STANDING COMMITTEE ON FINANCE

COMITÉ PERMANENT DES FINANCES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le lundi 16 octobre 2000

• 1536

[Traduction]

Le président (M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.)): La séance ouverte. Bienvenue à tous. Comme vous le savez, l'ordre du jour est le projet de loi C-38, Loi constituant l'Agence de la consommation en matière financière du Canada et modifiant certaines lois relatives aux institutions financières.

Nous accueillons cet après-midi plusieurs témoins: de la CS CO-OP, Gary Seveny, président-directeur général, et Kenneth Boland, conseiller juridique; de l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières, M. Joseph Oliver, président-directeur général; de la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario, Tanis MacLaren, chef du service des affaires internationales; de l'Association Interac, Judith Wolfson, présidente-directrice générale, Marc-André Lacombe, secrétaire général et conseiller juridique, et Kirkland Morris, responsable de l'élaboration des politiques; de TG International Ltée, Peter Downing, président.

Beaucoup d'entre vous ont déjà comparu devant votre comité et savent probablement comment nous fonctionnons. Vous avez environ cinq à sept minutes chacun pour faire vos observations. Après quoi nous passerons à une période de questions.

Nous allons commencer par M. Seveny. Allez-y.

M. Gary M. Seveny (président-directeur général, CS CO-OP): Merci. Monsieur le président et membres du comité, je tiens à vous remercier de m'avoir invité à comparaître devant vous aujourd'hui pour discuter du projet de loi C-38. Je regrette que mes notes ne soient qu'en anglais. Je n'ai pas pu les avoir en français.

Je commencerai par dire que la CS CO-OP est très favorable aux objectifs poursuivis par ce projet de loi, à savoir de favoriser une plus grande efficacité et la croissance du secteur des services financiers, d'encourager la concurrence à l'intérieur du pays, de responsabiliser et protéger les consommateurs et d'améliorer le cadre de réglementation.

Mes remarques porteront aujourd'hui sur ce que je crois être une option importante qui n'apparaît pas dans le projet de loi C-38, à savoir les dispositions permettant la propriété coopérative des banques. Nous estimons que de telles dispositions permettraient d'aller davantage dans le sens des objectifs énoncés du projet de loi.

Je reconnais qu'il est important d'adopter le projet de loi rapidement. Toutefois, cela ne devrait pas empêcher d'y apporter des amendements importants susceptibles de le renforcer. Le processus d'examen législatif est en cours. C'est la raison pour laquelle nous estimons que c'est le moment de proposer des amendements.

J'aimerais vous expliquer un petit peu ce que nous entendons par propriété coopérative des banques. Cela vous montrera pourquoi je me préoccupe qu'il n'y ait pas de disposition à ce sujet dans le projet de loi. À partir de 1996 et dans la foulée de vastes consultations et d'un examen approfondi des informations relatives à l'avenir du secteur des services financiers, notamment du développement des coopératives d'épargne et de crédit, le groupe de travail MacKay a fait la recommandation suivante dans son rapport publié en septembre 1998. Je cite:

Monsieur le président, je crois pouvoir dire sans me tromper que cette recommandation n'a pas été faite à la légère et que le groupe de travail avait effectué une étude approfondie de la question concernant la création de banques coopératives.

En décembre 1998, le Comité des finances de la Chambre a fermement appuyé la recommandation du groupe de travail MacKay en ajoutant:

• 1540

Enfin, en s'inscrivant lui aussi en faveur de la propriété coopérative des banques, le Comité sénatorial des banques a conclu dans son rapport que

Monsieur le président, après avoir lu ces rapports, je pensais bien que nous allions bientôt avoir un projet de loi qui autoriserait la propriété coopérative des banques. Malheureusement, je me trompais.

Je rappellerai au comité certaines des raisons pour lesquelles il avait recommandé des mesures permettant la création de banques coopératives en 1998. J'ajouterai que rien n'a changé ces deux dernières années qui mènerait à croire que cette option est moins importante. Au cours de son examen approfondi du secteur des services financiers, le groupe de travail MacKay et les deux comités parlementaires ont entendu de toutes parts qu'il serait bon d'avoir une seconde catégorie d'institutions financières pour accroître la concurrence et en particulier pour mieux répondre aux besoins des PME et des consommateurs.

Les banques coopératives offriraient une solution de rechange importante aux grandes banques parce qu'elles sont plus étroitement liées à leur clientèle locale. Cette souplesse dans le contrôle de ces institutions permettrait aux coopératives de maintenir leurs principes coopératifs qui donnent à chaque membre une voix et auxquels tiennent tant nos membres. Les banques coopératives responsabiliseraient les consommateurs en leur donnant davantage voix au chapitre de la gestion de leurs banques. Cela permettrait aux coopératives de mieux servir leurs membres dans tout le pays, sans restriction d'une province à l'autre, et cela les mettrait dans une meilleure position pour reprendre les succursales que ferment les grandes banques dans les localités rurales et isolées partout au pays.

Monsieur le président, je crois qu'il règne une certaine confusion quant à la distinction qui existe entre une caisse d'épargne et de crédit qui contrôle une banque, ce qui est actuellement autorisé dans la loi, et la conversion d'une telle caisse en banque contrôlée de façon coopérative, ce qui ne l'est pas. Les caisses d'épargne et de crédit ont actuellement le droit d'être propriétaire d'une banque. Toutefois, les principes coopératifs ne peuvent être appliqués à cette banque. Le client de la banque n'est pas également membre ou propriétaire de celle-ci. Je vous donne un exemple: À partir du 2 octobre dernier, la CS CO-OP est devenue le seul propriétaire de la CS Alterna Bank, banque à charte fédérale. Malheureusement, sans les dispositions législatives qui permettraient la propriété coopérative de cette banque, les clients de la CS Alterna Bank ne peuvent être propriétaires de cette banque, être actionnaires et avoir voix au chapitre de la gestion de cette banque.

Monsieur le président, le ministre Jim Peterson m'a indiqué dans une lettre datée du 19 janvier 2000 que le gouvernement continuait à vouloir renforcer notre secteur financier en instaurant le principe de banques coopératives. Toutefois, les hauts fonctionnaires du ministère des Finances qui ont comparu devant votre comité récemment ont déclaré que d'autres consultations s'imposaient avant que l'on puisse déposer un projet de loi traitant de la propriété coopérative des banques. Ceci est décevant.

Peu avant le dépôt du projet de loi C-38 en juin dernier, la CS CO-OP, sur les conseils du cabinet d'avocats Osler Hoskin et Harcourt, a soumis au ministre des Finances et au président de votre comité des projets d'amendements qui auraient permis la propriété coopérative de banques. Nous avions espéré pouvoir poursuivre les discussions avec les fonctionnaires des Finances au cours de l'été mais, malheureusement, on nous a dit que la question nécessitait d'être examinée davantage et que l'on n'aurait pas le temps d'inclure ces amendements pour permettre la propriété coopérative des banques dans ce projet de loi.

Je voudrais dire, messieurs et mesdames les membres du comité, en toute déférence, que la question a été suffisamment étudiée. Comme je l'ai déjà indiqué, le groupe de travail MacKay ainsi que votre comité ont mené de longues consultations avant de conclure que des dispositions sur la propriété coopérative de banques devraient être incluses dans la loi fédérale. La CS CO-OP ne comprend pas pourquoi il faut attendre encore avant de nous permettre d'offrir aux Canadiens une solution de rechange importante face à nos concurrents.

Je conclurai en répétant que les Canadiens et le secteur des services financiers profiteraient de dispositions qui permettraient la propriété coopérative des banques dans le projet de loi C-38. Je demanderais ainsi à votre comité d'examiner sérieusement la possibilité d'apporter les amendements nécessaires.

Monsieur le président, personne n'ignore qu'il est possible que le premier ministre déclenche des élections sous peu et qu'ainsi le projet de loi C-38 meure au Feuilleton. Dans ce cas, cela donnerait certainement aux fonctionnaires des Finances le temps nécessaire pour modifier le projet de loi afin de permettre la propriété coopérative des banques. J'espère qu'ils sauront utiliser au mieux cette occasion, si elle leur est offerte.

Monsieur le président, cela termine mon exposé. Je répondrai volontiers à vos questions.

Le président: Merci beaucoup.

Nous entendrons maintenant M. Oliver.

• 1545

M. Joseph Oliver (président et chef de la direction, Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières): Merci, monsieur le président.

Je suis heureux de témoigner cet après-midi devant les membres du Comité des finances de la Chambre des communes au nom de l'ACCOVAM, l'organisme d'autoréglementation et l'Association professionnelle du secteur des valeurs mobilières au Canada.

C'est la deuxième fois que je viens parler de la réforme des services financiers aux membres du comité. La première fois était en octobre 1998 pour vous faire part de la réaction de l'industrie des valeurs mobilières aux recommandations du groupe de travail MacKay.

Avant que le groupe de travail ne commence ses délibérations, l'Association estimait déjà depuis un certain temps que le cadre réglementaire et législatif régissant les institutions financières fédérales devait faire l'objet d'une révision en profondeur, afin que ces institutions puissent mieux faire face à la concurrence sur les marchés financiers canadiens et internationaux. Cette révision est devenue encore plus pressante ces dernières années par suite de la mondialisation des marchés financiers, de la prolifération des produits et services financiers complexes, de l'intégration des produits et services offerts par les institutions financières traditionnelles, et de la formation de groupes financiers distribuant des services groupés et spécialisés par l'entremise de sociétés affiliées.

Le cadre législatif actuel pose des obstacles aux institutions financières canadiennes qui désirent restructurer leurs activités pour mieux répondre à la demande des consommateurs, et il pénalise les consommateurs en limitant la concurrence canadienne et étrangère et en n'établissant pas des critères d'information et de transparence adéquats.

L'ACCOVAM a signalé au groupe de travail qu'un assouplissement de la législation, particulièrement en ce qui concerne les règles de propriété et l'entrée dans le secteur financier, favoriserait un secteur des valeurs mobilières plus ouvert, plus concurrentiel et plus dynamique, et, de manière générale, un système financier aussi plus efficace et concurrentiel.

L'une de nos principales recommandations était d'étendre l'accès au système des paiements canadiens de façon que les sociétés de courtage puissent offrir à leurs clients des services de paiement tels que des comptes de chèques et des cartes de débit et de crédit.

Cette recommandation a été adoptée par le groupe de travail et figure maintenant dans l'avant-projet de loi fédéral. Nous en félicitons le gouvernement, car cette mesure donnera aux consommateurs un plus grand choix en matière de services financiers et favorisera des règles de jeu plus équitables pour les institutions financières qui offrent ces services. Nous prévoyons qu'un bon nombre de nos sociétés membres non affiliées à des banques se joindront à l'Association canadienne des paiements, probablement à titre de sous-adhérents, et se procureront ainsi des services de paiement par l'entremise de l'un des treize adhérents. Nous recommandons au gouvernement d'adopter cette législation le plus tôt possible afin que les sociétés de courtage intéressées puissent commencer à offrir des services de paiement à leurs clients. Il serait important aussi que le ministère des Finances et l'Association canadienne des paiements mettent rapidement en application les règlements qui se rapportent à cette législation.

La loi fédérale proposée prévoit des mécanismes pour mieux informer les consommateurs et leur assurer un traitement équitable dans le cadre de la distribution des produits et services financiers. L'amélioration des critères d'information et de transparence relatifs aux produits et services toujours plus complexes, et l'établissement de normes de conduite rigoureuses sont absolument nécessaires pour aider les consommateurs à faire des choix plus éclairés.

Une mise en garde s'impose toutefois: en effet, même s'ils sont guidés par les meilleures intentions du monde, les mécanismes de protection des consommateurs qui seraient adoptés par la nouvelle Agence de la consommation en matière financière devraient être structurés de manière à éviter des coûts réglementaires excessifs pour les institutions canadiennes qui mènent leurs activités dans un marché hautement compétitif.

La législation proposée prévoit aussi la création d'un mécanisme de recours pour les clients des institutions financières fédérales qui ont été lésés et veulent obtenir dédommagement. Dans un premier temps, les clients devraient tenter de régler leur différend par les voies administratives régulières au sein de l'institution participante. Si cette étape ne donnait pas des résultats satisfaisants, les clients pourraient ensuite soumettre leur cas à un ombudsman fédéral. Cette proposition vise à peu près le même objectif que le système d'arbitrage créé par l'ACCOVAM en 1992 et qui est maintenant offert aux clients de nos sociétés membres partout au pays. Notre système offre aux clients qui n'arrivent pas à s'entendre avec leur courtier, la possibilité de recourir à l'arbitrage pour tout différend d'un montant maximal de 100 000 $.

Il existe toutefois plusieurs différences importantes entre le programme d'arbitrage de l'ACCOVAM et le système proposé par le gouvernement fédéral. Par exemple, la décision de l'arbitre est exécutoire pour les deux parties, alors que les décisions de l'ombudsman relèveraient plutôt de la pression morale. Le système d'arbitrage de l'ACCOVAM comporte un processus simple par lequel les parties, après avoir tenté de régler le différend de façon informelle, s'en remettent à un arbitre indépendant, à moins qu'elles n'aient accepté de se soumettre d'abord à la médiation.

• 1550

La proposition fédérale vise un processus par lequel le client tenterait d'abord de régler le litige au moyen d'un processus administratif plus formel au sein de l'institution financière et, en cas d'échec, soumettrait son cas à un ombudsman fédéral dans le cadre d'un forum quasi judiciaire.

Enfin, les clients des sociétés membres de l'ACCOVAM doivent partager les coûts de l'arbitrage, à moins que l'arbitre n'en décide autrement, alors que le système fédéral serait entièrement gratuit.

Le système fédéral, tel qu'il est structuré actuellement, aurait probablement des répercussions sur le programme d'arbitrage de l'ACCOVAM, bien qu'il viserait des différends où les montants sont moins élevés. Selon le proposition fédérale, les institutions de régime fédéral et leurs sociétés affiliées seraient obligées de participer au processus. Quant aux autres sociétés de courtage, elles seraient encouragées à y participer mais n'y seraient pas tenues. Les clients de nos sociétés membres appartenant à des institutions fédérales pourraient ainsi recourir au système fédéral pour obtenir dédommagement. Nous croyons que de nombreux clients opteraient pour le système fédéral plutôt que de choisir le programme d'arbitrage de l'ACCOVAM, puisque le service serait entièrement gratuit. Par contre, les clients des autres sociétés de courtage ne pourraient pas se prévaloir de cette solution de rechange.

En principe, nous appuyons cette initiative du gouvernement fédéral qui vise à établir un mécanisme de recours pour régler les différends opposant les clients aux institutions fédérales. Cependant, nous croyons qu'un régime fédéral-provincial intégré serait préférable, puisqu'il s'appliquerait aux clients de toutes les sociétés de services financiers, et ce, quel que soit le champ de compétence de l'organisme de réglementation. Le système devrait être complètement indépendant, économique et uniforme. Ce qu'il faut éviter, c'est un système restreint qui ne s'appliquerait pas à tous les consommateurs mais qui chevaucherait tout de même les autres systèmes en place.

Le poste proposé d'ombudsman fédéral ne devrait pas faire concurrence au programme d'arbitrage mis en place par l'ACCOVAM dans le secteur des valeurs mobilières, mais devrait plutôt le compléter. L'ACCOVAM a acquis au fil des ans une solide expérience dans l'établissement d'un système d'arbitrage pour les clients de ses sociétés membres d'un bout à l'autre du pays. C'est pourquoi nous serions très heureux de participer à un effort conjoint fédéral-provincial en vue de créer un seul système de règlement des différends dans le secteur financier au Canada.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Oliver. Nous entendrons maintenant la directrice de la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario, Mme Tanis McLaren. Je vous souhaite la bienvenue.

Mme Tanis McLaren (directrice, Affaires internationales, Commission des valeurs mobilières de l'Ontario): Je vous remercie de m'avoir invitée. J'aimerais d'abord mettre mon intervention en contexte pour que vous compreniez bien mon point de vue. J'aimerais ensuite discuter des réserves de la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario vis-à-vis du projet de loi C-38.

La Commission des valeurs mobilières de l'Ontario est un organisme du gouvernement ontarien chargé de réglementer les activités relatives aux valeurs mobilières entreprises dans la province ou avec ses citoyens. La Loi sur les valeurs mobilières de l'Ontario, ses règlements et les règles fixées par la Commission régissent les participants sur le marché qui fournissent des conseils sur les valeurs mobilières, en font le commerce ou la distribution. «Valeurs mobilières» est une expression dont le sens est très vaste et englobe la quasi-totalité des produits de placement, à l'exception des dépôts et des contrats d'assurance.

Directement ou par l'intermédiaire d'associations autoréglementées, comme l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières, nous réglementons les plus grands courtiers en valeurs mobilières et gestionnaires de portefeuille du Canada, y compris certaines grandes filiales d'institutions financières fédérales. Nous réglementons également la divulgation de renseignements par les sociétés ouvertes, comme les banques et les compagnies d'assurances démutualisées, à l'occasion d'une émission de titres et par la suite.

La loi qui nous régit nous confie deux mandats: protéger l'investisseur contre les pratiques injustes, abusives ou frauduleuses et favoriser des marchés de capitaux justes et efficaces ainsi qu'instaurer la confiance dans ces marchés. Contrairement au Bureau fédéral du surintendant des institutions financières, la mission première de la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario n'est pas la réglementation prudentielle. Peu de nos règles ont pour but d'empêcher la faillite d'une institution réglementée. Nous nous penchons surtout sur les mesures destinées à favoriser l'efficacité du marché et à protéger le consommateur.

Comme vous êtes sans doute lassés de l'entendre dire, il y a eu d'énormes changements dans le marché des services financiers au pays et ailleurs ces dix dernières années. Le mot qui décrit le mieux ce bouleversement, c'est la convergence. Le marché des services financiers se mondialise. La plupart des règles qui séparaient les quatre piliers ont été supprimées, ce qui permet à chaque genre d'établissement de se livrer à une plus grande gamme d'activités.

• 1555

L'innovation et la demande du consommateur ont fait naître un grand nombre de produits et de services, et la plupart d'entre eux sont offerts par chaque participant au marché. Ces changements ont produit un vaste secteur de services financiers où se retrouvent de nombreux genres de fournisseurs de services. Il semblerait logique cela étant que la convergence, transfrontière et intersectorielle, se traduise par une plus grande convergence des activités et des méthodes de réglementation. Pourquoi les mêmes activités devraient-elles être régies par des règles différentes qui dépendent du genre d'institution qui offre le produit ou le service?

Au niveau provincial, les organismes de réglementation des valeurs mobilières canadiennes collaborent depuis des années pour harmoniser le régime applicable au secteur. Les organismes provinciaux qui s'occupent de l'assurance, des fonds de retraite et des valeurs mobilières ont aussi créé une forme conjointe de réglementation du marché financier pour favoriser l'harmonisation dans ces trois secteurs. Au niveau purement provincial, le gouvernement de l'Ontario a annoncé la fusion de la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario et de la Commission des services financiers de l'Ontario, qui s'occupe de l'assurance, des fiducies et des fonds de retraite dans la province.

Le projet de loi C-38 a de nombreux objectifs louables. En élargissant les règles de propriété, en offrant plus de souplesse pour investir dans d'autres entreprises et en permettant aux institutions financières de se constituer en société de portefeuille, la loi devrait fournir un cadre plus flexible et plus adapté pour les institutions. Ceci profitera au marché.

Toutefois, le projet de loi C-38 ne semble pas refléter la tendance vers la convergence. Lors de la dernière grande réforme de la législation fédérale sur les institutions financières en 1992, un effort conscient a été fait pour aligner les lois régissant les banques, les compagnies d'assurances et les compagnies de fiducie. Cela était souhaitable parce qu'un grand nombre de questions et de sujets de préoccupation soulevés dans ces trois genres d'entreprises étaient perçus comme étant les mêmes. Huit ans plus tard, au moment où le démantèlement des quatre piliers est pour ainsi dire achevé et que la convergence des secteurs a beaucoup progressé, la loi fédérale régissant les institutions va en sens inverse: les règles deviennent plus différenciées au lieu du contraire.

La CVMO s'est publiquement dite en faveur de beaucoup des objectifs de protection du consommateur définis dans le rapport du groupe de travail MacKay. En particulier, nous avons vigoureusement préconisé l'harmonisation des lois, la réduction du double emploi, du chevauchement et des lacunes dans la législation régissant les fournisseurs de services financiers au Canada, ainsi qu'une meilleure protection pour le consommateur. Toutefois, le projet de loi fait peu pour atteindre ces objectifs.

La création de l'Agence de la consommation en matière financière du Canada chargée de superviser le respect d'une liste légèrement plus longue de dispositions visant à protéger le consommateur, n'améliorera guère la protection du consommateur. De fait, quantité de caractéristiques du cadre plus souple tracé par le projet de loi C-38 font qu'il est plus nécessaire que jamais d'avoir des dispositions destinées à protéger efficacement le consommateur. Les auteurs du texte n'ont pas non plus saisi l'occasion de réduire les risques de double emploi et de chevauchement en fusionnant les rôles de protection du consommateur joués par d'autres ministères fédéraux. Le texte peut même augmenter les risques de chevauchement et de conflits dans le cas des exigences fixées par les organismes de réglementation fédéraux et provinciaux en matière de communication des renseignements et de protection du consommateur.

Essentiellement, nous mettons en doute la nécessité de créer un autre organisme alors qu'il existe un si fort potentiel d'augmentation du double emploi et du chevauchement en l'absence de preuve que la protection du consommateur s'en trouvera notablement améliorée. Si vous tenez pour acquis qu'un nouvel organisme fédéral est nécessaire pour protéger le consommateur, il y aurait moyen de modifier le projet de loi à l'avantage tant du consommateur que du secteur.

L'article 3 du projet de loi expose les objectifs de l'organisme. Brille par son absence l'élimination du double emploi ou la recherche de l'harmonisation entre les divers organismes fédéraux et provinciaux de protection du consommateur. Comme le notait le rapport du groupe de travail MacKay, beaucoup de dispositions de protection du consommateur au niveau fédéral trouvent leur équivalent au niveau provincial et autant le consommateur que les fournisseurs de services financiers profiteraient de l'harmonisation des exigences. Selon nous, on parviendrait à un meilleur résultat si l'organisme se voyait expressément confié le mandat d'harmoniser les exigences et d'éviter le double emploi. Autre possibilité, le libellé pourrait être modifié pour indiquer que l'organisme doit tenir compte de la nécessité d'harmoniser et de coordonner de manière sérieuse et responsable les régimes de réglementation dans l'atteinte de ses objectifs.

Les responsabilités de l'organisme englobent la supervision des dispositions visant les consommateurs qui s'appliquent aux institutions financières fédérales. La définition des dispositions visant les consommateurs englobe les règlements applicables à la communication des renseignements par les institutions financières fédérales, y compris ceux relatifs aux produits ou services offerts. Il faudrait apporter des éclaircissements pour s'assurer que ces dispositions sur la communication ne viennent pas chevaucher les exigences concernant l'information à communiquer dans les prospectus, ce qui continue de relever du surintendant des institutions financières et qui incorpore expressément les exigences énoncées dans la législation sur les valeurs mobilières. De plus, il est probable que de multiples exigences sur la communication des renseignements chevaucheront les dispositions actuelles de protection du consommateur imposées au niveau provincial, ce qui fera augmenter les coûts et les risques de conflits. Cela n'est dans l'intérêt ni du consommateur ni du secteur.

• 1600

Dans l'accomplissement de ses attributions, l'organisme n'a à tenir compte du rôle des autres organismes provinciaux ou fédéraux à vocation semblable que lorsqu'il passe en revue le respect des codes facultatifs et non lorsqu'il s'agit des autres dispositions de protection du consommateur. Étant donné que la plupart des institutions financières fédérales et leurs principales filiales dans le secteur financier sont aussi assujetties aux règles de protection du consommateur au niveau provincial, cette exigence devrait s'appliquer à toutes les fonctions de l'organisme.

Nous sommes heureux que les dispositions relatives à la vente liée soient dorénavant applicables aux banques. La réglementation sur les valeurs mobilières interdit la vente liée dans le secteur des fonds communs de placement, et nous avons récemment proposé que cette interdiction s'applique à toutes les entités de valeurs mobilières inscrites. Nous nous demandons toutefois pourquoi une interdiction semblable n'a pas été ajoutée à la Loi sur les sociétés d'assurances et à la Loi sur les sociétés de fiducie et de prêts. Si l'objectif est de ne pas faire double emploi avec les règles actuelles au niveau provincial, pourquoi cela ne retrouve-t-il qu'ici et non pour les autres dispositions de protection du consommateur qui se retrouvent au niveau provincial, comme celles qui s'appliquent à la divulgation du coût des emprunts?

En ce qui concerne la Loi sur l'Association canadienne des paiements, nous avons une ou deux choses à dire. Nous constatons que beaucoup des définitions utilisées dans les amendements proposés ne permettront pas d'atteindre le but souhaité, à savoir permettre aux courtiers et aux fonds communs de placement du marché monétaire d'être admissibles au système des paiements. En particulier, les définitions employées pour décrire les fonds mutuels en instruments du marché monétaire et les entités qui auraient droit d'adhérer à l'association soulèvent d'importantes difficultés. Des termes reconnus existent dans le secteur des fonds d'investissement depuis des années et ceux-ci ne se retrouvent pas dans le projet de loi. Nous ignorons s'il s'agit d'une divergence de vues ou d'une méprise de la part des rédacteurs concernant la structure juridique du secteur.

Nous serions heureux d'étudier ces aspects techniques plus en profondeur avec le gouvernement tout au long du processus législatif. De fait, on retrouve un peu partout dans le texte des problèmes de terminologie relatifs aux fonds communs de placement. La définition d'une «entité de fonds communs de placement» dans la Loi sur les banques se rapproche bien davantage du sens que l'on donne généralement à ce que l'on entend par un fonds mutuel, que celui-ci soit structuré comme fiducie ou comme société. On ne sait trop pourquoi les définitions de la Loi sur l'Association canadienne des paiements sont différentes de celles des lois sur les institutions financières. De plus, les termes employés dans les dispositions du projet de loi concernant les placements autorisés dans les entités se livrant à des activités relatives aux fonds communs de placement semblent aussi être différents sans guère de raison.

J'ai un dernier point à rappeler. En ce qui concerne la Loi sur le surintendant des institutions financières, le paragraphe 22(2.1) permet au gouvernement de prendre des règlements pour interdire, limiter ou restreindre la divulgation publique par les institutions financières, les sociétés de portefeuille bancaire ou les sociétés de portefeuille d'assurance de renseignements prescrits. Lorsque ces entités sont des émetteurs publics, un règlement comme celui-là peut placer l'émetteur dans une position intenable. La Législation sur les valeurs mobilières exige la communication rapide de tout renseignement important concernant la société, alors que ce règlement l'interdirait. Cette disposition ne semble pas concorder avec les principes adoptés récemment par les organismes étrangers de réglementation des activités bancaires. Je pense en particulier au document intitulé A New Capital Adequacy Framework, proposé par le Comité de Bâle, et en particulier au pilier trois, concernant la discipline des marchés.

L'obligation de ne pas divulguer de renseignements semble contraire à l'obligation suivante que prévoit le projet de loi C-38. Le nouveau paragraphe 22(6) de la Loi sur le Bureau du surintendant des institutions financières demande au surintendant de présenter, chaque année, un rapport sur la divulgation de renseignements par les institutions financières faisant état du progrès accompli pour améliorer la divulgation des renseignements sur le milieu des services financiers. De plus, en quoi cette obligation correspond-elle au rôle que l'agence doit jouer en supervisant les dispositions de la législation fédérale régissant les institutions financières qui visent à protéger les consommateurs et dont un bon nombre reposent sur les renseignements divulgués par les institutions financières?

Je vous remercie.

Le président: Merci beaucoup, madame McLaren.

Nous allons maintenant entendre la représentante de l'Association Interac, Mme Judith Wolfson. Bonjour.

Mme Judith Wolfson (présidente-directrice générale, Association Interac): Merci, monsieur le président et membres du comité. Au nom de l'Association Interac, je vous remercie de votre invitation à vous présenter nos opinions au sujet du projet de loi C-38. Nous avons distribué le texte de notre exposé en anglais et en français et nous en avons ici d'autres exemplaires pour ceux qui en veulent.

Je centrerai mon attention aujourd'hui sur un petit article du projet de loi C-38, article 236, qui concerne la supervision des systèmes de paiements privés, dont l'Association Interac fait partie. Nous avons quelques suggestions mineures, mais néanmoins très importantes à formuler pour améliorer l'article 236 et aider ainsi le gouvernement à protéger les consommateurs comme ils le souhaitent tout en permettant à Interac et les autres systèmes de paiements comme le nôtre de pouvoir continuer à fournir un service de calibre mondial aux Canadiens.

Certains diront que les Canadiens se targuent facilement d'offrir des services de calibre mondial, mais Interac représente certainement un cas unique en son genre. Nous sommes considérés comme les meilleurs au monde et c'est vrai.

• 1605

Nous sommes une association privée sans but lucratif. Nos 89 membres ont coopéré pour bâtir un réseau qui relit les guichets automatiques et les détaillants de tout le pays. Et nous craignons que les dispositions du projet de loi C-38 ne compromettent l'excellente qualité des services que les Canadiens sont en droit d'attendre.

Le projet de loi C-38 établira un nouveau cadre de réglementation pour les systèmes de paiements privés du Canada. Il s'agit d'Interac, de Visa, de MasterCard, de Mondex et éventuellement d'autres systèmes. Nous appuyons totalement les objectifs énoncés par le gouvernement pour ce qui est de promouvoir l'efficience et la concurrence, d'assurer la sûreté et l'intégrité du système de paiements ainsi que la protection des intérêts des consommateurs. Néanmoins, nous estimons que la réglementation proposée va bien au-delà des mesures nécessaires pour atteindre ces objectifs et ne prévoit pas les freins et contrepoids que requièrent des pouvoirs aussi vastes.

Permettez-moi de m'expliquer. Nous avons trois grandes objections à l'article 236 du projet de loi. Premièrement, nous croyons que la nouvelle réglementation ferait largement double emploi avec les règlements existants. Interac est déjà régie par la Loi sur la concurrence et une ordonnance par consentement du Tribunal de la concurrence. Ces mesures suffisent amplement à assurer le dynamisme et la compétitivité du marché des paiements. En outre, la Loi sur la compensation et le règlement des paiements confère explicitement à la Banque du Canada le pouvoir de réglementer les systèmes de paiements de façon à promouvoir leur sûreté et leur stabilité. La mise en place de nouvelles mesures visant à accroître la concurrence, la sûreté et l'intégrité dans le cadre d'une nouvelle loi, créera donc des dédoublements et des chevauchements inutiles dans ces deux domaines.

Deuxièmement, le projet de loi confère au ministre des Finances le pouvoir de désigner des systèmes de paiements qui feront l'objet d'une surveillance directe. En ce qui concerne ces systèmes désignés, nous croyons que les mesures de surveillance que propose le projet de loi sont inutilement importunes, car elles pourraient amener le ministre des Finances à s'ingérer dans les décisions courantes. Par exemple, si le ministre décide de désigner Interac en vertu des pouvoirs que lui confère le projet de loi, il faudrait qu'il examine toutes les règles que nous établissons quotidiennement pour gérer notre entreprise. Nous travaillons dans un domaine d'activité complexe et la participation du ministre à l'établissement de nos règles opérationnelles entraînerait des frais importants pour l'industrie et également pour le gouvernement.

Troisièmement, le cadre de réglementation proposé ne prévoit pas les freins et les contrepoids requis. Le projet de loi C-38 n'établit pratiquement aucune règle, condition ou méthode pour la désignation d'un système de paiements privé. Aucun critère défini n'entraînera la désignation. Aucun délai n'est fixé. Aucune disposition ne permet à un système de paiements de régler un problème avant qu'il ne soit désigné. Le projet de loi n'établit tout simplement pas de paramètres clairs et transparents pour la surveillance.

Pour remédier à ces problèmes, nous proposons d'apporter au projet de loi C-38 quelques modifications très simples qui établiront un juste équilibre entre la nécessité, pour le gouvernement, de protéger les consommateurs et, pour notre secteur, de disposer d'une réglementation claire et bien définie.

Premièrement, l'article 236 devrait mettre l'accent sur la protection des consommateurs et éviter de faire double emploi avec la Loi sur la concurrence, l'ordonnance par consentement du Tribunal de la concurrence et la Loi sur la compensation et le règlement des paiements. Autrement, cette mesure entraînera des frais et des dédoublements inutiles.

Deuxièmement, en mettant l'accent sur la protection des consommateurs, on devrait mettre en place un processus simple, bien défini et transparent permettant au ministre de désigner les systèmes à surveiller s'il le juge nécessaire. Il faudrait prévoir trois étapes bien simples: premièrement, le ministre devrait faire part des inquiétudes que suscite le système de paiements; deuxièmement, il faudrait laisser au système de paiements en question l'occasion de répondre aux préoccupations du ministre et, troisièmement, si le système de paiement ne prend pas les mesures correctives voulues, le gouvernement devrait pouvoir le désigner par décret. Le gouvernement resterait ainsi entièrement en mesure de protéger les consommateurs. La désignation est une mesure qui serait prise en dernier ressort plutôt qu'en premier lieu pour résoudre un problème. Cela assurerait également la transparence et l'équité du processus de désignation.

Troisièmement, si un système de paiement est désigné, sur recommandation du ministre, le gouverneur en conseil devrait pouvoir émettre des directives visant à remédier aux problèmes. Le gouvernement n'a pas à examiner chacune des règles s'appliquant à un système désigné, car procéder ainsi entraînerait énormément de travail tant pour le système en question que pour le gouvernement. Ce serait une procédure bureaucratique lente et coûteuse.

• 1610

Pour résumé, nous appuyons l'objectif du gouvernement qui consiste à protéger les consommateurs. Nous sommes tout à fait prêts à coopérer pour que les Canadiens soient toujours bien desservis par les services Interac.

Les changements que nous proposons d'apporter au projet de loi C-38 visent seulement à l'améliorer. Ils ne modifient pas les objectifs énoncés par le gouvernement. Ils ne limitent pas la capacité de ce dernier à protéger les consommateurs. Ils visent simplement à assurer l'équité et la transparence nécessaires pour que les intérêts des consommateurs puissent être protégés d'une façon efficiente et rentable qui continuera de promouvoir l'innovation et l'excellence des services à la clientèle.

Nous vous avons fourni copie d'un amendement au projet de loi et nous nous ferons un plaisir de répondre aux questions du comité à ce sujet.

Le président: Merci beaucoup, madame Wolfson.

Nous allons maintenant donner la parole au président de TG International, M. Downing.

M. Peter R. Downing (président, TG International Ltée): Je m'appelle Peter Downing. J'ai des antécédents tant dans le milieu des affaires que dans les secteurs de l'enseignement, de l'administration publique et du développement international.

Depuis le milieu des années 90, je cherche à élaborer un système de reddition de comptes à trois niveaux pour les sociétés. Une entreprise doit, selon ce système, présenter chaque année le bilan de sa performance sur le plan économique, environnemental et social.

Je vais vous parler des dispositions du projet de loi C-38 concernant les rapports sur les responsabilités envers le grand public. Je passerai en revue les principaux renseignements que j'ai présentés au comité dans mon mémoire écrit du 4 août.

[Français]

Je vous demande, mesdames et messieurs, de bien vouloir m'excuser de ne pas faire ma présentation en français. Toutefois, vous avez en main la traduction du tableau 1 ainsi que les figures 1, 2 et 3, qui ont été soumises avec mon texte le 4 août dernier.

[Traduction]

Le projet de loi C-38 vise à faire en sorte que les institutions financières dont l'actif dépasse un milliard de dollars publient à leur site Web un rapport annuel sur les responsabilités envers le grand public. Ces rapports doivent décrire la façon dont elles ont contribué à l'économie et à la société canadiennes.

Le comité entendra et lira des opinions divergentes quant aux pour et aux contre de ces rapports annuels. Un éditorial du Financial Post du 4 juillet s'opposait aux dispositions du projet de loi C-38 à cet égard, qualifiant ces rapports de véritables inquisitions bancaires. Le rédacteur affirmait:

Mesdames et messieurs, il y a une soixante d'années, les PDG ont renâclé devant la nouvelle loi exigeant que les états financiers annuels des sociétés cotées en bourse fassent l'objet d'une vérification financière indépendante menée par des comptables publics de l'extérieur et à ce que les conclusions de la vérification soient rendues publiques. A posteriori, nous nous rendons compte que c'était là et que c'est toujours une loi fort sage pour protéger les actionnaires et les investisseurs potentiels.

Le rapport sur les responsabilités envers le public que prévoit le projet de loi C-38 se révélera être également une bonne mesure pour protéger les intérêts du milieu des affaires et du grand public. Cela étant, je préconise d'exiger, dans la réglementation découlant du projet de loi C-38, que les institutions financières publient des déclarations répondant à des normes minimums de divulgation et de transparence. Ces normes assureront la pertinence et la fiabilité des renseignements figurant dans les pages Web de chaque institution financière.

Si vous examinez le tableau 1, vous verrez que les renseignements actuellement affichés aux sites Web des 11 institutions financières qui seront tenues de produire ces déclarations annuelles, varient beaucoup. Les pages Web de CIBC, de la Banque Royale et de la Banque de Montréal témoignent de l'influence du Livre blanc de l'année dernière sur la réforme bancaire en citant expressément plusieurs de leurs contributions à l'économie canadienne. Les pages web des trois autres banques sont silencieuses à ce sujet. Seule la Banque Royale a présenté un rapport annuel sur ses activités communautaires. Trois des six banques ont fait rapport de leurs dons au niveau régional, mais trois ne l'ont pas fait. Trois des cinq sites web de compagnies d'assurances n'avaient même pas de page Web sur leur participation communautaire. Seule ManuVie avait une page Web impressionnante.

Le concept TGI de la Fiche de pointage communautaire des entreprises, qui figure au tableau 2, aborde la question d'une norme commune minimum pour la communication des renseignements dans les pages Web. Cette fiche de pointage permettrait aux parties prenantes du milieu des affaires et de la collectivité de comparer la performance des institutions financières, ce qui est impossible sans une déclaration annuelle normalisée. La transparence dépend de la clarté des renseignements présentés: à quel point les déclarations annuelles seront-elles compréhensibles pour le lecteur?

• 1615

Page suivante, à la figure 1, nous présentons le concept de la déclaration d'engagement social de l'entreprise: les éléments fondamentaux de l'entreprise, ses progrès environnementaux, le soutien communautaire et le mécénat correspondent aux composantes communes des états financiers. Par exemple, un bilan comprend trois éléments: l'actif, le passif et l'avoir des actionnaires. Comme pour les états financiers, les éléments que nous prévoyons feront partie intégrante de la déclaration annuelle.

La déclaration d'engagement social de l'entreprise de TGI présente un triple bilan, soit sur le plan économique, sur le plan environnemental et sur le plan social.

Ce printemps, le Groupe financier de la Banque Royale a publié son rapport communautaire pour 1999, un rapport social de 40 pages en couleur et très bien présenté. Il a été mis à la disposition du public par l'entremise du site web et des succursales de la banque comme le demandait le Livre blanc. Il ne contient pas de rapport sur les responsabilités envers le grand public.

À la figure 2 de la page précédente, vous trouverez notre esquisse préliminaire de la déclaration d'engagement social de la Banque Royale du Canada pour 1999. Nous voulons montrer ainsi au comité à quoi pourrait ressembler le rapport sur les responsabilités envers le public d'une institution financière. Le modèle de rapport de TGI contient les neuf catégories de renseignements à divulguer, indiquées dans le Livre blanc de l'année dernière sur la réforme du secteur bancaire. Le rapport communautaire de la Banque Royale pour 1999 contenait huit de ces neuf catégories de renseignements. La neuvième catégorie que prévoyait le Livre blanc, soit l'emplacement des succursales que les banques s'apprêtent à ouvrir et à fermer, a été omise.

Pour être juste envers la Banque Royale, c'est la seule société cotée en Bourse du Canada qui ait publié un rapport sur son engagement social en 1999. La critique que je porte à l'endroit de son rapport communautaire de 1999 correspond aux appréhensions exprimées par d'autres que moi aux États-Unis et en Europe quant à la qualité et à l'intégrité des rapports sur l'engagement social des entreprises.

En mai dernier, Ford Motor a émis son premier rapport de ce genre qui s'intitulait Connecting with Society. Ce rapport de 98 pages était affiché à son site Web. Le document publié par Ford Motor ne contient pas de rapport sur les responsabilités envers le grand public.

La figure 3 présente une esquisse préliminaire du rapport publié par Ford Motor en 1999 pour montrer au comité qu'il est possible d'assurer la transparence en établissant une norme minimum commune. L'application de notre cadre de divulgation en quatre éléments au rapport communautaire de la Banque Royale pour 1999 et au rapport Connecting with Society de Ford Motor résume bien la façon dont chaque entreprise a fait sa contribution à l'économie et à la société de son pays.

Les règlements pris en vertu du projet de loi C-38 offriront des avantages nets dont tous pourront bénéficier grâce aux rapports sur les responsabilités envers le grand public qui seront disponibles sur des pages web et dans un groupe commun d'informations sur le rendement. D'abord et avant tout, cela va permettre au grand public de mieux comprendre comment chaque institution financière a contribué à l'économie et à la société canadiennes. Les rapports sur les responsabilités envers le grand public procureront un avantage concurrentiel à chacune des 11 grandes institutions financières. Ils permettront à ces institutions d'attirer des employés très compétents, de conserver et d'accroître leur part du marché tout en rendant plus attrayantes leurs actions auprès des investisseurs. Ainsi, quand les petites institutions financières commenceront à publier leurs rapports sur les responsabilités envers le grand public, et ce de façon volontaire, il existera déjà une configuration généralement acceptée pour ce qui est du format et du contenu, ce qui permettra à l'Agence de la consommation en matière financière de mieux gérer ces nouveaux renseignements dans le cadre de son mandat qui est de protéger les consommateurs du secteur des services financiers au Canada.

Autre avantage très important: le projet de loi C-38 exigera que les grandes banques préparent une évaluation de l'impact sur l'intérêt public, advenant qu'elles envisagent une fusion. Les rapports sur les responsabilités envers le grand public des années précédentes pourront servir de sources de renseignements afin que soit mieux comprise la proposition de fusion, et ce par tous les intéressés, y compris les organismes de réglementation et les députés. Imaginez un instant que vous avez sous les yeux une évaluation de l'impact sur l'intérêt public, document de 60 pages préparé en vue d'une fusion bancaire. Les deux banques en question auraient produit pour les dernières années leurs rapports sur les responsabilités envers le grand public dans un format et avec un contenu qui ne seraient pas uniformes. La proposition de fusion bancaire contiendrait une prévision de rapport sur les responsabilités envers le grand public qui comporterait des éléments absents des rapports précédents. Comment dès lors évaluer l'impact d'une éventuelle fusion sur l'économie et la société canadiennes? Comment le public canadien pourrait-il juger?

• 1620

Nous recommandons au comité de s'assurer que les règlements pris en vertu du projet de loi C-38, règlements concernant les rapports sur les responsabilités envers le grand public, comportent l'exigence que tous contiennent un groupe commun d'informations sur le rendement et que ces renseignements soient disponibles sur une page web.

Merci de m'avoir écouté.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Downing.

Nous allons maintenant passer aux questions. Monsieur Harris, vous disposez de dix minutes.

M. Richard M. Harris (Prince George—Bulkley Valley, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.

Je voudrais parler tout d'abord de l'exposé de la CS COOP. Il semble étrange que malgré les recommandations du groupe de travail MacKay, les recommandations de ce comité-ci, celles du Comité sénatorial des banques et celles de notre comité—surtout notre comité—, le projet de loi C-38 ne contienne aucune disposition qui permettrait l'établissement au Canada d'institutions bancaires coopératives. Le gouvernement a fait fi de son propre objectif d'offrir davantage de choix aux consommateurs.

Ma question s'adresse à M. Seveny. Dans votre rapport, vous dites que des hauts fonctionnaires du ministère des Finances ont déclaré récemment... qu'il fallait poursuivre les consultations pour que... Ont-ils révélé de quel genre de consultations il s'agissait? Il semble que les amendements que vous présentez, même s'ils exigent une approbation, soient tout à fait satisfaisants. Quelles consultations futures... vous ont-ils dit?

M. Gary Seveny: Si je me souviens bien, on nous a dit qu'il fallait soumettre ces amendements au ministère de la Justice. C'est tout. Ils n'avaient pas le temps de le faire, puisqu'il fallait prévoir tout un dossier pour la présentation du projet de loi C-38 à la Chambre. C'était il y a trois ou quatre mois et c'est pourquoi je m'attendais à ce que l'on fasse plus grand cas de notre proposition.

M. Richard Harris: Monsieur le président, étant donné que ce projet de loi contient près de 900 pages, et qu'il a fallu près de cinq ans pour le préparer—et il y a eu beaucoup de consultations au cours de ces cinq années. Il me semble que... Je n'aime pas utiliser le mot «sabotage». Toutefois, quelqu'un au bureau du ministre des Finances—le secrétaire parlementaire pourra peut-être nous répondre—a dit non, refusant de laisser figurer ces modifications dans le projet de loi. Quelqu'un a pris la décision et sans qu'il n'y ait de logique là-dedans, car on ne peut expliquer l'exclusion de cette disposition, étant donné les recommandations qui ont été faites. Êtes-vous de mon avis? Quand ce sera le tour de M. Cullen, vous voudrez peut-être lui en parler, afin que nous soyons tous mis au courant.

M. Gary Seveny: Je conviens avec vous que les mesures que nous préconisons en sont absentes. Nous n'accusons personne mais nous avons l'impression qu'il y a un manque de volonté. Nous avons travaillé aussi étroitement que possible avec les fonctionnaires du ministère des Finances, allant jusqu'à les informer tout dernièrement que nous étions prêts à rencontrer les membres du comité pour plaider notre cause et coopérer au maximum pour que ces changements se fassent. Encore une fois, je ne peux pas dire qui s'y est opposé mais c'est à ce niveau qu'il semble qu'il y ait un blocage.

M. Richard Harris: Je crois que moi je pourrais accuser certaines personnes car il y a trois recommandations très fortes sur cette question, émanant tout particulièrement de notre comité. C'est le ministère des Finances qui semble ne pas avoir voulu y donner suite.

• 1625

Si ces dispositions avaient été incluses dans le projet de loi C-38, où en êtes-vous dans vos préparations? Que vous reste-t-il encore à faire? Combien de temps aurait-il fallu pour que soit établie une banque coopérative nationale?

M. Gary Seveny: Nous avons essayé de prendre en main les opérations au sein de notre industrie et nous avons, comme première mesure, créé la CS Alterna Bank, filiale à part entière de la CS CO-OP. C'était le seul moyen de nous hisser au niveau législatif fédéral. Nous avons donc créé cette banque le 2 octobre. Dès que la propriété coopérative des banques sera permise, nous aimerions pouvoir convertir aussi rapidement que possible cette filiale en banque coopérative administrée et gérée par ses membres clients.

M. Richard Harris: Je me souviens que lors de nos audiences publiques sur le rapport MacKay nous avons entendu des représentants de la VanCity Credit Union et de la Richmond Savings Credit Union. Il semblait qu'ils représentaient un groupe assez puissant sur le plan numérique—et je crois que vous aussi étiez venus témoigner au nom des coopératives, réclamant vous aussi la création de ce système de banque coopérative nationale. Je crois que subséquemment, deux groupes se sont désistés. Pensez-vous que cela ait pu avoir une influence sur la décision du ministère des Finances d'exclure cette initiative du projet de loi?

M. Gary Seveny: Encore une fois, je ne peux vous donner que mon opinion personnelle.

Je crois que quand un certain nombre d'entre nous se sont dit prêts à plaider la cause de la création d'un système de banque coopérative combinée au Canada, le ministère des Finances s'est rendu compte que nous avions le poids suffisant pour remplir ce créneau vide d'institutions financières de second rang. Le retrait d'un ou deux des intéressés a créé des incertitudes au niveau des changements législatifs nécessaires et multiplié les points d'interrogation. Pour être franc, nous avons dû à la CS CO-OP prendre les choses en main et plaider nous-mêmes les changements nécessaires à la loi car nous avions tellement investi dans la proposition initiale que nos partenaires ont dû déclarer forfait ne voyant pas d'issue au problème législatif.

En revanche, nous, à la CS CO-OP, estimons que c'est une mesure législative habilitante très importante. Que le secteur des coopératives décide d'en profiter ou non, c'est une option nécessaire pour demain.

M. Richard Harris: Très bien. Merci beaucoup.

Le président: Merci, monsieur Harris.

Monsieur Loubier.

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Monsieur le président, je vais poursuivre dans la même veine que M. Harris parce que je trouve que c'est une question fort importante. Il a posé sa question à M. Cullen et j'aimerais bien que ce dernier nous dise pourquoi la disposition préconisée par le Groupe de travail MacKay et par nous-mêmes est disparue dans le projet final. Il serait peut-être intéressant que M. Cullen réponde à cette question. C'est ma seule question et ma seule préoccupation en rapport avec les exposés.

[Traduction]

M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Monsieur le président, c'est contraire à notre procédure. Les témoins sont là. Lorsque mon tour viendra je pourrai participer à la discussion mais j'estime que les députés d'en face devraient poser leurs questions aux témoins. C'est pour cela qu'ils viennent ici.

[Français]

M. Yvan Loubier: Je vous cède mon tour, monsieur Cullen. Répondez donc à cette question. Je considère que c'est important.

M. Roy Cullen: Cela mettra-t-il un terme à vos questions?

M. Yvan Loubier: Oui. Allez-y.

[Traduction]

Le président: Votre question, monsieur Cullen.

M. Roy Cullen: Très bien. Merci, monsieur le président, et merci à tous nos témoins.

En effet, j'ai une question à l'intention de M. Seveny, que j'ai rencontré il n'y a pas si longtemps. Je suis sûr que les membres ministériels du comité et, sans doute aussi, tous les autres membres du comité souhaitent voir le mouvement coopératif jouer un rôle important. Je demanderais à M. Seveny de préciser une chose pour le bénéfice du comité. Les coopératives de crédit ont présentement le droit d'être propriétaires d'une banque. D'ailleurs, la VanCity est propriétaire d'une banque, et je crois que vous-mêmes avez reçu l'autorisation d'acquérir votre propre banque. Mais cela ne répond visiblement pas à vos besoins. Pourriez-vous nous expliquer pourquoi?

• 1630

M. Gary Seveny: Cela ne répond pas à nos besoins, étant donné que nous avons formé notre propre institution bancaire comme formule de rechange. L'objectif, c'est de créer petit à petit une institution qui soit entre les mains de ses clients—une coopérative, au fond—et qui fasse de chaque membre de la coopérative un propriétaire de la banque qui aurait droit de se prononcer par vote sur le fonctionnement de la banque. C'est essentiellement une coopérative dans sa forme la plus pure, aux termes de la Loi sur les banques. Cette banque-ci ne diffère d'aucune façon des autres banques, sauf pour ce qui est des droits de propriété et des privilèges de vote. Toutes les autres conditions de la Loi sur les banques s'appliquent à notre banque.

Ce qu'il faut bien comprendre, c'est que nos 145 000 membres veulent maintenir leur propriété en coopérative. Ils approuvent la mise sur pied, comme mesure provisoire, d'une filiale en propriété exclusive, mais l'objectif est pour eux de devenir une banque qui soit une entreprise coopérative.

M. Roy Cullen: Pour revenir à ce qui a été dit plus tôt, votre banque et vous-mêmes avez lancé une initiative conjointement avec VanCity et Richmond Savings. Puis, VanCity s'est retirée de l'initiative, pour sa part. Vous avez dit que vous ne parveniez pas à interpréter les diverses motivations du gouvernement ou du ministère des Finances, mais vous semblez laisser entendre que VanCity se serait retirée parce qu'elle avait l'impression qu'elle n'allait nulle part.

Je vous assure que le ministère des Finances et le gouvernement étaient bien intéressés à discuter des divers modèles qui avaient été proposés, mais cela n'a pas empêché VanCity soudainement de se retirer. On a voulu mettre à l'essai les divers modèles qui avaient été présentés, et il y avait certains points de désaccord... Mais vous n'êtes peut-être pas prêts à dire qu'il y avait certains points de désaccord. Personnellement, je crois que le gouvernement agissait en toute bonne foi, mais que tout d'un coup, l'initiative est tombée d'elle-même. Vous pourriez peut-être nous dire ce qui s'est réellement passé.

M. Gary Seveny: Il est évident que si des gens se sont retirés de l'initiative, c'est parce que VanCity s'était elle-même retirée du groupe de promoteurs de l'initiative et que, au palier fédéral, on ne semblait pas disposé à apporter les modifications législatives voulues.

Je tiens à répéter que VanCity avait le droit de décider pour elle-même qu'elle se retirerait de l'initiative; toutefois, j'ai l'impression qu'elle s'est rendue compte que la bataille qu'elle menait pour faire apporter les modifications législatives était peine perdue, et c'est pourquoi son conseil d'administration s'est dit qu'il valait peut-être mieux demeurer sous le régime législatif amical qu'était celui de la Colombie-Britannique, plutôt que de se lancer dans l'inconnu, comme cela aurait été le cas sous le régime législatif fédéral.

Par ailleurs, la CS CO-OP estime qu'il est important d'avancer au moins sur un plan. Lorsque nous avons pressenti au départ le ministère des Finances, c'était pour préconiser une loi sur le système bancaire coopératif très exhaustive qui offrirait de nombreux pouvoirs et accorderait des concessions spéciales. Les changements qui sont actuellement proposés portent exclusivement sur le régime de propriété de la banque comme coopérative. La seule chose que nous vous demandons, c'est de permettre la propriété coopérative des banques. C'est bien différent de ce qui a été proposé au ministère des Finances il y a déjà deux ans, puis il y a un an. Mais ces propositions ne tiennent plus. Nous, la seule chose que nous demandons dans le cadre de la Loi sur les banques, ou plutôt du projet de loi C-38, c'est de permettre le régime de propriété coopérative pour les banques.

Nous ne demandons pas que l'on nous accorde tous les pouvoirs et que l'on nous fasse des concessions. Nous ne demandons qu'une chose, et c'est ce que je viens de vous dire.

M. Roy Cullen: Monsieur le président, vais-je avoir mon temps et celui de M. Loubier?

Le président: Oui, nous pourrions faire cela.

M. Roy Cullen: D'accord, merci.

Monsieur Seveny, je ne m'oppose certainement pas à l'idée d'élargir le rôle des coopératives de crédit afin de donner plus de choix aux consommateurs, mais est-ce que la proposition que vous formulez aujourd'hui a l'appui du mouvement coopératif?

M. Gary Seveny: Je ne peux pas parler au nom du mouvement coopératif tout entier. Je peux certainement parler au nom de plusieurs coopératives de crédit membres d'une fédération plus large de coopératives de crédit qui nous ont félicités récemment d'avoir créé la Banque CS Alterna et de nos efforts en faveur de la propriété coopérative des banques. Les principales coopératives de crédit du Canada détiennent la majorité des actifs des coopératives de crédit et regroupent la majorité des sociétaires, mais cela ne réduit en rien l'importance des plus petites coopératives de crédit. Il y a au Canada de très nombreuses coopératives de crédit, et je ne peux pas parler au nom de chacune d'elle. D'ailleurs, personne ne peut le faire. C'est un groupe peu homogène.

• 1635

M. Roy Cullen: Oui, mais vous avez sans doute lu le témoignage de M. Bill Knight, PDG de la Centrale des caisses de crédit du Canada, qui nous a dit l'autre jour que cela suscite de graves questions liées au partage des compétences entre les gouvernements fédéral et provinciaux. Il nous a même incités à la prudence. Il recommandait plutôt que nous n'apportions aucune modification pour les cinq prochaines années, mais il était d'avis qu'une année de plus... Vous avez entendu le ministre dire l'autre jour que si nous avons trouvé la bonne solution, il est prêt à aller de l'avant. Votre proposition a-t-elle, par exemple, l'aval des provinces, ou pouvez-vous vous en passer?

M. Gary Seveny: Nous en avons discuté avec la province dans laquelle la CS CO-OP détient une charte, et nous avons demandé l'adoption d'une loi qui permette qu'une coopérative de crédit puisse détenir une charte fédérale au même titre qu'une banque. Ces changements entreront en vigueur quand aura été révisée la loi ontarienne sur les coopératives de crédit. La Saskatchewan a déjà adopté ces révisions, et d'autres provinces envisagent de suivre cet exemple. Notre société mère, la CS CO-OP, a une charte de l'Ontario, et c'est donc à ce niveau que nous concentrons nos efforts.

M. Roy Cullen: Mais vous admettriez sans doute qu'avant de proposer un projet de loi à la Chambre des communes, il nous faudrait nous assurer que toutes les questions de partage des compétences aient été réglées au préalable.

M. Gary Seveny: Je ne vois pas pourquoi. Les provinces ont le droit d'autoriser la poursuite des activités, ne serait-ce que par voie d'exception, si la loi provinciale les y autorise. Je ne crois pas qu'il soit nécessaire d'harmoniser la législation dans l'ensemble du Canada.

M. Roy Cullen: Eh bien, je suis certainement prêt à m'engager, comme l'a fait le ministre, à tenter d'élaborer un modèle qui puisse faire consensus—et je ne dis pas que le vôtre ne répond pas à ce critère—et qui ne créera pas de problème au regard des compétences des provinces, etc.

Monsieur le président, si vous me permettez, j'aimerais maintenant m'adresser à Mme MacLaren, de la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario.

Dans votre exposé liminaire, vous avez dit que la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario est un organisme du gouvernement de l'Ontario, de sorte que vous représentez...

Mme Tanis MacLaren: C'est une société d'État irrégulière sans capital-actions. Il s'agit d'une société mandataire autofinancée mentionnée dans l'une des annexes énumérant les sociétés mandataires. C'est une société mandataire quasi indépendante. Le président de la Commission relève du ministre des Finances de l'Ontario, mais la Commission est financée entièrement par l'industrie elle-même.

M. Roy Cullen: D'accord. Ainsi, les opinions que vous exprimez ici aujourd'hui ne sont pas nécessairement celles du gouvernement de l'Ontario.

Mme Tanis MacLaren: Le gouvernement de l'Ontario n'a pas été consulté.

M. Roy Cullen: D'accord.

J'aimerais vous poser quelques questions. Le gouvernement fédéral a compétence exclusive en matière de banques et d'opérations bancaires. Pourquoi le gouvernement fédéral voudrait-il céder la réglementation de ces activités aux provinces? Pourquoi pareil transfert de responsabilité serait-il dans l'intérêt supérieur du gouvernement fédéral et des citoyens du Canada?

Mme Tanis MacLaren: Je ne pourrais vraiment pas vous dire pourquoi ce serait dans l'intérêt du gouvernement fédéral du Canada. À mon avis, ce qu'on propose ici, c'est de prendre une série de régimes... vous établissez un nouveau régime là où il n'y avait rien auparavant en ce qui concerne les institutions financières fédérales. Parmi elles, les sociétés d'assurances et les sociétés de fiducie ont de tout temps été assujetties à un très grand nombre de mesures législatives et de règlements au niveau provincial afin de protéger les consommateurs, en particulier dans le cas des sociétés d'assurances. Les principales filiales des banques—à une exception près—les institutions financières, sont régies par les commissions des valeurs mobilières ou par les autres organismes de réglementation des institutions financières au niveau provincial.

On a donc un secteur, soit le secteur bancaire, qui est assujetti à des règles assez minimales de protection des consommateurs tandis que sur les quatre piliers, trois sont assujettis à une réglementation assez poussée au niveau provincial.

Quelle est la solution sensée? Établirez-vous une agence complètement nouvelle qui aurait pour mandat de voir à l'application—je ne me souviens pas du nombre exact, mais je les ai comptées—d'environ 35 dispositions qu'on trouve dans quatre lois, à l'aide d'une trentaine de personnes ou plus, ou conférez-vous la responsabilité ou l'activité d'une certaine façon—quelle que soit la formule acceptable sur le plan politique—à ceux qui s'en occupent déjà depuis des années?

• 1640

M. Roy Cullen: Et cela inclut la réglementation des banques? Je me pose la question. Il est facile de comprendre pourquoi je pose la question. S'il survient une anicroche ou un problème de réglementation dans le cas d'une banque au Canada, s'adresserait-on au ministre des Finances fédéral ou à celui de chaque province?

Mme Tanis MacLaren: Il est question ici de mesures législatives visant à protéger les consommateurs: les régimes de communication de renseignements; le coût des emprunts; la publication de prospectus; qui peut vendre certains produits; quelles possibilités de conflits d'intérêts doivent être divulguées et lesquelles n'ont pas à l'être; et dans une certaine mesure, quelle sorte d'information vous devez fournir à vos clients au sujet des autres usages que vous allez faire des renseignements détenus sur eux dans vos dossiers.

Nous ne parlons pas de règles de prudence. Comme je l'ai dit plus tôt, nous ne sommes pas un organisme de réglementation qui s'occupe de règles de prudence. Nous réglementons certaines parties du secteur en vue d'en arriver à ce qu'on pourrait appeler une règle de prudence, mais cette activité n'est pas très poussée. C'est le BSIF qui s'occupe de la réglementation visant à empêcher les faillites. Notre fonction de réglementation vise à réduire au minimum les dommages résultant d'une faillite. C'est une approche très différente. Si une banque faisait faillite à cause d'un problème lié à la protection des consommateurs, il s'agirait d'une circonstance très inhabituelle.

M. Roy Cullen: Je ne parlais pas vraiment... nous parlons peut-être de questions de prudence, mais permettez-moi de vous donner un exemple. Le projet de loi demande qu'on offre des comptes à faible coût. Nous retrouverions-nous avec une sorte de compte à faible coût en Ontario, une autre en Saskatchewan et une autre en Colombie-Britannique? Comment parviendrons-nous à une certaine harmonisation ou à une certaine norme, étant donné que le gouvernement fédéral a une certaine obligation de s'assurer que cela se produise?

Mme Tanis MacLaren: J'aimerais bien pouvoir vous dire que la façon dont nous fonctionnons au palier provincial est la façon idéale et que les organismes que nous avons créés pour réduire au minimum le double emploi, le chevauchement et le manque d'harmonie entre les divers secteurs sont parfaits. Ce n'est pas le cas. Cependant, l'autre solution est de proposer la création d'un compte à faible coût pour les comptes de dépôts des banques, dont le nombre est assez limité au Canada. Et si les gouvernements provinciaux veulent appliquer une norme équivalente à leurs institutions financières, y compris les sociétés d'assurances qui offrent des produits terriblement semblables aux comptes de dépôts, ainsi que les courtiers qui acceptent en réalité des dépôts, il y aurait toute une autre série de règles. La possibilité qu'elles s'harmonisent exactement à toutes les autres en vigueur dans le pays serait encore bien moins grande si un organisme fédéral de réglementation y ajoutait une autre couche de mesures législatives visant à protéger les consommateurs. Cette nouvelle addition n'améliorerait pas les choses, et je soupçonne même qu'elle contribuerait à faire empirer la situation.

M. Roy Cullen: N'est-il pas possible que si nous adoptons le modèle que vous avez choisi, on se retrouve dans une situation où l'Ontario prendrait essentiellement toutes les décisions, alors que les autres provinces devraient suivre le mouvement?

Mme Tanis MacLaren: Je ne puis que vous dire ce que je sais de la réglementation des valeurs mobilières et des autorités canadiennes en valeurs mobilières, c'est-à-dire le regroupement des autorités de réglementation des valeurs mobilières de toutes les provinces et territoires—et de leur modus operandi. Je puis vous garantir que ma vie serait grandement facilitée si c'était l'Ontario qui pouvait décider, mais ce n'est pas comme cela que les choses fonctionnent. Il s'agit d'un processus décisionnel consensuel et nous passons beaucoup de temps à écouter les différentes autorités de réglementation, tout comme d'ailleurs l'industrie, les groupes de consommateurs et toutes les autres parties prenantes. Il s'agit d'un processus tout à fait transparent et consensuel. Par voie de conséquence, il est également plus lent que ce que nous voudrions, mais il produit également le plus souvent un meilleur résultat. Et, non, ce n'est pas l'Ontario qui a la haute main.

M. Roy Cullen: Madame MacLaren, j'aurais une dernière question à vous poser.

Les associations et regroupements de consommateurs au Canada se sont très nettement prononcés en faveur de l'agence pour la protection du consommateur dont la création est proposée par le projet de loi C-38. Pour votre part, diriez-vous que ces organismes n'ont pas besoin d'être ainsi protégés ou que leur soutien est malavisé? Pourquoi les dispositions de cette loi ne protégeraient-elles pas les consommateurs?

• 1645

Mme Tanis MacLaren: Loin de moi l'idée de vouloir suggérer qu'il ne faut pas protéger les consommateurs. Je pourrais vous donner deux scénarios, purement hypothétiques, à l'appui du soutien des regroupements de consommateurs dont vous venez de parler. Par ailleurs, je ne voudrais pas me répandre en conjectures sur l'argumentation qui est la leur.

À mon sens, le seul élément positif du projet de loi C-38, c'est qu'il confie effectivement à quelqu'un la responsabilité directe du suivi des dispositions de protection du consommateur qui s'appliquent aux banques. Voilà qui est nouveau. À part cela, le reste de l'industrie est déjà inondée par une foule de dispositions qui protègent le consommateur. Ainsi, si les regroupements de consommateurs voient la chose en se disant qu'il vaut mieux cela que rien du tout, je comprends fort bien leur point de vue.

M. Roy Cullen: Dans votre mémoire, vous parlez beaucoup de dédoublement et de chevauchement. C'est une question importante: Est-ce cela que nous créons? Par contre, vous semblez faire valoir—et peut-être vous ai-je mal interprétée—que ce genre de texte doit précisément se retrouver dans la loi. La façon dont je vois l'agence de protection du consommateur, ce serait un regroupement de plusieurs fonctions qui sont déjà assurées au plan fédéral et qui se retrouveraient confiées à une seule et même entité. Il ne s'agit pas d'ajouter du personnel et de faire grossir la bureaucratie, mais plutôt de regrouper ce qui existe déjà. Pour votre part, vous parlez des risques de dédoublement et de chevauchement entre les administrations, ou entre agences. Vous pourriez peut-être nous expliquer ce à quoi vous pensez parce que je vous vois hocher la tête.

Mme Tanis MacLaren: Mais certainement.

M. Roy Cullen: L'autre élément est, j'imagine, qu'une agence de protection du consommateur qui serait bien gérée essaierait précisément d'éviter les dédoublements et les chevauchements. Êtes-vous en train de me dire qu'il faudrait le préciser dans la loi afin que ce soit évident, à l'excès peut-être?

Mme Tanis MacLaren: Il existe dans la loi une disposition qui nous oblige à traiter de ces questions d'harmonisation et de dédoublement. Malgré cela, il est extrêmement difficile de réunir autour d'une table des interlocuteurs valables pour régler ce genre de questions et pas uniquement dans le cadre d'un seul secteur. Lorsqu'on traite uniquement de l'industrie des valeurs mobilières, s'il était possible de l'isoler vraiment, ou alors uniquement l'industrie de l'assurance ou celle des fiducies, la vie serait sans doute plus simple. Mais à l'heure actuelle, ces industries ne sont pas faciles à circonscrire. Par conséquent, les dédoublements et l'harmonisation sont, pour tous et chacun, un objectif important. Mais à moins de rendre les choses transparentes et d'imposer une obligation d'action, il est beaucoup plus facile de ne pas consulter; il est beaucoup plus facile de dire que, somme toute, c'est ma façon de faire qui est la meilleure.

Toutes les agences provinciales de réglementation du secteur de l'assurance, de celui des pensions, de celui des coopératives de crédit et bien d'autres encore sont déjà en train de discuter de fusion. Nous avons déjà plusieurs fois discuté de certains dossiers très précis. C'est toujours surprenant de voir, au sein précisément du groupe de gens qu'on essaye de protéger, à quel point ils ont des perspectives différentes, des objectifs d'intérêt public tout à fait légitimes, défendables et extrêmement variés mais tout aussi incompatibles. Tout ce que je veux dire par là, c'est que si vous créez une agence sans lui imposer l'obligation expresse, d'une part, de tenir compte des autres organismes provinciaux de réglementation qui ont une responsabilité dans ce domaine, une responsabilité qui chevauche celle de l'agence, et en deuxième lieu de bien tenir compte de la nécessité qu'il y a d'harmoniser et de réduire les dédoublements, vous n'atteindrez pas le but recherché.

M. Oliver compte parmi ses clients les principales filiales de nos principales banques. Si nous disons que nous avons un ensemble de règles sur les éléments à divulguer en matière de conflits d'intérêts avec la banque mère au sujet de divers produits, et que l'agence de protection du consommateur propose des règles différentes—et Dieu nous en préserve, des règles mutuellement incompatibles—, que vont faire la Banque Royale et la DS ou CIBC et CIBC World Markets? Combien tout cela va-t-il coûter? À qui cela servirait-il à part les imprimeurs? Je ne vois pas l'intérêt. Ce n'est certainement pas utile aux consommateurs.

M. Roy Cullen: Monsieur le président, puis-je poser une dernière question?

Le président: Oui, bien sûr.

M. Roy Cullen: Madame Wolfson, merci pour votre mémoire. Je dois dire que je compatis quelque peu à ce que vous dites pour l'essentiel, à savoir que ce monde d'Interac et d'autres organisations est en évolution rapide. Vous êtes confrontés à divers systèmes qui évoluent rapidement et à d'éventuels partenaires différents. Quelles sont les règles? Pourrait-on tout d'un coup désigner hors circuit un système quelconque?

Je me demande si vous recommanderiez quelque chose comme cela, où par exemple le ministre pourrait souligner qu'il y a des règles ou des activités qui suscitent des problèmes de consommation et qu'il va y avoir une période de consultation pour voir si l'on peut rectifier le tir, et je me disais que si quelque chose arrivait très rapidement et que les consommateurs étaient menacés, on pourrait peut-être prévoir un délai pour protéger les consommateurs menacés étant donné...? Il y a toujours un équilibre entre la consultation et les initiatives dans l'intérêt public. Comment voyez-vous cela dans le contexte de ce que vous recommandez?

• 1650

Mme Judith Wolfson: Merci de me donner l'occasion de répondre.

J'aurais beaucoup de mal à imaginer un risque pour les consommateurs qui ne soit pas couvert par la Loi sur la compensation et le règlement des paiements. Comme je le disais au début, cette loi régirait les interventions immédiates dans ce cas. Je crois que les risques sont couverts, et il est aussi évident que les institutions membres d'Interac sont elles-mêmes tenues par leurs propres obligations.

Nous avons donc longuement réfléchi pour voir s'il pourrait exister des risques qui ne seraient pas régis par cette législation, mais nous n'en avons pas trouvés.

Pour ce qui est des questions de protection des consommateurs, je pense que l'intérêt de la consultation, c'est que la structure établie dans l'ordonnance précise de façon très claire la constitution du conseil—il y a 14 membres, qui se réunissent très fréquemment et la consultation est donc très facile. C'est un groupe bien défini de personnes qui ont des rôles très clairs et qui interviennent très fréquemment. En fait, non seulement le conseil lui-même se réunit fréquemment, mais les membres des institutions du conseil se rencontrent quasiment quotidiennement et au moins toutes les semaines. Je pense donc que la consultation est vraiment le moindre des problèmes, et je pense que ce que l'on cherche, ce sont des réponses en temps opportun.

Le problème, si vous le permettez, monsieur Cullen, c'est qu'en raison de la complexité des problèmes, il faut pouvoir discuter de tout cela rapidement. On pourrait par exemple penser que nous parlons de broutilles, mais pas plus tard que demain nous allons discuter lors d'une réunion des règles de divulgation des frais supplémentaires au guichet automatique. C'est le genre de règles dont nous discutons et dont nous pensons que vous devriez être tenus au courant en permanence. Par conséquent, s'il y a un problème avec une règle quelconque, nous estimons que la transparence est vitale de manière à permettre au gouvernement de dire qu'il y a un problème, qu'il veut savoir pourquoi afin de pouvoir le régler.

M. Roy Cullen: Oui, et vous tenez à avoir ce genre de choix car vous pouvez être en train de discuter à divers moments ou même de former des alliances, et tout le monde veut savoir quelles sont les règles et si elles risquent de changer d'un moment à l'autre sans qu'on le sache.

Mme Judith Wolfson: La certitude est généralement importante. Nous, les membres, nous venons de nous lancer dans un investissement massif de millions de dollars pour renforcer le système. Le volume de transactions, comme vous le savez tous ici, parce que les gens ne vont plus à la banque à 3 heures de l'après-midi le vendredi et qu'ils n'ont plus à se préoccuper de savoir s'ils ont de l'argent en espèces pour la fin de semaine, ce volume est constant. Nous allons avoir à peu près deux milliards de transactions simplement pour des retraits au cours de cette année.

Nous avons donc besoin de certitude pour que l'argent continue à circuler et il faut que les investissements et les modifications des règles pour répondre à l'évolution du marché se fassent rapidement et que les réactions soient très rapides.

Merci.

Le président: Merci, monsieur Cullen.

Monsieur Harris, vous avez une dernière question.

M. Richard Harris: Merci, monsieur le président. Ma question s'adresse encore à Mme Wolfson.

Dans votre exposé, vous avez évoqué quelque chose qui nous paraît un peu inquiétant de ce côté-ci du comité, à savoir les pouvoirs quasi divins que ce projet de loi confère au ministre des Finances. Le gouvernement n'est apparemment pas satisfait du système de réglementation en place qui est, à notre avis, très complet pourtant.

• 1655

L'industrie s'est assez bien autoréglementée et les choses ne se passent pas mal. Tout d'un coup, ils viennent dire que cela ne suffit pas et que le ministre des Finances doit avoir le pouvoir de mettre le nez dans cette industrie comme il le veut. J'ai l'impression que ce scénario doit être assez inquiétant pour votre industrie. Je ne voudrais pas que votre réponse vous mette en difficulté vis-à-vis du ministre des Finances, mais nous trouvons très inquiétant qu'on donne de tels pouvoirs à un ministre. Nous nous demandons ce que cela cache.

Pourriez-vous nous donner votre avis là-dessus?

Mme Judith Wolfson: Je n'aurais pas la prétention de savoir ce que le ministre des Finances a derrière la tête, mais je suis sûre qu'il a abondamment réfléchi à la question. Nous reconnaissons en tout cas qu'il y a là des pouvoirs extrêmement vastes qui doivent être précisés. Et nous pensons que si le gouvernement doit effectivement se soucier de la protection des consommateurs, s'il a le devoir et la responsabilité de s'en préoccuper, le ministre devrait pouvoir formuler cette préoccupation de manière à nous permettre d'y réagir.

Nous estimons donc qu'il faudrait préciser ces pouvoirs considérables et que la réglementation et l'encadrement du marché sont un choix de dernier recours, et qu'il faudra nous laisser la liberté de continuer à fonctionner correctement dans un secteur qui, je n'ai pas honte de le dire, est un modèle de succès remarquable.

M. Richard Harris: Merci.

Le président: Merci, monsieur Harris et madame Wolfson.

Mme Judith Wolfson: Merci.

Le président: Au nom du comité, je vous remercie. Nous allons évidemment tenir compte de vos remarques lorsque nous essaierons d'apporter des améliorations au projet de loi C-38. Encore une fois, merci.

La séance est levée.