STANDING COMMITTEE ON PUBLIC ACCOUNTS

COMITÉ PERMANENT DES COMPTES PUBLICS

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 18 novembre 1999

• 1532

[Traduction]

Le vice-président (M. John Richardson (Perth—Middlesex, Lib.)): Puis-je avoir votre attention, s'il vous plaît? Les témoins sont ici et nous avons le quorum.

J'ai le plaisir d'accueillir les témoins du Comité des comptes publics. Des questions vont être posées successivement du côté de l'opposition puis du côté ministériel. Cette fois-ci, nous allons commencer par un député de l'opposition, M. John Cummins.

Mais je voudrais tout d'abord demander au général Auger de nous présenter les personnes du ministère de la Défense qui l'accompagnent.

Ensuite, M. Michols pourrait-il faire la même chose pour Santé Canada une fois que le général Auger aura terminé de présenter le personnel du ministère de la Défense nationale?

Brigadier-général Claude Auger (chef, Services de santé et commandant, Groupe médical des Forces canadiennes, ministère de la Défense nationale): Monsieur le vice-président, membres du comité, je suis le général Claude Auger. Je suis chef du service de santé des forces armées canadiennes. J'ai avec moi le lieutenant-colonel Greg Cook, il est à la tête de notre Direction des politiques médicales et il est spécialiste en santé professionnelle.

M. Dann M. Michols (directeur général, Direction générale de la protection de la santé, Programme des produits thérapeutiques, ministère de la Santé): Je m'appelle Dann Michols, je suis directeur général du Programme des produits thérapeutiques à Santé Canada. Je suis en compagnie de Ian MacKay, qui s'occupe des essais cliniques et du programme d'accès spécial au sein de mon service.

Le vice-président (M. John Richardson): Merci beaucoup.

Nous allons commencer cette réunion par le point de vue de Mme Maria Barrados.

Mme Maria Barrados (vérificatrice générale adjointe, Bureau du vérificateur général du Canada): Merci, monsieur le président. Je suis aujourd'hui accompagnée de M. Ronnie Campbell, de mon service.

Monsieur le président, je vous remercie de me donner l'occasion de présenter les résultats d'une note de vérification publiée dans le rapport d'avril 1999. Cette note traite de la ligne de conduite adoptée par Santé Canada et la Défense nationale pour l'utilisation avant homologation d'un médicament antipaludique, la méfloquine.

Cette question avait été soulevée dans des reportages, à la Chambre des communes et dans des lettres au vérificateur général. Pour répondre aux préoccupations du public et des parlementaires, nous avons l'habitude de les examiner minutieusement et de faire des enquêtes préliminaires. Si nécessaire, nous exécutons une vérification si nous estimons que la question est assez importante pour être portée à l'attention du Parlement. C'est ce que nous avons fait dans ce cas-ci et c'est ce qui nous a amenés à préparer la note de vérification.

• 1535

La méfloquine est recommandée par l'Organisation mondiale de la santé et par d'autres organisations pour lutter contre certains types de malaria devenant résistants à d'autres médicaments. Bien qu'autorisée dans un certain nombre de pays depuis la fin des années 80, la méfloquine ne l'était pas au Canada avant janvier 1993. Auparavant, il était possible de s'en procurer seulement dans le cadre de programmes spéciaux.

En 1992, la Défense nationale a obtenu le médicament antipaludique non homologué dans le cadre d'un essai clinique en vue de le faire utiliser par le personnel des Forces canadiennes déployé en Somalie.

Santé Canada autorise des fabricants à produire et à vendre des médicaments dont l'innocuité et l'efficacité ont été éprouvées. Seuls les médicaments homologués peuvent être vendus au Canada, sauf s'il s'agit de produits utilisés dans des conditions particulières et contrôlées. C'est dans de telles conditions—un «essai clinique»—que la Défense nationale a obtenu la méfloquine. Le concept et le protocole de l'étude régissant ce genre d'essai doivent être approuvés par Santé Canada.

[Français]

Le protocole de l'étude précisait les responsabilités des chercheurs, notamment celles de tenir des registres précis sur l'administration du médicament et de déclarer tous ses effets indésirables. Il indiquait également qu'il fallait obtenir le consentement éclairé de tous les participants—dans ce cas-ci, les soldats—et précisait que «pour chaque sujet recevant de la méfloquine, il faudrait recueillir des données sur son innocuité et sur son efficacité». Toutes les données devaient être remises régulièrement au fabricant.

J'aimerais vous dire, monsieur le président, que nous ne remettons pas en question le fait que le médicament ait été donné aux soldats. Ils devaient être protégés contre la malaria. Le problème est que la Défense nationale n'a pas suivi le protocole de l'étude de contrôle de l'innocuité de la méfloquine à l'automne et à l'hiver de 1992-1993 lorsqu'elle a distribué le médicament à environ 900 soldats envoyés en mission de maintien de la paix. Cela s'est produit même si le ministère avait suivi toutes les règles lors d'une distribution antérieure du médicament aux voyageurs de la Défense nationale.

Voici, en termes concrets, ce que veut dire ne pas suivre le protocole.

Les membres des Forces canadiennes ont été renseignés oralement sur la malaria, la méfloquine et ses effets secondaires, mais ils n'ont pas obtenu la documentation remise aux autres voyageurs de la Défense nationale qui avaient suivi le traitement.

Le ministère n'a pas contrôlé systématiquement l'efficacité ou les effets indésirables du médicament sur chaque personne à qui le médicament avait été administré.

Même si 69 000 doses de médicament avaient été fournies à l'unité des Forces canadiennes à Petawawa, les registres de l'utilisation ou des effets indésirables ou secondaires de ces doses n'ont pas été transmis.

[Traduction]

Des représentants de la Défense nationale nous ont affirmé qu'ils n'avaient pas respecté les dispositions du protocole parce qu'ils croyaient à ce moment-là être autorisés par Santé Canada à suivre une ligne de conduite différente qui n'exigeait pas qu'on obtienne un consentement éclairé. Toutefois, cela n'était pas le cas. La Défense nationale n'avait pas demandé une telle autorisation ni obtenu d'approbation en ce sens.

Depuis, la Défense nationale a apporté des changements organisationnels qui, à son avis, réduiront les risques qu'une situation semblable ne se reproduise. Monsieur le président, le comité voudra peut-être obtenir plus d'information au sujet de ces changements organisationnels.

Lorsque des médicaments non homologués sont distribués dans le cadre d'essais cliniques, il incombe à Santé Canada d'évaluer et d'approuver le plan de travail et le protocole d'essai. Il lui faut s'assurer que les modalités énoncées dans les protocoles des essais cliniques sont respectées, afin de préserver l'intégrité du processus et de satisfaire aux conditions prévues par les règlements de la Loi sur les aliments et drogues.

Ce qui nous inquiétait, c'est le fait que même si les fonctionnaires de Santé Canada avaient approuvé le protocole de l'étude de contrôle de l'innocuité de la méfloquine, ils n'avaient pris aucune mesure pour veiller à ce que le protocole soit respecté. En fait, le ministère n'est doté d'aucune procédure de contrôle de ces études. On nous a dit que la responsabilité du contrôle incombait au fabricant. Monsieur le président, le comité voudra peut-être demander à Santé Canada comment il s'assure lui- même que les protocoles des études de contrôle de l'innocuité sont suivis.

• 1540

Lorsque l'utilisation du médicament par des soldats canadiens en Somalie a fait les manchettes à l'automne de 1994, Santé Canada a demandé au fabricant des copies des registres des 69 000 doses de méfloquine fournies à la Défense nationale en 1992. Ni le fabricant ni la Défense nationale n'ont pu fournir l'information. Malgré tout, Santé Canada n'a pris aucune mesure.

Santé Canada ayant omis de contrôler l'étude et la Défense nationale ayant omis de fournir l'information au fabricant, cela veut dire que des renseignements qui auraient pu être précieux sur l'innocuité et l'efficacité du médicament dans des conditions réelles n'ont pas été recueillis.

Monsieur le président, il est nécessaire de renforcer les mesures qui visent à assurer le respect des protocoles approuvés pour les essais cliniques.

Sur ce, monsieur le président, je mets fin à mon commentaire. Nous serons heureux de répondre aux questions du comité.

Le vice-président (M. John Richardson): Merci beaucoup, madame Barrados.

Nous allons maintenant commencer les questions, et la première sera celle de John Cummins, du Parti réformiste.

Mme Beth Phinney (Hamilton Mountain, Lib.): Monsieur le président, est-ce qu'on pourrait entendre tous les témoins avant de commencer les questions?

Le vice-président (M. John Richardson): Voulez-vous que l'on suive cette procédure?

Une voix: Oui.

Mme Beth Phinney: Oui, c'est comme cela que l'on procède d'habitude.

Le vice-président (M. John Richardson): D'accord; dans ce cas, je suppose que nous passons immédiatement à Santé Canada, représenté par M. Michols.

Mme Beth Phinney: Monsieur le président, est-ce que nous avons le rapport du ministère?

Le vice-président (M. John Richardson): Oui.

Mme Beth Phinney: De Santé Canada?

Le vice-président (M. John Richardson): Oui, il a été déposé.

Mme Beth Phinney: J'ai celui de la Défense nationale, mais pas celui de Santé Canada. N'est-ce pas?

Je ne l'ai pas. On m'a dit tout à l'heure qu'il n'était pas arrivé.

Ah, le voilà. Merci.

Le vice-président (M. John Richardson): Monsieur Michols.

M. Dann Michols: Merci.

Monsieur le président, j'aimerais d'abord vous remercier, ainsi que le comité, de me donner l'occasion d'aborder les points soulevés par le vérificateur général dans la note de vérification sur la disponibilité pré-commercialisation du LARIAM, ou méfloquine, qu'il a publiée en avril dernier.

Comme je l'ai dit, je suis directeur général du Programme des produits thérapeutiques. Je suis accompagné non pas de Mme Marta Caris, qui n'a pu venir ici pour des raisons personnelles, mais par Ian MacKay, qui est responsable du Programme d'accès spécial au sein de mon service.

Je vous signale que le Programme des produits thérapeutiques est le service de Santé Canada qui est responsable de la réglementation des médicaments et des matériels médicaux utilisés par les Canadiens.

Comme vous le savez, le Bureau du vérificateur général a effectué une vérification des dossiers de Santé Canada liés à l'étude sur la surveillance de l'innocuité du LARIAM, et à l'examen et à l'approbation du LARIAM. En plus d'examiner nos dossiers en détail, les représentants du Bureau du vérificateur général ont rencontré à plusieurs reprises les fonctionnaires de Santé Canada pour éclaircir certains points concernant le développement des médicaments, le mandat réglementaire du ministère dans le domaine des essais cliniques et le processus d'évaluation des médicaments en général.

Comme je l'ai signalé, le LARIAM a été et est toujours reconnu comme le médicament de prédilection pour la prévention et le traitement du paludisme résistant à la chloroquine, une forme de paludisme qui résiste à la plupart des autres médicaments. C'est le médicament que recommandent le Comité consultatif de la médecine tropicale et de la médecine des voyages du Canada, les Centres for Disease Control and Prevention des États-Unis et l'Organisation mondiale de la santé. Selon des statistiques accessibles à tous, le paludisme serait toujours l'un des principaux tueurs au monde, faisant plus de 2 millions de victimes par année; la morbidité et la mortalité qui y sont associées ont d'ailleurs considérablement augmenté chez les voyageurs canadiens au cours des dernières années.

En 1990, Santé Canada, reconnaissant la valeur du LARIAM pour lutter contre le paludisme, a parrainé, en collaboration avec les fabricants, un essai clinique spécial pour que les Canadiens et les Canadiennes puissent avoir accès à cet important médicament. Cet essai, que l'on a par la suite appelé l'étude de surveillance de l'innocuité du LARIAM, visait à permettre aux Canadiens voyageant dans des pays où le paludisme est prévalent d'utiliser ce médicament. Approuvé en 1990, l'essai s'est terminé au printemps 1993.

Lorsque Santé Canada a délivré un avis de conformité pour le LARIAM en janvier 1993, nous avons examiné toute une série de données, dont des données d'essais cliniques contrôlés et bien conçus. Nous disposions en outre d'une foule de données internationales et de rapports de cas sur les effets indésirables du médicament, provenant de nombreux pays où le LARIAM était vendu depuis des années, dont les États-Unis et le Royaume-Uni. Dans l'ensemble, ces données confirment l'allégation selon laquelle les avantages du LARIAM dépassent les risques qu'il peut présenter.

• 1545

Monsieur le président, je voudrais maintenant attirer votre attention sur certains aspects particuliers soulevés par le vérificateur général dans sa note de vérification sur le LARIAM. Tout d'abord, il nous serait utile, à mon avis, de décrire brièvement le rôle que joue Santé Canada dans les essais cliniques et de s'attarder au partenariat essentiel qui doit exister avec d'autres professionnels de la santé.

En gros, le développement d'un médicament dépend de l'efficacité du partenariat entre Santé Canada, l'industrie pharmaceutique, les médecins et d'autres professionnels de la santé et les établissements où est menée la recherche et les patients eux-mêmes. Dans le cadre de ce partenariat, le rôle de Santé Canada est de voir à ce que les essais cliniques soient conçus conformément aux normes scientifiques et médicales nationales et internationales, et à ce que les patients ne soient pas exposés à des risques indus.

Quant à la véritable responsabilité de l'exécution des essais, elle repose sur le promoteur de l'essai, soit habituellement le fabricant, ainsi que sur les médecins, les professionnels de la santé et les établissements de recherche. Pour aider les chercheurs et les promoteurs, Santé Canada donne des conseils sur la façon dont les essais doivent être exécutés et dont les réactions indésirables doivent être définies et signalées.

En ce qui concerne la question proprement dite de l'utilisation du LARIAM par le ministère de la Défense nationale, lorsque Santé Canada a appris en 1994 que le LARIAM avait peut-être été utilisé hors du cadre prescrit de l'étude de surveillance de l'innocuité, il a immédiatement demandé au promoteur de confirmer qu'il lui avait bien transmis le dossier complet sur l'utilisation du LARIAM par les Forces armées canadiennes dans le cadre de l'étude, de même que la liste complète de tous les effets indésirables qui avaient pu être signalés.

Malgré un certain nombre de tentatives, ces renseignements ne nous ont pas été communiqués, tout simplement parce que le ministère de la Défense nationale n'a pas diffusé, utilisé ou recueilli d'informations sur le médicament conformément au protocole de l'étude. Comme l'a souligné le Bureau du vérificateur général, le MDN a utilisé et obtenu le LARIAM en prétendant faussement qu'il avait l'autorisation spéciale d'utiliser ce médicament hors du cadre de l'étude. Le vérificateur général souligne que Santé Canada n'a pris aucune autre mesure à l'époque. C'est vrai, mais principalement parce qu'il n'y avait aucune autre mesure à prendre.

De toute évidence, Santé Canada était convaincu que, comme l'étude sur l'innocuité était terminée depuis longtemps, l'information posologique correspondait à la somme de l'expérience mondiale relative au médicament accumulée à l'époque. Le poids de la preuve recueillie confirmait le profil risques-avantages établi pour le LARIAM; autrement dit, nous avions déjà approuvé le médicament pour le marché canadien.

Le vérificateur général a raison lorsqu'il dit que Santé Canada doit vérifier si les conditions des essais cliniques sont respectées afin de préserver l'intégrité du processus et d'observer la Loi sur les aliments et les drogues et son règlement d'application. Santé Canada surveille effectivement, tout au long des essais cliniques, les effets indésirables des médicaments dont fait état le promoteur. Le ministère a également le pouvoir de mettre fin à un essai en cours si cela est justifié et dans l'intérêt de la santé publique.

Le vérificateur général a également raison lorsqu'il dit que les résultats non communiqués de l'utilisation du LARIAM pourraient indiquer que le médicament a été approuvé sans que l'on tienne compte de données réelles importantes. En fait, l'examen du LARIAM en vue de sa commercialisation et les mises à jour subséquentes sur l'innocuité du produit ont porté sur des données internationales postcommercialisation, des données réelles, si vous voulez, qui confirmaient que le profil des effets secondaires était relativement constant.

Vous avez peut-être l'impression que nous n'avons pas pris ce genre de données en considération, mais en fait, c'est tout le contraire, nous en avons bel et bien tenu compte au moment de la commercialisation, et nous continuons de le faire à l'étape de la postcommercialisation.

Monsieur le président, je tiens également à dire que Santé Canada a confiance dans le partenariat qu'il a établi avec les promoteurs d'essais cliniques et les médecins. Grâce à nos pratiques actuelles, les essais cliniques permettent à la population canadienne d'avoir accès en temps opportun à des médicaments nouveaux et prometteurs, et les patients sont traités par des professionnels qui ont la formation, l'expérience et les compétences nécessaires pour faire des recherches cliniques conformément aux normes des comités d'éthique de la recherche et aux lignes directrices nationales et internationales.

Nous envisageons actuellement d'apporter plusieurs modifications au processus d'examen et d'approbation des essais cliniques, à cause notamment des observations du vérificateur général. Ces modifications visent à mieux protéger les patients qui participent aux essais cliniques, et à rendre le processus d'examen plus efficace.

Les modifications envisagées comprennent la mise au point d'un système visant à vérifier si les essais cliniques sont conformes aux lignes directrices internationales sur l'exécution de la recherche clinique. La mise en place d'un système de vérification permettra de veiller à ce que la recherche menée au Canada soit conforme à ces normes élevées et d'accroître l'intégrité des données présentées à l'appui des demandes de commercialisation des médicaments.

• 1550

Je dois dire que la mise en place d'un système de vérification nous oblige à modifier nos règlements, et notre ministre envisage d'apporter, d'ici deux mois, les changements réglementaires nécessaires à la constitution du programme de vérification. Sa mise en place est donc imminente.

Je veux également mentionner que depuis les événements de 1992-1994, Santé Canada a développé une relation de travail plus étroite avec le ministère de la Défense nationale. Cette nouvelle relation est marquée par des communications plus fréquentes et plus claires en ce qui concerne l'examen et l'approbation des essais cliniques et l'accès spécial à des médicaments nouveaux ou à des médicaments qui ne sont pas disponibles sur le marché au Canada.

En ce qui concerne le LARIAM proprement dit, je désire vous dire à vous, à ce comité et, par votre intermédiaire, à l'ensemble de la population canadienne, que Santé Canada est convaincu que l'information posologique présentée dans la monographie du produit correspond à ce que l'on sait actuellement sur l'utilisation sécuritaire de ce médicament. Nous sommes persuadés que s'il est utilisé convenablement, ce médicament est sûr et efficace. Et même si son utilisation adéquate comporte quand même des risques, il assure une protection contre une infection qui peut être mortelle, et c'est là un avantage qui l'emporte largement sur ses risques.

Monsieur le président, cela était vrai en 1993 et en 1994, et ce l'est encore aujourd'hui.

En terminant, je rappelle que Santé Canada reconnaît la nécessité d'une évaluation critique de son mandat et des efforts qu'il déploie pour s'en acquitter conformément aux normes internationales et aux attentes de la population canadienne et de ses représentants.

Santé Canada tient à conserver sa réputation de leader mondial dans le domaine de la réglementation des médicaments et des matériels médicaux et, à ce titre, il apprécie les commentaires du vérificateur général et des autres parties intéressées à ses activités.

Monsieur le président, je termine ainsi mes observations préliminaires, et je serai heureux de répondre à toutes les questions.

Le vice-président (M. John Richardson): Est-ce que quelqu'un d'autre aurait une déclaration à présenter au comité?

Général Auger.

Bgén Claude Auger: Monsieur le vice-président, membres du comité, je vais essayer, au cours des prochaines minutes, de vous expliquer pourquoi et comment nous utilisons la méfloquine, quels sont les résultats obtenus et ce que nous avons fait depuis lors en ce qui concerne l'utilisation de médicaments non homologués.

Comme on l'a dit tout à l'heure, le paludisme est une maladie parasitaire grave véhiculée par les moustiques. Sa forme la plus grave est le paludisme à falciparum. Comme l'a indiqué Santé Canada, on dénombre chaque année de 200 à 300 millions de personnes infectées, et plus d'un million de décès par an en Afrique.

Les statistiques dont nous disposons pour 1997 sur les voyageurs canadiens indiquent 1 036 cas de paludisme, dont quatre mortels.

[Français]

Lorsque nous nous sommes préparés pour le déploiement en Somalie, les risques d'infection estimés pour le paludisme étaient de 2 à 3 p. 100 par mois. Les Forces canadiennes ont déployé en Somalie 1 250 personnes. Selon les statistiques et selon des évaluations très modérées, le nombre de cas de paludisme, en cas de protection non adéquate, pouvait être de 20 et plus par mois, soit 120 cas sur une période de six mois. De plus, on pouvait prévoir un ou deux décès. De toute évidence, la protection était nécessaire.

[Traduction]

La méfloquine est un médicament très efficace contre le paludisme à falciparum qui résiste à la chloroquine. Elle est recommandée par Santé Canada, par l'Organisation mondiale de la santé, par les Centres for Disease Control and Prevention d'Atlanta et par le Comité consultatif de la médecine tropicale et de la médecine des voyages de Santé Canada. En 1992, la méfloquine a été autorisée dans 29 pays sur la base d'un profil d'innocuité et d'efficacité bien établi. Avant qu'elle ne soit autorisée au Canada le 22 janvier 1993, la méfloquine a été mise à la disposition des membres des Forces armées canadiennes dans le cadre de l'étude de surveillance de l'innocuité du LARIAM. Le ministère de la Défense y a participé de mars 1991 à mars 1993.

• 1555

Comment avons-nous utilisé ce médicament? Juste avant le déploiement en Somalie,

[Français]

la Direction de la protection et de la promotion de la santé des Forces canadiennes a recommandé l'utilisation de la méfloquine pour protéger ses troupes lors de leur déploiement en Somalie.

Le consentement bien informé n'a pas été requis. La Direction de la protection et de la promotion de la santé avait l'impression qu'il y avait eu des contacts avec Santé Canada pour obtenir l'autorisation d'utiliser la méfloquine sans respecter les paramètres de contrôle de l'étude.

Des notes d'information ont été préparées pour informer les troupes des risques et des contre-mesures liées à l'environnement et des maladies possibles, ainsi que des avantages et des effets secondaires possibles de l'administration de la méfloquine.

On a distribué des notes d'information pour renforcer l'utilisation de mesures de protection personnelle telles que les crèmes chasse-moustiques, les moustiquaires de lits et les vêtements. Les médicaments recommandés contre le paludisme étaient la méfloquine et la doxycycline; la méfloquine était préférable puisqu'elle n'exigeait qu'une dose hebdomadaire alors qu'il fallait une dose quotidienne de doxycycline.

On a recommandé la distribution de méfloquine et la tenue de registres de son administration. Des opérations de surveillance médicale et des comptes rendus ont été exigés.

[Traduction]

Quelle surveillance y a-t-il eue sur le terrain? En Somalie, le système médical de campagne comprenait des officiers médicaux de navire et d'unité, des assistants médicaux dans huit sous-unités, ainsi qu'un peloton du personnel en attente médical incluant une équipe chirurgicale. Les chefs d'unité et le personnel médical et paramédical ont été informés des effets secondaires neuropsychiatriques de la méfloquine, et les ont surveillés. Les officiers médicaux d'unité sont normalement toujours informés des problèmes médicaux importants ou des effets secondaires, et savent que le QGDN doit être informé des cas de maladie grave, de blessure, de problèmes médicaux ou d'effets secondaires.

[Français]

Pour ce qui est de l'efficacité de la méfloquine, pendant le déploiement des troupes en Somalie, les Forces canadiennes ont connu un cas de malaria falciparum. Par la suite, il s'est déclaré six cas de malaria à vivax après le déploiement. La malaria à vivax est beaucoup moins dangereuse. On a donc constaté un taux d'efficacité supérieur au taux escompté de 95 p. 100.

Durant le déploiement en Somalie, plus de 33 000 doses de méfloquine ont été distribuées au personnel déployé. Aucun problème neuropsychiatrique significatif n'a été confirmé à la suite de l'absorption de la méfloquine. Aucun effet sérieux ou inattendu relié à la méfloquine n'a été identifié. Les effets secondaires ont été relativement peu fréquents. Nos documents font état de 15 cas où la méfloquine a été remplacée par la doxycycline à cause d'une intolérance au premier médicament.

Résumons les événements de l'opération en Somalie. Le groupe principal de combat aéroporté a été déployé en Somalie vers la fin décembre ou au début janvier 1993. La méfloquine a été approuvée au Canada le 22 janvier 1993. Le message de la Direction de la protection et de la promotion de la santé des Forces canadiennes a été distribué le 24 mars 1993, rappelant la restriction sur l'emploi de la méfloquine et demandant de maintenir des registres de son administration pendant six mois. Les troupes se sont redéployées au Canada en juin 1993.

[Traduction]

Qu'avons-nous fait depuis lors pour mieux contrôler la distribution des médicaments non homologués? Nous avons créé un poste des affaires réglementaires qui sert de point de contact unique avec Santé Canada, et nous avons amélioré l'échange d'information et de documentation avec Santé Canada. Les exigences et la procédure concernant l'acquisition, la distribution, l'utilisation et l'enregistrement d'un produit médical non homologué ont été confirmées par la promulgation d'une directive à ce sujet en juillet 1999. Nous sommes en train de mettre au point un document d'information détaillé sur les médicaments et les vaccins à l'intention du personnel soignant et des membres des Forces armées canadiennes. Par ailleurs, une base de données sur les déclarations et la surveillance des effets négatifs est également en cours de constitution.

• 1600

En conclusion, monsieur le président, membres du comité, la méfloquine reste un médicament antipaludique sûr et très efficace. Aucun problème nouveau relatif à l'utilisation de la méfloquine n'a été observé pendant le déploiement en Somalie. L'administration de la méfloquine à nos soldats conformément aux usages médicaux de campagne a permis de prévenir des cas de paludisme sans compromettre la santé ou la sécurité du personnel des Forces armées canadiennes.

Monsieur le vice-président, mesdames et messieurs les membres du comité, je suis prêt à répondre à vos questions.

Le vice-président (M. John Richardson): Merci beaucoup, général Auger.

Pour vous rappeler notre procédure, je signale que nous avons deux tours de questions. Pendant le premier tour, chacun aura huit minutes, et au deuxième tour, on passera à quatre minutes. Nous allons commencer avec M. John Cummins, du Parti réformiste.

M. John Cummins (Delta—South Richmond, Réf.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Je voudrais adresser mes questions à nos précieux collaborateurs du ministère de la Défense nationale. Dans leur déclaration, ils ont dit que l'utilisation de la méfloquine en Somalie n'avait pas compromis la santé ni la sécurité des membres des Forces armées canadiennes.

Je conteste cette affirmation ainsi que d'autres éléments qui figurent dans le document de la Défense nationale. Je suis attentivement ce dossier depuis cinq ans pour trois bonnes raisons.

La première est le soldat Kyle Brown. La deuxième est le caporal-chef Clayton Matchee, sa femme et sa fille, et la troisième est feu le caporal Scott Smith et sa mère, qui a perdu son fils à cause de l'inaction des Forces armées canadiennes.

Je voudrais rappeler à ces messieurs en vert que j'ai la note ministérielle d'octobre 1997 adressée au ministre de la Défense et conseillant au ministère de donner à la commission d'enquête sur la Somalie des informations trompeuses sur le statut de la méfloquine et sur la façon dont le ministère de la Défense avait obtenu ce médicament. J'ai la note en ma possession.

Vos réponses ont été inexactes. On peut certainement parler à ce propos de jeu de miroirs et d'écran de fumée. Mais je veux vous donner la possibilité de rectifier les faits. J'ai l'intention de vous poser une série de questions. Elles ne nécessitent guère de commentaires. Vous pourrez y répondre par oui ou par non. Nous noterons des points, et je vous donnerai les résultats à la fin.

N'est-il pas vrai que les soldats canadiens déployés en Somalie ont été obligés de prendre un médicament à l'essai, qui faisait l'objet d'une étude clinique approuvée par la Direction générale de la protection de la santé dans le cadre de la Loi sur les aliments et drogues, que le ministère de la Défense était légalement tenu d'effectuer une surveillance et qu'il ne l'a pas fait? Oui ou non.

M. Hec Clouthier (Renfrew—Nipissing—Pembroke, Lib.): J'invoque le Règlement. Monsieur le président, j'ai cru entendre M. Cummins dire qu'il avait en main une note confidentielle. J'estime que le comité est en droit de voir cette note. M. Cummins fait une déclaration, et l'armée se retrouve pratiquement devant l'inquisition espagnole lorsqu'il dit «j'exige ceci, j'exige cela». J'estime que le comité doit pouvoir prendre connaissance de cette note confidentielle.

M. John Cummins: Nous pouvons vous en faire part, monsieur le président.

Une voix: Avant que la réponse ne soit fournie.

M. John Cummins: Oui.

Le vice-président (M. John Richardson): Monsieur Cummins, avez-vous plusieurs exemplaires de ce document?

M. John Cummins: Oui.

[Français]

Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): Dans les deux langues officielles, s'il vous plaît.

[Traduction]

M. John Cummins: Elle est présentée dans la langue dans laquelle elle a été rédigée.

Mme Marlene Jennings: J'invoque le Règlement.

[Français]

Monsieur le président, il me semble que le comité avait adopté une règle de procédure selon laquelle aucun document ne serait distribué aux membres du comité avant qu'il ne puisse être diffusé dans les deux langues officielles. Tant que je n'aurai pas en main les versions française et anglaise de ce document, je m'opposerai à ce qu'on pose des questions qui y sont reliées.

[Traduction]

Le vice-président (M. John Richardson): Mme Jennings a raison. Le document mentionné aurait dû être déposé auprès du personnel de recherche, qui aurait alors pu le mettre à la disposition de tous les membres du comité dans les deux langues officielles. C'est tout à fait exact.

Mais par ailleurs, M. Cummins a le droit d'interroger les témoins.

M. John Cummins: Je peux retirer mon commentaire à ce sujet, si vous voulez. J'ai simplement fait référence au document. Je n'interrogerai pas les témoins sur sa teneur. J'y ai simplement fait référence, à titre de mise en garde à l'intention de ces messieurs de la Défense nationale, et c'est tout. La question n'est pas liée au document, vous vous en doutez bien.

• 1605

Mme Beth Phinney: J'invoque le Règlement, monsieur le président. Nous sommes ici pour obtenir des réponses, et j'estime que notre collègue pose ses questions de façon très inquisitoire. Il est inadmissible de dire à l'avance aux témoins comment ils doivent répondre. Il faut poser sa question, et le témoin doit pouvoir y répondre comme il l'entend. À mon avis, c'est faire preuve d'arrogance que de demander une réponse par oui ou par non.

Le vice-président (M. John Richardson): C'est présumer que...

M. John Cummins: J'ai suggéré, monsieur le président, qu'il était possible de répondre à la question par oui ou par non. C'est une question qui ne nécessite pas d'interminables commentaires, et la réponse doit être simple et directe.

Mme Beth Phinney: C'est aux témoins d'en décider.

M. John Cummins: En effet, mais c'est pourtant toujours de cette façon qu'on procède à la Chambre. Tout ce qu'il faut, c'est tout simplement un oui ou un non.

Le vice-président (M. John Richardson): Oui, mais il est rare qu'on obtienne une réponse par oui ou par non à la Chambre. Je vais laisser M. Cummins continuer, et si ceux qui répondent souhaitent étoffer leur réponse, ils auront le loisir de le faire.

[Français]

M. René Laurin (Joliette, BQ): Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Je regrette de devoir intervenir pour vous dire qu'autant que je sache, il n'existe aucune règle écrite, que ce soit à ce comité-ci ou un autre, qui nous dicte la façon dont on doit poser des questions. Je peux bien demander aux témoins de répondre par oui ou non. Ce sera à eux de juger s'ils doivent répondre de cette façon ou pas. On ne peut pas me dire que je ne peux pas poser une question de cette façon. Si on va jusqu'à censurer la façon dont on pose nos questions, il n'y a plus de liberté de parole et d'action.

Si nous devons tenir un tel débat de procédure, nous empiéterons sur le temps que nous devions accorder aux témoins et ils ne pourront pas répondre à nos questions. Nous devrons les convoquer à nouveau, lorsqu'on en aura fini de notre débat de procédure. Il semble qu'on veuille protéger certains témoins. Je regrette, monsieur le président, mais je n'admets pas cette façon de procéder qui m'apparaît très antidémocratique et qui ressemble à une stratégie du Parti libéral pour nous enlever du temps pour poser des questions aux témoins.

[Traduction]

Le vice-président (M. John Richardson): Madame Phinney, s'agit-il d'un rappel au Règlement?

Mme Beth Phinney: Oui. Je n'avais pas d'objection à la façon dont il a posé l question. Il ne peut pas exiger qu'il y réponde d'une certaine façon, c'est tout ce que je veux dire. Je ne suis pas en train de critiquer la façon dont il a posé la question. Il peut poser toutes les questions qu'il veut, mais tout comme nous ne pouvons pas lui dire les questions à poser, il ne peut pas lui dire comment y répondre.

[Français]

M. René Laurin: On peut lui demander ce qu'on veut.

[Traduction]

Mme Beth Phinney: Très bien.

Le vice-président (M. John Richardson): Écoutez, je pense que nous allons simplement éclaircir la question. M. Cummins a le droit de poser sa question. Et c'est la personne à qui il adresse cette question qui décidera comment y répondre.

M. John Cummins: J'aimerais simplement dire, monsieur le président, que les questions posées appelaient un simple oui ou non, et si ce monsieur veut donner une réponse évasive, nous en prendrons note.

Mme Beth Phinney: Donner une réponse évasive?

Le vice-président (M. John Richardson): Je pense que c'est prêter des intentions à un témoin dans une telle situation, monsieur Cummins. Voulez-vous poser votre question, je vous prie.

M. John Cummins: Je retire ce que je viens de dire. Pourrais- je obtenir une réponse à la première question, monsieur le président?

Le vice-président (M. John Richardson): Aimeriez-vous que l'on répète la première question?

Bgén Claude Auger: Oui, je vous prie.

M. John Cummins: N'est-il pas vrai que les soldats canadiens déployés en Somalie ont été obligés de prendre un médicament expérimental, un médicament qui était en train de faire l'objet d'une étude clinique approuvée par la Direction générale de la protection de la santé et régie par la Loi sur les aliments et drogues, médicament que le MDN était obligé de contrôler en vertu de la loi, ce qu'il n'a pas fait?

Bgén Claude Auger: Il est vrai que les troupes déployées en Somalie ont dû prendre de la méfloquine ou le médicament de rechange pour les protéger contre la malaria. Le MDN avait obtenu le médicament dans le cadre d'une étude de surveillance de l'innocuité et prévoyait, en dehors du déploiement en Somalie, de suivre le protocole de l'étude de surveillance. Nous avions l'impression que nous avions obtenu, par l'intermédiaire de Santé Canada, une entente différente nous permettant d'utiliser le médicament en dehors de l'étude de surveillance de l'innocuité grâce au programme d'accès spécial. À l'époque, le consentement n'aurait pas été obligatoire.

M. John Cummins: Simplement pour commenter l'effort que vous faites ici, il n'existe aucun document qui appuie votre dernière affirmation, et en fait les documents dont j'ai pris connaissance pourraient contester cette affirmation.

Ma deuxième question est la suivante: n'est-il pas exact que les soldats canadiens ont été obligés de prendre un médicament expérimental pour lequel la consommation d'alcool était contre- indiquée, et que pourtant de l'alcool avait été fourni par le MDN?

• 1610

Bgén Claude Auger: La consommation excessive d'alcool est contre-indiquée lorsque l'on prend de la méfloquine, comme dans le cas de la plupart des autres médicaments. On recommande toujours de faire preuve de modération lorsqu'on consomme de l'alcool. Les troupes déployées en Somalie étaient autorisées à consommer de l'alcool avec modération, comme dans toutes autres circonstances.

M. John Cummins: N'est-il pas exact que les Forces canadiennes ont obligé les soldats à prendre un médicament expérimental qui exigeait une sélection soignée des patients, sans appliquer les critères exigés en matière de sélection des patients?

Bgén Claude Auger: Pourriez-vous clarifier votre question?

M. John Cummins: N'est-il pas exact que les Forces canadiennes ont obligé les soldats à prendre un médicament expérimental qui exigeait une sélection soignée des patients et que pourtant elles n'ont pas appliqué les critères voulus en matière de sélection des patients?

Bgén Claude Auger: La méfloquine n'était pas un médicament expérimental. Il s'agissait d'un médicament qui n'était pas encore homologué au Canada mais qui l'était dans de nombreux pays et dont le profil d'innocuité était bon. Les membres des Forces canadiennes étaient obligés de prendre ce médicament pour se protéger contre la malaria pendant qu'ils étaient déployés en Somalie.

M. John Cummins: Au Canada, monsieur, il s'agissait d'un médicament expérimental.

Mon autre question est la suivante: n'est-il pas exact que le caporal Scott Smith a été obligé de prendre de la méfloquine alors que ce médicament n'était pas homologué, qu'il n'a pas fait l'objet d'un suivi conformément à la Loi canadienne, qu'on ne lui a pas conseillé de cesser de prendre le médicament lorsqu'il a développé des effets secondaires neuropsychiatriques, et qu'on ne l'a pas averti de ne jamais reprendre ce médicament?

Bgén Claude Auger: Je ne crois pas qu'il convienne à ce stade que je fasse des commentaires sur un cas particulier, monsieur.

M. John Cummins: N'est-il pas exact que le MDN a omis de contrôler et de surveiller correctement les effets secondaires chez nos soldats?

Bgén Claude Auger: Lorsque les troupes ont été déployées et qu'on leur a administré la méfloquine, on leur a indiqué qu'elles devaient rapporter tout effet secondaire important au personnel médical sur le théâtre des opérations. On a noté les effets secondaires importants et dans les 15 cas relevés où ces effets étaient intolérables, on a cessé de leur administrer ce médicament.

M. John Cummins: N'est-il pas exact qu'il existe un lien direct de cause à effet entre l'inaction du MDN qui a négligé de contrôler et de surveiller les effets indésirables de la méfloquine subis par Scott Smith en Somalie, le fait qu'il ait dû reprendre de la méfloquine au Rwanda et son suicide?

Bgén Claude Auger: Je ne crois pas pouvoir faire de commentaire à ce sujet, monsieur.

M. John Cummins: N'est-il pas exact qu'en négligeant d'assurer la surveillance voulue, le MDN n'a pu identifier les personnes qui au cours de l'utilisation prophylactique ont développé des symptômes d'anxiété, de dépression ou d'agitation inexpliqués, ou de confusion, qui pourraient être considérés comme des symptômes avant-coureurs d'un état plus grave? Dans de tels cas, il faut cesser d'administrer le médicament, n'est-ce pas?

Bgén Claude Auger: Vous voulez sans doute dire que nous n'avons pas posé de questions à chaque soldat auquel le médicament a été administré. On a demandé à tous ceux qui ont éprouvé des effets secondaires importants qu'ils trouvaient inquiétants d'en faire rapport à leur service de soins médicaux ou au personnel médical. Ces symptômes ont été inscrits dans leur dossier médical, mais n'ont pas fait l'objet d'un rapport, effectivement.

M. John Cummins: N'est-il pas exact qu'en négligeant de déterminer ceux à qui on doit cesser d'administrer le médicament, le MDN a également négligé de les prévenir contre une utilisation prolongée et future, qui présentait également le risque d'effets secondaires neuropsychiatriques graves, y compris l'homicide et le suicide?

Bgén Claude Auger: Comme je viens de le dire, je crois que ceux qui ont rapporté des effets secondaires importants, s'ils étaient suffisamment importants, se sont vu administrer un autre médicament, la doxycycline. Il y a eu une quinzaine de cas de ce genre, et le corollaire, c'est qu'à notre connaissance, ceux qui n'ont pas d'effets secondaires très graves voient souvent ces effets secondaires diminuer avec le temps, ce qui ne les empêchera pas de reprendre le médicament à une date ultérieure.

Le vice-président (M. John Richardson): Je vais devoir céder la parole à un autre intervenant. M. Cummins vient de dépasser la limite de huit minutes que nous lui avions attribuée.

Le prochain intervenant sera M. Laurin du Bloc québécois.

• 1615

[Français]

M. René Laurin: Je voudrais aussi m'adresser aux représentants de l'armée. Dans le protocole, on énonçait les responsabilités des chercheurs et on précisait qu'il fallait obtenir le consentement éclairé de tous les participants, c'est-à-dire de ceux à qui on administrait le médicament.

Je suis étonné que Santé Canada dise ne pas avoir informé l'armée puisque ce ministère croyait que l'armée était déjà au courant. L'armée dit pour sa part qu'elle pensait pouvoir se dispenser des procédures normales parce que Santé Canada avait déjà mis son nez dans l'histoire. Santé Canada a également dit que c'était habituellement le commanditaire qui effectuait les essais cliniques. Tout le monde se renvoie la balle et, pendant ce temps-là, des soldats prenaient un médicament qui risquait de les placer dans une situation où les effets secondaires pouvaient mettre leur vie en jeu.

Dans un des documents, on lit que le médicament n'a pas été administré à des soldats ou à des personnes qui pouvaient se trouver, dans l'exercice de leurs fonctions, dans des situations où le médicament aurait pu influencer leur comportement. Par contre, on lit ailleurs dans le même document qu'on estimait le nombre de patients à 38 000, mais qu'il existe des registres pour seulement 25 000 personnes.

Comment peut-on être sûr, en l'absence de registres à l'appui, qu'on n'a pas administré le médicament à des personnes qui auraient pu se trouver dans des situations dangereuses alors qu'il manque au moins 13 000 inscriptions dans les registres?

On dit aussi que la Défense nationale attribue cette confusion à un manque de communication entre deux de ses directions. Quelles sont ces deux directions?

J'aimerais que vous m'expliquiez comment vous pouvez affirmer des choses contradictoires. J'aimerais que le brigadier général Auger réponde à cette question.

Bgén Claude Auger: Monsieur, en ce qui a trait à votre question à propos des deux directions concernées, il s'agissait de la Direction de la médecine préventive et de la Direction des plans militaires et opérations, laquelle fait les recommandations concernant les vaccins ou la protection de la santé en territoire étranger.

Pourriez-vous préciser votre deuxième question?

M. René Laurin: Vous affirmiez que le médicament n'avait pas été administré à des soldats qui pouvaient se trouver en situation dangereuse. Comment pouvez-vous l'affirmer alors qu'il manque 13 000 dossiers dans le suivi effectué? Il y a 13 000 cas qui n'ont pas été contrôlés.

Bgén Claude Auger: Je regrette, mais je n'arrive pas à vous suivre. Vos chiffres me posent certaines difficultés. Vous parlez de 13 000 cas alors qu'on a déployé 1 250 personnes en Somalie. Je ne peux vraiment pas parler de 13 000 cas.

M. René Laurin: On a distribué 35 000 capsules. À la page 28, on parle du rapport final de l'étude sur ces médicaments, présenté par 21 chercheurs, et on dit:

Il y avait des soldats parmi ces patients, mais on ne sait pas lesquels ils sont. Si on ne le sait pas, comment pouvez-vous affirmer qu'aucun d'entre eux n'a pris le médicament à des moments où son comportement aurait pu être influencé et où il se trouvait en situation dangereuse? C'est ce que je veux savoir. Comment pouvez-vous dire que tel soldat particulier n'a pas pris le médicament?

Bgén Claude Auger: Je crois, monsieur, que vous faites allusion à l'un des effets secondaires, soit un étourdissement rapide, ce qui ne se produit pas fréquemment. C'est pourquoi la méfloquine n'a pas été distribuée à nos pilotes. Par contre, certaines autres forces armées ont fait des expériences de la méfloquine chez des pilotes sans observer d'effets secondaires.

• 1620

Les militaires canadiens en déploiement en Somalie étaient dans des circonstances relativement à risque. C'était un endroit à risque, mais la méfloquine n'était pas contre-indiquée pour des gens engagés dans de telles opérations.

Si, par contre, vous faites allusion à la différence qui existe, dans les résultats de l'étude, entre le nombre de personnes incluses au départ et le nombre dont fait état le rapport, les membres des Forces armées ne peuvent compter que pour 1 250 de ces 13 000 personnes manquantes.

M. René Laurin: Monsieur le brigadier général, dans la déclaration de Santé Canada, on lit:

Qu'est-ce qui justifiait cette prétention que vous saviez fausse? Dans quelles circonstances le ministère de la Défense nationale a-t-il déclaré qu'il avait une autorisation spéciale d'utiliser ce médicament hors du cadre de l'étude sachant qu'il ne l'avait pas eue? Le ministère de la Défense nationale devait savoir s'il avait l'autorisation ou s'il ne l'avait pas. Comment quelqu'un de l'armée a-t-il pu affirmer une telle chose qu'il savait fausse? Et qui l'a fait? Qui est responsable de cette affirmation?

Bgén Claude Auger: Si je comprends bien, votre question s'adresse aux membres des Forces armées canadiennes.

M. René Laurin: Oui, c'est cela.

Bgén Claude Auger: Les comprimés de méfloquine avaient été obtenus en 1991 dans le cadre de la special monitoring study, donc avant que le déploiement en Somalie soit préparé ou envisagé.

Par la suite, lors du déploiement en Somalie, nos directions avaient une fausse impression, à cause d'une méprise dans les communications entre elles. Chacune d'elles croyait que l'autre avait informé Santé Canada de ce que nous entendions utiliser la méfloquine en dehors du cadre de la safety monitoring study et que l'autre en avait reçu l'autorisation. C'est alors qu'on a décidé de le faire.

M. René Laurin: Quand vous dites que le ministère de la Défense nationale le croyait, à quel niveau se situait cette opinion? Ce ne sont sans doute pas des caporaux ou des sergents qui... À quel niveau hiérarchique ces gens-là se trouvaient-ils, ceux qui croyaient avoir l'autorisation alors qu'ils ne l'avaient pas? Où se situait le pouvoir de décision dans ce cas précis?

Bgén Claude Auger: Je vais demander à mon collègue ici présent de répondre. À mon avis, il pouvait s'agir de gens ayant le grade de lieutenant-colonel, par exemple des pharmaciens ou des officiers médicaux de la Direction de la protection et de la promotion de la santé et de la Direction des services de santé.

M. René Laurin: Donc, il s'agissait de gens qui détenaient un diplôme en médecine ou qui oeuvraient dans le domaine de la médecine.

Bgén Claude Auger: Oui, effectivement. Et cette information avait été transmise, je crois, par le bureau du médecin-chef des services de santé.

[Traduction]

Le vice-président (M. John Richardson): Je lui ai accordé une minute de plus parce que je voulais que M. Laurin puisse poursuivre son interrogation.

Nous passons maintenant à M. Perron pour huit minutes. Vous avez la parole, monsieur Perron.

Je suis désolé, c'est à...

M. René Laurin: Monsieur Richardson, cela signifie-t-il que j'ai terminé?

Le vice-président (M. John Richardson): Non, non, vous êtes en train de dépasser le temps qui vous a été alloué.

C'est au tour des Libéraux et je demande à M. Proud de poser la première question. Vous avez la parole, monsieur Proud.

• 1625

M. George Proud (Hillsborough, Lib.): Je vous remercie, monsieur le président.

C'est un sujet qui m'effraie beaucoup. Lorsque nos gens entrent dans l'armée, ils entrent dans l'armée en sachant qu'ils vont se trouver dans des situations dangereuses. Il me semble que nous les mettons dans des situations encore plus dangereuses d'après ce que nous disons aujourd'hui, et je pense que c'est une terrible erreur et qu'il faut que quelqu'un en soit tenu responsable.

Ma première question s'adresse à M. Auger. Qu'il s'agisse de la méfloquine ou de tout autre médicament, qu'êtes-vous en train de faire ou qu'avez-vous fait depuis pour sensibiliser les troupes aux effets secondaires de ce type de médicament ou de tout autre type de médicament?

Bgén Claude Auger: Si vous me le permettez, et cela a été mentionné par Santé Canada, la protection des troupes assurée par la méfloquine à l'époque était sans conteste une bonne protection pour les troupes, et elles auraient été dans une situation beaucoup plus dangereuse si elles n'avaient pas été protégées grâce à ce médicament.

Depuis, pour sensibiliser nos troupes, nous avons préparé des brochures et des feuillets d'information qui seront remis aux membres des forces lorsqu'on leur administre des médicaments ou des vaccins qui ne sont pas homologués au Canada. Ces feuillets d'information seront remis aux fournisseurs de soins de santé et aux membres des Forces canadiennes pour les mettre au courant des avantages ainsi que du risque et des effets secondaires possibles des médicaments et des vaccins.

M. George Proud: De l'avis de Santé Canada, la méfloquine est-elle le meilleur médicament qui existe contre la malaria?

M. Dann Michols: Absolument.

M. George Proud: S'agissait-il du meilleur médicament disponible à l'époque où il a été administré à nos troupes?

M. Dann Michols: Oui.

M. George Proud: Monsieur Michols, vous avez parlé des changements de réglementation que doit apporter le ministre pour que votre nouveau système de vérification devienne réalité. En quoi consiste le nouveau système de vérification?

M. Dann Michols: Comme l'a indiqué le rapport du vérificateur général, nous n'avions pas de système nous permettant, une fois l'essai clinique approuvé, de vérifier—probablement au hasard—que l'essai clinique s'était déroulé selon le protocole approuvé. Donc, nous allons désormais établir les mécanismes nécessaires dont nous aurons besoin pour le faire. Nous chargerons nos inspecteurs de donner suite aux essais cliniques approuvés pour s'assurer qu'ils ont été faits selon les procédures approuvées.

M. George Proud: Le problème en ce qui concerne ce processus, c'est que le MDN n'a pas suivi les lignes directrices de Santé Canada. Pourquoi a-t-on négligé de le faire et où dans le processus cette erreur a-t-elle été commise?

M. Dann Michols: Je crois qu'il faut comprendre que même si le ministère de la Défense nationale estime avoir agi dans le cadre de l'étude approuvée, il a effectivement suivi les protocoles. Comme on l'a mentionné, on a cru, à tort, qu'il administrait le médicament aux troupes en Somalie en dehors de l'étude de surveillance et par conséquent il n'a pas suivi les procédures prévues par cette étude. Donc je pense que le problème, c'est que l'on n'a pas compris si les médicaments avaient été prescrits dans le cadre de l'étude. Le ministère a suivi les procédures de l'étude préalablement à cela.

M. George Proud: Puis-je poser une question à la représentante du vérificateur général: avez-vous déjà eu affaire à un cas de ce genre? S'agit-il d'une situation permanente ou d'un incident unique?

Mme Maria Barrados: Notre rapport ne concerne que ce cas en particulier. Il y aura d'autres circonstances où nous examinerons l'ensemble du processus concernant les médicaments, mais nous ne l'avons pas fait dans ce cas-ci. Cependant, lorsque nous soulevons une question de ce genre, nous la soulevons parce que d'après nos discussions nous considérons qu'il y avait des mesures systémiques à prendre. Santé Canada et le ministère de la Défense nationale ont tous deux pris des mesures pour rectifier les problèmes systémiques mis en relief par ce cas en particulier.

M. George Proud: Je vous remercie. Merci, monsieur le président.

Le vice-président (M. John Richardson): Madame Phinney, je vous prie.

Mme Beth Phinney: J'aimerais avoir des précisions à propos de ce que M. Michols a dit il y a quelques instants. Je ne comprends pas le paragraphe où vous expliquez comment l'erreur s'est produite. Dans le rapport de l'adjointe du vérificateur général, elle indique que seuls les médicaments homologués sont vendus au Canada sauf dans certaines conditions contrôlées, c'est-à-dire un essai clinique.

• 1630

M. Dann Michols: Il s'agit de l'essai clinique ou du programme d'accès spécial que nous assurons.

Mme Beth Phinney: Seuls des médicaments homologués sont vendus au Canada. Donc quelles que soient les mesures que vous prenez à l'égard de ce médicament—et les Canadiens vous font confiance—si ce médicament n'est pas homologué, il s'agit d'un essai clinique. Si vous êtes en train de dire que ce médicament faisait l'objet d'un essai clinique et que vous pouvez dans des conditions spéciales l'administrer à la force aérienne, ne fait-il plus l'objet d'un essai clinique et est-il soudainement approuvé?

M. Dann Michols: Non.

Mme Beth Phinney: Donc, pendant tout le processus, jusqu'à ce que vous donniez votre pleine approbation au médicament, il s'agit d'un essai clinique. Que vous administriez ce médicament pendant six mois à quelqu'un ou que vous le donniez à 900 personnes, il continue à faire l'objet d'un essai clinique.

M. Dann Michols: Cela se fait dans des circonstances particulières effectivement. Parfois...

Mme Beth Phinney: Mais l'avez-vous déjà approuvé?

M. Dann Michols: Nous ne l'avons pas approuvé.

Mme Beth Phinney: Il s'agit donc toujours d'un médicament qui n'est pas homologué.

M. Dann Michols: C'est exact.

Mme Beth Phinney: Donc peu importe la décision finale, ce médicament relève de votre contrôle et vous en êtes responsables. Les Canadiens comprennent que vous décidez de la ligne de conduite à adopter en ce qui concerne nos médicaments jusqu'à ce qu'ils soient homologués.

M. Dann Michols: Nous avons deux responsabilités. Nous sommes responsables d'examiner un médicament et de déterminer s'il peut être vendu au Canada.

Mme Beth Phinney: Vous voulez dire homologué?

M. Dann Michols: C'est exact. Préalablement à l'homologation, nous avons aussi le pouvoir d'autoriser l'utilisation de ce médicament dans des circonstances particulières, c'est-à-dire parfois des essais cliniques et parfois une utilisation au cas par cas grâce à notre programme d'accès spécial.

Mme Beth Phinney: Ce que vous êtes en train de nous dire, c'est que lorsque vous donnez ce médicament à quelqu'un d'autre pour qu'il l'utilise dans des circonstances spéciales, vous n'avez absolument pas à en assurer le contrôle. Vous ne l'avez pas homologué, mais vous pouvez simplement le remettre à quelqu'un pour qu'il l'utilise, sans aucune restriction.

M. Dann Michols: Je ne crois pas que c'est ce que j'ai dit.

Mme Beth Phinney: C'est ce que vous avez dit.

M. Dann Michols: En ce qui concerne les essais cliniques, lorsque nous autorisons un chercheur à utiliser un médicament...

Mme Beth Phinney: Très bien, mais donnez-moi plus de précisions concernant cette situation. Je sais en quoi consiste un essai clinique.

M. Dann Michols: ...il s'agissait des militaires dans ce cas- ci—que nous n'avons pas approuvé, nous examinons la situation dans laquelle ils souhaitent utiliser le médicament, les conditions dans lesquelles ils suivront le protocole, et les compétences de ceux qui l'utiliseront. Nous ne nous contentons pas de leur remettre le médicament; nous approuvons d'abord l'essai clinique ou l'étude de surveillance de l'innocuité qui a été faite.

Mme Beth Phinney: Il semblerait logique que lorsque vous remettez ce médicament—dans une caisse ou peu importe la façon dont vous l'expédiez—à quelqu'un pour qu'il l'utilise, vous lui disiez: «Pendant que vous utiliserez ce médicament, vous devez inscrire ceux à qui vous l'administrez, ses résultats sur chaque personne, lorsque vous le leur avez administré, etc.» N'est-ce pas logique?

M. Dann Michols: C'est précisément ce que nous faisons.

Mme Beth Phinney: D'accord, vous êtes donc en train de nous dire que vous remettez cette caisse de médicaments avec les instructions sur son utilisation et sur la façon de vous en faire rapport tandis que quelqu'un d'autre dit avoir reçu la caisse mais pas les documents renfermant les instructions.

Si, en ce qui concerne les Canadiens, vous en êtes responsables, ne devriez-vous pas alors envoyer quelqu'un là où ce médicament est administré et faire le contrôle sur place, pour vous assurer que les procédures voulues sont suivies?

M. Dann Michols: C'est précisément le processus que nous sommes en train de mettre sur pied. Si je reprends votre analogie, avant de remettre cette caisse de médicaments à quelqu'un d'autre, nous nous assurons absolument qu'ils possèdent les compétences nécessaires pour utiliser ces médicaments correctement, qu'ils sont au courant des conditions dans lesquelles ces médicaments seront utilisés et qu'ils sont au courant des protocoles et ainsi de suite.

Mme Beth Phinney: Très bien. Puis-je vous arrêter ici? Donc cela signifie que les représentants du cabinet du ministre de la Défense nationale ont menti.

M. Dann Michols: Absolument pas.

Mme Beth Phinney: Ils ont dit ignorer qu'ils devaient le faire.

M. Dann Michols: Ce n'est absolument pas le cas. Le ministère de la Défense nationale a mis sur pied, avec notre approbation, l'étude de surveillance de l'innocuité. Je crois que l'argument que l'on veut faire valoir ici c'est que le ministère de la Défense nationale croyait, lorsque les médicaments ont été administrés en Somalie, qu'il n'était plus assujetti au protocole de l'étude.

Mme Beth Phinney: Mais ne le leur avez-vous pas dit lorsque vous leur avez remis les médicaments?

M. Dann Michols: Oui.

Mme Beth Phinney: Vous avez dit qu'ils devaient suivre le protocole, mais ils ne pensaient pas y être obligés.

M. Dann Michols: Auparavant, ils avaient procédé en respectant les conditions de cette étude...

Mme Beth Phinney: Jusqu'à ce qu'ils se mettent à administrer le médicament et alors...

M. Dann Michols: ...et il y a eu un malentendu avec la Somalie.

Mme Beth Phinney: Que voulez-vous dire par avec la Somalie? Pendant qu'ils étaient là avec les troupes, les membres du personnel médical leur ont administré les médicaments.

M. Dann Michols: Ils pensaient avoir demandé notre permission d'utiliser les médicaments en dehors des paramètres de l'étude. Or ils ne l'avaient pas fait, et c'est là d'où vient le malentendu.

• 1635

Mme Beth Phinney: Très bien. J'ai une question, monsieur le président.

Dans votre document, vous dites que ces données, prises ensemble, confirment l'allégation selon laquelle les avantages du LARIAM dépassent les risques qu'il peut présenter. Pouvez-vous nous indiquer comment Santé Canada détermine l'importance du risque? Est-ce que vous procédez par pourcentage?

Je sais qu'en ce qui concerne l'aspirine—et je me trompe peut-être, donc je dois faire attention... j'ai déjà prononcé le mot. Je sais que pour certains médicaments, la compagnie même dira qu'il y a par exemple un risque qu'environ 200 personnes sur tant de millions meurent, mais que c'est acceptable parce que ce médicament permet d'aider les autres qui souffrent de maux de tête, donc nous approuvons ces médicaments.

Quels sont les facteurs dont vous tenez compte pour évaluer le risque; je devrais peut-être arrêter et vous laisser répondre à la question. Qu'est-ce qui constitue un risque et en fonction de quoi l'évalue-t-on?

M. Dann Michols: Le processus d'examen des médicaments au Canada est semblable à celui en vigueur dans tous les pays industrialisés. Nous exigeons de quiconque souhaite mettre en marché un médicament qu'il nous présente un document étoffé qui renferme les résultats de très nombreuses études scientifiques—des études sur l'innocuité du médicament mais aussi des données résultant de l'essai clinique. Nous examinons le document en question et le processus d'examen dure des mois et parfois plus.

Nous tâchons de déterminer si le produit offre certains avantages et si les risques que présente l'utilisation du produit n'en dépassent pas les avantages.

Mme Beth Phinney: Très bien. Donc si le médicament a des effets bénéfiques chez 51 p. 100 des gens et des effets indésirables chez 49 p. 100 des gens, ce médicament est-il approuvé?

M. Dann Michols: Ce sont peut-être des résultats un peu trop rapprochés...

Mme Beth Phinney: J'aimerais avoir une idée approximative. Qu'est-ce qui constitue un risque? Comment déterminez-vous le niveau de risque? Vous dites que si le risque est suffisamment faible, c'est acceptable parce que les avantages sont plus grands. Donc, expliquez-moi comment vous arrivez à une décision.

M. Dann Michols: Il s'agirait de déterminer quelles sont les statistiques concernant les avantages, le genre de maladie que ce médicament permet effectivement de prévenir ou les conséquences de la maladie, en fonction de la probabilité d'effets secondaires ou d'effets secondaires graves.

La situation est différente pour chaque médicament. Cela dépend de l'efficacité du médicament et du risque qu'il présenterait, puis on procède à une évaluation scientifique pour déterminer si dans ce cas, la protection contre la malaria... on ferait des calculs statistiques sur le nombre de cas de malaria qui pourraient se développer parmi la population. Puis nous analyserions les effets secondaires et la probabilité statistique de ces effets secondaires, et nous obtiendrions alors...

Mme Beth Phinney: Mais vous n'êtes pas disposé à me donner des chiffres en ce qui concerne le ratio? Quel est-il en ce qui concerne ce médicament?

M. Dann Michols: Je n'ai pas les données. Je ne sais pas si...

Mme Beth Phinney: La différence est importante.

Une voix: C'est un sur 10 000.

M. Dann Michols: Nous pourrions préparer un document qui indiquerait, dans ce cas en particulier, la probabilité de contracter la malaria dans une situation particulière en fonction de la probabilité des effets secondaires susceptibles de se manifester.

Cela dépend de l'existence d'autres médicaments qui pourraient être utilisés dans des situations semblables. S'il n'en existait pas, alors les avantages sont d'autant plus grands et vous êtes prêts à prendre plus de risques.

Cela dépend aussi de la maladie dont il s'agit. Les patients qui ont contracté le VIH sont prêts à prendre beaucoup plus de risques comparativement aux avantages qu'ils peuvent en retirer que peut-être quelqu'un qui a mal à la tête et qui prend de l'aspirine.

Donc, il est très difficile de répondre à votre question de façon générale, parce que cela dépend...

Le vice-président (M. John Richardson): Monsieur Michols, je vais devoir vous interrompre. Nous avons dépassé de quelques minutes le temps alloué.

Mme Beth Phinney: Très bien.

Le vice-président (M. John Richardson): Comme M. Cummins a un avion à prendre pour le far west, je vais me permettre de lui donner la chance de présenter ses arguments, mais il s'agit d'un tour de quatre minutes seulement, pas de huit minutes.

M. John Cummins: Merci, monsieur le président. J'ai simplement quelques points à présenter.

En ce qui concerne l'effet du médicament, les membres du comité ne le savent peut-être pas, mais la journée où le médicament était administré en Somalie était qualifiée de mardi ou mercredi psychotique selon le jour où il était pris. Les troupes qui ont pris ce médicament en ont ressenti les effets de façon généralisée.

• 1640

On a voulu aussi avancer l'hypothèse, d'ailleurs fausse, aujourd'hui selon laquelle le MDN ignorait peut-être qu'il participait à l'étude de surveillance de l'innocuité. Vous pouvez confirmer qu'effectivement le MDN savait qu'il participait à l'étude de surveillance de l'innocuité. Le document qui l'indique se trouve sur leur site Web.

Donc, ne vous laissez pas tromper par la déclaration, «Eh bien, nous ne le savions pas». Ils le savaient très bien. Les signatures sont là. Elles se trouvent sur ce document. Si vous le voulez, je me ferai un plaisir de vous les fournir.

Un autre point qui vaut la peine d'être mentionné, c'est que l'Australie avait le même nombre de troupes que le Canada dans la région. L'Australie a utilisé un autre médicament, la doxycycline. Mais cela n'a rien à voir. Je suppose que ce n'est pas important.

J'aimerais maintenant revenir, si vous me le permettez, aux questions que j'ai déjà posées, surtout parce que j'ai récemment eu l'occasion de reparler à la mère de Scott Smith, et elle est préoccupée par le fait que son fils servait dans les forces armées. Elle considère qu'elle n'a pas été traitée de façon équitable. C'est la raison pour laquelle j'agis ainsi.

N'est-il pas exact que Scott Smith a été obligé de prendre de la méfloquine; que la surveillance exigée n'a pas été effectuée; et que par conséquent, on n'a pas décelé les symptômes d'angoisse inexpliquée et que l'on n'a pas cessé d'administrer le médicament à ce moment-là, comme l'exigeait la loi canadienne; et qu'on ne l'a pas averti de ne pas reprendre ce médicament à l'avenir?

Je tiens simplement à signaler que les renseignements concernant Scott Smith se trouvent sur votre site Web, donc vous n'avez pas à révéler de grands secrets.

Bgén Claude Auger: Je dois avouer que je ne suis pas au courant des détails concernant la situation de la personne ou du membre des forces armées dont vous parlez, donc je ne suis malheureusement pas en mesure de faire des commentaires à ce sujet.

M. John Cummins: N'est-il pas exact que Scott Smith a été obligé de prendre de la méfloquine une deuxième fois, lorsqu'il a été déployé au Rwanda, sans être informé que ses expériences précédentes en Somalie laissaient entrevoir le risque de symptômes plus graves pouvant mener au suicide? Il avait eu des problèmes en Somalie et n'aurait pas dû prendre ce médicament, mais il est allé au Rwanda et a été obligé de le prendre. N'est-ce pas exact?

Bgén Claude Auger: Comme je l'ai dit plus tôt, vous êtes en train de parler du cas précis d'un patient et de ses troubles médicaux ou des effets secondaires qu'il a ressentis. Je ne crois pas que cela corresponde à la situation générale en ce qui concerne la méfloquine, mais qu'il s'agit de cas individuels.

M. John Cummins: Pour comprendre la situation générale, nous devons comprendre les cas particuliers. Il s'agissait assurément d'un cas frappant. Ce jeune homme s'est suicidé à Noël.

N'est-il pas exact que Scott Smith qui reprenait de la méfloquine pour la deuxième fois s'est plaint d'angoisse inexpliquée et s'en plaignait encore quelques heures avant son suicide?

Bgén Claude Auger: Vous continuez à me poser des questions sur cette affaire particulière et comme je vous l'ai dit tout à l'heure, c'est un dossier que je ne connais pas. Je ne l'ai pas étudié.

M. John Cummins: Niez-vous un rapport entre l'administration de méfloquine à Scott Smith pendant son déploiement en Somalie avec des effets indésirables non contrôlés par le ministère puis de nouveau son administration pendant son déploiement au Rwanda et son suicide, compte tenu des effets médicaux connus de ce médicament?

Ma question, puisque vous ne voulez pas parler de cas particuliers, est simple, si la prise d'un médicament pose des problèmes lors d'un déploiement, vous devriez vous en abstenir lors d'un deuxième. C'est pourtant ce que vous avez fait parce que vous ne suivez pas médicalement vos soldats. N'est-ce pas exact?

Bgén Claude Auger: Je dois avouer ne pas être au courant de cas de personnes qui éprouvent des effets secondaires une fois, si ces effets secondaires sont mineurs, ou même graves pour les porter à l'attention des autorités médicales mais sans pour autant changer de médicament...

Le fait qu'elles en prennent lors d'un deuxième déploiement n'entraîne pas un effet cumulatif et il est possible que ces effets secondaires ne se reproduisent pas. Ces effets secondaires étant relativement non spécifiques, ils peuvent se répéter ou ne pas se répéter ou être plus ou moins prononcés lors d'un deuxième déploiement. Lorsque cela arrive, les membres des forces armées sont informés que s'ils estiment que des effets secondaires sont imputables à un médicament, ils doivent le signaler aux autorités médicales qui après examen de ces effets peuvent recommander un changement de médicament. Cela s'applique à tous les membres des forces armées.

Le vice-président (M. John Richardson): Le temps file. Les cinq minutes sont dépassées. Je dois vous arrêter.

• 1645

M. John Cummins: Merci beaucoup, monsieur le président.

Le vice-président (M. John Richardson): Je vous remercie infiniment de votre contribution, monsieur Cummins.

Monsieur Perron, c'est maintenant votre tour.

[Français]

M. Gilles-A. Perron (Rivière-des-Mille-Îles, BQ): En guise d'introduction, monsieur Auger, j'aimerais vous rappeler que vous êtes un militaire et non pas un patineur de fantaisie. Donc, on devrait obtenir des réponses plus claires. Cela me fait un peu penser à un certain dossier, celui des fameux documents perdus.

Une chose m'intrigue. Comment se fait-il que le dossier date de 1992-1993, année où on a administré les médicaments, et que ce ne soit qu'en 1997-1998, après la publication de plusieurs articles dans les journaux, après que ce soit devenu du domaine public, que vous ayez commencé à redresser vos façons de faire? S'il n'y avait pas eu ces événements en 1997-1998, est-ce qu'on continuerait à administrer des médicaments sans y porter plus attention?

Bgén Claude Auger: Votre question comporte deux aspects. Tout d'abord, jusqu'en 1997, nous croyions avoir utilisé la méfloquine de façon appropriée parce que nous croyions avoir averti Santé Canada que cela était fait en dehors du cadre de l'étude.

Ensuite, l'année 1992 a marqué le début des opérations des Forces armées canadiennes en territoire étranger, opérations qui sont devenues de plus en plus fréquentes depuis. Nous avons eu à utiliser de plus en plus souvent des drogues ou des vaccins non autorisés et nous y avons regardé de plus près. Conséquemment, nous avons pris les initiatives qu'il fallait pour nous renseigner sur les médicaments recommandés, les administrer et tenir les registres exigés.

M. Gilles Perron: Je vous accorde un cinq pour votre réponse.

Dans votre commentaire original, à la page 7, vous nous parlez d'effets secondaires peu fréquents. Tout à l'heure, dans une réponse à une question, vous avez parlé d'effets secondaires significatifs. Quels sont ces effets secondaires significatifs? Pouvez-vous nous les énumérer de façon exhaustive? De quoi pourrait souffrir un soldat après avoir pris ces médicaments?

Bgén Claude Auger: Les effets secondaires, la plupart du temps, sont mineurs. Il y a des effets secondaires qui peuvent être neuropsychiatriques et qui...

M. Gilles Perron: Des effets significatifs mineurs?

Bgén Claude Auger: Les effets secondaires significatifs peuvent être l'indigestion, des brûlures d'estomac, de la diarrhée. Les personnes peuvent souffrir de dépression clinique, passer par des épisodes maniaco-dépressifs, des réactions psychotiques, des encéphalopathies ainsi que des convulsions. Cela peut se produire dans 1 cas sur 10 000.

M. Gilles Perron: Vous avez aussi dit, dans une de vos réponses, que ces médicaments ne devaient pas être pris concurremment avec un haut niveau d'alcool. Qu'est-ce qu'un haut niveau d'alcool? Un verre de bière ou une caisse de bière? Quelle sera la différence dans les manifestations? Quels seront les effets si on prend le médicament en même temps qu'une caisse de bière ou en même temps qu'un verre de bière?

Bgén Claude Auger: Les effets peuvent être différents selon le médicament.

M. Gilles Perron: Les effets du médicament dont on parle.

Bgén Claude Auger: La méfloquine prise avec une quantité modérée d'alcool, soit une, deux ou trois consommations, ne semble pas avoir d'effets synergiques. Par contre, les...

M. Gilles Perron: Est-ce que c'est reconnu ou si c'est le résultat de l'observation? Est-ce que ce sont des effets significatifs cliniquement reconnus par les scientifiques ou constatés à l'expérience?

Bgén Claude Auger: En autant qu'on sache, l'alcool consommé en quantité modérée alors qu'on prend de la méfloquine n'augmente pas l'incidence des effets secondaires. Cela n'a pas été démontré.

M. Gilles Perron: Je n'ai plus de questions.

Le vice-président (M. John Richardson): Merci.

[Traduction]

Nous passons maintenant aux Libéraux, à Mme Jennings qui a quatre minutes pour poser ses questions.

Mme Marlene Jennings: Merci.

Est-ce que la méfloquine est aujourd'hui homologuée au Canada?

M. Dann Michols: Oui.

Mme Marlene Jennings: Depuis quand?

M. Dann Michols: Depuis janvier 1993.

• 1650

Mme Marlene Jennings: Très bien.

Je vois dans votre document, monsieur Michols, que Santé Canada réfléchit à une procédure de vérification des essais cliniques sur les médicaments non homologués au Canada. Étant donné que le problème de manque de vérification au niveau de l'utilisation par le ministère de la Défense de la méfloquine est survenu entre 1992 et 1994, je trouve relativement décevant que pratiquement à l'aube du troisième millénaire, facilement cinq ans après que le problème ait été identifié, Santé Canada n'a toujours pas mis en place les procédures de vérification nécessaires pour s'assurer que lorsque le ministère autorise la fabrication ou la production d'un médicament non homologué au Canada et son utilisation soit dans le cadre d'essais cliniques soit dans le cadre de votre étude de surveillance de l'innocuité, qu'il fasse une véritable vérification.

Est-ce que Santé Canada procède actuellement à des vérifications? Si vous n'avez pas de protocole en place, ou de directive ou de ligne directrice, contrôlez-vous effectivement les médicaments qui sont utilisés dans des essais cliniques ou dans le contexte du programme d'accès spécial, si c'est bien son nom? Est- ce que vous faites ces vérifications? Ou dois-je craindre—comme d'autres députés ici présents—que dans deux mois nous entendrons parler d'un essai clinique n'ayant pas suivi la procédure appropriée?

M. Dann Michols: Excellente question. Je crois qu'elle soulève un certain nombre de...

Mme Marlene Jennings: Moi aussi.

M. Dann Michols: Espérons que la réponse sera suffisante.

Mme Marlene Jennings: Espérons qu'elle sera également excellente.

M. Dann Michols: Laissez-moi essayer.

Pour commencer, je crois qu'il faut comprendre que bien que nous n'ayons pas en place, actuellement, et que nous n'eussions pas en place alors un système pour vérifier les essais cliniques dans le sens où «vérifier» est entendu, cela ne veut pas dire que nous ne surveillons pas les essais cliniques. Nous demandons à ce que toutes les réactions négatives aux médicaments qui font l'objet d'un essai clinique nous soient signalées. Nous les analysons et si nous entrevoyons la possibilité d'un problème majeur, nous avons le pouvoir de stopper un essai clinique ou d'intervenir et d'enquêter. Ce n'est pas un problème, nous l'avons déjà fait et nous continuons à le faire.

Je crois que ce que le Bureau du vérificateur général suggère, c'est que nous ayons également une procédure de vérification standard qui nous impose de contrôler, régulièrement, sur la base d'un pourcentage aléatoire, les essais cliniques en cours. Donc au lieu de n'intervenir qu'en cas de problème nous interviendrions sur une base permanente, qu'il y ait un problème ou non.

Nous aurions peut-être dû, dans le passé, vérifier certains essais cliniques. C'est un problème de ressources et de priorités.

Mme Marlene Jennings: Monsieur Michols, cela fait au moins cinq ans, sinon plus, que ce problème est connu du public. C'est un problème évident—j'ai d'ailleurs des questions à poser au brigadier-général Auger—et je trouve difficile d'accepter que cinq, sinon six ans plus tard, Santé Canada n'a toujours pas instauré de programme de vérification, de vérification ponctuelle, si vous voulez lui donner ce nom, de toute utilisation de médicaments non homologués soit dans le contexte d'essais cliniques soit dans le contexte de votre étude de surveillance de l'innocuité.

Vous dites y réfléchir. Dans votre propre document, vous dites:

La lumière ne vient tout de même pas de s'allumer maintenant. Je crois que si cela permettait d'accroître l'intégrité des données... Cela fait cinq ou six ans qu'on le sait.

Pour ce qui est de l'insuffisance de ressources, si vous n'avez pas suffisamment de ressources, vous ne pouvez pas rester passifs, vous avez aussi l'obligation en tant que fonctionnaires de le faire savoir—aux comités permanents, si nécessaire.

• 1655

M. Dann Michols: Vous avez tout à fait raison. Nous disons et nous sommes certains qu'un programme de vérification ne pourrait que rendre le système plus sécuritaire. Je me permets de vous suggérer qu'il y a d'autres utilisations des deniers de l'État, et qu'il y a d'autres moyens de les utiliser pour améliorer le système. Et c'est ce que nous faisons depuis cinq ans. Je ne sais pas si c'était la priorité absolue. Le système d'essais cliniques au Canada est très sûr. Ce programme de vérification ajoutera un élément de sécurité supplémentaire mais le système était déjà très sûr.

Mme Marlene Jennings: Dans ce cas, pourquoi n'avoir pas dit simplement dans votre document que bien que le vérificateur général ait proposé que Santé Canada mette en place un système de vérification des essais cliniques, Santé Canada après avoir étudié cette proposition a déterminé qu'au niveau de ses priorités, étant donné la fiabilité et l'intégrité des données produites par les études cliniques sans ce système de vérification, et étant donné les contraintes budgétaires, nous n'avons pas l'intention de mettre en place un tel système?

Dans le document et l'exposé que vous venez de nous faire, vous nous incitez à croire que vous avez l'intention d'instaurer un système de vérification. Vous me dites maintenant que lorsque vous avez un dollar et que vous devez décider où l'investir, étant donné que Santé Canada estime que l'intégrité des données générées actuellement est suffisamment élevée, investir ce dollar dans la création d'un système de vérification n'est pas le meilleur usage qu'on puisse en faire. Cela veut dire que Santé Canada a décidé de ne pas instaurer de système de vérification. C'est ce que je dois comprendre?

M. Dann Michols: Non. Vous m'avez demandé pourquoi nous ne l'avions pas fait il y a cinq ans et c'est à cette question que j'ai répondu. Nous le faisons aujourd'hui et comme vous le savez, nous entrons dans une période où les ressources ne sont plus aussi comptées qu'elles l'ont été dans le passé. Nous avons instauré un certain nombre de changements et d'améliorations dans l'ensemble du système de réglementation des médicaments, et nous en sommes arrivés au point, grâce à l'introduction simultanée d'un certain nombre de changements au niveau de la réglementation de la procédure générale des essais cliniques, de faire de l'introduction d'un système de vérification une de nos plus grandes priorités. Nous avons les ressources, ou elles nous seront données, pour le faire. C'est le moment.

Le système était déjà très sûr.

Mme Marlene Jennings: Je n'ai jamais dit le contraire.

Le vice-président (M. John Richardson): Monsieur Michols, nous avons largement débordé. Marlene, je vous ai généreusement accordé trois minutes de plus.

Mme Marlene Jennings: J'ai encore une ou deux questions à poser ou au moins une.

Le vice-président (M. John Richardson): Vous la poserez lors du prochain tour s'il reste du temps. Je vais donner la parole à M. Clouthier. Il est impatient de participer au débat.

Mme Marlene Jennings: Vous êtes vraiment impatient ou pouvez- vous me faire cadeau de votre temps?

M. Hec Clouthier: Allez-y, Marlene, posez-lui une question.

Mme Marlene Jennings: Merci.

M. Hec Clouthier: C'est pris sur mon temps?

Le vice-président (M. John Richardson): Oui.

Mme Marlene Jennings: Vous venez de dire oui. Vous ne pouvez pas revenir sur votre parole.

M. Hec Clouthier: Une question.

Mme Marlene Jennings: Merci.

[Français]

En vertu de la Loi sur la Défense nationale, les membres des Forces armées canadiennes peuvent faire l'objet de mesures disciplinaires s'ils refusent de se soumettre à un traitement ou de prendre un médicament, ou de recevoir un vaccin lorsqu'ils en ont reçu l'ordre. C'était la situation lors de l'envoi ou du déploiement des troupes canadiennes en Somalie. Est-ce toujours le cas aujourd'hui? Que faites-vous lorsque l'utilisation d'un médicament non homologué par Santé Canada, mais qui peut être utilisé dans le cadre d'un examen ou un essai clinique, exige, selon le protocole, le consentement exprès et écrit? J'aimerais le savoir.

On sait que vous n'avez pas respecté le protocole. Je n'accepte pas l'explication du malentendu dans les communications entre les deux directions, mais je mets cela de côté.

Encore aujourd'hui, comment conciliez-vous le fait de participer à un test pour lequel, selon le protocole, le consentement exprès écrit est exigé, et la mise en application de la Loi sur la Défense nationale, qui rend un soldat ou un membre des Forces armées passible de mesures disciplinaires s'il refuse le test?

Bgén Claude Auger: Votre question comporte deux aspects.

Mme Marlene Jennings: Oui.

Bgén Claude Auger: Le premier est relié à la protection par médicament ou par vaccin des membres d'une troupe qu'on déploie sur le théâtre des opérations. Le rôle des services de santé est de déterminer et d'évaluer les risques en fonction des avantages de la protection que procure le médicament ou le vaccin et de faire des recommandations au chef de la défense.

• 1700

L'autorité d'imposer ou de ne pas imposer la protection, ou de prendre des mesures administratives et disciplinaires n'est pas de notre ressort. C'est du ressort de la Défense. Comme il y a actuellement des procédures judiciaires en cours, je dois refuser d'en parler.

Mme Marlene Jennings: Donc, vous refusez de faire des commentaires. Vous êtes ici à titre de représentant des Forces armées canadiennes, et je vous demande comment vous arrivez à concilier la participation à un essai clinique, où le protocole exige le consentement exprès, et la mise en vigueur de la Loi sur la défense nationale qui oblige un soldat ou un membre des Forces armées à recevoir un vaccin ou à prendre un médicament si on le lui ordonne sous peine de faire l'objet de sanctions. Si cette personne ne donne pas son consentement—elle n'a même pas le droit de le donner—si elle refuse, elle s'expose à des mesures disciplinaires.

J'essaie de comprendre comment vous pouvez concilier les deux termes de cette alternative. Je ne comprends même pas comment la Défense peut participer à des essais cliniques, compte tenu qu'un des critères est l'obtention du consentement.

Bgén Claude Auger: Dans un protocole...

[Traduction]

Le vice-président (M. John Richardson): Général, il vous reste à peu près 25 secondes. La question a pris trois minutes et demie.

[Français]

Bgén Claude Auger: Dans un protocole de recherche spécifique où le consentement est nécessaire...

[Traduction]

Mme Marlene Jennings: J'ai été vite.

[Français]

Bgén Claude Auger: ...je suppose que la décision administrative concernant les personnes qui refuseraient de recevoir le traitement pourrait bien être de ne pas les déployer. Ce serait ma recommandation, mais une telle décision ne relève pas de ma compétence.

Est-ce que cela répond à votre question?

[Traduction]

Le vice-président (M. John Richardson): Et c'est fini. Comme je ne peux imaginer M. Hector Clouthier partir sans poser une question, je vais lui accorder deux minutes pour sa question et la réponse.

M. Hec Clouthier: Deux minutes, très bien. Merci beaucoup, monsieur le président.

Je commencerai par ce qui est peut-être plus une observation qu'autre chose. Monsieur Michols, il me semble tout à fait clair que Santé Canada aurait intérêt à trouver les fonds pour faire des vérifications suffisantes, sans cela il faudra interdire l'essai clinique de tous ces médicaments.

Vous avez dit une chose intéressante. Vous les avez jugés sans danger. Or, corrigez-moi si je me trompe, mais si vous confiez un médicament comme la méfloquine aux militaires—et je sais que vous avez dit qu'il vous semblait qu'il y avait eu un manque de communication dans ce cas particulier, intéressons-nous donc aux 99 p. 100 d'autres cas—ont-ils la responsabilité de faire leur propre vérification et de vous en rapporter les conclusions? Oubliez cet exemple peu glorieux, résultat d'un certain manque de communication; que se passe-t-il pour les autres médicaments?

M. Dann Michols: Pour tout médicament, lorsque nous approuvons un essai clinique—et nous l'approuvons parce qu'il est mené par des autorités médicales qualifiées—ils ont la responsabilité de nous signaler les réactions indésirables à ce médicament.

M. Hec Clouthier: De vous le signaler?

M. Dann Michols: De le signaler...

M. Hec Clouthier: À Santé Canada?

M. Dann Michols: ...au fabricant qui a l'obligation de nous le signaler à son tour.

M. Hec Clouthier: Très bien. Les militaires auraient-ils pu utiliser la méfloquine sans autorisation de Santé Canada?

M. Dann Michols: Non.

M. Hec Clouthier: Très bien.

Une voix: Mais c'est ce qu'ils ont fait.

M. Hec Clouthier: C'est vous qui avez répondu le premier. Non, ils l'ont donné...

Une voix: C'est ce qu'ils ont fait.

M. Dann Michols: Je m'excuse mais sur ce point non. Si c'était un médicament non homologué, il leur fallait notre autorisation pour s'en procurer.

M. Hec Clouthier: Santé Canada la leur a donnée. Vous leur avez donné l'autorisation d'utiliser ce médicament non homologué.

M. Dann Michols: Ils étaient un des participants de l'étude de surveillance de l'innocuité.

M. Hec Clouthier: Tout ne s'est pas passé comme prévu.

J'ai une toute petite question à poser pour que Mme Barrados ne se sente pas exclue. Vous dites dans votre document que 69 000 doses ont été fournies en 1992 à la base de Petawawa. En avez-vous des traces? C'est ma circonscription. À qui ont-elles été distribuées? Est-ce que vous le savez? Si cela fait courir les chevaux plus vite, j'en veux.

Mme Maria Barrados: Très bonne question. Il n'y avait pas de dossiers et c'est ce que nous reprochons dans notre note. Il n'y avait pas de dossiers vraiment tenus et c'est la responsabilité du ministère.

M. Hec Clouthier: Ils sont donc quelque part dans la nature.

Le vice-président (M. John Richardson): Ils sont perdus.

Mme Maria Barrados: Je ne sais pas.

Le vice-président (M. John Richardson): Je crains, Hec, que vos deux minutes ne soient écoulées.

M. Hec Clouthier: Très bien.

Le vice-président (M. John Richardson): Nous allons donner la parole à M. Perron pour quatre minutes puis à Beth Phinney pour aussi quatre minutes.

[Français]

M. Gilles Perron: Pour une fois, je sens une sorte de consensus autour de cette table. C'est très rare. Comme dit mon ami Clouthier, c'est un mess. C'est un vrai fouillis.

• 1705

Je vais essayer de me mettre sur la même longueur d'onde que M. Auger. À la page 9 de votre exposé, vous dites que vous êtes en train de mettre au point un feuillet d'information détaillé sur les médicaments, les vaccins, etc. Je ne le relirai pas. Quand ce feuillet sera prêt, sera-t-il communiqué à tous ceux qui utilisent le même système?

Bgén Claude Auger: La mise en oeuvre de ce projet est en marche. Nous avons des feuillets de documentation sur un vaccin contre l'anthrax, sur l'antidote HI-6, sur des vaccins pour la peste et sur d'autres choses. Nous continuons de progresser dans ce sens-là pour couvrir l'ensemble des médicaments susceptibles d'être utilisés d'ici l'été de l'an 2000.

M. Gilles Perron: J'espère qu'on s'occupe aussi du médicament contre la malaria, de celui dont on parle.

Bgén Claude Auger: La méfloquine est maintenant un médicament homologué qui est prescrit aux membres des Forces armées. Elle est décrite dans les documents et ils reçoivent la documentation contenue dans la monographie du médicament lors de la distribution.

M. Gilles Perron: Certaines personnes ont déclaré avoir ressenti des effets secondaires, comme vous l'avez dit. Dans la liste des effets secondaires que vous m'avez donnée tout à l'heure, il y en a que je ne voudrais pas connaître de trop près, parce que je ne serais pas ici pour travailler cet après-midi.

Bgén Claude Auger: Comme je l'ai mentionné, monsieur Perron, il y a des effets secondaires possibles, mais leur incidence est de 1 sur 10 000 patients qui prennent le médicament. C'est documenté dans la monographie. Les effets secondaires mineurs sont aussi documentés. Leur incidence est d'entre 1 sur 250 et 1 sur 500. Ils sont donc très peu fréquents, relativement mineurs et ne commandent pas l'arrêt de la médication.

M. Gilles Perron: Que le médicament soit pris en même temps que l'alcool ou non.

Merci, monsieur le président.

[Traduction]

Le vice-président (M. John Richardson): Merci, monsieur Perron. Madame Phinney.

Mme Beth Phinney: Je n'ai que deux petites questions. La méfloquine a été approuvée ou homologuée au Canada en janvier 1993, c'est exact, monsieur Michols?

M. Dann Michols: Oui.

Mme Beth Phinney: Selon le rapport de la vérificatrice générale adjointe, le dernier rapport du fabricant date d'avril 1993. C'est ce qui est dit à la page 25. C'est l'homologation qui m'inquiète comme Canadienne. Le dernier rapport du fabricant sort après que le médicament ait été approuvé au Canada. Bien sûr, il était déjà approuvé en Europe et aux États- Unis mais je me demande simplement quelles normes ont été utilisées pour l'approuver, pour l'homologuer en janvier 1993 alors que le dernier rapport du fabricant est sorti en avril 1993.

Je continue. Dans ce rapport, seuls 65,1 p. 100 des patients à qui le médicament a été administré ont été pris en compte. Il n'y a pas de dossiers sur les autres personnes qui ont pris ce médicament. J'aimerais que vous me disiez pourquoi. Il a été donné à nos forces armées et vous ne leur avez pas réclamé de dossiers avant octobre 1994 quand «l'utilisation du médicament par des soldats canadiens en Somalie a fait les manchettes». Santé Canada a alors demandé au fabricant des copies des dossiers des personnes qui avaient pris ce médicament plus tôt. Mais avant cela, Santé Canada n'avait jamais réclamé ces dossiers.

Donc, quand vous l'avez approuvé, vous n'aviez même pas les dossiers des 65,1 p. 100 qui avaient pris ce médicament, et qui avaient fait l'objet d'un dossier parce que lorsque vous les avez demandés à la Défense nationale, ils ne les avaient pas. Ils vous ont dit qu'ils devaient être chez le fabricant. Le fabricant ne les avait pas non plus; il vous a dit que c'était la Défense qui devait les avoir. La Défense nationale ne les avait pas. Vous n'avez pas insisté plus que cela et ce médicament a été approuvé. Je me pose des petites questions.

• 1710

M. Dann Michols: C'est tout à fait compréhensible.

La documentation déposée par le fabricant pour obtenir notre approbation, que nous avons accordée en janvier 1993, contenait les résultats de beaucoup plus d'études à l'échelle mondiale que celle menée dans le contexte de l'étude de surveillance de l'innocuité. Nous avions donc les résultats d'autres essais cliniques s'ajoutant aux résultats déjà approuvés dans plusieurs pays, etc. Bien évidemment, il y avait aussi les résultats de notre étude de surveillance de l'innocuité. Je crois que le malentendu réside peut-être dans le fait que certains ont cru que nous nous reposions que sur cette étude de surveillance de l'innocuité pour déterminer l'approbation ou non de ce médicament. Nous avions bien d'autres preuves et bien d'autres documents à notre disposition.

Mme Beth Phinney: Il y a donc 21 enquêteurs principaux. Je suppose que c'est pour le monde entier.

M. Dann Michols: Non, c'est pour le Canada.

Mme Beth Phinney: Le document dit que les fabricants ont déposé un rapport sur cette étude qui incluait les résultats rapportés par les 21 enquêteurs principaux. C'est simplement pour le Canada?

Mme Maria Barrados: Pour le Canada.

Mme Beth Phinney: Vous avez dit tout à l'heure que cela ne voulait pas dire que vous ne contrôliez pas les résultats. Le rapport du vérificateur général dit que ce n'est pas vous qui faites ce contrôle, c'est le fabricant. Est-ce parce que nous n'avons pas de service ou plus les moyens d'un service, à cause des coupures, ou autres, dans la division des médicaments de Santé Canada pour faire ce contrôle nous-mêmes? Ou vous serait-il possible de faire vous-mêmes ce contrôle?

M. Dann Michols: Nous ne faisons pas de vérification.

Mme Beth Phinney: Non, je parle de contrôle.

M. Dann Michols: Nous faisons un contrôle dans la mesure où nous sommes notifiés des réactions indésirables et que nous les surveillons lors des essais cliniques et que nous avons le pouvoir...

Mme Beth Phinney: Mais cela ne vous a pas inquiétés de ne pas pouvoir le faire sur je ne sais combien de milliers de cachets que vous avez envoyés...

M. Dann Michols: C'est exact. Mais ce n'était pas une vérification en profondeur et nous ne faisions pas de vérification alors parce que nous n'avions...

Mme Beth Phinney: Mais vous ne faisiez pas de contrôle non plus.

M. Dann Michols: Bien...

Mme Beth Phinney: Vous faites la distinction entre les deux mais vous n'avez pas fait non plus de contrôle.

Le vice-président (M. John Richardson): Vous feriez mieux de donner une réponse avant que je ne vous coupe la parole.

M. Dann Michols: Entendu. Nous n'avons pas fait de contrôle pour chaque dose fournie pendant cette étude particulière sur l'innocuité. C'est exact.

Mme Beth Phinney: Si les données résultant des études internationales sont suffisantes, pourquoi réclamer un essai clinique canadien?

M. Dann Michols: C'était 21 enquêteurs principaux au Canada. Ce n'est pas forcément suffisant. Nous aimons avoir plusieurs sources, mais nous acceptons les données résultant des études internationales.

Mme Beth Phinney: Vous dites l'avoir fait parce que vous n'aviez pas encore les résultats...

M. Dann Michols: Non, nous avions...

Mme Beth Phinney: Vous avez eu les résultats de ces 21 études canadiennes alors que vous aviez déjà homologué le médicament. Le rapport du fabricant n'était pas encore sorti. Vous avez donné l'autorisation de mise sur le marché un an avant.

Le vice-président (M. John Richardson): Nous avons atteint les six minutes et je dois vous interrompre. C'est ma prérogative de président.

Hoffmann-La Roche dit, dans son bulletin d'information sur ce produit, que la méfloquine déclenche une réaction inconnue chez les patients.

À votre avis, Santé Canada a-t-il correctement procédé au contrôle du LARIAM pour l'usage des Forces canadiennes déployées en Somalie? Le LARIAM est produit par la compagnie suisse, La Roche, qui reconnaît dans le fascicule de posologie qui accompagne chaque boîte de médicaments que les mécanismes exacts de réaction sont inconnus. Ce fascicule dit qu'en cas d'angoisse inexpliquée, de dépression, de troubles ou de confusion il faut immédiatement arrêter d'en prendre.

Dans ce fascicule, la compagnie dit aussi que ce médicament affecte les pouvoirs cognitifs. Or, s'il affecte les pouvoirs cognitifs, les usagers ne peuvent savoir ce qui ne va pas. Ils ne peuvent savoir qu'ils sont infectés. Ils ne peuvent savoir qu'ils se trouvent dans ce cas. Je vous en parle parce que personne n'a abordé cette question de perte de pouvoirs cognitifs.

Si quelqu'un peut m'informer du contraire, je lui en saurais gré. Si c'est vrai, je ne sais pas ce qu'il aurait fallu faire.

• 1715

M. Dann Michols: Encore une fois je vous répondrai d'une manière générale. Lorsque nous examinons un médicament pour l'approuver, nous prenons en compte les avantages par rapport aux inconvénients. Nous essayons de déterminer les avantages, dans quelles circonstances, et les risques. Les problèmes cognitifs ne se manifestent pas dans 100 p. 100 des cas et nous en tenons compte. C'est ce qui pourrait être considéré comme un des effets secondaires comme l'a mentionné le général Auger. Il faut en tenir compte. Les médecins prescrivant ce médicament doivent être conscients de cette possibilité. Ce sont ces informations que nous approuvons. Ensuite il faut porter un jugement au cas par cas sur les avantages et les risques pour le patient concerné.

Le vice-président (M. John Richardson): Sur ce dernier point, je mets fin à la réunion. Je vous remercie infiniment d'être venus et de nous avoir informés sur cette question très délicate.

La séance est levée.