Monsieur le Président, je m'intéresse énormément au débat de ce soir, et j'en tire un peu de fierté. Le projet de loi me tient à coeur, car j'étais responsable du dossier des chemins de fer au moment de l'Examen des services de transport ferroviaire des marchandises. J'ai pu annoncer l'intention du gouvernement de présenter ce projet de loi.
Nous en sommes à l'étape de la troisième lecture. C'est une bonne chose non seulement pour la Chambre, mais aussi pour le pays, car tous les partis ont indiqué qu'ils appuient la mesure législative. De nombreuses raisons font qu'il s'agit d'un excellent projet de loi.
J'expliquerai d'abord pourquoi nous avons présenté le projet de loi et pourquoi celui-ci est essentiel. J'aimerais faire un petit retour en arrière, afin d'expliquer à la Chambre et aux Canadiens ce qui était vraiment à l'origine du problème.
Lorsqu'on m'a confié le dossier des chemins de fer, les wagons du CN dans l'Ouest étaient livrés à temps dans environ 52 % à 55 % des cas pour les envois de céréales. Voilà une bien piètre performance. Comment les agriculteurs de l'Ouest pouvaient-ils envoyer leurs produits de la ferme au port afin de les exporter sur les marchés internationaux s'ils ne pouvaient compter sur l'arrivée ponctuelle des wagons que dans 55 % des cas?
Comme l'a mentionné mon collègue de Wascana, le CN s'est considérablement amélioré au cours de l'examen. Une nouvelle équipe de gestion s'est jointe au CN et s'est affairée à apporter des améliorations, ce qui a porté ses fruits. La société est passée de 55 % à 90 % en une période d'un an, un an et demi, et ce, seulement parce les yeux étaient rivés sur elle et qu'elle a consacré toute son attention à l'amélioration de ses services, qui faisaient l'objet d'un examen.
De nombreux expéditeurs nous ont demandé de poursuivre l'examen et de maintenir les projecteurs braqués sur les sociétés et les chemins de fer pour qu'ils maintiennent un niveau de service élevé. Nous les avons invités à conclure des accords de service avec tous les expéditeurs. Ils se sont engagés à le faire et ont signé autant d'accords de service de transport que possible. En fait, je sais pertinemment que certaines industries — peut-être celle du charbon — ont des accords depuis plus de 10 ans; c'est donc que des accords à long terme ont été signés à l'époque.
Ce projet de loi ne traite pas vraiment des accords eux-mêmes. C'est intentionnel, car ils sont tellement diversifiés. Comme les besoins des expéditeurs varient d'une industrie à l'autre, les accords de services varieront aussi d'un expéditeur à l'autre, tout comme le type de wagons, qui ne sera pas le même selon que l'on veuille transporter du charbon, de la potasse ou du bois, par exemple. Mais au fond, tous ces gens veulent avoir un bon service. Or, ce projet de loi leur laisserait beaucoup de souplesse, car les accords pourraient comprendre toute sorte de pénalités. Nous ne connaissons pas la teneur des accords, et ce n'est pas nécessaire. Toutefois, lorsque deux parties en viennent à un accord, il faut qu'un mécanisme soit en place pour que certaines choses se produisent.
Tout d'abord, il faut faire en sorte que l'accord conclu soit respecté. C'est ce que vise le projet de loi. Il prévoit des pénalités pour l'expéditeur ou le transporteur ferroviaire qui enfreindra les dispositions de l'accord.
Ensuite, il faut pouvoir faire quelque chose au cas où il serait impossible pour les parties de s'entendre. Si les négociations entre l'expéditeur et le chemin de fer sont menées au meilleur de leur capacité, qu'il s'agisse de produits forestiers, d'oeufs, de charbon ou de potasse, peu importe le produit, s'ils ne peuvent en venir à une entente, ils sont vraiment coincés. La mesure est un instrument qui leur permet d'obtenir un règlement arbitral définitif qui leur précise clairement ce qui est juste dans une entente. C'est ce que réclamaient les représentants du secteur ferroviaire et les expéditeurs.
Au lieu de se sentir pris au piège et d'affirmer que la volonté de négocier fait défaut chez leurs vis-à-vis, ce projet de loi leur assure que, s'ils ne peuvent arriver à s'entendre, il y aura un règlement arbitral. Il ne précise pas qui va gagner ou perdre à la suite de cet arbitrage; il exige simplement qu'il ait lieu. Et grâce à cela, le système dans son ensemble se trouvera amélioré. Si l'on examine attentivement les données du rapport d'examen des services ferroviaires, comme l'ont fait le comité et le gouvernement, on constate que les deux parties avaient beaucoup de choses à se reprocher.
Ne choisissons pas de gagnants ou de perdants. Réglons simplement l'affaire dans le meilleur intérêt du pays. Voilà la raison d'être de la Chambre. Sa mission consiste à élaborer une mesure législative qui permettra au pays de progresser. Peu nous importe qui gagne ou perd. Nous voulons que le système soit juste pour que les deux parties sortent gagnantes. Le Canada sort vainqueur parce que nous acheminons la marchandise jusqu'aux ports, et ensuite, aux marchés internationaux, pour le plus grand bénéfice des compagnies de chemin de fer, des expéditeurs et de tout le pays. Voilà pourquoi il faut appuyer le projet de loi.
Le commerce international est vraiment la clé de notre avenir. Nous sortons tout juste d'une grave récession économique qui a ébranlé le monde entier. Elle a ébranlé l'Amérique du Nord. Elle a ébranlé les États-Unis, notre principal partenaire commercial. L'an dernier, nos échanges se sont chiffrés à 528 milliards de dollars. Le commerce tripartite entre le Mexique, le Canada et les États-Unis s'élève à près d'un billion de dollars par année. Lorsqu'on commence à compter en billions, cela représente beaucoup d'argent.
L'ALENA a permis la création de près de 40 millions d'emplois chez nous. J'adore la carte affichée à l'ambassade du Canada aux États-Unis. On peut y voir, pour chaque État, les revenus des échanges avec le Canada et le nombre d'emplois que ces échanges ont créés. Il s'agit d'une information très efficace que nos cousins américains doivent comprendre plus directement. Tout comme les Canadiens d'ailleurs. Les revenus liés au commerce et le nombre d'emplois créés dans chaque province figurent aussi sur cette carte. Je la recommande à tout le monde.
Pourquoi est-ce que je mentionne cela? Parce qu'un emploi sur cinq au Canada est créé grâce au commerce, grâce aux exportations. Soixante pour cent de notre PIB vient du commerce. Est-il en croissance ou en décroissance? Les dernières statistiques que j'ai vues indiquent une augmentation du commerce international de 73 % entre aujourd'hui et 2025. C'est un chiffre impressionnant. Les pays qui vont tirer profit de cette croissance du commerce vont en sortir gagnants. J'aime le fait que nous sommes bien placés pour en tirer profit. Nous sommes sur le point de signer un accord de libre-échange avec l'Europe et j'espère que ce sera fructueux. Ce marché compte 500 millions d'habitants et il a un PIB de 17 billions de dollars et nous pouvons en profiter. D'autre part, si l'on se tourne vers la côte Ouest, avec le Partenariat transpacifique, on parle de 110 millions d'habitants et d'un PIB de 17,6 billions de dollars.
Il y a là d'immenses possibilités, pas seulement du côté de la Chine et de l'Inde, mais aussi de nos partenaires transpacifiques. Tout dépendra de ce que nous avons à offrir à ces marchés. Nous travaillons aussi à un accord commercial bilatéral avec le Japon. Nous nous efforçons d'augmenter notre commerce avec la Chine, qui est un joueur incontournable, en particulier quand il s'agit des chemins de fer et d'acheminer nos produits vers la côte Ouest.
Que veulent-ils? Ils veulent deux choses, la sécurité alimentaire et la sécurité énergétique. Le Canada peut offrir les deux et les chemins de fer ont un grand rôle à jouer à cet égard. Avant que les compagnies de chemin de fer et les expéditeurs commencent à s'invectiver, pourquoi ne se tournent-ils pas plutôt vers les occasions qui se présentent à nous? Pourquoi ne pas nous tourner vers les occasions qui s'offrent au Canada? Jamais l'occasion n'a-t-elle été si belle de créer une situation gagnante pour les industries canadiennes. Il peut s'agir de produits manufacturés et transportés aller-retour par rail, comme on le fait avec les États-Unis pour les automobiles. Nous pouvons même fournir aux États-Unis des produits qui viennent de Chine par le port de Prince Rupert en deux jours et demi de moins que par tout autre port de la côte Ouest. Le transport prend deux jours et demi de moins parce que la marchandise est débarquée à Prince Rupert et acheminée directement à Chicago pour approvisionner la plus grande économie du monde, celle des États-Unis. Tout cela grâce à nos chemins de fer et à notre réseau de transport.
Certains ont critiqué ce projet de loi, se demandant pourquoi nous n'avons pas inclus les envois vers les États-Unis dans cet accord sur les services ferroviaires. Je peux dire que les États-Unis examinent de très près ce projet de loi. Les Américains se demandent comment il fonctionne, de quel genre d'appui il bénéficie, et s'il sera vraiment efficace. Je crois qu'il sera efficace. Les Américains veulent vraiment l'examiner, et peut-être même s'en inspirer dans leur propre pays. Ainsi, on créera un système uniformisé entre le Canada et les États-Unis, qui est et demeurera toujours notre principal partenaire commercial.
C'est un excellent projet de loi pour bien des raisons. C'est un projet de loi fabuleux pour les marchés internationaux.
Les réseaux ferroviaires transportent énormément de marchandises: environ 240 million de tonnes. Au pays, environ 70 % du transport de surface des marchandises se fait par train. Cela comprend les marchandises en vrac comme les grains, le minerai, les produits forestiers et les produits énergétiques.
Hier soir, j'ai parlé à un représentant du Canadien national qui m'a dit qu'un nombre incroyable de wagons sont commandés pour approvisionner les marchés en énergie. Cela découle de la résistance aux oléoducs. Que les oléoducs soient construits ou non, il n'y a aucun doute que le réseau ferroviaire contribuera de façon importante au transport des produits énergétiques vers les régions côtières et au-delà.
Il est très important que ce projet de loi appuie non seulement le secteur agricole, qui fournit les grains et les céréales, mais aussi le secteur de l'énergie, le secteur minier, l'industrie de la potasse, etc. C'est un excellent projet de loi qui contribuerait grandement à égaliser les chances.
Mon collègue a dit que le CN était autrefois l'un des pires quant au service fourni. J'aurais tendance à être d'accord avec lui. C'est peut-être le contraire aujourd'hui, et le CP a plus de difficulté à assurer le service que le CN. C'est assez difficile à contester, et c'est sans doute vrai.
Nous avons entendu les arguments du président du CN. Il se demande pourquoi nous présentons ce projet de loi. Il craint que cela n'entrave les négociations et amène les parties en présence à quitter la table des négociations. Mais c'est tout le contraire qui va se produire. Le projet de loi va amener les parties à la table de négociation, car si elles n'en viennent pas à une entente de service, elles devront très rapidement s'en remettre à l'arbitrage prévu dans la loi, qui imposera une solution. Voilà ce que la loi est censée faire. C'est pourquoi elle sera si efficace.
Est-ce qu'elle sera très fréquemment invoquée? Sans doute pas. Du moins, je l'espère. Je souhaite même qu'elle ne soit jamais invoquée. Si la loi s'applique, les petits jeux seront terminés. Il y aura un règlement par voie arbitrale. À défaut, quelqu'un d'autre devra intervenir. Cela se fera très vite, et ne coûtera pas très cher. Dès la première contestation, un précédent aura été créé. La suite des choses en découlera et les ententes de service devront s'y conformer.
Je ne pense pas qu'on ait à recourir massivement à cette mesure législative, mais elle est indispensable, parce que le gestionnaire du CN ou du CP ne sera peut-être pas toujours un interlocuteur aimable et disposé à faire ce qu'il faut. Quand nous adoptons une loi, c'est pour longtemps, et c'est dans l'intérêt du pays. Cela n'a rien à voir avec la personnalité des parties en présence.
Je me souviens des représentants de l'industrie forestière. Nous étions à quelques heures de la conclusion d'un accord avec le secteur forestier canadien. Nous avons invité ses représentants à la table de négociation. Nous avons tout fait pour les convaincre. Nous n'y sommes pas parvenus. Maintenant, ce serait différent, car nous avons une mesure législative qui prévoit l'arbitrage. Je me garderai bien de dire qui va gagner et qui va perdre en arbitrage, car je n'en sais rien, mais je sais qu'il y aura une sentence arbitrale exécutoire.
Il est très important que les wagons arrivent en gare au moment opportun pour que le produit se rende du lieu de production au marché. C'est la première chose à faire pour créer l'économie, les emplois et la prospérité dont notre pays a besoin pour progresser.
On a beaucoup parlé des pénalités, qui seront encaissées par le gouvernement. En effet, nous ne voulons pas que les gagnants ou les perdants se servent de la loi pour en faire autre chose qu'un outil qui garantit que des services seront fournis au bon moment.
Les ententes de service pourraient prévoir toutes sortes de pénalités, si les parties sont d'accord. Si l'entente n'est pas réalisée, les pénalités prévues pourraient devenir un moyen de pression pour exiger l'application de l'entente de service.
C'est un grand jour pour moi aujourd'hui. Le processus a été long et a comporté des consultations considérables.
J'ai des extraits de ce qu'ont dit les représentants des industries agricole, forestière, minière, du charbon et de la potasse. Ils affirment que cette mesure législative contribue grandement à changer la dynamique entre les sociétés ferroviaires et les expéditeurs. Ils sentent que le gouvernement les appuiera dans un processus de règlement par arbitrage qui ne dressera pas les parties l'une contre l'autre. Cette mesure a vraiment pour but de faire en sorte qu'une entente convenant aux deux parties puisse être conclue et que le service soit offert comme il se doit. On n'insistera jamais assez sur l'importance primordiale d'un service prévisible, sans lequel les expéditeurs ne pourront pas prospérer et acheminer leurs produits jusqu'au marché.
Je félicite le Comité permanent des transports, qui a travaillé fort pendant des années pour obtenir ce résultat. Le ministre des Transports est intervenu et n'a pas ménagé les efforts pour que nous arrivions où nous en sommes ce soir.
Ce soir est un grand soir. Pensons-y. À quand remonte la dernière fois où tout le monde à la Chambre s'est prononcé en faveur d'une mesure législative de fond comme celle-ci? J'ai beau reculer très loin dans le temps, je n'en vois pas. Je sais que des projets de loi sans importance fondamentale ont obtenu un appui unanime, mais pas de mesures législatives de l'importance de celle-ci, qui modifie le paradigme et change la dynamique. C'est probablement la mesure législative concernant les relations entre expéditeurs et sociétés de chemin de fer la plus importante depuis au moins 50 ans. C'est donc un grand soir. C'est une mesure législative importante.
Je suis fier d'exprimer mon appui à ce projet de loi et j'ai hâte que nous passions au vote, qui aura lieu demain, je l'espère. Nous enverrons ensuite le projet de loi au Sénat et il recevra la sanction royale très rapidement.