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HESA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la santé


NUMÉRO 068 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le vendredi 15 septembre 2017

[Enregistrement électronique]

  (0835)  

[Traduction]

    La séance est ouverte. Nous tenons aujourd'hui la 68e réunion du Comité permanent de la santé. Nous étudions le projet de loi C-45 et notre groupe de témoins se centrera sur les produits comestibles.
    Tandis que j'ai la parole, j'aimerais remercier le Comité. Hier, nous avons siégé pendant 12 heures consécutives. Tout le monde est resté concentré, a gardé son intérêt et a bien écouté les interventions. Cette semaine, tous les membres du Comité ont fait un excellent travail. Vous avez posé les bonnes questions et avez soulevé de bons points. Je suis très heureux et fier de faire partie de ce comité. C'est ce que je tenais à vous dire ce matin. J'y pensais hier soir. Très souvent, dans les comités — et j'ai siégé à de nombreux comités —, les gens ne sont pas concentrés et perdent leur intérêt à un certain point, mais ce n'est jamais arrivé avec vous, même si nous avons fait tout un marathon. Je vous remercie tous. Nous avons eu toute une semaine, et elle n'est pas finie. Nous parlons des produits comestibles ce matin.
    Nous recevons trois premiers témoins à ce sujet. D'abord, nous recevons Ryan Vandrey, du Maryland, par vidéoconférence. Il est professeur agrégé à l'Université Johns Hopkins. Nous recevons également le Dr Daniel Vigil, qui est gestionnaire de la surveillance et de la recherche sur les effets du cannabis sur la santé pour le département de la Santé publique et de l'Environnement du Colorado. Enfin, nous recevons Dana Larsen, qui est directeur de Sensibile BC.
    Nous demandons à chacun de faire une déclaration préliminaire d'au plus 10 minutes. Nous vous poserons des questions ensuite. Nous allons commencer par M. Vandrey. Vous disposez de 10 minutes, monsieur.
    Je ne parlerai probablement pas pendant 10 minutes; je serai bref. Je suis chercheur sur les cannabinoïdes humains à l'Université Johns Hopkins. Je fais de la recherche sur le cannabis depuis maintenant 17 ans. Mes recherches récentes se centraient sur l'évaluation de l'effet des doses de cannabis et sur les diverses voies d'administration, notamment les produits oraux ou les produits comestibles. Nous étudions les effets pharmacocinétiques et pharmacodynamiques du cannabis associés à cette voie d'administration. Nous avons aussi réalisé des essais sur certains produits afin de déterminer l'exactitude des étiquettes des produits comestibles vendus dans les dispensaires des États-Unis.
    Très bien, merci beaucoup. Est-ce que c'est tout pour votre déclaration préliminaire?
    C'est tout.
    Nous aurons des questions pour vous; ne vous inquiétez pas.
    Nous passons maintenant à Daniel Vigil, gestionnaire de la surveillance et de la recherche sur les effets du cannabis sur la santé au département de la Santé publique et de l'Environnement du Colorado. Nous vous remercions de votre présence ici aujourd'hui.
    Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité. Ma déclaration préliminaire sera brève. Je serai heureux de répondre à vos questions ensuite. Je ne dirai que quelques mots.
    Les préoccupations relatives aux produits de cannabis comestibles sont quelque peu différentes de celles relatives aux formes fumables de marijuana, et nous croyons qu'il est important de les aborder dans les politiques. On pense d'abord à l'exposition accidentelle à la drogue, qu'il s'agisse de l'exposition des enfants ou des personnes qui ne savent pas que les produits qui se trouvent devant elles peuvent contenir du THC. Ensuite, on pense à la surconsommation, surtout par les consommateurs naïfs qui ne connaissent pas les effets à retardement des produits comestibles. Enfin, on pense aux diverses possibilités de contamination par des agents microbiens, des solvants résiduels ou des pesticides qui pourraient se retrouver sous forme concentrée dans les produits comestibles.
    En ce qui a trait à l'exposition accidentelle, à l'emballage et... Il est très important de veiller à ce que les produits ne soient pas attrayants pour les enfants et à ce que l'emballage soit à l'épreuve des enfants. L'étiquetage du produit et de son emballage est aussi très important pour que les gens comprennent qu'il ne s'agit pas par exemple d'une barre de chocolat normale, qu'il y a quelque chose de différent. De plus, il est très important de mettre en place une bonne réglementation pour les laboratoires en raison des diverses possibilités de contamination. Je peux vous transmettre de nombreux renseignements et données à cet égard, et je serai heureux de répondre à vos questions.

  (0840)  

    Merci beaucoup.
    Ce sont les déclarations préliminaires les plus courtes que nous ayons entendues.
    Nous allons maintenant entendre M. Larsen, de Sensible BC. Allez-y, monsieur.
    Merci beaucoup. Je vais prendre les 10 minutes qui me sont accordées.
    Je vous remercie de me recevoir. Je milite pour le cannabis depuis que je suis adulte. J'ai un dispensaire de cannabis et j'ai probablement vendu plus de cannabis que tous les témoins réunis.
    Je suis heureux d'être ici aujourd'hui, mais je doute que le Comité agisse en fonction des témoignages qu'il entendra. Je dis cela parce que je travaille dans le domaine depuis longtemps. Lorsque j'en étais à mes premières années de militantisme dans les années 1990, le gouvernement avait présenté la Loi réglementant certaines drogues et autres substances pour remplacer la Loi sur les stupéfiants. À l'époque, on avait tenu de nombreuses audiences et entendu de nombreux témoins, et une vingtaine de groupes avaient fait valoir que l'interdiction était un échec, qu'il fallait légaliser les drogues et voir les choses différemment. Les seuls groupes qui appuyaient la loi étaient l'Association canadienne des chefs de police et l'Association pharmaceutique canadienne. Tous les autres intervenants étaient contre cette loi.
    Le gouvernement avait dit qu'il adopterait la loi et qu'il procéderait ensuite à un examen des politiques en matière de drogues. Cela ne s'est jamais fait. Le Sénat du Canada a décidé d'y voir et a publié un rapport exhaustif et détaillé sur le cannabis en 2002: un rapport en cinq volumes qui demeure probablement l'une des meilleures analyses du cannabis et des politiques connexes à ce jour. Ce rapport a lui aussi été complètement ignoré. J'encourage les membres du Comité à lire ce rapport du Sénat de 2002, parce que c'est un document d'une grande qualité. Il recommande la légalisation du cannabis pour tous les Canadiens de plus de 16 ans. On parle ici de sénateurs conservateurs, pas d'une bande de « fumeux de pot », et ils recommandaient la légalisation du cannabis pour toutes les personnes de plus de 16 ans. On a ignoré leur recommandation.
    L'année de ma naissance, en 1971, la Commission Le Dain avait recommandé la décriminalisation de la possession de cannabis et de sa culture, et de viser la légalisation. On a aussi ignoré cette recommandation. Toute ma vie, j'ai vu le gouvernement entendre les témoins, faire des recherches ou des études et parler aux gens pour ensuite ignorer les résultats de tout cela. J'espère que ce ne sera pas le cas ici aujourd'hui.
    La loi sur le cannabis est une piètre mesure législative. Elle comporte de nombreuses lacunes. Elle ne décriminalise même pas le joint que j'ai dans ma poche, que je vais fumer après la présente réunion. L'idée voulant qu'il y ait du cannabis licite et du cannabis illicite et que la police tente de désigner le bon et le mauvais cannabis ne fonctionnera tout simplement pas.
    Dans certaines villes comme Vancouver, où le cannabis est décriminalisé, les politiques ne changeront pas beaucoup. Toutefois, dans les régions nordiques, je suis prêt à parier que les policiers vont cibler les collectivités des Premières Nations ou les pauvres qui sont démonisés et sont les plus touchés par l'interdiction du cannabis, qu'ils vont leur demander d'où vient leur cannabis, leur dire qu'il est illégal et les accuser de possession. C'est absurde, puisqu'on parle de décriminaliser toutes les drogues, mais que la loi ne décriminalise même pas la possession de cannabis.
    On m'a demandé de parler des produits comestibles aujourd'hui, mais à mon avis, cette catégorie est trop restrictive. On devrait aussi parler du hachisch, des teintures, des capsules, des extraits, des gouttes, des suppositoires et de toutes les autres façons d'utiliser le cannabis. Dans mon dispensaire, nous vendons des cocottes de marijuana et de nombreux autres produits, et les cocottes représentent moins de la moitié de tous nos produits. Lorsque j'entends dire qu'en Ontario, on ouvrira des boutiques de vente légale juste à côté des dispensaires pour les mettre en faillite, je trouve que c'est une très bonne idée, car cela n'aura aucune incidence sur ma clientèle. En effet, 95 % de mes clients continueront d'acheter chez moi quand même. Ces magasins n'offriront tout simplement pas le même éventail de produits, qui sont disponibles et nécessaires.
    En tant que militant qui souhaite qu'on améliore les lois sur les drogues au Canada, je n'aime pas cela du tout, mais en tant que propriétaire d'entreprise, cela fait bien mon affaire. Les dispensaires feront de bonnes affaires pour les nombreuses années à venir. Les dispensaires ne fermeront pas et le marché noir ne sera pas touché.
    Le procès d'Owen Smith a été une affaire judiciaire assez importante. Kirk Tousaw, qui a témoigné devant vous hier, était l'avocat principal dans cette affaire. Les tribunaux ont déterminé que les patients médicaux avaient le droit d'obtenir non seulement des cocottes fumables, mais aussi du cannabis sous toutes ses autres formes. Santé Canada a donc permis aux producteurs autorisés de produire des extraits de cannabis dont la concentration en THC ne dépasse pas les 3 %, ce qui ne tient aucunement compte de la lettre et de l'esprit de la décision du tribunal. Ce n'est pas surprenant, puisque le gouvernement et Santé Canada agissent de la sorte depuis des années. Chaque fois qu'une décision du tribunal vient casser... vise à accroître l'accès au cannabis, le gouvernement et Santé Canada interprètent cette décision de la manière la plus restrictive possible.
    Par conséquent, le gouvernement a perdu le contrôle du cannabis, et ce, depuis de nombreuses années. Nous avons systématiquement débouté les lois du Canada sur le cannabis au cours des 20 dernières années, à commencer par les lois contre les bongs, les vaporisateurs et les pipes, qui sont toujours consignés à l'article 462.2. On n'a jamais éliminé cette loi, mais presque toutes les villes du pays comptent de nombreuses boutiques qui vendent des bongs. Nous avons tout simplement défié la loi dans les années 1990 et ouvert des boutiques. Il y a eu des descentes et des conflits, comme il y en a aujourd'hui dans les dispensaires. Après un certain temps, la police et les collectivités ont compris que la guerre contre les bongs était un échec, que personne ne voulait qu'on s'y attarde, et ils ont abandonné. Ainsi, nous avons légalisé les bongs et les pipes, les banques de semences et les salons de vapotage, et sommes sur le point de faire de même pour les dispensaires. C'est déjà fait dans de nombreuses villes.

  (0845)  

    Nous n'allons donc pas respecter ces lois. Dans une large mesure, vous créez des lois qui ne sont tout simplement pas exécutables et vous confiez une tâche impossible aux policiers.
    Je fais actuellement face à des accusations parce que j'ai donné plus de 7 millions de semences de cannabis viables au cours des 2 dernières années, dans 22 villes du Canada.
    J'ai été accusé en 2016 à Calgary à cet effet. On a prévu un procès de trois jours à la fin d'octobre... trois jours devant les tribunaux dans notre système judiciaire. Donc, des meurtriers et des violeurs sont relâchés parce que les tribunaux sont surchargés, mais on prendra trois jours pour tenir mon procès, parce que j'ai donné des semences de cannabis à faible teneur en THC aux personnes qui souhaitaient en avoir. Je crois qu'on abandonnera ces accusations avant le début du procès, parce que ce serait une grande perte de temps, mais le fait est que nos tribunaux ne peuvent supporter la grande campagne de désobéissance civile lancée par les Canadiens. Ils n'y parviendront tout simplement pas.
    Je tiens à rappeler au Comité qu'au départ, l'interdiction du cannabis dans le cadre de la lutte antidrogue n'émanait pas de bonnes intentions comme la protection de la santé publique ou la protection des enfants. La lutte contre la drogue — contre l'opium et contre le cannabis — se voulait au départ un effort raciste et ignorant dans le but d'éliminer les Chinois et d'autres communautés raciales du Canada. C'est ainsi que la lutte a commencé; cela ne fait aucun doute. À aucun moment entre l'adoption de la Loi sur l'opium en 1908 ou l'interdiction du cannabis dans les années 1920 et aujourd'hui nous n'avons changé ces lois racistes et ignorantes pour en faire des lois qui soient bien intentionnées et bonnes pour nos collectivités. Ces lois étaient mauvaises au départ et continuent d'être terribles aujourd'hui.
    La lutte contre la drogue est en réalité une lutte contre les plantes, et le cannabis est peut-être la meilleure plante au monde. Aucune autre plante n'offre de telles valeurs nutritionnelles, industrielles, sociales et médicinales.
    De plus, dans la lutte contre la drogue et contre les plantes, on oublie que la feuille de coca, le pavot à opium, le champignon à psilocybine et le cactus peyotl sont aussi d'excellentes plantes utilisées à des fins sociales et culturelles depuis des milliers d'années. La lutte contre la drogue est en fait une lutte contre ces plantes et contre la nature; il est temps que cela cesse.
    Voulez-vous savoir qui est responsable de la crise du fentanyl au Canada? C'est vous. C'est notre parlement, qui a adopté ces lois qui interdisent un accès raisonnable aux opiacés. La crise du fentanyl est entièrement la faute des politiques canadiennes.
    Nous n'avons pas un problème de drogue au Canada; nous avons un problème d'interdiction. Lorsqu'on cessera d'interdire les drogues, la grande majorité des problèmes connexes disparaîtront.
    En fait, le cannabis n'est pas un problème; il fait partie de la solution. Vancouver compte deux sites qui offrent des médicaments à base de cannabis gratuitement ou à faible coût aux consommateurs d'opiacés aux termes d'un projet de substitution. Les données probantes des États-Unis montrent que les États qui offrent un accès aux dispensaires comptent moins de consommateurs d'opiacés et de décès attribuables à une surdose d'opiacés que les États qui n'offrent pas un tel accès.
    D'après mon expérience personnelle et mes recherches, les dispensaires de cannabis sauvent des vies tous les jours au Canada. Les clients de mon dispensaire me disent que je les ai aidés à cesser de consommer des opiacés et à améliorer leur santé; que je leur ai sauvé la vie. Cela m'arrive constamment.
    C'est un peu la même chose pour l'alcool. De nombreuses personnes arrivent à cesser de consommer de l'alcool en consommant du cannabis. Le cannabis est donc un substitut à d'autres drogues plus dangereuses de nombreuses façons.
    Il est facile de réglementer les produits comestibles et les extraits. On n'a qu'à faire des emballages à l'épreuve des enfants, à étiqueter les produits de manière adéquate et à vérifier l'exactitude des doses. C'est facile à faire; ce n'est pas compliqué du tout. De plus, il faudrait retirer le CBD de l'annexe et de la LRCDAS. Le CDB est très avantageux. Il n'y a aucune psychoactivité; c'est un médicament très sécuritaire. Il ne fait aucun doute que le CBD doit être retiré de la LRCDAS et doit être permis.
    Le fait est qu'on peut acheter suffisamment d'alcool, de tabac ou même d'aspirine... On peut acheter de l'aspirine à tout âge au magasin du coin, mais une bouteille d'aspirine peut vous tuer. L'idée qu'on traite le cannabis de manière aussi sévère et restrictive alors que d'autres substances sont permises est complètement insensée. Cela montre la défaillance de la loi.
    J'exhorte le Comité à penser différemment; à accepter qu'il s'agit d'une plante saine et que l'interdiction n'est pas une bonne chose; à cesser de laisser cette industrie au marché noir, comme vous le faites maintenant depuis de nombreuses décennies, et à reconnaître que le problème va au-delà de l'interdiction du cannabis. La lutte contre la drogue en soi est un échec total. Il est temps de légaliser et de réglementer les drogues, et de mettre en place des politiques fondées sur la science. On fait des recherches sur ce sujet depuis plus de 40 ans maintenant. On sait que la lutte antidrogue est un échec. On sait que le cannabis est essentiellement inoffensif et qu'il est certainement moins nocif que l'alcool ou le tabac que l'on consomme quotidiennement.
    Voilà ce que j'avais à dire. Je vous remercie de m'avoir invité. J'espère que le Comité écoutera bien les témoignages et qu'il apportera des modifications importantes à la loi. Merci.

  (0850)  

    Merci beaucoup. Nous apprécions votre enthousiasme.
    Nous passons maintenant à la période de questions. Nous allons commencer par M. Ayoub. Son intervention se fera probablement en français. Au besoin, vous pouvez écouter la traduction simultanée.
    Monsieur Ayoub, vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.

[Français]

     Je veux commencer par vous remercier de vos bons commentaires. Hier, ce fut effectivement une longue journée. J'étais un peu inquiet de ne pas voir mon collègue d'en face assister à la fin de la séance, lui qui demande toujours plus de temps pour questionner les témoins. Malheureusement, il a manqué une bonne partie de la rencontre d'hier. Je suis content de voir qu'il est aujourd'hui en pleine forme et qu'il pourra poser de bonnes questions.
    C'est intéressant d'entendre l'ensemble des témoignages. Ils peuvent parfois être bien différents, même si la portée et le but de nos actions relativement à la décriminalisation et à la légalisation du cannabis sont les mêmes, et le point le plus important est la protection de la jeunesse. Il faut s'assurer que la légalisation de la marijuana sera bien faite et éviter que les jeunes consomment du cannabis dont ils ne connaissent pas la provenance ni la qualité. Par contre, on sait d'où provient le cannabis que les gens consomment présentement: il provient du crime organisé.
    Aujourd'hui, on parle des produits dérivés et des produits comestibles. C'est un aspect important, puisque la jeunesse peut en subir les conséquences de façon majeure. J'aimerais connaître l'opinion du représentant de l'État du Colorado. J'aimerais en savoir un peu plus sur son expérience concernant l'étiquetage, l'emballage et le marketing. J'aimerais particulièrement savoir si les produits comestibles font augmenter le nombre de consommateurs de produits contenant de la marijuana, étant donné que ces produits sont plus facilement accessibles et qu'on peut les consommer autrement qu'en les fumant. Aujourd'hui, la plupart des gens sont conscients du fait que la fumée est néfaste. Il existe donc déjà une restriction. Cependant, il n'y a pas de restriction quant au fait de manger un muffin au cannabis; plusieurs personnes mangent des muffins le matin. C'est la même chose pour les bonbons.
    Je souhaite comprendre la vision de M. Vigil à ce sujet. M. Vandrey peut aussi répondre à ma question.

[Traduction]

    Allez-y.
    Avez-vous dit qu'on pouvait avoir recours aux services d'interprétation?
    L'interprétation se fait de façon simultanée. Je croyais que vous étiez bilingue et que vous m'écoutiez.
    Pourriez-vous m'aider avec cela?
    Je croyais que M. Vigil avait accès à la traduction simultanée, mais il n'avait pas son appareil auditif.
    Vous avez parlé de la consommation accrue chez les jeunes. Comme il est plus difficile de se cacher quelque chose à fumer que quelque chose à manger, les gens pourraient manger plus de cannabis et avoir plus de problèmes. Je crois que c'était la question.
    Monsieur Vandrey, avez-vous compris ma question? Nous pourrions peut-être commencer en attendant.
    Oui, j'ai écouté les interprètes. Vous soulevez des points très importants. Je crois que les essais et le contrôle de la qualité sont d'une importance capitale pour tous les types de lois.
    Il faut penser à la façon dont on produira et on offrira les produits, à la forme qu'ils prendront. Est-ce que ce seront des muffins, des brownies, des oursons en gélatine, des boissons gazeuses? À l'heure actuelle aux États-Unis — au Colorado —, le nombre de produits consommables est infini. L'attrait pour les enfants est certainement important et je crois qu'il faut absolument en tenir compte dans la loi et dans toutes les mesures qui seront prises.
    Il faut aussi penser à la façon de tester les produits. Si une méthode fonctionne pour tester les brownies, pouvons-nous l'utiliser pour les oursons en gélatine et obtenir des résultats précis? Nous n'avons pas la réponse à cette question pour le moment. Je crois qu'il faut valider les méthodes d'essai de façon scientifique pour les divers produits.
    L'emballage est également très important en vue de prévenir la consommation non intentionnelle. Nombre des problèmes — et je vais laisser M. Vigil vous en parler plus en détail, car je crois que le Colorado a été confronté à ce problème — surviennent lorsque des personnes consomment des produits qui contiennent du cannabis sans le savoir et qu'elles ont ensuite des effets secondaires.
    La clé réside dans l'éducation sur la chronologie, le décalage, le début et l'ampleur des effets. Il faut aussi éduquer les gens afin qu'ils comprennent qui doit ou ne doit pas consommer le cannabis. Contrairement à ce que disent nos amis de Sensible BC, le cannabis n'est pas une drogue inoffensive et les gens qui ont un certain bagage génétique ou des antécédents familiaux de psychose réagiront différemment à ces substances. Les personnes qui souffrent de maladies cardiovasculaires sont plus à risque d'avoir des problèmes en raison de l'accélération de la fréquence cardiaque et du stress cardiovasculaire.
    Ce sont là des facteurs très importants à prendre en compte lorsqu'on légalise une drogue comme le cannabis.

  (0855)  

[Français]

     J'aimerais poursuivre dans le même sens.
    Nous procédons par étapes, puisque la réglementation n'est pas encore intégrée dans le projet de loi. Nous n'en sommes pas encore à explorer intensivement les produits comestibles pour les mettre en marché. Cela sera probablement une étape subséquente.
    Trouvez-vous que procéder par étapes est une bonne approche?

[Traduction]

    Cela dépend aussi de chaque étape, non? Il est difficile pour moi de commenter sans savoir exactement de quoi vous parlez. Si on légalise les produits fumables et les produits de vapotage d'abord, puis qu'on se penche sur les produits comestibles... tout dépend de ce qu'on fera des produits comestibles et des avantages pour la santé publique ou des dangers des produits comestibles par opposition aux produits inhalables. Le contexte change lorsqu'on ne parle plus d'utilisation à des fins médicales. Le mécanisme de pensée ne sera pas le même. Cela représente un défi.
    Dans le contexte de l'utilisation à des fins médicales, la solution est simple: on offre le cannabis en capsules de gélatine.
    La question est de savoir si c'est plus dangereux que fumer. L'accès est-il plus facile pour les produits comestibles que pour la marijuana à fumer?
    S'ils sont en vente dans un magasin, l'accès est le même. Je ne crois pas que ce soit plus ou moins... L'accès au produit variera selon le mécanisme établi pour la vente au détail. Si les produits fumables et les produits comestibles se retrouvent côte à côte, l'accès sera le même. On pourrait croire que les produits comestibles sont moins nocifs que les produits fumables en raison de problèmes pulmonaires potentiels, mais il n'existe aucune donnée scientifique...
    Je suis désolé de vous interrompre ici. Je veux avoir une réponse de M. Vigil.
    Pouvez-vous me donner une réponse courte?
    Certainement. Au Colorado, une petite partie des utilisateurs de marijuana consomme uniquement des produits comestibles, mais la grande majorité des utilisateurs fume. Ce sont les données de notre enquête pour les adolescents et les élèves du secondaire. Fumer est le principal mode de consommation de la grande majorité. Peu d'utilisateurs préfèrent le vapotage ou les produits comestibles.
    L'idée, quand vous y avez peut-être fait allusion, était qu'il est plus facile de dissimuler cette dernière catégorie de produits et d'en consommer pendant les heures de cours, etc. outre un petit nombre de cas, ce n'est pas un phénomène très répandu.

  (0900)  

    Le temps est écoulé.
    Madame Gladu, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président. Je pense que vous avez fait un travail remarquable lors de notre longue séance d'hier.
    Je remercie tous les témoins ici présents.
    Je sais peu de choses des produits comestibles; je vais donc essayer d'apprendre quelque chose de vous. J'ai souvent entendu que nous devrions uniquement autoriser les produits comestibles qui ne sont pas attirants pour les enfants, mais les seuls produits comestibles dont j'ai entendu parler jusqu'à maintenant sont les biscuits, les bonbons, les jujubes, les gâteaux, le lait frappé, les suçons et les brownies.
    Monsieur Vigil, ma question est la suivante: quels sont les produits comestibles qui ne seraient pas attirants pour les enfants?
    C'est une très bonne question et je n'ai pas de réponse claire à vous donner. Je pense que l'emballage est un aspect très important, comme l'éducation, et qu'il faut éviter de présenter des biscuits déballés, ce qui serait très attirant, évidemment. Il est important d'éviter les types d'emballages qui pourraient inciter un enfant à vouloir absolument obtenir le produit.
    Au Colorado, nous avons été obligés d'adopter des règlements, après coup. Les produits ne peuvent avoir la forme d'un humain, d'un animal ou d'un fruit. Ce n'est qu'un début. Il est toutefois difficile d'établir la limite idéale.
    Très bien, merci.
    Passons à ce qui est considéré comme une dose raisonnable. J'ai entendu des observations selon lesquelles les gens consomment parfois une trop grande quantité en raison du temps nécessaire pour ressentir les effets. Quel est l'intervalle? Que considère-t-on comme une dose raisonnable, en fonction du poids d'une personne?
    Monsieur Vandrey?
    En ce qui concerne l'intervalle, on commence habituellement à ressentir les effets d'un produit comestible après 30 minutes, environ. Les effets maximaux sont ressentis environ une heure et demie plus tard et l'effet perdure pendant environ trois heures après consommation. Les effets sont ressentis pendant environ six à huit heures au total. La durée de l'effet varie en fonction de la dose.
    La question de savoir à quoi correspond exactement une dose unitaire a son importance. Au Colorado ainsi que dans d'autres États des États-Unis, la dose maximale a été établie à 10 mg, mais des doses plus faibles sont aussi offertes. Cela variera selon les individus.
    Le poids d'une personne n'est pas nécessairement un facteur important dans la détermination des effets d'une dose. Les effets du cannabis varient selon les sexes. Les femmes tendent à être plus sensibles aux effets du produit que les hommes. Je ne pense pas qu'on ait suffisamment de données pour déterminer quelle serait une dose unitaire adéquate.
    Dans mon laboratoire, nous avons réalisé des essais chez des adultes en santé avec des doses de 10, 25 et 50 mg. Une dose de 10 mg de drogue n'altère pas beaucoup les facultés. Cela dit, on parle encore une fois de jeunes adultes en santé; cela pourrait être différent pour des gens de 65 ou 70 ans. Cela pourrait aussi varier chez ceux qui ont une certaine prédisposition génétique, de sorte qu'ils métabolisent la drogue différemment. Je précise encore une fois que mes études ont été réalisées auprès de 35 personnes, au total. Il m'est donc difficile de dire quelle serait la dose idéale.
    Au Colorado, cela est établi à 10 mg. M. Vigil pourrait peut-être parler des problèmes liés à cette dose unitaire au Colorado.
    Avant d'aborder ce sujet, j'aimerais vous poser une autre question.
    Une des préoccupations que nous avons entendues concernant les activités de culture à domicile et l'absence de contrôle de la qualité; donc, la puissance peut varier. Si vous préparez vous-même des brownies avec du cannabis cultivé à domicile... Que savez-vous des pourcentages relatifs concernant les surdoses ou d'autres problèmes associés à ce genre de choses?
    Le problème dans ce cas-là, c'est qu'il faut tester le produit que vous utilisez pour fabriquer les brownies ou tout autre produit. Vous devez connaître la puissance pour déterminer la dose que contiendra le produit.
    L'autre aspect, c'est que vous devez soit fabriquer les brownies à la pièce pour connaître la quantité de cannabis qu'ils contiennent, soit avoir un procédé de fabrication quelconque pour veiller à la répartition uniforme de la drogue dans le lot. On ne peut simplement distribuer le cannabis au hasard sur le moule puis s'attendre à retrouver la même quantité dans chaque morceau. Il convient de mettre en place des directives claires quant aux procédés de fabrication et d'analyse.
    À domicile, cela n'existe pas. La personne qui cultive le cannabis à domicile n'en fera pas l'analyse pour en connaître la puissance ni celle de chaque morceau du produit qu'elle fabrique. Le dosage est un coup de dés.

  (0905)  

    Exactement; c'est hors de contrôle.
    D'après moi, vous n'autoriserez pas, à l'échelle nationale, la vente au détail de produits de fabrication maison. Il faut des normes en matière de fabrication, de production et d'analyse.
    J'espère même que ce ne sera pas autorisé en raison du danger que cela représente pour les autres personnes du ménage.
    Monsieur Vigil, savez-vous ce qu'il en est au Colorado depuis l'autorisation de culture à domicile? Je sais que vous avez étudié la question.
    Nous autorisons la culture à domicile d'une grande quantité, notamment pour ceux qui l'utilisent à des fins médicales, qui sont autorisés à cultiver un plus grand nombre de plants. Malheureusement, nos données ne nous permettent pas de déterminer si les appels aux centres antipoison ou les visites à l'urgence sont liés à la culture à domicile ou à l'achat dans un point de vente. Je pense assurément, à l'instar de M. Vandrey, que de ce point de vue, un marché réglementé sera plus sûr.
    Les personnes qui s'adonneront à la culture à domicile et qui fabriqueront elles-mêmes des concentrés et des produits comestibles sont des gens assez expérimentés et moins susceptibles de commettre des erreurs liées à des quantités excessives.
    Le dernier point que je veux soulever est le suivant: à quel endroit les novices se procureront-ils le produit? Plus le produit sera accessible sur le marché réglementé, moins il sera susceptible de provenir du marché noir, où il pourrait subsister des doutes quant à la teneur, de sorte qu'il pourrait être plus dangereux.
    Avez-vous des statistiques sur les appels d'urgence médicale associés à des produits comestibles ou sur les surdoses liées à ces produits, ou encore sur tout autre incident, pour le Colorado?
    Oui. Nous avons observé une augmentation du nombre d'appels aux centres antipoison et de visites à l'urgence liée à la marijuana après la légalisation, et même un peu avant, avec la commercialisation de la marijuana à des fins médicales.
    Nous pouvons faire la distinction entre les cas d'ingestion et d'inhalation dans les centres antipoison, mais pour le moment, ce n'est pas possible pour les visites à l'urgence. Chez les adultes, le nombre de cas d'ingestion et d'inhalation est à peu près égal, mais cela signifie en fait que les résultats sont disproportionnés, étant donné qu'au Colorado, fumer est le principal mode de consommation du produit.
    Donc, les produits comestibles suscitent plus de préoccupations.
    Donc, les surdoses associées aux produits comestibles sont relativement plus nombreuses.
    Exactement. Ensuite, évidemment, la majorité des cas chez les enfants de zéro à huit ans est liée aux produits comestibles.
    Est-il possible que les gens se sentent simplement plus à l'aise, maintenant, de se rendre à l'hôpital et de dire qu'ils consomment du cannabis, depuis qu'il a été légalisé? Ce n'est peut-être pas une augmentation du nombre réel de cas de surdose ou de surconsommation, mais simplement une augmentation du nombre de personnes qui n'hésitent pas à se rendre à l'hôpital et qui en parlent ouvertement. Auparavant, ces gens auraient été mis en accusation s'ils avaient avoué avoir utilisé du cannabis.
    Est-ce une possibilité? Avez-vous étudié cet aspect?
    Puis-je...
    Non. Le temps est écoulé. Nous passons à M. Davies.
    Merci. Monsieur Vigil, votre question sous-tend notamment que si nous ne légalisons pas les produits comestibles, les gens n'en feront pas la consommation, la fabrication, la vente ou la distribution. Ce n'est pas le cas, n'est-ce pas?
    Non.
    Il est peu probable que ceux qui fabriquent de tels produits actuellement, en particulier si c'est lié à la criminalité, présentent les produits comestibles dans des emballages à l'épreuve des enfants. Êtes-vous d'accord avec cette affirmation?
    Oui.
    Le groupe de travail canadien qui s'est penché sur la question a recommandé, pour divers motifs, que le gouvernement légalise les produits comestibles, les concentrés et d'autres produits non inhalables, précisément pour ces raisons. Si j'ai bien compris votre témoignage, vous dites qu'il est préférable de réglementer ces produits afin d'exercer un certain contrôle sur le dosage, les emballages à l'épreuve des enfants, les portions individuelles et les produits marqués, et ce, afin de réduire les préjudices le plus possible. Ai-je bien compris?
    Oui, c'est exact.
    Selon des témoignages que nous avons entendus, le Colorado a d'abord légalisé les produits comestibles, a constaté des problèmes, a acquis une compréhension des problèmes, puis a adopté des règlements supplémentaires à cet égard. Est-ce exact?

  (0910)  

    C'est exact.
    Qu'en est-il maintenant? A-t-on réglé certains des problèmes observés au début, au moment de la légalisation des produits comestibles?
    Dans nos données annuelles les plus récentes relatives aux centres antipoison et aux visites aux services d'urgence, nous observons une légère diminution. Nous avons bon espoir que cela découle de la réglementation et de la sensibilisation du public. Nous ne savons pas précisément pourquoi, mais nous avons observé une légère baisse et nous espérons que cela continuera de baisser.
    Monsieur Larsen, vous vendez des produits. Nous parlons de produits comestibles et, encore une fois, j'entends uniquement parler de brownies et d'oursons de gélatine. Vous avez décrit un large éventail de produits qui, selon les dispositions du projet de loi C-45, seraient toujours illégaux, comme les crèmes, les vaporisateurs, les teintures, les timbres et les capsules. Aux termes du projet de loi C-45, toutes ces formes de cannabis demeureraient illégales.
    Pouvez-vous nous dire si les produits que vous vendez sont nocifs? Y a-t-il une demande chez les consommateurs? Quel pourcentage de votre clientèle préfère ces produits au cannabis fumé?
    Les pourcentages sont probablement d'environ 60 % pour les extraits et 40 % pour les cocottes. Évidemment, il existe également des extraits fumables, notamment le haschisch et le « shatter ». Ils sont aussi très bénéfiques, même si ce sont des produits destinés à être fumés. Les gens sont plus susceptibles de consommer des produits comestibles lorsqu'ils ont la certitude que les doses sont sécuritaires. Les gens ne veulent pas ingérer de grandes quantités de THC et avoir des hallucinations. Ce n'est pas ce qu'ils recherchent. Les gens ont tendance à fumer parce que la dose peut être facilement titrée. Ils obtiennent l'effet recherché, puis c'est tout, tandis qu'avec les produits comestibles, l'attente peut être longue.
    Les produits comestibles peuvent être très utiles pour le soulagement de la douleur et pour l'obtention d'effets à plus long terme, en particulier pour ceux qui consomment à des fins médicales et qui ne veulent pas toujours être en train de fumer. Pour obtenir le dosage idéal, ils utilisent des produits comestibles ou encore des suppositoires qui, en passant, constituent une excellente façon de faire usage de cannabis, car ils entraînent une psychoactivité moins importante, mais permettent d'obtenir un excellent dosage, à des fins médicales ou autres. On parle de la légalisation en proposant que la vente de ces produits relève des sociétés des alcools. Vendrez-vous des suppositoires de cannabis dans les points de vente des sociétés des alcools?
    Nous vendons une crème à base de cannabis, appelée MJ creams, dont la psychoactivité est nulle. Cette crème est appliquée sur la peau et donne d'excellents résultats pour le traitement du psoriasis et de l'eczéma, en plus d'être un excellent analgésique topique. Elle peut être appliquée sur la peau de gens de tous âges, y compris les bébés. Je ne vois aucune raison d'imposer une limite d'âge pour une crème à base de cannabis qui n'entraîne aucune psychoactivité.
    Il faut élargir l'éventail de produits visés. Dans notre dispensaire, il est très rare que des gens reviennent nous voir et nous disent qu'ils ont consommé une trop grande quantité d'un produit comestible et qu'ils ont vécu une mauvaise expérience. Comme les médecins le font pour les médicaments sur ordonnance, nous conseillons aux gens de commencer par une dose plus faible. Si cela ne fonctionne pas et qu'ils n'obtiennent pas le résultat souhaité, ils peuvent augmenter la dose graduellement pour y arriver.
    Si le gouvernement choisit de ne pas autoriser les produits comestibles et les extraits, nous devrons continuer d'en faire la vente dans des dispensaires, sur le marché noir. Ils ne seront pas réglementés. Nous faisons de notre mieux pour veiller à l'innocuité et à l'étiquetage de ces produits. Compte tenu des contraintes d'ordre légal, nous faisons de notre mieux, et je pense que nous faisons déjà un assez bon travail. À Vancouver, à Toronto ou dans d'autres villes où l'on compte des dizaines de dispensaires, rien de ce qui était véhiculé dans les propos alarmistes concernant les produits comestibles des extraits ne s'est produit. Les problèmes ont été peu nombreux, même si on parle d'un marché non réglementé ou, en fait, d'un marché autoréglementé. Avec des règles adéquates, les problèmes seraient limités.
    « Bien dit, M. Zaid. »
    Il a parlé de la façon dont nous voulons limiter l'usage, sans aucun contrôle, de produits de provenance inconnue.
    Monsieur Vandrey, vous avez qualifié cela de « coup de dés ». Serait-il préférable que cela demeure légal et que les Canadiens puissent fabriquer leurs propres produits comestibles dans leur propre cuisine, sans aucune surveillance de la concentration en THC, par exemple, dans un plat de brownies? Je ne comprends pas en quoi une telle politique publique sur les produits comestibles serait préférable à la mise en place d'un marché strictement réglementé où ces produits pourraient être vendus au détail par des gens qui pourraient conseiller la clientèle, comme vous venez de le souligner.
    Les gens fabriqueront leurs propres produits comestibles de toute façon, même dans un marché complètement légalisé. C'est une activité qui leur plaît; ils y prennent plaisir. Cela vaut aussi pour la culture du cannabis. Faire pousser une plante dans son jardin, la récolter, puis l'utiliser, c'est plaisant. Les gens aiment cela. Il importe peu que ce soit des tomates, du zucchini ou du cannabis; ils aiment jardiner. Les gens cuisineront leurs propres produits comestibles même après la légalisation.
    La plupart ne le feront pas et se rendront plutôt dans un magasin parce que c'est plus facile. Il y a des gens qui fabriquent leur propre vin et qui brassent leur propre bière, et personne ne se présente à leur domicile pour vérifier le pourcentage d'alcool de la bière pour s'assurer qu'il respecte des normes précises. Cela n'arrive jamais. Beaucoup de ces préoccupations sont exagérées, à mon avis.
    Ma préférence serait d'avoir un marché légal, réglementé, ouvert et accessible pour les Canadiens, comme c'est le cas pour d'autres produits. D'ici là, les produits comestibles et les extraits seront tout de même disponibles. Les dispensaires vendent de la teinture à base de CBD pur et des extraits de THC et de CBD purs. Nous avons des années et des années d'avance sur un éventuel système légal, et vous avez beaucoup de rattrapage à faire.

  (0915)  

    Le projet de loi C-45 légalise le cannabis séché et l'huile de cannabis, mais j'ignore à quoi pourrait servir l'huile. Monsieur Larsen, que savez-vous de l'huile qui sera légalisée par l'intermédiaire du projet de loi? À quoi servira-t-elle? Peut-elle être vapotée?
    Je crois comprendre que la mesure législative vise seulement... Pour les extraits, la teneur maximale en THC actuellement imposée aux producteurs est de 3 %, et je pense que ce sera la même chose dans ce cas. Cela entraînera beaucoup de problèmes.
    Je souligne au passage que le vapotage présente aussi des avantages, si le fait que les gens fument vous préoccupe. Ces préoccupations sont souvent exagérées, mais la vaporisation répond à presque toutes les préoccupations. Aucune particule n'est émise. Seuls les ingrédients actifs de la plante sont vaporisés, puis inhalés. Ce mode de consommation combine l'avantage d'un produit à fumer, l'effet rapide, et la précision du dosage, mais sans fumée. Je pense que le vapotage devrait être encouragé et considéré comme un meilleur mode d'utilisation.
    Une véritable légalisation signifierait que les agriculteurs canadiens pourraient cultiver du cannabis à haute teneur en THC sur des milliers d'hectares. Voilà notre objectif. Lorsque nous serons rendus là, fumer sera moins populaire, mais il sera possible de fabriquer des extraits purs de THC, de CBD, de CBG, de CBN et d'autres cannabinoïdes, de les utiliser dans n'importe quelle combinaison, par vaporisation, ou encore de les consommer avec des méthodes qui seront à la fois révolutionnaires et beaucoup plus sécuritaires que ce que nous faisons actuellement.
    Madame Sidhu.
    Merci, monsieur le président. Je remercie tous les témoins d'être venus. Il y a beaucoup à apprendre sur des choses dont je n'avais jamais entendu parler auparavant.
    Ma question s'adresse à M. Vandrey. Dans votre récente étude sur les produits comestibles et l'étiquetage, vous mentionnez que la teneur en THC était correctement indiquée sur seulement 17 % des produits comestibles, et que dans 60 % des cas, la teneur était surévaluée. Pourquoi est-il si difficile d'afficher correctement la teneur en THC sur les produits comestibles? Cela découle-t-il de l'absence de réglementation à cet égard, ou d'un manque de ressources qui empêche les producteurs de fournir des données exactes sur l'étiquette?
    Je pense que cela résulte à la fois de techniques de fabrication imprécises qui ne permettent pas une répartition uniforme du produit dans chaque emballage et dans chaque dose, et des problèmes associés à l'absence de normes en matière d'analyse.
    Vous avez mentionné le mot « éducation ». Qui devrait consommer, ou qui ne devrait pas consommer? Vous avez aussi mentionné le stress cardiovasculaire chez les patients atteints d'une maladie cardiovasculaire. Donc, une teneur élevée ou une teneur faible en THC a une incidence? Quels genres d'outils d'éducation devons-nous offrir?
    Je pense qu'une sensibilisation générale s'impose, peu importe les circonstances. Quant à la teneur en THC, la dose doit être définie, et cela varie en fonction de chaque individu et de la raison pour laquelle il utilise le produit. Actuellement, nous parlons d'usage des fins non médicales. J'en conclus que nous parlons ici de gens qui cherchent à s'intoxiquer. On parle donc probablement de doses plus élevées que ce qui pourrait être nécessaire à des fins médicales, mais la détermination de la dose requise reste à débattre et nécessite plus de recherche.
    Tout bon chercheur vous dira qu'il faut faire plus de recherches, mais le fait demeure que très peu d'essais comparatifs du dosage de produits comestibles à base de cannabis ont été réalisés. Ce que nous avons constaté dans nos laboratoires, c'est que lorsqu'on donne une dose égale à 35 individus, on observe une très bonne tolérance aux produits chez la moitié d'entre eux et une réduction considérable des capacités chez les autres. Certains individus vomissent après l'administration d'une dose très élevée, puis font de même à chaque occasion même lorsque nous modifions le mode d'administration. Le cannabis à haute dose leur donne toujours le même type d'effets, peu importe si le produit est fumé, vapoté ou ingéré.
    Encore une fois, il est possible de faire un parallèle avec d'autres produits, comme l'alcool, et de dire exactement la même chose. Certaines personnes peuvent boire six bières et se porter parfaitement bien, tandis que d'autres peuvent se retrouver à vomir dans le coin d'une pièce. Pour gérer ce problème et en tenir compte dans la réglementation, il faut déterminer une dose unitaire assez faible qui n'aura pas pour effet de rendre la plupart des gens malades. Permettez aux gens qui ont une plus grande tolérance de consommer davantage, mais faites-le de façon à ce qu'ils sachent à quoi s'attendre, et veillez à ce que les effets soient uniformes à chaque utilisation. Lorsque vous achetez une bière au magasin, le taux d'alcool de votre bière n'est pas de 5 % un jour, puis de 10 % la prochaine fois où vous achetez une bière de la même marque. Il existe une grande variété de bières, elles ont toutes des caractéristiques qui leur sont propres, mais le taux d'alcool figure sur l'étiquette. Il faut adopter un système similaire pour le cannabis.

  (0920)  

    J'ai entendu dire que le Colorado utilise 10 milligrammes. Y a-t-il une façon de s'assurer que les doses de THC sont distribuées également?
    Là encore, le Colorado a son système pour évaluer et tester ces produits et fixe le seuil. Je vais laisser le soin à M. Vigil de parler de ce processus, mais dans la mesure où vous obtenez une dose constante de 10 milligrammes... Nous n'avons pas effectué notre étude sur les essais au Colorado. Elle a été menée dans les États de la Californie et de Washington. De plus, elle a été menée seulement dans les dispensaires de cannabis à des fins médicales, et non pas dans les points de vente à des fins non médicales, il y a de cela plusieurs années. Je ne sais pas où nous en sommes maintenant, mais je pense qu'il faut un organisme de réglementation chargé du contrôle de la qualité pour assurer une surveillance et veiller à ce que les produits soient étiquetés adéquatement, que la dose soit appropriée et ainsi de suite. Le contrôle de la qualité est essentiel.
    Merci.
    Ma prochaine question s'adresse à M. Vigil. En juillet 2016, le Denver Post a publié un rapport sur le fait que le nombre d'admissions à l'hôpital d'enfants à avoir ingéré des produits comestibles a quintuplé. Comment pouvons-nous protéger nos enfants? Quels sont les problèmes associés à l'emballage pour éviter qu'il soit attrayant pour les enfants? De plus, qu'en est-il de la sécurité des aliments? Que pensez-vous des autres pays qui combinent la production de drogues comestibles et la réglementation de l'inspection des aliments?
    Premièrement, en ce qui concerne les enfants et les produits comestibles, pour répondre à une question posée plus tôt, les admissions dans les hôpitaux sont attribuables à différentes causes, je pense. L'exposition accrue est probablement l'une de ces causes, mais il y a fort probablement une augmentation de la volonté d'admettre l'exposition ou l'utilisation. Bien entendu, nous avons mentionné que l'emballage à l'épreuve des enfants est très important, de même que l'éducation des parents pour qu'ils sachent ne pas laisser traîner ces produits. Ce peut être dangereux si les enfants sont exposés à ces produits, si bien qu'il faut les conserver dans l'emballage à l'épreuve des enfants.
    Pour ce qui est de l'appel, je ne peux pas vous fournir une réponse rapide et claire à ce sujet. Je pense qu'il est très important d'établir de bonnes lignes directrices et de tenir compte du fait que les gens veulent ces produits et une variété de produits. Si les restrictions sont trop contraignantes, il y aura des produits en dehors du système réglementé. C'est un équilibre difficile à atteindre. Je n'ai pas de réponse claire à vous donner à ce sujet.
    Pouvez-vous réitérer la dernière partie de votre question?
    C'était sur l'inspection des aliments.
    Je pense que cela varie d'un État à l'autre. Au Colorado, la production de drogues comestibles est assujettie à l'inspection générale des aliments effectuée dans les cuisines qui produisent des aliments qui se retrouvent sur les tablettes. Ces produits font l'objet d'inspections relatives à la salubrité des aliments. De plus, tous les produits de marijuana doivent être testés pour connaître leur teneur en THC, en CBD et d'autres cannabinoïdes et pour savoir s'ils contiennent une contamination microbienne, des pesticides et des solvants résiduels.
    Voilà qui met fin à notre première série de questions. Nous allons maintenant passer à notre série d'interventions de cinq minutes, en commençant avec M. Carrie.
    Merci, monsieur le président.
    Vous êtes un excellent groupe de témoins. Merci à vous tous d'être ici.
    Je veux poser ma question tout de suite, car nous savons que le déploiement se fera dans 288 jours. On n'a pas beaucoup de temps, et je pense que c'est vraiment une occasion ratée. Nous avons entendu un représentant du Colorado plus tôt qui a dit qu'avant de procéder au déploiement, nous devrions avoir un programme d'éducation publique en place, avec de bons renseignements factuels — ce que nous n'avons pas — et un système de collecte de données, de même que des recherches sur le traitement, etc. Depuis deux ans, le gouvernement libéral n'a rien fait, et nous étudions le dossier en une semaine seulement.
    Je tiens à vous remercier plus particulièrement, monsieur Larsen, de votre présence ici. Je pense que vous êtes la première personne qui travaille sur le terrain et qui discute avec les membres du public sur cette question importante et sur cette mesure législative qui entraînera de nombreux changements.
    Je vais vous adresser toutes mes questions, car je ne dispose que de cinq minutes. J'ai quatre grandes questions auxquelles j'aimerais que vous répondiez.
    Premièrement, les parents et les éducateurs posent de nombreuses questions au sujet du cannabis. Que faites-vous pour votre clientèle en matière d'éducation? Lorsque vos clients ont des questions, avez-vous des brochures scientifiques de base et d'autres documents de ce genre? Où vous procurez-vous votre produit? Assurez-vous un contrôle de la qualité? De plus, je serais curieux de savoir quel serait, d'après vous, l'âge limite approprié, et je ne parle pas de l'usage du cannabis à des fins médicales. Je parle de l'usage à des fins récréatives.
    Ce sont là mes quatre questions. Il me reste probablement quatre minutes. Pourriez-vous répondre à ces quatre questions, s'il vous plaît?

  (0925)  

    D'accord. Pouvez-vous me poser vos questions une à la fois pour que je ne les oublie pas?
    Tout d'abord, que faites-vous pour éduquer votre clientèle?
    Cela dépend des produits que les clients veulent se procurer, mais nous essayons de les orienter vers le bon produit.
    Parfois, il y a des utilisateurs de cannabis de longue date qui viennent. Ils en consomment beaucoup. Ils cherchent un produit particulier. Ils n'ont pas besoin de beaucoup de conseils.
    Nous avons aussi des personnes âgées qui viennent et disent ne pas avoir consommé de cannabis depuis 50 ans mais que leur petit-fils leur a fait savoir que ce serait bon pour leur arthrite ou autre condition. Nous ne leur donnons pas un joint. Nous leur donnons normalement des produits comestibles, des produits à base de CBD ou des crèmes ou des préparations qui auront moins de psychoactivité et plus un effet médicinal. Nous essayons de les conseiller en fonction de ce qu'ils cherchent et de leur expérience. Nous leur disons toujours de commencer par une petite dose et d'augmenter graduellement jusqu'à qu'ils bénéficient des avantages ou obtiennent ce qu'ils cherchent. C'est le type de conseils que nous essayons de donner.
    Ces conseils sont-ils par écrit?
    Ils sont principalement offerts verbalement. Nous avons des documents et des brochures qui renferment des renseignements. Cela dépend. Il s'agit souvent de conversations en personne comme celles que l'on pourrait avoir avec un pharmacien ou un médecin au sujet du cannabis. Parfois les gens ont reçu des conseils d'un médecin, mais les médecins canadiens ne sont pas très informés sur le cannabis et le système endocannabinoïde, qui est la partie de notre corps avec lequel le cannabis interagit, donc principalement...
    Vos employés ont-ils reçu une formation?
    Oui, nous essayons de leur offrir de la formation. Cela varie. Nous nous assurons de discuter avec tout le monde. Si un employé ne peut pas répondre à une question, nous veillons à ce qu'il y ait une personne sur place qui peut le faire.
    Deuxièmement, où vous procurez-vous votre produit?
    Il provient du marché illégal. Par définition, nous n'avons pas le choix. Il n'y a aucun endroit légal.
    Une partie de notre approvisionnement provient de personnes qui cultivent le cannabis depuis des années. Certaines détiennent un permis en vertu du programme médical pour cultiver leur propre cannabis et peuvent en avoir trop, et Santé Canada veut qu'elles détruisent leurs surplus ou s'en débarrassent. Eh bien, elles s'en débarrassent en les vendant à un dispensaire.
    Il y a de nombreuses personnes qui préparent des produits comestibles et des extraits à la maison. Bon nombre de ces produits ne répondent pas à nos normes. La majorité des produits qu'on nous offre sont rejetés parce qu'ils ne sont pas de qualité ou ne répondent pas à nos besoins.
    Les produits proviennent du marché noir, par définition, mais nous faisons de notre mieux pour que ce soit fait le plus adéquatement possible.
    J'ai deux autres questions.
    Vous parliez de la façon dont vous rejetez de grandes quantités. Que faites-vous pour assurer le contrôle de la qualité?
    J'ai une question très importante sur laquelle j'aimerais entendre votre opinion: l'âge de l'utilisation du cannabis à des fins récréatives. D'après vous, quel devrait être l'âge minimal permis?
    Pour ce qui est du contrôle de la qualité, c'est un problème, car nous ne sommes pas en mesure d'accéder aux laboratoires certifiés de Santé Canada. Ils testeront notre cannabis si une personne qui est légalement autorisée à en avoir en sa possession leur envoie des échantillons, mais si j'affiche sur mon site Web qu'un laboratoire a testé notre cannabis avec les résultats, Santé Canada communiquera avec ce laboratoire, qui perdra son permis parce qu'il ne peut pas tester le cannabis des dispensaires. Je peux afficher tous les résultats que je veux, mais je suis la seule personne qui sait si je dis la vérité. Je ne peux pas divulguer le laboratoire qui a effectué les essais. Cela nous place dans une situation très difficile.
    Nous menons aussi notre propre étude. La première chose que nous faisons lorsque nous recevons des cocottes à notre dispensaire, c'est de les examiner au microscope. J'encouragerais les membres à faire la même chose. On peut vérifier un grand nombre d'entre elles pour vérifier la présence de moisissures, la qualité des trichomes et les glandes résineuses, et pour voir si elles sont mûres. Ce n'est que la première étape. Si la majorité des cocottes ne passe pas cette étape, nous procéderons à un test de goût. Quelqu'un en fumera une petite quantité. On peut déterminer s'il y a des contaminants chimiques ou si le cannabis a été surfertilisé. Puis nous l'enverrons à un laboratoire, si nous le pouvons, après quoi, s'il répond à toutes les normes, nous le mettrons sur les tablettes.
    Pour ce qui est des produits comestibles et d'autres produits, nous approvisionnons généralement nos producteurs d'un extrait de cannabis, pour que nous sachions qu'ils reçoivent une quantité normalisée et sachions d'où il provient. Nous pouvons leur donner la même variété ou un produit semblable pour les aider à normaliser leur produit. Un grand nombre de produits comestibles n'utilisent pas de cocottes. Ils seront fabriqués à base d'extrait pour fabriquer un produit dont la concentration est connue et ainsi normaliser les doses.
    En ce qui concerne l'âge minimal permis, si c'était à moi de décider, je le ferais passer à 16 ans pour l'achat de cannabis dans un endroit légal... Cela dit, je suis satisfait qu'il soit le même que pour l'alcool. Ce n'est pas un problème.
    Ce qui fait défaut dans la mesure législative, c'est qu'on n'autorise pas un parent à donner du cannabis à son enfant. On peut donner de l'alcool à ses enfants à n'importe quel âge pratiquement. Un grand nombre d'enfants boivent un verre de vin au souper, et nous ne criminalisons pas ces parents. Si ces parents donnaient à leur enfant de 17 ans du cannabis ou un joint, ils pourraient être criminalisés et faire face à de graves conséquences. Je pense que c'est un problème. À mon avis, l'utilisation du cannabis chez les jeunes est une question qui doit être déterminée par la famille. Cette mesure législative ne permet pas aux familles de prendre cette décision, ce qui est un gros problème, selon moi.

  (0930)  

    Vous nous avez été d'une grande aide. Merci.
    Monsieur Oliver.
    Merci beaucoup de votre témoignage.
    C'est notre dernière journée d'une semaine complète de témoignages sur ce projet de loi de personnes dans l'industrie et de consommateurs de différents horizons. D'ici la fin de cette semaine, nous aurons entendu les déclarations de 100 témoins différents ou plus. C'est excellent. Si nous avions suivi notre processus normal, il nous aurait fallu environ trois mois. Cela nous a vraiment permis d'approfondir les questions et de comparer les témoignages, ce qui est souvent difficile à faire lorsque nous entendons les témoignages sur une période beaucoup plus longue.
    Au moment de l'étude article par article, je pense que les produits comestibles seront l'aspect que nous examinerons. En ce moment, les produits comestibles sont exclus de la définition légale de la marijuana, si bien qu'ils ne sont pas permis. Je vais vous faire part de ce que j'ai entendu sur les avantages de les inclure et sur les inconvénients de les exclure, et vous demander s'il manque quelque chose dans cette analyse.
    Pour ce qui est des avantages d'inclure les produits comestibles, j'ai entendu dire que c'est une question de santé publique: autrement, nous encourageons l'inhalation du cannabis. Les produits comestibles offrent une solution de rechange plus saine pour l'ingestion du cannabis. Ensuite, ce que j'ai entendu dire également, c'est que si on ne les inclut pas sur le marché légal, cela permettra au marché noir ou à tout autre marché de poursuivre ses activités et de prendre de l'expansion sur ce secteur du marché. Je pense que M. Larsen a discuté clairement de ce point.
    Ce sont là les deux raisons de les inclure.
    Pour ce qui est des raisons de les exclure, j'ai entendu dire que c'est un changement social, une expérience sociale pour le Canada, si bien que l'on devrait ralentir la cadence et voir comment la situation évolue avant de commercialiser les produits à plus grande échelle sur le marché. L'accès des enfants et l'ingestion accidentelle des enfants semblent être plus élevés avec les produits comestibles qu'avec les produits qu'il faut fumer. De plus, ce sont des produits difficiles à réglementer et à inspecter. Il y a plus de facteurs complexes avec les produits comestibles qu'avec les plants, quoiqu'avec le travail qui a été fait au Colorado, je pense qu'il y a de bons règlements faciles à adopter qui sont en place. Le quatrième point est le suivant: « Ils sont faciles à faire à la maison, alors si les gens veulent les produits comestibles, ils peuvent bien s'en procurer. »
    Ce sont les avantages et les inconvénients. Je les ai parcourus rapidement. Y a-t-il autre chose que je devrais savoir, d'après vous, sur les avantages et les inconvénients? En avez-vous à ajouter à ces listes?
    J'ai une toute petite clarification à apporter à votre premier argument.
    Avec les produits comestibles, on évite les effets de l'inhalation sur les poumons. Il y a une préoccupation qui est plus grande que les produits comestibles, et c'est la conduite. Le fait est qu'avec un produit inhalé, on peut rapidement reconnaître quels sont les effets et se donner du temps pour surmonter ces effets et être en mesure de conduire sécuritairement, mais avec les produits comestibles, il est possible qu'on ne ressente pas complètement les effets et qu'on prenne le volant.
    La vitesse est différente avec la digestion.
    C'est exact.
    Monsieur Vandrey.
    Dans les études en laboratoire où nous testons les gens qui ont consommé du cannabis par différentes voies d'administration, je pense qu'il est important de souligner que lorsque les gens inhalent ou ingèrent le cannabis, l'ampleur des effets et les types d'effets sont identiques. La seule différence est le rythme auquel ces effets se font sentir. Je n'ai vu aucune donnée probante selon laquelle l'ingestion est plus dangereuse que l'inhalation, et je n'approuve pas l'argument selon lequel on ne peut pas percevoir l'intoxication lorsqu'on ingère un produit du cannabis. Les gens sont très conscients qu'ils sont intoxiqués.
    La difficulté est de détecter qu'un conducteur a les facultés affaiblies parce qu'il a ingéré un produit du cannabis, mais c'est un problème généralisé, peu importe la voie d'administration. C'est un peu différent avec les produits comestibles, car les concentrations dans le sang sont moins élevées.
    Très rapidement, j'ai une question pour vous trois: recommanderiez-vous que le Canada inclue les produits comestibles parmi les produits autorisés, ou seriez-vous en faveur que l'on ralentisse la cadence, tel que proposé dans le projet de loi?
    Monsieur Larsen.

  (0935)  

    J'appuie l'idée d'ajouter les produits comestibles et d'autres extraits, comme le hachisch et d'autres substances, que l'on peut fumer ou ingérer. Ces produits doivent faire partie de la légalisation; en n'autorisant que les cocottes, on rate de nombreuses occasions.
    Oui, je suis convaincu qu'ils devraient être inclus. Pour ce qui est de ralentir la cadence, c'est ce que nous faisons depuis 1971. Il est temps d'agir, et non pas de ralentir.
    Je pense, qu'au final, ils devraient être inclus, mais il est important de faire les choses correctement. S'il faut du temps et s'il faut apprendre des leçons tirées du marché des produits à fumer, je serais d'accord.
    Je recommanderais personnellement d'appuyer une réglementation et un contrôle de la qualité de tous les produits. Je pense que c'est dans l'intérêt public, plutôt que de seulement autoriser une version et de continuer d'avoir un produit sur le marché noir dont on ignore le contenu. Je pense que c'est ce qui est le plus logique.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Webber.
    Merci, monsieur le président, et merci aux témoins.
    Ma première question s'adresse à M. Vandrey. En tant que chercheur sur le cannabis, vous avez mentionné que vous évaluez les renseignements sur les étiquettes de produits pour déterminer s'ils sont exacts ou non. N'est-ce pas? Pour les producteurs homologués des États du Colorado et de Washington, avez-vous relevé si les renseignements sur leurs étiquettes sont exacts?
    Là encore, je n'ai mené aucun test au Colorado. L'État du Colorado effectue ses propres tests. M. Vigil pourrait peut-être parler des résultats des tests qui ont été réalisés.
    Les tests que j'ai effectués à Washington se sont limités aux dispensaires de cannabis à des fins médicales qui, à l'époque, étaient distincts des tests effectués dans les dispensaires de cannabis à des fins non médicales. Je crois qu'à l'époque, la réglementation des produits vendus dans les dispensaires de cannabis à des fins médicales n'était pas très rigoureuse, et les tests ont révélé que l'étiquetage de la majorité des produits était inexact.
    C'est intéressant.
    Monsieur Vigil, en ce qui concerne l'exposition accidentelle, dans vos remarques, vous avez mentionné des incidents. Y a-t-il de nombreux incidents d'où vous venez?
    Je pense qu'il est important de clarifier ce que l'on entend par « nombreux » car on a constaté une hausse, comme je l'ai mentionné, des appels dans les centres antipoison et des visites aux services des urgences, pour d'autres raisons...
    Je parle plus précisément de l'exposition accidentelle chez les enfants...
    D'accord, alors concentrons-nous sur l'exposition accidentelle chez les enfants de moins de huit ans. En ce qui concerne les appels aux centres antipoison, au point le plus fort au Colorado, pour un enfant sur 10 000, un appel était lié à la marijuana. Je tiens à souligner que les répercussions connexes n'étaient pas sévères. La majorité de ces appels étaient seulement liés à des préoccupations...
    Était-ce à cause de l'ingestion d'un produit comestible?
    Il y avait certains cas d'inhalation de la marijuana. Les enfants peuvent aussi se mettre une cocotte dans la bouche. La majorité des cas étaient liés à des produits comestibles.
    Que pensez-vous de la culture, à quatre plants par ménage? Pensez-vous qu'on devrait l'autoriser?
    Je pense que les gens cultiveront le cannabis que nous l'autorisions ou pas. Encore là, il est préférable que ce soit réglementé que non réglementé.
    Au Colorado, pour la culture résidentielle, le réel problème auquel nous nous heurtons a trait à la culture d'un nombre plus élevé de plants que celui permis et à la capacité d'un fournisseur de soins de cultiver des plants pour de multiples personnes. On se retrouve donc avec des cultures importantes qui sont sur papier légales mais qui contribuent au marché noir et au détournement.
    Monsieur Larsen, je ne sais pas quelles décisions la Colombie-Britannique prendra concernant la distribution, que ce soit par l'entremise de points de vente comme la LCBO ou autre. Je ne sais même pas s'il y a une régie des alcools en Colombie-Britannique, mais vous savez l'orientation que prend l'Ontario. La province a déjà commencé à fermer des dispensaires et à arrêter des gens. Ces mesures ont sûrement été prises dans votre province aussi.
    Si le gouvernement de la Colombie-Britannique décide que vous ne pouvez pas faire cela, vous dites que vous continuerez à avoir des clients quand même. J'en doute. Je ne sais pas si vous avez pignon sur rue en ce moment. J'ignore tout des dispensaires, monsieur Larsen, car je n'ai jamais mis les pieds dans aucun de ces établissements, et je vais peut-être visiter le vôtre pour en apprendre à leur sujet. Je ne sais tout simplement pas comment vous continuerez de maintenir vos opérations si le gouvernement de la Colombie-Britannique décide de mettre en place un environnement plus contrôlé.

  (0940)  

    C'est un point intéressant. Soyons clairs. Le gouvernement fait tout ce qu'il peut en Ontario pour se débarrasser des dispensaires. Il déploie des efforts en ce sens depuis quelque temps et il échoue lamentablement.
    Il y a des dispensaires dans toutes les grandes villes au Canada, et dans la majorité des villes de plus petite taille, et il y a des magasins de pipes à cannabis. Je vous ai dit que les pipes à cannabis sont illégales également, et nous nous sommes battus, et nous avons fait l'objet de perquisitions, et bien des gens ont été incarcérés pour avoir vendu des pipes à cannabis dans les années 1990.
    Le problème que vous avez pour appliquer ces lois, c'est que les tribunaux ne sont pas disposés à imposer des sanctions sévères, et nous avons un système de justice surchargé. Des dizaines d'accusations ont été portées à Toronto, et seulement quelques-unes ont été maintenues. Dans le cadre de leurs perquisitions, les services de police s'en sont pris à Marc et à Jodie Emery et à quelques autres personnes, mais pas un seul de leurs fournisseurs n'a été arrêté ou accusé. Ils vendent du cannabis provenant de nombreuses entreprises qui ont des étiquettes, des sites Web et des numéros de téléphone avec lesquels on peut les appeler, et les gens vendent des extraits. Ils pourraient facilement, s'ils voulaient consacrer le temps et les efforts voulus, s'en prendre à ces personnes. Ils ne le font pas, car les corps de police et le système de justice ne sont pas en mesure de gérer ce genre de campagne de désobéissance civile de masse dans laquelle nous nous lançons.
    Nous aimons l'expression « cultiver le gouvernement ». Nous sommes trop nombreux à vouloir aller jusqu'au bout pour que vous puissiez suivre. Voulez-vous vraiment m'envoyer en prison pour avoir vendu du cannabis? Est-ce vraiment là où vous pensez que je devrais être? Je vais continuer d'en vendre, et c'est la seule option. Je vais continuer de donner des semences et de consommer du cannabis.
    Percevez-vous une taxe sur vos produits — TPS, TVP?
    Certains dispensaires perçoivent une taxe, mais pas tous. Nous n'en percevons aucune pour le moment, mais nous nous orientons dans cette direction. Je serais heureux de percevoir une taxe. Nous sommes heureux de respecter les règlements raisonnables. Je ne suis pas un anarchiste qui refuse de suivre les règles, mais si ces règles m'empêchent d'exploiter mon commerce, alors, bien entendu, nous ne les respecterons pas.
    Payez-vous des impôts? Produisez-vous une déclaration de revenus?
    Oui, nous faisons des déclarations de revenus. Tous les membres de notre personnel sont inscrits. Nous faisons les retenues et autres choses du genre au mieux de nos capacités. Je ne peux pas me prononcer pour tous les dispensaires au pays — nous sommes des centaines —, mais certains fonctionnent différemment.
    Mais, vous ne pouvez pas nous empêcher de mener nos activités. Vous n'avez pas la capacité nécessaire — services de police et tribunaux . C'est la raison pour laquelle nous connaissons autant de succès et pour laquelle nous continuerons à mener nos activités.
    Les règles doivent tenir compte du fait qu'il existe déjà une industrie dynamique du cannabis et que nos activités nous tiennent à coeur. La légalisation doit en tenir compte ou vous devrez trouver une façon d'offrir de meilleurs produits à un meilleur prix ainsi qu'une plus grande sélection de produits de qualité supérieure. Si vous réussissez, nous devrons fermer nos portes. Je considérerai alors que j'ai gagné. Si je ne peux pas exploiter mon dispensaire parce qu'il existe sur le marché une source légale de cannabis de meilleure qualité et moins dispendieux, alors j'aurai gagné. Il n'est pas nécessaire pour moi d'exploiter un dispensaire. Tout ce que je veux, c'est qu'il existe une source légale d'approvisionnement en cannabis. C'est ainsi que je vois les choses. Mais, d'ici là, aussi longtemps que mon dispensaire pourra offrir des produits qui ne sont pas disponibles légalement sur le marché et que les gens souhaitent acheter mes produits, nous poursuivrons nos activités.
    Maintenant je dois vous interrompre.
    Monsieur Eyolfson, vous avez la parole.
    Malheureusement, je figure au bas de la liste, ce qui signifie que bon nombre des questions que je voulais poser ont déjà été posées. Je devrai peut-être aller plus en détail sur certains sujets déjà abordés. Il est possible qu'il y ait un peu de répétition.
    Nous avons entendu hier des témoignages de différents spécialistes internationaux, notamment de la Grande-Bretagne qui regarde attentivement ce qui se passe ici. Encore une fois, nous entendons des témoignages contradictoires de différentes régions sur la façon de procéder. Il nous a été signalé que ce que nous tentons de faire est encore nouveau. Un seul autre pays a légalisé le cannabis. Nous sommes donc le deuxième pays à nous lancer dans cette aventure. Beaucoup nous ont recommandé d'adopter une approche prudente et de procéder étape par étape.
    Nous nous sommes engagés à réglementer les produits comestibles. Nous n'avons tout simplement pas encore amorcé nos efforts en ce sens. Nous avons appris que le Colorado avait éprouvé quelques difficultés à ce sujet.
    Monsieur Vigil, si j'ai bien compris, au début, vous avez éprouvé certaines difficultés en ce qui a trait aux produits comestibles. Pourriez-vous nous parler de ces problèmes et nous dire si, selon vous, il s'agit d'une bonne idée de procéder de manière plus progressive?
    En fait, initialement, notre principale préoccupation était qu'il y ait une augmentation du nombre d'appels au centre antipoison et de visites aux urgences, notamment chez les jeunes. Quelques cas de surdoses ont mené à des accidents. C'est ce qui nous a motivés à renforcer la réglementation.
    En ce qui a trait à l'échéance pour la mise en oeuvre, à mon avis, le délai de 288 jours est trop court pour fixer tous les règlements relatifs aux produits comestibles. Je ne suis pas législateur, donc j'ignore si c'est le cas, mais je vous recommanderais de prévoir plus de temps, non seulement pour travailler à la légalisation, mais aussi pour apprendre ce qu'ont fait les autres régions qui ont légalisé le cannabis, comme le Colorado et d'autres États américains. J'ai déjà souligné que nous avons remarqué une baisse de ces chiffres sur un an. Nous sommes impatients de prendre connaissance des données à ce sujet qui seront publiées au printemps prochain. Plus vous avez d'information à votre disposition, meilleures seront vos décisions.

  (0945)  

    Monsieur Vandrey, nous avons déjà parlé de l'emballage. Vous voulez que les emballages pour les produits comestibles ne soient pas attrayants pour les enfants et qu'ils soient à l'épreuve des enfants. Je suis tout à fait d'accord avec vous. Nous avons eu hier une discussion sur les emballages neutres et certains des précédents établis dans l'industrie du tabac, notamment le succès qu'a connu l'Australie dans la réduction du tabagisme. Malgré les fausses informations que fait circuler à ce sujet l'industrie du tabac, il semble effectivement qu'il y ait eu une baisse du tabagisme.
    Est-ce que vous recommanderiez l'utilisation d'emballages neutres, non seulement pour les produits comestibles, mais pour tous les produits de cannabis, comme nous envisageons de le faire pour les produits du tabac et comme l'a fait l'Australie?
    Je crois qu'en ce qui a trait au cannabis, il serait très judicieux de tirer des leçons de la réglementation sur le tabac et l'alcool. Il est important de reconnaître les conséquences de la surconsommation et de la publicité. Toutes ces informations sont pertinentes. Il serait farfelu de tenter de réinventer la roue en ce qui a trait au cannabis plutôt que de tirer des leçons de la réglementation sur le tabac et l'alcool, d'utiliser cette réglementation à titre de modèle sur la façon de procéder en ce qui a trait au cannabis ou d'étudier ce qui se fait actuellement en Uruguay ou dans les États américains ayant déjà légalisé la consommation de cannabis à des fins non médicales. Il existe déjà des modèles. Des règlements ont déjà été adoptés dans ces États et en Uruguay. Examinez ce qu'ils ont fait et parlez aux autorités compétentes des limites et de ce qu'elles feraient différemment. Votre modèle pourrait être meilleur.
    L'important, c'est d'établir quelle sera votre dose par unité et d'avoir confiance en cette décision et d'établir la procédure relative au contrôle de la qualité. Si vous parvenez à résoudre ces problèmes, le reste devrait bien aller.
    Votre temps est écoulé.
    Monsieur Davies, vous serez le dernier intervenant de cette série de questions.
    Monsieur Vigil, depuis combien de temps le Colorado réglemente-t-il les produits comestibles?
    Les produits comestibles étaient inclus dès le début, en 2012. Les dispensaires étaient autorisés à vendre ces produits à partir du 1er janvier 2014.
    Selon tous les témoignages que nous avons entendus sur la légalisation du cannabis, que ce soit dans les Pays-Bas, au Colorado, à Washington ou en Alaska, après la légalisation, il y a une augmentation soudaine à tous les niveaux. Puis, la situation se stabilise et on remarque ensuite une baisse.
    Ai-je raison de dire que c'est en quelque sorte ce qui s'est produit concernant l'ingestion accidentelle? Après la légalisation des produits comestibles, j'imagine que plus de gens ont essayé ces produits, puisqu'ils étaient disponibles légalement. Des gens ont vécu certaines expériences. Le nombre d'appels au centre antipoison a augmenté, et ensuite, la situation s'est stabilisée et vous constatez maintenant une baisse. C'est exact?
    Nous avons constaté une légère baisse par rapport au sommet atteint, mais les chiffres demeurent plus élevés qu'auparavant. Soit dit en passant, vous avez parlé d'une augmentation à tous les niveaux, mais nous n'avons vu aucune augmentation de la consommation chez les jeunes ou les adultes.

  (0950)  

    Des gens du Colorado nous ont dit qu'il y avait eu une augmentation immédiatement après la légalisation avant que la situation ne se replace. Ce n'est pas le cas?
    Selon nos principales sources de données, ce n'est pas le cas.
    Concernant la réglementation, vous dites que nous devrions procéder lentement. Ne pourrions-nous pas adopter les règlements adoptés au Colorado sur les produits comestibles? Quelles sont les grandes lacunes de la législation du Colorado que nous ignorons encore?
    Elle n'est pas parfaite et le système a ses limites. Par exemple, nous avons éprouvé certaines difficultés avec nos examens de la compétence des laboratoires. Beaucoup des difficultés découlent des limites du fédéral. Dans certains domaines, notamment celui des pesticides, tous les autres produits sont réglementés par le fédéral, mais nous n'avons pas accès à ces ressources pour le cannabis. À bien des égards, nous ne pourrions pas prétendre que notre système est parfait et qu'il devrait être adopté.
    Il n'y a rien de parfait; nous sommes en politique.
    Pour ce qui est de bien faire les choses en ce qui a trait aux principaux éléments, les portions individuelles, les contenants à l'épreuve des enfants, l'interdiction relative aux publicités destinées aux enfants, les produits marqués et certains des règlements concernant la puissance et le dosage, j'imagine que vous faites tout cela au Colorado?
    Oui.
    Qu'attendons-nous? Quoi d'autre ignorons-nous au sujet du cadre réglementaire qui ferait en sorte qu'il serait préférable de ne pas réglementer le cannabis pour le moment dans aucun des domaines mentionnés et d'attendre d'avoir plus de détail sur les règlements? Je suis confus.
    Un argument raisonnable pourrait être d'adopter une réglementation plus restrictive au début et d'être plus permissif par la suite. À mon avis, le danger d'adopter une réglementation moins restrictive est que vous voudrez la renforcer plus tard.
    Je ne dis pas que vous devriez absolument attendre. Ce que je dis, c'est que si vous pouvez adopter rapidement des règlements très rigoureux, tout devrait bien aller.
    C'est là ma question. Le Colorado dispose-t-il, oui ou non, de règlements rigoureux?
    Je crois que nos règlements sont rigoureux. Mais, il y a place à amélioration.
    Bien entendu.
    Monsieur Larson, nous avons entendu beaucoup de témoignages sur les dommages qu'a causé la criminalisation aux Canadiens. Bon nombre des méfaits associés au cannabis sont directement liés à la criminalisation du cannabis, et non au cannabis lui-même. Je crois que nous convenons tous que le projet de loi C-45 constitue un pas dans la bonne direction, mais il maintient une approche criminalisée. Il prévoit des sanctions pénales pour la possession de plus de 30 grammes, pour la culture de plus de quatre plants de plus de 100 centimètres, et pour la vente, qui elle est passible d'une peine de 14 ans de prison.
    Si la criminalisation a été un échec et qu'elle a causé des dommages, pourquoi le projet de loi C-45 maintient-il cette criminalisation dans une moindre mesure?
    Absolument. La criminalisation est plus présente dans ce projet de loi que dans d'autres domaines, et la peine d'emprisonnement de 14 ans signifie également que pour les individus concernés, il n'y a aucune possibilité de libération conditionnelle, ce qui, à mon avis, est très préoccupant.
    En tant que membre du mouvement pour le cannabis, je sais que l'aide du gouvernement n'est pas vraiment nécessaire pour obtenir des produits de cannabis de grande qualité. Tout ce que nous souhaitons, c'est que le gouvernement cesse d'arrêter les gens. C'est ce sur quoi cette mesure législative devrait se concentrer. Je trouve honteux que la possession de cannabis n'ait pas encore été décriminalisée et qu'il ne s'agissait pas d'une priorité importante. Il s'agit de la principale lacune de cette mesure législative: elle est plus sévère à l'égard du cannabis que ne l'est la législation relative à l'alcool. Pourtant, le cannabis est plus sécuritaire que l'alcool à tous les points de vue. Je crois que tous ceux qui sont venus témoigner en conviendraient.
    Si l'on impose plus de restrictions autour du cannabis qu'autour de l'alcool, les gens se tourneront vers l'alcool. En limitant davantage la publicité et l'emballage, notamment, pour le cannabis que pour l'alcool, on envoie le message qu'il est préférable de consommer de l'alcool que du cannabis, et je crois que nous devrions envoyer le message contraire. L'idée selon laquelle nous avons fait des erreurs en ce qui a trait à l'alcool, que celui-ci est trop facile à obtenir, et qu'il faut donc adopter des règles plus strictes pour le cannabis n'a absolument aucun sens. Le cannabis est un produit plus sécuritaire et devrait être traité ainsi. Nous faisons totalement fausse route en continuant de criminaliser les gens pour la possession de cannabis ou toutes les autres infractions relatives au cannabis.

  (0955)  

    D'accord. Merci beaucoup. Ceci met fin à notre série de questions régulière.
    Monsieur le président, j'aimerais savoir si nous avons le consentement unanime des membres pour amorcer une autre série de questions, puisqu'il nous reste encore 30 minutes.
    Ai-je le consentement unanime des membres pour amorcer une nouvelle série de questions?
    Nous avons le consentement unanime.
    Monsieur McKinnon, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Larsen, sans faire de jeu de mots, j'aimerais savoir quel est le fruit mûr des produits comestibles. Dans votre boutique, et selon ce que vous savez des autres boutiques, que recherchent les gens? Quels sont les produits les plus populaires, disons, vos trois meilleurs vendeurs?
    Cela dépend vraiment de ce que recherchent les clients. Certains veulent simplement se sentir bien et ressentir un effet euphorique, alors que d'autres ont des besoins médicaux; ils ont des douleurs, ils souffrent d'un cancer ou ils ont des maux systémiques et sont à la recherche d'un traitement différent. Donc, les raisons varient, mais ceux qui consomment le cannabis à des fins récréatives sont moins attirés par les produits comestibles, car l'effet de ces produits peut être plus puissant et il est difficile d'ajuster la dose. La plupart des gens que je connais qui consomment le cannabis le fument ou utilisent des extraits. C'est un aspect que je soulève régulièrement, mais qui n'est pas abordé, soit qu'il y a d'autres formes fumables de cannabis, comme les brisures et le haschich. Ces produits sont aussi très populaires et ils permettent aux consommateurs de fumer moins de cannabis pour obtenir le même effet. Si l'inhalation du produit vous préoccupe, il est probablement plus sécuritaire de fumer un produit plus puissant seul que de fumer un produit moins puissant mélangé à toutes sortes d'autres choses.
    Je voulais parler des produits comestibles.
    La question avec les produits comestibles est de savoir ce que recherchent les clients et pourquoi ils se tournent vers les produits comestibles.
    Non, je veux savoir quels sont les produits comestibles les plus populaires.
    Les plus populaires sont ceux qui ont bon goût. Les gens aiment les gâteries. Ils ne veulent pas vraiment consommer de capsules, par exemple, s'ils peuvent se procurer quelque chose de savoureux. Les gens achètent certainement plus de produits qui sont délicieux que de produits moins savoureux. C'est simplement la nature humaine.
    On ne peut pas vraiment adopter une mesure législative qui propose de réglementer les gâteries. Nous avons besoin de quelque chose d'un peu plus précis.
    Il est possible d'ajouter du cannabis dans toutes sortes de produits alimentaires. Certaines personnes aiment le beurre infusé, car elles peuvent l'inclure dans leurs propres aliments et l'étendre sur leurs rôties.
    Vendez-vous beaucoup de beurre infusé?
    Nous vendons du beurre infusé et des huiles infusées; nous vendons toutes sortes de produits comestibles. Nous vendons également des produits savoureux, mais, habituellement, ils sont plutôt utilisés comme collations.
    Quels sont les trois produits comestibles les plus populaires que vous vendez?
    Il faudrait que j'y réfléchisse un instant. Nos gouttes sont très populaires, quoiqu'elles ne sont pas vraiment des produits comestibles. Ce sont des gouttes fabriquées avec de l'huile de chanvre. C'est un peu comme un produit comestible.
    Je dirais que les biscuits sont extrêmement populaires. Les gens aiment différentes sortes de biscuits. Nous vendons beaucoup de produits de CBD qui entraînent une psychoactivité moins importante, voire nulle, mais qui ont des bienfaits médicaux. Les produits comestibles de CBD sont aussi de plus en plus populaires.
    D'accord. Concernant la culture à domicile ou personnelle, une des préoccupations est que le cannabis produit pourrait être détourné vers le marché illégal. Selon vous, les dispositions limitant le nombre de plants, notamment, sont-elles nécessaires pour prévenir le détournement du produit et auront-elles du succès à cet égard?
    Tout dépend de ce que vous voulez dire par « détournement ». Il est difficile de vendre le cannabis provenant de quatre plants d'un mètre. La récolte ne sera pas énorme, mais certainement suffisante pour partager avec des amis. Je crois que c'est ce que nous verrons.
    Si vous souhaitez vraiment empêcher le détournement du cannabis, faites en sorte que le cannabis ne soit pas dispendieux. La seule raison pour laquelle les gens cultivent et vendent leur propre cannabis, c'est qu'il s'agit d'un produit très dispendieux et d'une entreprise très profitable lorsque l'on considère qu'un plant vaut entre 5 $ et 10 $ le gramme. Que le produit soit légal ou non n'a aucune importance. Si les gens peuvent cultiver à domicile un plant d'une valeur de 1 000 $ pour ensuite le vendre, ils le feront.
    Pour éviter le détournement du produit et empêcher les gens de se livrer à cette pratique, il suffit de faire en sorte que le cannabis soit plus abordable, que les prix soient plus bas, comme le produit naturel qu'il est. C'est le seul plant vendu au gramme plutôt qu'à la livre. J'aimerais que le prix du cannabis se situe à environ 1 $ le gramme. Ce serait encore très élevé pour une si petite quantité, mais cela éliminerait la marge de profit et la grande majorité du détournement. Si la structure de prix pour le cannabis légal est la même que pour le cannabis illégal, le marché illégal se poursuivra. Cela ne changera pas, puisque la culture sera rentable. C'est là le problème.
    Je crois que la plupart des gens qui se tourneront vers la culture de quatre plants à domicile le feront pour eux-mêmes ou pour partager avec leurs amis et les membres de leurs familles. Ils ne cultiveront pas ces plants pour les vendre, car, pour seulement quelques plants, la marge de profit n'est pas suffisante. Il faut une culture plus grande pour satisfaire le marché noir. Je crois que c'est uniquement ce genre de grandes cultures qui alimentera le marché noir.

  (1000)  

    S'il me reste du temps, j'aimerais revenir à la question de l'emballage. Les produits comestibles que vous vendez sont offerts dans quel genre d'emballage? Ces produits sont-ils faits maison ou par une entreprise?
    C'est un peu à mi-chemin entre les deux. Nous faisons notre possible pour offrir un produit professionnel, mais il est très difficile de trouver des boulangeries ou autres entreprises commerciales prêtes à fabriquer des produits de cannabis. Nous devons donc nous tourner vers la fabrication à domicile ou à petite échelle. Nous utilisons des emballages à l'épreuve des enfants. Nous faisons notre possible pour inscrire sur l'étiquette de nos produits le niveau précis de cannabinoïdes du produit, quoique c'est difficile en raison de la disponibilité des tests visant à établir ces niveaux et du fait que les dispensaires n'ont pas totalement accès à ce genre de test.
    Que pensez-vous...
    Votre temps est écoulé.
    Monsieur Carrie, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président. Je vais partager mon temps avec ma collègue.
    Encore une fois, monsieur Larsen, j'aimerais m'adresser à vous. Je tiens aussi à vous remercier à nouveau d'avoir accepté notre invitation. De toute évidence, vous vous y connaissez beaucoup sur le sujet et je crois que votre contribution ainsi que vos connaissances sur la situation actuelle au Canada sont très importantes.
    Une chose attire ma curiosité. À votre connaissance, ou selon ceux qui travaillent dans le domaine de la production ou de la distribution, une de vos connaissances a-t-elle été consultée concernant la mise en oeuvre de cette mesure législative à titre de politique publique ou dans le cadre de l'élaboration de l'ébauche de ce projet de loi? Le gouvernement a-t-il consulté une de vos connaissances?
    Non. Faites-vous référence au groupe de travail qui a d'abord été mis sur pied? Certaines personnes ont été consultées. Je n'ai pas été invité à m'exprimer devant le groupe de travail. Certains de mes alliés ou amis ont été invités, mais je crois que les consommateurs réguliers de cannabis n'ont pas vraiment été inclus dans la discussion. Je consomme du cannabis tous les jours. J'en ai consommé ce matin avant de venir ici et j'en consommerai plus tard une fois que nous aurons terminé. À mon avis, l'opinion des consommateurs types n'est pas prise en considération.
    Non, la communauté du cannabis n'a pas été beaucoup consultée à cet égard.
    Je propose:
Que, conformément à l'article 108(2) du Règlement, un minimum de six réunions soit ajouté à l'étude que mène actuellement le Comité sur le projet de loi C-45, Loi concernant le cannabis et modifiant la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, le Code criminel et d'autres lois et que ces réunions soient inscrites au calendrier à la suite de la comparution des ministres de la Santé, de la Justice et de la Sécurité publique au cours de la semaine du 18 septembre.
    Monsieur Eyolfson.
    Je propose que le débat soit ajourné maintenant.
    Nous avons maintenant une motion sur la question.
    Nous allons mettre aux voix la motion de M. Eyolfson.
    Je demande un vote par appel nominal, s'il vous plaît.
    Tous ceux qui sont en faveur de la motion d'ajournement?
    (La motion est adoptée par 5 voix contre 4.)
    La motion a été adoptée; nous avons donc ajourné le débat sur la question. Nous revenons à la question à l'étude.
    Il vous reste une minute et demie.
    D'accord.
    Monsieur Vigil, les emballages à l'épreuve des enfants empêcheront-ils les jeunes de 12 à 17 ans de les ouvrir?
    Non, absolument pas.
    Ils n'offrent donc aucune protection.
    Quelles seraient vos recommandations? Nous tentons, avec le projet de loi, de garder le cannabis hors de la portée des enfants. Ce qui nous inquiète, c'est que les produits comestibles que les gens rapportent à la maison sont attrayants. Ce sont toutes des choses que les enfants voudraient avoir: des bonbons, des biscuits, des sucettes.
    Compte tenu des surdoses que nous avons vues au Colorado, les gens devraient-ils mettre ces produits sous clé?
    Je suis d'avis que oui. La réglementation ne va pas jusque-là pour les produits que les gens ramènent à la maison. Pour la culture à domicile, la réglementation exige que les produits soient placés dans un endroit verrouillé s'il y a quelqu'un de moins de 21 ans dans la maison. En vérité, avec ce groupe d'âge, c'est beaucoup plus important de faire comprendre aux parents et aux personnes qui s'occupent d'enfants ou qui côtoient des enfants que s'ils utilisent ces produits, ils devraient les mettre sous clé. Bien sûr, il faut aussi sensibiliser les jeunes aux dangers de consommer ces produits.

  (1005)  

    Très bien.
    Combien de temps me reste-t-il?
    Il vous reste 28 secondes.
    Dans ce cas, je vais terminer par un commentaire.
    Monsieur Larsen, sauf votre respect, je trouve votre manque de respect pour la primauté du droit dans ce pays troublant. C'est évident que ce que nous ferons du projet de loi C-45 n'a aucune importance. Vous allez faire ce que vous voulez et obéir aux lois qui vous plaisent, et personnellement, je n'approuve pas cette attitude.
    Merci.
    Je crois en la Charte des droits.
    Nous passons maintenant à M. Davies.
    Merci.
    Monsieur Larsen, je vous remercie de votre présence. Parmi tous les témoins que nous avons reçus cette semaine, vous êtes le seul propriétaire de dispensaire — la seule personne qui participe au marché des produits comestibles et qui travaille avec ces produits quotidiennement, sur le plan commercial. Je trouve votre contribution très utile.
    D'abord, monsieur Larsen, si nous ne légalisons pas les produits comestibles, il n'y aura aucune façon d'analyser les concentrations de THC, de CBD et de tous les autres composés. Les Canadiens continueront à consommer ces produits, d'après moi, sans savoir exactement ce qu'ils contiennent puisque, comme vous l'avez dit, vous ne pouvez pas les envoyer à un laboratoire accrédité de Santé Canada pour en contrôler le contenu.
    Ai-je omis quelque chose?
    Non, tout cela est exact.
    D'accord.
    Vous venez de mentionner la question de la décriminalisation. Des accusations criminelles ont-elles été portées contre vous ou des mesures d'application de la loi ont-elles été prises à l'égard de vos clients? Dans la négative, quelles ont été les incidences du contexte criminalisé actuel sur vous et vos clients?
    Vancouver a, à l'égard du cannabis, une attitude plus progressiste depuis un bon bout de temps. Les arrestations pour possession de cette substance y sont rarissimes comparativement à d'autres régions. Vous allez entendre le témoignage de Hilary Black, qui y a fondé le premier dispensaire il y a une vingtaine d'années. Nous avons ouvert le nôtre en 2008. Il s'agissait alors du troisième dispensaire de la ville. Il en existe maintenant un bon nombre.
    À Vancouver, j'ai enfreint quotidiennement les lois sur le cannabis presque toute ma vie. La première fois où j'ai été accusé, c'est pour avoir donné des graines de cannabis à faible teneur en THC à Calgary l'an dernier. La situation varie vraiment d'une province à l'autre. La liberté dont nous jouissons à Vancouver ne s'applique certainement pas au reste du pays. Plus on se dirige vers le Nord, plus le taux d'accusations pour possession et trafic de cannabis augmente en flèche. Je pense que c'est largement parce que le nombre d'Autochtones augmente aussi à mesure qu'on monte vers le Nord.
    L'application des lois varie vraiment d'une région à l'autre du pays, ce qui souligne une fois encore l'iniquité de la situation. Je peux faire quelque chose à Vancouver sans en subir de conséquences, alors qu'une personne qui ferait la même chose ailleurs au pays aurait de très graves problèmes avec la justice.
     M. Webber nous a indiqué aujourd'hui qu'il n'a jamais mis les pieds dans un dispensaire. Je pense qu'il n'est pas seul dans son cas au sein du Comité. Vous avez l'avantage d'être à Vancouver, où j'ai eu la possibilité de visiter plusieurs dispensaires, notamment le Compassion Club et certaines installations autorisées.
    À titre de parlementaires, nous examinons ce projet de loi et devons formuler des recommandations au sujet d'un éventail de questions. Nous n'avons pas visité de dispensaires, d'installations de producteurs autorisés ou de clubs de compassion. Pensez-vous qu'il serait utile que les parlementaires qui forment notre comité se rendent dans les communautés pour visiter certaines installations afin de mieux évaluer si le projet de loi est valable dans sa forme actuelle ou s'il pourrait être amendé?
     Je pense que ce serait très utile de le faire. Pour comprendre ce qu'il se passe réellement et les limites des lois que vous tentez d'adopter et de la capacité que vous avez de les appliquer, il serait crucial d'observer ce qu'il se passe vraiment sur place et de voir les gens qui bénéficient de l'accès aux dispensaires afin de constater comment ces services améliorent leur vie et à quel point cela est bénéfique pour les communautés.
    Il existe toutes sortes de dispensaires. Je ne prétends absolument pas qu'ils sont tous gérés impeccablement, mais d'après mes observations, les gens sont heureux d'avoir des dispensaires, lesquels leur sont bénéfiques et procurent beaucoup de résultats positifs. Je pense qu'il vaudrait la peine d'aller voir ce qu'il se passe sur place pour savoir ce que les gens font et pour comprendre qu'on fait fi des lois actuelles sur le cannabis dans presque tout le pays à divers degrés. Si vous ne tenez pas compte de ces éléments quand vous adoptez de nouvelles lois, ces dernières seront vouées à l'échec, car nous continuerons de les ignorer et les tribunaux nous donneront raison.
    Vous évoquez la primauté du droit. Certains diraient que nous avons l'obligation morale d'enfreindre les lois inéquitables. Lorsque des lois punissent des gens qui ne méritent pas de l'être et qu'elles sont fondées sur les préjugés raciaux et l'ignorance de leurs fondements, nous avons l'obligation morale de les enfreindre. Personnellement, je me réjouis d'avoir pu fournir des médicaments à base de cannabis à ceux qui en ont besoin. Je considère que j'améliore quotidiennement la vie des gens, et nous continuerons de le faire.

  (1010)  

    Certains ont laissé entendre qu'une fois que ce projet de loi sera en vigueur et légalisera la possession simple et une poignée d'autres infractions, le Parlement devrait prendre des mesures pour accorder un pardon à ceux qui ont été condamnés pour des crimes qui n'en seront plus en vertu du projet de loi. Qu'en pensez-vous?
    Je pense que nous devrions aller plus loin que cela. Si j'étais responsable du dossier, j'imposerais la TPS sur le cannabis et, au cours des premières années, je verserais cet argent dans un fonds pour dédommager les Canadiens qui ont été injustement incarcérés ou qui ont vu leur vie bouleversée en raison de l'interdiction du cannabis.
    Je pense vraiment que la légalisation du cannabis devrait commencer par une excuse aux producteurs et aux consommateurs de cette substance, qui ont été injustement punis, incarcérés, harcelés et diabolisés pendant une centaine d'années. Pas pour moi personnellement, mais pour les gens qui, au Canada, ont souffert de cette injustice, je voudrais que le gouvernement non seulement accorde son pardon, mais offre également des excuses et une sorte de dédommagement. Ces lois ont été injustes depuis le début et le sont encore aujourd'hui. Nous savons depuis des décennies qu'elles ne fonctionnent pas et qu'elles sont un échec; c'est vraiment une honte que des gens soient encore arrêtés chaque jour.
    Un homme a passé trois nuits en prison récemment à cause de quelques grammes de cannabis au Canada. En leur âme et conscience, les parlementaires devraient être choqués qu'il existe des lois qui donnent lieu à de telles situations.
    On affirme que la consommation de cannabis a connu sa plus forte croissance au pays à une période où la peine obligatoire était de six mois d'emprisonnement pour possession de cannabis et la peine minimale obligatoire était de sept ans pour la culture ou l'importation de cannabis, peu importe la quantité. C'est à cette période que la consommation de cannabis a le plus augmenté au cours de l'histoire de notre pays. Le concept selon lequel les lois ont une incidence sur le comportement des gens et tous vont cesser de fumer du cannabis parce qu'on interdit cette pratique est complètement désuet. Ce sont maintenant les peines minimales obligatoires imposées par Stephen Harper qui s'appliquent au Canada, et elles n'ont absolument pas freiné la prolifération des dispensaires.
    Je pense que vous devez prendre acte des limites de ce que le Parlement et la police peuvent faire dans ce genre de situation, et élaborer des lois en conséquence.
    Votre temps est écoulé, monsieur Davies.
    Nous accordons maintenant la parole à M. Oliver.
    Merci beaucoup.
    L'un des avantages du modèle que nous utilisons, c'est qu'il nous permet d'entendre de nombreux témoins en peu de temps. Je pense que c'est la septième fois que nous sommes capables de faire un autre tour, alors que normalement, nous n'en avons pas le temps. C'est un bon processus pour nous.
    J'ai tenu une assemblée dans ma circonscription d'Oakville, et au moins 100 personnes sont venues — de simples citoyens, qui sont venus parler de la loi, des avantages et des inconvénients. Un homme a dit quelque chose qui m'a vraiment marqué. Il était très préoccupé par la fumée secondaire du cannabis. Il craignait d'avoir des traces dans son système s'il était exposé à cette fumée et prenait le volant, et il s'inquiétait des divers aspects relatifs à la santé.
    Monsieur Vandrey, je crois que vous avez mené une étude sur les effets de la fumée secondaire du cannabis sur les non-fumeurs. Pourriez-vous faire part au Comité de certaines des conclusions de votre étude?
    Nous avons réalisé une recherche dans le cadre de laquelle nous avons exposé des gens à la fumée secondaire du cannabis dans des conditions diverses. Dans un cas, c'était dans une pièce aérée, et dans l'autre, dans une pièce qui n'était pas aérée. Puis, dans la pièce non aérée, nous avons varié la puissance du cannabis que les gens fumaient. Nous avons constaté que l'aération de la pièce avait un effet considérable sur le degré d'exposition.
    Pour ce qui est du dépistage, le test sur la personne exposée pouvait être positif ou négatif, selon la façon dont nous réalisions le test et les limites que nous utilisions, mais nous avons constaté en effet que des résultats positifs étaient possibles pour les tests d'urine et les tests sanguins, de même que pour les tests salivaires ou l'analyse des liquides oraux, dans le cas d'une personne se trouvant dans une pièce non aérée. La durée dépendait de la façon dont les tests étaient réalisés et des limites utilisées.
    Les résultats positifs, dans de telles circonstances, se limitaient vraiment aux personnes dans des pièces non aérées dans lesquelles la fumée était dense. Quand on faisait fonctionner le climatiseur ou le système de CVCA, les gens n'avaient pas les facultés affaiblies et le test donnait généralement un résultat négatif.
    L'exposition à la fumée secondaire est vraiment préoccupante. C'est réel, mais il est difficile d'en subir les conséquences sans s'en rendre compte. À l'intérieur, la réglementation sur la fumée secondaire est pertinente, comme celle qui s'applique à l'usage du tabac. Nous n'avons pas fait le parallèle avec la vaporisation, alors nous ne connaissons pas vraiment le degré d'exposition aux vapeurs secondaires du cannabis consommé par vapoteuse, par rapport au cannabis qui est fumé. Il y a ensuite des limites évidentes, au-delà de cela. Pour notre étude, nous avons exposé des gens pendant une heure, une seule fois. Cela ne nous dit rien sur ce qui se produit si une personne est exposée plus longtemps, ou moins longtemps, mais à répétition. Encore là, c'est un aspect pour lequel il faut davantage de données scientifiques, mais notre étude a démontré que vous pouvez être légèrement intoxiqué et avoir des résultats de test positifs dans un environnement où l'exposition est extrême.

  (1015)  

    Je vous remercie beaucoup de votre réponse.
    C'étaient les questions que j'avais.
    Cela met fin à notre tour supplémentaire et à notre tour normal.
    Au nom du Comité, je remercie tous les témoins. Vous nous avez apporté d'excellentes perspectives, différentes de celles que nous avions déjà entendues, et nous vous en savons gré.
    J'ai parcouru un bout de la rue Sparks dans un nuage de fumée, l'autre soir, et je pense que si j'avais été soumis à un test, le résultat aurait été positif, au bout du compte.
    Sur ce, je vais interrompre la réunion, et nous reprendrons à 10 h 45. Merci beaucoup.

  (1015)  


  (1045)  

    Bienvenue à la 68e séance du Comité permanent de la santé. Nous étudions le projet de loi C-45, Loi concernant le cannabis et modifiant la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, le Code criminel et d'autres lois.
    Avec notre groupe de témoins, nous allons concentrer notre attention sur l'utilisation de la marijuana à des fins médicales. Nos témoins d'aujourd'hui sont, de la BC Compassion Club Society, la fondatrice, Hilary Black, et un administrateur, Marcel Vandebeek; des Canadiens pour l'accès équitable à la marijuana médicale, le directeur exécutif, Jonathan Zaid, et la représentante du Québec, Daphnée Elisma; du ministère de la Santé, Jacqueline Bogden, sous-ministre adjointe, Direction générale de la légalisation et de la réglementation du cannabis, et David Pellmann, directeur exécutif, Bureau du cannabis médical.
    Nous allons demander à chaque organisation de faire une déclaration liminaire de 10 minutes. Vous pouvez vous partager le temps, mais le maximum est de 10 minutes par organisation.
    Nous allons commencer par la BC Compassion Club Society.
    Bonjour. Je vous remercie de m'avoir invitée.
    Je suis Hilary Black, et je suis la fondatrice du premier dispensaire de cannabis à des fins médicales au Canada, qui a été fondé en 1997. Pour tout vous dire, je suis aussi employée par un producteur autorisé, mais je suis ici aujourd'hui pour représenter la BC Compassion Club Society, et je vous remercie de m'accueillir.
    La légalisation du cannabis touchera certains des citoyens les plus vulnérables de la société canadienne — les patients atteints de maladies chroniques ou graves. Nous vous présentons sept recommandations dans notre mémoire, afin de vous aider à établir l'ordre de priorité des besoins des patients. Mes observations d'aujourd'hui vont principalement porter sur trois grands aspects, soit assurer la transition de la BC Compassion Club Society vers le marché légal, faciliter l'abordabilité et soutenir la recherche. Nous soulignons aussi la nécessité d'une gamme de produits légaux et traitons des restrictions en matière d'éducation. Mon collègue, Marcel Vandebeek, va vous parler de la nécessité d'éliminer les barrières pour les petits producteurs.
    Nous distribuons du cannabis médical de façon responsable et ouverte depuis plus de 20 ans. Nous sommes une société sans but lucratif qui compte plus de 11 000 patients inscrits. Nous avons un centre de bien-être subventionné. L'an dernier seulement, nous avons offert 3 400 traitements holistiques, dont des massages, de la consultation, des traitements d'herboristerie et des conseils nutritionnels sans frais ou à peu de frais à nos membres. Notre organisation est une intervenante de première ligne en matière de réduction des effets nocifs. Nos clients sont souvent marginalisés, ont reçu plusieurs diagnostics, et ont des problèmes de santé mentale et des problèmes de consommation de substances. Ils sont oubliés par le système de soin de santé jusqu'à ce que nous les attrapions.
    Nous sommes un étalon en matière d'éducation. Nous savons comment maximiser les bienfaits, minimiser les risques et éviter les effets nocifs. Nous offrons à chaque membre une séance de formation individuelle sur la consommation de 60 à 90 minutes. Cela n'est pas possible dans une pharmacie. Notre collectivité nous soutient, notamment nos voisins, les entreprises, la police locale, les professionnels de la santé et les organismes de service aux patients. Nous formons une communauté. Nous organisons des fêtes de Noël, des pique-niques et des journées de nettoyage du quartier.
    Les tribunaux ont à maintes reprises reconnu notre travail. En 2002, le Comité du Sénat sur les drogues illicites a visité nos installations et a recommandé que notre modèle soit la norme à l'échelle du pays. Le sénateur Pierre-Claude Nolin — qu'il repose en paix — a soumis ma candidature, et on m'a décerné la médaille du Jubilé de diamant reconnaissant notre contribution importante au Canada. Notre modèle a été entériné dans les règlements municipaux de la ville de Vancouver afin d'encourager sa reproduction, car nos praticiens ont une liste d'attente de trois ans.
    Les membres du groupe de travail nous ont visités en septembre dernier. Vous êtes aussi invités à venir nous visiter. Quand ils ont présenté leur rapport, Anne McLellan a indiqué que ce qu'ils ont appris chez nous, si on ne tient pas compte de certaines questions d'illégalités, c'est qu'il peut y avoir une approche holistique axée sur le bien-être au niveau de la rue qui sert en général les populations très marginalisées et qu'il s'agit d'un modèle auquel le rapport fait référence en suggérant que les gouvernements y jettent un coup d'oeil avant d'aller de l'avant.
    Malgré toute cette reconnaissance venant de divers ordres de gouvernement, avec la légalisation du cannabis, nous risquons d'être encore plus criminalisés que nous l'avons été au cours des 20 dernières années. Nous avons l'énorme responsabilité de veiller à ce que les soins de santé offerts à nos membres ne soient pas interrompus, et nous suggérons respectueusement que vous assumiez une part de cette responsabilité avec nous.
    Notre institution est historique, concernant le cannabis à des fins médicales. Nous vous implorons de tout faire en votre pouvoir pour protéger les racines de cette industrie. Washington et le Colorado ont donné la priorité à la transition vers le nouveau cadre des dispensaires de cannabis médical de longue date, et nous devrions faire de même.
    Pendant des décennies, nous avons vu des patients obligés de choisir entre se procurer les médicaments qui leur permettent de fonctionner ou acheter d'autres produits de première nécessité, comme de la nourriture. Le problème réside dans le statut du cannabis. Ce n'est pas un médicament approuvé. L'accès y est accordé par les tribunaux. C'est, encore une fois, une catégorie unique, et ce n'est pas traité comme d'autres médicaments, même si de nombreux patients peuvent y accéder grâce à une autorisation du médecin.
    Ce statut est problématique aussi bien du point de vue des impôts que des assurances. Dans les deux cas, un processus réglementaire accéléré pour l'approbation du cannabis à des fins médicales résoudrait le problème. Pour de bonnes raisons, nous ne taxons pas les autres médicaments sur ordonnance. Les tribunaux ont déclaré, dans l'affaire Gerry Hedges c. Sa Majesté La Reine, que la loi imposant la taxe de vente sur le cannabis à des fins médicales entraînait de l'incertitude et de la confusion, et qu'il fallait retravailler la loi.
    On pourrait aussi modifier la Loi sur la taxe d'accise pour qu'elle indique clairement que le cannabis à des fins médicales est exempt de TPS, comme d'autres produits médicaux et médicaments d'ordonnance, afin de soulager le fardeau financier injuste que cela représente.
    J'aimerais vous présenter Mounia Lahbabi, qui a travaillé pendant 12 ans à la Chambre des communes comme adjointe parlementaire du député Peter Julian. On lui prescrit du cannabis pour les problèmes médicaux qui ont été diagnostiqués alors qu'elle travaillait à la Chambre des communes, notamment la maladie de Crohn, l'ostéo-arthrite et la discopathie dégénérative cervicale. Elle a essayé tous les traitements médicaux habituels pour ces maladies dévastatrices. Ils se sont tous révélés inefficaces et comportaient des effets secondaires nocifs. Le cannabis a immédiatement éliminé le besoin de prendre des immunosuppresseurs, des stéroïdes, des anti-inflammatoires non stéroïdiens et d'autres médicaments contre la douleur. Le cannabis soulage ses symptômes, dont la nausée, l'insomnie et la douleur chronique et neuropathique constante et débilitante. Sans cannabis, elle ne peut pas manger, dormir et fonctionner.

  (1050)  

    Ses médicaments sont inabordables, mais elle ne peut pas s'en passer. Sa famille a accumulé des milliers de dollars en dettes pour pouvoir payer le cannabis qui lui est prescrit à des fins médicales. Même si le cannabis médical n'a pas de numéro d'identification du médicament, la Sun Life, qui est responsable de l'administration des demandes de remboursement du régime de soins de santé de la fonction publique, a indiqué à Mounia qu'elle s'est organisée et qu'elle est prête à couvrir les coûts de cette thérapie nécessaire, une fois qu'elle sera incluse dans son régime.
    J'aimerais maintenant vous présenter Mandy McKnight. Elle est une employée de l'Agence du revenu du Canada. Son fils, Liam, a neuf ans et a reçu un diagnostic de syndrome de Dravet, une forme d'épilepsie catastrophique pour laquelle il n'existe pas en ce moment de traitement, et le pronostic est inconnu. Avant d'essayer le cannabis, Liam avait essayé 10 médicaments anti-épilepsie sans qu'aucun parvienne à maîtriser ses crises. Il subissait jusqu'à 80 crises par jour. Les effets secondaires des benzodiazépines et des barbituriques étaient graves, causant notamment l'atrophie du cerveau. On lui a prescrit du cannabis quand il n'avait que cinq ans, et depuis, Liam est remarquablement bien, et ses crises sont mieux maîtrisées qu'avec tout autre médicament. Cela coûte à sa famille plus de 1 000 $ par mois, plus la TVH. Les thérapies de rechange, qui sont moins efficaces et s'accompagnent d'effets secondaires terribles, coûtent de 2 500 $ à 3 000 $ par mois, mais elles sont couvertes par l'assurance.
    Mandy et Mounia se sont toutes les deux fait refuser par leur employeur des allégations santé en vue d'obtenir que l'assurance en couvre les coûts.
    Donnez au cannabis médical un numéro d'identification du médicament, ou quelque chose de semblable — peut-être un numéro d'identification du cannabis — afin de favoriser l'équité sur le plan des taxes et des assurances. Occupez-vous des patients et des fonctionnaires du Canada. C'est la chose à faire. Vous pourriez orienter le gouvernement, le pays et le monde en incluant le cannabis dans le régime de soins de santé de la fonction publique fédérale. Traitez les patients avec la dignité, la compassion et le soutien qu'ils méritent.
    Nous avons la possibilité d'être des leaders mondiaux et de développer la base de données probantes sur les bienfaits du cannabis médical et sur son profil d'innocuité. Nous connaissons une crise de surdoses d'opioïdes, et le cannabis présente un potentiel énorme comme outil de réduction des méfaits. Nous vous pressons d'investir d'importantes ressources dans la recherche clinique sur des êtres humains concernant le cannabis et les cannabinoïdes, ainsi que d'accorder la priorité à la recherche sur le potentiel du cannabis pour la gestion de la douleur et la réduction des méfaits liés à la toxicomanie et à l'abus de substances. Le Compassion Club a acquis une expérience exceptionnelle auprès des gens qui sont aux prises avec un usage problématique de drogues. Grâce au cannabis comme outil de réduction des méfaits, nous avons constaté le potentiel qu'offrent les produits comestibles et les résines hautement concentrés en remplacement des opiacés, de la méthadone, de l'alcool et de la cocaïne consommés à des fins récréatives ou médicales. Le pays a besoin de solutions pour enrayer le fléau des opiacés, et le potentiel du cannabis à cette fin est incroyable.
    Nous implorons le Comité de tout faire en son pouvoir pour que soient intégrés dans le cadre réglementaire le Compassion Club — une organisation communautaire de longue date contribuant à la réduction des méfaits en première ligne — et les autres dispensaires de cannabis médical existant depuis longtemps, soit les pionniers du mouvement et de l'industrie du cannabis médical. Je vous prie de bien tenir compte des sept recommandations de notre mémoire visant l'amélioration des soins aux patients.
    Je vous remercie. J'aimerais vous présenter mon collègue, Marcel Vandebeek, qui vous fera brièvement quelques observations.
    Bonjour. Je m'appelle Marcel Vandebeek. Je travaille à la BC Compassion Club Society depuis 19 ans, et j'y ai fait de la distribution en première ligne de cannabis médical pendant 5 ans, j'ai accompli des tâches administratives pendant 15 ans et je me suis occupé des achats pendant 17 ans. Je travaille avec les fournisseurs de la BC Compassion Club Society afin d'obtenir de façon constante du cannabis médical de grande qualité à offrir à nos membres.
    Comme ma collègue Hilary l'a dit, nous sommes une société sans but lucratif enregistrée qui fournit des soins de santé holistiques aux personnes qui en ont le plus besoin. Nous travaillons avec de petits producteurs qui cultivent le cannabis exclusivement pour nos membres et l'offrent à un prix inférieur au prix courant. Ils cultivent des variétés spéciales et ont accumulé de vastes connaissances, notamment sur des méthodes de culture biologique. Aucun n'a de liens avec le crime organisé, et tous assument un risque personnel considérable afin de nous aider à répondre aux besoins de nos membres. Nous examinons les valeurs idéologiques de nos fournisseurs et rejetons les producteurs qui ne sont motivés que par le profit. Nous avons un plafond rigoureux pour les prix, ce qui exclut automatiquement ceux qui ne cadrent pas avec notre mission, notre vision et nos valeurs, et nous leur demandons de petits dons en nature ou en espèces.
    Par exemple, nous avions un cultivateur, Joe, qui était atteint d'une grave invalidité. Il cultivait du cannabis biologique pour nous. Il nous donnait chaque Noël des milliers de dollars en cannabis pour nous aider à en faire cadeau à nos membres et ainsi alléger le fardeau financier pendant la saison des fêtes. Il utilisait ses petits profits pour financer un camp d'été pour des enfants handicapés. Malheureusement, il a fait l'objet d'une perquisition de la GRC. Il n'a jamais fait l'objet d'accusations, mais à cause de cela, il a été obligé de mettre fin à son camp d'été. Ce sont les bons Canadiens honnêtes, travaillants et respectueux des lois que le gouvernement voit comme étant les criminels à éliminer de l'industrie, alors qu'en fait, vous devriez les faire sortir de l'ombre.
    Le processus actuel de demande pour devenir un producteur autorisé est hors de prix pour les petits producteurs et les petits entrepreneurs, alors qu'ils font partie de la solution pour répondre à la pénurie dans la production légale. Les pionniers du mouvement et de l'industrie du cannabis médical ne pourront faire partie du marché légal si vous ne faites pas tomber les obstacles inutilement exigeants à l'obtention d'une licence.
    Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de prendre la parole devant le Comité. Je suis impatient de répondre à vos questions.

  (1055)  

    Je vous remercie de vos observations.
    C'est maintenant au tour de l'organisation Canadiens pour l'accès équitable à la marijuana médicale. Monsieur Zaid, vous avez 10 minutes.
    Merci de votre invitation, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité.
    Nous allons parler au nom de deux entités, soit l'organisme Canadiens pour l'accès équitable à la marijuana médicale, ou CAEMM, et la Société de l'arthrite. Je suis le fondateur et le directeur exécutif de CAEMM, un organisme national sans but lucratif qui se concentre sur les besoins des patients utilisant le cannabis médical. La Société de l'arthrite est le principal organisme caritatif canadien à fournir de l’information et des programmes aux Canadiens souffrant de l’arthrite, et elle apporte du soutien à plus de 4,6 millions de Canadiens qui souffrent de l'arthrite. Au cours des deux dernières années, les deux organismes ont travaillé en étroite collaboration à d'importants enjeux entourant la recherche sur le cannabis, l'accès au cannabis et son abordabilité. Le mémoire soumis au Comité a été créé conjointement par les deux groupes, et tout suivi peut être assuré auprès de moi-même ou de Janet Yale, PDG de la Société de l'arthrite. Vous vous souviendrez que Janet a récemment comparu devant le Comité sur d'autres sujets, notamment le régime d'assurance-médicaments national. J'aimerais aussi vous présenter Daphnée Elisma, la représentante de CAEMM au Québec, également membre de notre conseil consultatif des patients. Elle va tout à l'heure présenter un exposé. J'aimerais d'abord vous parler un peu de mon histoire personnelle.
    Nous entendons tellement parler des inconvénients et des risques possibles du cannabis, et ce sont des points importants, bien entendu, mais l'expérience que bien des patients et moi-même avons vécue est complètement différente. Le 22 avril 2007, alors que j'avais 14 ans, je me suis réveillé avec un mal de tête constant qui est encore présent aujourd'hui, 24 heures par jour, 7 jours par semaine. On dit de cette affection neurologique appelée « céphalée chronique quotidienne de novo » qu'elle est l'un des problèmes de douleur les plus difficiles à traiter. Après avoir essayé plus de 40 médicaments sur ordonnance et toutes les autres thérapies, j'étais prêt à abandonner. Je n'avais aucune qualité de vie. Je ne pouvais pas quitter la maison à cause de ma sensibilité au bruit et parce que je n'en avais pas l'énergie. J'ai abandonné l'école en huitième année, puis j'ai fait mon secondaire tant bien que mal. Finalement, je me suis tourné vers le cannabis médical. Il a contribué à atténuer mes poussées de douleurs et m'a permis de dormir. Cela ne guérit pas mon mal, mais grâce à la gestion efficace de mes symptômes, je peux me concentrer et réussir dans mes études. J'ai plaidé pour que le cannabis soit couvert par les assurances, et je suis le premier au Canada à avoir réussi à obtenir que mon cannabis médical soit ainsi couvert.
    Les patients qui utilisent le cannabis médical sont souvent perçus comme des drogués correspondant aux stéréotypes. Cependant, pour moi, Daphnée et les patients que nous représentons, la gestion efficace des symptômes se traduit par une meilleure qualité de vie et une meilleure capacité de fonctionner. Le cannabis est un médicament. Il y a plus de 200 000 autorisations visant l'utilisation de cannabis pour la gestion d'une variété de problèmes médicaux, dont les crises, la douleur, l'insomnie, la nausée et les vomissements, et les effets secondaires de médicaments sur ordonnance.
    Même si le cannabis médical est accessible légalement, son utilisation s'accompagne de nombreuses difficultés. Il nous faut plus de recherche. L'accès à diverses formes du produit et la distribution au détail forment un enjeu important, et l'abordabilité demeure l'une des préoccupations les plus pressantes des patients.
    L'un des principaux objectifs du gouvernement, dans ses travaux visant la légalisation du cannabis, est d'en réduire la consommation. Bien que cet objectif soit louable concernant le cannabis utilisé à des fins récréatives, le but du gouvernement ne doit pas être de restreindre l'accès au cannabis médical — un médicament —, mais bien de garantir une offre sûre, fiable et abordable pour ceux qui en ont besoin à des fins médicales.
    Nous allons souligner trois enjeux, aujourd'hui: l'importance d'un cadre réglementaire distinct, la recherche et l'abordabilité, dont Daphnée va vous parler. Il nous faut davantage de recherche, mais une étude récente des U.S. National Academies a fait ressortir des preuves substantielles de l'efficacité des cannabinoïdes pour des problèmes comme la douleur chronique, la sclérose en plaques et la nausée chimio-induite.
    Les deux cannabinoïdes les plus étudiés sont le THC et le CBD. Le THC, le cannabinoïde qui mène à l'effet d'euphorie associé au cannabis a des propriétés médicales, notamment analgésiques. Le CBD, un cannabinoïde ne causant pas l'affaiblissement des capacités et reconnu pour ses effets anti-inflammatoires et anticonvulsivants, restreint également l'affaiblissement des capacités causé par le THC. De nombreux patients utilisent les deux cannabinoïdes ensemble afin d'obtenir la gestion des symptômes la plus efficace tout en limitant l'affaiblissement possible des capacités. Il faut le répéter: la plupart des personnes qui utilisent le cannabis à des fins médicales ne cherchent pas d'effet d'euphorie, mais veulent plutôt la gestion efficace de leurs symptômes et une meilleure qualité de vie.
    Le cannabis est un médicament légitime, et il faut le traiter ainsi. Il est important qu'on le traite comme tel dans un cadre de réglementation distinct. Nous tenons à féliciter le gouvernement qui, en créant le projet de loi C-45, reconnaît la nécessité de maintenir une approche réglementaire distincte pour le cannabis médical, et nous voulons veiller à ce que cela demeure. Mis à part l'obligation constitutionnelle imposée au gouvernement de fournir un accès raisonnable au cannabis à des fins médicales, nous croyons qu'il convient mieux d'adopter un cadre réglementaire distinct pour le cannabis et les besoins des patients. Dans le sillage du projet de loi C-45, il sera important que le gouvernement accorde la priorité aux patients en répondant à leurs besoins non satisfaits et qu'il leur offre le soutien requis.

  (1100)  

    Bien entendu, la recherche est un élément très important. Il manque énormément de travaux de recherche convenablement financés et d'essais cliniques canadiens portant sur l'usage thérapeutique du cannabis médical. Cela crée des entraves pour les patients, car de nombreux médecins se disent réticents à autoriser le cannabis médical en l'absence de solides études de recherche évaluées par les pairs.
    Santé Canada a aussi cité l'insuffisance d'études de recherche scientifique et clinique comme principale raison pour laquelle le cannabis médical n'est pas encore réglementé en tant que produit thérapeutique, ce qui empêche les patients d'accéder au cannabis médical grâce aux régimes publics ou privés d'assurance-médicaments. Il faut en particulier plus de recherche au sujet des doses, des indications et des formes. À cette fin, nous avons demandé que, dans le budget de 2018, le gouvernement fédéral s'engage à consacrer 25 millions de dollars sur cinq ans au soutien de la recherche sur le cannabis médical. Cet investissement contribuerait beaucoup au développement des données probantes sur le cannabis médical, et c'est très peu par comparaison au montant de 274 millions de dollars qui a déjà été proposé pour l'application de la loi.
    Bien que nous appuyions sans réserve l'application de la loi et la recherche sur les risques liés à l'usage du cannabis à des fins récréatives, nous croyons qu'il faut que le gouvernement fédéral investisse dans la recherche portant précisément sur l'usage médical du cannabis. C'est une étape urgente et essentielle pour mieux comprendre et reconnaître l'utilisation médicale légitime du cannabis et pour garantir la durabilité d'un cadre réglementaire distinct.
    En ce qui concerne l'amélioration de l'accès, en plus du maintien de la vente par correspondance et de la production personnelle, nous croyons que les pharmacies devraient avoir le pouvoir exclusif de vendre au détail le cannabis médical et que d'autres formes du produit devraient être offertes. La vente dans les pharmacies contribuerait à améliorer l'abordabilité, notamment en faisant disparaître la taxe de vente en conformité de la Loi sur la taxe d'accise, et elle améliorerait le potentiel d'obtenir une couverture d'assurance.
    Les pharmaciens pourront garantir que des professionnels de la santé formés à cette fin fournissent aux patients à l'échelle du pays de l'information fiable sur l'utilisation sûre et efficace du cannabis, avec une surveillance d'ordre réglementaire. Les décisions relatives à la vente au détail et à la distribution relèvent dans une grande mesure de la compétence des provinces, mais pour que la distribution se fasse en pharmacie, il faudra modifier les mesures réglementaires visant l'accès au cannabis à des fins médicales.
    Je vais maintenant laisser Daphnée vous parler d'abordabilité.

[Français]

     Après plus d'une décennie au sein de Santé Canada et en ma qualité de juriste, je défends la cause des patients qui utilisent le cannabis médicinal. En fait, j'utilise moi-même le cannabidiol, ou CBD, avec succès pour pallier le syndrome douloureux régional complexe dont je souffre à la suite du traitement d'un cancer du sein.
    La question de la modicité des tarifs constitue un enjeu de taille pour les patients que nous représentons ici aujourd'hui, puisque le cannabis médicinal s'avère la médication la plus efficace pour traiter leur maladie.
    Tout d'abord, nous recommandons que le cannabis à des fins médicales soit exempté de taxe. Lorsqu'un patient se procure des médicaments sous ordonnance et pour des nécessités médicales, ces derniers sont exemptés en vertu des lois fédérales. Comme le cannabis médicinal répond à ces critères, le gouvernement devrait permettre le retrait de la taxe de vente, le rendant ainsi plus abordable.
    Ensuite, nous demandons l'adoption de politiques et de programmes facilitant la couverture des coûts du cannabis médicinal en vertu des régimes publics et privés. Nous conseillons que le gouvernement puisse approuver le cannabis comme produit thérapeutique, incluant l'attribution d'un numéro d'identification de médicament, afin d'en faciliter le remboursement.
    En somme, les patients qui utilisent le cannabis pour pallier leur condition physique et psychologique se sentent victimes de discrimination. Le gouvernement fait une distinction entre ces patients et ceux qui utilisent des médicaments conventionnels tels que les opioïdes pour traiter la même maladie. Ainsi, le patient se trouve souvent astreint à utiliser un opiacé au lieu du cannabis parce que ce dernier est moins abordable.
    La taxation et l'absence de remboursement du cannabis médicinal représentent une contrainte excessive pour les patients. L'amélioration des droits des patients utilisant le cannabis médicinal doit demeurer au coeur des échanges.
    Je remercie les membres du Comité de m'avoir donné l'occasion de m'adresser à eux aujourd'hui.

  (1105)  

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Écoutons maintenant Mme Bogden. Je vous souhaite de nouveau la bienvenue parmi nous.
    Je vous remercie de me permettre de comparaître devant le Comité encore une fois ce matin. Je demanderai aux membres du Comité de faire preuve d'indulgence. J'ai eu un petit rhume ces derniers jours, donc ma voix n'est pas aussi bonne que lundi, mais je ferai de mon mieux.
    Mon collègue, M. David Pellmann, dirige le Bureau du cannabis médical. À titre de fonctionnaires, nous avons la responsabilité d'administrer, au nom de Santé Canada, le cadre réglementaire actuel qui permet aux Canadiens d'avoir accès à du cannabis à des fins médicales.
    J'aimerais fournir au Comité un aperçu du cadre réglementaire, en mettant l'accent sur quatre éléments. Il y a premièrement la conception même du cadre actuel, son fonctionnement et le nombre de Canadiens qui en bénéficient. Deuxièmement, je vous parlerai des obligations et des contrôles robustes qui s'appliquent à la production autorisée de cannabis, afin de protéger la santé et la sécurité publique. Troisièmement, je décrirai quelques-unes des principales améliorations que Santé Canada a apportées au programme au cours des six derniers mois. Enfin, j'expliquerai pourquoi et comment ce cadre serait préservé sous le régime de la loi sur le cannabis qui vous est soumise.
    Le Canada autorise l'accès au cannabis à des fins médicales d'une manière ou d'une autre depuis la fin des années 1990. Ce régime réglementaire a été mis en place après une décision judiciaire qui a établi que le gouvernement du Canada doit fournir des moyens légaux aux Canadiens d'accéder à du cannabis et d'en posséder à des fins médicales. Ce cadre a évolué considérablement au fil du temps, au gré des améliorations apportées par les gouvernements, et s'est adapté à diverses contestations et décisions judiciaires.
    La plus récente date d'avril 2016, où la Cour fédérale a déterminé que le cadre réglementaire en place n'accordait pas un accès raisonnable au cannabis à des fins médicales. Dans ce cas, « accès raisonnable » a été défini comme le fait d'avoir facilement accès à du cannabis abordable.
    En réponse à cette décision, il y a un peu plus d'un an, Santé Canada a adopté un nouveau cadre réglementaire, intitulé Règlement sur l'accès au cannabis à des fins médicales. En vertu de ce nouveau régime, les Canadiens en ayant reçu l'autorisation de leur médecin peuvent avoir accès à du cannabis d'une de trois façons. La première consiste à acheter du cannabis de qualité contrôlée d'un producteur autorisé par le gouvernement fédéral. Les personnes s'inscrivent alors directement auprès du producteur autorisé, et leur produit est livré en toute sécurité à la maison, par la poste ou par messager. Les gens ont également l'option de s'inscrire auprès de Santé Canada afin de produire une quantité limitée de cannabis chez eux ou de désigner une personne qui aura la responsabilité d'en produire pour eux.
    Comme je l'ai mentionné, les Canadiens doivent avoir l'autorisation de leur médecin pour avoir accès à du cannabis à des fins médicales. Santé Canada estime que la décision d'utiliser du cannabis à des fins médicales relève du médecin avec son patient.
    Sur son site Web, Santé Canada fournit de l'information destinée aux professionnels de la santé. Le ministère travaille également en étroite collaboration avec les autorités réglementaires provinciales et territoriales, qui guident ensuite les médecins sur leur territoire.
    Les médecins autorisent le cannabis pour traiter divers symptômes associés à toutes sortes de problèmes médicaux, comme la nausée chez les patients en chimiothérapie, la perte d'appétit et de poids associée au VIH-sida ou la douleur et la spasticité associées à la sclérose en plaques ou à l'arthrite.
    En ce moment, sous le régime de la nouvelle réglementation, il y a plus de 210 000 autorisations actives d'utilisation du cannabis à des fins médicales. De ce nombre, 200 000 personnes sont inscrites auprès du gouvernement fédéral pour bénéficier des services des producteurs autorisés. Elles achètent leurs produits directement des producteurs. Enfin, 10 000 personnes sont enregistrées auprès de Santé Canada afin de produire elles-mêmes une quantité limitée de cannabis à la maison ou de désigner une personne pour le faire à leur place.
    Le nombre de clients enregistrés pour bénéficier des services des producteurs autorisés continue de croître, à un taux d'environ 9 % par mois depuis que la production autorisée a commencé en 2013. Le nombre de médecins qui autorisent l'utilisation du cannabis augmente aussi constamment. Il y a dorénavant 10 000 médecins qui en autorisent l'utilisation, soit le double du nombre consigné en juin 2015.
    J'aimerais maintenant vous décrire brièvement le système de la production réglementée de cannabis au Canada. Il y a actuellement 58 producteurs titulaires d'un permis afin de produire du cannabis à des fins médicales. Ces producteurs sont les seules sources commerciales légales de cannabis réglementé et de qualité contrôlée à des fins médicales au Canada.

  (1110)  

    Le cadre réglementaire établit une série d'obligations strictes à respecter pour protéger la santé et la sécurité des Canadiens et l'intégrité du système juridique. Par exemple, les producteurs autorisés sont tenus d'observer de bonnes pratiques de production dans leurs installations, notamment de se doter d'un bon programme sanitaire et de désigner une personne responsable de l'assurance de la qualité. Ils doivent tester absolument chaque lot pour la moisissure, les bactéries et d'autres contaminants potentiels avant sa mise en vente au public. Les producteurs autorisés doivent également analyser la puissance en THC et en CBD de chaque lot, et les résultats doivent figurer sur l'étiquette.
    Pour prévenir tout détournement vers le marché illicite et assurer l'intégrité du système juridique, tous les titulaires de permis, les directeurs d'entreprise et les gestionnaires d'une installation doivent recevoir une attestation de sécurité. Cette attestation comprend une vérification du casier judiciaire et des bases de données policières pour mettre en lumière toutes les associations ou affiliations connues avec le crime organisé. De plus, toutes les installations doivent se doter de mesures de sécurité physique et de contrôle de l'inventaire pour prévenir le vol ou le détournement.
    Ces normes et contrôles s'accompagnent de mesures d'assurance de la conformité et d'application de la loi rigoureuses. L'an dernier, Santé Canada a inspecté chaque installation de sept à huit fois, en moyenne, pour un total d'environ 275 inspections. Ces inspections visent à vérifier le respect de bonnes pratiques de production et les résultats des tests effectués sur tous les produits, à attester de l'utilisation des pesticides autorisés seulement, à examiner les dossiers d'inventaire et à confirmer que des mesures de contrôle de la sécurité sont bien en place dans les installations.
    Je souligne la reconnaissance internationale du système canadien de production réglementée de cannabis. Nous recevons fréquemment des visites et des appels d'autres pays désireux d'obtenir des conseils sur notre modèle axé sur le patient, notre régime d'octroi de permis strict et notre programme de conformité et d'application de la loi.
    J'aimerais maintenant vous présenter quelques-unes des améliorations récemment apportées pour que les Canadiens continuent de jouir d'un accès raisonnable au cannabis et de faire confiance au contrôle de la qualité du cannabis à des fins médicales. En mai dernier, Santé Canada a annoncé qu'il allait obliger tous les producteurs autorisés à réaliser des tests sur tous les produits de cannabis afin de détecter la présence de pesticides non autorisés. De plus, Santé Canada mène des inspections non annoncées chez tous les producteurs autorisés et analyse des lots et des produits au hasard afin de détecter la présence de pesticides non autorisés. De même, toujours en mai dernier, Santé Canada a amélioré ses services et a octroyé de nouvelles ressources afin de simplifier l'octroi de permis aux producteurs et de permettre une production accrue de cannabis, tout en maintenant un contrôle de la qualité et une surveillance rigoureux. Ces mesures contribueront à assurer un approvisionnement licite de cannabis de qualité contrôlée si le projet de loi sur le cannabis est approuvé par le Parlement.
    La question de savoir s'il faut conserver un cadre séparé régissant l'accès au cannabis à des fins médicales est l'une des grandes questions auxquelles le gouvernement a demandé au groupe de travail d'experts sur la légalisation et la réglementation du cannabis de répondre. Ce groupe de travail a consulté abondamment les experts de la santé publique et de l'application de la loi, les patients et leurs défenseurs, y compris les personnes présentes à la table à mes côtés aujourd'hui, de même que les producteurs autorisés. Pendant ces consultations, ses membres ont entendu comment le cannabis change la vie de Canadiens confrontés à de graves problèmes de santé comme le cancer, le VIH/sida, la sclérose en plaques, l'arthrite et la fibromyalgie. Il a également entendu parler du rôle que le cannabis peut jouer dans la gestion de la douleur et les soins palliatifs et du soulagement qu'il procure aux enfants souffrant de formes graves d'épilepsie. Sur la base de ses conclusions, le groupe de travail a recommandé au gouvernement de conserver un cadre d'accès médical séparé pour aider les patients. Il a aussi recommandé que le gouvernement fasse un suivi et une évaluation de l'accès raisonnable pour les patients pendant la mise en oeuvre de la nouvelle loi, puis qu'il le réévalue au bout de cinq ans. Le gouvernement a accepté les recommandations du groupe de travail, si bien que le projet de loi sur le cannabis qui vous est soumis aujourd'hui prévoit le maintien de ce cadre.
    Pour terminer, monsieur le président, je souhaite souligner que Santé Canada est déterminé à permettre aux Canadiens d'avoir un accès raisonnable au cannabis à des fins médicales. Nous continuerons de suivre la situation de près, comme nous le faisons déjà, et nous sommes prêts à prendre d'autres mesures au besoin. Enfin, nous continuerons de solliciter l'avis des patients et des producteurs pour améliorer continuellement notre façon d'administrer le régime et veiller à ce qu'il serve bien les Canadiens.
    Nous sommes tout disposés à répondre à vos questions. Merci.

  (1115)  

    Merci infiniment.
    Commençons maintenant la première série de questions.
    M. McKinnon brisera la glace et disposera de sept minutes.
    Ma première question s'adresse à Mme Bogden. Dans son exposé, M. Zaid a demandé qu'on attribue un numéro d'identification du médicament, ou un DIN, au cannabis. Je me demande comment cela fonctionnerait, s'il y a des obstacles à cela et ce que cela implique.
    Le cannabis pourrait entrer dans la catégorie des médicaments thérapeutiques sous le régime de la Loi sur les aliments et drogues. Quand une entreprise souhaite commercialiser un médicament au Canada, il y a toute une série d'étapes à suivre pour présenter une demande.
    Santé Canada analysera toute la documentation fournie pour vérifier l'innocuité, l'efficacité et la qualité du produit. Le processus prévoit la présentation des résultats d'études cliniques et précliniques menées au Canada ou à l'étranger, ainsi que des détails entourant la production et l'emballage du médicament, entre autres.
    Pour l'instant, le cannabis lui-même (séché, frais ou sous forme d'huile) n'est pas autorisé comme produit thérapeutique. Aucune entreprise n'a encore formulé de demande ni présenté toutes les preuves cliniques requises. Cependant, je mentionne qu'un certain nombre de médicaments à base de cannabis... Il y en a en fait deux qui sont approuvés, qui ont passé le processus d'autorisation de mise en marché, ont reçu un DIN, sont vendus et sont admissibles à un remboursement d'assurance.
    À part ces deux produits, aucun n'a été soumis par un producteur ou fabricant. Aucun n'a demandé de DIN pour ses produits et fourni les données scientifiques voulues. D'accord.
    Monsieur Zaid, pouvez-vous nous dire ce que vous en pensez? Avez-vous discuté avec des gens de la possibilité de présenter une demande de numéro d'identification?
    Nous serions absolument ravis qu'une entreprise pharmaceutique présente une demande de numéro d'identification du médicament, mais l'un des problèmes qui touche le cannabis et qui le rend unique, c'est qu'il s'agit d'une plante. Il ne s'agit pas d'une molécule brevetable, comme la plupart des médicaments régis par la direction des produits thérapeutiques.
    Quand on parle du cannabis, il y a toutes sortes d'indications possibles. Il y a vraiment de la recherche à faire. Il faut favoriser les recherches sur le cannabis médical. Le gouvernement a une obligation à ce titre, selon nous, en raison de la difficulté à faire breveter le cannabis. Il doit stimuler la recherche et veiller à ce que nous ayons toutes les études nécessaires pour pouvoir obtenir un DIN. D'ici là, nous croyons qu'il faudrait attribuer un DIN au cannabis, ou quelque chose d'équivalent pour en faciliter le remboursement, parce que c'est crucial pour de nombreux patients au Canada.
    Il semble ne pas y avoir assez de recherches sur le sujet. Il faudrait simplement qu'il y ait des gens qui enclenchent le processus officiellement pour rendre la chose possible. N'y a-t-il personne à votre connaissance qui a entrepris des démarches?
    Non, aucune démarche officielle n'a été enclenchée, mais il y a quelques producteurs autorisés qui mènent des essais cliniques à petite échelle. Il est bien loin d'y en avoir autant que nous le voudrions, cependant. Nous aimerions aussi que les IRSC investissent 25 millions de dollars en subventions de recherche, pour financer des recherches impartiales, qui ne seraient pas financées par les sociétés pharmaceutiques.
    La recherche est donc l'élément central. Il y a la question des brevets et le vaste éventail des indications thérapeutiques, ce qui signifie qu'il y a beaucoup de recherches à faire. Ce sont des recherches cliniques qui coûtent cher. La Société de l'arthrite a organisé un forum il y a quelques années, grâce auquel elle a rassemblé tous les chercheurs, puis publié un rapport déterminant une liste de priorités. Nous connaissons donc les priorités. Nous savons ce qu'il faut étudier. Nous avons seulement besoin de financement pour le faire.

  (1120)  

    Je pense que Mme Black aimerait intervenir à ce sujet.
    Il y a beaucoup d'excellentes études qui existent sur le cannabis médical. Ce sont vraiment les essais cliniques à grande échelle sur les humains qui plombent la recherche. Il ne faut pas oublier que cette plante est interdite depuis presque 100 ans, de sorte qu'il est impossible pour les chercheurs qui souhaitent l'étudier de trouver une source d'approvisionnement licite et constante. Ces recherches sont très coûteuses, et il faut énormément de temps pour obtenir un permis, même pour les laboratoires.
    L'une des mesures que le gouvernement pourrait prendre, outre de financer la recherche, serait de l'encourager, de la faciliter et d'accélérer le processus autant qu'il le peut.
    Vous affirmez qu'il existe beaucoup d'études, mais tant que personne n'entame de démarche officielle pour présenter une demande, on n'obtiendra jamais de numéro d'identification du médicament.
    Comme Jonathan l'a dit, il y a des complications dans le cas du cannabis, parce qu'on ne peut pas le breveter. Je crois que si le gouvernement y affectait des ressources et que de votre côté, vous favorisiez la recherche sur les utilisations médicales du cannabis plutôt que de les empêcher, les choses pourraient commencer à progresser un peu.
    Madame Bodgen, avez-vous quelque chose à ajouter?
    J'aurais peut-être dû dire dans ma première réponse à la question du député que le projet de loi sur le cannabis accorderait une souplesse accrue à la ministre pour autoriser différents types de recherches sur le cannabis. Je veux dire qu'il améliorerait le processus en vigueur actuellement, qui oblige les personnes à obtenir une exemption pour pouvoir mener ce type de recherche.
    Je pense que l'une des vertus de ce projet de loi sera de faciliter la recherche. J'aurais peut-être dû le mentionner d'emblée.
    Madame Black, je pense que vous demandez des ordonnances plutôt que des autorisations. Vous croyez que cela améliorerait l'accès au produit, n'est-ce pas?
    Compte tenu des exigences prescrites par le règlement actuel sur le cannabis à des fins médicales, le RACFM, on accorde des autorisations de possession de cannabis plutôt que d'en prescrire; c'est comme dans l'histoire de l'oeuf et de la poule. Comme il ne s'agit pas d'un médicament approuvé, on ne peut techniquement pas parler d'ordonnance.
    On utilise le terme « autorisation » plutôt qu'« ordonnance ». C'est l'impasse dans laquelle se trouvent beaucoup de gens quand ils essaient d'obtenir un remboursement d'assurance, et c'est la raison pour laquelle la cour de l'impôt a déterminé que la TPS s'applique au cannabis médicinal.
    D'après ce que je comprends, les médecins hésitent à rédiger des ordonnances, parce qu'ils n'ont pas d'études sur lesquelles s'appuyer. Ils ne connaissent pas les conséquences médicales du cannabis d'une certaine puissance, par exemple, donc je présume qu'ils seront moins enclins à rédiger une ordonnance qu'à donner une autorisation.
    Je ne suis pas médecin, mais je communique fréquemment avec mes médecins. Je serais portée à croire que le formulaire d'autorisation que les médecins doivent remplir à l'heure actuelle leur prend plus de temps et est plus fastidieux que la rédaction d'une ordonnance.
    Mais qu'on parle d'ordonnance ou d'autorisation, cela ne règle en rien le problème de la recherche et de l'éducation dont ont besoin les médecins partout au pays.
    Le temps est écoulé. Merci beaucoup.
    Passons à M. Webber.
    Je remercie tous les témoins d'être ici aujourd'hui. Je vous remercie également vous, madame Black et monsieur Vandebeek, pour tout votre travail des 20 dernières années. Je suis un ardent défenseur de la marijuana thérapeutique.
    Ma femme a reçu à 37 ans un diagnostic de cancer du sein de stade 4, puis a dû subir de la chimiothérapie et de la radiothérapie d'une incroyable intensité. Elle souffrait de nausées intenses et incontrôlables. C'était désespérant. Nous avons dû nous résoudre à acheter de la marijuana sur le marché noir pour l'essayer, et cela a fonctionné. Cela a calmé ses nausées. Bien sûr, à l'époque, nous n'avions aucune idée de la composition du produit. Évidemment, le cannabis avait une forte teneur en THC, qui lui a causé bien de mauvaises expériences, mais il a arrêté les nausées. J'estime fondamental que les Canadiens puissent se faire prescrire de la marijuana de qualité, adaptée aux besoins des patients qui souffrent autant. Je répète donc à quel point je suis favorable à cela.
    Vous avez parlé de vos jeunes patients. Bien sûr, monsieur Zaid, vous êtes jeune, et vous avez besoin de marijuana. Je suis heureux qu'on ait trouvé quelque chose pour soulager vos migraines, soit dit en passant.
    Je vous pose la question à tous les deux: les études scientifiques qui établissent clairement une corrélation entre la consommation de marijuana à un jeune âge et les problèmes de santé mentale ne vous inquiètent-elles pas, parce que le cerveau est encore en développement?
    Je commencerai par M. Zaid.

  (1125)  

    Premièrement, oui, bien sûr que cela m'inquiète. Je pense, cependant, que le contexte est différent selon qu'on parle d'un usage thérapeutique ou d'un usage récréatif.
    Encore une fois, j'ai essayé 40 médicaments d'ordonnance. Aucun n'a jamais été étudié pour traiter mon problème, aucun. Ces médicaments avaient des effets secondaires pouvant aller jusqu'à la mort et la déficience cognitive, et ils m'ont été prescrits sans qu'on ne se pose ce genre de questions.
    Je pense que quand on souffre d'un problème de santé, les traitements alternatifs posent des risques, mais il y a aussi des risques à ne pas recevoir de traitement efficace, donc pour moi, les risques ne se comparaient absolument pas aux avantages que le cannabis pouvait me procurer. Je pense que c'est le cas pour beaucoup de patients.
    Il y a par ailleurs un autre aspect que j'aimerais souligner. On parle beaucoup du cannabis dans son ensemble, mais la plante renferme des centaines d'éléments chimiques. Certaines recherches mettent en lumière l'effet dangereux du THC sur le développement du cerveau des adolescents, mais beaucoup de patients pédiatriques prennent du CBD pur, et dans ce cas, les recherches ne montrent pas de corrélation avec le développement du cerveau.
    Compte tenu de ces deux aspects, soit du contexte médical et des différents cannabinoïdes qu'on peut utiliser, je pense qu'il y a indéniablement un potentiel pour traiter les jeunes.
    Est-ce le CBD qui soulage vos migraines, le THC ou un mélange des deux? Qu'est-ce qui vous aide?
    C'est un mélange des deux. Le jour, j'utilise principalement du CBD. Je suis sous l'effet du cannabis en ce moment. Je pense qu'il n'y a personne ici qui croirait que j'ai les facultés affaiblies. La plupart des gens ne seraient pas portés à croire non plus que je souffre d'une grave maladie chronique. J'ai des outils efficaces de gestion des symptômes. Je ne suis pas gelé. Je consomme un peu de THC le soir. Il m'aide à dormir, et le sommeil est tellement important dans un mode de vie sain. Dans l'ensemble, le cannabis est très efficace pour améliorer ma qualité de vie.
    Madame Elisma, vous avez mentionné être une survivante du cancer, et dans votre exposé, vous avez admis continuer de consommer du CBD. Je comprends que la marijuana est efficace pour traiter la nausée, par exemple, mais pourquoi continueriez-vous d'en prendre après les traitements?

[Français]

     Il y a une chose que je n'ai pas mentionnée plus tôt, lors de ma présentation, et c'est qu'en plus de la douleur chronique, j'ai développé des migraines très persistantes. Mon traitement consiste donc en de fortes doses de CBD mélangées à du THC. Cela me permet d'avoir une meilleure qualité de vie. Présentement, je n'ai aucun problème de migraine. Celles-ci ont complètement disparu depuis que j'ai commencé ce traitement. Auparavant, j'utilisais plusieurs médicaments d'ordonnance, notamment le naproxène. Ces médicaments très puissants me causaient des problèmes de santé. Lorsque je me suis tournée vers le cannabis médicinal, ma qualité de vie s'est beaucoup améliorée. Je veux continuer ce traitement pour le reste de ma vie.

[Traduction]

    Je vous remercie.
    Madame Bogden, vous nous avez parlé des producteurs autorisés et vous avez décrit les conditions strictes qu'ils doivent respecter. J'ai eu l'occasion de visiter un établissement autorisé situé au nord de Calgary. Vous l'avez bien décrit. On a l'impression d'entrer dans une prison fédérale quand on y arrive, mais oui, il y a beaucoup d'exigences sanitaires. On pourrait manger sur le plancher tellement il est propre. C'est très impressionnant. J'encourage tous nos membres, s'ils en ont l'occasion, à aller visiter les installations d'un producteur autorisé.
    Concernant les observations que vous avez faites sur les attestations de sécurité strictes que doivent obtenir les producteurs autorisés, nous avons entendu divers témoins nous recommander de permettre à ceux qui ont de l'expérience dans le domaine, qui ont peut-être même déjà été trouvés coupables d'infractions liées à la marijuana, de présenter une demande de permis et d'être acceptés. Qu'en pensez-vous?
    Il y a principalement deux raisons pour lesquelles nous exigeons des attestations de sécurité: pour protéger l'intégrité du système judiciaire dans son état actuel et pour nous prémunir contre le détournement de produits. Nous avons pris des décisions très conscientes quant aux exigences d'attestation de sécurité que nous imposons à toutes les principales personnes membres des organisations. C'est une caractéristique importante du système, et elle devra être maintenue si nous voulons nous assurer que le système n'est pas infiltré par le crime organisé.
    Bien sûr, nous connaissons les points de vue présentés par d'autres parties, et ils seront pris en considération dans l'élaboration de la réglementation future, mais je pense qu'il ne faut pas oublier non plus les objectifs du gouvernement afin de protéger l'intégrité du système.

  (1130)  

    Très bien.
    Monsieur Davies.
    Je remercie tous les témoins de leur présence ici.
    Monsieur Zaid, sous quelle forme ingérez-vous votre cannabis?
    Je l'ingère principalement par vaporisation, mais aussi en capsules. Je trouve que c'est la solution la plus efficace pour moi. Cela dit, j'aimerais beaucoup essayer le produit sous d'autres formes comme les teintures sublinguales et les crèmes traitant les douleurs neuropathiques. Ces produits ne sont pas disponibles dans le système.
    La Cour suprême a statué dans un arrêt que les patients devraient avoir accès à tout un éventail de produits. Santé Canada y a réagi en autorisant la vente d'huiles et de capsules, mais les capsules sont d'une puissance limitée, ce qui est très problématique, et des produits de base comme des crèmes ne sont toujours pas accessibles. Nous aimerions avoir accès à un plus vaste éventail de produits.
    Madame Elisma, comment consommez-vous votre cannabis? Est-ce en le fumant ou sous d'autres formes?

[Français]

     Comme M. Zaid, j'emploie un vaporisateur. J'utilise aussi le cannabis sous forme d'huile, que j'achète auprès d'un producteur licencié, bien sûr. Cela m'aide vraiment beaucoup à gérer les symptômes de ma douleur. Je le prends parfois sous forme séchée et il m'arrive de le fumer, selon les besoins qui se manifestent au cours de la journée. Cela dit, je l'utilise principalement en vaporisateur et sous forme d'huile.

[Traduction]

    Merci.
    Madame Bogden, vous avez indiqué que les producteurs autorisés sont assujettis à un régime que vous avez qualifié de très strict. Vous effectuez des tests sur l'utilisation de pesticides, la présence de moisissures, les niveaux de CBD et de THC, les contrôles sanitaires et les mesures de sécurité prises. Des inspections sont menées. Aucune de ces précautions n'est actuellement prise dans le cas des produits comestibles, n'est-ce pas?
    Suivant le régime en place, les producteurs autorisés peuvent produire du cannabis séché et de l'huile de cannabis, et ce, sous différentes formes.
    Je comprends. Les produits comestibles ne sont donc pas assujettis à ce régime. Quiconque fabrique actuellement des produits comestibles au Canada n'a pas à se prêter à tous ces tests que vous avez décrits. Est-ce bien cela?
    Voulez-vous parler d'un individu qui serait autorisé à produire une quantité limitée de cannabis à la maison?
    Ce régime d'évaluation ne s'applique pas à toute personne qui fabrique des produits comestibles pouvant être vendus dans ce pays, que ce soit illégalement ou autrement. C'est ce que j'essaie de confirmer.
    C'est exact.
    Bien.
    Madame Black, voici l'une de vos recommandations:
Assurer un accès légal aux produits de cannabis sous toutes leurs formes et puissances, y compris, mais sans s'y limiter: herbe de cannabis, capsules, teintures, topiques, résines, produits comestibles finis. Dans le cas contraire, les patients continueront de se les procurer sur le marché non réglementé. Cette démarche ferait en sorte que la politique fédérale soit conforme à la récente décision de la Cour suprême, R c. Smith 2015.

    Pouvez-vous nous en dire plus long et nous expliquer le lien avec l'arrêt Smith?
    Certainement.
    Kirk Tousaw a témoigné devant vous hier soir. Il est dommage qu'il ne soit pas ici aujourd'hui pour vous en dire plus long sur cette cause. D'après ce que j'ai pu comprendre, l'esprit qui sous-tend cette décision fait essentiellement en sorte que les patients consommant du cannabis sous toutes ses formes jouissent de la protection conférée par la Charte. Dans le cadre du travail de notre organisation, nous pouvons constater que le cannabis peut être consommé sous un très large éventail de formes, dont bon nombre n'ont pas été mentionnées ici. Si toutes ces formes de produits ne sont pas intégrées au marché légal, si les règlements pris ne suivent pas l'esprit de cet arrêt de la Cour suprême, en l'appliquant au marché récréatif bien qu'il s'agisse de patients en l'espèce, je crois que toute cette production sera accessible sur le marché non réglementé.
    Il y a une chose qui m'inquiète tout particulièrement. Certains concentrés de cannabis destinés à l'inhalation sont actuellement fabriqués à partir de solvants cancérigènes comme le butane. On se sert de tels solvants pour fabriquer des concentrés inhalables. Si les procédés de fabrication sont déficients, il peut rester des traces de solvant cancérigène dans le produit. Ces puissants produits inhalables font partie des éléments que le gouvernement doit absolument réglementer.

  (1135)  

    Quelle proportion des produits achetés par les patients et les clients de votre organisation sont comestibles, concentrés ou non destinés à être fumés?
    Je dirais sans doute environ 30 %. Nous avons toutefois cessé d'offrir des produits comestibles depuis que la Ville de Vancouver a demandé — exigé, en fait — que nous en arrêtions la vente. Nous voulions bien sûr nous conformer à la réglementation municipale. Il est donc un peu plus difficile de savoir à quoi nous en tenir depuis quelques années, mais je dirais que la proportion se situe entre 30 et 35 %.
    Nous avons entendu certains témoignages au sujet de l'étiquetage des produits. J'aimerais savoir quels conseils vous pouvez donner à notre comité concernant les informations que l'on devrait retrouver sur un emballage pour permettre au consommateur de faire des choix éclairés en matière de cannabis.
    Les prescriptions en matière de banalisation des emballages me causent quelques préoccupations. Il y a notamment le fait que ces exigences procurent un avantage de plus aux producteurs non assujettis à la réglementation qui peuvent utiliser des emballages attrayants et colorés. Toutes les fois que vous imposez des restrictions au marché légal alors que l'on peut agir librement sur le marché non réglementé, c'est celui-ci qui est avantagé. Comme nous avons pu le constater, il est très important de fournir certaines informations sur le produit. Je crois en outre qu'il convient d'apposer une marque quelconque pour que le consommateur puisse savoir de quel producteur il s'agit et quelle entreprise lui vend le cannabis. C'est à ce niveau que votre comité devrait s'efforcer de trouver le juste équilibre en imposant des restrictions sur l'étiquetage qui demeureront raisonnables.
    Encore là, on peut penser aux possibilités qui s'offrent pour l'emballage de l'alcool, que nous savons pourtant plus nocif que le cannabis. Dans le cas de l'alcool, on peut fournir de l'information sur le produit, indiquer la marque et utiliser différents caractères et toutes sortes de couleurs. Je crois par contre qu'il pourrait être raisonnable de restreindre l'utilisation d'éléments comme les dessins susceptibles d'attirer tout particulièrement l'attention des enfants.
    Merci.
    Dispensaires ou pharmacies, pouvez-vous me dire ce que vous en pensez?
    C'est une question très complexe. Pendant longtemps, les organismes de réglementation des pharmacies se sont opposés farouchement à la vente de cannabis à des fins médicales. Ce n'est que tout récemment qu'ils se sont ralliés en se rendant compte que la distribution de cannabis médical représentait un marché considérable et très lucratif.
    Je crois effectivement que le cannabis devrait être vendu en pharmacie; c'est d'ailleurs une façon de le rendre équitablement accessible aux patients de tout le pays. Je suis par contre tout à fait opposée à l'idée qu'il soit vendu exclusivement dans les pharmacies.
    L'an dernier, j'ai eu le privilège d'organiser une rencontre spéciale de patients pour le compte du groupe de travail sur la légalisation avec l'appui des Canadiens pour l'accès équitable à la marijuana médicale et de la Société de l'arthrite. Au fil de cette merveilleuse rencontre d'une demi-journée avec un groupe diversifié de patients, nous avons pu constater qu'ils étaient peu nombreux à vouloir que le cannabis soit accessible uniquement dans les pharmacies.
    Mandy McKnight, ici présente, pourrait vous parler des difficultés qu'elle éprouve lorsqu'elle doit se procurer des médicaments pour Liam à la pharmacie et vous indiquer qu'elle préfère nettement avoir accès à un service comme celui du Compassion Club où du personnel médical spécialisé peut lui consacrer de 60 à 90 minutes afin de lui expliquer tout ce qu'il y a à savoir au sujet du cannabis. Nous prenons ainsi le temps de traiter de tous les différents produits possibles et de la façon de les utiliser en toute sécurité. Notre expérience et notre expertise nous permettent de prendre en charge les patients devant consommer du cannabis à des fins médicales mieux que n'importe quelle pharmacie pourrait le faire.
    Merci beaucoup, monsieur Davies.
    C'est maintenant au tour de M. Ayoub.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais poser la question en français, de sorte que si vous voulez utiliser l'écouteur, je vous invite à le faire.

[Français]

     Je voudrais commencer par M. Vandebeek.
    Vous avez dit tout à l'heure que vous vous assuriez de vendre le cannabis à un prix en dessous de celui du marché. Quel prix demandez-vous par gramme de cannabis?

[Traduction]

    Environ 4,84 $ le gramme. Normalement, nous l'achetons à la livre.

[Français]

    Je vous remercie. Cela répond en grande partie à mon questionnement là-dessus. J'avais entendu dire qu'il se vendait jusqu'à 10 $ le gramme et même plus à différents niveaux. Il est important de s'assurer d'éliminer le marché noir et illégal et le crime organisé. Vous avez d'ailleurs mentionné que vos fournisseurs sont clear et qu'ils ne font pas partie du crime organisé. C'est l'une de vos constatations. Vous êtes conscient de cela et vous approuvez cette façon de faire. C'est ce que j'ai compris.

  (1140)  

[Traduction]

    Oui.

[Français]

    Merci.
    Madame Bogden, vous avez dit qu'il y a 58 producteurs autorisés et que 275 inspections ont eu lieu d'un bout à l'autre du Canada. Avez-vous déjà constaté une brèche par où s'infiltrerait le crime organisé? A-t-on retiré ou modifié la licence de certains producteurs à la suite d'une quelconque infiltration du crime organisé?

[Traduction]

    C'est une très bonne question. La réponse est non. C'est en partie en raison de la structure du système et des différentes mesures de contrôle rigoureuses que nous prenons sur le plan de la sécurité et de l'accès.

[Français]

    J'ai une autre question à vous poser à la suite de votre réponse.
    Sauf erreur, M. Rick Barnum, sous-commissaire et commandant provincial du commandement Enquêtes et crimes organisés de la Police provinciale de l'Ontario, a mentionné ici même, dans son témoignage cette semaine, qu'il est certain que le crime organisé a infiltré les producteurs de cannabis médical au Canada. Est-ce tous les producteurs qui l'ont été ou seulement quelques-uns? Je n'en sais rien, mais il a été très affirmatif au cours de son témoignage.
    Qu'avez-vous à répondre à cela?

[Traduction]

    Je peux affirmer catégoriquement qu'en ce qui concerne les producteurs autorisés, ce n'est pas vrai, à notre connaissance. Si une personne avait des preuves du contraire, il serait très important qu'elle le signale à la GRC et à d'autres organismes puis, en définitive, à nous, dans un tel cas.

[Français]

     D'accord.
    Clairement, il y a lieu de faire des recherches plus poussées en vue d'obtenir une réponse. À mon avis, l'affirmation de M. Barnum est certainement inquiétante.
    Je passerai maintenant à autre chose.
    J'ai bien compris ce que demandaient Mme Black, M. Zaid et Mme Elisma. Relativement au numéro d'identification de médicament, le DIN, aucune demande n'a été faite par l'industrie ou par les producteurs.
    Si j'ai bien compris, le cannabis fait partie d'une classe à part. Il s'agit d'un produit végétal et, jusqu'à un certain point, d'un produit médicinal. Bien que plusieurs recherches scientifiques aient déjà été effectuées, on aura besoin d'en faire davantage afin d'en faire la preuve sur le plan administratif.
    Si on vous demandait d'amender le projet de loi afin qu'il contienne un processus sur mesure relatif au cannabis, quelles seraient vos recommandations? Quelles recommandations voudriez-vous présenter au gouvernement et à la ministre de la Santé en vue de modifier le processus, afin de permettre aux médecins d'écrire une ordonnance au lieu de remplir un formulaire d'autorisation? Ainsi, au lieu d'un long formulaire, on aurait quelque chose de plus rapide et de standard, comme pour un médicament.

[Traduction]

    Je vous remercie de la question, monsieur le président. En fait, c'est une question que le groupe de travail sur la légalisation a étudiée dans ses délibérations sur le régime d'accès au cannabis à des fins médicales compte tenu des commentaires qu'il a reçus de la part de patients et de militants pour déterminer si l'on pouvait envisager l'établissement d'un processus distinct pour l'autorisation de ces produits ou d'une autre façon de procéder. Je pense qu'après un examen attentif et ses délibérations, le groupe de travail a conclu que le processus actuel peut fonctionner, que le gouvernement devrait faire ce qu'il peut pour stimuler la recherche, y compris apporter les changements contenus dans son projet de loi, ce qui encouragerait la recherche préclinique et clinique et universitaire, ou la recherche qui pourrait être financée par des producteurs autorisés. Notre système actuel fonctionne, et en encourageant la recherche, nous observerons probablement une intensification des activités de recherche dans ces secteurs ce qui se traduira par l'autorisation de la commercialisation du cannabis, du cannabis séché ou d'autres catégories.

[Français]

    Jusqu'à maintenant, on ne peut que constater un échec ou du moins un manque, puisque personne, pas même un producteur, n'a fait de demande. Dans la vie, je n'aime pas présumer des choses, mais, dans ce cas-ci, j'imagine que c'est probablement parce qu'ils font déjà un constat d'échec. Avant même de faire leur demande, les producteurs savent qu'il ne satisferont pas les conditions d'admissibilité, et cela fait qu'ils ne présentent pas de demande. Sans demande de la part des producteurs, il n'y a pas de numéro d'identification et les médecins ne peuvent pas écrire une ordonnance, puisqu'ils n'ont pas l'assurance que le produit ne pose pas de problème du point de vue médical. C'est une roue sans fin. On n'arrivera à rien si on ne change pas le processus.
    Ailleurs, les bienfaits médicaux de la marijuana sont déjà admis. Ici, toutefois, il y a un manque sur le plan administratif, et il faut y remédier. Plusieurs années plus tard, il n'y a toujours pas de solution. C'est une lacune sur laquelle il faut se pencher rapidement.
    C'est ce que je recommanderais si j'étais à votre place.

  (1145)  

[Traduction]

    Je dirais peut-être aux membres du Comité que, comme les autres témoins l'ont souligné, bien que le cannabis soit utilisé à des fins médicales depuis très longtemps, le régime réglementé d'accès que nous avons présentement au pays n'a été créé qu'à la toute fin de 2013. Nous en sommes donc à trois ans dans l'établissement et la croissance d'une industrie autorisée qui est capable de produire du cannabis dont la qualité fait l'objet d'un contrôle. Je crois qu'on peut comprendre qu'il faudra attendre encore quelque temps. Comme d'autres témoins l'ont dit, les producteurs autorisés, de plein droit, financent la recherche de concert avec des universités de partout au pays. Près de 12 universités mènent des recherches — cliniques, précliniques et d'autres types de recherches — sur l'utilisation du cannabis à des fins médicales.
    Cela commence. Nous pouvons peut-être laisser passer du temps pour déterminer si les résultats seront bons. Le processus d'approbation actuel fonctionne.
    Votre temps est écoulé.
    C'est ce qui met fin au premier tour, aux interventions de sept minutes. Nous passons maintenant à des interventions de cinq minutes. C'est Mme Gladu qui commence.
    Je remercie tous nos témoins. Je connais bien les excellentes mesures de contrôle qui sont prises dans le régime du cannabis thérapeutique.
    J'ai une question à poser à Mme Bogden.
    Hier soir, un témoin a soutenu que de par la façon dont nous avons mis en place le régime d'utilisation de la marijuana à des fins médicales, nous violons trois traités internationaux. Est-ce vrai?
    Bien entendu, je sais que le Canada est un pays signataire de trois conventions internationales et qu'il est très conscient de ses obligations, qu'il prend très au sérieux. Je crois qu'en présentant le projet de loi, le gouvernement a dit très clairement qu'il avait l'intention de faire passer la santé et la sécurité du public en premier. C'est pourquoi il essaie de mettre en place un nouveau cadre de contrôle plus efficace.
     Bien entendu, nous savons que des questions seront soulevées au sujet de nos obligations internationales. Je pense qu'à ce moment-ci, étant donné que le projet de loi vient d'être présenté et que le Parlement vient tout juste d'en commencer l'étude — un volet important de notre processus démocratique —, notre priorité, c'est de communiquer avec ces partenaires internationaux, de leur expliquer le contenu du projet de loi, les objectifs du gouvernement et ce que nous voulons faire, de sorte que ce soit clair.
    Je pense que nous essayons également d'aider nos partenaires à comprendre la situation actuelle au Canada quant à la consommation chez les jeunes, au marché illégal et à ce que cela représente, et voilà, je crois, ce sur quoi nous nous concentrons à ce moment-ci.
    D'accord. Vous n'êtes donc pas d'avis que nous ne respectons pas nos obligations à l'heure actuelle, qu'il ne s'agit que de déterminer si le projet de loi compliquera les choses.
    Je ne suis pas la personne la mieux placée pour... Ce n'est pas mon rôle d'exprimer une opinion ou de vous conseiller sur la question de savoir si nous respectons nos obligations à ce moment-ci.
    Permettez-moi de changer de sujet alors.
    L'une des choses que nous entendons constamment, c'est qu'il nous faut sensibiliser et informer le public sur le cannabis et ses effets, et que ces efforts doivent être orientés vers les parents et les jeunes. Où en est le ministère de la Santé dans la mise en oeuvre du programme de sensibilisation du public?
    Les activités d'information et de sensibilisation sont très importantes, et le gouvernement considère que c'est un élément central de sa démarche pour protéger la santé et la sécurité et réduire les risques liés à la consommation de cannabis. Voilà pourquoi le gouvernement a investi un montant initial de 9,6 millions de dollars dans son plus récent budget, de sorte que nous puissions commencer ces activités d'information et de sensibilisation maintenant.
    À cette étape-ci, nous concentrons beaucoup d'efforts sur la communication avec les parents, les jeunes et d'autres personnes qui les influencent pour les encourager à discuter des risques liés à la consommation de cannabis et des risques pour leur sécurité s'ils conduisent avec les facultés affaiblies ou s'ils se trouvent dans un véhicule avec d'autres personnes dont les facultés peuvent être affaiblies.

  (1150)  

    Existe-t-il des programmes précis? Y a-t-il des groupes de programmes précis auxquels les gens peuvent avoir accès?
    Oui. Vous avez peut-être déjà entendu parler de Jeunesse sans drogue Canada, qui est un bon exemple. Santé Canada collabore avec cette organisation. Elle a produit un excellent guide destiné aux parents.
    Oui, nous en avons entendu parler. On parle de 100 000 parents, je crois.
    Oui.
    Qu'en est-il des jeunes, de l'information qui leur est destinée?
    Nous avons produit un certain nombre de documents d'information qui sont accessibles sur notre site Web. Nous en faisons la promotion dans les médias sociaux depuis janvier dernier de toutes les façons que nous pouvons, et le taux de participation est très élevé. Les enfants aiment accéder à de l'information à l'aide de leurs appareils mobiles. Nous savons très bien que nous devons le faire. Nous sommes maintenant en train de préparer des vidéos éducatives qui seront disponibles sur YouTube, un autre moyen...
    Excellent.
    ... par lequel les enfants aiment vraiment obtenir ce type d'information.
    Nous nous concentrons vraiment sur la présentation des faits. Nous avons mené des recherches sur l'opinion publique sur les jeunes et la façon dont ils aiment obtenir de l'information. Ils veulent vraiment connaître les faits et se faire leur propre idée. Ils ne veulent pas qu'on leur fasse des sermons. Nous allons faire tout en notre pouvoir pour mobiliser les jeunes pour la poursuite de l'élaboration de notre campagne.
    D'accord. Très bien. Merci.
    J'ai une dernière question, et je crois qu'elle s'adresse à Mme Black.
    L'une de mes craintes, c'est que lorsque l'usage récréatif du cannabis deviendra légal, il me semble qu'il se produira la même situation que lorsque les médicaments pharmaceutiques — qu'on plaçait auparavant derrière le comptoir — sont devenus accessibles dans toutes les pharmacies et que les compagnies d'assurances ont cessé de les couvrir. Y a-t-il un risque que la même chose se produise dans le cas du cannabis thérapeutique?
     J'ai bien peur de ne pas avoir bien compris votre question, car le cannabis n'est pas du tout couvert à l'heure actuelle. Pouvez-vous reformuler votre question de sorte que je puisse mieux vous répondre?
    Je l'ignorais. Aucune compagnie n'en remboursera les frais?
    Il y en a très peu. Jonathan en sait un peu plus que moi à ce sujet. Au pays, une poignée de patients ont réussi à se faire entendre à cet égard pour le cannabis thérapeutique, mais c'est très rare. C'est pourquoi bon nombre des recommandations que Jonathan et moi faisons visent à ce que des changements systématiques soient apportés, ce qui inclut ma proposition que le gouvernement fédéral prenne l'initiative en incluant le cannabis thérapeutique dans le régime de soins de santé de ses propres employés. C'est l'une des plus grandes difficultés qu'éprouvent les patients. Deux fonctionnaires fédéraux ici présents sont en train de s'endetter énormément et envisagent de prendre une nouvelle hypothèque sur leur maison afin de pouvoir se procurer des médicaments.
    C'est très bien. Merci.
    Merci beaucoup.
    C'est maintenant au tour de Mme Sidhu.
     Madame Bogden, vous avez dit que le cannabis pourrait entrer dans la catégorie des médicaments thérapeutiques avec un numéro d'identification du médicament si une entreprise faisait une demande. Est-il difficile de faire une demande? D'autres témoins nous ont parlé d'un certificat. Existe-t-il un système leur permettant de demander cette autorisation? J'imagine qu'un plus grand nombre d'entreprises pourraient être prêtes à le faire. Est-ce que...?
    Parlez-vous de la façon de faire une demande pour commercialiser un médicament au Canada?
    Oui, de la situation dans laquelle elles demandent cette autorisation.
    Lorsqu'elles font une demande pour commercialiser le médicament... Puisque je ne suis pas responsable de ce programme, je...
    Fait-on une campagne d'information?
    Pour aider les entreprises à faire une demande? Je ne le crois pas, mais j'imagine — et j'en suis presque certaine — que le site Web de Santé Canada contient de l'information sur le processus de demande d'autorisation de mise en marché, et sur les exigences que les entreprises doivent respecter pour la présentation de la demande.
    J'ai déjà mentionné certaines des exigences, comme la nécessité de mener des études précliniques et cliniques. C'est le volet recherche qui prouvera l'efficacité, la qualité et l'innocuité du produit. Elles doivent également fournir des détails sur la production, l'emballage et l'étiquetage du produit, des renseignements supplémentaires sur les allégations à visée thérapeutique et sur les effets secondaires. C'est le type de choses dont elles ont besoin pour faire leur demande.
    Je suis certaine que l'information leur est accessible, et les fonctionnaires sont habituellement bons pour aider les gens lorsqu'ils ont besoin d'information dans le cadre d'une demande. J'ose croire que nous essayons d'aider les gens le mieux possible.

  (1155)  

     Il a également été question du numéro d'autorisation et du numéro d'identification du médicament — DIN —. À l'heure actuelle, des frais d'ordonnance s'appliquent pour le DIN. Est-ce que des frais s'appliquent aux numéros d'autorisation? Dans le cas d'un DIN pour la marijuana thérapeutique, est-ce que des frais d'ordonnances supplémentaires seront imposés?
    À l'heure actuelle, dans...
    Je veux dire après sa légalisation.
    Y aura-t-il des frais supplémentaires? Je répondrais à votre question en vous décrivant la situation actuelle. Si une personne veut avoir accès à du cannabis thérapeutique, elle s'adresse à son médecin, qui remplira un document et le lui remettra. Nous fournissons un exemple, ou nous prenons quelque chose, pourvu qu'on fournisse la bonne information. Il s'agit d'une autorisation médicale et non d'une ordonnance, comme l'a déjà expliqué Mme Black.
    Une ordonnance ne peut être utilisée que pour un médicament dont la vente est autorisée au Canada. Nous avons quelque chose d'équivalent, soit un document que le médecin signe et sur lequel il inscrit la date et la période. La dose que le patient est autorisé à prendre est indiquée. La personne apporte ensuite le document à un producteur autorisé pour s'inscrire et pouvoir se procurer du cannabis.
    Sur le plan du contrôle de la qualité, existe-t-il un processus de rappel?
    Si c'est nécessaire, tout à fait. Il y a des règles qui donnent à Santé Canada le pouvoir d'ordonner un rappel, au besoin. Depuis la création du régime, dans la plupart des cas, il y a eu des rappels lorsque des entreprises ont constaté des problèmes. Elles sont très conscientes des obligations qui leur incombent en vertu des règlements et de la nécessité de ne pas mettre en danger la santé de la population, et des rappels seront lancés par mesure de précaution. C'est ainsi que les choses se sont passées dans tous les cas décelés dans le cadre de nos inspections.
    Comment pouvons-nous réglementer un prix? Quelqu'un a parlé de 4,54 $ le gramme, et nous avons entendu aussi 10 $ le gramme. Un système a-t-il été mis en place?
    Sur le plan des prix établis par les producteurs autorisés, je dirais tout d'abord que nous surveillons de très près la disponibilité, les prix et la variété des produits offerts sur le marché. Les producteurs autorisés sont tenus de nous faire rapport — et David pourra me corriger si je me trompe — chaque mois, c'est bien cela?
    C'est par cette collecte de données, entre autres, que nous surveillons ce qui se passe.
    Sur le plan des prix offerts par les fournisseurs à l'heure actuelle, on parle de 9 $ en moyenne, mais des producteurs autorisés offrent toute une gamme de produits dont les prix peuvent aller de 4 à 18 $ le gramme. Tout dépend du type de produit et de la forme sous laquelle il est vendu.
    Merci beaucoup.
    C'est maintenant au tour de M. Carrie.
    Je remercie beaucoup les témoins de leur présence. Il s'agit de très bons témoignages.
    Je veux souligner l'importance de la différence entre la marijuana thérapeutique et la marijuana à usage récréatif, dont vous avez parlé, car je crois que tous les gens ici présents veulent protéger la santé et la sécurité des Canadiens. Cependant, bon nombre de consommateurs de marijuana thérapeutiques sont très malades. Avant de devenir député, en tant que chiropraticien, j'ai vu de nombreuses personnes souffrant de douleur chronique qui, après avoir pris des anti-inflammatoires non stéroïdiens pendant des années, ont décidé de consommer de la marijuana, qui engendrait beaucoup moins d'effets secondaires et donnait de bien meilleurs résultats. Notre système de soins de santé peut assurément jouer un très bon rôle.
    Encore une fois, en ce qui a trait à la santé et à la sécurité des Canadiens... Des gens ont parlé de la culture à domicile et de l'inspection de contrôle de la qualité. Je sais que Santé Canada... Même dans une bureaucratie énorme, nous avons fait face à des problèmes. Vous avez parlé des rappels. On a rendu accessible à des patients de la marijuana qui contenait des fongicides, des pesticides et des substances cancérigènes. Ce qui est inquiétant, c'est que même pour la marijuana thérapeutique, il semble être difficile de garantir qu'une inspection sera faite et qu'il n'y a pas de danger.
    Je veux vous poser des questions sur la culture à domicile et le contrôle de la qualité. Comment gérez-vous cela? Y a-t-il une différence entre la marijuana thérapeutique cultivée à domicile et la marijuana à usage récréatif cultivée à domicile? Avez-vous quelque chose à dire à ce sujet?

  (1200)  

    Concernant l'usage à des fins médicales, nous avons certainement des choses à dire. Au cours des 6 à 12 derniers mois, Santé Canada a pris des mesures pour que les patients qui sont autorisés à cultiver de la marijuana puissent soumettre leurs produits à des tests effectués en laboratoire. Bien entendu, cela pose des difficultés sur le plan financier. Pour les patients, il est difficile de faire passer des tests dans un laboratoire, et bon nombre de gens produisent de la marijuana à la maison pour des raisons financières, de sorte qu'à bien des égards, ce n'est pas un moyen accessible. Nous saluons toutefois le ministère d'avoir pris cette mesure, car, auparavant, les patients n'avaient rien à leur disposition sur le plan des tests.
    En ce qui concerne les risques pour la santé et la sécurité, je dirais qu'avec la légalisation, cela devrait être en bonne partie visé, entre autres, par des règlements administratifs et des codes de sécurité pour réduire les risques, mais nul doute que cela peut se faire de façon sécuritaire. Il faut que les gens reçoivent l'information qu'il faut à cet égard.
    D'accord.
    Madame Black, voulez-vous intervenir?
    Non, je crois que Jonathan a dit ce qu'il y avait à dire.
    Un témoin du Colorado nous a dit entre autres... Lorsque nous discutions de l'usage du cannabis à des fins récréatives, il a dit, en parlant de la mise en place, que cela avait été comme faire voler un avion en même temps qu'on le construit. On nous a conseillé de ne pas faire la même chose, de ralentir le rythme et de nous assurer de faire les choses correctement. On nous a recommandé notamment de mettre des mesures en place au chapitre de la sensibilisation du public, des données de base et des capacités de collecte des données et des recherches sur le traitement.
    Je remarque que vous recommandez tous les deux une augmentation des investissements en recherche. Il reste 288 jours et bon nombre de témoins se demandent si c'est une occasion manquée.
    Je me demandais si vous pouviez nous donner votre point de vue, car vous travaillez sur le terrain. Vous aidez des patients. Avez-vous accès à des programmes offerts par Santé Canada ou par le gouvernement, si vous essayez d'informer vos patients, que ce soit sur la façon de bien faire la culture de la marijuana, par exemple, ou de bien l'utiliser? La collecte de données... de sorte que vous puissiez dire que tel patient emploie des vaporisateurs, plutôt que des produits à fumer ou des produits comestibles. Quelles sont les doses? Quels sont les effets? On peut considérer cela comme un outil de base de sorte que le marché à des fins récréatives peut utiliser ces données et s'assurer que c'est même plus sécuritaire... l'étiquetage, les recommandations.
    Avez-vous accès à ce type de programmes ou de fonds à l'heure actuelle?
     À ce moment-ci, pour ce qui est du Compassion Club, non. Nous avons recours à la désobéissance civile depuis 20 ans, et nous ne participons donc d'aucune façon à des recherches officielles en collaboration avec le gouvernement. Nous ne recevons aucune subvention gouvernementale. À ce sujet, je veux que vous sachiez que les employés du Compassion Club ont en général un revenu inférieur à 25 000 $ par année. Nous parlons de gens qui travaillent pour un très petit salaire pour fournir des services de soins de santé additionnels.
    En ce qui a trait à la collecte de données, puisque nous n'avons pas eu accès aux tests sur les cannabinoïdes, nous n'avons pas été en mesure de recueillir des données permettant l'établissement de liens entre le profil des cannabinoïdes et la gestion des symptômes. Ce que nous pouvons faire dans notre petit vase clos, c'est conserver des documents immaculés portant sur ce que consomment les clients. Nous savons exactement ce qu'un patient consomme. Si un patient s'est inscrit auprès de nous il y a 18 ans, nous avons un profil sur chaque produit qu'il s'est procuré chez nous. S'il y a une rétroaction sur ce qui a fonctionné ou n'a pas fonctionné pour un patient, nous pouvons ajouter cette information à son profil. Nous n'avons pas rassemblé toutes les données, mais nous avons fait les choses de façon à offrir un service personnalisé spécialisé. Je dirais que notre organisation est mûre pour une collaboration avec un organisme de recherche compte tenu de l'énorme bassin de patients et de l'expérience que nous avons.
    Je crois que votre expérience est précieuse. Il reste 288 jours avant la décision, et je crois que vous conviendrez avec les représentants du Colorado qu'il serait bon de disposer de ces ressources et de ces données de base au cours de nos travaux.
    Au-delà des données, il est encore plus important de sensibiliser les gens sur l'optimisation des avantages et la réduction des risques, et c'est un domaine dans lequel nous avons énormément de connaissances. En effet, on peut indiquer aux gens des façons simples d'éviter les effets indésirables de la consommation du cannabis, et leur recommander de veiller à ne pas conduire ou utiliser de la machinerie avec les facultés affaiblies. Nous traitons ces types d'enjeux depuis 20 ans.

  (1205)  

    Je vous en remercie.
    La parole est maintenant à M. Oliver.
    Madame Bogden, un très grand nombre de témoins ont répondu à nos questions. Il s'est passé beaucoup de choses depuis que nous vous avons vue lundi matin, mais il demeure essentiel de sensibiliser la population à cet égard, et nous sommes donc très heureux d'entendre parler des initiatives en cours. Vous avez raison. Nous avons entendu un très bon exposé de la part d'un groupe qui a produit un excellent document — et je vais d'ailleurs l'apporter à la maison. Dans leur exposé, ces témoins ont dit que vous aviez parlé de la marijuana aux jeunes d'une façon très réfléchie, et je vous en remercie.
    Toutefois, le projet de loi C-45 ne mentionne pas vraiment la sensibilisation de la population. Je crois que certaines provinces ont laissé entendre qu'elles avaient le mandat d'investir un pourcentage du produit de la vente de marijuana ou de cannabis dans les efforts de sensibilisation. Êtes-vous satisfaite du projet de loi C-45 dans sa forme actuelle? Est-ce que le dossier de la sensibilisation et du message lié à la santé publique est traité ailleurs au sein du ministère de la Santé? S'agira-t-il d'une stratégie permanente en matière de santé ou cela doit-il se trouver dans le projet de loi?
    Comme je l'ai dit en réponse à une question posée par un autre membre du Comité, la sensibilisation de la population est un élément très important de la stratégie du gouvernement. L'adoption d'une approche axée sur la santé publique dans le cas du cannabis ou du tabac passe par l'optimisation des efforts en matière de sensibilisation de la population et la minimisation des risques liés à l'utilisation. En réponse à une question posée par un autre honorable membre du Comité, j'ai parlé de nos travaux en cours. En effet, nous parlons du cannabis aux jeunes Canadiens afin de veiller à ce qu'ils tiennent compte des risques pour leur santé. Cela fait partie de nos efforts. Dans les semaines et les mois à venir, si ce projet de loi est adopté par le Parlement, nous collaborerons peut-être avec d'autres partenaires afin de diffuser davantage d'information à cet égard.
    Que le projet de loi soit adopté ou non, étant donné la prévalence de l'utilisation de la marijuana chez les jeunes, je suis d'avis que la diffusion de ces messages d'intérêt public doit se faire le plus rapidement et le plus efficacement possible.
    J'aimerais maintenant passer à un autre sujet. La cinquième recommandation formulée par la Compassion Club Society de la Colombie-Britannique me laisse croire que les fabricants autorisés n'ont toujours pas le droit de fabriquer des produits comestibles. Est-ce exact?
    C'est un point qui entraîne une certaine confusion. En effet, les producteurs autorisés peuvent distribuer de l'huile de cannabis qui n'est pas destinée à l'inhalation, mais qui est tout de même consommée. On peut donc prendre l'huile directement...
    On peut acheter cette huile.
    ... à l'aide d'une cuillère ou d'une seringue, ou confectionner des pâtisseries chez soi avec cet ingrédient.
    Toutefois, en ce qui concerne d'autres éléments dont nous ont parlé les représentants d'autres États, par exemple le Colorado, où le marché est florissant...
    Non. Actuellement, à l'exception des huiles infusées, les producteurs autorisés n'ont pas le droit de fabriquer des produits comestibles.
     Des témoins ont soutenu à maintes reprises que les produits comestibles devraient être visés par le projet de loi C-45, et ce, pour de très bonnes raisons liées à la santé publique. Premièrement, sans directives à cet égard, les gens choisiront surtout de fumer et d'inhaler le produit, et deuxièmement, le marché noir — ou l'autre marché — offre des produits concurrentiels.
    Ce qu'on nous a dit lundi dernier, c'est qu'il est trop tôt. En effet, selon l'expérience du Colorado, il faudrait du temps pour lancer les produits comestibles, car il faut encadrer ce processus de règlements complexes; ce volet n'a donc pas été inclus. Toutefois, cela fait maintenant trois ans, et je suis sûr que les utilisateurs de marijuana thérapeutique préconisent l'introduction des produits comestibles depuis un certain temps, c'est-à-dire depuis trois ou quatre ans.
    Cela me pousse à me demander ce qui se passe. Pourquoi Santé Canada n'a-t-il pas abordé cette question? Est-ce parce qu'à votre avis, ce n'est pas une partie importante du marché? Pourquoi n'avez-vous pas abordé la question avec le groupe qui préconise la marijuana thérapeutique? De cette façon, les règlements et les autres éléments nécessaires auraient été en place pour l'utilisation à des fins récréatives.
    Je crois que je répondrais que permettre la production d'huile de cannabis... Au début, l'autorisation visait seulement le cannabis séché, et ce n'est que tout récemment que le système a commencé à autoriser des producteurs à fabriquer de l'huile de cannabis, et c'est en partie attribuable à une décision de la Cour fédérale. Pendant l'été 2015, un an avant que je commence cet emploi — est-ce exact? —, nous nous sommes surtout concentrés sur...
    Nous avons pris ces règlements; ils permettent aux producteurs de fabriquer de l'huile de cannabis, comme l'a mentionné Mme Black, sous différentes formes et nous avons collaboré avec les producteurs qui souhaitent accroître l'approvisionnement de ce produit. Nous nous sommes réellement concentrés sur les producteurs autorisés qui souhaitent accroître ce type de production, afin de veiller à ce que...

  (1210)  

    Je sais que vous êtes allée là-bas, et je crois donc que vous conviendrez qu'il existe un vaste éventail de produits comestibles au Colorado.
    Absolument.
    Pourquoi n'avez-vous pas permis le développement de ce volet ou pourquoi Santé Canada n'a-t-il pas établi de lignes directrices à cet égard, du moins dans le cadre de la consommation de marijuana thérapeutique?
    Comme je l'ai dit, nous n'avons pas envisagé d'autoriser un plus large éventail de produits.
    Et pourquoi?
    Je crois que nous concentrions plutôt nos efforts en vue d'autoriser l'huile de cannabis et l'édification de cette industrie en prenant les règlements appropriés. C'est le volet sur lequel nous nous sommes concentrés. Il se peut que nous ayons envisagé d'examiner d'autres produits, mais étant donné le changement de gouvernement et son engagement de légaliser et de réglementer le produit, je crois que nous avons utilisé notre énergie et notre attention pour appuyer les efforts du gouvernement à cet égard.
    Il n'y a donc aucune autre raison pour laquelle vous n'autoriseriez pas la production de produits comestibles?
    Non, absolument pas.
    Je crois que nous reconnaissons, comme l'ont fait de nombreux témoins qui ont comparu devant votre comité cette semaine, que nous devrions faire tout notre possible pour permettre aux gens de consommer du cannabis de façon plus sécuritaire tout en réduisant les risques. C'est la raison pour laquelle on envisage, dans le cadre de ce projet de loi, de prendre des règlements visant des produits tels les produits comestibles ou les concentrés, etc. C'est une question soulevée dans le projet de loi.
    Merci beaucoup.
    Allez-y, monsieur Davies.
    Madame Bogden, ce que je trouve curieux, c'est qu'on envisage effectivement d'autoriser les produits comestibles dans le cadre du projet de loi, mais ce dernier ne les légalise pas. Nous sommes les membres du Comité permanent de la santé et vous êtes la SMA du ministère de la Santé. N'est-il pas vrai que la façon la moins saine de consommer le cannabis, c'est de le fumer?
    Absolument.
    Toutefois, ironiquement, dans le projet de loi C-45, on se concentre d'abord sur la question du cannabis qui sera fumé, ce qui représente la façon la plus dommageable de le consommer, et on laisse de côté les produits comestibles et d'autres produits qu'un grand nombre de patients préfèrent, car ils n'ont pas besoin de les fumer. On a prévu de régler ces questions plus tard. Cela ne me semble pas être la meilleure façon de procéder sur le plan de la santé.
    Puis-je répondre à cela?
    Allez-y.
    Le projet de loi considère un large éventail de produits. Lorsqu'il sera adopté, il visera le cannabis séché et, comme certains témoins qui ont comparu aujourd'hui l'ont reconnu, les gens le consomment en le vaporisant et en utilisant d'autres techniques. Mais ce qui est encore plus important, c'est que les gens auront également accès à l'huile de cannabis, qui est produite dans un cadre strictement réglementé. On peut ingérer cette huile en la buvant ou on peut l'ajouter à un thé ou à des pâtisseries. Il y a de nombreuses façons de la consommer. Ainsi, il est très important que d'ici le mois de juillet, les gens aient accès à un approvisionnement en huile de cannabis qui fait l'objet de règlements et d'un contrôle de la qualité, ce qui représente une façon plus saine de consommer ce produit.
    D'après ce que je comprends, le problème qui se pose avec l'huile de cannabis consommée par le vapotage, c'est que son pourcentage de THC — 3 % — ne permet pas d'atteindre la concentration dont les gens ont besoin.
    Si nous autorisons les Canadiens à produire cette huile — dans leur cuisine, je présume —, cela signifie que nous n'aurons aucun contrôle sur le moule utilisé, l'hygiène, la concentration, le dosage et les contenants à l'épreuve des enfants, et ces produits pourraient se retrouver dans... Je présume que c'est le point que je fais valoir.
    Puis-je répondre à cela, monsieur le président?
    Madame Bodgen, mon temps est limité, et j'aimerais poser quelques questions à Mme Black.
    Madame Black, j'aimerais vous poser des questions au sujet de la publicité. L'une de vos recommandations consiste à veiller à ce que les restrictions en matière de publicité ne limitent pas indûment la capacité des fournisseurs de services de sensibiliser les gens, d'annoncer les caractéristiques de leurs produits et de gagner la confiance des consommateurs à l'égard de ce nouveau règlement. Des témoignages que nous avons entendus contiennent un message très alarmant à l'égard de la publicité, c'est-à-dire qu'on ne veut pas que cette publicité se retrouve dans les installations sportives et sur les panneaux d'affichage, et qu'on ne souhaite pas que cette publicité fasse la promotion d'un style de vie. Je comprends cela.
    Qu'entendez-vous par la recommandation que vous avez formulée dans votre témoignage?

  (1215)  

     Je vous remercie d'avoir posé la question. Avant d'y répondre, puis-je apporter des éclaircissements liés à votre question précédente?
    Oui.
    Les restrictions, telles que je les comprends... Je veux tout simplement préciser que les restrictions actuelles sur les huiles ne visent pas la vaporisation. Elles visent seulement l'ingestion.
    J'aimerais également préciser que l'inhalation est un mode très important de consommation et que cela peut être fait en toute sécurité lorsqu'on utilise un vaporisateur de façon appropriée. Je tiens à veiller à ce que nous évitions de stigmatiser l'inhalation auprès des patients, car le soulagement immédiat des symptômes est un aspect très important. Selon ce que je comprends, dans le RACFM, la restriction est actuellement de 30 milligrammes de THC par millilitre — je ne suis pas certaine de l'origine de la donnée de 3 %. Trente milligrammes de THC représentent une grande quantité. Lorsque j'enseigne aux patients comment utiliser le cannabis pour la première fois, s'ils utilisent de l'huile, je commence par 2,5 milligrammes et j'attends au lendemain pour augmenter la dose.
    Je tenais simplement à apporter ces éclaircissements.
    En ce qui concerne la publicité, les membres du Compassion Club souhaitent pouvoir faire davantage de promotion auprès des patients. Nous avons toujours déployé tous les efforts nécessaires pour respecter chaque règlement et chaque loi, quelle que soit sa portée, tout en enfreignant les lois à grande portée. Nous ne faisons aucune promotion aux patients d'autres groupes qui pourraient réellement profiter de nos services, car nous ne voulons pas contrevenir aux règlements en matière de publicité.
    Il y a deux ans, nous avons reçu une lettre de Santé Canada qui nous informait sans détour que si nous ne cessions pas immédiatement nos activités liées au menu présenté sur notre site Web et sur notre ligne téléphonique, nous serions tenus de payer des amendes de plusieurs millions de dollars et de passer des années en prison; nous avons donc immédiatement obéi. La plupart des dispensaires de Vancouver et des dispensaires en ligne n'ont pas respecté cette ordonnance de la même façon que nous. Par conséquent, nous perdons énormément de revenus, ce qui a des répercussions néfastes sur notre capacité de fournir des services aux patients.
    Je crois que la même chose se produira sur le marché légal. En effet, si on limite la capacité de parler des effets ou de la qualité des produits sur le marché légal, ou même de parler de la nature de l'entreprise qui les produit, on fournira un avantage non négligeable aux intervenants qui produisent le cannabis sur le marché non réglementé.
    Merci.
    Très brièvement, est-ce que...
    Je suis désolé, mais votre temps est écoulé.
    J'aimerais donner la chance à Mme Bogden de répondre à une question.
    Je crois que vous souhaitiez formuler un commentaire il y a quelque temps, madame Bogden.
    En fait, je crois que Mme Black a fourni les précisions que je souhaitais fournir, c'est-à-dire que l'huile de cannabis fait l'objet d'un contrôle de la qualité et qu'elle est ingérée, c'est-à-dire qu'elle n'est pas inhalée, et qu'on autorisera donc 30 milligrammes par millilitre — une quantité assez importante — d'un produit dont la qualité aura été contrôlée.
    C'est ce qui termine nos séries de questions, mais j'aimerais poser une question à Mme Black.
    À votre avis, pourquoi personne ne demandera à ce que la marijuana thérapeutique soit inscrite sur une liste et reçoive un numéro?
    Ce n'est pas mon domaine d'expertise, mais selon ce que je comprends, lorsqu'on fait une demande en vue d'obtenir l'approbation d'un médicament pour lequel il faut effectuer des essais cliniques chez les humains, il faut le faire pour chaque ingrédient actif contenu dans le médicament dont on tente d'obtenir l'approbation. Le cannabis contient plus de 80 cannabinoïdes actifs. Ensuite, il y a une autre catégorie d'ingrédients actifs appelés les terpénoïdes, ou les terpènes, qui donnent à chaque variété sa saveur et son odeur particulière. De plus, de nouvelles preuves ont démontré que les terpènes interagissent aussi avec notre système endocannabinoïde et qu'ils ont des effets thérapeutiques.
    D'après ce que je comprends, le cannabis est une plante très complexe qui ne s'inscrit pas facilement dans notre façon de réglementer les médicaments pharmaceutiques, qui sont souvent composés d'un seul ingrédient actif. C'est une plante qui contient de nombreux différents ingrédients actifs. Encore une fois, ce n'est pas mon domaine d'expertise, mais je comprends également qu'il faut mener des essais cliniques pour chaque utilisation pour laquelle on tente d'obtenir une approbation, et le cannabis est utilisé pour traiter un vaste éventail de symptômes.
    Merci beaucoup.
    Nous serons peut-être en mesure de collaborer pour tenter de trouver une solution qui permettra de faire avancer les choses.
    Si nous pouvons vous aider, nous sommes prêts à le faire.
    Pour l'instant, les autres membres du Comité tentent par tous les moyens d'attirer mon attention sur...

  (1220)  

    Vous savez ce que je suis sur le point de dire. Il reste un peu de temps, et j'aimerais donc obtenir le consentement unanime — et c'est ce qui pose problème —, afin qu'on accorde cinq minutes à chaque parti pour poser des questions.
    Vous aimeriez que chaque parti obtienne cinq minutes pour poser des questions. Si vous le souhaitez, nous pouvons revenir à la première série de questions, qui comporte des questions de cinq minutes.
    J'accepterais cette solution.
    Avons-nous le consentement unanime?
    Nous n'avons pas le consentement unanime; nous ne pouvons donc pas faire cela.
    Mme Marilyn Gladu: D'accord.
    Le président: Notre réunion est donc terminée.
    Au nom des membres du Comité, j'aimerais vous dire que vous avez été des témoins formidables. J'aimerais particulièrement remercier M. Zaid et Mme Elisma de nous avoir raconté leur histoire personnelle. Ces histoires sont très importantes pour nous. Vous avez fait une différence en témoignant aujourd'hui, et j'aimerais donc vous remercier de votre comparution au nom de tous les membres du Comité.
    Je suspends donc la séance. Nous reprendrons les travaux à 13 h 45.

  (1220)  


  (1345)  

    La séance reprend.
    Il s'agit de la 68e réunion du Comité permanent de la santé de la 42e législature.
    Conformément à l'ordre de renvoi du jeudi 8 juin 2017, nous étudions le projet de loi C-45, Loi concernant le cannabis et modifiant la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, le Code criminel et d'autres lois.
    Bienvenue à nos invités. Avec ce groupe de témoins, nous nous concentrerons sur les municipalités, c'est-à-dire l'impact de cette mesure sur les municipalités et les défis auxquels elles feront face.
    Nous accueillons donc Mme Lisa Holmes, présidente de l'Alberta Urban Municipalities Association. Nous accueillons également Jodie et Marc Emery, de Cannabis Culture. Par vidéoconférence, nous accueillons Brock Carlton, chef de la direction de la Fédération canadienne des municipalités, et son collègue, Bill Karsten, deuxième vice-président. M. Karsten est également conseiller à la Municipalité régionale d'Halifax. Ils sont tous les deux à Fort McMurray, et nous les entendrons bientôt.
    Bienvenue à tous.
    Chaque organisme a donc 10 minutes pour présenter un exposé, et nous passerons ensuite aux questions.
    Nous entendrons d'abord, pour suivre l'ordre dans lequel je vous ai présenté, le témoin de l'Alberta Urban Municipalities Association.
    Madame Holmes, vous avez 10 minutes.
    Bonjour, et merci de me donner l'occasion de m'adresser au Comité aujourd'hui.
    Je m'appelle Lisa Holmes. Je suis la mairesse de Morinville, en Alberta, et la présidente de l'Alberta Urban Municipalities Association, aussi appelée AUMA.
    L'AUMA est une association qui regroupe toutes les municipalités urbaines de l'Alberta, ce qui inclut tous les types de villages et de villes, notamment Edmonton et Calgary, où vit presque 90 % de la population de l'Alberta.
    L'AUMA a été la première association provinciale de municipalités au Canada à prendre des mesures pour aborder les répercussions sur la santé et la sécurité que pourrait entraîner la légalisation du cannabis. Il y a plusieurs années, nous avons formé un groupe de travail pour formuler des recommandations liées aux installations de production de cannabis thérapeutique et pour prendre des mesures contre les problèmes posés par les installations illégales de culture du cannabis. Depuis ce temps, et depuis que le gouvernement a annoncé son intention de légaliser le cannabis, nous avons collaboré avec d'autres associations de partout au Canada en vue de promouvoir, de façon proactive, l'importance d'adopter une approche intégrée au sein des gouvernements fédéral, provincial et municipal en ce qui concerne la mise en oeuvre du projet de loi C-45. Nous souhaitons trouver des façons par lesquelles nos trois paliers de gouvernement pourront collectivement veiller à mettre en place des systèmes appropriés en vue de sensibiliser la population, limiter l'utilisation inappropriée, résoudre les problèmes liés à la santé et à la sécurité, et permettre la coordination des efforts liés à l'application de la loi.
    Toutefois, nous sommes préoccupés par le moment où ces conversations se déroulent. En effet, l'AUMA appuie fermement le ralentissement de la mise en oeuvre du projet de loi, étant donné la nature complexe des questions de santé et de sécurité qui doivent être résolues et la nécessité de mettre au point une mesure législative complète et coordonnée dans les trois paliers de gouvernement. La rapidité avec laquelle le gouvernement fédéral a l'intention de progresser pose un risque pour nos collectivités. En effet, le gouvernement fédéral doit ralentir le rythme et permettre aux gouvernements provinciaux et municipaux de collaborer en vue de créer un cadre approprié pour chaque province.
    Les règlements provinciaux, y compris ceux qui sont liés à l'alcool et aux drogues, à la sécurité routière et aux normes en matière d'emploi doivent être élaborés longtemps avant la date de mise en oeuvre prévue par le gouvernement fédéral. Je serai honnête, les membres de l'AUMA n'ont pas l'impression que les municipalités sont traitées comme des partenaires égaux dans les efforts de planification, et il est impératif que les trois paliers de gouvernement disposent du temps et du soutien appropriés en vue de préparer toutes les règles et les règlements nécessaires pour les régions dont ils sont responsables.
    Les municipalités seront aux premières lignes de ce projet. En effet, notre palier de gouvernement se trouve au sein de la collectivité. Nous travaillons le plus près des gens, et il nous incombera de mettre en oeuvre et de faire respecter ce nouveau régime de réglementation et de gérer ses effets. Nos membres sont préoccupés à l'idée de se voir confier ces nouvelles responsabilités liées à la loi sur le cannabis sans qu'on leur fournisse les ressources nécessaires pour veiller à ce que ces responsabilités, surtout celles liées à l'application de la loi, puissent être assumées de façon efficace. En effet, il faut fournir des ressources et du financement aux municipalités afin de leur permettre de renforcer leur capacité et de réduire les coûts administratifs liés aux permis, à la sensibilisation, à l'inspection et à l'application de la loi. Il faut financer pleinement les coûts liés à l'équipement et à la formation nécessaires à l'application de la loi par l'entremise d'une taxe sur le cannabis ou d'un financement fédéral ou provincial, afin que les coûts ne soient pas refilés à nos collectivités.
    En ce qui concerne les questions liées à la santé et à la sécurité, l'AUMA appuie la recommandation formulée par le groupe de travail fédéral qui vise l'établissement d'un âge minimum pour l'achat, la publicité et la promotion, l'emballage et l'étiquetage et les stratégies en matière de sensibilisation de la population, pourvu que les gouvernements municipaux soient consultés à l'égard de toutes les questions qui ont des effets et des répercussions pendant l'élaboration des mesures législatives et des règlements.
    La sensibilisation de la population à l'égard des risques et des dommages potentiels liés au cannabis doit représenter une priorité en matière de politique pour le gouvernement fédéral. Nous appuyons la sensibilisation précoce et intensive auprès de la population, ainsi que l'adoption d'une approche liée à l'empaquetage, à la commercialisation et à la publicité similaire à celle adoptée pour le tabac, afin de réduire la désirabilité du cannabis chez les jeunes.
    Ces questions de santé et de sécurité touchent les volets de la production, de la distribution et de la consommation du cannabis. Par exemple, les municipalités recommandent d'apporter des changements au code du bâtiment et au code de prévention des incendies en vue de réglementer la culture du cannabis, surtout dans les immeubles résidentiels, afin que les propriétaires actuels et futurs soient protégés des effets nuisibles qui pourraient découler de la culture en milieu résidentiel.
    De plus, il faut se pencher attentivement sur la vente des produits du cannabis pour veiller à éliminer le marché illicite de la drogue tout en évitant de poser un danger pour les jeunes ou d'autres personnes dans nos collectivités. Les municipalités collaboreront avec vous en limitant les endroits où le cannabis peut être consommé en public. Toutefois, environ 96 % des municipalités urbaines de l'Alberta n'ont toujours pas adopté des règlements ou des politiques régissant l'utilisation du cannabis dans leurs collectivités, car on manque d'information et de certitude sur les éléments qui seront inclus dans les règlements fédéraux et provinciaux. La plupart des municipalités qui ont commencé à s'attaquer à cette question se sont contentées d'élargir leurs politiques et règlements existant sur le tabagisme pour qu'ils visent également le fumage de produits du cannabis. Il reste beaucoup de travail à faire, et après l'adoption des cadres fédéraux et provinciaux, les municipalités auront peu de temps — ou pas du tout — pour mettre en oeuvre les règlements et les politiques nécessaires à la sécurité de nos collectivités.

  (1350)  

    Nous sommes d'avis que la production, la distribution et la consommation de cannabis suscitent des inquiétudes importantes au sein de la collectivité relativement à la santé et à la sécurité. Étant donné que l'application de la loi se fera au niveau local, le gouvernement fédéral devrait consulter les municipalités et les services de police municipaux pour déterminer la meilleure façon de minimiser les risques, ce qui est leur objectif premier. L'AUMA a réalisé un sondage auprès de ses membres et a conclu que la principale préoccupation des municipalités en Alberta à l'égard de cette mesure législative concerne la sécurité publique, principalement les questions de conduite avec facultés affaiblies, de surveillance policière et d'application de la loi. Étant donné les limites actuelles des appareils de dépistage pour évaluer l’altération des facultés par le cannabis, l'AUMA estime que des règles additionnelles visant à dissuader les gens de conduire avec les facultés affaiblies, telles que la limite per se, ne devraient pas être mises en place tant qu'il n'y a pas suffisamment de preuves et un mécanisme fiable pour mesurer l'affaiblissement des facultés d'une personne au moment où elle conduit. Nous recommandons au gouvernement fédéral d'investir dans la recherche afin de mieux établir le lien entre les niveaux d’affaiblissement des facultés et les risques d’accident et de déployer une stratégie globale de sensibilisation du public à l'échelle nationale pour envoyer le message clair que le cannabis affaiblit les facultés et que le meilleur moyen d'éviter de conduire avec les facultés affaiblies est de s'abstenir d'en consommer.
     En Alberta, nos services de protection comprennent non seulement la GRC, mais aussi les services policiers municipaux, les agents de la paix communautaires et les agents chargés de faire appliquer les règlements. Chacun de ces groupes doit être une composante des activités d'application de la loi et recevoir la formation et l'équipement nécessaires. Ils pourront ainsi garder en détention des contrevenants potentiels jusqu'à ce que d'autres organismes d'application de la loi le valident et, au besoin, déposent des accusations. La formation et l'équipement sont très dispendieux, et les municipalités, particulièrement les petites, ne peuvent pas se le permettre. Il est préoccupant pour nous, en tant qu'élus municipaux, d'entendre la GRC chargée de maintenir l'ordre dans nos collectivités nous dire qu'elle n'aura pas suffisamment de temps pour former ses agents avant la date de mise en oeuvre prévue de juillet 2018. Sans la formation ni l'équipement pour appliquer les règlements, les lois et les règlements municipaux, les municipalités albertaines ne sont pas certaines de pouvoir s'acquitter de leur mandat fondamental, c'est-à-dire assurer la sécurité de leurs collectivités et la maintenir à son niveau maximum.
    Par ailleurs, je recommanderais au gouvernement fédéral d'adopter une approche pondérée et graduelle à l'égard de la législation sur le cannabis. Cette approche est essentielle, étant donné qu'il s'agit d'un environnement complexe et, bien que bon nombre d'entre nous essaient de prédire ce qui va arriver, nul ne peut prétendre savoir quelles seront les répercussions de ce projet de loi. Cela permettra d'ajuster les stratégies au besoin, une fois que les trois ordres de gouvernement et les divers intervenants auront eu le temps d'évaluer dans quelle mesure la loi et son règlement d'application les toucheront. Notre demande est simple: ralentissez, regardez ce qui se fait ailleurs et accordez assez de temps à tout le monde pour que nous puissions faire les choses correctement dès le départ.
    Je suis heureuse d'avoir eu l'occasion de m'exprimer au nom de l'AUMA, et je répondrai volontiers à vos questions. Merci.

  (1355)  

    Je vous remercie, madame Holmes.
    Je cède maintenant la parole aux représentants de Cannabis Culture. Si je ne me trompe pas, Marc Emery, vous allez utiliser les cinq premières minutes, puis partager les cinq autres.
    Je vais essayer de m'en tenir à cinq minutes, monsieur le président, et je vous remercie de nous avoir invités à comparaître aujourd'hui.
    Nous représentons Cannabis Culture, une organisation militante fondée en 1994 et dévouée à la cause de la légalisation du cannabis. Nous nous plaisons à dire que notre mission est de « cultiver » le gouvernement, et non pas de l’abattre.
    Je tiens à dire, en toute déférence pour le comité de la santé, que la marijuana est l'une des substances les plus inoffensives qui soient. Il y a moins de danger à consommer du cannabis que tout autre produit qui se trouve ici sur la rue Sparks. Le cannabis est moins dommageable que les bonbons, le McDonald's, les médicaments d'ordonnance, le tabac et l'alcool, soit toutes des choses qui sont en vente sur cette rue. Fumer du cannabis est plus sécuritaire que de faire du cheerleading ou de jouer au football ou au hockey à l'école. Pour toutes sortes de raisons, on peut difficilement faire un choix plus sécuritaire que celui de consommer du cannabis.
    C'est pourquoi je considère tout à fait inutile qu'un Parlement consacre une semaine entière à discuter des risques pour la santé d'une substance qui n'a jamais tué personne tout en étant distribuée sur le libre marché — que certains appellent le marché noir — depuis 50 ans. Imaginez. Pouvez-vous penser à un autre produit qui n'a pas tué personne en 50 ans? Les voitures tuent des gens constamment. L'alcool, le tabac, les médicaments d'ordonnance et la nourriture font également des victimes. L'obésité tue des gens.
    De tout ce que l'on fait au sein de la société, lorsqu'on a le contrôle sur son propre corps, qui est un droit garanti par la Cour suprême dans l'arrêt Morgentaler, rares sont les choses qui sont moins néfastes que le cannabis. En fait, le gouvernement a même approuvé de l'eau qui a tué huit personnes à Walkerton, en Ontario, alors on pourrait dire que l'eau est plus dangereuse que la marijuana.
    Il faudrait débattre de cette question devant le comité de la justice. Si je dis cela, c'est parce que j'ai été emprisonné dans 36 prisons pour des infractions liées au cannabis. J'ai été extradé aux États-Unis par mon propre gouvernement pendant cinq ans pour avoir vendu par la poste des semences de marijuana. Pouvez-vous imaginer? Malgré le fait que ce pays repose sur l'agriculture, j'ai passé cinq ans en prison, parce que j'ai expédié des semences à des adultes consentants qui souhaitaient cultiver des plants. Nous en sommes arrivés là. Le comité de la justice devrait se pencher là-dessus, parce que 2 400 000 Canadiens ont été criminalisés pour des infractions liées au cannabis depuis 1965.
    Cette situation ne s'apparente à rien d'autre. Près de 2,4 millions de gens criminalisés pour quelque chose qu'ils aiment, c'est-à-dire cultiver, vendre ou consommer de la marijuana, et tout cela, en ne faisant aucun mal à personne. Si le crime organisé est impliqué là-dedans, c'est parce que vous l'avez créé. Si vous n'aviez pas criminalisé la marijuana, il n'y aurait personne qui vendrait de la marijuana à l'exception des détaillants réguliers. Vous êtes donc le problème. C'est de votre faute. Cette interdiction perdure depuis 93 ans. Entretemps, je n'ai jamais vu le Parlement moderniser ou améliorer ce régime.
    J'ai passé trois mois au Centre correctionnel de Saskatoon pour avoir passé un joint. On m'a emprisonné aux États-Unis pendant cinq ans pour avoir vendu des semences à des Américains, puis nous nous sommes lancés dans toutes sortes de démarches de désobéissance. Comme je l'ai dit, j'ai probablement été arrêté 27 ou 28 fois, et j'ai été emprisonné 36 fois. J'ai été emprisonné dans 9 provinces sur 10 pour mon activisme. Je peux vous dire que j'en ai vu des prisons partout au pays. Nous devons nous défaire de cette criminalisation... Et on veut la légalisation qu'on nous a présentée lorsque nous avons élu M. Trudeau.
    En 1923, le ministre de la Justice s'est présenté au Parlement et a dit au Président qu'ils avaient ajouté une nouvelle drogue à l'annexe. Voilà. Il n'y a pas eu d'autres discussions. Par conséquent, vous pourriez légaliser le cannabis de cette même façon en disant: « Monsieur le Président, nous avons enlevé le cannabis de la liste ». C'est la seule légalisation qui soit acceptable. C'est la seule qui soit réellement une légalisation. Tout le reste constitue de la recriminalisation. En fait, j'irais même jusqu'à dire qu'il y a plus d'infractions criminelles dans le nouveau projet de loi sur le cannabis que dans la législation en vigueur. Par conséquent, vous visez davantage de gens avec davantage d'infractions, et pratiquement tous ceux qui doivent être décriminalisés, soit les cultivateurs, les vendeurs et les consommateurs, seront encore criminalisés en vertu de ce projet de loi. Seuls les producteurs qui détiennent un permis, soit une très petite minorité, seront autorisés à cultiver de la marijuana. On ne peut pas être en possession de marijuana qui ne vient pas d'un producteur autorisé ou d'un monopole gouvernemental en Ontario, au Québec ou au Nouveau-Brunswick.
    Avant, nous étions seulement criminalisés. Maintenant, nous allons être criminalisés et exploités par notre propre gouvernement. Le gouvernement fera de l'argent sur notre dos. Nous serons en quelque sorte sa vache à lait. Nous perdrons nos cultures aux mains d'une bande de bureaucrates et de politiciens qui n'ont probablement jamais fumé de cannabis de leur vie, ne comprennent rien à ces gens et ne savent rien à notre sujet. C'est une insulte pour les cinq millions de Canadiens qui adorent cette plante, qui l'utilisent, la consomment, la vendent, la cultivent, et qui y ont consacré toute leur vie, comme moi-même...
    Le gouvernement qui nous a opprimés se considère comme un libérateur, alors qu'il est très condescendant envers nous. Nous ne sommes pas des enfants. Nous sommes des adultes et nous faisons des choix. Si vous vous souciez des enfants, très bien, occupez-vous-en, mais je vous dirais que la plupart des gens qui fument de la marijuana au pays sont âgés de 18 à 80 ans.

  (1400)  

    Je vous remercie, monsieur Casey. Cela fait cinq minutes que je parle, alors je vais laisser mon épouse poursuivre. Elle vous expliquera à quel point la marijuana est extraordinaire.
    Monsieur le président, je tiens à vous remercier de m'avoir invitée à comparaître devant le Comité. Je représente, je présume, les victimes de l'interdiction du cannabis.
    Nous avons entendu l'opinion de nombreux experts et bureaucrates et de bien des gens qui en avaient long à dire, et c'est fantastique que nous ayons cette discussion. C'est très important pour moi que nous soyons réunis ici aujourd'hui pour discuter de la légalisation du cannabis au Canada. J'ai été candidate à l'investiture libérale parce que je croyais en la légalisation.
    Je suis non seulement une victime de l'interdiction, car je suis en liberté sous caution après avoir été arrêtée il y a six mois, mais je suis aussi une victime de la guerre des drogues. J'ai été séparée pendant des années de mon mari, qui a été emprisonné dans un pays où il n'avait jamais mis les pieds. L'administration américaine chargée de la lutte antidrogue a très clairement invoqué comme motif le fait qu'il militait en faveur de la légalisation et qu'il avait donné des millions de dollars à des groupes militant pour la légalisation partout dans le monde. C'est ce qu'a fait valoir la dirigeante de cette administration, Karen Tandy, dans un communiqué auquel vous pouvez facilement avoir accès. Mon mari a dit que c'était seulement pour des semences, mais le gouvernement américain affirme que c'était pour des activités en faveur de la légalisation.
    Nous sommes ici pour discuter de la légalisation du cannabis, ce qui signifie que nous ne devrions pas nous préoccuper de l'application de la loi. Si le cannabis devient légal, l'application de la loi devrait être axée sur les véritables crimes qui font de réelles victimes, comme les viols, les agressions, les meurtres et les vols.
    Certains membres de ma famille travaillent dans le domaine de l'application de la loi. J'ai une tante et un oncle en Alberta qui travaillent au sein de la GRC et pour l'organisme MADD. Ma soeur travaille au sein du service de police de Vancouver. Je me préoccupe de l'application de la loi, de la législation, de notre pays et de nos citoyens, mais interdiction et la criminalisation du cannabis nuisent à notre pays, à la législation et à nos citoyens. Même si le cannabis était dangereux, même s'il causait des décès tous les jours et contribuait à des crimes comme les viols, les agressions et les meurtres chez les jeunes adultes partout au pays comme le fait l'alcool, il ne devrait pas être illégal. Nous devrions être libres de consommer, de cultiver ou de donner une plante dont les effets sont bénins ou neutres et qui, comme vous l'avez entendu, est bénéfique pour certaines personnes et sauve des vies.
    Je sais que nous avons seulement quelques minutes, mais j'aimerais citer... Si vous lisez mon mémoire... J'ai présenté un mémoire de 10 pages... qui n'en compte plus que 5.
    Examinons les effets du cannabis sur la santé. On pouvait lire dans The American Journal of Medicine, en 2013, et dans le Journal of Health Economics, en 2017, que la consommation de cannabis contribue à réduire l'obésité et à rendre les consommateurs plus en santé et plus minces. En 2015, on pouvait lire dans le Journal of the American Medical Association que le cannabis est un médicament. En 2012, on écrivait dans cette même publication qu'au terme d'une étude qui s'est échelonnée sur 20 ans, on a conclu que le cannabis n'était pas dommageable pour les poumons. Cette conclusion est soutenue par le Dr Donald Tashkin, à qui le gouvernement américain avait demandé de prouver que le cannabis cause le cancer du poumon. On a plutôt constaté que le cannabis contribue à prévenir le cancer. Vous pouvez aller consulter le site cancer.gov. Le gouvernement américain affirme que le cannabis et les cannabinoïdes attaquent et tuent les cellules cancéreuses. Ils contribuent également à réduire les cellules cancéreuses au cerveau. C'est ce qu'on pouvait lire en 2014 dans la revue Molecular Cancer Therapeutics. Dans l'American Journal of Public Health, en 2014, on affirmait que l'accessibilité au cannabis contribue à réduire les taux de suicide.
    Mon père s'est enlevé la vie quand j'avais neuf ans. La chaîne en or que je porte lui appartenait. J'ai pris des antidépresseurs pendant de nombreuses années, qui m'ont causé du tort. Hier justement, nous avons entendu dire que les antidépresseurs augmentent les taux de suicide de 33 %. C'est pour cette raison que j'ai délaissé les antidépresseurs et que j'utilise plutôt du cannabis. J'obtiens mon cannabis de façon illégale, car, comme j'ai été libérée sous caution, je ne suis pas autorisée à fréquenter un dispensaire.
    Je vais vous montrer un joint de marijuana. C'est ce dont nous parlons aujourd'hui. C'est du cannabis et ça ne fait de mal à personne. J'ai été dans des prisons américaines, et je peux vous dire que je ne pleurais pas pour moi-même ou pour mon mari en tant que victimes de l'interdiction; je pleurais pour les enfants, les mères et les familles qui visitaient leurs proches et pour les bébés qui voyaient leurs pères de l'autre côté de la salle des visites. Les enfants demandaient « Pourquoi mon papa est ici? Il n'a fait de mal à personne. On dit que les prisonniers sont méchants, mais mon père n'est pas méchant, n'est-ce pas? » Les mères essayaient de ne pas pleurer, et les enfants disaient « Maman, ne pleure pas. Soit courageuse. » Ce sont les victimes de l'interdiction du cannabis. L'interdiction du cannabis fait beaucoup plus de victimes et cause beaucoup plus de torts que le cannabis pourrait en faire.
    Nous vivons en ce moment au pays une crise de la drogue. C'est la crise des opioïdes. Tout le monde ici en a entendu parler. Le National Institute on Drug Abuse des États-Unis affirme que les dispensaires de cannabis contribuent à réduire les décès liés aux opioïdes. Il y a amplement de preuves à cet égard. Même l'étude de l'Université Harvard publiée dans Frontiers in Pharmacology conclut que le cannabis améliore les fonctions cognitives. En 2015, l'American Psychological Association a affirmé que les adolescents, même les utilisateurs chroniques, n'avaient pas pour autant des problèmes plus tard dans la vie. Le British journal... Dans un article, on affirmait que le cannabis est la substance la plus sûre.
    Je suis émotive, car j'ai respecté la loi. Durant toutes les années où mon mari a été incarcéré, je devais franchir la frontière américaine en sachant qu'on pouvait me demander si je consommais du cannabis et qu'on pouvait m'empêcher de voir mon mari. J'ai passé au travers de cette période, car j'ai suivi les règles le plus possible.

  (1405)  

    Nous avons décidé par la suite de pratiquer la désobéissance civile pacifique, comme l'a fait le Dr Henry Morgentaler, qui a reçu l'Ordre du Canada pour avoir enfreint la loi afin de fournir un service grandement nécessaire. La désobéissance civile est la seule façon que nous avons trouvée pour faire changer les lois au pays en ce qui concerne le cannabis.
    Madame Emery, je vois que vous êtes passionnée et que vous avez ce dossier à coeur, mais je dois passer aux autres témoins. Vous aurez amplement l'occasion de répondre aux questions et de donner de l'information.
    Tout à fait. Je vous remercie de m'avoir écoutée.
    Nous apprécions votre contribution.
    Nous allons maintenant passer à la Fédération canadienne des municipalités pour 10 minutes. Allez-vous partager le temps de parole ou est-ce seulement l'un...
    Monsieur Karsten.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président, de nous accueillir aujourd'hui. Nous tenons à vous remercier pour le travail important que vous et votre comité accomplissez.
    Comme nous le savons, monsieur le président, nous sommes ici aujourd'hui pour discuter des aspects législatifs et réglementaires de la légalisation du cannabis utilisé à des fins récréatives, car vous conviendrez, j'en suis certain, que cette légalisation doit se faire efficacement et en toute sécurité pour les Canadiens. Cependant, il n'y a rien d'automatique dans tout cela. Il faudra une solide collaboration entre les différents ordres de gouvernement et j'estime que les administrations municipales vont jouer un rôle essentiel.
    Le conseil national d'administration de la Fédération canadienne des municipalités s'est réuni cette semaine à Wood Buffalo, en Alberta, et croyez-moi lorsque je vous dis que le projet de loi C-45 a occupé une grande place dans l'ordre du jour. J'ai des recommandations claires à vous formuler aujourd'hui à la suite de cette rencontre. Je vais partager un peu avec mon collègue les 10 minutes qui nous sont imparties. J'aimerais vous présenter le chef de la direction de la FCM, Brock Carlton. Je lui cède la parole pour quelques minutes. Brock.
    Comme vous le savez peut-être, la Fédération canadienne des municipalités comprend près de 2 000 municipalités qui représentent 90 % des Canadiens dans chaque région, province et territoire, dans les grandes villes et dans les collectivités rurales, nordiques et éloignées. Ce sont dans nos communautés que les gens vivent, qu'ils travaillent et élèvent leur famille. Souvent, lorsque des projets du gouvernement fédéral sont mis en oeuvre, c'est au sein de ces collectivités qu'on passe de la théorie à la pratique.

[Français]

     De toute évidence, c'est dans nos collectivités que le cannabis sera vendu et consommé. Les gouvernements municipaux seront donc aux premières lignes lorsque la réglementation entrera en vigueur dans l'ensemble du Canada. Les membres de la FCM sont déjà vos yeux et vos oreilles. Nous savons comment est appliquée la réglementation du cannabis, tant médicinal qu'illicite, dans un marché qui évolue rapidement. Nous savons comment le changement peut améliorer ou perturber les villes et les collectivités, partout au Canada. Les Canadiens ont besoin d'une certaine expertise locale pour aider à façonner le régime relatif au cannabis à des fins récréatives.
    À l'échelle locale, la mise en application de ce nouveau régime sera une tâche monumentale, une tâche qui dépend énormément des prochaines mesures des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux. C'est une autre bonne raison pour s'assurer que les municipalités participeront à ce processus et qu'elles pourront ainsi savoir ce qui les attend.

  (1410)  

[Traduction]

    Cela fait plus de 20 ans que je travaille au sein de la FCM, et j'ai souvent constaté que, lorsque le gouvernement fédéral collabore systématiquement avec les administrations municipales, les Canadiens sont gagnants. C'est vrai en ce qui concerne l'infrastructure, la croissance économique, la sécurité publique, et ce sera vrai également pour la légalisation du cannabis utilisé à des fins récréatives. Il est important de savoir que la FCM est prête et qu'elle est disposée à aller de l'avant efficacement et en toute sécurité.
    Je vais maintenant redonner la parole au vice-président Karsten, qui vous parlera de nos recommandations.
    Merci, Brock.
    Mesdames et messieurs les membres du Comité, le fait est que l'adoption du projet de loi C-45 déclenchera dans tous les ordres de gouvernement un immense processus de mise en oeuvre, et je voudrais souligner ce que notre membre de l'Alberta a dit: « tous les ordres de gouvernement ». Les municipalités devront adapter des règlements, des règles et des programmes à l'échelon local, en conséquence directe, par exemple, de changements de zonage, de l'occupation du territoire, de l'octroi de permis aux entreprises, de la nécessité de faire respecter la loi et de bien d'autres motifs. Mais une grande partie de ce travail découlera de cadres réglementaires que les autorités fédérales, les provinces et les territoires devront concevoir et construire.
    Notre fédération est heureuse et fière d'avoir publié une initiation à la légalisation pour nos membres de tout le pays, et elle a mis en chantier une ligne directrice et un guide plus complets à leur intention. Ces outils aideront nos municipalités à commencer à résoudre les problèmes immédiats et à planifier le travail à long terme. Mais pour que ces plans de travail soient menés à bon terme, les municipalités ont besoin de clarté et de certitude sur toute une gamme de questions.
    Notre première recommandation est que le gouvernement fédéral coordonne ses forces avec celles de tous les ordres de gouvernement pour élaborer son cadre réglementaire sous le régime du projet de loi C-45. Nous croyons que la recette pour respecter sûrement et efficacement le délai du lancement prévu pour juillet 2018 — et, encore une fois, j'insiste sur « sûrement et efficacement » — est que tous les ordres de gouvernement élaborent dans le même temps des lois, des règlements et des règlements municipaux. Localement, nous avancerons petit à petit, en nous inspirant des actions fédérales, provinciales et territoriales. Ces partenaires ont encore d'importantes décisions à prendre sur des points comme l'âge minimum de consommation et le genre de modèle de distribution à adopter.
    Il subsiste aussi beaucoup d'incertitude touchant les responsabilités partagées pour des incidences communes dont je voudrais vous entretenir. Succinctement, cela concerne notamment la culture à des fins personnelles, l'hygiène et la sécurité au travail, la sensibilisation du public, les nuisances, le zonage municipal, le pouvoir des municipalités d'édicter des règlements de zonage dans l'éventualité de la présence d'installations fédérales de production, pour nous en tenir à ces questions.
    Le gouvernement fédéral a formalisé ses consultations avec les provinces et les territoires dans un groupe de travail. Nous le comprenons. C'est un premier pas, d'importance. Cependant, notre fédération verrait d'un bon oeil la mobilisation continue des municipalités auprès de ce groupe pour l'harmonisation des besoins de tous les gouvernements.
    Dans le cadre de cette coordination, notre deuxième recommandation à votre comité, monsieur le président, est d'établir l'ordre de priorité des décisions qui, si elles ne se prennent pas, empêcheront les autorités locales d'aller de l'avant dans le travail de mise en oeuvre. Cet ordre de priorité est essentiel pour que nous avancions sûrement et efficacement.
    Dans certains domaines, les décisions prises aux échelons fédéral, provincial ou territorial entraîneront la réaction locale, par exemple, le choix, par la province, de son modèle de distribution et de vente au détail, les règles concernant la culture à des fins personnelles, comme je l'ai dit, la superposition des limites des municipalités et des territoires des Premières Nations, question qui a été soulevée par certains de nos membres, le pouvoir d'interdire la consommation et la vente de cannabis là où cela s'applique et les options dont pourront se prévaloir les municipalités si le cannabis, légalisé à l'échelon fédéral, ne l'est pas à celui de la province ou du territoire.
    Nous croyons que le gouvernement fédéral devrait prendre les devants avec tous les ordres de gouvernement dans les mois à venir pour s'assurer de la définition très claire des différents rôles et responsabilités.
    Notre troisième recommandation est de prévoir un financement fédéral des coûts de démarrage de la mise en oeuvre locale. Il est absolument certain qu'on s'attend à ce que les municipalités soient en première ligne pour faire respecter la loi, notamment en matière de zonage local, de réglementation municipale de la densité d'occupation des sols, de l'âge minimum pour l'achat, de la culture à des fins personnelles, des limites de possession, des limites de consommation et des plaintes pour nuisance publique, toutes des questions qui se poseront inévitablement. De plus, comme on y a fait allusion dans l'autre exposé, des questions sur la sécurité sont soulevées relativement au code du bâtiment. Nous croyons qu'elles sont du seul ressort des municipalités. Cependant, l'adaptation imposera à coup sûr des coûts immédiats. En général, les municipalités ne possèdent pas la souplesse financière qui leur permet d'investir dans ce qui est nécessaire dans les délais impartis.

  (1415)  

    Je suis heureux de faire remarquer que l'un des membres de votre comité a déjà été conseiller municipal et que d'autres députés l'ont également été.
    Le groupe de travail fédéral a reconnu que la mise en oeuvre exigera une capacité renouvelée. J'incite vivement les dirigeants fédéraux à s'assurer que toutes les autorités l'acquerront avant l'entrée en vigueur de la loi, avant qu'on ne commence à engranger les recettes provenant du cannabis. Je ferai remarquer que nous avons été heureux de constater que le gouvernement a annoncé, au cours de la semaine, le financement de la formation.
    Notre quatrième recommandation est de préconiser un modèle de partage intelligent des revenus entre tous les ordres de gouvernement. L'administration et l'application de loi imposeront des coûts permanents aux autorités locales. Nous prévoyons des heures supplémentaires pour le personnel, plus de ressources pour la formation, la santé publique, l'octroi de permis, l'administration, les règlements municipaux, etc. Visiblement, la liste ne se termine pas là. Nous tenons aussi mordicus à nos arguments et à nos renseignements que les autres témoins. Notre dernière recommandation est donc qu'on veille à ce que la lenteur plus grande que prévu des rentrées d'argent dues au cannabis ne mette pas en péril la sûreté et l'efficacité du régime.
    Un des objectifs premiers de la loi sur le cannabis est de décourager la criminalité. Comme les spécialistes le disent, pour affamer le marché noir il faut maintenir bas le prix du cannabis légal. Pour cette raison, le directeur parlementaire du budget nous a avertis que les recettes démarreront lentement et qu'elles seront peu élevées, entre 356 et 959 millions de dollars par année, mais les autorités locales, peu importe quel sera le chiffre, devront éponger des coûts administratifs et des coûts d'application élevés. Nous avons donc besoin de savoir que l'appui fédéral sera disponible, si les rentrées prennent un certain temps pour attraper le niveau voulu.
    Monsieur le président, nous pouvons condenser nos recommandations dans deux idées: le gouvernement devrait mobiliser les municipalités dans l'élaboration de ses cadres réglementaires et de ses modèles de recettes, et la durabilité de tout régime visant le cannabis dépend de la dotation des autorités locales avec les outils nécessaires pour l'administrer et le faire respecter dès le départ et pour longtemps.
    Nous sommes fiers du bilan du secteur municipal dans la production de solutions locales à des problèmes nationaux. Il nous tarde de collaborer avec le gouvernement fédéral pendant tout le cheminement de la loi sur le cannabis. Nous vous remercions de votre temps et nous serons également heureux de répondre à vos questions. Merci.
    Je vous remercie de votre exposé et de tous les points de vue exprimés.
    Passons maintenant aux questions, dans une série d'interventions d'une durée de sept minutes. Nous commençons par M. Eyolfson.
    Je vous remercie tous d'être venus.
    Je félicite la Fédération canadienne des municipalités, ou FCM, et la Alberta Urban Municipalities Association, ou AUMA, de leur travail sur la question. Bien franchement, je suis ravi de constater que vos deux organisations ont eu la sagesse de réfléchir à l'avance, puis de venir nous parler de la façon dont il faut procéder, selon vous. C'est tout un contraste avec les provinces, qui ont dit dans les médias qu'elles auront du mal à respecter notre délai. Nous les avons toutes invitées, mais à l'exception de la Saskatchewan, elles ont toutes décliné. La Saskatchewan, la seule province à avoir témoigné, a dit que ce n'est pas du tout une priorité pour elle; elle a affirmé qu'elle ne ferait pas grand-chose à ce sujet, à l'exception du délai que nous lui demandons de respecter.
    Contrairement à ce que nous avons pu constater de la participation des provinces, je vous remercie d'avoir pris l'initiative d'y réfléchir à l'avance et de vous présenter aujourd'hui.
    En ce qui concerne les coûts, j'allais citer quelques chiffres, mais vous avez déjà parlé des sommes que nous nous sommes engagés à verser comme aide à l'application de la loi et à la formation. Nous comprenons que les forces de l'ordre, les provinces et les municipalités auront des frais connexes à assumer. Voilà pourquoi nous nous sommes engagés… je dois constamment vérifier les chiffres, car je n'arrive pas à les mémoriser. Il s'agit de 274 millions de dollars pour les forces de l'ordre et les frontières, et 161 millions de plus pour la formation des agents de première ligne qui doivent déceler la conduite avec facultés affaiblies. Nous savons que la mesure va accroître la pression sur vos ressources.
    Il y aura d'autres coûts aussi. Dans le système actuel, des gens sont arrêtés, accusés puis traduits devant les tribunaux. Nous savons que ce processus coûte cher. On parle de beaucoup d'argent.
    Je vais d'abord m'adresser à vous, madame Holmes. Ne convenez-vous pas que cet argent sera économisé dans le système? Le projet de loi ne représentera-t-il pas des économies substantielles, lorsque nous cesserons d'arrêter et d'accuser des gens pour possession simple?

  (1420)  

    En toute franchise, je ne suis pas bien placée pour parler du nombre d'affaires qui se retrouveraient devant une cour criminelle en Alberta, de sorte que je peux difficilement dire si le coût sera important. Quant à ce qui nous préoccupe, nous avons dit penser qu'il y aura des coûts associés à l'application de la loi, sur les plans de la formation et de l'équipement, mais ce n'est pas tout. Par exemple, les petites municipalités n'ont pas la même capacité d'absorption que les grandes villes en présence de ce genre de modification législative. Nous allons même devoir former les conseillers municipaux sur la façon de créer des règlements à adopter pour que le projet devienne réalité. Les coûts vont au-delà de l'application de la loi. Cela dit, je m'attends à ce qu'il y ait des économies, mais je ne peux pas vous en dire la somme.
    Je comprends.
    Qu'en pensent les représentants de la FCM?
    Nous sommes d'avis que la légalisation ne réduira pas à elle seule la charge de travail de nos services de police locaux. En fait, compte tenu des différents problèmes qui se posent, leur charge va plutôt augmenter. Le travail consistant à évaluer les économies qui pourraient être réalisées n'a pas encore été fait. Dans l'ensemble, nous croyons qu'il y aura des coûts importants associés à l'application de toutes les nouvelles règles sur la conduite avec facultés affaiblies, la culture à des fins personnelles, les limites de la possession, l'approvisionnement de cannabis aux mineurs, et ainsi de suite. Au bout du compte, nous croyons que les hausses de coûts seront considérables.
    Dites-vous que les dispositions législatives vont alourdir la charge de travail malgré le fait que les policiers n'arrêteront plus les gens pour possession simple?
    Oui c'est vraiment ce que nous pensons, à la lumière des autres problèmes qui s'ajouteront à leur charge de travail.
    Qu'est-ce qui alourdirait leur charge au point de contrer les économies réalisées par le fait de ne pas arrêter les gens pour possession?
    Nous avons bien sûr beaucoup réfléchi à la question de la conduite avec facultés affaiblies et des essais qui doivent être réalisés. Pour ce qui est du coût des immobilisations, il faudra peut-être acheter de l'équipement. Nous comprenons que le gouvernement fédéral a injecté des fonds, et nous l'en remercions, mais nous doutons que ces sommes couvrent l'ensemble des coûts.
    C'est compréhensible.
    Parlons maintenant de la conduite avec facultés affaiblies par le cannabis. Nous savons que la question constitue un problème à l'heure actuelle.

  (1425)  

    Lorsque vous aurez terminé, j'aimerais ajouter certaines précisions à ce sujet.
    D'accord, mais je souhaite d'abord terminer ma question.
    Nous savons que la conduite avec facultés affaiblies est un problème à l'heure actuelle. Pour l'instant, nous n'avons pas les outils nécessaires pour nous en occuper, même si nous savons que le problème est généralisé. Nous ne connaissons même pas son ampleur. Ne sera-t-il pas avantageux pour les forces de l'ordre et vos municipalités que nous introduisions une façon de composer avec un problème pour lequel nous n'avions pas les outils jusqu'à maintenant?
    De mon point de vue, il est vrai que nous avons actuellement un problème relatif à la conduite avec facultés affaiblies, mais pour l'instant, les citoyens considèrent que le cannabis est illégal. Lorsqu'il sera légalisé, une campagne de sensibilisation sur le sujet sera indispensable, étant donné qu'il y aura assurément une augmentation des infractions. Une de nos préoccupations, c'est que nous ne sommes pas certains que la technologie soit en place dès le 1er juillet pour que nos polices locales puissent l'utiliser à cette fin.
    Je vais vous donner un exemple d'augmentation de la charge de travail, d'après les agents de la GRC de l'Alberta. C'est un exemple de l'incidence de la législation à Morinville. Disons qu'un agent de la paix communautaire, autorisé à faire respecter le code de la route, interpelle un individu qu'il soupçonne de conduire avec les facultés affaiblies par le cannabis. L'agent devra appeler la GRC pour que celle-ci conduise l'individu à l'hôpital, où un test de dépistage sera réalisé pour déterminer s'il a consommé, étant donné que nous n'avons pas encore la technologie nécessaire pour effectuer des dépistages en bordure de route. Il faudrait donc appeler un agent de la GRC — je n'en ai que neuf dans une municipalité de 10 000 habitants —, qui devra attendre à l'hôpital d'une autre municipalité pour voir si les facultés de l'individu étaient affaiblies. C'est ce que j'ai cru comprendre.
    J'ai donc de sérieuses réserves en raison de l'augmentation des cas de conduites avec facultés affaiblies que nous allons observer, du manque de sensibilisation de la population et de l'absence d'outils convenables pour appliquer la loi.
    Vous n'observerez pas de hausse de cas de conduite avec facultés affaiblies à cause du cannabis.
    Votre temps est écoulé, mais vous vouliez formuler un commentaire, madame Emery.
    Je comprends que le cannabis au volant soit une question importante et une préoccupation. Je ne milite pas en faveur de la conduite avec facultés affaiblies. Cependant, en 2015, la National Highway Traffic Safety Administration des États-Unis a publié un rapport intitulé « Drug and Alcohol Crash Risk: A Case-Control Study » dans lequel elle n’a pas constaté de hausse des risques d’accidents associée au THC. Encore plus récemment, en juillet 2017, l’American Journal of Public Health — je le mentionne puisque nous sommes à une réunion du Comité permanent de la santé — a conclu que les changements observés dans les statistiques sur les taux de mortalité concernant les accidents de la route à Washington et au Colorado ne différaient pas des taux enregistrés dans des États semblables où la consommation de marijuana à des fins récréatives n’est pas légale. Il s’agit d’une étude récente, alors je vous prierais de la consulter.
    Je n’encourage pas la conduite avec facultés affaiblies, mais la grande majorité des consommateurs de cannabis ne conduisent pas lorsque leurs facultés sont affaiblies. Le cannabis n’a pas le même effet que l’alcool sur le jugement. Lorsque vous buvez de l’alcool, vous pensez pouvoir conduire et vous savez que vous ne pouvez pas le faire. Lorsque vous fumez du cannabis, vous savez que vous ne pouvez pas prendre le volant et vous ne le faites pas. Nous devons aussi tenir compte des centaines de milliers de patients qui consomment de la marijuana à des fins médicales au Canada et qui sont incapables de conduire, de participer à la vie en société ou de travailler s’ils ne fument pas de cannabis. Si vous criminalisez ceux qui conduisent après avoir consommé du cannabis, vous allez criminaliser chaque patient et chaque personne défavorisée qui consomme de la marijuana à des fins médicales au pays.
    Nous constatons aussi que ce harcèlement ciblé, comme nous l’avons admis, ferait en sorte qu'il faille amener quelqu’un à l’hôpital et lui faire une prise de sang sans son consentement quand il n’a pas la chance de le donner. Et pourquoi? Pour prouver qu’il a consommé du cannabis ou que ses facultés sont affaiblies? C’est le rendement qui montre que les facultés d’une personne sont affaiblies, qu’elle conduise après avoir pris des médicaments dont l’étiquette déconseille de faire fonctionner de l’équipement lourd ou des véhicules, qu’elle prenne le volant alors qu’elle est en colère après une dispute ou qu’elle conduise en envoyant des SMS. Il a été prouvé que l’envoi de SMS au volant haussait le nombre d’accidents. Nous le savons, et c’est arrivé immédiatement. Nous pourrions dire que les téléphones portables et l’envoi de SMS distraient les conducteurs et accroissent le nombre d’accidents de la route. Il est possible de le prouver: d’ailleurs, on l’a déjà fait.
    Avec le cannabis, c’est impossible à prouver, ce qui explique pourquoi les policiers et les responsables d’organismes d’application de la loi font des pieds et des mains pour essayer de trouver un test et de fixer une limite de cannabis dans le sang. Comme j’ai appuyé officiellement la campagne Initiative 502 de l’État de Washington, j’ai participé à la légalisation avec l'avocat de mon conjoint — alors vous pouvez trouver un terrain d’entente avec les gens qui ont travaillé contre vous auparavant — mais ils ont avoué qu’ils n’avaient qu’un seul niveau de cannabis dans le sang, car le fait de diffuser cette information encouragerait le public à appuyer l’initiative.
    Nous devons reconnaître que, dans les faits, des décennies d’interdictions et de désinformation générée par le gouvernement et la peur de conduire après avoir consommé du cannabis découragent les gens de chercher à connaître la vérité en ce qui concerne cette substance.
    Comme je l’ai mentionné, l’American Journal of Public Health a étudié cette question à fond en 2017, tout comme la National Highway Traffic Safety Administration en 2015. Le cannabis ne créera pas de crise sur les routes. Les policiers devraient se concentrer sur l’alcool et les drogues vraiment dangereuses.
    Merci.

  (1430)  

    Merci beaucoup.
    La parole est maintenant à Mme Gladu.
    Merci à nos témoins.
    Bien sûr, c’est contraire aux témoignages que nous avons entendus concernant Washington où le taux de cas de conduite avec facultés affaiblies est passé de 8 % à 17 % après la légalisation du cannabis. Le Colorado a connu une hausse de 32 %, tandis que le nombre de décès attribuables à la drogue au volant a augmenté dans l’ensemble des États-Unis.
    Cependant, ma question s’adresse à Mme Holmes.
    J’ai trouvé que vous avez bien montré la difficulté qui découle du fait que l'on se précipite pour faire adopter la présente mesure législative. Avec seulement 288 jours avant la légalisation de la marijuana que souhaite le gouvernement, nous devons terminer la mise à jour du projet de loi C-45. Ensuite, les provinces devront rédiger leur propre mesure législative pour choisir ce qu’elles feront dans les secteurs dans lesquels on leur a donné de la latitude. Ensuite, les municipalités auront à décider comment elles les mettront en oeuvre, et ce, sans le moindre financement dans tous les secteurs que vous avez mentionnés.
    La première chose que nous avons entendue et la plus importante est que les efforts de sensibilisation du public aux dangers de la conduite avec facultés affaiblies par la drogue doivent permettre de rejoindre les parents et les jeunes, ainsi que la société. Combien de sensibilisation publique le gouvernement fédéral a-t-il fait auprès de votre municipalité, et combien de financement a-t-il versé dans le cadre de cette initiative?
    À ce stade, en particulier à Morinville, nous n’avons reçu aucun financement destiné à la sensibilisation du public ni le moindre outil que ce soit. Cela étant dit, je sais que l’AUMA a travaillé d’arrache-pied à l’élaboration de boîtes à outils, tout comme la FCM, afin d’aider les municipalités dans ces domaines puisque nous estimons qu’il s’agit autant d’une question locale que fédérale.
    Merci.
    Ma question s’adresse à Bill Karsten et elle porte sur les installations de culture à la maison.
    Des témoins nous ont dit qu’on se préoccupait grandement de ces types d’installations. Elles ont 24 fois plus de chances de déclencher des incendies. Il y a aussi des questions de vol d’électricité et de moisissure. On a parlé des propriétaires en Ontario ou au Québec qui seraient incapables d’empêcher leurs locataires de cultiver, de fumer ou de consommer du cannabis dans leur logement. Cette préoccupation ressemble-t-elle à celles auxquelles vous faisiez allusion?
    La culture personnelle du cannabis est un domaine susceptible d’avoir de nombreuses nouvelles implications pour les municipalités au pays et il est nécessaire de bien les comprendre. À ce stade, on ignore comment cet aspect de la mesure législative sera géré, mais on prévoit que les municipalités auront à composer avec des questions de santé et de sécurité ainsi que des perturbations, comme vous l’avez laissé entendre.
    Le message auquel j’aimerais revenir ressemble beaucoup à l’autre question. Je ne pense pas nécessairement qu’on doive tenir un débat sur la conduite avec facultés affaiblies ou qu’on doive déterminer toutes ces choses à l’échelon du comité. Je crois que, en tant qu’organisation représentant des municipalités d’un océan à l’autre, la FCM doit signaler que nous avons besoin de travailler avec le gouvernement fédéral dans le contexte du cadre réglementaire. Les responsables de la FCM sont fiers d’envoyer un document d’information à tous leurs membres, et ils publieront un guide ou des lignes directrices. Comprenez que nous faisons maintenant affaire avec le gouvernement fédéral à l’échelon national; les membres de notre personnel ont tenu un certain nombre de réunions.
    Mon autre question se rapporte au traitement. Nous avons beaucoup entendu parler, surtout chez les jeunes, d’une hausse de 30 % des cas de schizophrénie, de psychoses et de dépression. Il y a aussi des gens qui ont une dépendance au cannabis et il faut pouvoir leur offrir des traitements.
    Dans quelle mesure les municipalités de partout au Canada sont-elles outillées pour composer avec la hausse attendue?
    De toute évidence, c’est une question très importante.
    Malheureusement, nous ne sommes pas les experts du secteur en ce qui concerne cette question particulière. J’ose espérer que chaque province se tournerait vers ses responsables de la santé publique et son ministère de la Santé pour connaître la meilleure façon de gérer cette situation. Nous n’avons vraiment pas l’expertise nécessaire pour ce faire.
    Madame Holmes, j’ai la même question pour vous.
    À l’heure actuelle, les municipalités de l’Alberta ne sont pas, essentiellement, responsables de ce type de question, car elle se rapporte à la santé. Cela étant dit, chaque question est une question locale à laquelle nous finirons par être confrontés. Nous devrons faire appel à nos services de soutien communautaire aux familles pour trouver des outils quelconques de façon à pouvoir gérer la situation. Nous offrirons aux autorités provinciales la même chose qu’à vous. Nous travaillerons avec elles à répondre à toutes leurs questions pour nous assurer qu’elles ont mis en place la réglementation nécessaire pour régler ces problèmes.

  (1435)  

    D’accord.
    J’ai une autre question d’ordre municipal et, ensuite, je me tournerai vers M. et Mme Emery. Les responsables des municipalités estiment-ils que le projet de loi C-45 leur donne la latitude voulue pour choisir à quels endroits la marijuana peut être vendue et consommée?
    C’est une des questions que nous avons étudiées, mais comme nous ignorons ce que sera le modèle de la vente au détail d’une province à l’autre, c’est là que cela devient en quelque sorte important. En vérité, je n’aime pas répéter la même rengaine, mais nous avons besoin d’obtenir l’information. Nous avons besoin de participer. Comme je suis conseiller municipal à Halifax, je peux vous confirmer que nous avons entrepris certains de ces travaux, mais ils sont, en partie, assez coûteux, car nous faisons des travaux sans savoir si nous allons ou non les utiliser.
    Il est pour moi primordial de poursuivre sur ce thème pour que nous puissions être prêts. Nous avons dit dès le départ que nous estimions que les membres de la Fédération canadienne des municipalités pouvaient être prêts, aptes et disposés à…
    D’accord. Je manque de temps. Puis-je avoir une réponse de Mme Holmes concernant la latitude?
    Bien sûr. Comme Bill l’a mentionné, à l’heure actuelle, nous ne savons pas exactement ce que nous serons en mesure de faire. En collaboration avec la province, nous espérons pouvoir donner à la municipalité une certaine autonomie en ce qui touche l’emplacement des installations de production.
    Il y a aussi la question des municipalités qui ne veulent aucune installation de production ou de distribution, alors nous le demandons.
    Ma question s’adresse à M. et Mme Emery.
    Si le projet de loi C-45 est adopté tel quel, respecterez-vous cette nouvelle loi ou continuerez-vous à faire preuve de désobéissance civile?
    Soyez très brefs.
    Je choisis de respecter la loi dans la mesure du possible, car je n’ai commencé à ouvrir des dispensaires qu’en avril dernier et c’est ce dont on m’accuse à l’heure actuelle. Je pourrais écoper d’une peine de prison à vie au moment où on se parle, ce qui coûterait certainement beaucoup plus aux contribuables.
    Je veux ajouter que, avec les municipalités, nous devrions envisager d’autoriser les comptoirs de service à fonctionner comme ceux qui vendent de la caféine, qui est un stimulant qui crée une dépendance et que je peux obtenir gratuitement au fond de la pièce, ou comme l’alcool si je veux ouvrir un bar ou un restaurant pour en servir ou offrir une bière artisanale. La réglementation municipale en matière de permis ne devrait pas être aussi restrictive, prohibitive ou même coûteuse si on s’y prend bien.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Davies.
    Merci à tous les témoins d’être venus.
    Je veux commencer par dire que la question de la légalisation du cannabis fait partie du programme de politiques publiques depuis des décennies — depuis la commission Le Dain au début des années 1970. Je suis bien conscient du fait que nous ne serions pas ici à parler d’un type de ce que je qualifierais de décriminalisation et non de légalisation du cannabis sans le travail accompli par de nombreuses personnes qui ont beaucoup sacrifié.
    Monsieur et madame Emery, je ne peux songer à deux personnes dont l’opinion est plus importante que la vôtre dans le cadre de cette mesure législative. Je sais que vous avez consacré vos vies à ce sujet, que cela vous a coûté très cher sur le plan personnel et que vous avez fait beaucoup de sacrifices. Je voulais simplement le souligner.
    Madame Emery, je veux commencer par discuter avec vous de la grande portée du projet de loi. Vous avez dit de lui qu’ « il ne s’agit pas de légalisation, mais bien de Prohibition 2.0… ». Pouvez-vous expliquer ce que vous entendez par là?
    Les Canadiens ont fini par appuyer la légalisation du cannabis pour trois raisons. La première est que nous ne devrions pas criminaliser nos concitoyens canadiens qui, autrement, respectent la loi. Ils ne devraient pas être frappés d’une interdiction de voyager aux États-Unis, perdre leur emploi pour avoir échoué un test de dépistage des drogues ou se faire enlever leurs enfants par la Société de l’aide à l’enfance. Les Canadiens non violents et pacifiques ne devraient pas être soumis à cette criminalisation ou subir ces torts.
    La deuxième est que l’industrie existe déjà et elle vaut des milliards de dollars. L’Institut Fraser et bien d’autres l’ont analysé et dit que le cannabis devrait être légal parce qu’il existe déjà. On le cultive, on le vend, on le partage et on le consomme déjà. On le voit dans tous les films et les émissions de télévision. Il est partout. Il est normalisé, sauf au gouvernement. Nous devrions permettre à l’industrie qui existe de sortir de l’ombre pour venir dans la lumière.
    La troisième raison de légaliser le cannabis est que les organismes d’application de la loi ont dépensé des milliards de dollars des contribuables afin de poursuivre des gens pour possession de marijuana. Je préférerais nettement que cet argent soit affecté aux soins de santé, à l’éducation, au logement social, à n’importe quoi d’autre, ou qu’on permette à nos organismes d’application de la loi de se concentrer sur les crimes graves qui font des victimes.
    Tel qu’il est présenté, le projet de loi C-45 n’offrira ni amnistie ni réhabilitation aux personnes qui ont déjà été trouvées coupables. Il ne permettra pas aux personnes comme mon conjoint et moi-même de ne plus avoir de casier judiciaire. Il ne permettra pas à l’industrie actuelle de faire sa transition vers la légalité. En fait, il instaure de nouvelles sanctions plus sévères et impose des interdictions aux personnes ayant été victimisées par la prohibition en les empêchant de pouvoir faire la transition. On nous empêche de participer et on nous punit parce qu’on est incapable de participer.
    Bien que la troisième raison de légaliser la marijuana soit les dépenses des organismes d’application de la loi, vendredi, on a annoncé qu’un quart de milliard de dollars supplémentaires d’argent des contribuables serait affecté à l’application de la loi entourant la marijuana. La légalisation est censée faire en sorte qu’il ne soit plus nécessaire d’appliquer de loi contre le cannabis. Nous savons que ce type d’application de la loi est extrêmement coûteux, et bien des policiers ne veulent même pas l’appliquer, ce qui explique pourquoi il leur arrive de porter des accusations contre certaines personnes, mais pas contre d’autres.
    Comme l’a admis M. Bill Blair, qui n’est pas avec nous en ce moment, l’interdiction de la marijuana et les organismes d’application de la loi ciblent les personnes de couleur, les groupes autochtones, les personnes défavorisées et les marginaux. Ce projet de loi ne légalisera aucun des éléments pour lesquels nous nous sommes battus.

  (1440)  

    Les autres témoins ont fait remarquer que le projet de loi contient toujours un modèle de criminalisation selon lequel vous pouvez être sujet à des sanctions pénales pour possession de plus de 30 grammes dans un endroit public. Si vous avez plus de quatre plants qui font plus de 100 centimètres, vous pouvez être arrêté et passer du temps en prison pour vente et d’autres types d’infractions.
    Monsieur Emery, notre premier ministre Justin Trudeau aurait dit, en parlant de « bien faire les choses », que « nous devons créer un système complet qui contrôle et réglemente la marijuana, et qui englobera la marijuana à des fins médicales et les dispensaires possédant les permis adéquats ».
    Faisons-nous bien les choses?
    Mon Dieu, non. C’est tout le contraire. En fait, pour répondre à la question de votre collègue qui me demandait si j’allais continuer à enfreindre la loi, absolument. C’est la seule façon que Cannabis Culture a pu obtenir la moindre amélioration de son statut au cours des 20 dernières années. À titre d’exemple, le Parlement a interdit tous les livres et les magazines sur la marijuana en 1987. Cette loi est restée en vigueur pendant sept ans, jusqu’à ce que certains collègues et moi-même commencions à distribuer des livres et des magazines devant des postes de police. On a fini par nous accuser d’avoir donné des brochures aux élèves du secondaire. Nous nous sommes adressés à la juge Ellen MacDonald de la Cour supérieure qui a annulé cette décision.
    Ensuite, j’ai commencé à distribuer des brochures pour encourager tout le monde à vendre des bongs et des pipes, qui étaient tous illégaux. Maintenant, nous avons une industrie florissante à la grandeur du Canada. J’ai commencé à vendre des graines, qui étaient — et sont probablement toujours — illégales, et j’en ai vendu des millions à des Étatsuniens et à des Canadiens pour que nous puissions contourner le gouvernement. Je pensais que la seule façon de vraiment légaliser la marijuana était de faire en sorte qu’elle soit partout et que tout le monde en ait, ce qui rendrait le gouvernement impuissant — et c’est vraiment la raison pour laquelle nous sommes ici: nous avons gagné. Nous sommes arrivés à nos fins. La marijuana est partout. Les gens en font pousser; des magasins ouvrent leurs portes, et nous nous fichons bien que vous nous mettiez en prison ou que vous portiez des accusations contre nous. Nous allons faire ce que nous voulons parce que nous aimons le cannabis et que nous vivons dans cette culture.
    Je vais continuer à enfreindre ces lois parce qu’elles sont terribles. Ce projet de loi criminalise toutes les personnes qu’elle est censée légaliser et enrichit ensuite les monopoles gouvernementaux proposés. Il y a de riches propriétaires d’entreprises de production cotées en bourse qui n’ont aucun lien avec le cannabis, mais qui gagnent de l’argent sur le marché boursier. Ils travaillent, en quelque sorte, main dans la main avec le gouvernement libéral et vendent maintenant de la marijuana même si des personnes que je connais qui le font depuis 10, 20 ou 30 ans ne seront pas invitées à le faire.
    Je suis curieux de connaître votre opinion à ce sujet. Nous avons déjà entendu dire qu’en Ontario, et je pense que vous avez mentionné le Québec et potentiellement le Nouveau-Brunswick, on s’enligne vers un système de monopole gouvernemental qui exclura clairement les dispensaires. Je me demande ce que vous en pensez. Est-ce que…
    Ce sera insoutenable. J’encouragerai tout le monde à boycotter les magasins du gouvernement. Nous essaierons d’empêcher physiquement les gens d’y aller. Nous allons les informer qu’ils sont des traîtres s’ils vont dans ces magasins, car ils sont gérés par les gens qui nous ont opprimés pendant 50 ans.
    Allez-vous donner votre argent à l’ennemi qui nous a battus, a tué nos animaux quand il a fait des descentes chez nous, a rassemblé nos enfants, nous a enlevé notre chat, nos plants et notre moyen de subsistance? Vous plaisantez?
    Nous ne pouvons jamais laisser le gouvernement tirer profit de la marijuana après toutes les années où il nous a abusés, exploités et persécutés. C’est du sadisme pur. Cette loi sur le cannabis est du sadisme pur. Celle que vous proposez et celle que nous avons eue pendant 50 ans punissent simplement les Canadiens sans raison valable.
    Je vais passer à la production, car le groupe de travail a dit:
Les décisions relatives à la production, à la distribution et à la vente au détail ont des incidences évidentes sur les entreprises qui espèrent entrer dans l'industrie du cannabis, y compris comment assurer la diversité des participants. Il est évident qu'il existe un intérêt important et une forte spéculation quant à la possibilité de nouvelles recettes...

La gestion de la chaîne d'approvisionnement a... des répercussions importantes tant pour les consommateurs que pour les collectivités. Le prix, la qualité et l'accessibilité du produit peuvent tous être affectés, selon le chemin que le gouvernement choisit de suivre.
    Ils recommandent d’utiliser des « contrôles d’octroi de permis et de production pour encourager un marché diversifié et concurrentiel qui inclut également les petits producteurs ».
    Pensez-vous que le projet de loi C-45 honorera cette recommandation?
    Le projet de loi C-45 n’atteint pas le moindre objectif souhaitable. Le problème est que nous avons la réponse sous le nez. Si nous voulons que le prix chute au point que l’argent ne soit même pas un facteur dans le cas de la marijuana; si nous voulons que tous les Canadiens soient traités équitablement devant la loi; si nous voulons rétablir les libertés civiles; si nous voulons enlever à la police tous les pouvoirs que nous lui avons accordés pendant 30 ou 40 ans pour mettre sur écoute, surveiller, se faire passer pour des trafiquants de drogues, faire toutes ces choses qui coûtent des milliards de dollars, alors enlevons le cannabis de cette annexe. Enlevons-le simplement et disons à tout le monde qu’il faut respecter la loi, être pacifique, payer ses impôts, bien payer ses employés et respecter tous les règlements municipaux.
    En gros, traitez l’industrie de la culture du cannabis comme toute autre industrie normale. Après tout, elle n’a tué personne en 50 ans. Il n’y a pas d’autres industries du genre au pays. Elles produisent toutes de la pollution, des automobiles, des aliments, des drogues, du tabac ou de l’alcool qui tuent. En fait, tout tue les Canadiens sauf le cannabis, et vous voulez le traiter comme du plutonium. C’est cinglé.

  (1445)  

    J’aimerais ajouter que l’un des principaux problèmes que soulève le projet de loi C-45 est que le gouvernement fédéral contrôle la production.
    Vous avez tous entendu parler de B.C. Bud. On fait pousser du cannabis partout au Canada depuis très longtemps, et les provinces devraient avoir le pouvoir et la capacité de délivrer elles-mêmes des permis à leurs propres agents de production et elles méritent de pouvoir le faire. Si elles doivent attendre que le gouvernement fédéral fournisse du cannabis, les tablettes des magasins du gouvernement provincial seront vides.
    Nous avons vu le Nevada déclarer l’état d’urgence et demander à des producteurs de cannabis de se manifester parce qu’on avait épuisé les stocks en une semaine. C’est une situation qui se produit dans le monde entier. Il faut beaucoup de fournisseurs, et ce, partout. Il faut permettre aux municipalités de délivrer des permis à leurs propres producteurs artisanaux, comme elles le font dans le cas des brasseurs artisanaux. Il faut permettre aux provinces de le faire et permettre au gouvernement fédéral de veiller à ce que cela se produise.
    Si l’échelon fédéral contrôle la production, l’échelon provincial, la distribution, et l’échelon municipal, les comptoirs de vente et le maintien de l’ordre, il est clair qu'une catastrophe vous guette, mais…
    Il n’y a que le gouvernement pour penser à un plan pareil. Les intervenants du marché le regarderaient avec horreur. Il ne fonctionnera jamais.
    En outre, j’aimerais ajouter que si vous permettez aux provinces de contrôler l’établissement de monopoles de production du cannabis  — comme on pourrait les appeler — au lieu de permettre aux citoyens canadiens, aux innovateurs, aux entrepreneurs et aux propriétaires de petites entreprises de créer des emplois, de générer des recettes fiscales et de redonner à la collectivité, vous forcerez chaque contribuable à subventionner une bureaucratie gouvernementale de plusieurs centaines de millions de dollars qui, de l’aveu même du gouvernement, ne permettra pas de générer des profits. Elle fera en sorte qu’il perde de l’argent.
    Encore une fois, le gouvernement fédéral ne connaît même pas le produit. Pourquoi ne peut-il pas permettre aux gens qui ont cultivé, vendu et aimé cette plante de se manifester et de sortir de l’ombre? Pourquoi continuez-vous à nous criminaliser?
    La grande question est de savoir ce que vous avez eu contre nous pendant 50 ans.
    Merci beaucoup.
    La parole est maintenant à M. McKinnon.
    Je pense que nous allons passer aux questions municipales pendant un moment.
    Monsieur Karsten, vous avez parlé de la nécessité d’un processus de mise en oeuvre exhaustif et d’une coordination avec tous les ordres de gouvernement, etc. Ces démarches ont certainement été entreprises dès que le processus a été lancé. Je sais que le secrétaire parlementaire Blair a tenu des consultations à la grandeur du pays, tant auprès des partenaires provinciaux que municipaux, alors je pense que ce processus a été lancé.
    D’autres éléments comme la priorisation des points de décision, le financement fédéral et des choses du genre débordent vraiment le cadre des responsabilités du présent comité. Notre travail consiste à examiner le projet de loi C-45, qui s’attache vraiment à déterminer si la marijuana est légale ou non. Il ne s’intéresse pas aux questions de conduite avec facultés affaiblies. C’est plutôt le projet de loi C-46 qui traite la question. Il fera bientôt l’objet d’une étude. Le projet de loi C-46 prévoit des mécanismes et des outils supplémentaires pour repérer et traiter les situations de conduite avec facultés affaiblies.
    J’aimerais apporter une correction au compte rendu. Mme Gladu a affirmé qu’au Colorado, le nombre de cas de conduite avec facultés affaiblies avait augmenté. Nous avons une lettre du gouverneur du Colorado ainsi que du procureur général de cet État et du procureur général des États-Unis qui énonce que dans les six premiers mois de 2017, le nombre de cas de conduite avec facultés affaiblies a baissé de 21 %. Je prends note de l’allusion de Mme Emery au National Highway Safety Board, qui n’indique pas une hausse marquée des cas de conduite avec facultés affaiblies, du moins, alors j’estime que la question de la conduite avec facultés affaiblies n’est probablement pas la question à soulever dans le dossier de la légalisation.
    Pour être plus précis, à l’heure actuelle, en Colombie-Britannique, nous avons des situations dans lesquelles des producteurs illicites louent une propriété et la convertissent en installation de culture, ce qui ne convient ni à la propriété en question ni à son propriétaire, alors la question de la surveillance des cultures à la maison devient problématique, et je pense qu’avec cette nouvelle mesure législative, ce genre de situation ne se produira plus. Je vous dirais que c’est un cas où cette loi allégera le fardeau qui pèse sur les municipalités, alors j’aimerais vous demander à tous les trois si vous aimeriez en témoigner.
    Commençons par vous, monsieur le maire.

  (1450)  

    Merci beaucoup, monsieur McKinnon. J’aimerais vous remercier d’emblée pour la promotion. Je suis conseiller municipal à la ville d’Halifax, et Mike Savage, un ancien député, n’aimerait pas beaucoup que je laisse entendre que je suis le maire de la ville.
    Qui parle d’élections?
    Touché.
    Merci, monsieur, de vos observations. Sachez que la Fédération canadienne des municipalités a beaucoup de respect pour le travail que fait le gouvernement fédéral dans tous les dossiers, et je ne voudrais certainement pas être belliqueux dans mes réponses. Je prends bonne note des points que vous avez soulevés.
    Vous avez dit que, oui, nous avons tenu des discussions et organisé des réunions avec des gens comme M. Blair, etc. À nos yeux, toutefois, ces rencontres sont des consultations préliminaires plutôt que de véritables tables de négociation destinées à faire comprendre comment le dossier évolue semaine après semaine. Voilà le message que nous tenons à transmettre: nous devons être à la table et participer sans cesse aux discussions.
    J'ai trouvé très intéressant ce que vous avez dit au sujet de l'écart entre les deux projets de loi complémentaires, soit le projet de loi C-45 et le projet de loi C-46. Nous fournirons des renseignements supplémentaires sur la position de la FCM dans le cadre d'un autre mémoire qui sera présenté au Comité de la justice de la Chambre des communes et qui portera précisément sur le projet de loi C-46.
    En fait, allez-y, madame Holmes.
    Je suis d'accord avec M. Karsten. Je crois qu'il y a une grande différence entre le fait de participer aux discussions comme partenaire et celui de fournir de l'information comme intervenant. À mon avis, c'est ce que font les municipalités.
    Pour ce qui est de notre invitation à comparaître ici ou des réunions que nous avons eues avec M. Blair, nous recevons beaucoup de renseignements dans le cadre de nos rencontres avec divers parlementaires, mais nous n'avons pas l'occasion d'avoir une conversation sur nos idées quant à la façon dont le dossier peut aller de l'avant. Les lois et les règlements sont déjà établis. Nous faisons part de nos commentaires au moyen d'un sondage ou d'une lettre quelconque. Nous voulons vraiment un modèle différent. Nous demandons la possibilité de nous asseoir à la table et de vous présenter nos préoccupations. Cela ne concerne pas seulement le gouvernement fédéral, mais aussi la province. En Alberta, on a créé un secrétariat chargé de la légalisation du cannabis; il s'agit d'une administration composée de différents ministères, mais là encore, on nous demande seulement de venir présenter nos préoccupations. Il n'y a aucun dialogue. Selon moi, c'est de là que découle le problème.
    En ce qui a trait à la sécurité et au code du bâtiment, nous recommandons fermement à la province de l'Alberta d'apporter des changements importants. Ainsi, une fois que le tout est mis en oeuvre, nous pourrons modifier nos règlements municipaux afin d'appliquer ces changements. Cela fait tout simplement partie du travail.
    Là où je veux en venir, c'est que nous devons veiller à ce que cette mesure législative soit bien conçue, dans la mesure du possible, afin que nous ayons une procédure définie pour déterminer les modifications à apporter au code du bâtiment, élaborer des règlements provinciaux et peaufiner le modèle de vente au détail, ce qui relèvera également des provinces. Tant que nous n'aurons pas visé juste, dans les limites du possible, tout ce dossier sera en péril, n'est-ce pas?
    Oui.
    J'ai une bonne solution.
    Dans l'état actuel des choses, les agriculteurs canadiens cultivent du cannabis sur des milliers et des milliers d'acres en Saskatchewan, au Manitoba et en Alberta. Ils l'utilisent pour les semences, mais il s'agit du même plant. C'est de la marijuana. Ils peuvent donc produire de la marijuana pour ensuite la vendre dans nos commerces, ou dans n'importe quel commerce, pour 20 000 $ la tonne. Cela représente 2 ¢ par gramme. On pourrait vendre cela pour 1 ou 2 $ par gramme, mais cela procurerait des profits énormes aux agriculteurs des Prairies qui possèdent d'immenses étendues de terres, lesquelles peuvent servir à faire pousser de la marijuana.
    Ainsi, personne n'aurait à en cultiver à la maison. Après tout, la culture à domicile coûte cher. Il faut de l'électricité. Il s'agit d'une utilisation inutile de l'espace urbain. Au fond, si vous légalisez la marijuana comme il se doit et que vous permettez à quiconque ayant les moyens d'en cultiver dans une économie d'échelle, alors le prix chutera. Plus personne n'en cultivera à la maison. J'attends le jour où la légalisation de la marijuana ne reposera plus sur l'argent.
    Merci.
    J'aimerais entendre l'avis de Mme Holmes.

  (1455)  

    Je sais que les installations de culture à domicile constituent l'un des sujets de préoccupation.
    Pardon, je voudrais entendre Mme Holmes.
    Oh, je suis désolée.
    Ce qui me préoccupe dans ce dossier, c'est l'information. Oui, cette question doit être renvoyée au Comité, et vous devez prendre des décisions, après quoi ce sera au tour des provinces, puis des municipalités de prendre leurs décisions. À notre avis, le travail se fait en vase clos. Les représentants de la province ne sont pas ici. Ils ne discutent pas de ces modifications avec vous. Je parle en particulier de l'Alberta puisque c'est pour cela que je suis ici; les fonctionnaires provinciaux devront comparaître à un moment donné et interpréter votre travail pour déterminer quelles en seront les conséquences pour eux; ensuite, à l'échelle municipale, nous aurons à nous occuper de questions propres à l'Alberta.
    Ce que nous demandons, c'est de tenir des discussions ensemble pour essayer de tout mettre en place avant juillet. À voir la façon dont les choses progressent, nous ne pensons pas que cela se produira. Les discussions auront lieu ici, et la province se décidera à s'en occuper quand elle le pourra, puis au mois de juillet, il n'y aura rien de prêt au palier municipal.
    Nous les avons invités, alors...
    Votre temps est écoulé, monsieur McKinnon. Merci beaucoup.
    Voilà qui met fin à notre première série d'interventions de sept minutes. Nous allons maintenant entamer la deuxième série d'interventions de cinq minutes, en commençant par M. Carrie.
    Encore une fois, merci à tous nos témoins. Nous avons là un excellent groupe.
    Je songe au délai de 288 jours. Tout cela a commencé par une promesse électorale et, selon moi, cette initiative a été très mal pensée. Au bout du compte, je crois que tout le monde veut protéger la santé et la sécurité des Canadiens, surtout des jeunes. Nous avons entendu des représentants d'autres administrations, et j'observe vraiment un décalage ici. Aux États-Unis, dans le cas du Colorado et de l'Oregon, on semble avoir adopté une approche ascendante. Il y a eu des référendums, et le dossier est passé d'une étape à l'autre du processus. Au Canada, le gouvernement veut plutôt adopter une approche descendante.
    Madame Holmes, nous en avons beaucoup entendu parler. Les administrations qui ont adopté un tel régime nous disent très clairement: « Avant d'entreprendre cette démarche, assurez-vous de tout mettre en place: sensibilisation de la population, collecte de données, activités de recherche et de développement, mesures de prévention et de traitement, sécurité au travail, et tout le reste. » Le gouvernement ne semble pas se rendre compte de tout ce qu'il refile aux provinces, aux territoires, aux municipalités et aux peuples autochtones, sans leur donner l'occasion, comme vous l'avez dit, de participer aux discussions en tant que partenaires. Le gouvernement n'a même pas mis en place sa propre loi et, maintenant, il s'attend à ce que les intervenants sur le terrain, qui représentent le statu quo, s'adaptent et se conforment aux changements et que tout le monde fasse de même; voilà, nous serons tous heureux le 1er juillet et nous aurons tout réglé d'ici là.
    Je me demande s'il existe des programmes qui permettent aux municipalités de s'adresser au gouvernement. Dans la foulée des annonces faites par le gouvernement, qui est passé maître dans cet art, y a-t-il des mesures concrètes mises à votre disposition? Je ne peux même pas imaginer ce qu'il en coûtera aux municipalités. En ce qui concerne notamment la sensibilisation de la population et la collecte de données, y a-t-il des programmes dans le cadre desquels vous pouvez obtenir des fonds et de l'aide du gouvernement fédéral pour mettre en oeuvre ce qui s'impose en seulement 288 jours?
    Pour autant que je sache, non, il n'y en a pas. Ce qui nous préoccupe le plus, c'est l'application de la loi. Nous n'avons pas la possibilité d'obtenir du financement, mis à part ce qui a été annoncé la semaine dernière. On s'inquiète de la sensibilisation de la population — oui, tout à fait — et, comme je l'ai dit, il y a aussi la capacité du personnel et des décideurs de comprendre les répercussions éventuelles. On discute de façon générale de la nature intéressante de ce sujet. Ce n'est pas la priorité absolue des municipalités en Alberta, mais c'est la principale question dont je parle parce que, selon moi, les gens sont très mal renseignés là-dessus. Ils ne comprennent tout simplement pas ce qui les attend. Ils craignent que cette échéance approche à grands pas et qu'ils n'aient pas le temps de protéger leurs collectivités et leurs concitoyens.
    Même quand on songe à certaines des données scientifiques... Si je ne me trompe pas, Mme Emery a parlé des limites prescrites et de la question de savoir si elles seront jugées acceptables par les tribunaux. Vous dites que vous avez neuf agents de la GRC et, à ma connaissance, il y a aussi des agents appelés des ERD. J'ai oublié ce que signifie cet acronyme.
    Experts en reconnaissance...
    Bref, il y a des experts en reconnaissance qui ont comparu devant la Cour suprême. Il s'agit d'agents qualifiés qui s'occupent de la conduite avec facultés affaiblies, que ce soit par l'alcool, le cannabis, les médicaments d'ordonnance, la colle ou l'essence. C'est ce qui semble être le problème, mais aucun montant n'a été prévu — d'après ce qui a été annoncé — pour envoyer ces agents sur le terrain parce que nous ne savons même pas ce que signifient ces taux sanguins ou si des mesures vont être prises à cet égard.
    Que prévoyez-vous comme coûts en ce qui concerne vos agents et la formation qui doit être offerte sur le terrain? Entrevoyez-vous une date limite pour mettre en place ce qui s'impose avant le déploiement afin de protéger la santé et la sécurité des Canadiens?
    Ce qui m'embête, c'est que j'ignore si la technologie existe déjà. On ne m'a rien dit à ce sujet. Si elle existe, tant mieux. Alors, nous aurons à acheter la technologie et à la déployer dans chaque municipalité, parallèlement à la formation. Lors d'une réunion avec M. Blair, on nous a assuré que la formation provient des États-Unis, mais qu'elle sera adaptée aux besoins canadiens pour ensuite être présentée à la GRC. Ce que je préconise ici, toutefois, c'est que nous devons faire en sorte que cette formation soit offerte à tous les niveaux d'agents d'application de la loi au sein d'une municipalité; de plus, tout agent qui interagira avec un individu soupçonné d'avoir les facultés affaiblies devra avoir reçu la formation nécessaire pour agir avec respect, de sorte que les arrestations ne soient pas faites par des agents qui ne comprennent pas la teneur des changements.

  (1500)  

    Merci beaucoup de votre réponse.
    J'aimerais interroger M. Emery sur la façon dont on met en oeuvre... J'ai entendu des gens dire que le projet de loi ne fera qu'aggraver les choses. Bien des gens nous disent que si nous comptons nous engager dans cette voie, nous devrions ralentir la cadence pour nous assurer que la situation n'empirera pas davantage et qu'il s'agit de quelque chose de faisable pour les provinces, les territoires, les gens sur le terrain qui distribuent de la marijuana, le marché de la marijuana à des fins médicales et tout le reste. Pensez-vous que la décriminalisation soit une option? On pourrait commencer tout de suite en disant: « D'accord, écoutez, prenons une bonne respiration. Décriminalisons la marijuana, pour une certaine quantité, et faisons-en peut-être pour l'instant une infraction punissable par simple contravention ou peu importe ce qui est jugé acceptable. » Est-ce là une solution envisageable?
    Notre objectif est de faire en sorte que la consommation de cannabis n'entraîne aucune punition, au même titre que la consommation responsable d'alcool commercial ou artisanal à la maison. Je peux être propriétaire d'un vignoble. En raison de mon casier judiciaire, je ne peux pas, semble-t-il, obtenir une licence pour produire de la marijuana, mais je peux quand même lancer ma propre brasserie. Je peux toujours exploiter mon propre vignoble. Je peux faire beaucoup de choses avec l'alcool, le tabac et un certain nombre de substances nocives, mais je n'ai pas le droit, aux termes de cette loi, de participer à l'industrie de la marijuana.
    Vous avez parlé, entre autres, de la sensibilisation de la population. J'espère bien qu'une campagne de sensibilisation ne sera pas menée par le même gouvernement qui a menti à la population canadienne pendant 50 ans et qui nous a diabolisés afin que les gens aient peur de nous, alors qu'il n'y avait rien à craindre des consommateurs ou des producteurs de cannabis. Si la marijuana était légalisée, nous ne la ferions pas pousser dans des maisons ou des installations louées auprès d'autres gens. Elle serait cultivée sur les fermes canadiennes, et nous laisserions aux agriculteurs canadiens le soin de la cultiver en vue de nous la distribuer.
    Bientôt, le CBD se trouvera dans tout ce que vous achèterez. Il y en aura dans le yogourt et le lait, parce que c'est un produit cannabinoïde non psychotrope dont tout le monde peut tirer des bienfaits incommensurables. C'est un agent anti-anxiogène, et on sait que tout le monde souffre de stress et d'anxiété. Ce produit calmant apaise le corps, sans pour autant être psychotrope. C'est un aspect de la marijuana qui pourrait grandement améliorer votre vie si vous en consommiez tous les jours. Ce composant sera donc intégré à nos aliments. Un jour, tous les aliments consommés quotidiennement seront additionnés de CBD.
    Nous assisterons à une foule d'innovations, mais nous devons libéraliser le marché comme il se doit pour rendre tout cela possible. Laissons les agriculteurs cultiver la marijuana. Laissons-les extraire cet ingrédient. Ajoutons du CBD à nos aliments. Il n'y aura alors plus de culture à domicile. Très peu de gens fumeront du cannabis après 10 ou 20 ans, car des techniques encore plus astucieuses verront le jour afin de permettre aux gens d'en profiter.
    Le temps est écoulé.
    Nous allons maintenant entendre Son Honneur le maire Ayoub.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais poser la question en français.

[Français]

     En effet, je suis un ancien maire et je salue mes collègues. On n'oublie pas ses racines.
     Dans ma région, 45 % des jeunes de 15 à 24 ans consomment du cannabis. Je suis au Québec, dans la banlieue nord de Montréal. Au Québec, la moyenne est de 35 % pour cette même strate d'âge.
    Avoir du leadership veut dire avoir des objectifs, les atteindre et s'assurer de pouvoir traiter les situations urgentes. Je ne parle pas des bienfaits et des dangers de la marijuana. Il y en a une panoplie. C'est tout un éventail de sujets.
     Toutefois, plusieurs nous ont dit que, pour les jeunes de moins de 25 ans, le fait de consommer de la marijuana est dangereux. Or c'est exactement pour cela qu'une réglementation sur la légalisation s'en vient. Le but est de réduire le plus possible, de façon urgente, la consommation chez les jeunes qui sont en train de consommer de la marijuana dont on ne sait pas ce qu'elle contient. De plus, le crime organisé en fournit la plus grande partie.
     J'aimerais entendre ce que vous avez à dire, chers collègues maires et mairesses. Lorsque des citoyens et des parents viennent vous voir et vous disent que la moitié de leur famille risque de fumer ou de consommer de la marijuana et qu'ils n'ont aucun moyen pour contrôler cela, éprouvez-vous un sentiment d'urgence? J'aimerais connaître votre opinion.

  (1505)  

[Traduction]

    J'invite quiconque voudrait répondre à le faire.
    Madame Holmes.
    Je suis d'accord avec vous et je dois dire que je suis de cet avis sans même qu'on vienne m'en parler. Cela ne prend pas un parent. Je suis moi-même mère d'un garçon de 13 ans, alors je suis très consciente des préoccupations. C'est pourquoi je vous implore de bien faire les choses, car je sais qu'il y a des gens dans des circonstances particulières, et nous avons entendons les Emery expliquer comment certaines personnes éprouvent des difficultés en raison de la loi en vigueur et de la procédure actuelle. Cela dit, nous devons éviter de nous précipiter dans quelque chose qui créera plus de problèmes, qui empêchera les gens de se sentir à l'aise au sein de leur collectivité. Cela ne touche pas seulement les utilisateurs, mais aussi les citoyens qui louent peut-être une maison à quelqu'un ayant l'intention de faire pousser de la marijuana ou qui ne se sentent pas à l'aise d'être entourés de gens qui en consomment, et c'est bien le cas.
    Je conviens qu'il y a un niveau d'urgence, mais je crois également que nous avons le temps de tenir des discussions sur ce dont nous avons tous besoin dans ce processus.
    Merci.
    Monsieur Karsten, avez-vous une réponse ou des préoccupations à cet égard?
    Oui. Merci beaucoup.
    Je crois que Mme Holmes a bien exprimé mes sentiments. Dans mon cas, il s'agit plutôt de bien faire les choses pour mes trois petites-filles, car tous mes efforts à l'échelon municipal sont tournés vers l'avenir.
    La FCM est toujours d'avis, et nous l'avons dit dès le début, que la légalisation du cannabis est une décision qui relève du gouvernement fédéral et, comme vous le savez, c'est un engagement qui a été pris en 2015. Nous, les gens du secteur municipal, sommes déterminés à assurer la mise en oeuvre de ce projet, tant que nous pourrons y participer et à la condition que cela soit fait de manière sûre et efficace.

[Français]

    Plusieurs personnes l'ont mentionné, lorsque cela a été le cas au Colorado et dans l'État de Washington.
    Pensez-vous que, du jour au lendemain, la légalisation de la marijuana va faire en sorte que la majorité des conducteurs sur la route vont avoir de la marijuana dans le sang? La majorité des citoyens vont-ils commencer à faire pousser de la marijuana dans leur appartement? La majorité des gens vont-ils commencer à consommer de la marijuana tout d'un coup, parce qu'elle est légale?
     Je n'ai pas la science infuse, mais personnellement je suis convaincu que non. L'alcool, la cigarette et beaucoup d'autres produits sont légaux et ont des effets négatifs. Les gens sont sensibilisés aux dangers liés à leur consommation. Je ne crois donc pas que ce sera la fin du monde le jour où la marijuana deviendra légale ni que, tout à coup, tout va tomber.
     Il faut une infrastructure. C'est ce que nous sommes en train de faire et nous voulons consulter le plus possible de gens, justement. Votre gouvernement mène des consultations comme on ne l'a jamais fait au cours des 10 dernières années. On veut avancer de façon positive et assurer, particulièrement, la sécurité de nos enfants. C'est ce que je peux ajouter.
    Je n'ai pas d'autre question, monsieur le président.

[Traduction]

     J'aimerais dire un mot à ce sujet.
    En ce qui a trait à la consommation chez les adolescents, selon un article paru en 2017 dans le Journal of Adolescent Health, le cannabis à lui seul n'entraîne pas une augmentation des symptômes psychotiques chez les adolescents. Par contre, l'effet combiné du tabac ou de l'alcool avec du cannabis peut aggraver les symptômes. Cela touche un très faible pourcentage de gens, qui sont déjà prédisposés.
    En 2016, la British Association of Psychopharmacology a affirmé que les adolescents ne subissent pas de perte du QI, ni même les usagers invétérés de la marijuana. Alors que la consommation de la marijuana a augmenté au fil du temps, les taux de schizophrénie n'ont pas augmenté et les taux de QI n'ont pas diminué. Comme je l'ai dit, l'American Psychological Association a déclaré en 2015 que même les jeunes utilisateurs chroniques n'éprouvent pas de problèmes de santé accrus plus tard dans leur vie.
    J'aimerais également parler de la culture à domicile, puisque cela touche les municipalités. La marijuana a de la valeur, et c'est la raison pour laquelle les gens en font la culture chez eux. C'est une question de risques et de bénéfices. Plus on interdit ou réglemente à outrance quelque chose, plus les gens vont essayer de contourner cela; autrement dit, une telle approche ne fait qu'augmenter la valeur.
    Au sujet de la culture à domicile, en février de l'an dernier, le juge Michael Phelan de la Cour fédérale a analysé cette question et il a constaté que, malgré le témoignage de Len Garis et d'autres responsables de l'application de la loi, la culture du cannabis à domicile peut se faire en toute sécurité et, dans bien des cas, c'est ce qui se passe. Voilà pourquoi le juge a prononcé une injonction fédérale pour permettre aux patients de faire pousser du cannabis chez eux.
    En entrant dans cet édifice, j'ai remarqué qu'il y a un énorme mur vert, garni de plantes. C'est un système hydroponique. Il y a donc une installation de culture intérieure ici même, dans cet édifice, mais cela se fait en toute sécurité. La vaste majorité des consommateurs, des cultivateurs et même des vendeurs de cannabis ne veulent pas de bourgeons moisis. Ils ne veulent pas de mauvaises conditions dans leur maison. Vous trouverez les pires cas d'installations de culture, celles qui causent des dommages destructeurs, non pas auprès des patients ou des militants, mais auprès des profiteurs.
    La seule raison pour laquelle ces profiteurs participent à la culture et à la vente du cannabis, c'est parce que le gouvernement, par la réglementation excessive et la criminalisation, alourdit les peines, ce qui fait augmenter les bénéfices. Vous n'avez qu'à rendre le cannabis très peu coûteux et extrêmement accessible. Les membres du crime organisé ne vendent pas du sucre parce que ce produit est disponible partout. Donc, si le cannabis était tout aussi accessible, on éliminerait l'appât du gain qui attire les membres du crime organisé, et ceux-ci auraient alors à trouver un autre travail.

  (1510)  

    Monsieur Karsten.
    Merci beaucoup de me donner l'occasion de répondre.
    Monsieur Ayoub, je vous suis reconnaissant d'avoir posé cette question, et je partage votre opinion. C'est, en gros, ce que démontre le directeur parlementaire du budget. Je ne pense pas que les gens vont tous se mettre à fumer de la marijuana dans leur voiture. Je suis d'accord avec vous, monsieur.
    Comme le prévient le directeur parlementaire du budget, et quelqu'un y a fait allusion tout à l'heure, les recettes provenant de la vente du cannabis risquent d'être modestes au début. Cependant, comme je l'ai déjà mentionné, à l'échelle locale, les municipalités continueront de faire face à des coûts importants en matière d'administration et d'application.
    J'aimerais préciser, en 30 secondes ou moins, qu'au Colorado, les municipalités ont prélevé une taxe de vente directe sur le cannabis. Voilà le genre de discussions que nous devons tenir. Il est tout simplement inacceptable de procéder à la mise en oeuvre sans consulter les municipalités pour ensuite venir leur imposer la marche à suivre.
    Les municipalités du Colorado ont touché des recettes supplémentaires de 15 % à partir du fonds de la taxe sur la marijuana. Il y a d'autres exemples de ce genre, comme l'État de Washington. Là où je veux en venir, c'est que les municipalités assumeront des coûts relativement élevés dès le départ, peu importe la façon dont les ventes ou le commerce au détail évolueront. C'est là-dessus que nous voulons centrer le débat.
    Merci.
    Puis-je ajouter une observation?
    Oui.
    S'agissant de coûts, il faut comprendre que nous parlons de deux choses. D'abord, nous faisons allusion aux coûts de lancement: tout le travail qui doit être effectué pour nous préparer à l'entrée en vigueur de cette loi, les services de police, les règlements municipaux, etc. Ensuite, il y a les coûts administratifs permanents, qui seront maintenus à perpétuité, à mesure que la loi est mise en oeuvre.
    Nous ne devons donc pas perdre de vue ces deux types de coûts qui seront engagés par les municipalités.
    Merci beaucoup. Nous allons maintenant donner la parole à Mme Gladu.
    Merci, monsieur le président. Je vais partager mon temps de parole avec M. Carrie.
    Je vais revenir sur les observations faites par les représentants de la Fédération canadienne des municipalités en ce qui concerne le modèle de partage intelligent des recettes. Je conviens que si les municipalités doivent assumer une bonne partie des coûts liés à la mise en place de ce système, alors le projet de loi C-45 devrait contenir une disposition qui précise la façon dont les recettes seront partagées.
    Avez-vous une recommandation à faire? Préconisez-vous une répartition en trois parts égales entre le municipal, le provincial et le fédéral? Que recommanderiez-vous?
    Puis-je commencer?
    Oui, bien sûr.
    À ce stade-ci, nous n'avons pas eu suffisamment de discussions sur les modèles de taxation possibles pour pouvoir en privilégier un en particulier. Je crois que vous savez où je veux en venir: même si nous n'avons pas en tête un modèle précis, nous demandons qu'un soutien soit offert aux municipalités pour les coûts permanents de la légalisation grâce à un modèle quelconque de partage des recettes. Quelle forme prendront la taxation et le partage des recettes? Voilà l'une des nombreuses questions qui méritent, bien franchement, des discussions plus poussées. C'est pourquoi la FCM continue d'exhorter le gouvernement fédéral, dans le cadre des consultations que nous tenons, à mobiliser tous les ordres de gouvernement. Vous avez certainement entendu ce message de la part de Mme Holmes et de notre fédération: la mise en oeuvre ne peut procéder à l'échelle locale en l'absence d'autres directives de la part non seulement des partenaires fédéraux, provinciaux et territoriaux, mais aussi des municipalités.

  (1515)  

    Oui, je n'ai pas l'impression que le tout va se concrétiser en 288 jours.
    Je voudrais revenir sur une autre observation que vous avez faite, à savoir la possibilité que certaines municipalités veuillent interdire la vente du cannabis. J'aimerais simplement vous aviser que nous avons reçu des témoins du ministère de la Justice, et ils nous ont dit que si la marijuana est légalisée au palier fédéral, il sera impossible pour n'importe quelle municipalité de l'interdire sur son territoire parce que cela porterait atteinte aux droits de tous, d'autant plus que cela ne résisterait pas à une contestation judiciaire. Je tenais simplement à vous le signaler.
    Sur ce, je vais céder la parole à M. Carrie.
    Merci beaucoup.
    J'ai quelques questions concernant la frontière et le commerce. Nous sommes en pleine négociation avec notre principal partenaire commercial, les États-Unis, au sujet de l'ALENA, mais d'après ce que j'ai entendu, certains craignent que nous soyons déphasés par rapport aux Américains. Selon vous, devrions-nous nous donner comme priorité de leur expliquer ce que nous faisons à cet égard? Dans les circonstances actuelles, si les contrôleurs américains décident de vous interroger, ils peuvent vous interdire d'entrer aux États-Unis et, dans ce dossier commercial, il est surtout question d'emplois et d'économie. Je me demande si cela touche les municipalités.
    Par ailleurs, monsieur Emery, je crois que vous savez pertinemment que certains Canadiens très en vue qui ont admis fumer de la marijuana n'ont aucune difficulté à faire des allers-retours aux États-Unis. Qu'en pensez-vous?
    C'est inhabituel. Si un agent frontalier fait une recherche sur Google et découvre que vous avez un lien quelconque avec la marijuana, il vous interdira probablement d'entrer aux États-Unis, du moins pour cette fois-là, pendant une période d'au plus 30 jours et, parfois, de façon permanente. De nombreux Canadiens font actuellement l’objet d’une interdiction permanente. C'est ce qui s'est passé à l'ancien maire de Grand Forks, Brian Taylor. Il avait l'habitude d'aller aux États-Unis pour acheter du lait et des oeufs, et je ne vois pas en quoi c'est raisonnable, mais les États-Unis étant si près de Grand Forks, il avait coutume de s'y rendre. Aujourd'hui, il n'a plus le droit d'y aller parce qu'il a fait du militantisme en sa qualité de maire.
    Les États limitrophes que sont Washington, le Vermont, le Maine, New York, le Wisconsin et le Minnesota ont tous adopté des régimes de légalisation de la marijuana à des fins médicales ou récréatives. C'est ainsi tout le long de la frontière, à l'exception de l'Idaho et du Montana, ainsi que de la Pennsylvanie, laquelle ne jouxte pas tant la frontière, mais elle se trouve de l'autre côté du lac; voilà donc les trois seuls États limitrophes où l'on ne trouve aucun régime en la matière; donc, l'argument selon lequel nous aurons un problème commercial est affaibli. Par contre, nous ferons face à un problème frontalier.
    Il y a une chose à laquelle les autorités n'ont pas songé relativement au monopole de l'Ontario: tous les employés qui travaillent pour la commission provinciale de contrôle du cannabis n'auront plus le droit d'entrer aux États-Unis. Donc, comme condition d'emploi, s'ils sont prêts à admettre qu'ils n'iront plus jamais aux États-Unis, alors c'est très bien. Je suis sûr que la commission trouvera des employés. Nous, les distributeurs sur le marché libre, reconnaissons déjà que nous ne pourrons pas nous rendre aux États-Unis si nous sommes associés publiquement au cannabis. Je suppose que chaque fonctionnaire qui souhaite travailler pour un commerce de vente de marijuana aura peut-être intérêt à se demander s'il a de la famille aux États-Unis ou s'il lui arrive d'y aller, car il n'en aura plus le droit.
    Madame Holmes, croyez-vous que cette question devrait être considérée comme une priorité et peut-être faire l'objet de discussions entre le premier ministre canadien et le président américain afin de déterminer quelles en seront les répercussions sur notre frontière? Des Canadiens me disent qu'ils sont inquiets. Beaucoup de gens qui vont passer l'hiver dans le Sud possèdent une propriété aux États-Unis et ils craignent de se faire arrêter dans la foulée de la légalisation, si jamais les agents américains décident de prélever un échantillon de salive ou de faire un test au hasard. Si quelqu'un mange un biscuit ou quelque chose de semblable lors d'une fête, même par inadvertance, cela pourrait être un gros problème. Y a-t-il des préoccupations à l'échelle municipale?
    Je ne connais pas grand-chose dans ce domaine, mis à part ce que j'ai appris en regardant l'émission Border Security. Je crois que M. Karsten serait mieux placé pour répondre.
    Y a-t-il d'autres observations?
    Le temps est écoulé.
    Nous devons passer à...
    Peut-on lui permettre de conclure?
    Le président: Oh, je suis désolé.
    Monsieur Karsten.
    Merci, monsieur le président.
    J'allais simplement dire que la mairesse a peut-être un peu trop de temps libre pour en être rendue à regarder cette émission.
    Nous n'avons pas vraiment de position à ce sujet, nous non plus, monsieur Carrie. Je vous remercie tout de même de la question. Puisque nous parlons des relations entre les États-Unis et le Canada, je me dois de dire ceci: d'après les recherches effectuées par nos spécialistes des politiques, chaque État ayant adopté un modèle prévoit une dérogation distincte ou un fonds désigné pour les municipalités. Voilà, il fallait que je le dise.
     C'est noté.
    Nous passons maintenant à Mme Sidhu, qui dispose de cinq minutes.
    Monsieur le président, je vais partager mon temps de parole avec John.
    Le projet de loi permet le partage des recettes avec les provinces et les territoires; toutefois, cela représentera un enjeu sur le plan financier. Ma question s'adresse à la FCM.
    Comment le tabagisme et la consommation d'alcool sont-ils actuellement pris en considération dans les calculs pour les immeubles à appartements? Quelle sera la démarche à suivre pour ajouter la fumée de cannabis aux restrictions concernant le tabac?

  (1520)  

    Je suis heureux d'intervenir. Ma réponse n'est pas nécessairement fondée sur les travaux stratégiques réalisés par la FCM, mais je peux parler du point de vue de ma municipalité. En ma qualité de conseiller municipal, et j'en suis maintenant à mon quatrième mandat, je sais que le personnel aurait à effectuer une analyse complète de la réglementation municipale, ce qui pourrait nécessiter la tenue d'audiences publiques et tout le reste. Je le répète, il s'agit de savoir ce qui est permis dans le cadre réglementaire, et c'est ce qui nous permettra d'aller de l'avant dans ce dossier.
    Dans votre document Légalisation du cannabis: comment les municipalités peuvent-elles s'y préparer?, vous proposez entre autres la tenue d'une consultation à l'échelle municipale. Savez-vous combien de municipalités ont suivi ce conseil?
    Je n'ai pas le chiffre en main aujourd'hui. Nous pouvons certainement essayer de faire parvenir l'information au président et aux membres du Comité la semaine prochaine. Nous savons — c'est dans l'abstrait, j'en suis conscient — qu'il y a eu beaucoup de membres, de collectivités et de municipalités.
    Merci.
    Je cède la parole à John.
    Je vous remercie énormément de partager votre temps avec moi.
    Je vous remercie de vos commentaires et de vos témoignages aujourd'hui. Comme il ne reste que quelques minutes à notre semaine de réunions sur le projet de loi, je tiens simplement à remercier le greffier et son équipe. J'ai réalisé quelques recherches pour voir le nombre de témoins qui ont participé aux délibérations sur divers projets de loi par le passé. Il y en a eu 74 pour la Loi sur l'intégrité des élections; il y en a eu 75 pour le projet de loi C-51, Loi antiterroriste; il y en a eu 20 pour le projet de loi C-2 , Loi modifiant la Loi réglementant certaines drogues et autres substances. Pour les autres, le nombre de témoins est plus faible. Je crois que nous avons peut-être atteint un plateau avec plus de 100 témoins dans le cadre de notre étude sur cette question, ce qui démontre l'importance qu'accordent les Canadiens à ce sujet et le changement social qui en découle.
    Voici mon commentaire pour les Emery et les autres qui incarnent cette très forte culture en vue d'essayer d'instaurer un vent de changement; l'objectif du projet de loi est d'éviter que les jeunes aient accès au cannabis, de protéger la santé et la sécurité du public en établissant des exigences plus sévères relativement à la sécurité et à la qualité des produits et de dissuader quiconque de commettre des activités criminelles en imposant de lourdes sanctions pénales.
    Si vous lisez bien le projet de loi, son objectif n'est pas d'optimiser l'expérience et les choix offerts aux gens qui consomment de la marijuana à des fins récréatives. Son optique est très différente. Je crois que c'est la différence sociale ou peut-être philosophique. Je comprends et j'entends votre frustration. Je comprends votre bagage, mais le projet de loi vise des enjeux sociaux différents de ceux dont vous avez parlé.
    Eh bien, c'est donc inadéquat, pour dire les choses simplement. Toutefois, voici le problème. L'autre aspect important est qu'il n'y a aucune excuse. Le gouvernement doit reconnaître qu'il a fait fausse route depuis 50 ans avec cette politique et que la diabolisation, la persécution, l'arrestation et la condamnation de 2,4 millions de Canadiens étaient mal avisées. C'était contre-productif et n'a rien apporté de bon pour quiconque, à l'exception des forces de l'ordre, qui tirent avantage de tous ces éléments.
    Il y a un aspect que j'aimerais souligner. Nous sommes seulement des jeunes de 15 à 17 ans, soit durant trois ans, puis nous sommes des adultes en moyenne durant 70 ans. De 18 à 85 ans, soit l'espérance de vie moyenne actuellement au pays, vous êtes un adulte. Vous ne devriez donc pas écrire des lois en fonction des trois années avant de devenir un adulte durant 70 ans. Vous devriez écrire les lois en fonction des adultes; les adultes autonomes qui peuvent se faire avorter et ingurgiter autant d'alcool qu'ils le peuvent. Je peux acheter tout l'alcool que je veux et remplir ma maison d'alcool du plancher au plafond. Je peux faire énormément de choses très dangereuses, et le gouvernement et notre société démocratique libre me permettent de les faire. C'est merveilleux, parce que la majorité des gens sont capables de gérer une telle responsabilité lorsqu'elle leur est confiée.
    Cependant, dans ce projet de loi, c'est le contraire. Nous avons l'impression d'être des enfants. Le gouvernement se montre sans cesse condescendant à notre endroit et nous raconte des choses absurdes et ridicules. Par exemple, votre plant ne peut pas dépasser une telle hauteur. Qui peut avoir un tel contrôle sur la nature? Ce sont des plantes. Vous comprenez qu'elles poussent, n'est-ce pas? Il y en aura notamment de toutes les tailles.
    Merci. J'entends votre réaction. Je tenais seulement à m'assurer que nous comprenions clairement l'objectif.
    Vous avez dit que vous alliez légaliser la marijuana. Vous n’aviez pas dit que ce serait une demi-mesure pour arriver à un certain objectif. Le premier ministre a promis de légaliser la marijuana lors des dernières élections.
    J'aimerais poser une question aux représentants des municipalités.
    J'ai entendu certaines préoccupations. Bon nombre des enjeux que vous avez soulevés relèvent de la loi provinciale à venir. Sur la scène fédérale, nous avons vraiment des outils grossiers et assez limités. Aimeriez-vous nous faire part d'un dernier commentaire tandis que nous arrivons à la conclusion de notre semaine pour vous aider à vous préparer dès maintenant d'après ce que vous pouvez voir du projet de loi fédéral? Vous avez des ébauches du projet de loi fédéral devant vous. En ce qui concerne les effets sur les municipalités, vous avez une assez bonne idée de ce qui s'en vient sur la scène fédérale.
    Je crois comprendre que vous avez encore beaucoup de détails à décortiquer et à comprendre sur la scène provinciale. Toutefois, y a-t-il une dernière orientation du gouvernement fédéral au sujet de laquelle vous aimeriez avoir une précision ou des domaines qui vous préoccupent, outre l'échéancier?

  (1525)  

    Votre question s'adresse-t-elle à Lisa?
    Oui. Ma question s'adresse à Lisa et à vous.
    Lisa, voulez-vous répondre en premier? Je ne vous vois pas.
    Avec plaisir. Merci, Bill.
    En ce qui concerne votre question, j'imagine que j'aimerais que le projet de loi comprenne une source de revenus pour les municipalités pour nous donner les moyens d'assumer les frais que nous devrons engager à cet égard; la Fédération canadienne des municipalités a fait valoir à maintes reprises cet aspect important. J'aimerais également avoir des garanties que nous serons en mesure de donner la formation et que l'ensemble des services de police municipaux seront couverts.
    Je vous demande également d'exhorter la province à s'asseoir avec nous pour discuter de ce à quoi cela devrait ressembler dans un an et dans cinq ans. Nous pourrons ainsi nous demander ce qu'est l'objectif de la mesure et la façon dont nous pouvons collaborer pour l'atteindre.
    Merci.
    Merci beaucoup de votre question. En réponse au commentaire de Lisa, j'aimerais seulement ajouter que c'est une bonne idée d'en discuter de manière continue au cours des cinq prochaines années, mais nous devons également commencer à en parler immédiatement.
    Je ne veux pas répéter une grande partie de ce que j'ai déjà dit, mais nous avons certainement répété depuis le début que nous voulons participer au processus. Nous pouvons faire le travail si nous recevons les outils, l'information et les ressources pour prendre des mesures maintenant.
    Avec un peu de chance, vous aurez bientôt l'occasion de prendre l'avion et de retourner dans vos municipalités respectives, mais je tiens à vous transmettre un point très valide et très convaincant, du moins je l'espère; nous pouvons tirer bon nombre d'exemples et de données de l'expérience de nos voisins du Sud.
    Denver est une municipalité d'un peu moins de 700 000 habitants. Les frais de démarrage en matière de santé publique, de sensibilisation et d'application de la loi s'élevaient à 7 millions de dollars. Les prévisions pour 2016 pour cette seule municipalité étaient de 9 millions de dollars. Voilà pourquoi nous vous demandons d'établir immédiatement un dialogue continu avec notre organisation nationale, de bien vouloir tenir compte des frais de démarrage et de penser au modèle pour fournir le soutien financier continu dont les municipalités ont besoin.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Passons à M. Davies, et ce sera la dernière série de questions de la semaine.
    Madame Emery, j'aimerais vous poser ma prochaine question, étant donné que vous tenez un dispensaire.
    Le premier ministre Trudeau a également dit ceci: « Si nous voulons bien faire les choses avec cette importante initiative, nous devons nous assurer de mener de vastes consultations auprès des divers partenaires, de l'industrie de la marijuana médicinale, du milieu municipal et des provinces et évidemment de tirer profit des pratiques exemplaires dans le monde. [...] Nous le ferons comme il faut et d'une manière qui convient de façon générale aux Canadiens... »
    J'aimerais vous poser une question sur les produits comestibles, les concentrés et les autres produits qui demeureront illégaux en vertu du projet de loi C-45 . Nous avons entendu des témoins au Comité nous expliquer que le Colorado, l'État de Washington et l'Alaska ont tous légalisé les produits comestibles. Le Colorado semble avoir adopté un régime réglementaire très avancé et très réfléchi quant à ces produits.
    Voici ce que le groupe de travail a dit concernant les produits comestibles:
En soupesant les arguments pour et contre des limitations sur les produits comestibles, la majorité des membres du Groupe de travail a conclu que l'autorisation de ces produits offre une occasion de mieux régler les autres risques pour la santé. Les produits comestibles à base de cannabis offrent la possibilité d'éloigner les consommateurs du cannabis à fumer et des dangers pulmonaires connexes. Ceci est un avantage, non seulement pour les utilisateurs, mais également pour leur entourage...
    Il a aussi mentionné que:
[...] l'accès à une vaste gamme de produits au cannabis est possible par l'entremise du marché illicite, y compris des dispensaires et des détaillants en ligne.
    Il a recommandé au gouvernement de:
réglementer la production de cannabis et de ses dérivés (par exemple, comestibles, concentrés) au niveau fédéral en s'appuyant sur les bonnes pratiques de production du cannabis actuel pour le système à des fins médicales
    Considérez-vous l'absence des produits comestibles et des concentrés dans le projet de loi comme une bonne ou une mauvaise chose?
    Je suis d'avis que les Canadiens devraient être libres de consommer du cannabis sous la forme qu'ils souhaitent. Je sais que la Cour suprême du Canada a donné raison à des fabricants de produits comestibles qui faisaient littéralement des biscuits pour les vendre dans un dispensaire; c'était R. c. Smith. Le tribunal a déterminé que les patients qui font usage de cannabis doivent avoir accès à des huiles, des teintures, des extraits, du haschisch, etc.
    Les produits comestibles sont extrêmement précieux. Lorsque les policiers ont serré la vis l'an dernier à Toronto, nous savons que les autorités ont vraiment ciblé les produits comestibles, et les personnes âgées sont les plus touchées; ce sont les personnes âgées et les grands-parents qui viennent. Ces gens en ont plus qu'assez des pilules qu'ils doivent prendre et ils en ont plus qu'assez de ne pas pouvoir dormir. Tout ce qu'ils savent, c'est qu'ils se sentent mieux lorsqu'ils mangent des morceaux de biscuit le soir après le repas. Aucune loi ne devrait empêcher une personne d'avoir accès à un tel produit.
    Si vous voulez avoir une idée de la forme que prennent l'image de marque ou la publicité dans le domaine des produits comestibles, je vous invite à assister à un événement ayant trait au cannabis. Vous pouvez me suivre sur les médias sociaux ou chercher en ligne. Vous constaterez que de tels événements sont organisés partout. La Karma Cup vient tout juste de se tenir. Comme vous pouvez le voir, il y a des dizaines et des dizaines de marques bien établies. Les entreprises ont des logos et des produits. Elles y consacrent beaucoup de temps et d'énergie, parce que les fabricants de produits comestibles au pays ne sont pas des revendeurs louches sur le coin de la rue qui essaient de convaincre les enfants de fumer du pot. Ce sont des citoyens canadiens consciencieux qui essaient de fournir un service dont les gens ont grandement besoin.
    Les produits comestibles doivent être légaux. Je ne crois pas personnellement que le fédéral devrait gérer tous ces menus détails. Je crois que le gouvernement devrait retirer le cannabis de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances et laisser tout le monde se faire une idée. N'empêche que les produits comestibles doivent être légaux. Les autorités doivent les autoriser.

  (1530)  

    Merci.
    Monsieur Emery, le groupe de travail a également dit ce qui suit sur la vente par correspondance en ligne:
Il y a également lieu de s'assurer que les ventes au détail en ligne disposent des droits des consommateurs appropriés. Pour prendre en charge ceux qui n'ont peut-être pas accès aux points de vente au détail (par exemple, les petites collectivités, les communautés rurales et éloignées, les personnes à mobilité réduite), un système de vente par correspondance s'adressant directement aux consommateurs de cannabis non médical devrait être envisagé.
    Vous êtes probablement au courant que le projet de loi C-45 ne prévoit pas une plateforme nationale permanente pour le commerce en ligne. À votre avis, est-ce positif ou négatif?
    Cela dépend grandement de votre interprétation du libre marché et du marché noir. Je crois que c'est bon pour nos affaires si le gouvernement souhaite négliger cet aspect.
    Ce que nous cherchons vraiment à obtenir grâce à la légalisation, c'est une réduction des prix au fil du temps, parce qu'un produit légal devrait être bon marché. Le prix de la marijuana est artificiellement gonflé à l'heure actuelle, et le prix de tous les produits dérivés est beaucoup trop élevé. Les gens paient beaucoup trop cher leur marijuana, ce qui crée énormément de problèmes. Cette situation a attiré les gangs et les criminels. Elle attire maintenant le gouvernement. Tout ce que j'ai entendu des représentants des municipalités, c'est qu'ils cherchent un moyen de saigner encore plus les contribuables et qu'ils ont besoin de plus d'argent. Pour une certaine raison, la légalisation coûtera plus cher aux diverses autorités. Les villes investiront des millions, et les forces de l'ordre investiront aussi des millions. Nous serions en droit de penser que nous intensifions la criminalisation, ce que nous ferons peut-être justement, et c'est la raison pour laquelle tous ces investissements sont nécessaires.
    Rien de ce que j'ai entendu des municipalités, des gouvernements provinciaux ou de toute personne ici ne me laisse croire que c'est une légalisation. Vous donnez l'impression de vouloir tout contrôler et saigner le plus possible la population vulnérable que sont les fumeurs de pot.
    À mon avis, voilà la véritable raison derrière ce projet de loi. Ce n'est pas la légalisation du pot. Si c'était la légalisation du pot, voici ce que M. Trudeau dirait au Président de la Chambre: « Mon parti est majoritaire, et nous venons tout juste de retirer le cannabis de l'annexe. La ministre de la Santé s'en occupera, et les provinces sont maintenant libres de réglementer le cannabis. » La grande campagne autour de la légalisation se limiterait à cela. Nous nous retrouvons plutôt avec un projet de loi sur le cannabis de 300 pages qui prévoit de criminaliser de nouveau tout le monde et qui met en place un lourd appareil bureaucratique dans les divers ordres de gouvernement, ce dont nous n'avons pas besoin. Cela gaspille beaucoup plus d'argent et donne aux forces de l'ordre des pouvoirs accrus. Cela ressemble à la prohibition.
    Merci.
    Votre temps est écoulé.
    Monsieur le président, j'aimerais maintenant proposer ma motion, si vous me le permettez.
    Comme j'ai donné avis hier, je propose:
Que, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, les membres du Comité tiennent deux journées supplémentaires de réunions pour étudier le projet de loi C-45, Loi concernant le cannabis et modifiant la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, le Code criminel et d'autres lois; que le président soit habilité à coordonner le choix des témoins, au nombre minimum de 32 (huit par groupe d’intervenants), l’affectation des ressources et l’établissement du calendrier de travail afin de mener à bien cette tâche conformément aux lignes directrices que voici:
...
    Un instant. Laissons les témoins partir. Ils sont ici depuis longtemps. Nous poursuivrons ensuite avec votre point. Cela vous convient-il?
    J'ai tout mon temps; je suis au chômage.
    Monsieur le président, vous avez dit que j'étais le dernier intervenant. Que les témoins soient présents ou non ne semble pas avoir d'importance.
    Je crois que nous devrions remercier les témoins de leur contribution. Chacun d'entre eux a contribué à sa manière à nos travaux, et nous en sommes reconnaissants. Nous avons entendu des témoignages très importants aujourd'hui. Donc, au nom de tous les membres du Comité, je tiens à tous vous remercier de votre contribution et de vos renseignements.
    Sur ce, allez-y, monsieur Davies.
    Je poursuis la lecture de ma motion:
1. Les témoins doivent représenter les groupes d’intervenants suivants au cours de quatre tranches de deux heures par jour:

i. Des producteurs et des dispensaires canadiens licenciés existants

ii. Des producteurs de produits du cannabis comestibles et d’autres formes de cannabis non inhalable

iii. Des Canadiens ordinaires qui ont remis au Comité un mémoire concernant le projet de loi C-45

iv. De jeunes Canadiens (de 15 à 24 ans)

2. Que le nombre de témoins pour chaque tranche soit réparti comme suit: deux libéraux, un conservateur, un néo-démocrate.

3. Que les témoins soient invités à préparer un exposé oral de dix minutes et à soumettre une déclaration écrite avant leur comparution.

4. Que l’on tienne les réunions avant le samedi 30 septembre 2017.
    Monsieur le président, j'aimerais prendre la parole au sujet de ma motion pour en expliquer le bien-fondé.
    Le projet de loi C-45 est une mesure législative avant-gardiste à bien des égards. Il modifie une politique juridique, sociale, économique et culturelle en vigueur au pays depuis un siècle. Il compte 131 pages et 226 articles ainsi que des annexes. Ils traitent de nombreux enjeux complexes ayant trait à la décriminalisation du cannabis: la culture, la possession, l'âge de l'accès, les effets sur la santé, l'application de la loi, la production, l'emballage, l'étiquetage, les conséquences internationales, les produits comestibles et les concentrés, la sensibilisation, la recherche, etc.
    En juin, les libéraux ont proposé de tenir cinq jours de réunion la semaine avant la reprise des travaux au Parlement. Ils ont sondé l'opinion des Canadiens au cours de l'été, soit la période où les Canadiens s'intéressent probablement le moins aux politiques publiques. Les libéraux ont prévu ces réunions avant que les Canadiens ne puissent être pleinement consultés. À bien des égards, les réunions sont terminées avant que la majorité des Canadiens puissent vraiment y participer.
    La tenue des réunions la semaine avant la reprise des travaux de la Chambre des communes permet d'éviter un examen minutieux par la Chambre et restreint la capacité des députés de souligner des éléments à la Chambre et de poser des questions aux ministres et au gouvernement, comme tout gouvernement responsable devrait nous le permettre. Cela limite la capacité du Comité d'adéquatement donner suite aux questions que les témoignages soulèvent. Nous avons entendu cette semaine beaucoup de témoins qui ont soulevé de nombreux problèmes, et je crois que des députés des deux côtés aimeraient pouvoir approfondir ces questions.
    À l'époque, en juin, les députés néo-démocrates et conservateurs de l'opposition se sont opposés à la tenue de ces cinq jours de réunion. Nous avions dit en avoir besoin de plus. J'aimerais prendre un instant pour souligner que les délibérations du Comité sont la seule étape du processus législatif où le Parlement entend les commentaires du public, des intervenants et des spécialistes. C'est la seule occasion que les gens ont de se faire entendre, et je crois que c'est très important d'entendre ces opinions dans le cadre de notre travail et de l'étude du projet de loi.
    En juin, lorsque l'opposition s'est opposée à limiter à cinq le nombre de jours de réunion, les libéraux étaient d'accord et ont dit être ouverts à en tenir d'autres, au besoin. Aujourd'hui, après cinq jours de réunion, nous constatons que le projet de loi comporte des lacunes évidentes, que de nombreuses questions ont été soulevées et surtout que les voix dissidentes brillent par leur absence.
    Premièrement, nous n'avons pas encore entendu les commentaires des jeunes. Nous n'avons eu aucun témoin âgé de 15 à 24 ans. Or, nous avons entendu des gens de tout acabit nous rappeler l'importance de bien faire les choses quant au projet de loi sur le cannabis pour les jeunes Canadiens, de connaître précisément les effets sur la santé et le développement du cerveau et d'échanger avec les jeunes de manière à ce qu'ils y soient réceptifs et qu'ils comprennent. Nous sommes chargés de la protection de la santé des jeunes; or, nous ne nous donnons même pas la peine d'en inviter au Comité pour entendre ce qu'ils pensent de la question.
    Deuxièmement, nous n'avons pas entendu l'opinion des Canadiens ordinaires. De nombreux Canadiens ordinaires ont fait parvenir des mémoires au Comité et ont exprimé leur désir de témoigner, mais nous n'en avons invité aucun.
    Troisièmement, nous n'avons pas entendu les témoignages de producteurs autorisés, soit les personnes mêmes qui cultivent légalement du cannabis au pays depuis une décennie.
    Quatrièmement, nous avons entendu de nombreux témoignages  — mon avis, voire quelques exagérations, peut-être même des mythes — sur les effets des produits comestibles, mais nous n'avons pas entendu un seul producteur ou un seul membre de l'industrie des produits comestibles et des concentrés.

  (1535)  

    En toute honnêteté, je crois que ce sont des erreurs flagrantes. Or, pour une certaine raison, je crois que les libéraux ne veulent entendre les commentaires d'aucun de ces groupes.
    Monsieur le président, les néo-démocrates appuient la légalisation. Nous sommes d'accord de façon générale avec le projet de loi. Honnêtement, nous sommes d'avis que le projet de loi peut être mis en oeuvre d'ici juillet prochain, et nous sommes prêts à collaborer avec le gouvernement pour y arriver. Nous voulons collaborer avec le gouvernement pour corriger les lacunes du projet de loi que nous avons déjà mentionnées. Les produits comestibles et les concentrés ne sont pas inclus; il n'y a pas de plateforme nationale pour le commerce en ligne; la mesure législative ne traite pas des pardons; nous avons des questions ayant trait aux frontières et des préoccupations internationales; le projet de loi continue de criminaliser de nombreux Canadiens, notamment en maintenant une peine d'emprisonnement maximale de 14 ans pour les Canadiens. Il y a divers aspects du projet de loi qui, selon moi, méritent un examen plus approfondi.
    Les néo-démocrates n'ont pas l'intention de nuire ou de retarder de quelque façon que ce soit l'objectif déclaré du gouvernement d'adopter le projet de loi d'ici le 1er juillet. Voilà pourquoi je mentionne dans le libellé de ma motion que nous pourrions tenir ces deux jours de réunion avant le 30 septembre. Nous savons que les ministres sont prévus à l'horaire mardi la semaine prochaine. Nous savons qu'après ce processus nous aurons besoin d'au moins une semaine, voire deux, pour rédiger les nombreux amendements avant d'entamer l'examen article par article du projet de loi. Au cours de cet examen, nous passerons en revue, une ligne à la fois, l'ensemble du projet de loi et nous discuterons, débattrons et proposerons des amendements. Le processus se poursuivra de toute manière jusqu'en octobre. Je crois qu'il est tout à fait raisonnable de prévoir à l'horaire deux jours de réunion de plus pour prendre connaissance des commentaires de ces groupes qui sont très importants à entendre avant le 30 septembre. Cela nous permettra de nous assurer le plus possible d'entendre au Comité un éventail complet de témoignages et de renseignements, tout en permettant au gouvernement de respecter son objectif déclaré.
    J'aimerais conclure en mentionnant que je crois comprendre que les libéraux s'opposeront à la motion. Ils devront expliquer aux Canadiens pourquoi la voix des jeunes n'est pas importante pour nous éclairer au sujet du projet de loi et pourquoi la voix des Canadiens ordinaires n'est pas importante. J'aimerais prendre un instant pour dire à ce sujet que le projet de loi n'est pas pour les producteurs; ce n'est pas pour les dispensaires. Ce n'est pas pour les fabricants de produits de cannabis comestibles. Ce projet de loi est pour les millions de Canadiens qui ont voté lors des dernières élections et qui se sont rangés derrière la promesse de la légalisation du cannabis, et c'est inacceptable d'aller de l'avant avec ce projet de loi sans les entendre.
    Les députés ministériels feront valoir qu'ils ont entendu les commentaires du groupe de travail, alors que ce groupe ne servait qu'à éclairer le processus. Je veux entendre les commentaires de ces gens au sujet du projet de loi. Maintenant que le projet de loi a été rédigé et déposé au Parlement, les gens ont maintenant le droit de faire part de leurs commentaires sur les propositions réelles qui ont été formulées, d'autant plus que le gouvernement a fait fi de plusieurs recommandations du groupe de travail dans le projet de loi.
    J'espère de tout coeur que le gouvernement libéral jugera bon d'inclure ces voix importantes. Autrement, j'espère qu'il aura une bonne explication à fournir pour expliquer pourquoi il n'est pas nécessaire d'entendre au Comité ces voix importantes.
    Je vais m'arrêter ici. Voici la différence. Ce n'est pas suffisant de dire que les gens peuvent communiquer avec leur député ou que nous pouvons organiser des assemblées publiques locales, ce que bon nombre d'entre nous ont fait ou font. Témoigner à notre comité signifie de témoigner en séance publique devant l'ensemble du Comité de la santé, et les témoignages sont enregistrés et télévisés dans les deux langues officielles. Cela donne une occasion unique d'entendre une voix qui ne peut pas l'être parfaitement d'une autre manière.
    Pour toutes ces raisons, j'exhorte mes collègues à appuyer cette motion très raisonnable. Nous pourrons ainsi offrir aux Canadiens le projet de loi sur le cannabis le plus efficace, le plus sécuritaire et le plus sain que nous pouvons concocter au Canada.
    Merci, monsieur le président.

  (1540)  

    Madame Sidhu.
    Monsieur le président, je vais me prononcer contre cette motion.
    Je veux rappeler au Comité ainsi qu’à mon collègue M. Davies, qui appuie cette motion, que nous avons organisé cinq journées d’étude ininterrompue — ce que nous sommes en train de faire — et que le gouvernement a mené une campagne à ce sujet en 2015. En 2015, le Groupe de travail sur la légalisation et la réglementation du cannabis a travaillé pendant six mois, a consulté plus de 30 000 Canadiens, a parcouru le pays de long en large et s’est même rendu dans d’autres États. Le Comité a entendu plus de 100 témoins cette semaine, ce qui représente plus de 40 heures de témoignages de représentants du gouvernement, des forces de l’ordre, de monde médical, du milieu de la recherche et de la communauté scientifique. Le Comité a également reçu des centaines de mémoires. Au cours de l’été, chaque partie a eu la chance de dresser une liste des témoins qu’il souhaitait voir comparaître dans le cadre de cette étude. De plus, les provinces et les territoires ont amorcé leurs propres consultations.
    Je tiens seulement à vous remercier, monsieur le président, et à remercier tous mes collègues. J’estime qu’il s’agit d’un texte de loi important et que nous devrions aller de l’avant.

  (1545)  

    Monsieur Carrie.
    Monsieur le président, je tiens à remercier Don d’avoir soulevé cette question et de l’avoir si bien présentée. Merci de cela.
    Don a répété que nous avons bel et bien voté contre cela en juin. D’une certaine façon, les libéraux ont cherché à nous confiner à cinq jours axés sur différents sujets, et nous étions tout à fait disposés à entendre ce que différents groupes avaient à dire. Don a évoqué le nom de certains d’entre eux. En fin de compte, les Canadiens s’attendent à ce que nous veillions sur leur sécurité et leur santé. C’était la raison d’être essentielle de ce comité.
    Si vous écoutez attentivement les messages que répètent les libéraux, vous allez vous rendre compte qu’ils sont constamment en train de dire qu’ils veulent garder le cannabis hors de la portée des enfants et qu’ils veulent garder les bénéfices hors de la portée du crime organisé. Or, tout au long de ces séances, nous l’avons entendu de la bouche des témoins, et même des députés libéraux eux-mêmes: il est évident qu’il y a d’énormes lacunes dans ce projet de loi. Et l'on nous a répété à profusion qu’à défaut de procéder correctement, il est possible que les choses empirent pour tout le monde au Canada.
    Je sais que le gouvernement va claironner qu’il a entendu tant et tant de témoins — le nombre de témoins — et qu’il va comparer cela à d’autres études qu’il a réalisées. Cela ne m’intéresse pas. Il est arrivé que ces autres études aient été interrompues elles aussi. Les libéraux nous avaient promis qu’ils étaient disposés à entendre d’autres témoins.
    Ce que nous avons fait jusqu'ici m’a permis de comprendre à quel point cette question est complexe et de prendre conscience de la nécessité pour les différents ordres de gouvernement de mettre la main à la pâte. Il leur incombe de préparer toutes ces choses. Comme mon collègue libéral l’a remarqué, il y a d’énormes lacunes dans ce projet de loi. Nous devons avoir un peu plus de perspective et veiller à ce que tout soit fait dans les règles. C’est la moindre des choses que nous pouvons faire pour nos concitoyens.
    Don, sachez que nous allons appuyer votre motion.
    Madame Gladu, nous vous écoutons.
    Monsieur le président, je veux aussi parler en faveur de la motion.
    Lorsque j’ai proposé ce matin d’ajouter des séances et des témoins à notre étude, j’ai été très déçue de la fin de non-recevoir que m’ont servie les libéraux. Ils répètent sans arrêt qu’ils ne cherchent pas à précipiter les choses, mais on dirait bien que c’est ce qu’ils font. Nous n’avons pas entendu parler de l’Uruguay, le seul autre pays au monde à avoir légalisé la marijuana, et je crois que nous devrions au moins entendre ce qu’il a à dire en la matière.
    Les témoignages ont mis l'accent sur certains aspects et nous ont permis de cerner les lacunes qu’il nous faudrait combler, comme la question des frontières, celle des traités internationaux, et un certain nombre d'autres choses — comme la répartition des revenus — qui ne sont pas abordées, bref, autant de sujets pour lesquels il nous faudrait entendre d’autres témoins.
    Merci, Don, d’avoir mis cela à l’avant-plan. Je vais appuyer la motion.
    Monsieur Davies, vous avez la parole.
    Pour répondre brièvement à l'intervention de Mme Sidhu, rappelons-nous que la motion initiale des libéraux était d'avoir cinq jours d'audience seulement. Après délibération, le Comité a modifié la motion pour y inclure la possibilité d'ajouter des journées aux cinq jours initialement prévus, au besoin. Les libéraux étaient d'accord avec cela. Maintenant, au terme de ces cinq jours d'audience, les libéraux disent qu'il n'est plus possible d'ajouter des séances. En fait, ce sont les libéraux qui reviennent sur l'engagement qu'ils ont pris en juin.
    De plus, je tiens à faire remarquer que ce que les Canadiens ont pu dire dans le cadre des consultations du groupe de travail n'est pas la même chose que ce qu'ils ont à dire sur le projet de loi qui a été présenté, surtout si l'on considère que ledit projet de loi s'écarte des recommandations formulées par le groupe de travail. J'en veux pour exemple celui des produits comestibles. Pour diverses raisons dégagées des consultations réalisées auprès de 30 000 Canadiens et de l'examen de ce qui s'est fait ailleurs, le groupe de travail en est venu à la conclusion réfléchie et étayée par des faits probants que le gouvernement devrait légaliser les produits comestibles. Bien que ce soit ce que les Canadiens lui ont dit, le gouvernement a présenté un projet de loi qui passe par-dessus cette question. Je veux savoir ce que les Canadiens pensent de cela.
    Enfin, je le répète, je n'ai pas besoin que les gens de 50 et 60 ans me disent comment parler aux jeunes de 16 à 18 ans. Je veux entendre les jeunes de 16 à 18 ans me dire ce qu'ils pensent du cannabis. Le fait de museler ces voix ou de refuser de les écouter risque d'avoir des conséquences fâcheuses relativement aux préoccupations soulevées quant à la santé de nos jeunes. Je vais m'arrêter là.
    Je serais heureux que nous passions au vote, si c'est ce que désirent mes collègues.
    Très bien. Comme il n’y a pas d’autres intervenants, nous allons procéder au vote.
    J’aimerais, s’il vous plaît, que ce soit un vote par appel nominal.
    Monsieur le président, j’invoque le Règlement.
    Nous vous écoutons.
    Ici, au Comité, chaque parti est censé avoir un certain nombre de membres. Je crois que cela a été proposé à la Chambre. Officiellement, je pense que M. Kang fait toujours partie du Comité. Je ne suis pas certain que le gouvernement libéral a le droit de le remplacer par un autre de ses députés. Je sais que M. McKinnon est là, et je salue sa solide contribution à nos travaux.
    D'un point de vue technique, le parti au pouvoir peut-il remplacer un député indépendant par l'un des siens et, si c'est le cas, le député remplaçant est-il autorisé à voter? Pouvez-vous nous dire ce que le Règlement stipule à cet égard?

  (1550)  

    Ma décision est qu'il peut être remplacé. La présence de M. McKinnon en tant que membre votant du Comité est légitime.
    Monsieur Davies, je vous écoute.
    Pardonnez-moi, monsieur le président, mais je demande que ma motion fasse l’objet d’un vote par appel nominal.
    D’accord. Nous allons procéder au vote.
    (La motion est rejetée par 5 voix contre 3.)
    Voilà qui met fin à cette 68e séance du Comité.
    Merci à tous d'avoir été là.
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