Je vous remercie, monsieur le président.
J'ai été sous‑ministre sous des gouvernements conservateurs et libéraux durant 15 ans aux ministères de la Justice, de la Santé et des Affaires étrangères. Depuis ma retraite de la fonction publique, j'ai été président de la Fondation Pierre-Elliott-Trudeau, ainsi que conseiller politique et membre de divers conseils d'administration.
Je tiens à parler d'abord de ma présence, à titre de président de la Fondation, à une réunion avec des fonctionnaires en avril 2016 dans ce qui était l'édifice Langevin. J'ai entre autres choisi de travailler à la Fondation parce que je crois qu'il est dans l'intérêt public de renforcer les échanges entre les chercheurs universitaires et les décideurs. Les décideurs devraient connaître la recherche universitaire, et comme sous‑ministre, j'ai souvent pris contact avec des universitaires en plus de les rencontrer. Il est tout aussi important pour eux, d'ailleurs, d'être exposés aux réalités pratiques de la prise de décisions politiques.
À la Fondation, l'un de nos membres et mentors avait entamé un projet au début de 2016 pour établir s'il y avait des avantages économiques à la diversité. Je savais que la diversité et le pluralisme étaient des priorités du gouvernement à l'époque et j'ai indiqué au sous‑secrétaire au Bureau du Conseil privé qu'une réunion avec des fonctionnaires donnerait l'occasion de débattre de divers points de vue sur cet enjeu.
C'est la genèse de la réunion sur laquelle il y a eu des reportages dans les médias. Le Bureau du Conseil privé a invité les fonctionnaires pertinents. Les journalistes ont insisté sur le fait que la réunion a eu lieu à l'édifice Langevin. Ils y voyaient un lieu de rencontre inhabituel, parce que le Cabinet du premier ministre y est situé.
Or, non seulement le Cabinet du premier ministre s'y trouve, mais le Bureau du Conseil privé, qui est un organe de la fonction publique, s'y trouve aussi. C'est un édifice central au centre‑ville où se réunissent les fonctionnaires et d'autres personnes. Il n'est pas inhabituel d'y inviter des gens qui ne font pas partie du gouvernement à des réunions. Ainsi, il n'y avait rien d'inhabituel du tout à propos de cette réunion d'avril 2016 dans l'édifice Langevin.
Je veux maintenant parler de deux points soulevés en lien avec l'enjeu du don reçu en 2016. Il a été allégué que l'entreprise au nom de laquelle un reçu fiscal a été émis, Millennium Golden Eagle (Canada) Inc., est une société-écran. J'ai eu l'occasion d'examiner le Registre des entreprises du gouvernement du Québec, et il appert que cette entreprise est en activité dans le milieu des hôtels, des auberges et de l'investissement immobilier. Je peux vous fournir ce document.
Par ailleurs, je voulais vous donner plus de contexte pour appuyer le point de vue exprimé par Alexandre Trudeau au comité permanent de l'accès à l'information, par Ted Johnson et moi‑même. Ce don doit être évalué sous l'angle des relations que nous avions avec la Chine à cette époque, qui étaient bien différentes des relations très négatives que nous avons de nos jours. Au milieu des années 2010, les universités, les entreprises et les gouvernements au Canada estimaient tous qu'il était dans leur intérêt de renforcer leurs liens avec la Chine. Je pense que le premier ministre Harper a bien saisi l'esprit qui régnait en 2013, lorsqu'il a accueilli deux pandas chinois à Toronto:
Durant les prochaines années, ces pandas nous aideront à en apprendre plus les uns sur les autres, tout en nous rappelant que l'approfondissement de nos relations se fonde sur le respect mutuel et une collaboration croissante.
C'était une autre époque.
Certains d'entre vous se sont dits très préoccupés qu'un des deux donateurs soit le président de la China Cultural Industry Association, en raison de ses liens avec le gouvernement de la Chine. C'était bien compris à l'époque où le don a été négocié. Lorsque cette association a été fondée, en 2013, l'ambassadeur du Canada en Chine a écrit à son président et à ses membres pour les féliciter. J'ai des copies de cette lettre, que je peux vous remettre, mais j'aimerais d'abord en citer trois passages brefs:
Il est heureux qu'à bien des égards, vos objectifs et vos efforts concordent avec les nôtres, à l'ambassade du Canada en Chine. En fait, l'année dernière, lors de la visite du premier ministre Harper, le Canada et la Chine ont convenu d'organiser une série d'activités culturelles dans les deux pays en 2013 et 2014, dans le but de renforcer notre engagement bilatéral.
La deuxième citation va comme suit:
J'aimerais souligner notre profonde gratitude pour le généreux don de votre association à la Faculté de médecine de l'Université de Toronto par la création du Fonds Bethune.
Enfin:
Compte tenu de votre engagement ferme envers la coopération et les échanges culturels, votre association fera assurément office de chef de file d'une collaboration culturelle accrue entre le Canada et la Chine. Nous nous réjouissons de travailler en étroite collaboration avec votre association au cours des mois et des années à venir.
Nous sommes persuadés que notre représentant gouvernemental en Chine avait les intérêts du Canada à coeur lorsqu'il a rédigé cette lettre. La China Cultural Industry Association était perçue comme un collaborateur positif par le gouvernement Harper. C'était bel et bien une autre époque.
Nous croyons que dans ce contexte de réchauffement des relations, les donateurs étaient mus par un sincère désir de rendre hommage à l'héritage de Pierre Elliott Trudeau et par leur volonté d'appuyer le programme de conférences politiques de la Fondation.
Les conférences qui ont eu lieu sur les répercussions de la montée de la Chine rejoignaient nos thèmes centraux, soit le Canada, le monde et les droits de la personne. Les donateurs n'ont pas eu leur mot à dire sur le contenu de ces conférences, et c'était une condition importante pour la Fondation.
Nous n'avons jamais pensé qu'un don de 200 000 $ pour des conférences influencerait ou pouvait influencer un gouvernement. À aucun moment les donateurs n'ont demandé à la Fondation de les mettre en contact avec des représentants du gouvernement ou quoi que ce soit d'autre. La Fondation n'a jamais coordonné ses activités avec des élus, ni avant ni après les élections de 2015.
Merci.