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HUMA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 067 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 19 octobre 2017

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    Bon après-midi à tous. Bienvenue. C'est un plaisir d'être ici.
    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion que le Comité a adoptée le jeudi 4 mai 2017, le Comité poursuit son étude de la promotion de l'intégration et de la qualité de vie des aînés canadiens. Nous accueillons aujourd'hui le premier de trois groupes de témoins que nous avons invités pour discuter des thèmes suivants: l'intégration, les déterminants sociaux de la santé et le bien-être.
    Nous avons un extraordinaire groupe de témoins aujourd'hui. Premièrement, nous accueillons, par vidéoconférence à partir de Vancouver, en Colombie-Britannique, Dre Margaret M. Cottle. Témoignant également à titre personnel, nous avons Mme Alison Phinney, qui est professeure à la Faculté des sciences infirmières de l'Université de la Colombie-Britannique, qui témoigne aussi par vidéoconférence, mais à partir de Winnipeg, au Manitoba. En personne, nous accueillons Mme Pat Armstrong, du Centre canadien de politiques alternatives; M. Raza Mirza, de l'Initiative nationale pour le soin des personnes âgées; M. Danis Prud'homme et Mme Caroline Bouchard, du Réseau FADOQ.
    Bienvenue. Nous allons commencer par les déclarations préliminaires, qui seront d'une durée de sept minutes, tout au plus. Je vous informerai lorsqu'il vous restera une minute pour vous permettre de conclure.
    Nous commençons avec Margaret, de la Colombie-Britannique. Les sept prochaines minutes sont à vous.
    Je m'appelle Margaret Cottle. Je suis médecin en soins palliatifs et professeure clinicienne adjointe à la Faculté de médecine de l'Université de la Colombie-Britannique. Pendant près de 30 ans, j'ai consacré ma pratique exclusivement aux soins des patients atteints de maladies graves et de leurs proches, en particulier...
    Désolé de vous interrompre. Nous entendons un grésillement très fort de notre côté. Les gens ont de la difficulté à vous entendre.
    Je propose que nous passions au témoin suivant pendant qu'on cherche une solution. Espérons que nous pourrons régler le problème; ensuite, nous vous reviendrons. Veuillez nous excuser de ce contretemps.
    D'accord.
    Nous passons maintenant à Mme Alison Phinney, qui témoigne aussi par vidéoconférence.
    Les sept prochaines minutes sont à vous.

  (1535)  

    En tant qu'infirmière, mes recherches étaient principalement axées sur les personnes âgées vulnérables de la communauté, en particulier les personnes atteintes de démence, mais portaient également de façon plus générale sur les personnes âgées ayant des déficiences physiques et des vulnérabilités sociales. On parle de gens qui sont isolés, qui habitent parfois loin de leur famille et qui ont un réseau de soutien restreint. Essentiellement, ce sont des gens qui ont de la difficulté à sortir de chez eux, et lorsqu'ils le font, ils constatent qu'ils ont moins de possibilités de participer et d'établir des liens avec l'ensemble de la communauté.
    Mes recherches portaient sur une question plutôt vaste: quelles sont les activités significatives pour les personnes de ce groupe? Plus précisément, quelles mesures pouvons-nous prendre pour les appuyer? Je vais brièvement vous présenter certaines constatations que nous avons dégagées de ces recherches qui pourraient représenter des pistes de solution.
    Je suis une chercheuse très engagée auprès de la collectivité. Essentiellement, je travaille sur le terrain; par conséquent, je ne parlerai pas tant de solutions descendantes, mais plutôt des solutions ascendantes que j'ai observées.
    Ces dernières années, nous avons assisté à l'émergence d'un nombre croissant de petits programmes communautaires visant à offrir diverses des activités de groupe pour les personnes âgées et les personnes atteintes de démence. Les groupes qui offrent ces services sont diversifiés et souvent très novateurs, et ils exercent principalement leurs activités en marge du système des soins de santé. Les gens se réunissent dans des centres communautaires, des salles paroissiales et même dans des salles de réunion d'un hôtel. Nos travaux de recherche ont révélé que ces groupes ont des retombées positives pour la santé et sur le plan social et, contre toute attente, ils semblent être durables; ils sont loin de disparaître.
    Puisque nous avons peu de temps, je vais simplement vous donner deux exemples des recherches que nous avons menées en Colombie-Britannique.
    Le premier exemple est un groupe appelé Paul's Club, un organisme social de bénévoles — à l'exception d'un employé à temps partiel rémunéré — dont les activités s'adressent à des personnes plus jeunes atteintes de démence, soit des personnes de 50 à 75 ans environ. Paul's Club a été fondé par Nita et Michael Levy, un couple de retraités de Vancouver qui voulait faire quelque chose pour cette population précise pour des raisons très personnelles. Au cours des cinq dernières années, ils ont essentiellement créé une approche qui combine les activités physiques et sociales, toutes offertes au coeur de la ville. Le club compte environ 15 membres qui se rencontrent trois journées complètes par semaine.
    On parle ici de gens dont la démence avait tellement progressé qu'ils n'étaient plus capables de faire des sorties sans être accompagnés. Ils étaient isolés chez eux, mais en même temps, ils ne pouvaient être laissés seuls. Paul's Club représente pour eux un nouveau cercle d'amis, et ils ont l'occasion de faire des promenades dans leur quartier tous les jours, ce qui leur permet d'être visibles, d'être actifs et d'établir des liens avec l'ensemble de la communauté.
    Le deuxième exemple est un programme appelé Arts & Health: Healthy Aging Through the Arts. Dans le cadre de ce programme, divers centres communautaires de la ville offrent des ateliers hebdomadaires destinés aux personnes âgées. Ces personnes ont l'occasion de collaborer avec un artiste professionnel pendant un an. Le programme s'adresse à des personnes identifiées comme étant à risque d'être isolées et marginalisées. Nos recherches ont démontré que ce programme a permis à ces gens d'apporter une contribution réelle à la communauté. En effet, leurs créations artistiques ont été exposées dans l'espace public et ils ont pu renforcer leurs liens sociaux. Cela a aussi permis d'améliorer la santé physique et psychologique des membres et, ce qui est probablement le plus important, nous avons constaté que les membres avaient acquis un réel sentiment d'appartenance.
    Lors de son lancement en 2006, le programme était une collaboration de la ville et de l'autorité régionale de la santé. Je crois comprendre que le financement pour les services de santé a été essentiellement éliminé au fil du temps, mais les programmes ont été maintenus. En fait, ils ont été élargis et sont de plus en plus enracinés dans les quartiers.
    Ces recherches présentent des exemples concrets sur la façon dont les groupes de ce genre peuvent contribuer à l'amélioration de la santé physique et psychologique des personnes âgées, mais la constatation la plus probante, dans tous les cas, est la façon dont ils favorisent l'inclusion sociale.
    Je n'ai pas l'habitude de faire valoir que cela contribuera à la réduction des coûts des soins de santé. Là n'est pas la nature de mon travail. Cela dit, j'avance que ce sont des exemples des mesures d'aide que nous voulons au Canada tandis que nous vieillissons. Il ne s'agit pas seulement d'appuyer le bien-être et la qualité de vie pour que nous nous sentions mieux et que nous vivions mieux sur le plan personnel. Nous voulons que notre société soit une société qui accepte le vieillissement et qui offre aux personnes âgées un espace où ils pourront non seulement avoir un appui adéquat, mais aussi contribuer en tant que membres actifs du tissu social.

  (1540)  

    Quant à la suite des choses, les données démontrent de plus en plus que les programmes de ce genre sont efficaces, en particulier ceux des groupes qui offrent des activités physiques et créatives destinées aux personnes âgées. Ces activités sont de plus en plus populaires au Canada et à l'échelle internationale.
    Dans une certaine mesure, nous en sommes maintenant à examiner les détails, c'est-à-dire déterminer quels types de programmes dans les meilleurs résultats pour une clientèle donnée et quelles approches sont plus efficaces. Toutefois, la grande question demeure: comment créer des solutions qui favoriseront l'accessibilité accrue des initiatives communautaires de ce genre? Il existe évidemment des défis très concrets, et c'est toujours une question de financement. Ces groupes tendent à consacrer des efforts considérables à trouver les fonds nécessaires pour maintenir leurs activités. La question est donc de savoir quels modèles de financement pourraient donner de meilleurs résultats.
    À cela s'ajoute la difficulté à atteindre le groupe cible, car les personnes isolées peuvent être très difficiles à trouver. Même lorsque nous y parvenons, le transport demeure un problème important. Comment pouvons-nous réunir les gens, en particulier à l'extérieur des centres urbains? Le transport ne consiste pas seulement à assurer que les gens peuvent se rendre au cabinet du médecin. Il s'agit aussi de permettre aux aînés d'assister à des réunions, de rencontrer leurs amis et de maintenir leurs liens.
    Mon dernier point porte sur la capacité de la communauté de fournir ces programmes, qui demeurent plutôt limités. Je parle ici de deux aspects. D'abord, il y a la capacité liée aux connaissances et aux compétences requises pour travailler auprès d'une population qui peut être très complexe. Ensuite, et je dirais que c'est l'aspect le plus important, nous devons accroître, sur le plan collectif, notre sensibilisation et notre compréhension à l'égard des enjeux liés au vieillissement et à la démence en particulier. Pendant trop longtemps, notre sensibilisation a été limitée par la crainte d'un prétendu « tsunami gris ». Nos travaux démontrent que nous devons réellement nous attaquer à l'âgisme sous-jacent si nous voulons vraiment être une société inclusive pour la population vieillissante.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Pour les sept prochaines minutes, nous entendrons Mme Pat Armstrong, qui est chercheure associée au Centre canadien de politiques alternatives.
    Je suis aussi professeure à l'Université York.
    Je vous remercie de m'avoir invitée ici aujourd'hui, je vous remercie également de l'attention que vous portez à la promotion de l'intégration et de la qualité de vie des aînés. Ma présentation se fonde sur mes nombreuses années de recherche, qui ont démontré que l'intégration et la qualité de vie sont des aspects à tout le moins aussi importants au sein des établissements de soins de santé qu'à l'extérieur de ceux-ci.
    Aujourd'hui, j'aimerais me concentrer sur trois principaux enjeux: l'accès à des services de santé appropriés, la portée des soins à domicile, et la qualité des soins de longue durée en établissement.
    Je vais commencer par les services de santé. Comme vous le savez sans doute, la Commission royale d'enquête sur les services de santé de 1964 — la Commission Hall — a conclu, après une enquête approfondie des faits, que la couverture de tout l'éventail des services était la seule solution logique et économique d'assurer la coordination des soins, de veiller à ce que les gens reçoivent les soins appropriés et d'éliminer les coûts et les délais associés au tri des personnes méritantes et non méritantes. Toutefois, le gouvernement fédéral a décidé de commencer par les services hospitaliers, puis par les services médicaux, avant de passer aux autres services, un élargissement qui ne s'est jamais concrétisé.
    Les éléments de preuve recueillis par la Commission royale sont toujours pertinents aujourd'hui. Il est plus urgent que jamais d'offrir une couverture universelle et coordonnée de l'éventail complet des services, étant donné le vieillissement de la population. Les personnes qui ont des problèmes de santé chroniques, dont le nombre ne cesse de croître, doivent pouvoir passer rapidement d'un service à l'autre et y recevoir des traitements par des gens qui comprennent les soins gériatriques.
    Nous avons besoin d'une initiative nationale, semblable à la Loi canadienne sur la santé, afin d'offrir des soins universels, accessible et complet, et ainsi enfin terminé le projet entrepris il y a longtemps. Nos aînés, qui ont travaillé avec acharnement pour nous offrir notre programme social le plus populaire, ne méritent rien de moins. C'est un aspect fondamental dans notre quête d'équité.
    Je passe maintenant au deuxième point. On affirme que les soins à domicile sont le premier choix de tous. C'est certainement ce que disent mes amis, mais ils font partie de la classe moyenne, ils ont un régime de retraite et un important réseau familial et un grand cercle d'amis. L'idée selon laquelle les soins à domicile sont l'idéal pour tout le monde ne correspond pas à la réalité. Beaucoup de gens ne vivent pas dans un milieu sécuritaire et sain et pour beaucoup, comme le disaient les féministes, le domicile n'est pas nécessairement un refuge dans ce monde sans merci.
    Beaucoup de gens ne peuvent compter sur des membres de leur famille ou des amis, près de chez eux, pour leur offrir des soins ou leur tenir compagnie. Cela découle de divers facteurs, notamment les familles moins nombreuses, le nombre plus élevé de célibataires et les enfants qui doivent déménager pour trouver un emploi. La solution du « vieillissement chez soi » ne tient pas compte des soins spécialisés dont beaucoup ont besoin, soins qui ne peuvent être facilement offerts par leur partenaire et par leurs amis, aussi vieillissants, ni du fait que beaucoup de gens habitent dans des endroits mal adaptés à la prestation de soins assidus. J'habite dans une vieille maison victorienne où l'on trouve de nombreux escaliers. Il faut gravir trois escaliers pour arriver à l'entrée, et je peux vous dire que les monte-escaliers que l'on voit à la télévision ne pourraient être installés chez moi.
    Enfin, les soins à domicile sont souvent synonymes d'isolement à domicile, comme nous venons de l'entendre, en particulier lorsque le seul endroit accessible où faire l'épicerie est un Walmart, à des kilomètres de distance, et que la banque locale est fermée. L'isolement est le contraire de l'inclusion.
    On insiste beaucoup sur les soins à domicile, mais sans tenir compte des conditions de travail des fournisseurs de soins, qu'ils soient rémunérés ou non, et il y a un manque de compréhension des compétences nécessaires et des risques potentiels que cela représente tant pour les patients que pour les fournisseurs de soins. Autrement dit, nous ne pouvons nous en remettre exclusivement aux soins à domicile pour la prestation de nombreux soins dont les gens ont besoin actuellement. Quant aux personnes qui peuvent recevoir des soins à domicile, il convient d'avoir assez de personnel rémunéré ayant les compétences nécessaires et de leur offrir des conditions de travail afin d'offrir une qualité de vie tant aux fournisseurs de soins qu'aux bénéficiaires.
    Pour terminer, j'aimerais parler des soins de longue durée en établissement. Très peu de gens prévoient être hébergés un jour dans un établissement de soins de longue durée, qui sont considérés comme une solution de dernier recours — et la pire qui soit — par la plupart des gouvernements et une bonne partie de la population et du personnel soignant. On peut mettre l'accent tant que l'on veut sur le vieillissement chez soi, mais nous sommes tous des résidents potentiels et nous avons tout intérêt à assurer la qualité des soins dans ces établissements.
    Un haut gestionnaire que nous avons interviewé en Ontario nous a indiqué ce qui suit: « La durée moyenne de séjour en établissement est de 18 mois; je pose la question suivante tous les jours: " S'il vous restait seulement 18 à 24 mois à vivre, dans quelles conditions voudriez-vous les vivre? " Notre travail, c'est d'offrir les meilleures conditions possibles. » Ce n'est pas seulement le rôle de ce gestionnaire et de ce personnel; c'est notre rôle à tous. Nos huit années de recherches et d'études en équipe portant sur 27 centres de soins de longue durée dans six pays différents nous ont convaincus que les conditions de travail correspondent aux conditions de soins. On ne peut offrir des soins axés sur les résidents sans mettre en place les conditions de travail qui favorisent la prestation de tels soins.

  (1545)  

    À l'heure actuelle au Canada, on omet trop souvent d'offrir ces conditions. C'est l'une des raisons pour lesquelles les personnes qui fournissent des soins directs dans ces établissements présentent les plus hauts taux d'absentéisme en raison de la maladie ou de blessures. En effet, le personnel des établissements de soins est plus susceptible de se blesser que les policiers ou les pompiers.
    Si nous voulons ajouter de la vie aux années plutôt que de seulement ajouter des années à la vie, il faut comprendre l'importance non seulement d'avoir suffisamment de personnel, mais aussi d'avoir assez de personnel bien formé et des conditions qui permettent d'assurer la constance du personnel. Les taux de roulement élevés et le recours au personnel occasionnel, à temps partiel ou d'agence augmentent le risque de blessures et nuit aux relations de soins qui nous permettent de prévenir la violence et d'offrir une qualité de vie aux aînés. Ce ne sont là que quelques-uns des problèmes associés aux conditions de travail. Un important corps de recherche indique également que le type de propriété a une incidence sur la qualité des soins, qui tend à être inférieure dans les établissements à but lucratif.
    En conclusion, j'ajouterais que les répercussions de notre système actuel sont sexospécifiques: les femmes vivent plus longtemps que les hommes, utilisent davantage le système de santé et ont moins de ressources économiques. Ainsi, le défaut de fournir des soins entraîne des répercussions sexospécifiques, qui sont inégales entre les femmes également. Les femmes assurent également la grande majorité de la prestation rémunérée ou non des soins. Par conséquent, les mauvaises conditions de travail les affectent particulièrement. Les soins à domicile et les soins en établissement sont offerts en grande partie par des femmes appartenant à des collectivités immigrantes et racialisées. Il faut établir une initiative fédérale pour assurer un accès universel à l'ensemble des services de santé offerts par les organisations sans but lucratif, selon les mêmes principes que ceux de la Loi canadienne sur la santé. Cela signifie aussi d'établir une stratégie en matière de ressources humaines pour garantir des conditions de travail appropriées. Il faut le faire aujourd'hui, avant qu'il ne soit trop tard.
    Merci.
    Vous m'excuserez pour ma voix: j'ai un problème de gorge chronique.
    Vous n'avez pas à vous excuser. Cela nous est tous déjà arrivé.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant entendre M. Raza Mirza, qui est gestionnaire de réseau pour l'Initiative nationale pour le soin des personnes âgées.
    Vous disposez de sept minutes. Allez-y, monsieur.

  (1550)  

    Merci, monsieur le président, et merci aux membres du Comité de me recevoir aujourd'hui.
    Je suis associé de recherche principal à l'Université de Toronto et gestionnaire de réseau pour l'Initiative nationale pour le soin des personnes âgées, l'INSPA. Je suis ici aujourd'hui à titre de gestionnaire réseau pour représenter le conseil d'administration et la directrice scientifique de l'INSPA, qui ne pouvait pas être ici aujourd'hui en raison d'autres engagements.
    Selon l'INSPA, pour améliorer la qualité de vie et le bien-être des aînés — ce qui comprend les facteurs associés aux programmes communautaires, à l'inclusion sociale et aux déterminants sociaux de la santé —, il faut renforcer la capacité des aînés d'être des citoyens à part entière plutôt que de les ghettoïser par l'entremise de systèmes de santé et de services distincts.
    L'INSPA est un centre international d'excellence financé par les centres d'excellence nationaux et est un organisme de charité sans but lucratif établi en 2005. L'INSPA est un réseau de transfert et d'échange des connaissances qui vise à améliorer les soins offerts aux aînés du Canada et d'ailleurs. Pour ce faire, nous transmettons des connaissances valides et fiables sur le vieillissement aux personnes qui en ont besoin. Ce sont notamment les aînés, les membres de leur famille, les praticiens de diverses disciplines — notamment les soins infirmiers, le travail social et l'application de la loi, par exemple —, les étudiants et les décideurs.
    L'INSPA réalise ce travail par l'entremise de divers mécanismes. L'un d'entre eux est la recherche. Nous avons aussi recours à des équipes thématiques, qui sont dirigées par un chercheur et un praticien et qui travaillent sur divers aspects du vieillissement. L'INSPA compte actuellement 12 équipes thématiques, qui travaillent à des sujets comme la violence envers les aînés, les soins aux personnes atteintes de démence, la santé mentale, les soins dentaires, la prestation de soins et la littératie financière, pour n'en nommer que quelques-uns. Le troisième mécanisme vise à créer des outils à partir de la recherche fondée sur des données probantes qui n'a jamais vu le jour.
    L'INSPA a la chance de compter un grand nombre de membres, soit 4 000 à travers le monde, et une représentation officielle dans 14 pays. Nous continuons de trouver des façons d'accroître ce nombre pour faciliter l'accès aux connaissances sur le vieillissement partout au pays et ailleurs dans le monde. Notre branche internationale, l'International Collaboration for the Care of the Elderly ou ICCE, permet au Canada de faire sa marque à l'échelle internationale dans le domaine du vieillissement, mais nous aide aussi en nous transmettant des connaissances sur le vieillissement et la diversité. Notre réseau représente une ressource importante pour de nombreux intervenants, puisque les professionnels ne sont pas toujours à jour. La base de connaissances en matière de gérontologie et de gériatrie demeure petite et il est encore difficile d'attirer de nouveaux étudiants dans ce domaine.
    L'INSPA a effectué des recherches à l'échelle régionale, nationale et internationale, ce qui nous a permis de faire d'importantes observations et de tirer des leçons importantes également. Ainsi, notre travail se fonde sur des données probantes et nous a permis de créer plus de 200 outils dans plusieurs langues, dans le but d'améliorer les soins offerts aux aînés. Ces outils ont été élaborés à partir des recherches que nous avons menées — je vais vous parler de ces recherches de façon précise aujourd'hui — et nous nous centrons sur les observations qui peuvent nous permettre de travailler avec les aînés et d'améliorer leur qualité de vie générale et leur bien-être.
    Du point de vue de l'INSPA, il est essentiel de prendre les décisions avec les aînés et non pour les aînés. Pour ce faire, il faut financer la recherche gérontologique qui établit un partenariat significatif avec les aînés du Canada et veiller à transformer les connaissances en des actions par l'entremise de changements aux politiques et aux pratiques fondés sur des données probantes.
    L'année dernière, nous avons franchi une étape historique au Canada: les aînés canadiens sont plus nombreux que leurs homologues pour la première fois de notre histoire. Nous avons accueilli ce jalon avec espoir et optimisme, puisque de façon générale, les aînés vivent plus longtemps, sont en meilleure santé et sont plus riches qu'avant. Toutefois, nous savons aussi qu'il faut renouveler nos efforts en ce qui a trait à la recherche, à la formation et aux programmes d'éducation pour améliorer davantage la qualité de vie d'un plus grand nombre d'aînés.
    Lorsqu'on regarde au-delà des expériences générales des aînés au pays et au-delà du Canadien âgé moyen, on voit des populations plus vulnérables qui ont besoin d'aide. Notre recherche s'est centrée sur ces populations et vise notamment les victimes de violence, les membres âgés des collectivités autochtones, les personnes qui vivent l'isolement social et qui vivent souvent dans des collectivités diversifiées ou rurales, les grands-parents qui sont à nouveau parents à un stade avancé de leur vie, les aînés qui n'ont pas de bonnes connaissances financières, les personnes qui vivent dans la pauvreté — surtout les femmes âgées —, les personnes vulnérables au divorce tardif ou à l'exploitation financière et les personnes qui ne peuvent avoir accès à des soins de fin de vie ou des soins palliatifs de qualité.
    À titre de dimension des inégalités en matière de citoyenneté sociale, les aînés sont souvent victimes d'âgéisme, qui se manifeste de façons subtiles par l'entremise de la discrimination au travail ou dans les transports, du déni du droit à des soins de qualité et des logements et services ghettoïsés.

  (1555)  

    Si l'on ne traite pas les aînés comme tous les autres citoyens, ils se sentent exclus dans leur propre collectivité. L'INSPA croit fermement que les aînés sont des citoyens adultes et qu'ils ont le droit d'être responsables de leur propre vie.
    La citoyenneté sociale pour les aînés est désignée à titre de sujet prioritaire au Canada par le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, par Emploi et Développement social Canada, par le Conseil national des aînés et par la Stratégie pour le bien-être des personnes âgées de l'Ontario, pour ne nommer que ceux-là. De façon générale, la citoyenneté sociale suggère l'égalité de statut dans la société et le droit d'appartenance à une collectivité, à la prospérité économique et à la sécurité. Lorsqu'on associe cela à la qualité de vie et aux déterminants sociaux de la santé appliqués à la population vieillissante, l'importance de la citoyenneté devient encore plus évidente. Bien que la recherche sur les conséquences des inégalités des droits et des possibilités et sur la citoyenneté sociale soit très mince et limitée, elle montre qu'environ un aîné sur quatre au Canada souhaite participer plus activement à sa collectivité. L'inclusion sociale a été désignée à titre de sujet prioritaire en ce qui a trait aux déterminants sociaux du bien-être.
    L'isolement social a aussi été désigné à titre de problème de santé et de société important chez les aînés et ne devrait pas être une conséquence normale du vieillissement. De façon particulière, les personnes de différentes origines ethniques peuvent présenter un risque accru d'isolement social, puisqu'elles ont peut-être immigré récemment et ne parlent peut-être pas bien notre langue. L'isolement social est un enjeu complexe et peut être attribuable à un milieu physique et social qui n'est pas conçu pour aider les personnes âgées et peut leur être hostile.
    Pour conclure, l'INSPA est déterminé à développer des connaissances fondées sur des données probantes et appuyées par un financement désigné pour la recherche sur les populations âgées vulnérables et à améliorer la formation des étudiants en gérontologie et en gériatrie, les décideurs et les praticiens. Surtout, l'éducation directe des personnes âgées leur fera comprendre qu'ils peuvent devenir des citoyens actifs qui contribuent à la société canadienne, et que c'est ce qu'on attend d'eux.
    Encore une fois, nous tenons à insister sur l'importance de la recherche en gérontologie et en gériatrie qui pourrait orienter notre approche en vue d'élaborer une stratégie nationale pour les aînés qui correspond aux réalités d'une nouvelle génération d'aînés au Canada.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant entendre le représentant du Réseau FADOQ.
    Danis Prud'homme, les sept prochaines minutes vous appartiennent.
    Merci, monsieur le président.
    Je ferai ma déclaration en français, mais nous vous en avons transmis une copie dans les deux langues, en plus de notre mémoire complet.

[Français]

    Membres du Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées, bonjour.
    C’est un honneur pour moi de représenter aujourd'hui le Réseau FADOQ dans le cadre des consultations particulières qui mèneront, nous l’espérons sincèrement, à l’élaboration d’une stratégie nationale sur le vieillissement au Canada.
    Laissez-moi d’abord vous présenter un peu notre organisation. Fondé il y a 47 ans, le Réseau FADOQ est le plus grand organisme d’aînés au pays, avec près de 500 000 membres actifs de 50 ans ou plus.
    Le Réseau FADOQ est le leader incontesté des organismes de défense des droits des aînés au Québec, profitant de toutes les tribunes pour faire avancer sa cause principale: l’obtention d’une qualité de vie adéquate pour tous les aînés d'aujourd'hui et de demain. C’est un ardent promoteur d’un vieillissement actif, puisqu’il propose une vaste panoplie d’activités sportives, récréatives et culturelles qui contribuent à faire bouger plus de 70 000 aînés par semaine. À cela s’ajoutent près de 1 500 rabais et privilèges liés à la carte FADOQ, qui aident les aînés à maximiser leur pouvoir d’achat, dans un contexte général d’appauvrissement des aînés.
    Le Réseau FADOQ n’hésite pas à mettre l’énorme pouvoir d’influence que lui confère son impressionnant nombre de membres au service d’enjeux cruciaux. D’ailleurs, nombreux sont les gains importants obtenus par le Réseau au cours des dernières années, seul ou en collaboration avec des partenaires: abolition des frais accessoires en santé au Québec, inscription automatique au Supplément de revenu garanti, rétablissement à 65 ans de l’admissibilité au crédit d’impôt provincial en raison de l’âge, pour ne nommer que ceux-là.
    Le Réseau réclame depuis quelques années déjà l’élaboration d’une politique du vieillissement au Québec, car il croit que la concertation et la mise en avant d’une vision globale du vieillissement sont les pierres angulaires d'une véritable amélioration de la qualité de vie des aînés. De plus, depuis cinq ans, il représente les organismes d’aînés canadiens à l’Organisation des Nations unies, ou ONU, au sein du Groupe de travail à composition non limitée sur le vieillissement, qui travaille à la création d'un instrument international global et intégré pour la promotion et la protection des droits et de la dignité des personnes âgées.
    Il est donc tout naturel que le Réseau FADOQ applaudisse la tenue des présentes consultations jetant les bases de la stratégie sur le vieillissement à l’échelle du pays. Les grandes orientations en matière de qualité de vie des aînés qui s’en dégageront sont fondamentales non seulement pour les aînés, mais pour l’avenir du pays. Nous croyons fermement que seul un tel instrument nous permettra de faire face adéquatement au défi démographique déjà en cours et qui prendra de l’ampleur à vitesse grand V.
    Il va sans dire que nous offrons notre pleine collaboration à cette démarche essentielle en laquelle nous fondons beaucoup d’espoir, puisqu’elle proposera une orientation commune et unique et qu'elle sera propice à l’action. À quoi bon, en effet, se concerter et mettre en commun nos différentes expertises si, au bout du compte, les gestes concrets ne suivent pas? Il faut passer de la connaissance à l’action, sans quoi cet exercice sera vain et les aînés en paieront le prix fort.
    J’en viens maintenant aux principales recommandations contenues dans ce mémoire, qui sont le fruit de presque cinq décennies entièrement consacrées, de notre côté, à toutes les facettes de la qualité de vie des aînés.
    Tout d’abord, le Réseau FADOQ recommande la création d’un secrétariat aux aînés relevant du conseil exécutif. Il suggère aussi qu’une « lorgnette aînés » soit systématiquement utilisée pour examiner les politiques publiques actuelles et futures. Aussi, nous verrions d’un bon oeil l’actualisation du Conseil national des aînés, afin qu’il devienne un lieu de concertation pour les organisations comme la nôtre, qui pourraient y être intégrées.
    En matière de revenu, il est évident que les méthodes de gestion et d’administration du Supplément de revenu garanti doivent être revues et que cette prestation doit être bonifiée. Quant aux employeurs, le gouvernement doit s’engager à les sensibiliser à leur rôle en matière d’équité intergénérationnelle et de santé financière des futurs retraités, puis les encourager à offrir des régimes complémentaires de retraite.
    En ce qui concerne l’habitation, le Réseau FADOQ estime que le gouvernement canadien doit faire une place de choix à l’innovation et être un ardent promoteur des normes d’accessibilité universelle pour toutes nouvelles constructions financées au moyen des deniers publics, de sorte que les milieux de vie évoluent au gré des besoins démographiques. En outre, le gouvernement doit inciter les entreprises à maintenir les services de proximité, tout en prêchant par l’exemple.
    En guise de transition vers le thème central de la santé, passons au sujet de l’urgent virage du soutien à domicile. Le gouvernement fédéral doit agir comme un leader dans ce dossier et mobiliser les provinces en ce sens. À cet effet, l’une des voies incontournables à suivre est celle des transferts en santé exclusivement consacrés aux soins et aux services à domicile.

  (1600)  

    De plus, nous considérons que le gouvernement canadien devrait inscrire, dans la Loi canadienne sur la santé, une prévision visant à établir un accès minimal et équitable à des services et à des soins à domicile, et ce, pour tous les Canadiens.
    En ce qui concerne le système de santé canadien, il est indispensable d'en garantir le caractère universel. Pour ce qui est des mesures touchant directement la santé, le Réseau suggère que le gouvernement fédéral s'inspire de la stratégie nationale sur les aînés, présentée par l'Association médicale canadienne, y compris le cadre propre à la montée de la démence que notre société doit affronter.
    Nous demandons également la mise en place d'un programme national de médicaments, lequel assurerait l'équité à tous les Canadiens. Dans un même souci d'équité, ainsi que pour mieux soutenir les aînés en perte d'autonomie, nous souhaitons que les transferts en santé tiennent compte du vieillissement de la population et qu'ils soient versés selon la proportion d'aînés au sein de la population de chaque province et territoire.
    On ne peut parler de santé des aînés sans aborder la situation quasi inhumaine vécue par certains proches aidants, dont le nombre est appelé à croître rapidement. En leur nom, nous réclamons des mesures compensatoires plus substantielles, ainsi que la garantie de leur emploi pour les proches aidants en situation aigüe.
    Enfin, nous tenons à rappeler qu'une intervention adéquate repose sur un état des lieux aussi précis que possible. À cet égard, il importe que les prochains recensements permettent aux aînés vivant dans des résidences privées pour aînés de remplir leur propre questionnaire plutôt que de laisser la direction de l'immeuble s'en charger.
    En conclusion, soyez assurez de la plus entière collaboration du Réseau FADOQ à l'élaboration de la stratégie nationale sur le vieillissement au Canada. Nous mettons notre expertise à votre service, et nous suivrons de très près l'essentiel de toute cette démarche, soit le déploiement de réelles actions qui amélioreront, partout au pays, la qualité de vie des aînés d'aujourd'hui et de demain.

[Traduction]

    C'est excellent. Merci beaucoup.
    Et maintenant — on croise les doigts —, je crois que la Dre Cottle se joint à nous non pas par vidéoconférence, mais bien par conférence téléphonique.
    M'entendez-vous?
    Oui. Est-ce que vous m'entendez aussi?
    Le président: Oui, très bien.
    Dre Margaret M. Cottle: D'accord.
    Je ne vous verrai pas me faire signe lorsque mes sept minutes seront écoulées, mais j'ai répété ma déclaration deux fois. Je vais tout simplement la lire; je vous prie donc d'être patients.

  (1605)  

    Vous pouvez procéder de cette façon. Nous vous remercions de votre patience. Je suis heureux que nous puissions vous entendre.
    Merci.
    Je suis désolée d'avoir manqué bon nombre des autres déclarations. Elles étaient intéressantes et je suis très reconnaissante de pouvoir prendre part à cette conversation.
    Je m'appelle Margaret Cottle. Je suis médecin en soins palliatifs et professeure adjointe d'enseignement clinique à la faculté de médecine de l'Université de la Colombie-Britannique. Depuis près de 30 ans, je consacre ma pratique uniquement au soin des patients atteints de maladies graves et de leurs proches, surtout dans le cadre des soins à domicile. Je cumule de nombreuses années d'expérience directe avec les patients et les familles qui vivent avec l'exclusion et la diminution de la qualité de vie, qui sont principalement attribuables au manque de volonté de notre société de leur offrir les ressources dont ils ont besoin. Je trouve cela troublant, puisque nous semblons être en mesure de trouver de l'argent pour financer des contrats de plusieurs millions de dollars avec les célébrités du monde des sports et du divertissement.
    Le Canada a signé la Déclaration universelle des droits de l'homme des Nations unies, dont le préambule commence ainsi:
Considérant que la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine et de leurs droits égaux et inaliénables constitue le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde.
    L'article 25.1 énonce que:
Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l'alimentation, l'habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires; elle a droit à la sécurité en cas de chômage, de maladie, d'invalidité, de veuvage, de vieillesse ou dans les autres cas de perte de ses moyens de subsistance par suite de circonstances indépendantes de sa volonté.
    À l'heure actuelle, le Canada ne répond pas à cette norme de base.
    La solitude, l'isolement et la vulnérabilité sont au coeur de ma pratique. Un patient, que j'appellerai Joe, a été retrouvé dans sa maison alors qu'il était déshydraté, délirant et agressif. La plaie ouverte causée par son cancer au visage était infestée d'asticots. Au beau milieu d'une grande ville aisée, il n'a personne pour prendre soin de lui. Même lorsque les membres de la famille peuvent aider ces gens, ils ont souvent dépassé le point de rupture, tant sur le plan physique que sur le plan émotionnel. Ils connaissent souvent des difficultés financières et au travail. Notre système est austère et n'offre pas suffisamment de soutien durable aux familles qui font ce travail essentiel avec une efficience et un amour profond qu'aucune personne rémunérée ne pourrait offrir.
    Les aînés fragiles partagent de nombreuses préoccupations avec les personnes handicapées dans notre société. Carol J. Gill, du département d'étude sur l'invalidité et le développement humain de l'Université de l'Illinois, à Chicago, elle-même une survivante de la polio vivant avec d'importantes difficultés motrices et respiratoires, présente un point de vue intéressant en matière de vulnérabilité. Je vous recommande la lecture de deux excellents articles. Bien qu'ils aient été rédigés dans d'autres contextes, ils sont très pertinents aux fins de notre discussion. Elle fait valoir que la vulnérabilité est créée par la société et n'est pas inhérente à nos conditions physiques ou cognitives. Elle donne l'exemple suivant:
Toute ma vie, on m'a dit que je ne pouvais pas manger au restaurant du coin parce que mes jambes ne me permettaient pas de monter les escaliers. Aujourd'hui, je sais que c'était plutôt parce que le propriétaire du restaurant ne voulait pas construire une rampe.
     Elle dit aussi que le fait d'avoir besoin d'aide est une « indignité créée par la société ».
    Elle poursuit:
C'est la façon dont on traite et on perçoit les personnes handicapées dans la société qui entraîne ce sentiment de honte chez les personnes qui ont besoin d'aide pour aller à la toilette. C'est la stigmatisation des personnes handicapées qui suscite la peur chez les personnes qui ne peuvent plus vivre de façon indépendante ou se montrer « normales ». Ce sont l'économie et les arrangements sociaux associés à l'invalidité qui transforment les personnes malades en un fardeau pour leur famille ou en prisonniers des centres de soins.
    Elle écrit:
En règle générale, la population associe l'invalidité à la souffrance. Comme j'ai une limitation physique, que j'ai besoin de l'aide des autres et que j'utilise des appareils comme un fauteuil roulant et un ventilateur, de nombreux observateurs me perçoivent comme une personne souffrante. Je ne suis pas de cet avis. Ironiquement, leurs préjugés me causent plus de souffrances que mes incapacités. Les personnes handicapées sont toujours associées à une souffrance alors qu'en fait, elles tentent tout simplement de vivre leur vie autrement.
    De plus, elle écrit ceci:
En fait, nous avons beaucoup plus peur des médecins qui sont là pour nous aider, mais qui perçoivent notre vie comme étant contraignante et qui ne connaissent pas les options qui rendent la vie des personnes handicapées pertinente. Nous savons que cette pitié mal placée et le pessimisme des médecins sont renforcés par les institutions médicales qui les entourent, les politiques qui les orientent, le système de financement des soins de santé qui les récompense pour leurs économies de coûts, et la culture prévalente qui influe sur leur pensée au sujet de l'invalidité.

  (1610)  

    Elle a également dit ce qui suit:
Il est difficile pour la majorité des gens d'imaginer qu'une vie avec une invalidité grave ne peut se résumer que par de la souffrance, et cette souffrance ne peut être que déshumanisante. Conjointement à la tolérance à l'imperfection, l'esprit du public a perdu de son courage réaliste devant les difficultés humaines qui ont fait traverser des périodes difficiles aux générations antérieures. J'ai également remarqué à quel point l'imagination du public est devenue étroite sur ce qui rend la vie précieuse — si étroite qu'elle ne peut pas concilier simultanément ces deux réalités: invalidité et pleine humanité.
    Voici une dernière citation de la Dre Gill:
Les gens de n'importe quel âge peuvent bénéficier de mesures visant à accroître leur capacité de décider eux-mêmes, ce qui comprend de l'aide professionnelle à domicile dans la dignité, des réponses respectueuses aux préférences quotidiennes de chacun, de la compagnie ou le respect de la vie privée, et l'assurance que les changements associés au vieillissement ou à une maladie ne réduisent pas l'humanité et la valeur d'une personne.
    Ma conclusion est la suivante. Chaque personne mérite d'être respectée et prise en charge pas « comme si » elle était un membre d'une famille humaine, mais précisément parce qu'elle « est déjà » un membre à part entière d'une famille humaine. J'espère que nous rêverons grand, que nous pouvons imaginer un Canada où de l'amour et du soutien communautaire peuvent être offerts à tous les membres de la famille humaine, où tous nos citoyens jouissent de liberté, de justice et de paix, où chaque vie sera reconnue comme valant la peine d'être vécue, et où le fait de prendre soin des autres est considéré comme étant un privilège, et non pas un fardeau, même quand c'est difficile. Les programmes gouvernementaux ne peuvent pas changer le coeur des gens, mais ils peuvent favoriser la compassion au sein des collectivités et aider les systèmes de soins qui appuieront ceux qui apportent de l'amour dans la vie de tous les citoyens. J'espère sincèrement que vous trouverez des solutions créatives qui peuvent être mises en oeuvre rapidement. Le besoin est grand et urgent.
    Merci.
    Merci, docteure Cottle, de votre éloquente déclaration. Je suis ravie que nous ayons pu entendre ce que vous avez à dire.
    Avant de passer à la première série d'interventions, j'ai une petite question d'ordre administratif à régler. Le timbre devrait se faire entendre vers 17 h 15, et nous devrons conclure la séance à ce moment-là. Nous avons également des affaires du Comité à régler. Nous devrions avoir suffisamment de temps pour terminer les deux séries d'interventions, mais nous devrons suspendre la séance pour étudier les travaux du Comité à 17 heures.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue au député Doherty, que je remercie de se joindre à nous aujourd'hui.
    Notre premier intervenant est le député Warawa.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins de leurs excellents exposés.
    Nous avons des contraintes de temps, et je suis certain que vous avez beaucoup plus de choses à nous dire que ce que vous pourrez nous dire durant la période d'interventions de sept minutes. Pourriez-vous tous vous assurer de nous remettre un mémoire écrit, avec vos recommandations, que nous ferons traduire? Le but aujourd'hui était d'entendre vos témoignages. Nous élaborerons un rapport qui renfermera des recommandations au gouvernement. Si vous avez des recommandations précises à ajouter, il serait très utile que vous nous en fassiez part pour que nous puissions les inclure.
    Nous nous efforçons de déterminer si nous avons besoin d'une stratégie nationale pour les aînés. Avons-nous besoin d'une recommandation pour qu'un leadership soit exercé à tous les différents ordres de gouvernement? Nous avons entendu des observations à ce sujet. Le gouvernement fédéral, dans son rôle de leadership, doit-il avoir un ministre responsable des aînés? Nous avons entendu parler du secrétariat. L'idée semble très intéressante. Recommandons-nous que chaque province ait un responsable de manière à avoir une personne-ressource à tous les ordres de gouvernement? D'après le dernier témoin que nous avons entendu, le besoin est grand et urgent. Nous avons une population qui vieillit très rapidement, et la situation n'est pas uniforme partout au Canada. Certaines régions comptent une population de personnes âgées très importante.
    Je vais commencer avec vous, docteure Cottle. Vos exemples pour démontrer que nous ne prenons pas déjà soin de nos aînés étaient profonds et déchirants. Nous avons entendu parler d'une participation limitée en gériatrie. Vous êtes médecin en soins palliatifs. Les médecins spécialisés dans ce domaine sont peu nombreux. Dans ma circonscription de Langley, il y a un médecin en soins palliatifs pour une population d'environ 140 000 habitants. C'est un bon endroit où prendre sa retraite. Je ne sais pas quel est le pourcentage à l'heure actuelle, mais j'imagine qu'environ une personne sur quatre ou cinq est une personne âgée. Même autour de cette table, une personne sur quatre est probablement une personne âgée.

  (1615)  

    Je suis une aînée.
    Mon bon ami, M. Robillard, est un aîné. La moitié d'entre nous sommes probablement admissibles à ce rabais.
    Comment pouvons-nous, dans une courte période et d'une façon coordonnée et efficace, répondre aux besoins des aînés? D'après les exemples que vous avez fournis, docteure Cottle, nous ne le faisons pas actuellement. Quelle est la solution la plus facile que nous pouvons rapidement mettre en oeuvre pour pouvoir commencer à nous diriger dans la bonne direction? À ce stade-ci, je vois que nous ne sommes pas prêts et que nous ne répondons pas à leurs besoins. Pouvez-vous vous prononcer là-dessus, s'il vous plaît?
    Je suppose que si j'avais cette réponse, je pourrais dominer le monde. Un fait très intéressant que j'ai entendu — et le Comité devrait étudier cette possibilité —, c'est qu'au Danemark, le gouvernement n'a pas ouvert de nouveaux hôpitaux et a fermé des lits de longue durée. Il a plutôt investi son argent et ses ressources dans les soins à domicile.
    Je sais que les soins à domicile ne sont pas pour tout le monde. J'ai trouvé très intéressantes les déclarations d'un autre témoin voulant que ce ne soit pas pour tout le monde. Mais ça l'est pour de nombreuses personnes. Un grand nombre de personnes ne reçoivent pas des soins à domicile parce qu'ils n'ont pas l'appui voulu. Les aidants naturels ne peuvent pas s'absenter suffisamment du travail. Des changements ont récemment été apportés aux lois et aux règlements sur l'assurance-emploi, mais ils ne sont pas suffisants pour aider une personne qui prend soin d'un parent atteint de démence, par exemple, et qui devra le faire pendant 5 ou 10 ans.
    Nous avons de grandes ressources dans nos familles. Je prends soin de personnes à domicile depuis 30 ans. Les membres de la famille sont plus dévoués de façon générale — ce n'est pas universel, mais de façon générale — et sont plus aimants à l'égard des patients et de leurs proches que n'importe quelle autre personne externe que vous pouvez embaucher. Ils ont également tendance à comprendre la personne et ses besoins. Mais ils ont besoin d'aide. Ils ont besoin de soutien externe pour leur donner un répit. Ils ont besoin d'aide pour leur travail.
    Pour être honnête, je pense qu'un bon point de départ serait de soutenir les gens qui font déjà le travail et de s'assurer qu'ils ne s'épuisent pas pour que leurs proches ne finissent pas dans une maison de soins infirmiers ou aux urgences.
    Pat Armstrong, vous avez parlé de former plus de personnes en gériatrie. Comment amenons-nous plus de personnes à suivre cette formation? La pédiatrie est attrayante avec ses beaux bébés, et les salaires sont plus élevés en pédiatrie. Comment amenons-nous plus de gens à se tourner vers la gériatrie?
    Je pense que nous devons intégrer la gériatrie dans le programme d'apprentissage des médecins et du personnel infirmier. Il faut prévoir un semestre avec les personnes âgées. Je pense que l'idée d'intégrer un volet sur les aînés à toutes nos stratégies est un bon point de départ. C'est une question de logement. Ce sont toutes nos politiques. Il ne faut pas seulement élaborer une politique relative aux aînés distincte des autres politiques. Nous devons songer à cela.
    Je veux aussi que nous pensions aux soins en établissement de longue durée. Je pense que c'est très important. Nous ne voulons essentiellement pas en parler — Romanow n'en a pas parlé — car nous voulons oublier cette question. Un très grand nombre de personnes devront vivre dans des établissements de soins de longue durée. Nous devons réfléchir à des moyens de trouver la meilleure solution possible plutôt que de dire que tout le monde demeurera à la maison, car c'est impossible. Je veux seulement faire valoir un argument de plus en faveur des soins en établissement de longue durée.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant entendre M. Robillard, pour six minutes.

  (1620)  

[Français]

    J'ai cinq questions à vous poser, monsieur Prud'homme. Si je n'ai pas le temps de les poser toutes, je travaillerai avec la greffière du Comité pour vous les soumettre par écrit afin que vous puissiez répondre à chacune d'elles et que nous puissions tenir compte de vos réponses quand même dans le cadre de notre étude. J'espère que cela vous convient.
    Tout d'abord, je vous remercie de tout ce que vous faites pour nos aînés du Québec et bienvenue au Comité HUMA. Je crois comprendre que votre organisme a un programme permettant aux aînés de se familiariser avec les tablettes iPad et d'autres outils technologiques comme les logiciels Word et Excel.
    Pouvez-vous nous parler du succès de ce programme?
    Tout à fait. Je vous remercie de me donner l'occasion d'en parler.
    En fait, c'est un programme qui existe depuis une dizaine d'années et que nous avons dû mettre en place. Les groupes comptent de huit à dix personnes au maximum, et le professeur est un bénévole du même âge que les gens qui vont apprendre, ou presque. Nous formons environ 5 000 personnes par année. Nous avons commencé cela en raison de la modernisation de la société, ce qui est totalement naturel. Par contre, il ne faut pas oublier nos gens. Les adolescents d'aujourd'hui sont nés avec ces appareils dans leurs mains alors que nos aînés n'y avaient pas accès à leur âge. Nous devons donc leur apprendre à se servir de ces outils si nous voulons les habituer à continuer d'évoluer avec nous et les inclure dans notre société.
    Pouvez-vous nous faire part des tendances que votre organisme constate chez nos aînés?
    Quels sont les enjeux et les besoins que vous voyez croître en importance depuis les débuts du Réseau FADOQ, en 1970?
    En fait, le premier enjeu était de les sortir de l'isolement. Déjà, à cette époque, il y avait un isolement dans la population vieillissante. Nous devions donc créer des endroits où les femmes et les hommes peuvent interagir et pratiquer des activités qu'ils aiment. C'est la première chose que nous avons remarquée.
    Il y a quelques années, nous avons créé ce qu'on appelle un contrat social en faveur d'une qualité de vie adéquate pour les aînés, qui comprend quatre piliers, soit la santé, la sécurité, le bien-être et l'appartenance. Ces quatre piliers couvrent tous les problèmes que nous constatons aujourd'hui. Il y a un appauvrissement, un isolement, un besoin de logement, un besoin d'activités et un besoin de revenu adéquat.
    Selon ce que je comprends, n'importe quel individu au Québec âgé de plus de 50 ans peut adhérer à votre organisme. Il n'importe pas qu'il soit retraité, préretraité ou au travail.
    Pouvez-vous nous en dire davantage sur la stratégie que vous avez adoptée à cet égard?
    Pourquoi ne considérer que l'âge comme critère? Croyez-vous que cela est plus efficace et donne plus de résultats positifs pour nos citoyens de plus de 50 ans?
    En fait, lorsque le Réseau FADOQ a vu le jour, nous nous concentrions sur la couche de la population qui avait des difficultés, par exemple, celle qui était isolée.
    Au fil du temps, nous en sommes venus à constater jusqu'à aujourd'hui que cette couche de population est passée de 60 ans à 55 ans, puis à 50 ans. Nous osons espérer que ce chiffre ne se rendra pas à 25 ans, un jour, parce que cela veut peut-être dire qu'il y a des problèmes qui ne sont pas vraiment pris en compte et que nous devons aborder.
    Par exemple, en ce qui concerne les travailleurs d'expérience, nous en sommes aujourd'hui à considérer même ceux qui ont 45 ans parce qu'à cet âge, au Québec et au Canada, ou plutôt vers 50 ans, on a de plus en plus de difficulté à se trouver un nouvel emploi si on en perd un.
    Nous fonctionnons selon les difficultés et, après l'âge de 50 ans, c'est là que les problèmes se posent le plus.
    Comment une stratégie nationale sur les aînés doit-elle s'adapter aux individus préretraités? En quoi les enjeux se différencient-ils, comparativement aux retraités ou même aux aînés qui travaillent toujours? Quelle devrait être la réponse du gouvernement?
    En fait, nous n'aimons pas le mot « retraité » parce qu'on ne le définit pas comme il le faut. Retraité veut dire quelqu'un qui reprend sa vie et la traite différemment, et non quelqu'un qui ne fait plus rien. Ce sont donc des gens qui sont toujours actifs.
    Nous avons 15 000 bénévoles et 800 conseils d'administration au sein de notre organisation. S'il n'y avait pas de bénévoles, il n'y aurait pas de Réseau FADOQ. La majorité de nos proches aidants sont des gens qui travaillent, à tout le moins les femmes dans certains cas, et qui ont 60 ans et plus. Tout ces gens participent à la société.
    Quand nous parlons de retraités et de préretraités, l'âge est un continuum selon nous. Quand on naît, on a besoin d'aide. En fin de vie, on a besoin d'aide. On redonne à la société, qu'on travaille ou non. Les bénévoles sont plus performants que ceux qui travaillent parce qu'ils ne sont pas rémunérés, ils ont un très bon rendement et un bon retour sur investissement.

  (1625)  

    Est-ce qu'il me reste du temps?

[Traduction]

    Il vous reste une minute.
    C'est une longue question. Puis-je passer mon tour et revenir plus tard?
    Vous ne pouvez pas passer votre tour et revenir plus tard. Si vous avez terminé, vous pouvez partager... Allez-y, on vous écoute.

[Français]

    J'ai appris que le Réseau FADOQ a rejoint les rangs de l'ONU dans le cadre du comité Global Action on Aging, ou GAA, pour l'instauration d'une convention internationale sur les droits des aînés. Votre site Web rapporte que vous y défendez les questions suivantes: la mort dans la dignité; l'égalité entre les femmes et les hommes âgés; les travailleurs d'expérience; le logement; la pauvreté; la maltraitance; et les revenus à la retraite.
    Que pouvez-vous nous dire de votre collaboration avec l'ONU pour contribuer à l'élaboration de la stratégie nationale sur les aînés de notre gouvernement?

[Traduction]

    Soyez bref, s'il vous plaît.

[Français]

    Après cinq ans de travaux, il a été démontré que les aînés ne sont pas bien protégés, où que ce soit dans le monde. Il faut un outil pour les protéger, comme une convention. Ce qui découle d'une convention est une politique pour veiller à ce que les choses soient bien faites. Ce sont deux éléments interreliés.
    Merci.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à la députée Blaney.
    Merci beaucoup, tout le monde, d'être ici aujourd'hui.
    Je veux commencer avec une question très courte. Vous pouvez peut-être y répondre par oui ou non, ou vous abstenir. La question est la suivante: croyez-vous que le gouvernement devrait mettre en oeuvre une stratégie nationale pour les aînés?
    Docteure Cottle, je vous adresse la question en premier.
    Je vais user de faux-fuyants — je sais que c'est une réunion politique — car cela dépendrait de la stratégie, à mon avis.
    Vous vous abstenez donc de répondre.
    Madame Phinney.
    Eh bien, je ne vais pas m'abstenir de répondre. Oui, je crois qu'il devrait y avoir une stratégie nationale.
    Merci beaucoup.
    Pat.
    Cela dépend. Alors j'imagine que c'est une abstention.
    Merci.
    Oui, non, ou vous abstenez-vous, madame Mirza?
    C'est un oui pour moi.
    Monsieur Prud'homme.
    C'est un oui à 100 %.
    Merci beaucoup.
    Pat, dans des discussions antérieures, nous avons entendu des témoins parler des normes nationales relatives aux fournisseurs de soins aux aînés. Pensez-vous que nous devrions avoir un modèle de dotation en personnel minimale, tel que des heures par résident par jour?
    Oui, absolument. Le problème avec des heures minimales, c'est qu'elles se transforment souvent en heures maximales, mais sans un seuil minimal, les gens ne reçoivent pas des soins suffisants.
    Oui. Merci.
    J'ai également entendu parler de la dotation en personnel pour les soins de longue durée. La formation et le manque de personnel qualifié sont les deux principales préoccupations dont on m'a fait part. Pourriez-vous nous dire ce que vous en pensez, nous donner votre opinion sur les conditions de travail en tant que facteur important, et fournir quelques exemples de la façon d'améliorer les conditions de travail et de la façon dont cela changerait les choses?
    Je peux vous parler d'une incidence que cela aurait. Notre projet compte des pays nordiques, dont le Canada, et il y a un certain nombre d'années, nous avons effectué un sondage que nous menons désormais à nouveau auprès des gens qui travaillent dans des établissements de soins de longue durée et qui prodiguent des soins à domicile. Nous les avons entre autres interrogés sur la violence. Les niveaux de violence dont subissent les Canadiens qui fournissent les soins sont beaucoup plus élevés que ceux dans les pays nordiques. La grande différence est le niveau de dotation. Je pense que c'est la condition fondamentale.
    L'autre condition, et elle se rapporte à ce que nous avons entendu d'autres personnes, c'est que la continuité des fournisseurs de soins est absolument essentielle aux soins, au type de soins dont nous a parlé la Dre Cottle, pour ce qui est de connaître la personne. Vous ne pouvez pas faire cela avec des employés occasionnels. Vous avez besoin d'autant d'employés réguliers à temps plein que possible.
    Oui. Vous l'avez très bien dit, à savoir que les soins, les bons soins, sont fonction des conditions de travail des gens. Je pense que c'est très important.
    Vous avez également mentionné votre préoccupation entourant les services de soins à but lucratif à long terme et à domicile. Pourriez-vous m'expliquer vos préoccupations? Et des normes nationales pourraient-elles faire partie d'une solution pour régler une partie de ces préoccupations?
    Une panoplie de recherches ont été effectuées, notamment par Margaret McGregor et Charlene Harrington, qui font toutes les deux partie de notre équipe de recherche, et par des gens ici à Bruyère qui se sont penchés sur les transferts hospitaliers, par exemple. Il est beaucoup plus vraisemblable d'avoir des transferts de maisons de repos à l'hôpital avec des services de soins à but lucratif qu'avec des services de soins sans but lucratif. Le nombre de plaintes vérifiées est beaucoup plus élevé. Les taux de blessures sont plus élevés. Nous avons une foule d'indicateurs qui laissent entendre que la qualité des soins et des conditions de travail est différente.
    C'est une tendance; ce n'est pas exclusif. Certainement, il y a de bons services de soins à but lucratif, tout comme il y a de mauvais services de soins sans but lucratif, mais c'est une tendance importante. De nombreuses recherches révèlent que vous seriez mieux dans un établissement sans but lucratif. En Ontario, la liste d'attente pour les établissements sans but lucratif est beaucoup plus longue que celle pour les établissements à but lucratif car les gens entendent parler de leur réputation et regardent les indicateurs.

  (1630)  

    Pouvez-vous me parler un peu plus de la façon dont une stratégie nationale pour les aînés pourrait promouvoir les soins en tant que relations?
    C'est en partie ce que j'essayais de faire valoir à ce comité, que c'est une question de ressources humaines. Les ressources humaines doivent porter attention aux conditions de travail. Nous comptons de plus en plus sur les gens d'autres pays qui viennent au Canada pour faire ce travail. Il est de plus en plus difficile d'attirer les citoyens canadiens à faire ce travail, en partie parce que c'est un travail instable. C'est précaire. Les soins à domicile sont moins bien payés que les soins en établissements de longue durée, qui sont à leur tour moins bien payés que les soins en milieu hospitalier. La tâche est plus lourde.
    Nous avons besoin d'une stratégie sur la formation, mais il faut aussi les conditions requises pour que les gens puissent utiliser leur formation. C'est ce que nous disent sans cesse les employés qui travaillent dans des établissements de soins de longue durée: ils rentrent à la maison le soir et pleurent car ils voient ce qui aurait dû être fait mais n'ont pas pu le faire. Ils n'avaient tout simplement pas le temps. Alors à moins d'avoir un personnel suffisant, et à moins de revenir à la question précédente, à savoir qu'ils doivent avoir la formation dont ils ont besoin... mais la formation ne vaut rien si l'on n'a pas les capacités d'utiliser les compétences que l'on possède.
    Nous avons entendu dire que l'accès à la formation est une préoccupation importante.
    Absolument.
    La situation n'est pas la même partout au pays, et c'est un facteur aggravant. Je pense que cela nous ramène à la valeur des aînés — il me reste sept secondes, monsieur le président — et à la façon dont nous prenons soin d'eux.
    En fait, il ne vous reste plus temps, mais merci.
    J'ai chronométré mon temps de parole.
    Monsieur Ruimy.
    Merci à vous tous d'être venus aujourd'hui et d'avoir fait des exposés.
    Il y a clairement des défis qui nous attendent. C'est mon premier mandat en tant que député et politicien, et une question m'a traversé l'esprit: qu'avons-nous fait au cours des 20 ou 30 dernières années pour en arriver là?
    Il y a tellement d'orientations différentes à prendre, mais je veux me concentrer sur le point suivant. Lorsque nous discutons des soins, nous avons les nantis et les démunis. Je vais vous raconter deux histoires. L'une est celle de mon père. Nous n'avons pas les moyens de le placer dans un foyer car c'est 5 000 $ par mois. Donc, il est pris en charge par un organisme gouvernemental, qui est épouvantable et tout à fait horrible. J'ai un ami dont le père vit la même situation... et ira vivre dans l'un de ces établissements. Il a cette possibilité car sa famille a les moyens de payer 5 000 $ par mois. Cette installation a une longueur d'avance considérable sur l'établissement gouvernemental.
    Je vois cela partout au pays. Je le vois dans ma circonscription. Nous avons un excellent centre pour personnes en perte d'autonomie, mais il faut payer 5 000 $ par mois. Je ne sais pas où vous trouverez l'argent. Ma préoccupation est que si vous avez les moyens de payer pour ces soins, tant mieux, mais qu'en est-il des personnes qui n'en ont pas les moyens?
    Docteure Cottle et madame Armstrong, vos déclarations sont formidables. Vous parlez de compassion. Vous parlez de soins à domicile. Vous parlez des familles. Vous parlez d'amour. Mais nous devons joindre le geste à la parole.
    Je peux peut-être commencer avec vous, Pat. Quelles sont les mesures que nous devons prendre, à l'heure actuelle, pour aller de l'avant? Elles ne seront pas mises en oeuvre du jour au lendemain — nous en sommes conscients —, mais des mesures doivent être prises.
    D'abord, j'ai visité beaucoup de bons établissements à but non lucratif ou subventionnés par l'État. Les provinces offrent beaucoup de choix. D'ailleurs, un des documents que nous avons produits dans le cadre de notre projet porte sur les frais facturés par les établissements provinciaux et territoriaux et s'ils sont fixés en fonction des ressources. La fourchette, à cet égard, est très large. Si l'on pouvait adopter des normes relativement aux frais, cela serait utile.
    Tous les établissements subventionnés par l'État facturent des frais d'hébergement. Je crois que nous avons quelques exemples de... mais il faut plus de fonds. Comme je le disais plus tôt, les plaintes les plus fréquentes dans les établissements de soins de longue durée concernent le personnel, la nourriture, les vêtements ou la lessive. Ces aspects sont critiques. Dans certaines provinces, les établissements de soins de longue durée disposent de trois ou quatre dollars par personne par jour pour nourrir les patients. Il n'est pas étonnant que la nourriture goûte... Nous avons goûté à la nourriture dans tous les établissements, et je peux vous dire qu'il nous était parfois impossible d'identifier de quoi il s'agissait.
    Oui, nous avons besoin de plus de fonds, mais nous avons surtout besoin de normes et non de plus de règlements. Je sais qu'il est peut-être surprenant de m'entendre dire cela, mais la réaction a toujours été d'accroître la réglementation. Cela signifie que nous devons produire plus de documents, et que nous passons moins de temps à donner des soins aux patients. Les gens doivent donner des soins plutôt que de remplir des formulaires au sujet des soins qu'ils n'ont pas le temps de donner.

  (1635)  

    Docteure Cottle, auriez-vous quelque chose à ajouter?
    Je suis tout à fait d'accord avec tout ce que Pat vient de dire. De plus, lorsque je parle des soins à domicile, je ne dénigre aucunement les soins de longue durée. Ces services sont nécessaires. J'ai donné des soins palliatifs dans des établissements de soins de longue durée et les établissements ne sont pas tous égaux. À l'un d'entre eux, j'ai dû demander au jardinier de me laisser entrer et j'ai parcouru deux étages sans trouver une seule infirmière.
    La situation est critique. Plutôt que d'adopter de nouveaux règlements, le gouvernement devrait adopter des normes nationales. Les employés des établissements doivent avoir le temps d'apprendre à connaître leurs patients. Ils seront plus heureux de venir travailler dans un tel environnement — car, les aînés sont des personnes merveilleuses — si la situation est moins déchirante.
    Un tribunal de la Colombie-Britannique vient de rendre un jugement dans une affaire importante. Maintenant, les écoles doivent compter un certain nombre d'étudiants. Je ne dis pas qu'il faudrait faire la même chose en ce qui a trait aux aînés, mais il faudrait peut-être imposer un certain ratio personnel/patient. Les établissements doivent compter sur un certain nombre d'employés à temps plein afin que les résidents puissent s'habituer au personnel en place. Ce dont ils ont besoin, c'est de bâtir cette relation. Les employés des établissements ne partiront pas s'ils peuvent donner les soins pour lesquels ils ont été formés aux gens qu'ils sont censés aider. Ils ne rentreront pas chez eux en larmes. Ils pourront donner les soins qui font une différence dans la vie des patients.
    Il me reste très peu de temps, docteure Cottle, mais j'aimerais parler brièvement de la démence. Évidemment, il y a des cas moins lourds, mais une fois qu'une personne sombre dans la démence, elle devient un danger pour elle-même et pour les gens qui l'entourent.
    C'est exact.
    Que peut-on faire pour adresser ce genre de situation?
    Très brièvement, s'il vous plaît.
    Ce n'est pas une question à laquelle je ne peux pas répondre brièvement. Toutefois, à mon avis, nous devons regarder ce qui se fait ailleurs. Même le Québec propose d'excellents modèles qui s'appuient sur les soins à domicile. Certains établissements font un meilleur travail que nous qui ne faisons qu'entreposer les gens. Il est très difficile pour les personnes en fin de vie de recevoir des soins à domicile, mais nous devons regarder ce qui se fait ailleurs dans le monde — car il n'est pas nécessaire de réinventer la roue — et adopter les pratiques qui conviennent à notre situation.
    Merci.
    M. Sangha sera notre prochain intervenant. Peut-être partagera-t-il son temps avec M. Ruimy.
    Merci à tous les témoins experts d'avoir accepté de venir nous faire part de leurs observations.
    Monsieur Mirza, nous avons parlé de l'isolation et de l'inclusion, mais également des raisons pour lesquelles les gens deviennent isolés, comme un état de santé critique. Tout le monde parle d'offrir de meilleurs services aux aînés. Nous savons tous qu'un jour, nous aurons atteint cette étape de notre vie. Selon vous, comment devrait-on aborder les questions de l'inclusion sociale, de la participation et de la santé des aînés canadiens vieillissants dans le contexte de la stratégie nationale pour les aînés dont nous parlons?

  (1640)  

    Je vais d'abord rapidement parler de certains des facteurs de risque qui sont ressortis des recherches menées par l'INSA. Nous avons examiné la question de l'isolation sociale dans le contexte des collectivités-amies des aînées. L'une de mes suggestions générales est d'habiliter les communautés afin qu'elles puissent soutenir les aînés qui restent à la maison. Nous savons que les aînés veulent rester chez eux; cela revient souvent. Nous savons qu'ils ne veulent pas habiter dans un établissement de soins de longue durée s'ils peuvent rester dans leur propre communauté et leur propre maison et conserver leur enthousiasme.
    La littérature nous apprend qu'une personne dont l'état de santé est compromis, qui vit seule, qui n'a aucun enfant ou aucun contact avec des membres de la famille, qui n'a pas accès à un moyen de transport, qui a peu de revenus ou qui est handicapée est à risque de se retrouver socialement isolée.
    Les études de recherche menées par l'INSA sur les collectivités-amies des aînés nous ont permis d'apprendre qu'il est très difficile d'identifier les personnes socialement isolées, comme d'autres témoins l'ont souligné également. Elles sont isolées; il est donc difficile de les joindre. Le problème, c'est que, souvent, lorsque l'on réussit à joindre les personnes isolées socialement, elles sont en situation de crise dans une salle d'urgence. L'autre problème, c'est que lorsque l'on identifie une personne socialement isolée, que l'on évalue ses facteurs de risque et que l'on conclut qu'elle est à risque d'être isolée, vers qui peut-on l'orienter dans la communauté? Quels services peut-on lui fournir? Où peut-on l'envoyer?
    Dans le cadre du contexte plus large de l'isolation sociale, un des facteurs de risque que nous avons découverts dans le cadre de nos recherches, c'est que le manque de participation au sein de la communauté constitue un problème majeur. Mais, selon les participants à notre étude, le principal problème, c'est que la participation n'est pas mutuellement enrichissante. Les programmes et les initiatives communautaires doivent être mutuellement enrichissants. Les aînés doivent avoir le sentiment qu'ils contribuent aux programmes et à la communauté, que les programmes ne sont pas juste destinés à eux et qu'ils peuvent y apporter quelque chose. C'est ainsi que nous devrions approcher la programmation.
    Il y a deux groupes. D'abord il y a ceux qui sont gravement malades et qui doivent être traités dans des établissements de soins de longue durée. Puis, il y a les aînés qui peuvent rester chez eux et recevoir parfois des soins des membres de la famille et de spécialistes. Ceux qui prennent soin d'eux à la maison le font par amour. Comme le soulignait la docteure Cottle, nous devons faire preuve de compassion et les communautés aussi doivent faire preuve de compassion, mais, le gouvernement doit également agir.
    Quelles mesures le gouvernement pourrait-il prendre?
    Regardons le portrait global. Les collectivités-amies des aînés et les collectivités qui font preuve de compassion, notamment, ne se créent pas en vase clos. Si nous avons le soutien de ceux qui participent au sein de ces communautés, des soignants qui donnent des soins à leurs êtres chers dans leurs maisons et qui les tiennent loin des hôpitaux et des résidences de soins de longue durée, nous devons leur offrir une certaine souplesse en matière de soutien du revenu. Comme nous l'avons déjà souligné, les soignants doivent souvent choisir leurs êtres chers aux dépens de leur développement et de leur croissance professionnels.
    Il est important que les soignants puissent avoir accès à des horaires de travail flexibles ou ajustés en fonction de la maladie de la personne dont ils prennent soin. Je sais qu'il y a les soins de compassion et les congés de deuil, mais...
    Monsieur Mirza, j'aurais une autre question brève à vous poser.
    Allez-y.
    Votre organisation, l'INSA, vient-elle en aide aux aînés qui sont, disons, de nouveaux immigrants, qui ont de la difficulté à s'exprimer en anglais ou qui ont peu de connaissances en TI ou dans l'utilisation du système? Quel genre de programme recommanderiez-vous au gouvernement d'adopter pour aider ces aînés?
    Il vous reste 30 secondes.
    Je serai très bref.
    J'aimerais soulever trois points en ce qui concerne les communautés d'immigrants. Dans le cadre de ses activités, l'INSA travaille avec deux groupes d'immigrants: ceux qui sont arrivés au Canada il y a longtemps et qui ont vieilli ici; et, les nouveaux immigrants. Les membres de ces deux groupes doivent composer avec des défis très similaires. Dans le contexte de la maltraitance envers les aînés, de la littératie financière et des collectivités-amies des aînés, nous devons offrir de la formation à ces gens et effectuer des recherches pour les aider, mais cela se fait à très petite échelle. Ce que je propose, c'est d'accentuer la formation, mais cela est impossible en l'absence de données et de recherche.

  (1645)  

    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup.
    Madame Wong, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup à tous les témoins d'avoir accepté de venir répondre à nos questions.
    D'abord, j'aimerais mettre ma question en contexte. Je tiens à rappeler au Comité que le gouvernement précédent a fait de la question des aînés une priorité. J'ai été ministre d'État des aînés pendant cinq ans. J'ai également eu l'honneur de travailler avec l'INSA et ensuite, concernant le financement à long terme... et l'INSA a fait de l'excellent travail. Le gouvernement précédent s'est penché sur les questions relatives aux soins et au soutien des travailleurs et à la question de savoir qui prend soin des soignants. Malheureusement, le gouvernement actuel ne semble pas accorder suffisamment de priorité à la question des aînés et des soignants pour poursuivre tout le travail réalisé par notre ministère dévoué.
    Si je ne m'abuse, c'est Danis qui a souligné qu'il faudrait créer un secrétariat pour vraiment se concentrer sur la question des aînés et tout coordonner. Quelqu'un doit également donner des directives au secrétariat. Il est vrai que certaines politiques adoptées dans le cadre de la 41e législature ont survécu à la 42e législature — par exemple, le Programme Nouveaux horizons pour les aînés. Il s'agit de fonds auxquels ont accès tous les groupes communautaires qui luttent contre la maltraitance envers les aînés et qui aident les aînés à ne pas se sentir isolés, notamment.
    Ma question est la suivante: est-ce suffisant pour permettre aux nombreux soignants de redresser la situation financière extrêmement difficile dans laquelle ils se retrouvent? Je sais que nos amis d'en face ont également parlé des aidants familiaux. Selon ce que j'ai pu observer, certains de ces aidants ont également un emploi.
    Monsieur Mirza, j'aimerais avoir votre opinion à ce sujet.
    Je dirais d'abord que le principal groupe de soignants est celui des femmes, et la littérature le confirme. Les recherches menées par l'INSA confirment qu'il s'agit souvent d'une situation très sexospécifique.
    J'aimerais me concentrer un instant sur un groupe avec lequel nous travaillons beaucoup, soit celui des grands-parents qui élèvent leurs petits-enfants. Pendant longtemps, ce groupe est passé inaperçu, mais nous avons effectué deux études de recherche nationales auprès des grands-parents qui élèvent leurs petits-enfants et je peux vous parler de leur situation. Souvent, on ne considère pas ces gens comme étant des soignants, mais bien comme des membres d'une famille qui assument une responsabilité familiale. Il s'agit donc d'une question de dynamique familiale. Leur situation financière est très précaire. La plupart des participants à notre étude, 75 % d'entre eux, en fait, gagnent entre 15 000 $ et 50 000 $, et leurs frais juridiques pour l'année s'élèvent à plus que cela. La situation est très problématique pour ce groupe de soignants.
    Nous devons considérer les soignants en groupes distincts. Les soignants qui s'occupent de patients souffrant de démence ont des responsabilités et des rôles différents. Ceux qui travaillent avec les aînés dans des établissements doivent composer avec des responsabilités et des défis différents. Ceux qui prennent soin de parents qui sont de nouveaux immigrants et qui ne parlent pas bien la langue doivent eux aussi composer avec des défis très différents et jouer des rôles très différents. Nous devons modifier notre perception à l'égard des soignants et commencer à les considérer comme des groupes distincts nécessitant des mesures de soutien très précises et ciblées. À mon avis, le système de soutien actuel n'aide pas les gens autant qu'il le devrait. Il est question ici de populations vulnérables, et, souvent, ces populations se composent de soignantes.
    J'aimerais souligner une dernière chose et je laisserai ensuite la parole à quelqu'un d'autre. Être soignant cause souvent beaucoup de conflits familiaux. Une des choses que nous avons comprise dans le contexte des collectivités-amies des aînés, c'est que, bien souvent, les personnes socialement isolées se retrouvent dans cette situation en raison de problèmes au sein de la dynamique familiale. Les responsabilités de soignant sont souvent la cause de ces problèmes. En apportant un soutien aux soignants, nous pourrons habiliter et renforcer les communautés et aussi offrir de meilleurs soins à nos aînés.

  (1650)  

    Docteure Cottle, concitoyenne britanno-colombienne, j'aimerais vous poser la même question.
    Si nous allouons suffisamment de fonds aux soignants?
    Pour aider les membres de la famille qui travaillent tout en prenant soin de leurs parents ou de leurs grands-parents.
    Il s'agit d'une question très importante. Une des choses que le gouvernement fédéral pourrait faire serait d'offrir des incitatifs fiscaux à ceux qui donnent ce genre de soins.
    Notre premier témoin a parlé des programmes communautaires non officiels et du soutien que ceux-ci peuvent apporter. Investir dans ce genre de programmes nous permettrait d'en avoir plus pour notre argent. À mon avis, il faut la participation de l'ensemble de la société pour donner des soins aux aînés, car, comme je l'ai dit dans mon mémoire, ce n'est pas « comme si » ils font partie de la famille humaine, ils « font » partie de la famille humaine. Nous devons tous considérer qu'il s'agit de notre responsabilité de prendre soin l'un de l'autre, et le financement de ces programmes locaux sera très utile en ce sens. Les programmes offerts à Weyburn, en Saskatchewan, seront très différents de ceux offerts dans l'ouest de Vancouver, car les besoins sont différents. Du point de vue des aînés, nous devons soutenir ces groupes communautaires qui, grâce à beaucoup de bénévoles, nous permettent d'en avoir plus pour notre argent.
    Merci beaucoup pour ces commentaires.
    Madame Fortier, vous avez la parole pour six minutes.

[Français]

    Merci beaucoup de vos présentations très intéressantes. Elles contenaient beaucoup d'information.
    J'ai plusieurs questions, mais je veux surtout essayer de bien comprendre.
    Je vais commencer par M. Prud'homme.
    Votre expertise sur le sujet est assez exceptionnelle. S'il y avait une meilleure pratique, ou un modèle, que nous devrions examiner de plus près et dans lequel investir, ou une stratégie sur laquelle, nous, comme gouvernement fédéral, pourrions mettre l'accent, que nous suggéreriez-vous aujourd'hui?
    C'est une question à un million de dollars.
    Je dirais qu'il faudrait étudier la situation dans plusieurs endroits dans le monde. Dans le cas des pays nordiques, le soutien à domicile forme un tout. La manière dont ils s'en occupent, le budget qu'ils accordent et les différentes méthodes qu'ils utilisent sont déterminés en partenariat avec les gouvernements ou les proches aidants, mais aussi avec les entreprises d'économie sociale et la communauté. Un proche aidant ne peut pas tout faire tout seul, et le gouvernement ne le peut pas non plus.
    Il y a d'autres exemples ailleurs dans le monde. En ce qui touche la participation sociale des communautés, il y a des endroits où, en effet, des résidences sont construites où il y a des garderies qui côtoient des logements pour les aînés, c'est-à-dire des maisons intergénérationnelles, mais de plus grande taille. On parle ici d'inclusion, soit de garder les gens actifs. Lorsqu'il est question d'isolement, comme l'a mentionné quelqu'un, on a beau maintenir les aînés à domicile, mais si dans les les municipalités amies des aînés, ou MADA, on n'a pas les transports en commun ou communautaires, si on n'a pas les services que les aînés peuvent utiliser et qu'on n'en tient pas compte quand on effectue des changements, par exemple si les passages pour piétons ne sont pas assez longs, alors ils vont s'isoler, même s'il y a de l'aide à domicile.
    Cette question est vraiment complexe.
    Merci.

[Traduction]

    Madame Armstrong, à la suite de votre exposé, j'ai tenté de trouver une solution ou une pratique exemplaire qui, selon vous, mériterait d'être étudiée. Si vous pouviez nous fournir plus de détails à ce sujet, nous vous en serions reconnaissants.
    Dans le cadre de nos recherches actuelles, nous n'utilisons plus le qualificatif « exemplaire ». Nous utilisons plutôt le qualificatif « prometteuse ».
    D'accord.
    Pour revenir à ce que disait Raza, je crois que tout dépend de la population. Comme nous l'avons souligné plus tôt, si nous adoptons une stratégie nationale pour les aînés, celle-ci doit correspondre à ce que l'on retrouve dans la Loi canadienne sur la santé et établir des normes plutôt que de normaliser. À mon avis, il y a une grande différence entre les deux. Si nous établissons les principes que nous souhaitons défendre concernant les aînés, y compris s'assurer que toute stratégie est analysée afin d'en définir l'impact sur les aînés, je crois qu'il faudra établir des principes plus généraux plutôt que de dire qu'il n'y a qu'une seule bonne façon d'aborder la question. Cette approche s'est montrée efficace dans les hôpitaux et avec les médecins.

  (1655)  

    Avez-vous déjà vu cette approche mise en oeuvre quelque part dans le monde, dans le cadre de vos recherches, peut-être?
    Dans le cadre de mon projet de recherche actuel, qui dure depuis huit ans maintenant, nous étudions l'Allemagne, la Suède, la Norvège, le Royaume-Uni, les États-Unis — mais n'allez pas là, particulièrement au Texas, où nous sommes allés — et le Canada. Il est sans équivoque que nous avons observé des pratiques très intéressantes en Allemagne, en Suède et en Norvège, en particulier. Or, ce n'est pas la réglementation qui fait la différence, mais un financement adéquat, du personnel adéquat et la confiance. Ce n'est pas le fruit d'une réglementation et d'une surveillance constante.
    Pour revenir à ce que je disais sur la réglementation, une trop grande partie de notre solution consiste à faire vérification par-dessus vérification plutôt qu'à comprendre comment nous pouvons améliorer la situation. Ce serait l'un des principes que j'inscrirais dans des normes nationales sur la qualité de vie des aînés.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Monsieur Prud'homme, votre organisation étant quand même active partout en province, j'aimerais aborder le sujet des régions rurales.
    Comment pouvons-nous appuyer des programmes ou des initiatives plus précises dans les régions rurales?
    Rapidement, je vous dirais que c'est par la connexion, c'est-à-dire aider les aînés à être liés au reste du monde puisque — nous le savons tous — tout se fait maintenant par Internet.
    En matière de transport, le permis de conduire et l'automobile sont nécessaires en région parce qu'il n'y a pas de services de transport comme dans les grandes villes. Les gens vont donc s'isoler. En ce qui concerne le transport communautaire, il y a différentes façons de faire. Il y a surtout la question des services. Quand on coupe les services dans un village, les jeunes s'en vont, les aînés restent et ils finissent par mourir à petit feu.

[Traduction]

    Monsieur Doherty, vous avez cinq minutes.
    Merci.
    Nous avons parfois tendance, au sein des comités, à faire preuve de partisanerie et à dire: « Voici ce que nous avons fait; voici ce qu'ils n'ont pas fait. »
    Je vous remercie vraiment d'être parmi nous aujourd'hui. Ce n'est pas le comité auquel j'ai l'habitude de siéger, mais je pense pouvoir parler d'expérience, parce que j'ai beaucoup travaillé dans ma propre collectivité avec un refuge pour femmes. Je sais que l'un des profils démographiques dominants des femmes qui utilisent notre refuge depuis quelques années, c'est celui de la veuve âgée qui finit par se retrouver au refuge.
    Je ferai plus une déclaration que de poser une question, si les membres du Comité le veulent bien. J'ai beaucoup apprécié les témoignages d'aujourd'hui, tant en personne que par vidéoconférence.
    J'aimerais vous parler un peu de ma famille. Ma mère a travaillé très longtemps en centre de soins de longue durée et en résidence. Elle fait tout juste cinq pieds et parlait beaucoup de la violence qu'elle subissait de certains de ses patients. Elle déplorait aussi se retrouver parfois seule à devoir contenir une personne beaucoup plus corpulente qu'elle. Un jour, elle s'est blessée au dos après l'accès de violence d'un patient qui ne voulait pas lui faire du mal, mais qui ne savait pas ce qu'il faisait à ce moment-là. Elle en a parlé ensuite, et elle en parle encore; elle dit qu'elle souhaiterait vraiment pouvoir encore faire ce travail, mais qu'elle a dû arrêter, faute de ressources, en Alberta comme en Colombie-Britannique, où elle a terminé sa carrière. Elle disait également qu'il n'y avait pas de mécanisme de levage dans les chambres et qu'elle devait parfois essayer de déplacer physiquement un patient bien plus imposant qu'elle, et qu'elle en gardait des séquelles physiques.
    Si elle était ici aujourd'hui, elle vous parlerait aussi avec beaucoup d'émotion d'une chose qui n'a pas encore été mentionnée aujourd'hui. Elle vous parlerait de son expérience quand elle s'est rendue dans une communauté autochtone pour aider une personne âgée autochtone.
    Je pense que c'est Mme Phinney ou Dre Cottle qui a mentionné que les soins à domicile ne sont pas toujours la meilleure option pour nos personnes âgées, et ce n'est pas nécessairement par mauvaise intention, mais parce que les soignants n'arrivent pas à s'occuper des aînés de la façon dont ils devraient vraiment le faire.
    Je me rappelle une fois où ma mère m'a raconté être allée s'occuper d'un homme, en particulier. C'était un lundi. La dernière fois qu'elle l'avait vu, c'était le vendredi. Elle a dit avoir eu le coeur brisé en voyant ce monsieur assis au même endroit que le vendredi. Il n'avait pas bougé. Il portait toujours les vêtements, sous-vêtements et produits sanitaires qu'elle lui avait enfilés le vendredi. Ma mère avait le coeur brisé en voyant sa peau irritée, sa douleur et toute la frustration qu'il ressentait pour avoir été laissé là, à la fenêtre.
    J'aimerais aussi vous parler de mon frère, qui est vraiment mon héros. Il s'est battu à deux reprises contre le cancer. Il travaille dans une résidence de soins de longue durée pour personnes âgées dans l'Okanagan; il travaille pour son syndicat, où il représente les travailleurs de ce genre d'établissement dans l'Okanagan. Il me raconte toutes les souffrances des soignants, qui voudraient tellement faire mieux. Ils ont choisi cette profession parce qu'ils veulent aider.
    Monsieur le président, vous pouvez me le dire si je prends trop de temps. C'est plus un beau discours qu'autre chose.

  (1700)  

    Comme je l'ai mentionné à ma collègue, je félicite sincèrement tous les membres de ce groupe. Je ne crois pas que ce soit le bon moment pour la partisanerie. Je pense qu'il faut progresser. Je suis vraiment convaincu, pour en avoir parlé avec des membres de la profession, qu'ils veulent aider, mais qu'ils n'en ont pas les moyens. On ne leur donne pas les ressources nécessaires. Bien trop souvent, ils doivent faire du temps supplémentaire. Ils sont fatigués. Ils subissent du stress émotionnel. Ils s'occupent de ces personnes et les voient souffrir parce qu'ils n'ont pas assez de ressources pour bien s'en occuper.
    Je vous félicite de cette étude, mais je vous mets au défi de trouver des solutions gérables qui auront une incidence concrète, parce que nous en avons bien besoin. En Nouvelle-Écosse, en Colombie-Britannique ou ailleurs, nos aînés souffrent. Tous les gouvernements ont de bonnes intentions, mais nous pouvons faire mieux et nous devons faire mieux. Je peux vous le dire à la lumière des exemples que je connais trop bien.
    J'aimerais m'entretenir avec Dre Cottle et Mme Armstrong, s'il me reste une seconde.
    J'ai bien peur que non. Je vous ai laissé continuer un peu plus longtemps...
    D'accord, je serai très bref.
    J'ai aussi une grand-mère en résidence, une résidence privée, et elle vous dira qu'elle n'a plus accès qu'à du lait écrémé, malgré qu'elle essaie de prendre du poids. C'est très inquiétant.
    Je vous félicite tous et toutes de votre présence ici aujourd'hui et je vous remercie, chers témoins, parce qu'il est inspirant de vous voir vous battre pour cette cause. Merci.
    C'est très bien dit, monsieur.
    Je vais donner brièvement la parole à Rachel Blaney.
    Vous avez trois minutes.
    Merci.
    J'aimerais m'adresser à vous, encore une fois, Pat. Nous avons parlé très brièvement de la réalité des collectivités rurales et éloignées. Je peux vous dire que dans ma circonscription, il y a beaucoup de gens qui quittent les grands centres urbains après leur retraite. Ils s'achètent une belle maison et rayonnent de bonheur, mais plus ils vieillissent, plus ils se trouvent isolés, dans des maisons bien trop grandes. Je m'interroge sur les solutions qui existent pour offrir des soins gériatriques dans ces collectivités; je me demande s'il y a des solutions. En avez-vous observé dans d'autres pays?
    Je pense que l'une des choses que l'on commence à faire ici, au Canada, c'est de fusionner les hôpitaux, les soins de longue durée et les soins à domicile, afin de créer une communauté autour de ces services. Plutôt que de fermer tous les petits hôpitaux et les petits centres dans les petites collectivités, nous pouvons regrouper tous les services pour assurer une offre commune de services complets.
    J'ai grandi dans une minuscule ville du Nord de l'Ontario, où ce modèle fonctionne. Il fonctionne dans certains pays nordiques. Nous nous sommes rendus dans le Nord de la Suède — nous y avons passé un peu plus d'une semaine avec une équipe de 14 personnes pour observer les services —, et la résidence que nous avons vue là-bas fait physiquement partie du centre récréatif de la ville, où l'on trouve une piscine et un programme de loisirs. C'est un seul et même grand centre. Le cinéma s'y trouve aussi. Je pense que le regroupement des services pourrait être la solution dans certaines petites villes rurales, pour que les gens puissent y rester.
    L'autre problème, en région rurale, qui a déjà été mentionné, c'est celui des transports. Bien sûr, il est amplifié en région rurale, et nous devons nous pencher sur la question aussi.
    Cela dit, je pense que la première étape serait de combiner les services et de conserver nos hôpitaux. Une personne âgée ne peut pas vivre à une centaine de kilomètres d'un hôpital, particulièrement au Canada, compte tenu de notre climat, donc ce genre de services doit être accessible sur place. Nous pourrions les offrir en les regroupant plutôt qu'en les éliminant.

  (1705)  

    La dernière chose que vous nous avez dite dans votre exposé, c'est que nous devons faire quelque chose avant qu'il ne soit trop tard. Pouvez-vous me dire ce que cela signifie pour vous?
    Eh bien, je pense qu'il faut tout de suite commencer à affecter des ressources aux services de santé regroupés qui couvrent tout le spectre des soins et qui se fondent sur des principes et des normes adaptés aux besoins des personnes âgées.
    Si je peux dire une dernière chose, j'aimerais vous parler de formation sur l'utilisation d'un iPod. J'ai engagé un adolescent pour m'enseigner à utiliser mes appareils électroniques.
    Des voix: Oh, oh!
    C'est très utile.
    C'est probablement le meilleur conseil que je peux vous donner aujourd'hui.
    Des voix: Oh, oh!
    Merci.
    Je remercie infiniment toutes les personnes présentes ici aujourd'hui.
    Je m'excuse des difficultés techniques que nous avons éprouvées un peu plus tôt, mais je suis content que nous ayons pu entendre tout le monde clairement. Je vous suis reconnaissant de votre contribution à chacun à notre étude.
    Nous prendrons une petite pause d'une minute, littéralement, peut-être deux, après quoi nous devrons examiner les travaux du Comité, donc je vous demanderais de vous déplacer assez rapidement.
    Encore une fois, je vous remercie sincèrement du temps que vous avez passé avec nous aujourd'hui.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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