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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 8 juin 1995

.1140

[Traduction]

Le président: Nous avons le quorum.

Messieurs, nous cédons directement la parole à M. Kingsley, qui comparaît ce matin, à la demande du comité, pour nous expliquer son document Perspective 1995-1996 qu'il a envoyé au comité le 31 mai.

Monsieur Kingsley, avez-vous une déclaration à nous faire aujourd'hui, ou préférez-vous répondre directement aux questions des membres du comité?

M. Jean-Pierre Kingsley (directeur général des élections): Je préférerais répondre aux questions, car je n'ai pas de déclaration, monsieur le président. Toutefois, comme le confirme votre ordre du jour, Mme Janice Vézina, directrice des Finances, et M. Jacques Girard, directeur des Services juridiques, m'accompagnent aujourd'hui pour nous aider.

Le président: Madame Parrish, je crois que vous avez des questions à poser sur le document Perspective.

Mme Parrish (Mississauga-Ouest): Me permettriez-vous de passer mon tour pour l'instant, pour me permettre de retrouver mes esprits? M. Kingsley répond toujours magnifiquement bien aux questions, et je dois me préparer.

Le président: Dans ce cas, laissez-moi poser une question moi-même. Monsieur Kingsley, ce qui nous intéresse, c'est le projet d'élaboration d'une liste électorale permanente que vous avez entrepris. Pouvez-vous nous dire combien elle coûterait?

M. Kingsley: Pour l'exercice actuel, nous avons budgété environ 500 000$ pour le lancement de projets pilotes. Comme je l'ai déjà fait savoir, ce n'est que lorsque nous aurons fait une étude de faisabilité et déterminé quelles banques de données peuvent s'appliquer et nous permettront d'obtenir le type de document qui nous satisferait et qui serait utile pour notre liste que nous saurons combien sa mise en oeuvre nous coûtera. Ce n'est qu'à ce moment-là que nous pourrons vous parler de chiffres.

Le président: Pensez-vous pouvoir attendre le prochain exercice pour recevoir des crédits supplémentaires, ou vous attendez-vous à devoir réclamer encore de l'argent au cours du présent exercice, une fois les 500 000$ épuisés?

M. Kingsley: Si j'ai bien compris la question, nous aurons certainement besoin de crédits supplémentaires au cours des prochains exercices. Cela coûte cher de maintenir un registre permanent. Mais il est prématuré de décider d'ores et déjà qu'il nous faudrait augmenter notre budget pour cette année-ci. Nous avons tenté de prévoir au budget tous les facteurs que nous vous aviez expliqués lors de notre dernière comparution, à la lumière de ce que nous savions à l'époque.

.1145

Mme Catterall (Ottawa-Ouest): Les travaux de la Commission sur la réforme électorale ont permis de suggérer plusieurs amendements à la loi. Je n'ai malheureusement pas eu le temps d'examiner votre document Perspective avant la réunion de ce matin. Prévoyez-vous que d'autres mesures vous permettraient de mettre en oeuvre certaines des autres recommandations au cours des prochaines années?

M. Kingsley: Notre objectif reste toujours de déposer auprès du comité une annexe au rapport exigé par la loi sur les 35e élections générales de 1993, et de déposer auprès du Parlement une annexe énumérant les modifications apportées à la suite des recommandations de la commission royale par le biais du projet de loi C-114, de même que les autres recommandations restées lettre morte, en raison du fait que les élections de 1993 ont interrompu les travaux du comité étudiant les recommandations. J'espère déposer ce document d'ici peu, et j'imagine que c'est votre comité qui en sera saisi.

Ce sera à vous de déterminer ensuite s'il faut ou non modifier la loi. J'ai peut-être ma petite idée là-dessus, mais vous n'êtes peut-être pas du même avis, et c'est de bonne guerre. Je me répéterai en répondant par l'affirmative, et en confirmant que nous attaquerons ce sujet d'ici peu.

Mme Catterall: Quand faudrait-il proposer des amendements éventuels si l'on veut qu'ils soient entérinés avant la prochaine élection?

M. Kingsley: Aux termes de la loi, chaque amendement modifiant la Loi électorale du Canada ou la Loi référendaire - puisque vous êtes censés revoir d'ici peu non seulement les règlements, mais la Loi référendaire elle-même - prévoit que le directeur général des élections a jusqu'à six mois pour les mettre en oeuvre. Autrement dit, une fois l'amendement adopté, j'ai jusqu'à six mois pour le mettre en oeuvre et pour le rendre opérationnel avant l'élection suivante. Dès qu'il y a mise en oeuvre, j'émets un avis dans La Gazette du Canada.

Il est important que vous sachiez qu'en pratique nous avons pu mettre en oeuvre les modifications majeures qu'apportait le projet de loi C-114 à la Loi électorale. Sauf erreur, nous avons pu concrétiser dans les six semaines les modifications fondamentales adoptées, y compris le bulletin spécial et l'informatisation. Nous avons donc publié un avis en ce sens et en avons informé tous les partis afin que les candidats soient au courant.

Il m'est difficile d'imaginer que j'aurais besoin de six mois pour apporter les changements voulus. Si nous avons réussi à concrétiser en six semaines à peine les modifications adoptées dans le projet de loi C-114, c'est que nous avons prouvé notre capacité de planifier, de faire les changements et de nous organiser, de façon qu'il nous faudra quelques mois au plus pour concrétiser des modifications éventuelles, peu importe qu'elles soient majeures ou non.

Mme Catterall: J'ai une question qui ne porte pas nécessairement sur votre document Perspective, mais qui porte sur la publicité massive entourant l'affichage des listes électorales. Si j'ai bien compris, nous n'affichons plus depuis un certain déjà ces listes lors des élections fédérales, n'est-ce pas?

M. Kingsley: C'est exact, car la loi a été modifiée. C'était autrefois prévu par la loi, mais cela ne se fait plus en pratique pour les élections fédérales. Nous avons ainsi pu éviter nombre des problèmes qui surviennent actuellement en Ontario, puisqu'il est toujours prévu dans cette province qu'il faut afficher les listes électorales lors des élections.

Mme Catterall: Pour revenir à votre document Perspective, toute la démarche m'intéresse beaucoup. Vous savez que c'est une première pour nous, mais c'est l'occasion pour le comité et pour le Parlement d'examiner vos priorités et de déterminer si elles coïncident avec celles du Parlement. Cela signifie, à mon sens, qu'il faut effectuer des choix. Quelle sera votre orientation principale au cours des prochaines années, et quels seront les choix les plus importants que vous devrez effectuer?

.1150

M. Kingsley: Comme vous le voyez dans le document que nous vous avons envoyé et qui est un résumé de notre plan stratégique, «Au service de la démocratie», nous avons entrepris plusieurs grands projets dont nous vous avons déjà fait part.

Revoyons-les brièvement. Nous devons d'abord être fin prêts à toute éventualité d'ordre électoral. Pour ce faire, il nous faut effectuer certaines tâches, même si nous savons qu'il ne devrait pas y avoir d'élections générales avant l'automne 1997. Il faut d'abord nous approvisionner afin de pouvoir répondre au délai d'exécution et afin d'assembler tout le matériel nécessaire. Nous ne pouvons pas tout expédier en contenants individuels. Il nous faut approvisionner les directeurs de scrutin des 295 districts. Comme nous avons une trentaine de lots différents à envoyer, il nous faut du temps de préparation.

Nous achetons les fournitures, le papier à bulletin, que nous devons imprimer en utilisant le masque approprié. Vous savez sans doute que les bulletins de vote sont imprimés dans chaque circonscription électorale. Nous nous préparons tout autant à l'éventualité d'un référendum.

Nous préférons parler d'état de préparation en vue d'une éventualité électorale plutôt que de parler d'élections, car nous devons être tout aussi prêts dans le cas d'un référendum éventuel, comme le prévoit la Loi référendaire. Voilà justement pourquoi votre deuxième point à l'ordre du jour porte sur les modifications que je propose à la Loi référendaire. Tout cela, pour nous permettre d'être fin prêts.

Voilà une de nos grandes priorités et voilà ce qui gruge notre budget en grande partie. Il faut acheter des fournitures, du papier à bulletin - on peut y dépenser un demi-million de dollars dans le temps de le dire - des urnes, des isoloirs, ce qui coûte assez cher en fin de compte. Il faut revoir les formulaires, monter des films vidéo pour former les gens, au besoin. Voilà une entreprise qui nous prend plus de notre temps, car nous avons constaté à quel point il est essentiel au Canada d'avoir une méthode normalisée, pour que tous les Canadiens puissent jouir du même produit.

Mais ce que nous considérons comme notre priorité la plus haute, et dont a parlé le président, c'est le registre, et je vous ai dit quel était notre budget.

Afin d'optimiser les investissements que nous avons déjà faits lors de l'informatisation des listes, nous essayons de voir comment il serait possible d'utiliser ces dernières lors du prochain événement électoral. Au cours des élections complémentaires, nous avons lancé un projet pilote et avons réussi à imprimer au préalable les listes, avant même que les scrutateurs commencent leur porte-à-porte. Nous espérons que si la liste est modifiée de façon majeure, nous aurons au moins toutes les adresses, de sorte que chacun des recenseurs saura exactement où se présenter pour faire remplir le nouveau formulaire. Pour ce qui est de la saisie des données, l'inscription des adresses représente déjà 60 p. 100 de la totalité des données.

Le seuil est de 40 p. 100: autrement dit, si 40 p. 100 de votre électorat a déménagé, il n'est plus économique d'imprimer le nom des électeurs de l'ancienne liste, même si l'informatisation reste une solution intéressante. C'est ce que nous appelons le recensement assité par ordinateur. C'est ce que le projet pilote au cours des élections complémentaires nous a permis d'établir, et nous savons maintenant que cela peut être économique. L'important, c'est de nous organiser en ce sens et de faire imprimer au préalable tout le matériel en vue du prochain événement. C'est en tout cas l'un de nos grands projets actuellement.

Au moment voulu, nous allons également faire un examen de fond en comble de la Loi référendaire avec vous. Ni vous ni nous n'avons le choix là-dessus. L'examen doit se faire à la fin de la troisième année d'application. En ce qui concerne l'examen de la Loi électorale, je déposerai sous peu un document auprès du comité. Vous pourriez décider qu'il restera lettre morte, mais cela m'étonnerait. Cela aussi fait partie de nos projets.

Nous élargissons de plus nos sytèmes de planification et de budgétisation. Ainsi, dans le prochain document Perspective, nous espérons pouvoir vous présenter les postes législatifs pour plus d'une année plutôt que pour une seule à la fois, et les crédits administratifs pour trois ans.

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Nous travaillons également à un projet en vertu duquel l'information financière qui est rendue publique sera disponible sur disquette. Ainsi, les Canadiens et les médias auront accès à tout sur format électronique. Je vais vous donner un exemple. Le livre orange sur les dépenses faites pendant l'élection fédérale de 1993, que je ferai parvenir à vos bureaux demain, sera disponible sur format électronique au cours des deux prochaines semaines si quelqu'un en fait la demande.

Nous avons également commencé un programme pour informatiser la cartographie. Ainsi, d'ici le mois de mai 1996, toutes les cartes électorales seront informatisées, ce qui nous permettra de réaliser des économies et d'entreposer les données de façon plus efficace. À l'aide de l'ordinateur approprié, vous pourrez ainsi lire les données concernant la carte électorale de votre propre circonscription. Et ce n'est pas tout, parce que nous pourrons dorénavant étudier les sections de vote de façon plus précise s'il s'avère nécessaire de faire du porte-à-porte, ce qui sera encore probablement le cas pour la prochaine élection nationale. C'est donc un autre grand projet qui est en cours. Ce projet nous aidera également à mieux faire le découpage, y compris celui qui est prévu en vertu du projet de loi C-69, si le projet de loi est adopté.

Je veux juste m'assurer que je n'oublie aucun projet important. Je crois vous avoir donné un bon aperçu - assez bref et concis - de ce que fait Élections Canada.

[Français]

Le président: Monsieur Langlois, avez-vous des questions à poser?

M. Langlois (Bellechasse): Oui. J'espère que vous avez une compréhension large de la pertinence du débat, monsieur le président.

Monsieur Kingsley, est-ce que la loi référendaire actuelle comporte une disposition de révision ou une disposition d'expiration après une période donnée?

M. Kingsley: Il y a une période de révision. Le Parlement s'était mis d'accord pour qu'elle soit révisée après trois ans. Il y a une disposition dans la loi qui dit que la Loi sur les référendums fédéraux sera revue par le comité de la Chambre qui sera chargé de la chose. Ce pourra être un comité du Sénat ou un comité mixte. Le Parlement aura une décision à prendre à partir du 23 juin.

M. Langlois: Vu la question que je vous ai posée, et étant donné que Mme la greffière avait rédigé certaines procédures d'urgence, ce serait sans doute notre Comité qui serait saisi de la révision de la loi référendaire, monsieur le président.

Le président: Sans doute. Nous avons besoin d'une motion de la Chambre pour cela.

M. Langlois: Bien.

M. Kingsley: Vous devrez décider si ça se fera conjointement avec un comité du Sénat ou s'il y aura carrément un comité mixte, parce que la loi offre cette possibilité.

M. Langlois: Il est une autre précision dont j'aurais besoin. La loi référendaire actuelle, au niveau fédéral, permet-elle des référendums sur des questions autres que constitutionnelles?

M. Kingsley: Non. Ce sont des consultations populaires sur des questions constitutionnelles.

M. Langlois: En 1992, par le biais de quel mécanisme a-t-on pu restreindre à notre province la consultation, alors qu'une province a obtenu sa propre consultation? Est-ce qu'il y a une disposition qui permet au gouverneur en conseil de déterminer quelles provinces seront consultées?

M. Kingsley: Oui, il y a une disposition qui permet au gouverneur en conseil de déterminer dans quelles provinces et quels territoires un référendum aura lieu. Ce peut être neuf provinces et deux territoires. Ce peut être un territoire. Ce peut être trois provinces. Ce peut être une province. Tout est possible.

M. Langlois: Vous avez probablement suivi le débat, à l'époque où ça touchait de près votre bureau. Quelle est la raison qui a été invoquée pour une question qui intéresse le Parlement fédéral du Canada, et donc, en principe, tous les Canadiens?

.1200

On inclut dans la loi une disposition qui peut faire en sorte que le référendum ne s'adresse qu'à une seule province. Je dois dire qu'au niveau des principes, j'ai un peu de difficulté à suivre la logique qu'il y a là-dedans.

Pourquoi est-ce que le Parlement fédéral...

M. Kingsley: Je dois admettre...

M. Langlois: Je comprends que c'est une décision politique.

M. Kingsley: J'allais justement vous dire qu'il y a des discussions qui ont lieu à la table des ministres auxquelles je ne participe jamais.

Quelles sont les considérations? Quand on me demande un avis sur la façon d'obtenir telle chose, je le fournis. Quel a été le raisonnement? Je ne participais pas aux discussions qui portaient sur ce sujet.

M. Langlois: D'accord. Merci.

Vous dites que vous étiez toujours un peu en état d'alerte. Je comprends l'alerte appréhendée. Si, cet après-midi, M. Chrétien se rendait chez le gouverneur général et en ressortait avec une dissolution, vous auriez sans doute une montée d'adrénaline. L'alerte serait alors plus immédiate. Seriez-vous en mesure de répondre à une dissolution cet après-midi?

M. Kingsley: Oui, mais permettez-moi d'élaborer, s'il vous plaît.

Oui, nous serions prêts. Il y aurait des choses qu'on serait obligés de faire en icourtichant» les procédures.

La raison pour laquelle on s'y prend à l'avance - j'allais le mentionner tantôt, quand Mme Catterall a soulevé la question - est que les mécanismes d'achat prennent du temps car il faut autant que possible aller en appels d'offres. On veut respecter cela dans la mesure du possible. Mais si jamais on précipitait un déclenchement d'élections, en ce qui nous concerne, on saurait comment couper les coins et on les couperait.

On sait qu'on est suffisamment avancés, parce que j'ai un système où on fait un rapport sur notre état de préparation. Les derniers rapports indiquent que nous sommes prêts à faire face à une élection.

Évidemment, si vous me posez la question dans trois mois, je vous dirai que je suis encore plus prêt que je ne le suis aujourd'hui. Je vous réponds aujourd'hui que je suis plus prêt qu'il y a trois mois. Il y a trois mois, j'aurais trouvé une façon de faire en sorte que nous soyons prêts.

Les gens savent que quand on ne fait pas d'appels d'offres pour les gros contrats, les prix peuvent être plus élevés. On essaie de maximiser l'investissement du dollar du contribuable canadien en suivant des procédures étanches.

M. Langlois: Est-ce que vous êtes au courant, monsieur Kingsley, du projet de loi qui est actuellement devant l'Assemblée nationale du Québec modifiant la façon de procéder au rencensement?

M. Kingsley: Oui, je le suis.

M. Langlois: À votre avis, est-ce une mesure souhaitable qui devrait être envisagée au niveau fédéral?

M. Kingsley: Je vous demanderais d'être plus précis. Je suis au courant du projet de loi. J'ai une bonne appréciation de son contenu, mais de quel aspect du projet de loi parlez-vous?

M. Langlois: Je parle de la méthode de recensement, de pouvoirs.

Comme je le comprends, le projet de loi permet aux recenseurs d'avoir un meilleur contrôle lorsqu'ils se présentent chez les électeurs. Actuellement, une personne s'inscrit. À moins que ce soit un enfant de sept ans, les recenseurs ne refusent pas. Mais dorénavant, ils pourront poser des questions, demander des preuves d'identité et aller plus loin.

Si je comprends bien, on fait en quelque sorte un mélange entre ce qui pourrait être un comité de révision lorsqu'il y a une plainte et ce que la personne doit montrer pour se défendre: Pourquoi ne devrait-elle pas être radiée, etc.? Je pense qu'on essaie de mélanger les deux.

Je reviendrai à cette question quand le débat aura eu lieu à l'Assemblée nationale et qu'on sera en possession des textes, parce que maintenant c'est de la spéculation que je vais vous demander de faire, puisque je suis obligé d'en faire moi-même.

M. Kingsley: Il vaut peut-être mieux que je ne réponde pas.

M. Langlois: Il vaut peut-être mieux que vous ne répondiez pas.

M. Kingsley: Si je vous disais ce que j'en pense, cela pourrait faire dresser les cheveux sur la tête.

M. Langlois: C'est tout dire.

Voici ma dernière question. On a assisté aux élections à la présidence de la République française. Il semble que les processus électoral soit extrêmement lent. On a vu les piles de papier avec lesquelles les électeurs se promènent. Les gens s'échangeaient des bulletins en dehors des bureaux de scrutin.

Ce n'est pas pour faire de l'autogratification, mais je pense qu'on est passablement avancés dans le monde occidental en matière de procédure électorale. À ce niveau-là, le leadership que nous exerçons doit être maintenu et je suis convaincu qu'il sera maintenu. Pour ma part, je n'ai que des félicitations à offrir à votre Bureau pour la façon dont vous et toute votre équipe travaillez.

.1205

C'est probablement ce qu'il y a de plus rassurant dans un système politique comme le nôtre: on peut avoir des chicanes partisanes et c'est pour cela, d'ailleurs, qu'on est en politique, mais au niveau de l'arbitrage et de ceux qui ont à appliquer les règles, il n'y a pas eu de bavure majeure. D'ailleurs, les procédures judiciaires qui ont été intentées ont été très limitées.

Je pense qu'on a un système qui fonction bien, mais il n'est pas tombé du ciel. Je pense que les Canadiens et les Canadiennes doivent comprendre que nous avons développé toute cette culture démocratique grâce à des personnes qui, comme vous et vos prédécesseurs, ont permis qu'elle se réalise au Canada. C'est une chose dont je suis fier, monsieur Kingsley.

M. Kingsley: Je vous en remercie. Je vous en sais gré.

Permettez-moi de dire juste un petit mot pour que tout le monde autour de la table comprenne. Le système français prévoit que les bulletins de vote sont distribués à l'avance aux partis et aux candidats afin de permettre à ces gens-là d'essayer d'obtenir que les gens les appuient et qu'ils puissent entrer au bureau de scrutin avec le bon bulletin de vote déjà en main. Cela fait partie des us et coutumes en France.

Ici, c'est le contrôle du bulletin de vote qui est absolument impératif, comme vous le savez. On a le contrôle en imprimant le même numéro sur les deux talons. Vous devez rapporter le bulletin de vote qui a encore un talon et on vérifie le numéro, tandis que là-bas, les us et coutumes en ce qui a trait aux bulletins de vote sont complètement différents. C'est pour cela qu'il y a des bulletins de vote qui se promènent là-bas. Les contrôles, les Français les exercent différemment.

M. Langlois: Je voudrais vous raconter une petite anecdote, monsieur Kingsley, à propos de ma circonscription, lors des dernières élections. Personne ne s'en est plaint parce que ce n'était pas frauduleux. Tout le monde était de bonne foi. Une de mes scrutatrices, pour accélérer le processus, avec le consentement de tout le monde, avait décidé d'enlever les coupons des talons et d'avoir une pile de bulletins prêts. Il n'y a pas eu de fraude et personne n'a contesté ce qui s'est passé.

M. Kingsley: Il y a des choses que je préfère ne pas entendre.

Des voix: Ah, ah!

Le président: Madame Parrish, s'il vous plaît.

Une voix: Je vais contester votre élection.

Des voix: Ah, ah!

[Traduction]

Mme Parrish: J'aimerais revenir à ce document. Je m'intéresse au document Perspective. À moins que cela ne m'ait échappé, vous ne parlez pas en détail des listes permanentes d'électeurs. C'est un cheval de bataille pour moi, surtout en ce qui concerne ma circonscription.

D'abord, je crois qu'on cherche à avoir des listes permanentes parce que le recensement qui se fait actuellement est truffé d'erreurs. Certains membres de ma famille, que je connais et aime bien, font du recensement, mais je ne suis pas impressionnée par la qualité de leur travail quotidien. À long terme, la liste permanente d'électeurs, où sont ajoutés les noms des jeunes dès qu'ils atteignent l'âge de la majorité...

M. Kingsley: Dix-huit ans.

Mme Parrish: Dix-neuf ans.

M. Kingsley: C'était 19 ans en Colombie-Britannique, mais maintenant c'est 18 ans.

Mme Parrish: Ma fille vote aujourd'hui. Je l'ai appelée pour m'assurer qu'elle aille voter. C'est mon bébé.

D'après vous, quelles économies allons-nous réaliser grâce à cette liste? Comment va-t-elle améliorer l'efficacité du système? Et la question qui nous intéresse tous au plus au point: en quoi va-t-elle rendre la vie plus facile pour les électeurs?

M. Kingsley: Pour ce qui est des économies, nous avons déjà convenu qu'il était dommage que vous n'étiez pas à la réunion portant sur le sujet, parce qu'on a parlé de toutes sortes de choses. Mais je peux vous donner une réponse brève.

Donc, parlons des économies réalisées dans le système fédéral. J'entends par là qu'il n'y aurait aucune participation de la part des provinces ni des municipalités. En fait, nous pourrions espérer au plus rentrer dans nos frais. Mais cela vaut quand même la peine, car nous devons trouver une façon d'éliminer le recensement.

Si quelques provinces - ou toutes - participent, nous allons réaliser des économies. Cela a été démontré dans une des études faites par la commission royale. Dans une période de 10 ans contenant un cycle électoral normal - je ne crois pas que les élections municipales étaient incluses, seulement les élections fédérales et provinciales - on indiquait que les contribuables canadiens pouvaient épargner jusqu'à 150 millions de dollars. Mais si nous parvenions à englober davantage les municipalités, entre autres, les économies que nous réaliserions pourraient s'avérer considérables.

.1210

Mme Parrish: Permettez-moi de vous interrompre un instant. À présent que pour voter aux élections municipales, il faut être citoyen canadien - si tel est bien le cas - est-il possible d'établir une liste permanente des électeurs de notre pays? Ce serait une liste permanente et complète, afin que toutes les élections puissent se tenir selon cette même liste. Ne réaliserait-on pas ainsi des économies considérables?

M. Kingsley: À cette question je répondrai par un «oui» nuancé, bien que j'aie entendu que quelqu'un disait «non». Si j'apporte des réserves à ce «oui», c'est parce que...

Mme Parrish: Parce que vous êtes le patron.

Des voix: Oh, oh!

M. Kingsley: Je revendique cette médaille.

La qualité d'électeur n'est pas la même dans les élections municipales et provinciales: pour ces dernières il faut avoir résidé six mois dans la province; les deux territoires imposent une année de résidence, et nous n'imposons rien; il suffit d'être Canadien.

Si vous déménagez donc de Terre-Neuve à la Colombie-Britannique, c'est dans cette dernière province que vous voterez pour les élections fédérales, parce que c'est votre province de résidence, même si vous n'y êtes arrivé que récemment. Les choses ne se passent pas de la même façon dans les provinces, ce qui d'ailleurs a causé des difficultés lorsque deux référendums se sont tenus simultanément au Canada. Certains Québécois, n'ayant pas encore résidé six mois dans la province, ont été privés de leur droit de vote et ont porté l'affaire devant la Cour suprême, qui les a déboutés de leur appel.

Ce que nous devrions faire, c'est trouver le moyen - c'est facile avec les ordinateurs - de retracer les variables spécifiques à chaque compétence. C'est un peu compliqué...

Mme Parrish: Pourriez-vous délivrer une carte d'électeur qui comporterait plusieurs codes? Elle pourrait mentionner que vous êtes électeur en Ontario, dans la région de Peel, et que vous pouvez également voter aux élections fédérales. N'y a-t-il pas un système de codage, par exemple, un code à barres?

M. Kingsley: On peut toujours songer à utiliser une carte, mais nous essayons de nous en passer tout en arrivant aux mêmes résultats. De toute façon, nous devons envoyer à chaque électeur un avis d'élection lui déclarant son identité et son lieu de résidence. Nous avons l'intention de faire cela et d'arriver à un taux de fiabilité de 80 à 85 p. 100, de sorte que les révisions successives traitent les 15, 20 ou 23 p. 100 pour lesquels les renseignements sont inexacts. Ce sont là des résultats assez satisfaisants, et de la sorte vous n'avez même pas besoin de carte, car nous voudrions éviter d'en imposer encore une autre aux Canadiens.

Mme Parrish: Ce n'est pas une médaille que vous mériteriez pour cela, c'est l'Ordre du Canada.

M. Kingsley: Vous avez une façon irrésistible d'augmenter la mise.

Mme Parrish: J'étais en Ukraine l'an dernier, où tout le monde a besoin d'un passeport pour voter, mais cela ne semblait guère gêner les électeurs; ils semblent y être tout à fait habitués.

Dans le tableau que vous nous brossez, vous évoquez le cas des handicapés et des gens qui ont des difficultés à voter. En Ukraine, on sortait l'urne, qui est portable, et en plein jour tout s'arrêtait. Les gens sortent, et ceux qui ont un passeport valide sont autorisés à voter, puis on rentre avec l'urne fermée à clé.

Je ne vois pas pourquoi on devrait avoir d'objection à une carte d'électeur.

M. Kingsley: C'est là une opinion intéressante, dont je vous remercie. On peut effectivement envisager d'instituer une carte d'électeur, mais cela ajoute au coût. Si toutefois nous trouvons le moyen de nous en passer, nous viendrons vous dire comment nous procéderons; la question est à l'étude.

Il faut toutefois ne pas perdre de vue le cas du Mexique, par exemple, où chacun porte toujours sa carte sur soi, pas seulement pour les élections, mais pour toutes les circonstances. Les us et coutumes varient selon le pays. Il se peut qu'en Ukraine ou ailleurs on ait l'habitude de produire un document en diverses circonstances. Ce n'est pas le cas au Canada, pas même pour les élections. Nous ajoutons même qu'il n'est pas besoin d'apporter la convocation au bureau de scrutin; il suffit de se présenter. Si votre nom figure sur la liste et que vous indiquez votre adresse, vous avez le droit de voter. Il convient donc de ne pas heurter les us et coutumes des Canadiens, afin qu'ils acceptent plus volontiers les changements.

Mme Parrish: C'est une leçon que nous avons apprise cette semaine.

M. Malhi (Bramalea - Gore - Malton): Quel est le genre de services que vous assurez à ceux qui sont handicapés, ou qui sont analphabètes, ou pour lesquels l'anglais ou le français n'est ni la première, ni la seconde langue?

.1215

M. Kingsley: La loi prévoit que tous les bureaux de vote, sans exception - donc pas seulement pour le vote anticipé et les bureaux des directeurs de scrutin - doivent être accessibles aux handicapés, non seulement au plan physique, mais également en matière de services et d'aide, autrement dit, de ce qui est accompli pour eux. C'est ainsi qu'un aveugle peut voter seul à condition qu'on lui explique comment fonctionne le système, avec le normographe fourni pour la circonstance. Ce sont des systèmes qui ont été mis au point en collaboration avec les diverses associations d'handicapés.

Pour informer les autres, nos brochures contenant l'information essentielle sont publiées en 35 langues différentes, soit les 35 langues principales autres que l'anglais et le français. Il est également prévu d'aider et d'accompagner une personne dans le bureau de vote même. Nous utilisons également les services d'entreprises qui se spécialisent dans la presse des langues minoritaires, afin qu'en période électorale, qu'il s'agisse d'un référendum ou d'une élection, nos annonces figurent dans cette presse ethnique, de même que dans les journaux et magazines des autres Canadiens.

Ce sont là, en résumé, les principales mesures que nous avons prises, que nous maintiendrons et que nous perfectionnerons.

M. Malhi: Qu'arrive-t-il pour les langues qui ne figurent pas parmi les 30 ou 35 que vous avez prévues? N'oubliez pas qu'il y a plus de 35 langues.

M. Kingsley: Je crois me souvenir que c'est là le chiffre que nous avons retenu, mais nous avons envisagé cette possibilité, et nous faisons faire la traduction de nos documents dans toute langue pour laquelle il y a plus de quelques milliers de locuteurs. Je ne voudrais pas vous donner l'impression que nous publions tout: nous donnons simplement les renseignements essentiels dans une brochure où le système canadien est expliqué, et nous diffusons ces brochures par le biais des organisations et des contacts que nous avons.

M. Malhi: Vous adressez-vous aussi aux journaux, à la télévision ou à la radio?

M. Kingsley: Nous prenons contact avec les chaînes de télévision et les stations de radio qui sont suivies par ces membres de l'électorat, en leur demandant de publier l'annonce d'une élection fédérale, le jour où elle aura lieu, le jour où commence et finit le recencement. Il en va de même de la révision, afin que ces électeurs puissent entendre le message dans leur langue.

M. Malhi: Qu'advient-il de ceux qui sont trop pauvres pour avoir un moyen de transport le jour de l'élection? Supposons que le candidat d'un parti propose de les amener au bureau de vote? Ils se sentiraient alors une obligation de voter pour ce parti.

M. Kingsley: Non, il est tout à fait acceptable, au Canada, que les candidats proposent un moyen de transport, mais on leur demande de n'exercer aucune pression sur la personnes qui se trouve dans le véhicule. C'est un usage très répandu chez presque tous les candidats. Il existe également, un peu partout au Canada, des transports publics pour les handicapés, avec lesquels il est possible de prendre rendez-vous. Enfin, il existe un bulletin de vote spécial, qu'il est facile d'obtenir, pour ceux qui sont handicapés et qui leur permet de voter jusqu'à trois jours avant le jour des élections.

Toutes ces mesures sont donc en place. Ce qui ne nous empêche pas, pour l'avenir et parce que nous envisageons différentes possibilités, d'examiner, pour certains groupes, le vote électronique, par téléphone ou autrement. Mais je veux m'assurer qu'au début nous procédions avec grande prudence, afin que nous ne perdions pas le contrôle des choses. Nous nous sommes fait une réputation de prudence dans l'introduction de changements, même quand il s'agit d'un changement capital comme l'informatisation des listes, autre mesure de nature à améliorer la situation des catégories que nous venons d'évoquer.

.1220

M. McWhinney (Vancouver Quadra): Y avait-il corrélation, dans les pays étrangers sur lesquels vous vous êtes renseignés, entre les listes permanentes d'électeurs et les obligations réglementaires de vote ou d'inscription? Autrement dit, était-il obligatoire de s'inscrire et de voter? Y avait-il toujours, ou d'une façon générale, un lien avec le système de listes d'électeurs permanentes?

M. Kingsley: C'est là une question intéressante, car je n'ai jamais vu le lien. Je crois que je pourrais obtenir les données, parce que, quand je reviens d'un voyage ou quand nous nous adressons par écrit à un autre pays, nous disposons des données sur ce pays, mais nous n'avons pas établi de lien entre les deux facteurs, ce qui serait pourtant intéressant.

M. McWhinney: Je sais que c'est vrai pour certains des pays que vous avez étudiés, et je me demandais si c'était quasiment la norme. De toute évidence, il est plus facile de conserver une liste permanente d'électeurs s'il y a obligation légale, avec amende pour les citoyens qui ne votent pas ou ne s'inscrivent pas, ou ne font ni l'un ni l'autre. Il serait bon de savoir si le succès d'une liste permanente d'électeurs dépend d'un système de vote ou d'inscription obligatoire; la réponse à cette question nous ouvrirait des perspectives intéressantes.

M. Kingsley: C'est vrai, et cela me rappelle des conversations que j'ai eues avec mes homologues australiens.

M. McWhinney: En effet, c'est à l'Australie que je pensais.

M. Kingsley: Mes homologues semblaient dire que l'obligation de voter, puisqu'elle est assortie d'une pénalité, était respectée, mais que les gens avaient souvent compris qu'il fallait se dérober à l'inscription; ceux qui ne voulaient donc pas voter ne s'inscrivaient pas, et il n'y avait pas moyen de retrouver leur trace. C'était là ce qui semblait être le talon d'Achille de leur système, et c'est en ce sens qu'on ne parvient pas à obliger les gens à voter.

M. McWhinney: L'autre question que je voulais poser porte sur le port de la carte. J'ai été frappé de constater que dans les pays qui ont récemment accédé à la démocratie il y a moins de résistance au port de documents d'identité. Je pense ainsi à l'Europe de l'Est, où il est impossible de se déplacer, voire d'acheter un billet de train, sans document d'identité, mais également au cas de l'Afrique du Sud, avec les lois sur les castes.

Existe-t-il un système non officiel pour vérifier s'il y a fraude, si quelqu'un a voté deux fois, ou s'il y a objection de la part du scrutateur? Ces personnes demandent-elles une vérification sur pièce d'identité autre que la carte?

M. Kingsley: Les organisateurs du scrutin sont autorisés, quand un cas leur paraît suspect, de réclamer un document d'identité et, à défaut, un témoignage sous serment.

M. McWhinney: Il faudrait demander aux gens de faire une déclaration sous serment assortie de pénalités bien précises.

M. Kingsley: Des témoins signent la déclaration sous serment; ce pouvoir existe, et je sais qu'on y a recours, peut-être pas dans chaque bureau de vote, mais je sais qu'il y a des cas où, quand l'affaire paraît suspecte, on procède de la sorte. Ce sont également les représentants de candidats qui peuvent éprouver des soupçons, car ils sont présents sur les lieux et peuvent faire une recommandation aux organisateurs du scrutin.

M. McWhinney: Permettez-moi de vous poser une question théorique. Seriez-vous surpris d'apprendre qu'au Canada, dans le cadre d'élections primaires et de votes en cas de contestation, cette pièce d'identité est souvent réclamée quand on soupçonne une irrégularité, et qu'il arrive que les gens apportent leur passeport? Est-ce que vous voyez un intérêt à cela?

M. Kingsley: Vous voulez dire exiger cela des Canadiens?

M. McWhinney: Non. Vous n'ignorez pas que les partis politiques ne font pas partie, comme aux États-Unis et dans certains pays européens, du processus constitutionnel, que ce ne sont pas des organes constitutionnels. Mais l'usage s'est établi, quand il y a contestation des élections primaires de partis au Canada, de faire une vérification d'identité, et dans certains cas les gens montrent leur passeport ou leur permis de conduire. Cela donne à penser que la notion de document d'identité rencontre moins de résistance que l'on ne pourrait s'y attendre.

.1225

M. Kingsley: Effectivement. Il convient de noter également que la loi va être modifiée par le projet de loi C-114, qui autorise les gens à s'inscrire le jour des élections, mais, à cet effet, ils seront obligés de fournir une preuve satisfaisante de leur identité.

M. McWhinney: Qu'appelez-vous preuve satisfaisante? Un permis de conduire, par exemple?

M. Kingsley: Plusieurs documents sont considérés comme preuve satisfaisante, dont un permis de conduire ou tout document ou série de documents attestant le nom et l'adresse de la personne.

M. McWhinney: Même s'il ne s'agit pas d'un document du gouvernement fédéral?

M. Kingsley: Oui, même un document qui n'est pas de cet ordre, par exemple un permis de conduire ou, en cas de déménagement récent, une facture de Bell Canada portant votre nom et votre nouvelle adresse, qui serait considérée comme preuve, mais à laquelle nous vous demanderions d'adjoindre un autre document portant votre nom et votre signature, à titre de confirmation. Tout document qui contient ces trois indications, comme un permis de conduire, constitue pour nous une preuve suffisante.

M. McWhinney: Vos idées ne vous amènent-elles pas à vous opposer à une proposition comme celle de Mme Parrish?

M. Kingsley: Ce qu'il convient de noter ici, c'est que la loi ne prévoit que la production de pièces d'identité qui existent déjà.

M. McWhinney: Mais elles sont plutôt éparpillées, et non officielles.

M. Kingsley: C'est vrai, alors que Mme Parrish proposait une carte spécifique à des fins électorales. C'est à cela que je réagissais en disant que nous nous efforçons d'éviter cela, si c'est possible.

M. McWhinney: D'après les exemples que vous avez cités, le cas se présente le mieux dans les pays où il existe une carte d'identité, sorte de passeport interne que portent les gens, et vous avez, je crois, cité les pays de l'Europe de l'Est.

M. Kingsley: C'est exact; ce sont les pays soit de l'Europe de l'Est, où le pli était pris, car on demandait, à tout moment, à vérifier vos documents d'identité, de sorte qu'il paraît naturel de les produire le jour d'une élection...soit un pays comme le Mexique, où cette carte électorale est devenue un document très important, car c'était la première fois qu'un document était produit pour toute une section de la population mexicaine. Plus de la moitié d'entre eux ont finalement obtenu une carte de plastique portant leur nom, leur photo et autres détails, ce qui leur a permis de participer à toutes sortes de programmes et d'accéder aux banques.

M. McWhinney: Je vous suis, comme toujours, reconnaissant des réflexions très intéressantes que vous nous livrez.

M. Kingsley: Je vous remercie.

Le président: Il y a encore trois intervenants qui demandent à questionner ce témoin.

Mais comme nous avons un second point à l'ordre du jour, le temps est limité. M. Kingsley demande aux membres du comité de lui faire parvenir leurs commentaires sur le règlement concernant le référendum, qui est le second point de l'ordre du jour, le 16 juin 1995 au plus tard.

Notre premier point porte sur les prévisions financières du directeur général des élections. Jusqu'à présent, nous avons semblé nous intéresser davantage à la conduite des élections qu'aux prévisions financières, et je suis tout à fait disposé à continuer ainsi, à condition que les députés sachent qu'il nous reste peu de temps pour le second point.

Je veux toutefois bien accorder un second tour à ceux qui le demandent, et pour vous, monsieur Bonin, ce sera le premier tour. Je n'y vois pas d'inconvénient, mais je vous signale que le temps nous presse. C'est toutefois faisable, à condition que les députés soient disposés à rester pour traiter du deuxième point. Nous avons prévu autre chose pour mardi prochain, et comme nos commentaires doivent être remis avant le 16 juin, nous n'avons pas trop de temps devant nous pour terminer nos travaux. Il nous faut donc traiter aujourd'hui du deuxième point, et je demande donc instamment aux députés de poser leurs questions en conséquence.

M. Bonin (Nickel Belt): Je préfère alors laisser passer mon tour, car ma question portait sur ce dont nous avons discuté, mais non sur ce qui figure à votre ordre du jour.

Le président: M. Kingsley, de toute façon, voudra peut-être bien rester pour la seconde partie, et nous pourrions peut-être lui poser ces questions après, si vous y consentez. Nous pouvons revenir là-dessus après avoir traité la question du règlement.

[Français]

M. Langlois: Je veux poser une seule question. Je veux profiter de la présence du sénateur Prud'homme dans nos tribunes pour vous demander si vous aviez réintroduit une garantie constitutionnelle de 25 p. 100 pour le Québec dans le projet de loi C-69.

Le président: À l'ordre.

Des voix: Ah, ah!

M. Langlois: Alors, je vais m'adresser à M. Kingsley et à M. Girard. Je vais éliminer deux questions sur trois pour aller plus vite.

.1230

Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, j'ai été très satisfait de ce processus électoral-là, mais je suis moins satisfait sur un autre point, et j'envie le régime français en ce qui a trait à la contestation des élections. On ne parlera pas des contestations en cours. Je vais vous donner un exemple, au Québec, où une loi assez ancienne régit les élections contestées. En 1966, un candidat était élu dans la circonscription de Saguenay et son élection a été contestée. Le jugement final qui le déclara inhabile à siéger, annulant donc son élection, fut rendu en 1971. Or, il a été défait en 1970 et il a donc pu siéger pendant toute la législature. Je trouve donc que le contentieux électoral, surtout au niveau du Québec, pourrait commencer au niveau fédéral. Vous pouvez m'éclairer, mais il y a quelque chose d'absolument inapproprié et il est préférable de gagner une élection de manière discutable que de penser faire rétablir rapidement les choses par les tribunaux. Je ne sais pas s'il serait envisageable d'avoir une juridiction spécialisée qui se saisisse rapidement d'un cas, avec une possibilité d'appel sur des questions de droit très spécifiques, comme le Conseil d'État en France, afin que, dans un délai de six à neuf mois, on ait une décision sur une élection partielle, si besoin en était.

M. Kingsley: Je pense que vous soulevez un point valable. La loi fédérale concernant les élections contestées date de la Confédération. C'est du bel anglais, mais c'est désuet; c'est du beau français, mais c'est désuet. La dernière fois qu'il y a eu contestation en vertu de cette loi, ce fut après les élections générales de 1988, dans la circonscription de York North. Les choses ont traîné devant les tribunaux et ont pris beaucoup de temps, et on a finalement déterminé qu'une élection partielle devait avoir lieu. Celle-ci a eu lieu en 1990, deux ans plus tard. Je m'en souviens parce que j'avais été récemment nommé et que c'était la première élection partielle que j'avais à gérer, je crois. J'avais été surpris d'entendre que ça avait pris tout ce temps-là. Je dis cela sans vouloir blâmer quiconque dans ce processus, parce que quand on fait certaines choses légalement, on introduit des délais.

Je pense aussi que le point que vous soulevez mérite d'être examiné davantage, surtout pour les élections contestées, afin qu'on ait une décision plus rapide. Il est aussi important que les gens soient représentés par la personne qu'ils veulent vraiment pour les représenter, sans qu'il y ait de fraude de rattachée à l'événement.

Le président: Madame Caterall, vous avez une autre question?

[Traduction]

Mme Catterall: Je n'ai plus de question, car nous devons discuter de l'autre sujet à l'ordre du jour.

Le président: J'aimerais donc passer à la question suivante à l'ordre du jour, qui concerne les notes d'information qui ont été distribuées aux députés au sujet des règlements proposés en vertu de la Loi référendaire.

[Français]

M. Girard est ici. C'est le directeur des Services juridiques du Bureau du directeur général des élections. J'ai demandé qu'il soit ici aujourd'hui pour qu'il puisse nous aider avec ces réglementations. Monsieur Girard, voulez-vous dire quelque chose ou êtes-vous prêt à répondre aux questions?

M. Jacques Girard (directeur, Services juridiques, Bureau du directeur général des élections): J'espère être prêt. Malheureusement, je dois dire que le service de recherche ne m'ayant transmis que ce matin la copie du document que vous avez reçu, je n'ai pas eu le temps de le lire. Je ne suis donc peut-être pas en mesure de répondre très précisément aux questions que vous allez soulever, mais je vais faire de mon mieux. J'ai aussi offert au personnel de nous rencontrer aujourd'hui ou demain pour qu'il puisse mieux vous informer des difficultés, s'il y en a, mais je suis tout de même à votre disposition pour répondre à vos questions.

M. Kingsley: Monsieur le président, je ne sais pas si vous avez eu l'occasion d'expliquer le contexte de ces modifications-là.

Le président: Pendant la dernière réunion du Comité, j'ai dit quelque chose concernant ce sujet, et vous avez répondu à une question sur ce sujet pendant la période de questions d'aujourd'hui.

[Traduction]

Les députés savent qu'il s'agit d'une adaptation de la loi, ce que vous avez pu lire dans la note d'information préparée par M. Robertson.

.1235

À la page 10 de la note d'information de M. Robertson, on peut lire: l'article 134 de la Loi électorale du Canada prévoit le cas où quelqu'un se présente pour voter après que quelqu'un d'autre a apparemment voté sous son nom. Le greffier du scrutin doit noter «les objections présentées au nom de n'importe quel candidat». Le projet de règlement, c'est l'adaptation suivante: «Les objections présentées par l'un des représentants de tout comité référendaire enregistré ou par l'un des témoins, et le nom de cette personne.» Ne devrait-on pas indiquer aussi le nom du comité référendaire enregistré ou du témoin? En d'autres mots, ce devrait être le nom de cette personne et celui du comité référendaire enregistré ou du témoin, selon le cas. Quelque chose comme ça... Une petite question technique?

[Français]

M. Girard: Je pense que je serais d'accord avec vous, sous réserve d'une vérification plus concrète des textes, qu'il faudrait effectivement prévoir, comme on le fait pour une élection, que le mandat de la personne reste sur les listes. Cela peut être une petite omission.

[Traduction]

Le président: Plutôt que de passer à travers ce document et de poser certaines des questions soulevées par M. Robertson, serait-il utile que nous vous en donnions une copie, monsieur Girard, pour que vous puissiez nous envoyer une réponse par écrit? Le comité se réunit mardi prochain.

Il se peut que vous ayez une explication à fournir en réponse à certaines des questions soulevées par M. Robertson - qui, à mon avis, se justifient - ou que vous soyez d'accord avec ses observations. Si personne n'a d'objection, vous ou M. Kingsley pourriez nous envoyer une réponse par écrit, et le comité pourrait en prendre connaissance. Si les membres du comité ont d'autres objections par la suite, nous pourrions soit retransmettre nos commentaires, comme nous en avons le droit, soit tout simplement accepter votre réponse si nous la jugeons satisfaisante. Ce pourrait être la façon la plus simple de procéder, mais les membres du comité peuvent avoir d'autres questions à poser, et je ne veux pas les empêcher de le faire.

M. McWhinney: Je pense que nous devrions avoir une réponse par écrit. Cela serait extrêmement utile.

[Français]

M. Girard: C'est ce qui avait été fait en 1992 et c'est ce que nous nous proposons de faire également. Si vous souhaitez qu'on vous envoie quelque chose demain, cela nous donnera la fin de semaine, aux membres du Comité comme aux membres du personnel, pour revoir cela, de façon que mardi...

Le président: Lundi après-midi suffira, et nous aurons le temps de le lire avant la réunion de mardi.

M. Girard: Parfait!

Le président: Est-ce que tout le monde est d'accord? Y-a-t-il des questions de la part des autres députés? Oui, madame.

[Traduction]

Mme Parrish: Monsieur le président, on parle ici de listes électorales révisées produites en format lisible par ordinateur. Ce que nous avons pu constater, c'est que nous les envoyons sous forme de longs rubans et que le parti doit ensuite les transférer sur disquettes pour nous. Est-ce que l'on se propose de les présenter sous un format qui soit plus accessible dans les bureaux des candidats?

M. Girard: De fait, au cours d'une élection, nous fournissons aux candidats des copies sur disquettes et sur papier. Après l'élection, lorsque nous recevons une demande, la loi dispose que nous nous fassions payer pour les disquettes, alors que les partis possèdent toutes les listes du pays sur CD-ROM. Ainsi, la plupart des députés nous ont dit: eh bien, je m'adresse au parti et il me prépare une disquette. C'est la raison pour laquelle les choses sont ainsi.

Mme Parrish: J'ai constaté que personne ne voulait extraire une partie de l'information qui se trouve sur le CD-ROM. Personne ne veut courir le risque d'endommager son propre ordinateur ni d'y introduire un virus, et par conséquent il faut passer par l'intermédiaire du parti. On ne peut pas s'adresser aux grandes compagnies.

M. Girard: Nous n'étions pas au courant de cela, mais c'est quelque chose dont nous pouvons nous occuper.

Mme Parrish: Par exemple, IBM n'a pas voulu y toucher pour rien au monde. Ils avaient peur qu'il n'y ait un virus ou quelque chose d'autre qui puisse endommager leurs grosses machines.

M. Kingsley: C'est la raison pour laquelle nous mettons des disquettes à la disposition des candidats. Je suppose que, même s'il s'agit d'une somme modeste, les candidats préfèrent en faire l'économie.

Mme Parrish: Je n'étais pas au courant. Suis-je bête! La prochaine fois, je paierai.

M. Kingsley: Et vous aurez la disquette.

Mme Parrish: C'est parfait. Merci.

Le président: Les membres du comité ont-ils d'autres questions à poser sur ce sujet? Je crois que, dans ce cas, nous avons terminé l'examen des points à l'ordre du jour. Est-ce que l'une ou l'autre des deux personnes qui ont attendu pour poser des questions au directeur général des élections veut le faire maintenant?

Je tiens à remercier tous les députés d'avoir assisté à la réunion. Quant à vous, monsieur Kingsley, selon la coutume, merci d'avoir pris le temps de venir comparaître devant nous avec vos collègues. Nous sommes très heureux que vous ayez pu être des nôtres aujourd'hui.

.1240

Lors de notre réunion de mardi, nous continuerons les travaux que nous avons entamés mardi dernier, et nous ferons la revue de divers règlements. J'espère que les députés suggéreront des améliorations.

La séance est levée.

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