus par la Banque, par exemple les intérêts sur un prêt dans lequel la Banque aurait investi, seront versés dans les revenus généraux du gouvernement. C'est à celui-ci qu'il incombera ensuite de décider s'il veut réacheminer ces capitaux vers la Banque ou vers d'autres programmes.

  (1615)  

    Souhaitez-vous ajouter autre chose que vous auriez oublié de mentionner tout à l'heure?
     Au sujet des revenus, précisément?
    Oui.
    Je veux m'assurer de bien cerner les différents concepts.
    Il y a les revenus qui se rattachent aux projets d'infrastructure et qui devront financer les projets eux-mêmes. Une partie de ce financement reviendra à la Banque. Il s'agit d'un concept de revenu différent. Les revenus de la Banque seront des recettes d'investissements que nous aurons faits, plutôt que des recettes impliquant un lien direct entre les frais des usagers, par exemple, et la Banque. Nous n'avons pas de lien direct avec ce revenu à la source.
    Merci.

[Traduction]

    J'ai une question qui s'adresse aux deux groupes. Si une administration territoriale ou provinciale n'a pas la volonté ou la capacité de participer à un projet d'infrastructure — par exemple, une route —, une collectivité pourrait-elle collaborer avec le secteur privé, sans l'aide de l'administration territoriale ou provinciale, et avoir accès à de l'argent du gouvernement fédéral?
    Tout d'abord, nous nous attendons à ce que les responsables de la collectivité cernent les priorités concernant un grand nombre d'infrastructures et qu'ensuite ils décident à quel projet il est possible d'allouer les ressources dont ils disposent. Dans un grand nombre de ces cas, les collectivités contribueront aux projets, même si la Banque offre d'y participer.
    Dans certaines situations, si la collectivité locale est le promoteur public et fournit des capitaux, les responsables peuvent collaborer avec le promoteur privé et présenter à la Banque une proposition non sollicitée, ou les responsables de la collectivité pourraient s'adresser à l'administration territoriale ou provinciale, en tant que municipalité, ou à un autre ordre de gouvernement, pour présenter ce projet. La Banque et l'administration gouvernementale en question examineraient le projet et établiraient s'il est dans l'intérêt public. On chercherait à vérifier s'il y a un promoteur public lié d'une façon ou d'une autre au projet, ce qui le différencierait d'un projet lié à un promoteur privé.
    Les projets ne doivent pas obligatoirement avoir à la fois comme promoteur l'administration territoriale et municipale. Il pourrait s'agir d'un gouvernement d'une collectivité autochtone qui présente un projet, soit en collaboration avec des acteurs du secteur privé, soit par lui-même, dans le cadre de certains des programmes pertinents.
    Nous allons maintenant donner la parole à M. Jeneroux.
    Merci, madame la présidente.
    Le ministre précédent était en poste quand vous avez été embauché, monsieur Lavallée. Il a été par la suite écarté sans cérémonie parce que, pour être franc, il n'arrivait pas à réaliser les engagements au chapitre des dépenses en infrastructure. Le premier ministre l'a dit lui-même dans la lettre de mandat. Il y a maintenant un nouveau ministre en poste qui tient beaucoup de propos semblables à ceux que tenait le ministre précédent. Vous nous avez dit qu'il y a 10 projets qui vous enthousiasment sur lesquels se penche la Banque de l'infrastructure, mais vous ne pouvez cependant pas nous dire en quoi consistent ces projets. Pourquoi est-ce le cas?
    Dans le domaine des investissements, où je travaille depuis longtemps, il est reconnu, de façon générale, que le fait de divulguer et de discuter de façon publique des investissements que vous envisagez n'est jamais favorable pour l'investisseur, et j'ajouterais, dans le cas qui nous occupe, pour le projet même. Cela crée une dynamique complètement différente qui, honnêtement, n'aide personne, et pourrait même nous ralentir dans nos démarches.
    Je sais que votre objectif est d'accomplir le plus de réalisations possible rapidement, ce qui fait aussi partie de nos objectifs. Cela dit, nous souhaitons aussi faire les choses correctement. Nous voulons faire de bons investissements à titre de gardiens d'un volume très important de capitaux qui proviennent de fonds publics.

  (1620)  

    Pouvez-vous nous donner une estimation du montant d'un de ces 10 projets et une date vers laquelle nous pourrions nous attendre à ce qu'une annonce soit faite? Je pose cette question parce que je rencontre un certain nombre d'intervenants chaque jour qui, honnêtement, ont de la difficulté à comprendre si un projet satisfait ou non aux critères pour faire partie du portefeuille de la Banque d'infrastructure du Canada.
    En somme, vos activités portent sur trois domaines qui totalisent 15 milliards de dollars en investissement. Je ne sais pas quoi dire à ces intervenants, et, en toute franchise, ils attendent une annonce. Je suis certain que le ministre, d'un point de vue très politique, espérait que le projet du REM mettrait fin à ces questionnements; toutefois, cela n'a pas été le cas. Au contraire, cela a créé plus de confusion quant au processus. Je vais vous décrire un scénario possible, et dites-moi si vous avez déjà entendu parler d'une telle situation.
    Je viens de l'Alberta, une province qui dépend beaucoup du secteur de l'énergie, des oléoducs et des gazoducs. Le gouvernement fédéral a récemment fait l'acquisition du pipeline Trans Mountain, et, en bon gestionnaire des fonds publics, la Banque de l'infrastructure du Canada pourrait sembler avoir le mandat d'examiner le financement du pipeline Trans Mountain. Souscrivez-vous à cette affirmation?
    Si la présidente veut bien me le permettre, je vais revenir au début de votre question ou à certains de vos commentaires selon lesquels les gens ne savent pas exactement quel est le mandat de la Banque, et je reconnais cette situation. Nous avons tenu plus de 120 réunions en moins de six mois, et voici la première chose que les gens nous disent: « nous avons lu les documents, nous avons lu les communiqués, mais qu'en est-il réellement? » Je comprends la question. Je dirais que le fait d'annoncer notre premier investissement a envoyé un message au marché. Quand nous avons dit que nous serions souples, que nous ferions des investissements par capitaux propres ou par emprunt de diverses manières, je crois que ce message a été lié à cette seule annonce. Si nous ne présentons qu'une seule annonce à propos d'un seul investissement, alors que la portée de nos activités sera plutôt large, cela nous fait courir le risque de limiter la réflexion des gens quant à la question de savoir s'ils doivent présenter un projet qui nécessite un prêt à terme d'une durée de 15 ans. La réponse sera non.
    Je vous proposerais de dire aux personnes qui vous demandent ce qu'il est possible de faire avec la Banque de ne pas attendre que nous fassions d'autres annonces et de nous appeler maintenant s'ils ont une bonne idée et qu'ils croient que la BIC peut les aider à la réaliser. Nous entamerons une discussion qui portera sur ce projet en particulier.
    Est-ce que le pipeline Trans Mountain une bonne idée?
    Le gouvernement a déjà acheté le pipeline Trans Mountain. Cet actif ne nous concerne pas.
    En ce qui concerne l'utilisation de capitaux privés pour le projet de Trans Mountain, vous a-t-on demandé quelque chose par rapport au pipeline Trans Mountain?
    Nous n'avons pas...
    Je présume que cela s'inscrirait dans votre mandat.
    À dire vrai, notre mandat est d'investir dans des projets qui ne pourront être lancés par manque de capitaux privés. Dans le cas de Trans Mountain, le gouvernement n'a pas acheté l'actif parce qu'il manquait de capitaux. C'était une situation tout à fait différente.
    Je crois que le gouvernement dit souvent que...
    J'ai bien peur que votre temps soit écoulé. Vous n'avez que cinq minutes ce tour-ci.
    Nous allons terminer par le député Amos.
    Merci aux témoins.
    Je comprends que c'est une discussion difficile, et ce, d'un bout à l'autre du Canada, étant donné que les besoins dans le Nord sont tellement grands. Le secteur privé est disposé à investir des capitaux, mais il a ses limites.
    Disons qu'une initiative d'infrastructure est proposée dans le Nord, sur quels fondements...? Les critères de base qui seront utilisés pour un projet dans le Nord seront-ils différents par exemple, de ceux utilisés pour un projet de transport en commun dans le Sud? La Banque de l'infrastructure du Canada adopte-t-elle un point de vue différent pour les projets d'infrastructure dans le Nord?
    Je vous pose la question, monsieur Lavallée.
    Je crois qu'il serait juste de dire que nous examinons chaque projet potentiel en fonction de ses qualités propres et de ses circonstances particulières. Par exemple, on peut affirmer que les circonstances du transport en commun à Vancouver, à Toronto et à Montréal sont très différentes les unes des autres. Un projet routier dans le Sud de la Colombie-Britannique ne sera pas le même que dans le Nord ou dans les territoires. L'environnement économique ne serait pas le même dans chaque cas. Nous devons tenir compte de tous ces éléments pour déterminer si un projet est viable et s'il peut attirer des investisseurs du secteur privé.
    En résumé, nous devons examiner les circonstances particulières de chaque projet, y compris, donc, les projets dans le Nord et dans les collectivités éloignées.

  (1625)  

    Je comprends qu'il faut examiner les projets individuels, mais vous ne m'avez pas dit s'il y a un ensemble de critères particuliers pour les projets nordiques. C'est vraiment... L'intérêt de chaque projet est évalué, mais je ne suis pas sûr de savoir quels sont les critères d'évaluation.
    De façon générale, le projet doit cadrer avec notre mandat. Il doit également s'inscrire dans notre secteur de priorités et être dans l'intérêt public.
    Pour qu'un projet soit considéré comme étant d'intérêt public, il doit respecter les priorités des différents ordres de gouvernement des régions où le projet sera mis en oeuvre. En ce sens, on évalue le projet à travers divers prismes: le Nord, le territoire et les collectivités autochtones.
    À cet égard, c'est effectivement très adapté à la situation.
    Madame la présidente, j'aimerais donner le temps qu'il me reste à notre collègue M. Tootoo afin qu'il puisse poser des questions, s'il en a.
    Bienvenue, Hunter. Allez-y.
    Merci, monsieur Amos et madame la présidente.
    Je vous souhaite à tous deux la bienvenue. C'est bon de vous revoir.
    Monsieur Lavallée, dans votre témoignage, vous avez dit que « la Banque devrait tenir compte des défis particuliers liés au développement des infrastructures » et que « la Banque devrait également envisager une façon de contribuer à l'engagement du gouvernement à parvenir à une réconciliation ».
    De quoi devez-vous tenir compte précisément à ce chapitre? Vous dites simplement « devrait », et non « doit ».
    C'est peut-être ma faute.
    L'hon. Hunter Tootoo: Non, vous citez le ministre.
    M. Pierre Lavallée: Je me suis peut-être mal exprimé. C'est une question de temps de verbe.
    Plus sérieusement, au début du processus, nous consultons les responsables locaux pour connaître leurs priorités et savoir sur quoi nous devons axer notre attention et notre énergie. Si nous faisons bien cela, je crois que nous arriverons à faire ce que vous voulez.
    Merci.
    Monsieur Campbell, vous avez dit que vous vous êtes récemment rendu dans ma ville natale, Rankin Inlet. Les représentants de la société Agnico Eagle sont venus témoigner devant le Comité, ainsi que la Kivalliq Inuit Association, mais à un autre moment. Le Manitoba et Kivalliq veulent réaliser un projet hydroélectrique et de fibre optique. Cela n'a pas été facile pour eux d'attirer les investissements du secteur privé, mais ils nous ont dit que le problème était réglé. Je voulais juste savoir si, à ce chapitre, les choses avancent dans l'un ou l'autre de vos processus à l'étude.
    Sans entrer dans les détails d'un projet en particulier, je peux dire que nous connaissons bien les projets qui nous sont proposés par différentes sources. Je crois qu'on pourrait dire que les premiers à nous proposer un projet, que ce soit le gouvernement ou une entreprise du secteur privé qui veut peut-être que la Banque, ou même le gouvernement, agisse à titre consultatif... Je crois qu'on néglige souvent le fait qu'il faut souvent beaucoup de temps pour développer ces projets. Les projets au bout desquels le secteur privé touche des revenus sont plus complexes et prennent plus de temps, alors il est important de réaliser une étude de faisabilité pour les structurer de la bonne façon.
    Quand les collectivités locales proposent certains projets, qu'elles les proposent au ministère ou à la Banque de l'infrastructure... Et nous voulons qu'elles se manifestent et soumettent des projets. Ensuite, nous déterminerons la meilleure façon de procéder et examinerons minutieusement les projets pour voir s'ils peuvent être lancés ou si on peut les faire progresser.
    Nous devons vraiment encourager ce genre de discussion et de processus. Je suis heureux de voir que cela semble avoir porté des fruits au Nunavut.
    C'est tout le temps que nous avions.
    Merci beaucoup de vous être déplacés et d'avoir passé l'après-midi avec nous. Nous vous en sommes reconnaissants. Meegwetch. Nous allons prendre une courte pause, puis nous reprendrons avec notre deuxième groupe de témoins.

  (1630)  


  (1635)  

    Bienvenue.
    Nous accueillons les représentants d'Ingénieurs Canada et, par vidéoconférence, ceux de la Chambre de commerce du Yukon.
    Je demanderais aux députés de bien vouloir préciser à qui vous posez vos questions, que ce soit aux témoins par vidéoconférence ou à ceux ici présents.
    Je veux aussi souligner tout spécialement le fait qu'Ingénieurs Canada faisait anciennement partie de la famille. C'est bon de vous voir. Les ingénieurs et les géoscientifiques sont tous ensemble maintenant. Je voulais seulement m'assurer que notre relation était connue.
    Assez perdu de temps. Je sais que les députés ont hâte de poser des questions. Cette étude que nous avons entreprise sur l'infrastructure dans le Nord est une tâche colossale. Nous ne pouvons absolument pas non plus oublier le Yukon. C'est un plaisir pour nous de vous accueillir.
    Commençons par Ingénieurs Canada. Vous avez 10 minutes tout au plus. Si vous terminez avant, les députés auront plus de temps pour poser des questions.
    Commencez quand vous le voulez.
    Merci beaucoup, madame la présidente, de nous accueillir.
    Je suis très heureuse d'être ici au nom d'Ingénieurs Canada pour discuter des efforts déployés par les ingénieurs professionnels pour protéger les infrastructures du Canada dans le Nord contre les effets des changements climatiques au Canada. Je vais également vous parler du travail fait par les professionnels pour aider les collectivités autochtones et éloignées à renforcer leurs capacités et atteindre leurs objectifs en matière de planification, de conception, de construction et d'exploitation relativement aux projets d'infrastructure dans le Nord.
    Ingénieurs Canada est l'organisme national regroupant les 12 ordres provinciaux et territoriaux qui réglementent la profession d'ingénieurs au Canada et qui délivrent les permis d'exercice aux quelque 300 000 ingénieurs du pays. Ensemble, nous nous efforçons, dans l'intérêt public, de promouvoir la profession d'ingénieur.
    Ce sont les collectivités du Nord ainsi que les collectivités éloignées ou autochtones qui accusent le plus grand déficit infrastructurel du Canada. En 2017, Affaires autochtones et du Nord Canada a calculé que le déficit infrastructurel dans les réserves des Premières Nations aurait atteint à lui seul 9,7 milliards de dollars en 2018.
    Même si on s'attend à ce que la fréquence des catastrophes liées aux changements climatiques augmente, les collectivités du Nord et les collectivités autochtones et éloignées sont loin de pouvoir résister convenablement aux risques liés aux changements climatiques, ce qui contribue à creuser davantage leur déficit infrastructurel. Cela est dû en partie à des données climatiques inadéquates, mais aussi au manque d'uniformité des procédures d'évaluation qui nous empêche de réagir convenablement aux risques liés aux changements climatiques qui menacent les infrastructures.
    Cela m'amène donc à notre première recommandation: réaliser des évaluations de la vulnérabilité au climat dans le cadre des projets d'infrastructure dans les collectivités nordiques, éloignées et autochtones afin d'éclairer les mesures d'adaptation à prendre pour atténuer les risques potentiels liés aux changements climatiques et d'en établir l'ordre de priorité.
    Les infrastructures résilientes sont le moteur des sociétés productives, contribuent à la stabilité des industries et assurent la confiance du public. Des évaluations objectives de la vulnérabilité au climat permettront aux propriétaires et aux gestionnaires d'infrastructures d'être rapidement sensibilisés aux répercussions potentielles que les événements météorologiques extrêmes pourraient avoir sur les infrastructures dans les collectivités autochtones, éloignées et du Nord.
    Ingénieurs Canada, en partenariat avec Ressources naturelles Canada, a mis au point un instrument d'évaluation des risques climatiques qui permet de renforcer considérablement la résilience des projets d'infrastructure. Le protocole du Comité sur la vulnérabilité de l'ingénierie des infrastructures publiques, alias le protocole du CVIIP, permet de réaliser un examen systématique des données climatiques historiques et des conséquences connexes afin de déterminer les risques climatiques et les vulnérabilités au climat actuels. Il permet aussi d'anticiper la gravité et la probabilité des événements météorologiques extrêmes.
    Les données permettent de prendre des décisions d'ingénierie éclairées et de prioriser les éléments qui doivent être adaptés, mais aussi de savoir comment les éléments doivent être adaptés, s'il faut, par exemple apporter des modifications à la conception ou changer les procédures d'exploitation ou d'entretien.
    Le protocole du CVIIP a déjà été utilisé pour certains projets d'infrastructure spécialement sélectionnés dans le Nord ou dans des régions éloignées, par exemple pour la route de Yellowknife, la route 3, et les réseaux d'aqueduc et d'égout de la Première Nation de Moose Factory. Il a également servi à évaluer les risques climatiques qui touchent les aéroports de Churchill, d'Inuvik et de Cambridge Bay, dans le Nord.
    Ingénieurs Canada est fier de travailler auprès des collectivités des Premières Nations et avec des ingénieurs autochtones afin de renforcer les capacités locales en matière de planification, de conception, de construction et d'exploitation d'infrastructures résistantes aux changements climatiques. Pour vous donner un exemple récent, nous avons travaillé avec la réserve mohawk d'Akwesasnane en Ontario et avons appliqué le protocole du CVIIP pour évaluer les risques climatiques qui pèsent sur leurs réseaux d'aqueduc et d'égout. Cela a été fait en collaboration avec la Ontario First Nation Technical Services Corporation. Dans le cadre de ce travail, nous avons élaboré une trousse d'outils pour les Premières Nations qui intègre l'évaluation des risques climatiques aux plans de gestion des biens immobiliers des collectivités des Premières Nations.
    Nous croyons fermement que le gouvernement fédéral doit déployer des efforts en vue de renforcer la capacité des collectivités autochtones d'évaluer, de planifier et de gérer leurs infrastructures.
    En outre, Ingénieurs Canada travaille présentement à des initiatives pour favoriser la diversité et l'inclusivité de la profession afin de refléter la société canadienne. Nous avons notamment adopté des programmes de soutien pour augmenter le nombre d'Autochtones qui entrent dans la profession d'ingénieur, qui y prospèrent et qui y restent.

  (1640)  

    Madame la présidente, le protocole du CVIIP a attiré l'attention à l'échelle nationale. Selon l'Optique des changements climatiques que le gouvernement du Canada a récemment mise en place, le protocole du CVIIP d'ingénieurs Canada est l'une des trois méthodes d'évaluation de la résilience aux changements climatiques qui est conforme à la norme ISO 31000. Cet investissement constitue une première étape importante. Cependant, Ingénieurs Canada encourage le gouvernement fédéral à imposer, comme critère d'approbation de financement, l'adoption d'outils d'évaluation et de prévention comme le protocole du CVIIP, et ce, à l'ensemble des ministères fédéraux qui possèdent ou exploitent des infrastructures ou qui fournissent des services. Nous recommandons aussi vivement de rendre obligatoires les évaluations des risques climatiques dans le cadre des évaluations environnementales des projets d'infrastructure réalisés dans le Nord et dans les collectivités éloignées et autochtones.
    Cela m'amène à ma dernière recommandation: faire participer les ingénieurs agréés du Canada à la conception, à l'entretien, à la réhabilitation et au déclassement des infrastructures dans le Nord et dans les collectivités éloignées et autochtones du Canada.
    Douze ordres provinciaux et territoriaux réglementent l'exercice de l'ingénierie au Canada. Ils doivent veiller à ce que les ingénieurs rendent des comptes et qu'ils exercent de manière professionnelle, éthique et compétente et en conformité avec la loi provinciale ou territoriale applicable, le code de déontologie ou le cadre juridique pertinent. Les normes techniques et de conduite professionnelle sont établies, révisées, mises à jour et appliquées par l'ordre responsable de tous les ingénieurs professionnels d'une province ou d'un territoire. Les ingénieurs sont tenus de veiller à l'intérêt et à la sécurité du public dans l'exercice de leur profession.
    Pour cette raison, Ingénieurs Canada soutient et encourage fortement la participation directe des ingénieurs agréés dans la conception, la construction, l'entretien, l'évaluation, l'exploitation et la modification de tous les travaux d'ingénierie liés à des infrastructures dans des collectivités nordiques, éloignées ou autochtones au Canada. Cela contribuera non seulement à améliorer la transparence et à augmenter la confiance du public, mais aussi à assurer la sécurité du public et la reddition de comptes dans tous les projets d'infrastructure.
    Madame la présidente, je vous remercie d'avoir invité Ingénieurs Canada à témoigner devant le Comité aujourd'hui à propos de ce sujet important.
    Nous espérons que le Comité reconnaît le rôle essentiel que les ingénieurs jouent relativement aux infrastructures dans le Nord du Canada.

  (1645)  

    Merci.
    Nous accueillons Peter Turner et Kells Boland, du Yukon. Bienvenue.
    Vous pouvez commencer dès que vous êtes prêts.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je m'appelle Peter Turner. Je suis le président ou directeur général de la Chambre de commerce du Yukon. Cette chambre élabore des politiques et des documents de position par l'entremise de comités chargés des politiques sectorielles, y compris notre comité du transport et des infrastructures, présidé par Kells Boland. Kells interviendra dans un instant.
    Comme il n'y a pas de chambre territoriale similaire au Nunavut et que, jusqu'à tout récemment, la Chambre de commerce des Territoires du Nord-Ouest n'avait pas de personnel, la Chambre du Yukon offre également une voix, une perspective et un engagement pour l'ensemble du Nord sur des questions qui ont des répercussions sur les entreprises du Nord. Par exemple, nous travaillons actuellement avec Affaires Mondiales Canada et le Conseil économique de l'Arctique afin de les aider à recruter des membres pour le Conseil.
    Cette perspective nordique s'étend également au travail que notre comité du transport et des infrastructures entreprend, et j'aimerais vous présenter le président du comité, Kells Boland. M. Boland est le directeur de l'entreprise PROLOG Canada, établie à Calgary et à Whitehorse, qui se concentre sur les infrastructures de transport dans tout le Canada. Je vais maintenant passer la parole à M. Boland.
    Bonjour.
    J'aimerais m'assurer que vous avez une copie de mon dossier de présentation PowerPoint; je vais m'y rapporter pendant mon exposé.
    Nous l'avons. Merci.
    La Chambre de commerce du Yukon a recommandé l'adoption d'une stratégie panterritoriale en matière de transport et la création d'un organisme de coordination des corridors territoriaux. Cette recommandation a été adoptée par la Chambre de commerce du Canada par le truchement de son comité des politiques territoriales.
    J'aimerais vous donner un aperçu du contexte de la stratégie que nous avons recommandée, et je vais le faire en parlant des futurs ports et corridors de l'Arctique, à court et à moyen terme, et compte tenu du réchauffement du Nord.
    La première diapositive montre que le réchauffement du Nord signifie que la saison de navigation sera plus longue et qu'elle attirera plus de bateaux dans l'Arctique. Je suis sûr que tout le monde le sait, mais je vais simplement répéter que, au Canada, le passage du Nord-Ouest ne peut pas vraiment concurrencer son équivalent, le passage russe du Nord-Est ou la route maritime du Nord russe, en tant que raccourci entre le Nord de l'Europe et le Nord de l'Asie. Cependant, nous constatons un afflux de navires à destination de l'Arctique. Selon nous, il s'agit de navires de transport de ressources, des navires qui partent de projets de mise en valeur des ressources, ou qui partiront de futurs projets de mise en valeur des ressources en Arctique pour des marchés d'exportation outre-mer.
    Sur cette image, nous pouvons voir Milne Inlet. C'est un port qui dispose d'installations d'exportation pour la mine Mary River, située à l'extrémité nord de l'île de Baffin, et pour la société Baffinland Mines. En ce moment, au cours d'un été qui dure environ deux mois et demi, l'installation expédie environ une cargaison par semaine. Ce qui représente une augmentation considérable du volume du trafic du côté est du passage du Nord-Ouest, dans l'Arctique de l'Est.
    Nous avons également d'autres projets qui ont testé toute la traversée. Le Nordic Orion a transporté une cargaison de charbon en vrac de la côte Ouest du Canada jusqu'en Finlande en 2013. En 2014, le Nunavik a transporté une cargaison de nickel de la baie de Voisey jusqu'au Japon. Les navires évaluent les perspectives de l'amélioration de la viabilité d'une véritable voie maritime dans l'Arctique sur notre littoral nordique.
    Nous avons également vu un plus grand nombre de croisières dans l'Arctique, et de plus grands navires de croisière. Le Crystal Serenity, transportant 1 600 passagers, a effectué la traversée complète en 2016 et en 2017, et il en fera probablement d'autres.
    De plus, nous observons un nombre accru d'expéditions de recherche chinoises et russes qui, au moyen de brise-glaces, empruntent notre passage du Nord-Ouest; il pourrait y avoir aussi des migrants, des contrebandiers ou pire, ce qui augmente notre inquiétude face aux menaces des activités maritimes dans l'Arctique.
    La page suivante vous montre que les Russes demeurent au premier plan du transport maritime en Arctique pour les mêmes raisons qui feront que nous connaîtrons nous aussi une augmentation du transport maritime; non pas en raison du raccourci entre le Nord de l'Europe et le Nord de la Chine, mais parce qu'eux aussi exportent leurs ressources depuis l'Arctique par leur voie maritime en Arctique, la route maritime du Nord.
    Voici le projet de Yamal LNG, sur la péninsule de Yamal. Il n'est pas différent des projets que nous avons pour le delta du Mackenzie ou de ceux de l'Alaska pour le versant Nord. À un moment donné, nous pourrions bien voir le Canada et l'Alaska imiter les investissements qui ont été faits pour le projet Yamal LNG avec ce type de pétroliers et de technologie de terminal.
    La diapositive suivante montre essentiellement que nous aurons des exigences accrues visant à soutenir ce qui représente une véritable voie maritime dans l'Arctique. Cela concerne la navigation dans la glace et les services d'escorte pour les activités de recherche et sauvetage, les interventions de récupération en cas de déversement, la surveillance et l'interception. La Marine royale canadienne est en train de faire construire une flotte de patrouilleurs hauturiers pour l'Arctique, et un premier navire effectue déjà des essais en mer. Nous avons hâte que la Garde côtière mette en service son brise-glace lourd, le Diefenbaker; à un moment donné, entretemps, nous comptons sur quelques brise-glaces loués qui nous offriront une capacité provisoire, dans le Nord.
    Pour que vous ayez une idée de l'exigence: il ne s'agit pas simplement d'avoir un grand nombre de navires commerciaux, mais de la nécessité de soutenir ces navires commerciaux en protégeant cette nouvelle voie maritime.

  (1650)  

    Si vous regardez à la prochaine page, vous aurez une idée des infrastructures que nous avons mises en place, et qui consistent essentiellement en deux ports, celui de Milne Inlet et celui de Nanasivik, d'anciens sites miniers aujourd'hui transformés en installations navales de ravitaillement en eau profonde.
    De plus, Iqaluit est en train de se doter d'un débarcadère en eau profonde et Churchill vient d'être reliée au chemin de fer de la baie d'Hudson.
    Essentiellement, nos seules installations en eau profonde dans l'Arctique se trouvent dans l'Arctique de l'Est. Si vous tournez la page, vous aurez une idée du vide qu'on a dans l'Arctique de l'Ouest. Si l'un de ces navires — qu'il s'agisse d'un navire de la marine ou de la Garde côtière ou d'un navire commercial — est en difficulté, il n'y a pas d'eaux profondes à l'est de l'île de Baffin, c'est-à-dire jusqu'à la côte nord de l'Alaska directement à Dutch Harbour, dans les îles Aléoutiennes.
    Il y a trois endroits potentiels en eaux profondes dans l'Arctique de l'Ouest: la baie Grays dans le Nunavut; Tuk, qui est problématique en raison de la longueur du chenal d'accès; et King Point sur la côte nord du Yukon.
    Je vais parler de l'arrière-pays pendant une minute, et des répercussions du réchauffement du Nord sur ce qui était, et qui est encore, une innovation canadienne, c'est-à-dire le prolongement par chemin de glace des routes praticables en tout temps. Voici la route de la Tibbitt à Contwoyto, qui va jusqu'aux mines de diamant à la frontière entre les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut. La saison des routes d'hiver se raccourcit. Par conséquent, le carburant en particulier devra être transporté par avion jusque là-bas, comme c'est arrivé au cours d'une des années où la saison a été extrêmement courte.
    La page suivante vous montre que nous passons de ces prolongements de routes d'hiver à des routes praticables en tout temps; voici une photo de la construction de la route d'Inuvik à Tuk, qui est aujourd'hui achevée.
    Si vous allez à la page suivante encore, vous aurez une idée de la liste de souhaits des nouveaux corridors routiers reliant les ports actuels et futurs de l'Arctique. En commençant à l'extrême ouest, il y a la route de Dalton, qui va jusqu'à la baie Prudhoe en Alaska. Nous avons la route de Dempster, qui traverse le Yukon jusqu'à Inuvik et qui maintenant va jusqu'à Tuk. Puis, vous avez la route de la vallée du Mackenzie. Voilà la liste des souhaits, pour ce qui est des nouvelles routes vers les ports de l'Arctique.
    J'ai mentionné plus tôt la baie Grays. Le projet du port et de la route de la baie Grays relierait Yellowknife directement à la province géologique Slave, où se trouvent toutes les mines de diamant, ainsi que des mines de métal commun plus loin au nord, dans la région de Kitikmeot, au Nunavut directement sur la baie Grays.
    Au Nunavut, la route Nunavut-Manitoba relie la région de Kivalliq au Nunavut au système routier du Manitoba. Je me suis rendu à Milne Inlet, aux mines de Baffinland, à la mine Mary River. Les responsables veulent pouvoir produire en toutes saisons. Ils en sont actuellement à 4 millions de tonnes par an et ils veulent en arriver à 12 millions de tonnes par an; pour cela, ils construiraient une autoroute. Ils voudraient remplacer les 100 kilomètres de la route charretière qui sert au transport de minerai de fer jusqu'à Milne Inlet par un chemin de fer et qui finirait à Steensby Inlet, le port qu'ils ont proposé pour leur expansion finale dans le bassin Foxe.
    Comme je l'ai mentionné, la technologie est disponible. La technologie ferroviaire est une technologie dépassée, mais on peut certainement l'améliorer, et c'est ce que la société Baffinland Iron Mines est en fait en train de faire pour la mine Mary River. De façon plus générale, nous envisageons le transport ferroviaire du pétrole brut et du bitume, et c'est une solution de rechange au pipeline qui est à notre disposition.
    L'une des raisons qui nous pousse à faire cela, et je suis sûr que vous la connaissez, c'est que les sables bitumineux de l'Alberta sont limités par l'accès au pipeline. Ils ne peuvent pas avoir accès aux marchés internationaux par les pipelines d'exportation. Encore une fois, le gouvernement de l'Alberta a envisagé le transport ferroviaire de bitume. Il emprunterait une ligne de chemin de fer de Fort McMurray, en passant par le Yukon, jusqu'à Delta Junction, puis serait transbordé dans le pipeline de l'Alaska jusqu'à Valdez, qui donne accès aux marchés d'exportation internationaux. Il serait vendu au prix du marché mondial du bitume, ce qui est impossible pour le moment.

  (1655)  

    Par contre, les pipelines pourraient plutôt aller vers le Nord. Tout le monde connaît le pipeline Mackenzie qui devait acheminer le gaz du delta vers le sud. Peut-être que cela devrait aller dans l'autre sens. Un pipeline pourrait acheminer le bitume jusqu'au Nord. Il pourrait également prendre le shale de Canol, juste à côté de Norman Wells. Puis, nous pourrons le transporter jusqu'aux ports de l'Arctique faits pour l'exportation des ressources en pétrole et en gaz.
    À la page suivante, vous verrez qu'il y a une multitude de possibilités. Mon temps est presque écoulé, je ne vais donc pas passer en revue chacune d'elles. Le plus important à savoir, c'est qu'une multitude de possibilités correspond également à une multitude de lacunes dans la planification. J'en parle rapidement: les ports de l'Arctique et les corridors du Nord souffrent du manque d'intégration des plans; les investissements dans les infrastructures nordiques sont utilisés de manière désordonnée; les projets sont souvent menés par plusieurs administrations, mais il leur manque une entité de coordination.
    La dernière page contient nos recommandations: planification-cadre par un organisme de coordination des corridors territoriaux; regroupement de l'administration des voies maritimes, des ports et des corridors; modernisation des infrastructures nordiques à l'aide d'un partage des dépenses entre les utilisateurs et les gouvernements.
    J'espère que je n'ai pas trop dépassé mon temps de parole. Merci.
    C'est bien que vous ayez d'aussi belles cartes, monsieur Boland, et que j'aime les cartes, car vous avez en effet dépassé votre temps de parole.
    Des voix: Ha, ha!
    La présidente: Je suis sûre que je vais en entendre parler.
    Vous avez présenté un formidable exposé en donnant un aperçu régional. Nous l'avons trouvé très fascinant, je crois, et je vous en remercie.
    Nous allons commencer la période des questions par M. Bossio.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie les témoins d'être venus aujourd'hui. Nous avons entendu un bon nombre de témoins au cours des dernières semaines et des dernières séances.
    Je m'adresse à la Chambre de commerce du Yukon. Nous en sommes à l'ère des changements climatiques, de la résilience et de l'adaptation au climat, et de nos inquiétudes sur notre capacité à atteindre nos objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre aux termes de l'Accord de Paris, et un grand nombre des propositions que vous faites ici sont axées sur les infrastructures pétrolières et gazières. Nous sommes dans une ère où nous essayons de réduire les subventions à ce secteur, par rapport à ce qu'elles étaient dans le passé.
    J'aimerais avoir votre opinion à ce sujet et savoir comment vous justifiez l'injection de fonds fédéraux dans des subventions supplémentaires du secteur du pétrole et du gaz, alors qu'il y a déjà eu des investissements considérables et que nous nous sommes engagés à les éliminer progressivement d'ici 2025.
    Je ne fais pas l'apologie du secteur pétrolier et gazier, mais s'il doit passer dans notre cour, nous avons de bonnes façons de nous adapter à cette réalité. Les ports dont j'ai parlé ne sont pas nécessairement des ports pétroliers et gaziers. Le GNL ne produit pas autant d'émissions que le bitume et le pétrole brut. Il y a une ressource dans le delta du Mackenzie que l'on peut exploiter pour exporter du gaz naturel liquéfié, le GNL, ce qui est attirant pour l'Asie.
    Je pense qu'il s'agit d'un aspect légèrement différent, même si ce n'est peut-être pas la réponse que vous cherchez, en ce qui concerne l'objectif zéro émission. Ce dont nous n'avons pas parlé, c'est...

  (1700)  

    Dans un sens, j'examine également cet aspect. Comme nous allons essentiellement dans cette direction en tant que planète, je veux savoir quels types de développements nous faisons dans une perspective à plus long terme. Quelles pourraient être les autres utilisations des ports?
    Vous avez parlé de navires de croisière. Je pense que le tourisme représente certainement un aspect de la chose. C'est un côté. J'aurais pensé que la Chambre de commerce, en tant qu'organisation polyvalente, aurait mis l'accent sur l'infrastructure numérique. J'estime qu'il s'agit d'un domaine qui manque certainement de ressources et qui nécessite d'importants investissements.
    Eh bien, nous sommes certainement en faveur d'un système redondant pour le Yukon en ce qui a trait à la fibre optique, c'est-à-dire qu'un câble de fibre optique suivra la route de Dempster et se rattachera à la station-relais pour satellites d'Inuvik. Cela assure la redondance et permet dans les collectivités un grand nombre de connexions qui n'étaient pas disponibles auparavant. En outre, cela convient tant à nous qu'aux Territoires du Nord-Ouest.
    En ce qui concerne les émissions de gaz à effet de serre, ce dont nous n'avons pas parlé ici —  car nous partons des ports dans l'Arctique et en arrivons au corridor en direction sud —, c'est un programme national de lignes de transport hydroélectrique qui s'étend jusqu'au nord. Si le gouvernement fédéral devait écarter ce type d'investissement pour l'édification de la nation alors que nous comptons à peine 40 000 contribuables au Yukon, qui ne sont pas tous raccordés au réseau, alors ce genre de connexion — au site C en Colombie-Britannique, par exemple — serait hors de portée; par conséquent, si c'était là, il ne serait pas nécessaire de diminuer les émissions de gaz à effet de serre dans le Nord et d'offrir le soutien du secteur pétrolier et gazier qui vous préoccupe.
    Puis-je ajouter quelque chose?
    Bien sûr, je vous en prie.
    J'ai assisté à un atelier à Iqaluit en août dernier, et ce qu'on recommande principalement, c'est envisager une connexion Internet par câble. Je vous parle en fait d'un câble de fibre optique sous-marin allant jusqu'au Nunavut.
    En réalité, cela coûtera très cher, probablement la majeure partie du 1 milliard de dollars, et je reconnais qu'une population relativement petite en bénéficiera. Toutefois, si nous ne voulons pas que les gens soient séparés par ce fossé numérique, il faudra un jour que cela se concrétise. La solution actuelle, qui consiste simplement à construire plus d'antennes paraboliques, est évolutive, mais on ne peut bénéficier d'aucune économie d'échelle avec la connexion Internet par satellite. Le reste d'entre nous dépend des câbles de fibre optique, avec laquelle plus il y a de trafic, plus les coûts sont amortis sur l'infrastructure, mais nous ne réaliserons jamais ces économies d'échelle avec la transmission satellite, c'est pourquoi nous appuyons pleinement cette mesure.
    J'aimerais poursuivre notre discussion au sujet des ports, messieurs. Encore une fois, outre la simple utilisation que vous avez proposée — qui est liée au pétrole et au gaz —, quelles sont les autres possibilités de développement économique à long terme? Quels sont les domaines que nous devrions examiner?
    Ce qu'il faut précisément, c'est une voie maritime contribuant aux efforts de recherche, qui sont actuellement fondés sur les brise-glaces. Toutefois, nous voyons de nombreux autres pays non arctiques s'intéresser à l'Arctique. Ils ont besoin d'une base pour leurs activités de recherche; cela leur permettrait donc de mener ce type d'activité de façon efficiente et en toute sécurité.
    En définitive, qu'il s'agisse de pétrole et de gaz ou de minéraux sous-marins, il faut une base à terre pour ce type d'exploration et d'exploitation. C'est l'un des aspects.
    Comme je l'ai dit tout à l'heure au sujet des navires de croisière, les ports n'encouragent pas la présence de navires de croisière; il s'agit plutôt de protéger la sécurité de la navigation des navires de croisière. Dans deux cas, il n'y a aucune collectivité où ces ports seront situés. Il n'y a aucun endroit qui peut accueillir 1 600 personnes qui débarquent d'un navire de croisière. Ce serait le genre d'installations qui pourraient permettre une évacuation massive dans le cas où 1 600 personnes à bord d'un navire de croisière se retrouvent dans une situation critique. Ce n'est pas possible à l'heure actuelle.
    Il s'agit plutôt d'assurer la sécurité de la navigation au moyen d'une nouvelle voie maritime, où se fera le commerce provenant ou non du Canada, mais qui transitera par le Canada. Je vois cela comme l'équivalent de la voie maritime du Saint-Laurent, et c'est un aspect que nous pourrions envisager du point de vue du recouvrement des coûts, avec les droits exigibles aux autres navires qui passent par là. Ce serait l'activité économique associée...

  (1705)  

    Je suis désolé. J'aimerais poser une autre petite...
    Oh, mon temps est écoulé.
    Je suis désolée. Je vous ai accordé plus de temps, puisque je...
    Je comprends. C'est très bien.
    Nous allons céder la parole au député Waugh.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie ceux qui témoignent par vidéoconférence de même que les gens présents.
    Je vais d'abord m'adresser aux ingénieurs.
    Votre exposé me donne à croire que l'ingénierie est laissée de côté. Vous avez demandé aux gens autour de la table de ne pas oublier l'ingénierie. Je crois comprendre que vous avez l'impression d'être laissés-pour-compte. Pourquoi dites-vous cela?
    Une partie de mon témoignage visait à m'assurer que les ingénieurs agréés soient inclus dans l'évaluation des vulnérabilités au climat des divers aspects des projets d'infrastructure. Le gouvernement fédéral n'est pas toujours tenu de faire appel à des ingénieurs agréés. Nous vous demandons de recourir activement à des ingénieurs agréés, qui sont tenus de respecter des normes éthiques, dans le déploiement de ces projets.
    Avez-vous un exemple de projet qui a été réalisé sans la participation de votre organisme et qui présente maintenant des problèmes?
    Rappelez-vous que notre association est une association-cadre des organismes de réglementation, donc ces derniers prendraient probablement des mesures d'application ou des mesures disciplinaires si quelqu'un devait pratiquer l'ingénierie sans être agréé.
    David, pensez-vous à des exemples précis?
    Pas de mémoire, mais nous pouvons examiner cela avec nos organismes de réglementation.
    Vous comptez 290 000 ingénieurs?
    Oui.
    Combien d'entre eux connaissent bien l'Arctique? Combien d'entre eux viennent en fait de là et pourraient se démarquer?
    Nous avons deux associations territoriales qui réglementent l'ingénierie, au Yukon et à Yellowknife...
    Donc, il n'y en a pas au Nunavut.
    Je ne pense pas, non.
    D'accord, vous êtes donc présents dans deux des trois régions.
    Poursuivez.
    Oui, c'est exact. Elles ne comptent pas beaucoup de membres.
    Combien?
    Je pense qu'elles en comptent moins de 500. Habituellement, on y trouve également des ingénieurs agréés venant d'autres provinces. Il y a une grande mobilité des ingénieurs entre les provinces. Il peut s'agir d'ingénieurs qui résident sur le territoire ou d'ingénieurs qui viennent pour réaliser un projet d'infrastructure et qui doivent obtenir un permis de pratique pour ce territoire.
    D'accord. Combien d'entre eux sont spécialisés? Je pense que c'est ce que nous cherchons, en raison de tous les projets dont on parle dans ces régions.
    À l'heure actuelle, nous offrons de la formation sur le Protocole du Comité sur la vulnérabilité de l'ingénierie des infrastructures publiques, le CVIIP. Je vais laisser David en parler.
    Oui, nous donnons de la formation relative au Protocole à un certain nombre d'ingénieurs qui habitent dans le Nord. Nous l'avons probablement fait quelques centaines de fois, car nous avons donné une série d'ateliers au fil des ans. Comme l'a mentionné Annette, il y a aussi des ingénieurs qui viennent des provinces du Sud, mais qui travaillent dans le Nord. Ils réalisent des projets sur le terrain dans le Nord — ce genre de choses —, donc nous leur donnons de la formation également.
    Nous avons probablement enseigné le Protocole à quelques milliers d'ingénieurs à l'échelle du pays, et environ 20 entreprises du milieu des experts-conseils ont travaillé avec ce protocole, puis l'ont appliqué dans le cadre de leurs travaux de conception et de construction, par exemple.
    J'aimerais faire un petit commentaire. Je suis un ingénieur qui travaille dans le Nord depuis plus de 20 ans, je le faisais même avant de faire partie d'Ingénieurs Canada, j'ai donc un grand amour pour le Nord. J'ai travaillé à la mine Nanisivik. J'ai travaillé à Resolute Bay et à la Compagnie de navigation Canarctic lorsqu'elle assurait le transport de marchandises à partir de Nanisivik. J'ai donc une très bonne idée de certains des problèmes qu'il y a dans le Nord et je peux en parler.

  (1710)  

    Y a-t-il un établissement d'enseignement pour l'ingénierie là-bas, ou est-ce que tout se fait dans le Sud du Canada?
    Oui, l'enseignement se fait dans le Sud.
    C'est donc un problème.
    C'est un problème également, oui.
    D'accord.
    J'aimerais m'adresser à la Chambre de commerce du Yukon. Je veux vous féliciter tous les deux pour les cartes. Au cours des deux ou trois dernières semaines, nous avons reçu un certain nombre de groupes avec qui nous avons parlé de Churchill, de Murad Al-Katib et ainsi de suite. Il semblerait que le chemin de fer sera prêt d'ici environ un mois. Nous ne sommes pas certains, mais il y a eu une grande annonce la semaine dernière.
    Parlons de Churchill. Si vous n'avez pas d'objection à ce que j'en parle autour de la table, je dirais que le problème réside en partie dans le fait que, soudainement, des gens insistent à propos de Churchill, puis vous faites la promotion du Yukon et voulez une région différente. Vous comprenez les difficultés financières que nous avons dans les deux régions du Nord, et même si certains font la promotion de Churchill, nous avons également entendu parler d'un autre projet pour transporter le GNL de Whitehorse à Fairbanks. Vous avez aussi parlé d'hydroélectricité, qui, honnêtement, ne semble pas avoir le même coût, que ce soit à partir du Manitoba ou de la Colombie-Britannique. Je pense qu'il est faux de penser que l'hydroélectricité arrivera dans le Nord très bientôt.
    Si cela ne vous dérange pas, j'aimerais simplement parler du Nord avec vous. Commençons par vous, Kells. Nous avons des brise-glaces ici. Nous ne sommes pas certains qu'il y en a suffisamment dans le Nord à l'heure actuelle pour réaliser les projets illustrés sur certaines de vos cartes.
    C'est là toute la question.
    D'après moi, nous devons nous concentrer sur la côte Arctique, ce que nous n'avons pas fait auparavant. Le passage du Nord-Ouest a toujours été là, mais il était bloqué par la glace. Maintenant la glace fond. Cela ne veut pas dire qu'il est possible d'y naviguer avec n'importe quel type de bateau; il faut tout de même être escorté par un brise-glaces, car la glace qui fond se défait en icebergs ou en petits morceaux de glace qu'il faut tout de même enlever du chemin pour les grands navires.
    Le déglaçage est un aspect important. Il n'est pas possible d'envoyer des brise-glaces là-bas, et encore moins des patrouilleurs hauturiers pour l'Arctique de la Marine canadienne, sans un certain réapprovisionnement de Nanisivik. Nanisivik se trouve dans l'Est de l'Arctique, et cette voie maritime de l'Arctique s'étend jusqu'au-delà de la côte de l'Alaska.
    C'est notre message. Il y a une nouvelle voie maritime dans l'Arctique dans le passage du Nord-Ouest qui devient maintenant navigable sur une longue période.
    Je serais d'accord avec vous.
    Des représentants de Grays Bay et de Tuk étaient ici. Iqaluit éprouve également des difficultés avec son nouveau port. Aidez-nous à comprendre la façon dont on s'occupe du problème. Tout d'abord, le Nord est une région très vaste, n'est-ce pas? Sur quoi devrions-nous porter notre attention?
    Vous avez une excellente carte ici, mais je peux vous dire d'emblée que nous ne pouvons pas offrir les services que vous nous montrez. Donnez-moi un projet avec lequel nous devons aller de l'avant.
    Avec tout le respect que je vous dois, c'est exactement ce que je ne veux pas faire. Nous recommandons la création d'un organisme de coordination des corridors panterritoriaux, qui examinerait ce qui serait le mieux pour l'ensemble des territoires, non pas seulement le projet du moment qui est attrayant du point de vue politique pour un seul territoire.
    Je pourrais choisir un projet — King Point est un excellent projet que vous pourriez financer —, mais ce qu'il faut vraiment faire, c'est de prendre un peu de recul et d'examiner tous les besoins de cette nouvelle voie navigable et le développement économique du Nord, et de voir ce qui est le plus logique en analysant l'ensemble des territoires dans le Nord relativement à l'investissement en infrastructures que vous devez réaliser et l'argent dont vous avez besoin. Le Canada n'a peut-être pas l'argent nécessaire pour effectuer cet investissement. Eh bien, il existe d'autres options.
    Comme je l'ai mentionné, on ne peut pas traverser la côte de l'Alaska — aucun endroit n'a des eaux profondes, et on en aura besoin — avant d'atteindre Dutch Harbor et les îles Aléoutiennes. Pourquoi ne parlons-nous pas de peut-être travailler conjointement avec les États-Unis en vue de réaliser certains de ces projets et de toucher une partie de leur argent? Eux aussi s'inquiètent du fait que certains de leurs navires passeront à cet endroit.
    Les Chinois ont ce qu'ils appellent la route de la soie de l'Arctique. Ils veulent investir dans une infrastructure circumpolaire pour appuyer leurs eaux internationales dans l'Arctique en ce qui a trait aux activités de recherche. Ils font cela en Russie. Nous pourrions accepter leur argent, ou peut-être que cela compromettrait notre souveraineté.
    Nous devons discuter de cette question. Comment financer des projets coûteux dans l'Arctique qui profitent à la communauté internationale, mais qui sont réalisés dans nos eaux souveraines? Voilà l'objet de nos recommandations qui se trouvent à la dernière page.

  (1715)  

    Madame Blaney est la prochaine.
    Merci à vous tous d'être ici.
    Je vais commencer par les ingénieurs. Je crois que c'est le protocole du CVIIP. C'est bien cela?
    Oui. Excellent. C'est un nom difficile.
    Nous devons discuter de beaucoup de choses importantes en ce qui concerne la vulnérabilité et la résilience au changement climatique. Si nous commençons par le protocole, pourriez-vous nous en dire plus sur la façon dont il fonctionne et sa mise en œuvre?
    Vous avez mentionné qu'il a obtenu une certaine attention au pays. J'aimerais que vous nous en disiez un peu plus à cet égard.
    Ce protocole a été appliqué dans plus de 50 projets au Canada, à tous les ordres de gouvernement. Ce sont les propriétaires de l'infrastructure. Nous avons mené des projets d'infrastructures fédérales, provinciales et municipales.
    Il s'agit d'un processus d'évaluation qualitative préalable des risques qui suppose la participation non seulement d'ingénieurs, mais également de professionnels d'autres disciplines. Tout d'abord, il faut des climatologues. Les données climatiques sont extrêmement importantes, et on doit travailler avec les climatologues pour comprendre à quelle fréquence certains événements climatiques vont excéder la capacité de l'infrastructure. Par exemple, s'il tombe 150 millimètres de pluie en cinq heures, cela aura-t-il une incidence sur cette infrastructure? Quels sont les risques que se produise un tel événement maintenant et dans l'avenir? C'est la façon d'obtenir en quelque sorte les probabilités dans l'équation des risques.
    Ensuite, on utilise des experts et des données — si on possède des données à propos des opérations — sur l'infrastructure pour déterminer quelles sont les conséquences si le seuil est dépassé. Il pourrait s'agir de dommages, d'une panne et de la perte ou d'une réduction des services. Il existe différents degrés de conséquences. On doit classer les risques: élevés, moyens et faibles.
    Les risques élevés sont tout ce qu'il faut savoir. S'il s'agit d'un risque élevé, on prend des mesures. Il est utile d'établir l'ordre des priorités quant à savoir où il faut dépenser l'argent en vue de rendre l'infrastructure et le système qui la soutient plus résilients. C'est une question d'établir des niveaux de service et d'assurer la sécurité des gens afin qu'ils continuent à travailler et à jouir d'une bonne qualité de vie. Cela touche non seulement le Sud du Canada, mais également le Nord.
    Une des choses que vous avez dites dans votre exposé, c'est que les données sont inadéquates. Pourriez-vous me dire ce qu'il nous manque et où nous pourrions le trouver?
    Je vous garde occupé.
    Très bien.
    Les données climatiques sont toujours un défi parce que le climat est un paramètre très variable. Pour vous donner un exemple, je crois que c'était il y a environ 13 ans, Toronto a connu une panne importante sur l'avenue Finch. Cette panne a été causée par 150 millimètres de pluie très localisée. Pendant la même période, l'aéroport de Toronto en recevait 30 millimètres. Il y a des variations très locales, et nous n'avons pas nécessairement assez de stations de mesure pour obtenir les données nécessaires nous permettant de comprendre les situations locales.
    Souvent, les climatologues doivent utiliser des approximations en notant qu'il s'agit de la station la plus proche et qu'il y a peut-être une colline ou une montagne entre la station et l'endroit des précipitations; en utilisant leur jugement professionnel, ils peuvent faire des prévisions, mais ce n'est jamais une corrélation.
    L'autre aspect est, bien sûr, l'information sur les débits d'eau et ce type de chose. Notre réseau de données sur l'écoulement fluvial a connu un déclin au cours des dernières années, et nous devons le renforcer encore une fois parce que, avec l'eau, nous devons tenir compte de l'alimentation et des inondations. On doit concevoir des modèles, et ces modèles ont besoin de données. Si on n'a pas de données, alors on doit utiliser des approximations. Cela crée plus d'incertitude, et l'incertitude crée plus de risques. Voilà la notion.
    Vous avez parlé de plusieurs projets qui utilisent ce processus, mais, évidemment, ce n'est pas tout le monde qui y a recours, ce qui est inquiétant.
    Y a-t-il un pays qui accomplit plus de travail à cet égard, et quels sont les résultats qu'il a obtenus?
    C'est une question intéressante parce que nous appliquons en réalité le protocole dans d'autres pays. Dans ce secteur en particulier, nombre de pays dans le monde comprennent la nécessité de réaliser ce type de travail.
    Le Costa Rica est un des pays avec lesquels nous avons beaucoup travaillé. Il possède un plan national d'adaptation qui comporte une planification des infrastructures et ce genre de choses, et il évalue les risques. Nous travaillons avec lui afin d'appliquer le protocole, et il veut l'adopter comme outil national à l'égard de ses infrastructures.
    Je crois qu'on reconnaît la nécessité du protocole. J'assiste à beaucoup de réunions de la Convention-cadre des Nations unies. On vient juste de comprendre que ce travail est un premier pas. Si on veut évaluer le climat comme une boîte noire, comment pouvons-nous commencer à l'expliquer? Il faut comprendre d'abord nos risques. Ensuite, nous pouvons décider quelles sont les mesures nécessaires au lieu de seulement dire bêtement: « Essayons de dépenser beaucoup d'argent, et peut-être que cela fonctionnera. » Adoptons une approche raisonnée à cet égard.
    En raison de toutes les incertitudes liées au climat futur, nous ne savons pas à quelle vitesse les changements se produiront et quelle sera leur ampleur. Nous avons des modèles et bien des outils, et les climatologues se penchent sur la question, mais il plane encore beaucoup d'incertitude. Nous devons trouver des façons de s'adapter aux changements. La gestion des risques est de plus en plus une pratique normalisée en ingénierie parce que c'est la tendance mondiale.

  (1720)  

    Oui, en raison de tous les changements climatiques.
    Vous avez beaucoup parlé de travailler avec les collectivités autochtones et d'être en mesure d'effectuer des évaluations de leur vulnérabilité. Est-ce qu'on fait appel à vous pour réaliser ces évaluations afin que ces collectivités et d'autres puissent présenter des demandes pour obtenir des ressources supplémentaires en vue de corriger certains problèmes d'infrastructure?
    Allez-y, Annette.
    Nous aimerions que la capacité soit renforcée au sein de ces collectivités. Ensuite, nous souhaiterions qu'il y ait davantage d'ingénieurs autochtones qui y résident. Ils posséderaient les meilleures connaissances sur la façon d'aller de l'avant avec les projets d'infrastructure et de réduire la vulnérabilité au climat.
    La parole est à monsieur le député Robillard.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Je remercie tous les témoins de leurs excellents témoignages.
    Mes questions seront en français et s'adresseront à Mme Bergeron, qui est la présidente d'Ingénieurs Canada.
    Pouvez-vous donner des exemples d'innovation dans le domaine du génie qui pourraient contribuer à améliorer le réseau de transport du Canada dans le Nord?

[Traduction]

    Je crois qu'il faut être stratégique dans sa façon de faire. Par exemple, un certain nombre de projets de ressources dans les Territoires du Nord-Ouest pourraient, s'il y avait une route qui reliait tous ces projets et qui se rendait jusqu'à un terminal portuaire sur la côte de l'Arctique, stimuler une activité économique considérable. Je connais l'existence d'au moins cinq ou six mines qui ont essentiellement juste besoin de cette route. Si vous pouviez la construire, cela offrirait des possibilités de développement économique pour ces mines, et l'on pourrait financer cette route et également établir un corridor de transport, ce genre de chose, ce qui profiterait à ces projets.
    Je crois qu'il faut mettre en corrélation un certain nombre d'éléments. L'autre aspect, bien sûr, c'est les routes de glace qui ont été mentionnées. Les changements climatiques réduisent certainement leur efficacité et leur durée. Elles sont un bon mécanisme qui permet un transport rentable vers certaines des mines, mais, à mon avis, encore une fois, s'il y avait à cet endroit une route permanente — et je sais que le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest a réalisé des études en ce sens — qui se rendait jusqu'aux mines, elle deviendrait l'épine dorsale du transport.
    Quant au transport maritime, je crois que les commentaires des représentants du Yukon sont bien fondés, selon mes connaissances de cette industrie. Nous devons nous assurer, du point de vue de la souveraineté, que nous fournissons ces services. Si nous ne les offrons pas, nous renonçons à notre souveraineté, et il y a également les incidences environnementales.
    Certaines de ces aides à la navigation doivent être mises en place afin d'assurer un transport plus efficace.

  (1725)  

    Très brièvement, nous avons mentionné l'autoroute d'Inuvik à Tuktoyaktuk, qui a remporté des prix. Elle en a gagné un récemment. Ces autoroutes ne semblent pas être très novatrices, mais leur construction pose nombre de défis. C'est une autoroute primée, selon les pairs.
    Merci.

[Français]

    De quelle façon la profession d'ingénieur pourra-t-elle participer à l'établissement et à la modernisation du plan du gouvernement?

[Traduction]

    Une des initiatives que j'ai mentionnées pendant mon exposé, l'adoption de ce nouveau protocole, est une des trois méthodes énumérées dans le cadre de la nouvelle optique des changements climatiques. Je crois que cette optique sera un des aspects qui modernisera la façon dont nous allons de l'avant relativement à la vulnérabilité au climat.
    David, voulez-vous ajouter autre chose à cela?
    Oui, je pense que l'évaluation de la vulnérabilité nous permet de relever les difficultés et les problèmes qui doivent être réglés grâce à l'innovation et aux technologies que peuvent offrir les ingénieurs. Également, à mon avis, il importe d'étudier le rendement des autoroutes existantes. Je sais que l'autoroute Dempster pose certains problèmes, par exemple, et les ingénieurs peuvent en tirer des leçons qu'ils intégreront à la norme de pratique.
    Merci.
    Je vais laisser le temps qu'il me reste à mes collègues.
    Nous allons maintenant céder la parole à M. Amos. Nous sommes rendus à la fin de la séance, à moins que nous souhaitions...
    Merci.
    Il ne s'agit pas tant d'une question pour nos témoins, mais plutôt d'une information et d'une petite déclaration à la fin parce que nous sommes, comme notre présidente le souligne toujours, sur un territoire algonquin.
    Au cours des derniers jours, un témoin qui a comparu devant le Comité dans la dernière année, le chef Harry St. Denis de la Première Nation de Wolf Lake, une des collectivités de la nation algonquine, est décédé. Je crois qu'il serait approprié de souligner la contribution du chef local et régional, qui a donné beaucoup non seulement à sa propre communauté, mais également à l'ensemble de la nation algonquine et à notre pays, bien honnêtement, parce que des contributions comme la sienne dans le contexte de notre étude sur des revendications foncières particulières nous ont vraiment aidées à faire avancer le processus de réconciliation.
    J'aimerais que nous observions un moment de silence en l'honneur du chef Harry St. Denis.
    Merci, madame la présidente.
    [On observe un moment de silence.]
    Merci.
    J'aimerais remercier nos intervenants qui sont venus ici dans la salle et ceux qui ont comparu par vidéoconférence.
    Nous avons mené une discussion intéressante. Tous vos commentaires et tous vos mémoires seront inclus dans un rapport qui sera remis à tous les députés et auquel le gouvernement réagira.
    Vos commentaires et vos conseils sont pris très au sérieux. Nous apprécions vraiment votre collaboration et votre participation.

[Français]

    Merci. Meegwetch. Au revoir.

[Traduction]

    La séance est levée.
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