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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 082 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 25 avril 2013

[Enregistrement électronique]

  (0845)  

[Traduction]

    Bonjour à tous. Il s'agit de la séance no 82 du Comité permanent de la sécurité publique et nationale. Nous sommes le jeudi 25 avril 2013.
    Nous poursuivrons aujourd'hui notre étude des aspects économiques liés aux services de police du Canada. Le premier groupe de témoins de la présente réunion est composé de Geoff Gruson, directeur exécutif, Conseil sectoriel de la police, et de Rod Knecht, chef de police, Edmonton Police Service. Je vous souhaite la bienvenue.
    Nous remercions les deux témoins de s'être présentés devant nous aujourd'hui pour nous aider à mener notre étude sur les coûts liés aux services policiers au Canada.
    J'invite le chef Knecht, et ensuite M. Gruson, à formuler des observations préliminaires. Nous passerons ensuite à un tour de questions ou deux.
    M'entendez-vous, à Edmonton?
    Oui, je vous entends. Merci.
    J'ai un exposé d'une durée d'environ 10 minutes à vous présenter. Est-ce trop long?
    Non, c'est parfait. Merci.
    D'accord. Très bien. Je vais commencer, alors.
    Bonjour. Merci de m'avoir invité ici aujourd'hui et de me donner l'occasion d'aborder avec vous un sujet d'une importance cruciale pour la profession de policier, les collectivités que servent les services de police et tous les échelons de gouvernement.
    Le travail proactif du comité est capital pour la durabilité des services de police, la confiance du public à leur égard et l'ensemble du système de justice pénale. Je félicite le comité d'assumer la responsabilité de mener un examen exhaustif de cette question.
    Partout au Canada, les services de police se heurtent à des difficultés sans précédent. Les demandes de services continuent d'augmenter, et les attentes du public sont de plus en plus élevées, alors que les budgets demeurent les mêmes, ou diminuent dans certaines administrations. Tout le monde s'entend pour dire que la situation actuelle n'est plus viable. Aucune organisation ne peut continuellement travailler au maximum de ses capacités et s'adapter pour répondre à toutes les exigences et combler toutes les attentes dans un contexte où la demande croît sans cesse.
    Au moment où nous sommes à la recherche de solutions réalistes et abordables, on nous rappelle que la sécurité publique est une attente fondamentale des citoyens et une fonction centrale de tous les échelons de gouvernement. La police est un service essentiel dont le mandat est très vaste. D'un point de vue personnel, ma carrière dans les services de police a duré 37 ans. J'ai exercé mon métier dans cinq provinces, deux territoires et 16 collectivités du Canada. Au cours des 17 dernières années, j'ai assumé des fonctions de haut dirigeant au sein de deux services de police. J'ai été sous-commissaire supérieur de la GRC à Ottawa, et je suis actuellement chef du service de police de la Ville d'Edmonton.
    La réalité est simple: les coûts liés aux services de police augmentent, et de nombreuses personnes remettent en question, à juste titre, le bien-fondé de ces dépenses. La profession de policier se trouve à un moment charnière — les services de police doivent réformer leurs pratiques et les adapter au contexte global où ils évoluent, et mieux communiquer la valeur que représente l'investissement de fonds publics précieux et limités.
    Qu'est-ce qui explique la hausse des dépenses et des coûts liés aux services de police? La croissance des services de police a toujours reflété une croissance de la population dans son ensemble. Les citoyens veulent pouvoir marcher dans leurs rues et vivre dans leurs quartiers en toute sécurité. On s'attend à ce que les gouvernements investissent dans les services de police pour assurer cette sûreté et cette sécurité. Cette croissance a un coût. Les services de police sont très chers et, comme c'est le cas pour la plupart des produits, leur qualité est proportionnelle aux sommes que l'on dépense. Cependant, les coûts de main-d'œuvre par unité de production liés aux policiers assermentés et civils ou non assermentés sont plus élevés qu'ils l'ont jamais été dans le passé, comme c'est le cas dans l'ensemble de la fonction publique. Il convient de souligner que, depuis 1999, la croissance de la rémunération des policiers a été considérablement supérieure à l'inflation. Les pensions et les avantages sociaux ont grandement contribué à la croissance de ces coûts.
    À Edmonton, une proportion de 80 p. 100 de notre budget de fonctionnement est consacrée aux coûts liés aux employés, de sorte qu'une proportion de seulement 20 p. 100 de notre budget peut être allouée à des dépenses discrétionnaires liées à l'exécution des services de police. Ces pourcentages rappellent la situation que j'ai vécue au sein de la GRC. La hausse des salaires est la conséquence normale de la plus grande mobilité des jeunes Canadiens, de la demande de compétences spécifiques et d'une concurrence plus vive au sein du marché du travail.
    En Alberta, le marché est extrêmement concurrentiel, ce qui met à l'épreuve notre capacité d'attirer de nouveaux employés et de conserver les employés expérimentés. Ce phénomène ne touche pas exclusivement les services de police. Cela dit, pour répondre aux demandes, en raison de la concurrence que se livrent les services de police de l'Alberta pour attirer de nouveaux employés, nous déployons des efforts vigoureux pour recruter des employés en Ontario et dans les provinces de l'Est. La conservation des employés hautement qualifiés que l'industrie pétrolière et gazière ne cesse d'attirer vers elle grâce à des emplois mieux rémunérés demeure un défi.
    Ces coûts paraissent dérisoires par rapport à ceux que les services de police engagent lorsqu'ils mènent des interventions liées à des problèmes sociaux dont l'importance croît sans cesse, par exemple l'itinérance, la santé mentale et la toxicomanie. Notre infrastructure de santé et de services sociaux doit constamment s'adapter aux ressources humaines et aux pressions budgétaires d'un environnement en constante évolution, surtout en ce qui concerne les personnes les plus vulnérables de nos collectivités.
    En conséquence, les services de police consacrent toujours plus de temps et de ressources à la prise en charge de problèmes sociaux complexes plutôt que de s'occuper de problèmes liés à la sécurité publique, dont ils ont davantage l'habitude de s'occuper. En fait, au cours des cinq dernières années, le secteur dans lequel nous avons le plus accru le déploiement de ressources policières est celui des relations avec les personnes atteintes de troubles mentaux, les personnes itinérantes et les toxicomanes. Je peux dire sans craindre de me tromper que les services de police sont devenus l'organisme social de premier recours d'une multitude de citoyens vulnérables.
    L'an dernier seulement, la police d'Edmonton a traité 35 000 appels téléphoniques liés à la santé mentale, à la toxicomanie et à l'itinérance. Chaque appel a exigé un temps moyens de 104 minutes. Si vous faites le calcul, vous arriverez à sept ans et demi. La plupart du temps, nous avons affaire sans cesse aux mêmes personnes. Par exemple, l'an dernier, nous avons eu affaire plus de 150 fois à une même personne. Nos collègues des services des urgences des hôpitaux, des services ambulanciers et des refuges ont affaire aux mêmes personnes, dans certains cas plus souvent que nous.

  (0850)  

    Le métier de policier est devenu de plus en plus complexe. Au début de ma carrière, il fallait 55 minutes pour traiter un cas de conduite en état d'ébriété. Aujourd'hui, cela exige quatre heures. En 1986, lorsque je faisais partie de la section antidrogue, une demande de mandat de perquisition tenait sur une seule page; aujourd'hui, ce document fait systématiquement des centaines de pages.
    Bien souvent, les services de police n'ont aucune emprise directe sur les changements de politiques aux divers échelons de gouvernement, les modifications législatives et l'accroissement des responsabilités. Néanmoins, ces changements accentuent les pressions qui s'exercent sur les policiers et les budgets des services de police, et en créent de nouvelles. Les attentes des citoyens et des intervenants à l'égard de la police sont constamment à la hausse, ce qui exige l'établissement de critères plus élevés au chapitre du matériel, de la formation, de la reddition de comptes et de la technologie.
    Internet, les médias sociaux et les nouvelles technologies ont eu en très peu de temps une profonde incidence sur les services de police. De nouveaux types de crimes qui transcendent les frontières géographiques, culturelles, organisationnelles et administratives voient le jour. La pornographie infantile, la cybercriminalité, la traite de personnes, la fraude financière et la sécurité nationale ne sont que quelques-uns des secteurs où les enquêtes sont facilitées par Internet, nouvelle communauté au sein de la collectivité.
    Il y a 10 ans, la police possédait les technologies les plus perfectionnées, alors qu'aujourd'hui, ce sont les groupes criminels organisés qui possèdent ces ressources et qui peuvent accéder, sans aucune restriction de nature juridique, budgétaire ou réglementaire, aux technologies de pointe, ce qui place souvent la police dans une position où elle doit faire du rattrapage ou se voir simplement neutralisée. La plupart des principales municipalités canadiennes, voire la totalité d'entre elles, doivent également composer avec des population parallèles et des populations de passage. Par exemple, plus de 100 000 personnes ont déclaré un revenu en Alberta, mais ont fait une déclaration de revenus ailleurs.
    En outre, on assiste à une évolution au chapitre du niveau de connaissances qu'exigent les fonctions de dirigeant au sein d'un service de police. Auparavant, un agent de police supérieur expérimenté devait posséder des compétences administratives et opérationnelles, alors qu'aujourd'hui, il doit posséder les qualités d'un chef de la direction et être doté de la perspicacité d'un chef d'entreprise. Les services de police sont devenus une forme moderne d'entreprise, de sorte que les cadres supérieurs doivent être rompus aux subtilités d'un service de police d'aujourd'hui et aux complexités de la direction d'une entreprise. Ce tournant fondamental accroît les difficultés liées au recrutement et à la conservation des employés, que j'ai mentionnées plus tôt.
    Enfin, les organisations policières au sein de la structure gouvernementale globale doivent souvent rivaliser avec les autres ministères et organismes en vue d'obtenir des fonds de fonctionnement, ce qui se traduit par un jeu à somme nulle: un ministère ou un organisme n'obtient ces fonds qu'aux dépens des autres. Cela favorise la concurrence et les pratiques non efficientes, et nuit à la coopération, à l'intégration, à l'innovation et aux stratégies plus globales axées sur la réussite collective à long terme.
    On s'entend généralement pour dire que la criminalité est à la baisse. Cet énoncé est exact dans certains secteurs et certaines administrations. Cependant, rares sont les policiers de première ligne qui souscriront à une telle affirmation. À Edmonton, les appels de citoyens voulant obtenir des services ont connu une croissance considérable. Certains types de crimes sont à la hausse, plus particulièrement les agressions sexuelles, la violence familiale et les vols de véhicules, et il y a une nouvelle tendance qui consiste à ne pas signaler certains crimes, car on croit que la police n'a pas la capacité d'intervenir à leur égard.
    Les éléments que j'ai mentionnés donnent un aperçu des pressions et des catalyseurs complexes auxquels font face les services de police d'aujourd'hui et auxquels se heurteront ceux de demain. Cela dit, tout n'est pas perdu. De l'adversité émergent de réelles possibilités, et je crois qu'une foule de possibilités s'offrent à nous au moment de régler les problèmes actuels. La bonne nouvelle, c'est que, dans le passé, les services de police ont prouvé leur capacité d'adaptation et leur souplesse, malgré leur lenteur et leur résistance occasionnelle, et le fait que la personnalité des dirigeants joue souvent un rôle de premier plan. Le modèle traditionnel des services de police a évolué au fil du temps et en réaction à un environnement en mutation; il est passé d'un modèle réactif axé sur les problèmes à un modèle plus stratégiquement actif et proactif grâce à l'application des principes de la police communautaire, de la police axée sur le renseignement, de la police intégrée et, plus récemment, des services de police axés sur la prévention.
    Dans l'avenir, nous devrons avoir recours à la gestion axée sur le renseignement et à l'intégration à l'échelle des systèmes, c'est-à-dire à l'intégration à l'échelle des ministères et des organismes publics et privés. En tant que gardiens des deniers publics, les chefs de police d'aujourd'hui ont la responsabilité de chercher continuellement et judicieusement à faire des économies au chapitre de la prestation de services de sécurité publique.
    La réalité budgétaire actuelle exige que l'on rétablisse constamment l'ordre de nos priorités en fonction des tendances en matière de criminalité et de ce qui est prioritaire pour les collectivités, et ce, tout en tirant parti des nouvelles technologies et des exigences relatives aux ressources humaines, le tout devant être soutenu par de solides compétences sur le plan des communications et de la création de liens. Il est essentiel que les chefs de police gèrent constamment la demande de services de façon plus efficace, plus efficiente et plus économique. À ce chapitre, il est absolument nécessaire de gérer les attentes en communiquant les nouveaux ordres de priorité aux intervenants, aux bailleurs de fonds et aux membres des collectivités. À cette fin, il faut que les dirigeants des services de police acquièrent des compétences leur conférant l'acuité de chefs d'entreprise, sans perdre de vue le fait qu'ils font partie d'un corps de métier unique en son genre.

  (0855)  

    En lien avec ce qui précède, j'ajouterai que les services de police doivent mieux évaluer et mieux expliquer la valeur de chaque dollar qu'ils investissent dans leurs activités. L'une des difficultés tient au fait de tenter d'évaluer l'impondérable. Comment établir la valeur d'une vie sauvée, d'une intervention qui évite à quelqu'un une visite à l'urgence ou de la deuxième chance de contribuer à la société que l'on offre à une personne arrêtée dans le cadre d'une opération antidrogue? Comment établir la valeur de l'arrestation d'un conducteur ivre, qui évitera un accident à la suite duquel une personne pourrait avoir exigé des soins de santé pour le restant de ses jours?
    Nous devons entreprendre un examen détaillé de notre modèle actuel de services de police, et établir le véritable effet du modèle axé sur les coûts et les avantages. Dans mon secteur d'activités, il est souvent arrivé que les demandes de service soient à la hausse et qu'elles deviennent incontrôlables puisque nous ne disposions pas des ressources requises pour y donner suite, ce qui est particulièrement déchirant puisqu'il s'agit de demandes touchant des personnes itinérantes, toxicomanes ou atteintes de troubles mentaux.
    En théorie, il y a des économies substantielles à réaliser grâce aux activités policières d'atténuation des tensions sociales, de prévention des conflits et de réduction de la victimisation et de la revictimisation. Ces activités présentent manifestement des avantages en aval pour les familles et les collectivités, et contribuent à la croissance du développement économique. Nous devons nous pencher sur les méthodes et les mesures qui permettraient de quantifier efficacement cela.
    Comme je l'ai indiqué plus tôt, les interventions liées aux membres les plus vulnérables de nos collectivités représentent une proportion de 30 p. 100 à 40 p. 100 de nos budgets. Ces interventions ont également une incidence sur les budgets des services de santé, des services sociaux, des services de justice pénale et des services correctionnels, car tous ces services prennent en charge les personnes visées par ces interventions. Même si les conséquences budgétaires sont énormes, la véritable tragédie tient à la souffrance des personnes les plus vulnérables. À Edmonton, nous avons reconnu qu'une quantité démesurée de ressources liées aux services de police, aux services ambulanciers, aux services de santé et aux services sociaux sont affectés à la prise en charge d'un nombre restreint de citoyens. Nous avons pris des mesures pour contrer cela.
    Nous avons constitué un groupe d'intervenants clés touché par cette situation. Ce groupe comprend des personnes du secteur des soins de santé publique et du secteur des services médicaux, des représentants de refuges, des membres de la collectivité et des représentants des divers échelons de gouvernement. Ces gens sont appelés à collaborer, à travailler de façon plus intelligente et à gérer des cas de manière à améliorer la situation des personnes les plus vulnérables. Il s'agit d'une intégration de la prestation de services à l'échelle du système. À l'heure actuelle, nous mettons l'accent sur les 50 personnes qui accaparent le plus les ressources policières, et nous nous employons à comparer notre liste avec celle de nos collègues d'autres organismes.
    Nous prenons des mesures pour tenter d'établir à quel moment ces personnes passent à travers les mailles du système et deviennent des « clients » réguliers, si je peux dire. Grâce à des partenariats, à de la collaboration, à de l'innovation et à la prise de conscience du fait qu'il doit exister une meilleure façon de faire, nous sommes en train de changer un système qui est en place depuis des dizaines d'années.
    En tirant parti des ressources, nous pouvons réaliser des gains d'efficience et des économies d'échelle, et accroître la qualité de nos services. Les seuls services de police sont en mesure de réinvestir 30 p. 100 de leurs ressources limitées dans la lutte contre les personnes qui s'en prennent aux plus vulnérables et les autres délinquants qui commettent des actes criminels à répétition.
    L'objectif final est de rendre les collectivités plus sûres, de déployer plus efficacement les ressources policières et de réduire les coûts qu'assument nos partenaires du secteur de la justice pénale. Il ne s'agit pas d'un jeu à somme nulle. Il n'y aura que des avantages pour les personnes vulnérables et le système.
    Cela me mène à l'élément central de mon exposé de ce matin. Il existe une solution plus efficace, et elle ne concerne pas uniquement les services de police. Cette solution doit englober l'ensemble du système de justice pénale et du système de soins de santé, les services sociaux, les collectivités et les intervenants concernés. Plus souvent qu'autrement, les policiers sont les premiers intervenants et les gardiens du système de justice pénale, mais ce système ne leur appartient pas. On ne peut pas examiner les coûts liés aux services de police sans examiner également les coûts liés aux autres éléments que je viens de mentionner et les gains d'efficience qu'ils peuvent réaliser. Si l'on fait cela, on n'examine qu'une partie du problème. La solution réside dans le fait d'obliger le système à voir au-delà des aspects économiques des services de police. Un nouveau modèle est nécessaire. Ce modèle doit clarifier les rôles et les responsabilités de l'intégralité du système de justice pénale et des systèmes de justice sociale, et doit énoncer une vision claire. L'accroissement des coûts liés aux services de police n'est qu'un symptôme d'un mal plus profond.
    Pour un nombre croissant de Canadiens, les services de police sont devenus le premier organisme social auquel ils ont recours, et cela entraîne des coûts réels, concrets et excessifs. Partout au Canada, dans les petites collectivités, surtout dans les collectivités isolées, les collectivités du Nord et les communautés des Premières Nations, le problème est beaucoup plus grave. En général, les services de police sont l'unique organisme social présent dans ces collectivités.
    En conclusion, je mentionnerai que les services de police ne deviendront pas plus abordables si l'on se contente de prendre des mesures pour fournir plus efficacement les services actuellement offerts — cela revient simplement à traiter le symptôme plutôt que le mal.
    Il y a trois questions que nous devrions nous poser lorsque nous nous penchons sur les services de police de l'avenir, et une fois que nous y aurons répondu, nous devrions restructurer nos processus de manière à créer une démarche plus globale axée sur les systèmes. Les trois questions que nous devons nous poser sont les suivantes: parmi les activités que nous menons, lesquelles sont appropriées? Parmi les activités que nous menons, lesquelles devraient être laissées de côté? Quelles sont les activités que nous devrions mener, et que nous ne menons pas actuellement?
    Lorsque les gouvernements, les collectivités et les services de police auront répondu à ces questions, nous pourrons accroître notre souplesse, gérer les attentes, recevoir un financement adéquat et continuer d'assurer une sécurité publique qui suscite l'envie du monde entier.
    Merci.

  (0900)  

    Merci beaucoup, monsieur.
    Nous allons rapidement passer à M. Gruson. Allez-y, s'il vous plaît. Vous avez 10 minutes.
    Durant mon exposé, je vais revenir sur quelques éléments mentionnés par Rod, et en fait, je vais leur accorder une plus grande importance.
    Merci de l'invitation, et surtout, merci à vous tous des efforts que vous consacrez à l'examen d'un nouveau modèle de services de police et de l'évolution de ce modèle au Canada. De toute évidence, les aspects économiques sont à l'origine d'un réexamen sérieux du travail et des coûts des services de police et d'une réorganisation possible du modèle visant à réaliser des gains d'efficience et à obtenir une meilleure efficacité.
    Si je peux me permettre, je vais commencer par quelques réflexions personnelles avant de prendre un moment pour expliquer ce qu'était et ce qu'a fait le Conseil sectoriel de la police. J'emploie le passé parce que, malheureusement, le programme fédéral qui en finançait le travail a été éliminé par la dernière série d'initiatives visant à réduire le déficit. Je ferai ensuite une recommandation à l'intention du comité à la lumière des recherches et du travail que le conseil a réalisés.
    Ma première réflexion — il s'agit d'un point de vue personnel sur la questions — est inspirée par de longues années passées dans le secteur public, dont six à la GRC à titre de sous-commissaire, et huit au poste de directeur général du Conseil sectoriel de la police. Le modèle actuel des services de police au Canada évolue depuis environ 140 ans, mais il se fonde sur le modèle britannique de Robert Peel, dont la structure est quasi militaire et qui s'efforce d'assurer la sûreté et la sécurité des Canadiens et des collectivités.
    Ce modèle a évolué lentement au gré de nombreux facteurs environnementaux dynamiques, mais ces dernières années, un certain nombre de facteurs critiques ont accéléré cette évolution: les récessions économiques des années 1980 et 1990 et, à coup sûr, celle qui sévit actuellement, la technologie qui a apporté l'information et le renseignement jusque dans les voitures et les dispositifs mobiles des policiers; la croissance des services de sécurité dans le secteur privé, surtout après les attentats du 11 septembre; l'évolution des collectivités, qui vieillissent, se diversifient et s'urbanisent; et même les politiques des administrations fédérales, provinciales et municipales. Tous ces facteurs ont eu des répercussions notables sur les modalités de prestation et le cadre des services de police.
    Mon opinion personnelle est que le facteur économique l'emporte maintenant sur tous les autres facteurs environnementaux — les facteurs d'ordre social, technologique, politique et démographique —, et que, en fait, à la lumière de ces seuls facteurs économiques, le modèle actuel des services de police n'est pas durable. En réalité, les aspects économiques des services de police sont la résultante de l'ensemble des autres facteurs, mais ils ont assurément pour effet de les amplifier.
    Examinons maintenant ce qu'était et ce qu'a fait le Conseil sectoriel de la police. Il s'agissait d'une modeste organisation nationale sans but lucratif intégralement financée, jusqu'au 31 mars dernier, par le Programme des conseils sectoriels de RHDCC. Comme tous les autres conseils sectoriels, le Conseil sectoriel de la police axait stratégiquement son travail sur la viabilité à long terme du secteur, il menait des recherches et il prenait des initiatives pour faire en sorte que le secteur demeure efficient, efficace et attentif aux besoins des services de police et du public.
    Au cours des huit dernières années, éclairé par un conseil d'administration composé des principaux intervenants des services de police — des SMA des gouvernements fédéral et provinciaux, le président de l'ACCP, à savoir l'Association canadienne des chefs de police, le président de l'Association canadienne des commissions de police, le président de l'Association canadienne des policiers, à savoir le syndicat des policiers, le président de la Fédération canadienne des municipalités, des chefs d'écoles de police et d'établissements de formation et des représentants de services privés de sécurité —, le Conseil a mis l'accent sur un certain nombre de questions liées aux solutions nationales aux problèmes touchant la gestion stratégique des effectifs.
    Un exemple qui illustre nos recherches et les initiatives que nous avons dirigées ou auxquelles nous avons collaboré récemment est l'adoption progressive d'éléments clés visant à renforcer le professionnalisme des services de police, à savoir un langage commun, des processus et une gestion fondée sur les compétences dans les fonctions essentielles en matière de ressources humaines, à savoir le recrutement, l'éducation, la formation, le développement du leadership, la planification de la relève et la gestion du rendement. Je vous en dirai davantage là-dessus dans quelques instants.
    Ce que cherchait véritablement à faire le Conseil, c'était d'amener les dirigeants et les praticiens des services de police à sortir de l'isolement de leurs champs d'action respectifs, à s'attaquer à des problèmes communs et à collaborer à des solutions applicables à l'échelon national. Autrement dit, il s'agissait de faciliter la poursuite commune de gains d'efficience en gestion et d'une plus grande efficacité. C'est ce que nous avons fait durant huit ans.
    Notre conviction est assez simple. Au Canada, nous avons seulement 201 services de police répartis dans 11 provinces et territoires, alors que, aux États-Unis, on dénombre plus de 16 000 services de police répartis dans plus de 100 administrations. Il devrait être nettement plus facile pour nous de nous entendre sur un cadre national commun de gestion des services de police et de tirer profit des deniers publics pour améliorer les services de police et la sécurité.
    Quand on y réfléchit, on ne peut pas dire qu'on s'attend à ce que les services policiers soient différents d'une extrémité à l'autre du pays. Qu'il s'agisse de la technique utilisée pour passer des menottes, de la formation en matière de lutte contre le terrorisme ou de la gestion des ressources humaines, nous devrions élaborer une façon de faire et l'appliquer de nombreuses fois. Une telle démarche nationale se traduirait par des gains d'efficience et une plus grande efficacité. Bien sûr, le slogan du conseil était: « Unir les forces garantes de l'avenir », mais surtout, notre devise était la suivante: Compétences à la hausse, coûts à la baisse. En réalité, le travail que nous faisions dans ce domaine a mené au Sommet du ministre sur les paramètres économiques des services de police.

  (0905)  

    Je vais formuler quelques brefs commentaires pour étayer deux ou trois éléments mentionnés par Rod en ce qui concerne les aspects économiques, les coûts et la charge de travail des services de police. Dans tous les services de police au Canada, il y a peu de latitude pour réaliser des économies ou faire des gains d'efficience. Une proportion de 80 p. 100 des 96 000 employés du secteur travaillent dans 8 p. 100 des services de police, à savoir les 16 services fédéraux, provinciaux et municipaux les plus importants du pays.
    Au cours des 10 dernières années, les budgets des services de police ont progressé d'environ 7 p. 100 par année, et ils représentent une part croissante des budgets provinciaux et municipaux. En moyenne, les coûts relatifs aux employés — les salaires et les avantages sociaux prévus par les conventions collectives — représentent à peu près entre 85 p. 100 et 90 p. 100 du budget d'un service de police.
    Au cours des 10 dernières années, les salaires ont augmenté de 40 p. 100, alors que, dans d'autres secteurs de l'économie, l'augmentation moyenne a été de plus ou moins 11 p. 100 pendant la même période. Cela est attribuable principalement à la surenchère entre les conventions collectives et les décisions arbitrales. Par exemple, à la lumière d'une récente décision arbitrale rendue à Windsor, il semble qu'un policier de première classe touchera une rémunération de 93 000 $.
    Au moyen des 10 ou 15 p. 100 restants de leur budget, les services de police doivent acquérir et entretenir leur infrastructure, leur technologie, leur matériel et leurs véhicules, et doivent assumer les coûts liés à la formation et à la gestion de l'effectif. Ce sont des coûts incontournables pour assurer une prestation optimale de services policiers.
    Les Canadiens consacrent actuellement quelque 12,6 milliards de dollars aux services de police. Même s'il était possible de bloquer les contrats et de réduire les coûts, nous en serions à 17 milliards de dollars d'ici 2015 à cause des conventions collectives en vigueur et des contrats sur lesquels on ne peut pas revenir.
    Comme vous l'a déjà dit le sous-ministre Dale McFee — et je pense qu'il se présentera ici plus tard aujourd'hui —, les services de police ont encore moins de contrôle sur leur charge de travail que sur leurs coûts. À coup sûr, il s'agit d'une question que le chef Knecht a abordée ce matin. Chaque fois qu'une loi est adoptée et qu'un règlement est pris, chaque fois qu'un commissaire formule une recommandation et chaque fois que, pour lutter contre les déficits, on impose des mesures d'austérité à d'autres services dans la collectivité, le travail des services de police s'alourdit et devient plus compliqué et complexe. Nous sommes les premiers intervenants et la solution de dernier recours.
    Une étude menée récemment à l'Université Fraser Valley, en Colombie-Britannique, a montré à quel point le travail des policiers avait évolué au cours des 10 dernières années, après l'adoption de la Charte et par suite des modifications législatives et réglementaires apportées dans les années 1980 et 1990. Ainsi, il faut 58 p. 100 plus de temps pour traiter les dossiers liés à des introductions par effraction, 250 p. 100 plus de temps pour traiter les cas de conduite avec facultés affaiblies et 950 p. 100 plus de temps pour traiter un cas relativement simple de voies de fait contre un membre de la famille.
    Je présente ces éléments d'information pour montrer qu'il n'est pas très utile de faire reposer le fardeau de la solution des problèmes économiques des services de police sur les divers dirigeants chargés du commandement ou sur leur service de police respectif, vu qu'ils ont fort peu de latitude dans leurs propres budgets. Il n'ont guère de contrôle sur plus de 95 ou 96 p. 100 des coûts, et ils n'ont vraiment une marge de manœuvre que dans le tri des crimes et leurs réactions aux problèmes d'inconduite sociale, ce qui, pour certains services, peut représenter presque 75 p. 100 des appels qui leur sont faits.
    Lorsque notre conseil a interrogé les chefs au sujet des conséquences des aspects économiques des services de police, ils ont répondu qu'ils sentaient beaucoup de pression. La réalité avec laquelle ils sont aux prises est celle d'une assiette fiscale qui ne peut varier et de contraintes budgétaires. Le résultat est une érosion de leurs capacités qui a été estimé à environ 12 p. 100 au cours des cinq dernières années. En outre, les chefs doivent continuer à gérer leur service en tenant compte des attentes les plus élevées qui soient: la surveillance du public, l'examen minutieux des médias et les plus hautes exigences en matière de reddition de comptes au public.
    Il faut que le débat sur les aspects économiques des services de police soit porté à un palier supérieur. Il revient aux gouvernements et aux dispositifs de gouvernance d'établir un cadre national applicable au sein duquel les chefs pourraient gérer leur effectif. À l'heure actuelle, cela ne se fait pas.
    Je vais vous donner un seul exemple du travail réalisé par notre Conseil. Il s'agit d'une occasion de réaliser un progrès réel au chapitre de l'efficience et de l'efficacité de la gestion des effectifs. Au cours des cinq dernières années, le Conseil sectoriel a dépensé près de 5 millions de dollars de fonds publics pour élaborer un ensemble de normes professionnelles national; nous avons recherché et exploité des pratiques exemplaires sur trois continents, nous avons mené des consultations et avons validé des constatations auprès de 900 spécialistes de l'ensemble du pays — des gens de la police et des superviseurs qui font et gèrent le travail —, et nous avons regroupé l'apport de 70 organisations policières et de 90 membres de comités de direction et de travail. Il s'agit d'une chose qui a été faite par et pour les services de police.
    Il existe maintenant des normes comportementales et techniques pleinement définies et fondées sur des compétences pour plus de 160 rôles au sein des services de police. Ces normes sont réparties en trois grands volets: service général — du gendarme au chef; soutien général, spécialisé et d'enquête; et leadership et gestion — de la surveillance jusqu'au commandement d'exécution. Tous ces rôles ont été entièrement définis sous l'angle des normes techniques ou comportementales axées sur les compétences.
    Pourquoi cela est-il important pour notre discussion sur les gains d'efficience et l'efficacité? Le raisonnement est le suivant: si le travail des services de police est uniforme dans l'ensemble du Canada, et si nous pouvons définir le travail et les compétences nécessaires pour réussir dans ce travail, alors il est possible de normaliser les rôles et les professions au moyen de normes professionnelles nationales ou provinciales. Si nous avons des normes, nous pourrons, comme tout autre secteur d'activités, depuis celui des médecins jusqu'à celui des électriciens, avoir des processus et des mécanismes normalisés pour gérer ce travail de façon cohérente et plus efficace.

  (0910)  

    À l'heure actuelle, nous n'avons pas cela, c'est-à-dire que nous n'avons pas de normes nationales de gestion des effectifs, lesquelles englobent notamment des normes sur les programmes d'étude et la formation, des agents et établissements de formation chargés de la certification et l'attestation des compétences acquises pour jouer chacun des rôles. Il faut se représenter les services de police comme une entreprise d'envergure nationale. Nous voudrions que tous les agents de police soient qualifiés pour occuper leur poste et qu'ils ne soient promus que s'ils ont acquis des compétences nouvelles et plus solides.
    Des progrès sont réalisés. La situation actuelle, qui s'est grandement améliorée, est à peu près la suivante: nous accordons les promotions en fonction de critères définis d'après le rang et non pas d'après les compétences; nous accordons la rémunération en fonction du rang, et non pas des compétences; nous faisons du recrutement et dispensons de la formation comme nous le faisons depuis 50 ans, c'est-à-dire non pas en fonction des compétences. En conséquence, nous avons des travailleurs trop qualifiés et trop bien rémunérés qui occupent des fonctions qu'ils ne devraient pas être les leurs. Je crois que Dale McFee a utilisé l'analogie d'un mécanicien de moteur turbo contraint de faire des vidanges d'huile. Cela peut souvent avoir pour conséquence des effectifs médiocres et démotivés.
    Le résultat de la démarche utilisée par le Conseil sectoriel en ce qui concerne le travail axé sur les compétences, ce sont des économies d'échelle qui permettent des gains d'efficience. Le même dispositif est conçu une seule fois et est utilisé un grand nombre de fois. Les économies réalisées sont consacrées à l'efficacité opérationnelle et aux secteurs importants des services de police, par exemple la lutte contre le crime organisé et la cybercriminalité.
    Les uns après les autres, les commissaires de la GRC se sont présentés devant le comité et lui ont dit que leurs ressources ne leur permettaient que de mener des enquêtes sur 20 ou 25 p. 100 des activités connues du crime organisé au Canada, et on n'a pas encore tenu compte des problèmes liés à la cybercriminalité. À cet égard, grâce au travail du Conseil sectoriel, qui a facilité la collaboration de nombreux intervenants, nous avons désormais un cadre de gestion des effectifs fondé sur les compétences, cadre qui a été élaboré par les services de police pour les services de police. Il a été bien accueilli par les gestionnaires et les syndicats. Il s'agit d'un cadre clair, objectif, axé sur l'apprenant et sur les employés, et il s'agit d'un outil et d'un processus simplifié de gestion des ressources humaines.
    La mise en œuvre de ce cadre exige une orientation claire et du leadership. Comme on vous l'a déjà dit, la délégation des responsabilités liées aux services de police va du gouvernement fédéral aux gouvernements provinciaux, puis des gouvernements provinciaux aux administrations municipales, ce qui suscite dans les services de police une culture défavorable à une orientation nationale et à un changement transformationnel. Nous avons collaboré lentement avec des services de police pilotes, certains SMA provinciaux et des personnes passionnées des commissions et des associations de police de toutes les régions du pays pour amorcer le processus de changement.
    La recommandation que je veux formuler à l'intention du comité est très simple. Il faudra du temps et du leadership, mais d'ici cinq ans, s'il est possible de déployer des efforts bien orientés et intenses, un cadre national de qualifications devrait être en place, mais il faudra saisir l'occasion qui se présente au sein de l'économie canadienne.
    Permettez-moi de vous proposer une vision, si vous voulez, en cinq points des services de police du Canada. Nous recommandons l'instauration des éléments suivants: un cadre national de qualifications fondé sur une architecture nationale de gestion des effectifs; des normes professionnelles fondées sur le rôle, et non sur le rang; un dispositif de formation professionnelle et de certification au moyen de structures de prestation rationalisées et efficaces par rapport aux coûts; des normes rigoureuses en matière de leadership de manière à ce que des dirigeants tout à fait qualifiés occupent les postes d'adjoint et de chef; enfin, un collège national des services de police qui administrerait la formation et les études en fonction de normes nationales, très semblable à celui qui existe au Royaume-Uni.
    Pour concrétiser cette vision, il faudra une organisation sans but lucratif, indépendante et capable de compter sur la pleine participation des intervenants qui prendra en charge les activités de mise en œuvre et d'administration. Il faudra un cadre national axé sur les compétences pour gérer le capital humain, y compris un cadre de certification et d'accréditation, ce qui exigera la coopération et l'appui de toutes les provinces et de Sécurité publique Canada.
    Cette organisation sans but lucratif poursuivrait le travail réalisé par le Conseil sectoriel, lequel a, au cours des huit dernières années, créé des réseaux de collaboration, amélioré la capacité de tous les intervenants de travailler ensemble dans un contexte sectoriel, décelé les approches communes afin d'optimiser les ressources consacrées à la gestion du personnel et défini une orientation nationale sectorielle en ce qui concerne la certification et l'accréditation axées sur les compétences des policiers et des civils. En d'autres termes, il s'agit de poursuivre la professionnalisation des services de police du Canada.
    Comme vous pouvez tous le comprendre, toute nouvelle innovation fondée sur des faits visant à changer la façon dont nous menons actuellement nos activités exige que les dirigeants politiques et les décideurs préconisent et promeuvent ces efforts et mobilisent les partenaires nécessaires qui peuvent avoir une influence marquante. Ce n'est pas le cas en ce moment. Le défi consiste véritablement à élaborer une solution de l'ère numérique au sein d'un système et d'une structure de l'ère analogique.
    Merci de m'avoir permis de présenter cet exposé. Je serai heureux de répondre à vos questions.

  (0915)  

    Merci beaucoup.
    Comme votre exposé a été un peu long, nous allons réduire à six minutes, si cela est possible, la durée des tours de question.
    Nous allons commencer par M. Hawn. Allez-y, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie les deux témoins d'être ici.
    Chef Knecht, je vais commencer par vous, mais je vais également demander à M. Gruson de dire quelque chose là-dessus. Vous avez abordé la question de la cybercriminalité, et c'est assurément quelque chose qui a retenu notre attention à la suite de certains événement survenus récemment. Vous avez aussi parlé des services de police axés sur le renseignement, ce qui m'amène à vous poser une question au sujet d'un projet de loi qui a déjà été à l'étude, mais qui a été abandonné pour diverses raisons, concernant l'accès légal au contenu d'Internet, aux adresses IP, etc., sous supervision, évidemment, avec des freins et contrepoids, pour permettre aux services de police de recueillir des renseignements sur ce qui se passe sur Internet et qui constitue un crime ou témoigne de la perpétration d'un crime, qu'il s'agisse de terrorisme, d'intimidation ou d'autres choses. Croyez-vous qu'il soit nécessaire d'adopter des dispositions législatives sur l'accès légal pour venir en aide à la police dans ce domaine?
    Je pense que cela a trait aux aspects économiques liés aux services de police. Nous passons beaucoup de temps à faire en sorte d'obtenir l'accès à Internet, à des immeubles, à des locaux, etc. Le moment de l'accès en tant que tel est précédé par des heures de préparation secrète. L'accès légal est essentiel à notre travail.
    Je pense qu'il faut qu'il y ait une surveillance, des freins et contrepoids, comme lorsque nous demandons un mandat de perquisition, lorsque nous nous présentons devant un juge pour justifier l'obtention d'un accès légal. Je ne pense vraiment pas qu'il y ait parmi nous des gens qui souhaitent avoir carte blanche, mais je pense aussi qu'il faudrait simplifier l'obtention de l'accès légal et des adresses IP, entre autres.
    Monsieur Gruson, puis-je connaître votre point de vue là-dessus?
    Je suis tout à fait d'accord. J'ajouterais un élément de comparaison pour aller un peu plus loin. Nous avons mené une enquête au sein de 190 pays par l'intermédiaire d'Interpol l'an dernier pour demander aux représentants de ces différents pays ce qu'ils font pour lutter contre la cybercriminalité.
    Chacun des pays consultés est en train de mettre au point ses propres cybercentres, son processus de cybertraitement, ses cyberstructures, ses cyberinstallations, et tout cela révèle un manque de renseignement, l'absence d'intégration et l'incapacité des services de police de faire face aux problèmes qui s'en viennent. Il s'agit assurément de l'une des questions que nous devons régler.
    Merci.
    Je reviens à vous, chef Knecht. Vous avez abordé certains problèmes qui se posent au sein du système judiciaire et des tribunaux, entre autres, je sais que les agents de police passent beaucoup de temps en cour. C'est en partie du temps perdu, puisqu'il arrive que le défendeur ne se présente pas au tribunal et que l'agent de police reste là pendant deux ou trois heures sans qu'il ne se passe quoi que ce soit.
    Avez-vous envisagé d'adopter une solution technologique pour régler ce problème, par exemple la comparution par téléconférence, qui permettrait aux agents de police de demeurer au poste ou ailleurs et de s'acquitter d'autres tâches dans l'intervalle? Si le défendeur se présente au tribunal ou si le délai est écoulé, l'agent pourrait à ce moment-là comparaître par téléconférence. Est-ce que ce serait possible?

  (0920)  

    Oui, c'est certainement une possibilité.
    J'en ai parlé avec les représentants du ministère de la Justice avant-hier. Par leurs propres moyens, ils sont capables de libérer des périodes d'audience au début de la journée pour instruire les affaires qui leur sont renvoyées.
    Malheureusement, nos agents de police vont quant même devoir se présenter quelque part, que ce soit au poste équipé pour la vidéoconférence ou au tribunal. Lorsqu'ils ne sont pas prévenus de l'annulation, ils sont automatiquement payés pour huit heures. Il arrive donc qu'ils se présentent et qu'ils soient payés pour huit heures même s'ils n'ont pas à comparaître ce jour-là.
    Il faut que nous intégrions dans le système un moyen d'aviser nos agents à l'avance du fait qu'ils n'ont pas à se présenter. C'est un fardeau énorme.
    Seulement au service de police d'Edmonton, nous versons probablement 3 M$ chaque année en heures supplémentaires aux agents qui se présentent au tribunal et finissent par ne jamais témoigner.
    D'accord. Je poursuis avec vous, chef Knecht. Vous avez évidemment accumulé beaucoup d'expérience en travaillant au sein du service de police national, et maintenant d'un grand service de police municipal. Pouvez-vous expliquer les similitudes et les différences entre un service de police national et un service de police municipal pour ce qui est des difficultés liées à l'aspect économique et à l'accomplissement des tâches dans le cadre d'un budget limité, et expliquer aussi les différences entre les solutions adoptées, le cas échéant?
    Certainement. À certains égards, les coûts sont plus élevés, et à d'autres, ils sont moindres. Je pense à la période pendant laquelle j'ai travaillé à la GRC. Beaucoup de difficultés venaient du fait d'offrir des services de police dans des collectivités isolées et que nos agents avaient besoin du même équipement, de la même formation, etc.
    Je sais que, pour que la formation d'un membre de la GRC travaillant à Iqaluit soit toujours à niveau, il faut qu'il prenne l'avion pour aller suivre des cours. Cela entraîne des coûts. Le fait qu'il doive y avoir autant d'agents de police... pour assurer la sécurité de nos agents de police, nous devons pourvoir davantage de postes dans les petites collectivités, même lorsque la charge de travail ne le justifie pas. Ce sont là de très grandes difficultés.
    Ce qui est bien d'un service de police national, c'est qu'on dispose de ressources à déployer dans une situation donnée; qu'il s'agisse d'une équipe d'intervention d'urgence, d'équipement spécial, d'un hélicoptère, d'un avion ou de quoi que ce soit d'autre, on a cet accès. Encore là, c'est souvent loin et à un coût supplémentaire.
    À la police municipale, nous sommes très chanceux, dans la mesure où nous avons un accès immédiat à de l'équipement de secours et connexe.
    La centralisation présente des avantages, et la décentralisation aussi. Il faut que nous arrivions à trouver un meilleur équilibre. Nous intégrons mieux les services de police aujourd'hui, beaucoup mieux qu'il y a 10 ans, qu'il y a cinq ans. Je pense qu'il est encore possible d'accroître l'intégration, de mieux mettre à profit les ressources de notre milieu.
    Je peux vous dire qu'ici, à Edmonton, nous collaborons beaucoup plus étroitement avec la GRC parce que notre territoire est entouré par le sien. Nous envisageons la possibilité de partager un hélicoptère, une escouade tactique et une équipe d'intervention d'urgence. Nous pouvons collaborer à ce chapitre, et ainsi mieux utiliser l'agent des contribuables en investissant des ressources municipales, provinciales et fédérales au même endroit, pour le bénéfice de l'ensemble des citoyens.
    Merci.
    Merci beaucoup, monsieur Hawn, chef Knecht.
    Nous allons passer à M. Garrison, s'il vous plaît.
    Vous avez six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux deux témoins d'être ici aujourd'hui.
    J'aimerais d'abord poser une question au chef Knecht.
    Vous avez commencé par parler des coûts salariaux. Je crois vous avoir entendu dire que ces coûts semblent dérisoires lorsqu'on envisage les besoins créés par des problèmes sociaux complexes. J'aimerais que vous reveniez là-dessus, parce qu'on a un peu insisté sur les salaires. Ce que j'ai l'impression que vous me dites, c'est que c'est un fait, mais que les besoins sont encore plus importants que les coûts liés aux services de police. Est-ce bien cela?
    C'est cela.
    Les salaires sont l'élément important. Cela ne fait aucun doute, puisqu'ils comptent pour 80 p. 100 de notre budget. Pour ce qui est de l'intervention et du devoir des services de police, je me rappelle que lorsque je suis devenu chef de la police d'Edmonton, c'est venu à mon attention parce que nos agents arrêtaient surtout des itinérants ou des gens drogués ou en état d'ébriété. Ils ne pouvaient les confier à personne, puisque les refuges et les centres fermaient à 16 heures. Ceux-ci étaient ouverts de 8 heures à 16 heures, du lundi au vendredi. Les agents n'avaient nulle part où emmener les gens qu'ils arrêtaient à 11 heures du soir ou à 3 heures du matin. Ils patrouillaient avec ces gens assis sur la banquette arrière parce qu'ils n'avaient nulle part où les déposer; c'était des gens qui n'avaient pas de famille prête à les accueillir, etc. C'est une situation qui avait des répercussions très importantes.
    Nous nous occupions aussi d'itinérants blessés, par exemple, ou encore atteints d'une maladie mentale. Le samedi soir, il y avait trois voitures de police devant le service des urgences de l'hôpital, avec dedans six agents de police devant attendre pendant six heures que la personne qu'ils avaient arrêtée reçoive un traitement. Pendant ce temps-là, ils ne pouvaient pas faire leur travail de policier, s'occuper de libérer les rues des prédateurs. Essentiellement, ils faisaient du gardiennage, puisqu'ils devaient s'occuper de ces gens; le système est congestionné et ne peut s'en occuper. Dans cette situation, nous devenons soit des chauffeurs de taxi, soit des travailleurs sociaux, ce qui n'est pas notre responsabilité première.

  (0925)  

    Vous dites que vous collaborez avec d'autres organismes de services sociaux. Pouvez-vous être plus précis? S'agit-il d'un projet pilote, ou est-ce réservé à un secteur de la ville? De quelle façon avez-vous essayé de travailler au système de gestion des cas?
    On pourrait dire que c'est un projet pilote, mais c'est plus large. Nous faisons intervenir davantage de gens, par exemple les membres de groupes autres que ceux avec lesquels nous interagissons habituellement. Nous nous rendons compte que nous nous occupons tous des mêmes gens. En parlant avec les ambulanciers et les responsables des services d'urgence des hôpitaux et des refuges, on se rend compte que tout le monde s'occupe des mêmes gens. Nous les connaissons tous par leur nom; nos agents de police de première ligne les connaissent. Nous savons tous de qui il s'agit, et ce sont des gens qui seront constamment pris en charge par le système.
    Il arrive parfois, par exemple, que nous arrêtions la même personne deux ou trois fois pendant une nuit. Nous l'amenons à l'hôpital, elle est traitée, l'hôpital lui donne son congé, puis nous la revoyons. On ne peut pas traiter ainsi les gens les plus vulnérables de notre société. Il y a une meilleure façon de s'en occuper, et nous avons trouvé une meilleure façon de le faire. Nous savons que le système a des lacunes. Nous cherchons à les cerner en collaboration avec les gouvernements provincial et fédéral ainsi que l'administration municipale et nos partenaires des organismes sociaux. Nous essayons de cerner les lacunes, de les combler et de trouver ensemble un meilleur endroit pour les gens en question.
    L'avantage pour les services de police, très franchement, c'est que nous économisons un nombre considérable d'heures-personnes en ne faisant plus le genre de choses que nous faisions avant — par exemple, attendre que quelqu'un s'occupe du problème, ou encore répondre plusieurs fois à un même appel. Il y a d'énormes économies à réaliser à ce chapitre. C'est un investissement à court terme qui va permettre des gains à long terme. Tous nos partenaires le constatent, et cela les enchante. Il s'agit non seulement d'un meilleur moyen de traiter les gens les plus vulnérables de notre société, mais également d'un moyen d'épargner énormément d'argent grâce à la collaboration et à l'intégration, au fait de travailler ensemble.
    Merci.
    J'aimerais m'adresser à M. Gruson.
    Merci d'être ici.
    Je dois dire ce qui finira inévitablement par être dit: les initiatives de compressions budgétaires se résument parfois à des économies de bouts de chandelles. Je vais m'en tenir à cela.
    Dans le cadre du travail de votre conseil sectoriel, ce que vous avez exposé aujourd'hui — et je ne veux pas critiquer la démarche en la qualifiant d'étroite — je pense que c'est une façon étroite d'envisager les économies du point de vue de la gestion.
    Le conseil s'est-il penché sur les questions liées aux besoins dont nous entendons parler, les besoins relatifs aux services de police?
    Oui, bien sûr. J'essayais simplement de me concentrer sur un domaine dans lequel nous avions fait des recherches pour montrer qu'il y a de réelles économies à réaliser sur le plan de la gestion aussi.
    Si vous me permettez de dire quelque chose là-dessus avant de répondre à la question, au Royaume-Uni, il y a un système qui permet à la police de faire appel à une unité moins coûteuse et plus mobile pour aller chercher les gens dont Rod parle, et les responsables de cette unité s'occupent de l'administration et du traitement avant de relâcher les gens en question pour que Rod s'en occupe. Il y a donc d'autres façons de faire en sorte que des personnes moins payées fassent le travail, au lieu qu'un agent payé 93 000 $ par année passe six, sept ou huit heures là-dessus.
    Pour en revenir à ce que vous disiez au sujet des besoins, nous avons certainement examiné cet aspect de la chose assez en profondeur au cours des huit dernières années. Le problème, c'est que ça devient de plus en plus compliqué et complexe.
    Si je peux vous proposer une recommandation, nous avons en réalité besoin d'un modèle tenant compte de divers degrés d'intervention policière et permettant aux gens pleinement qualifiés et pleinement fonctionnels de faire le travail qu'ils ont à faire et de laisser le travail dont le chef Knecht parlait à des gens tout aussi qualifiés et compétents, mais dont le salaire est beaucoup moins élevé. Les besoins ne vont pas changer. La complexité du travail ne devait pas changer.
    Je vous donne un exemple très rapidement. Dès que les travaux de la commission sur l'incident relatif au taser survenu à l'aéroport de Vancouver ont pris fin, la formation sur les tasers a changé pour tous les services de police du pays. La Commission a terminé ses travaux, elle a adopté cette recommandation, et la formation sur les tasers a changé. On n'a pas évalué le travail nécessaire pour offrir cette formation, ni le coût de la formation ni le coût potentiel du renouvellement de cette formation.
    À l'heure actuelle, nous mettons à niveau 22 compétences techniques au sein des services de police de l'ensemble du pays chaque année, compétences qu'ils devraient posséder et qui ne se détériorent pas tant que ça d'une année à l'autre.
    Alors oui, lorsque nous examinons les besoins, il y a toutes sortes de choses que nous devons examiner d'un peu plus près.

  (0930)  

    Merci beaucoup.
    Nous allons passer à M. Gill, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais également remercier nos témoins de s'être joints à nous aujourd'hui.
    Ma question s'adresse au chef Knecht. Chef Knecht, vous avez mentionné dans votre déclaration préliminaire certaines des infractions qui ne sont pas signalées simplement parce que le public croit que la police n'a pas les ressources nécessaires pour enquêter sur celle-ci. Je me demandais si vous pouviez préciser quelles sont certaines de ces infractions que le public ne signale pas nécessairement à la police.
    Certainement. C'est quelque chose qui évolue au fil du temps, en fait. Nous voyons encore plus souvent qu'avant des infractions graves qui ne sont pas signalées. Les infractions qui ne sont pas signalées sont les vols mineurs, les dommages légers aux véhicules, souvent les vols dans les cours. Nous savons qu'il y a beaucoup d'agressions sexuelles qui ne sont pas signalées.
    La plupart des gens signalent les crimes contre les biens s'ils présentent une déclaration à leur assureur, parce que, souvent, l'assureur l'exige, mais les gens qui sont victimes de vols, de voies de fait simples... les choses de ce genre ne sont pas signalées. Nous avons même vu récemment des cas d'introduction par effraction qui n'ont pas été signalés. Les gens ne signalent même pas le fait que quelqu'un est entré chez eux par effraction. S'ils n'ont pas d'assurance, ils ne seront pas obligés de le faire, et ils négligent même de signaler des crimes plus graves.
    Il y a donc toutes sortes de crimes qui ne sont pas signalés aux autorités par le public. Les gens sont apathiques. Encore là, s'il faut attendre pendant trois ou quatre heures pour qu'un agent de police vienne à cause du volume d'appels, les gens ne sont pas prêts à le faire. Tout le monde est très occupé, et les gens ne veulent pas attendre.
    Merci.
    Vous avez aussi parlé du coût de 3 millions de dollars lié au fait que des agents doivent se présenter au tribunal alors que leur présence n'est pas vraiment nécessaire, et évidemment de l'absence d'avis et d'autres choses. Vous avez également mentionné que les services de police doivent payer ces agents pour huit heures même si la personne ne se présente pas et que leur présence n'est pas requise. Est-ce que cette période de huit heures est la norme? Est-ce quelque chose qui varie d'un service de police à l'autre? Est-ce que cela varie d'une province à l'autre? Avez-vous des recommandations ou des suggestions concernant une façon plus efficace de procéder afin d'éventuellement régler ce problème?
    Je vais répondre à la première partie de la question.
    Cela varie en fonction des services de police et des conventions collectives. À la GRC, par exemple, l'agent qui doit se rendre au tribunal fait l'objet d'un rappel au travail de quatre heures, qu'il ait à témoigner ou non, pour d'autres services de police, c'est huit heures. Ça peut être à temps et demi; dans certains cas, c'est à temps double. C'est selon que le rappel a lieu immédiatement après un quart de travail ou pendant un jour de congé. Cela varie selon la province et le moment où le rappel survient. Dans la plupart des cas, tout cela est prévu par la convention collective. Comme la GRC n'est pas syndiquée, c'est un peu différent dans ce cas.
    Je pense qu'il y aurait une meilleure façon de procéder. Nous mettons en ce moment à l'essai un logiciel qui s'appelle CARM. C'est un logiciel qui doit servir à mieux gérer tout l'aménagement de l'horaire, l'information détaillée concernant les tribunaux, etc. Par contre, ce qui se passe souvent, dans le système de justice pénale, c'est que l'avocat peut attendre de voir si l'agent de police va se présenter avant de plaider coupable. Il y a des gens qui se présentent pour plaider non coupable pour un excès de vitesse et qui attendent de voir si l'agent de police va se présenter. S'il se présente, ils plaident coupable. S'il ne se présente pas, souvent, la contravention n'est pas maintenue. C'est toujours un peu le jeu du chat et de la souris, et il est difficile d'y faire quoi que ce soit. Évidemment, si l'agent de police est cité à comparaître, il doit se présenter.
    Il doit y avoir une meilleure façon de gérer cette situation, et je ne pense pas que la police puisse le faire seule. Encore là, il faut qu'il y ait une collaboration entre la justice, la police et les autres intervenants afin qu'on puisse trouver une façon plus efficace de faire fonctionner le système de justice pénale.
    La police peut trouver des façons d'économiser, mais si les tribunaux et les services correctionnels ne le font pas, ces économies peuvent ne pas être pleinement réalisées. Pour qu'elles le soient, il faut une collaboration entière. Il faut que nous cessions de travailler chacun de son côté. Nous devons travailler ensemble pour trouver des façons d'économiser, parce que le système est en train de s'effondrer de lui-même.

  (0935)  

    Vous avez parlé des contraventions. Une chose que j'ai remarquée, dans la région de Peel, c'est que les agents consacrent essentiellement une journée complète à leur comparution au tribunal. Toutes les contraventions données par un agent sont examinées le même jour. C'est une mesure qui, je crois, aide les services de police à réduire certains coûts.
    J'ai une autre question pour M. Gruson.
    Rapidement.
    Comme vous avez travaillé dans le secteur privé et dans le secteur public, quelles sont selon vous les pratiques de gestion du secteur privé qui pourraient être adoptées dans le secteur public?
    Très rapidement.
    Nous parlons clairement ici de pratiques modernes de gestion des effectifs. Il n'y a aucun secteur au Canada qui ne pratique pas une gestion axée sur les compétences. Ce n'est pas quelque chose de nouveau au sein des services de police; c'est simplement que ce n'est pas pleinement mis en oeuvre dans tous les services de police du pays.
    En général, les chefs de police ne sont pas des experts des finances, de la TI, des RH ni des communications. Ce sont des policiers qui font un travail opérationnel, et nous constatons de plus en plus qu'ils doivent être experts dans tous ces domaines. Comme le chef Knecht l'a dit, ils n'ont pas encore les compétences nécessaires pour faire de bons PDG de grandes organisations devant composer avec l'influence de plusieurs services dans la collectivité, et ce n'est pas une bonne chose. Il faut régler ce problème.
    Merci beaucoup.
    Nous allons passer à notre dernière question pour le tour actuel, et celle-ci revient à M. Scarpaleggia.
    Vous soulevez un point intéressant. Vous dites que les gens qui dirigent les services de police doivent posséder toutes ces compétences, et ainsi de suite, et qu'il y a peut-être un mouvement des compétences policières de base vers les compétences en gestion de grandes organisations.
    Pouvez-vous imaginer une situation — qui existe peut-être déjà — où les chefs des services de police ne seraient pas eux-mêmes des agents de police? Dans ce cas, le problème qui se poserait, c'est que les policiers ne respecteraient peut-être pas leur chef. Je pense que c'est ce qui s'est produit à la GRC dans une certaine mesure. D'une manière ou d'une autre, je trouve que vous avez soulevé un point très intéressant.
    Vous avez mentionné le fait qu'il y a dans beaucoup de pays un organisme central chargé de luter contre la cybercriminalité. Pouvez-vous préciser? Au fond, affirmez-vous que les enquêtes sur la cybercriminalité menées au Canada ne sont pas suffisamment intégrées?
    La réponse simple est oui. Ce que nous avons appris d'intéressant dans le contexte de l'étude que nous avons menée avec Interpol, c'est que la cybercriminalité est de nature pannationale et qu'on peut très rarement lutter contre celle-ci dans un cadre législatif national. On lutte contre une criminalité qui est de nature mondiale, et pourtant tous les pays essaient de mettre au point leur propre solution, leur propre démarche. Je pense que cela fait partie des domaines où il est très clair que nous devons intégrer nos activités, collaborer et comprendre le problème, et déterminer la solution à ce problème.
    Donc la réponse est oui.
    Même au Canada, il y a...
    Même au Canada, d'une province à l'autre, on envisage le problème différemment. C'est vraiment dû à un manque d'orientation. Si j'avais à nommer des coupables, ce que je ne fais jamais... Nous devons comprendre la nature du cadre que Sécurité publique crée pour les services de police du pays, le cadre de gestion et de conduite des activités policières qui devrait être créé par Sécurité publique, puis transmettre cette connaissance aux provinces et aux municipalités. Cela fait défaut à ce moment-ci.

  (0940)  

    Il faudrait que ce cadre de gouvernance national dont vous parlez soit d'adoption volontaire, vu la nature de la fédération...
    D'adoption volontaire, mais je crois...
    ... en ce sens que vous établiriez des normes et que vous proposeriez un modèle à suivre.
    Exactement. On établirait des normes nationales, et la province les adopterait comme normes provinciales, ce serait très bien. Ensuite les municipalités en feraient des normes municipales, et ce serait une bonne chose. En fait, ce serait plutôt des niveaux que des normes. Il s'agirait en réalité de définir des niveaux de base pour la formation, pour la gestion et pour la prestation efficace et efficiente des services. Ce seraient des niveaux de base à respecter si possible.
    Nous avons constamment affirmé au cours de l'étude que ce dont nous avons besoin, au Canada, c'est de coordination et d'une espèce de point d'échange pour les études sur les services de police, sur les coûts liés aux services de police, sur les méthodes policières, etc., afin de pouvoir établir des normes, mais c'est ce que vous faisiez.
    C'est exactement ce que le Conseil sectoriel de la police fait, et ce, depuis huit ans.
    Mais le financement du conseil a été supprimé.
    Oui. Malheureusement, c'est le genre de choses qui arrivent dans les secteurs de programme.
    Oui, mais nous sommes en train de discuter du rétablissement de...
    Je pense qu'il faut que ce soit rétabli, assurément. Nous avons créé une organisation embryonnaire avec un conseil de direction provisoire, constitué dans ce cas-ci également de représentants de tous les groupes d'intervenants, et nous sommes à la recherche de financement; nous cherchons des façons de poursuivre le travail.
    C'est intéressant.
    Chef Knecht, vous avez parlé des crimes qui ne sont pas signalés.
    D'après ce que je sais, Statistique Canada est en mesure de déterminer le nombre de crimes non signalés. Est-ce exact? Je devrais plutôt dire que cet organisme arrive à estimer le nombre de crimes non signalés. Êtes-vous au courant de cela?
    Pas vraiment, mais je pense que des enquêtes ont été menées. Je sais que des enquêtes ont été réalisées en Alberta dans le but de déterminer si les victimes de crime signalent les crimes dont elles sont victimes. C'est de là que je tiens l'information que j'ai, ainsi que de discussions que j'ai eues avec certaines personnes. Les gens ne prennent pas la peine de signaler certains crimes.
    Pour ce qui est de libérer les agents de police et de leur éviter certaines tâches dont d'autres pourraient s'acquitter — les spécialistes de la santé mentale, entre autres — dans certaines collectivités, il y a des agents de la circulation qui peuvent seulement donner des contraventions, etc. Cela nous amène d'une certaine manière à nous interroger sur le rôle de l'agent de police. S'il y a des quasi agents de police qui donnent des contraventions et des spécialistes de la santé mentale qui peuvent répondre à l'appel lorsqu'une personne est en crise, à un moment donné, on doit se demander si le rôle de l'agent de police devrait être davantage un rôle d'enquête, un rôle de détective, et je veux dire par là un rôle qui suppose l'acquisition de nouvelles compétences pour lui permettre de s'occuper de problèmes plus complexes qui se posent. Est-ce vers là que nous nous dirigeons?
    À mes yeux, un avantage lié au fait que ce soit un agent de police qui intervienne, du point de vue des citoyens, c'est que, si le recours à la force est nécessaire, il peut s'en charger.
    Monsieur Scarpaleggia, votre temps est écoulé, mais j'aimerais entendre la réponse, alors...
    Certainement.
    Monsieur Gruson, je pense que la question s'adressait à vous.
    Monsieur le président, je pense que le député a mis le doigt sur le problème. Le problème, c'est que les agents de police doivent jouer un vaste éventail de rôles, qui va du fait de diriger la circulation dans une zone de construction — à 93 000 $ par année — au fait de lutter contre la cybercriminalité, contre des cas de fraude complexes qui ont des ramifications dans plusieurs pays. Le problèmes, c'est que nous ne voulons pas que ce soit une personne qui gagne 93 000 $ par année qui dirige la circulation. Nous voulons que cette personne consacre son temps à des problèmes graves qui ont une incidence sur l'économie et sur les citoyens canadiens dans leur collectivité.
    Par rapport à ce que vous avez dit, au fond, ce qui va arriver, c'est que, de temps à autre, la personne qui s'occupe de la circulation dans la zone de construction va avoir à s'occuper d'un incident. La police sera toujours là, bien sûr. La seule chose que je dirais, c'est que, si nous demandons à des gens compétents, qualifiés et capables de jouer leur rôle, ce sera beaucoup mieux pour nous que si nous leur faisons jouer le rôle que d'autres devraient jouer, et la rémunération variera en fonction des compétences.

  (0945)  

    Merci beaucoup.
    L'heure dont nous disposions est écoulée. Nous tenons à remercier le chef du service de police d'Edmonton, M. Knecht, ainsi que M. Gruson, d'être venus témoigner.
    Nous allons très rapidement passer à des travaux du comité. Nous allons le faire à huis clos.
    Comme vous le savez, nous allons faire certains voyages dans le cadre de l'étude que nous avons entreprise. Essentiellement, ce dont nous avons besoin, c'est de l'approbation concernant les semaines disponibles pour les voyages. Nous en avons parlé en sous-comité. Nous en avons également parlé un peu la semaine dernière, mais nous avions reporté la décision à plus tard, et je pense qu'il est maintenant temps de la prendre.
    Je vais simplement passer en revue ce dont nous avions discuté. Hier, nous avons fait circuler les suggestions...
    Voulez-vous dire au revoir?
    J'ai dit au revoir à nos témoins.
    Merci beaucoup, encore une fois, d'être venus. Nous voudrions passer au prochain point sans suspendre la séance, alors nous vous remercions.
    La semaine suivant notre congé est celle du 20 au 25 mai. Ce qu'on avait proposé, c'est que ce serait pendant cette semaine-là que nous nous rendrions aux États-Unis, ainsi qu'à Prince Albert et à Calgary. Sommes-nous tous d'accord là-dessus? Est-ce que les autres partis sont d'accord?
    Je vois que les gens sont d'accord. Tout le monde est d'accord, simplement pour que nous le sachions?
    Des voix: D'accord.
    Le président: Ensuite, la semaine suivante — c'est la semaine indiquée dans les suggestions que vous avez fait circuler, n'est-ce pas? — celles du 25 mai au 1er juin, seraient consacrées au voyage au Royaume-Uni. Est-ce que tout le monde est d'accord là-dessus?
    Tout le monde est d'accord?
    Des voix: D'accord.
    Quelle est la date, monsieur le président?
    Il s'agit de la semaine du 25 mai au 1er juin.
    Même si nous voulons passer du temps dans notre circonscription, nous prendrions l'avion un dimanche soir, selon le nombre de personnes. Voilà à peu près où nous en sommes.
    Vous parlez du voyage au Royaume-Uni?
    Oui.
    Vous prendriez donc l'avion dimanche ou peut-être même avant. Il se pourrait que ce soit dimanche après-midi.
    Je sais qu'un certain nombre d'entre vous êtes venus me voir et m'avez dit que vous tenez à participer à un événement samedi soir et vous voulez rester pour pouvoir le faire.
    Je vois que les gens sont d'accord. Très bien.
    Des voix: D'accord.
    Le président: C'est réglé.
    Nous allons inviter nos prochains témoins à venir s'asseoir.
    Bonjour à tous. Nous reprenons nos travaux. Nous poursuivons notre étude sur les aspects économiques liés aux services de police au Canada.
    Pour ce groupe de témoins, nous allons entendre d'abord le témoignage de Tammy Thompson, coordonnatrice du programme START. Les documents ont été distribués hier ou la semaine dernière, et vous les avez reçus encore une fois ici aujourd'hui.
    Nous recevons également Walter Tielman, du gouvernement du Manitoba. Il est directeur de secteur au ministère de la Justice, Région des lacs, Services correctionnels de la collectivité et de la jeunesse.
    Nous espérons également entendre le témoignage par téléconférence — quoique la communication n'ait pas encore été établie — de Christine Tell, ministre des Services correctionnels et de la Police, ainsi que de Dale McFee, sous-ministre des Services correctionnels et de la Police, au gouvernement de la Saskatchewan.
    Nous vous remercions de vous joindre à nous. Certains d'entre vous ont pu être ici pendant la première heure et ont eu l'occasion d'entendre le témoignage du chef Knecht et de M. Gruson.
    Nous n'avons toujours pas pu établir la communication avec les témoins qui sont à Regina. Ils vont devoir se joindre à nous en cours de route, mais nous pouvons peut-être commencer et inviter Mme Thompson à prendre la parole en premier.

  (0950)  

    Bonjour, monsieur le président, et bonjour aux membres du comité. J'aimerais vous remercier de me donner l'occasion de comparaître devant vous ce matin pour parler du programme START et de notre approche multidisciplinaire touchant le travail auprès des jeunes à risque et de la façon dont cela est lié à votre étude des aspects économiques liés au service de police.
    Il y a 11 ans, les membres de notre collectivité du Manitoba ont décidé de travailler ensemble pour aider les jeunes et leur famille, les plus importants consommateurs de services de police, de services à l'enfance et à la famille et de services de probation, le groupe où les problèmes scolaires étaient également les plus importants. Ces organismes ont décidé de cibler les jeunes et leur famille qui avaient utilisé leurs services et qui pourtant ne semblent pas en avoir tiré profit.
    Cette collaboration a pris pour nom Selkirk Team for At-Risk Teens, ce qui est devenu le programme START, et des services de santé mentale, de santé publique et de lutte contre la toxicomanie ont rapidement décidé d'y participer. Jusqu'ici, cette collaboration a donné lieu à plus de 1 800 conférences de cas touchant des jeunes à risque âgés de 11 à 18 ans, dans le but de cerner les jeunes à risque, de préparer un plan à leur intention et de leur proposer des interventions et de l'aide afin d'en faire des membres productifs de la collectivité.
    La clé du modèle START, c'est que le jeune et les membres de sa famille participent; ils font partie de l'équipe multidisciplinaire et peuvent parler librement de leurs problèmes véritables et y chercher des solutions. Il est nécessaire de comprendre les motifs d'un comportement donné si l'on veut élaborer un plan utile qui fournit au jeune un réseau de soutien adapté et qui augmente ses chances de réussite, tout en diminuant le recours aux services sociaux et aux services de police. La responsabilisation est un aspect important de ce modèle, pour le jeune, pour la famille et pour les organismes. Le programme START propose aussi une approche à long terme — de six mois à quelques années — si la gravité de la situation le justifie, car nous avons constaté que, même s'il est important de désamorcer une situation de crise, cela ne suffit pas à fournir les compétences nécessaires pour empêcher qu'une autre crise ne survienne.
    De nombreuses collectivités ont mis en place des initiatives de collaboration interorganisationnelles qui finissent par s'éteindre ou qui ne produisent pas de résultats; les membres ont en effet un emploi à temps plein, et il leur devient difficile de demeurer efficace, surtout quand il n'y a pas eu de consentement à l'échange d'information. Le programme START prévoit la présence d'un coordonnateur dont la responsabilité consiste à convoquer et à présider les conférences de cas concernant un jeune, à s'assurer que le jeune et les membres de sa famille ont le sentiment d'être écoutés et qu'ils participent au processus, à défendre les intérêts du jeune et à assurer un suivi touchant les plans qui ont été élaborés pour garantir que toutes les étapes seront franchies et qu'au bout du compte le jeune aura de meilleures chances de réussir sa vie, ce qui suppose le consentement à l'échange de ces informations. Ce modèle fonctionne très bien, même dans les petites collectivités, où les ressources sont moins nombreuses ou lorsque les travailleurs doivent couvrir une vaste région, puisque le coordonnateur est en mesure de s'assurer qu'ils sont informés de tous les problèmes ou enjeux nouveaux qui concernent le client, même si aucune visite à ce client n'est prévue avant deux ou trois semaines.
    Le coordonnateur du programme START occupe un bureau du détachement de la GRC. Les policiers peuvent donc facilement lui envoyer des jeunes qui ont exigé de nombreuses interventions, et le coordonnateur peut facilement fournir aux policiers des informations pertinentes, lorsque le besoin s'en fait sentir. Nous avons constamment montré que, lorsqu'un jeune est dirigé vers le programme START, le nombre d'interventions de la GRC diminue. Les tribunaux de notre région ont reconnu les avantages du programme START et ont intégré la participation à ce programme à leurs décisions. Il nous arrive souvent de fournir aux procureurs de la Couronne et aux comités de justice des informations qui les aident à prendre des décisions plus éclairées. En outre, nous tenons un dossier qui contient toute l'information nécessaire fournie par chacun des organismes pour chacun des jeunes, et il est très utile car un organisme donné y trouve rapidement toutes les informations dont il a besoin pour prendre la décision la plus avisée quant à la façon d'intervenir.
    Notre dernière évaluation, qui a été financée par les Services nationaux de prévention du crime, présente des constatations très favorables à l'égard du programme, un argument en faveur d'une plus grande collaboration interorganisationnelle, et indique que la grande majorité de nos clients obtiennent des résultats positifs, et ce, malgré l'augmentation constante du nombre de clients dirigés vers le programme chaque année et malgré le niveau de risque des clients avec lesquels nous travaillons. Trois autres collectivités du Manitoba ont adopté notre modèle de programme, qui fonctionne tout aussi bien avec des populations différentes.
    Le programme START est géré et financé par les organismes communautaires impliqués et par les trois ordres de gouvernement. Malheureusement, cette année, notre principal bailleur de fonds, Service Canada, a coupé les vivres au programme START et à toutes les autres collectivités qui utilisent ce modèle, nous laissant aux prises avec un manque à gagner probablement insurmontable, et il nous faut trouver une autre source fédérale de financement. Cette absence de financement créé également des problèmes dans d'autres régions qui cherchent à adapter ce modèle à leurs collectivités, mais n'arrivent pas à obtenir le soutien de tous les ordres de gouvernement.
    On dit constamment que l'application de la loi constitue maintenant la première ligne d'intervention pour tous les enjeux de nature sociale, et cela ne changera pas tant que nous n'aurons pas trouvé la façon de coordonner les ressources de l'ensemble des organismes afin de nous attaquer aux racines de ces comportements.
    J'ai affiché dans mon bureau une citation de Walter Barbee: « Si vous devez répéter la même chose des milliers de fois à un enfant et qu'il ne comprend toujours pas, ce n'est pas parce que l'enfant n'apprend pas vite. »

  (0955)  

    Si les services de police reçoivent de la même maison plusieurs appels pour les mêmes motifs, et cela arrive souvent, c'est que nous ne nous sommes pas attaqués au vrai problème et que nous devons envisager la situation sous un autre angle. C'est ce que fait le programme START.
    Merci.
    Merci beaucoup, madame Thompson.
    Nous poursuivons avec M. Tielman.
    Mesdames et messieurs, membres du comité, monsieur le président, c'est réellement un honneur et un privilège pour moi de comparaître devant vous aujourd'hui. Merci de m'avoir donné l'occasion de venir discuter avec vous du programme START et de son approche du travail auprès des jeunes et des familles à risque élevé vivant dans nos collectivités.
    Le programme a vu le jour pour répondre aux besoins de divers organismes de la ville de Selkirk qui désiraient élaborer des processus leur permettant de communiquer efficacement avec les jeunes et les familles à risque élevé et de dresser des plans avec eux. Les organismes se réunissaient déjà pour discuter des cas, avec les meilleures intentions du monde, mais souvent de manière improvisée et désorganisée.
    Les divers organismes n'avaient pas non plus établi de processus objectif sur la façon de s'échanger des renseignements ni sur l'opportunité de le faire. Ils échangeaient parfois de l'information, d'autres fois refusaient de le faire. Cela dépendait souvent de la motivation des divers employés et du temps dont ils disposaient pour communiquer avec les autres organismes et organiser avec eux des réunions.
    De plus, il est rare que le mandat d'un organisme rende obligatoires l'échange d'information et la collaboration dans des dossiers. Au contraire, la confidentialité est imposée et nuit à l'échange d'information entre organismes.
    Les politiques en matière de gestion des cas laissent souvent entendre que la collaboration interorganisationnelle est la meilleure façon de faire efficacement son travail, mais il revient souvent à un employé ou à un gestionnaire de programme en particulier de décider dans quelle mesure il veut collaborer avec les autres organismes. En conséquence, en raison du manque de temps et de la charge de travail, contraintes importantes, les employés cherchent le plus souvent à respecter d'abord le mandat de leur organisme et laissent de côté les besoins des jeunes, des familles et de l'ensemble de la collectivité.
    Le programme START corrige la situation grâce à un coordonnateur, qui organise et coordonne les conférences de cas de ses propres clients ou les conférences de cas multiorganisationnels. Les responsables du programme ont officialisé ce protocole d'échange d'information et créé un processus de gestion multiorganisationnel permettant de s'occuper des jeunes à risque élevé et des membres de leur famille.
    START a obtenu de très bons résultats et a éliminé les obstacles à l'échange d'information existant dans les divers ministères. Il a donc été possible, ensuite, d'orienter les mandats et les procédures opérationnelles des divers ministères vers un ensemble commun d'objectifs et de les appliquer à l'élaboration d'un plan de gestion du cas en collaboration avec le jeune et sa famille.
    Le programme START a changé la façon dont les employés de mon bureau travaillent. Je vais vous donner un exemple. Avant la création du programme START, mes employés restaient assis à leur bureau, et la quasi-totalité de leurs communications avec les employés d'autres organismes de notre collectivité se faisait par téléphone ou par ordinateur, en grande partie en raison du manque de temps. C'est ainsi qu'ils effectuaient leurs tâches et s'acquittaient de leur mandat, c'est-à-dire, souvent, sans que les autres organismes en aient connaissance ou se trouvent concernés. Aujourd'hui, tous mes employés participent régulièrement aux conférences de cas de START avec les employés d'autres organismes, à divers endroits de la collectivité, et les organismes participant au programme travaillent tous de concert à la réalisation d'un ensemble commun d'objectifs orientés sur la gestion de cas. Cette approche fait en sorte que les divers organismes s'acquittent de leurs obligations au chapitre de la gestion de cas à l'égard d'un jeune en particulier et de sa famille.
    Le personnel explique en outre, à chacune des conférences de cas, quels services il a pu ou non fournir, ce qui augmente d'autant sa responsabilisation à l'égard des services. De plus, lorsqu'on cerne une lacune au chapitre des services, l'équipe de la gestion de cas de START élabore une stratégie pour trouver des moyens de les combler.
    Le programme START a eu comme résultat de favoriser la poursuite des études chez les enfants, d'améliorer le fonctionnement familial et de rendre les jeunes responsables de leur comportement.
    Les retombées du programme sont importantes. Comme l'a dit un de mes employés: « START est une ressource très précieuse pour la collectivité et pour les familles qui essaient de stabiliser leurs enfants. Le programme permet de réunir les ressources nécessaires, qui n'avaient pas auparavant été cernées. »
    Le sergent Mark Morehouse, du détachement de Stonewall de la GRC, a dit que, au cours de la première année d'existence du modèle START dans sa collectivité, le détachement avait reçu à peu près 50 p. 100 moins d'appels relatifs à des jeunes.
    Le ministère de la Justice de la province soutient financièrement trois programmes inspirés du modèle START, au Manitoba, pour un total de 21 000 $, investissement très faible si on le compare aux avantages de ces services pour les jeunes à risque élevé, leur famille et les collectivités.
    Les retombées de START sont également durables et de nature préventive, puisque le programme oriente les jeunes et leur famille en leur proposant des choix positifs et prosociaux.
    La recherche a démontré que les approches multiorganisationnelles de gestion des cas sont efficaces, et le programme START en a fourni une autre preuve. Nos évaluations annuelles l'ont confirmé, et notre dernière évaluation, financée par les Services nationaux de prévention du crime, a montré que notre travail est efficace à court terme, et qu'il a des qualités préventives à long terme. Cette évaluation nous a également donné une idée des améliorations à apporter, et nous nous y fierons à l'avenir.
    Je crois personnellement que le programme START et les programmes multiorganisationnels de gestion des cas inspirés du même modèle représentent, pour les gouvernements et les organismes, un bon moyen de répondre à l'avenir aux besoins de la société au chapitre de ses familles les plus troublées.

  (1000)  

    Je ne crois pas que nous puissions nous en passer.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Nous avons maintenant un témoin de Regina qui communique avec nous par vidéoconférence. M'entendez-vous?
    Nous vous entendons parfaitement bien.
    Nous n'avons pas encore d'image. Mais le comité ne vous a pas convoquée pour vous regarder; il vous a convoquée pour vous écouter.
    Nous pourrions peut-être tout de suite écouter votre déclaration préliminaire. Je ne sais pas si je vous ai déjà présentée. Nous recevons aujourd'hui Mme Christine Tell, ministre des Services correctionnels et de police.
    Le sous-ministre, M. McFee est-il à vos côtés?
    Très bien. Il me semble que cela ne fait qu'une semaine ou deux, peut-être, que nous avons parlé avec vous. C'est agréable de vous avoir à nouveau avec nous ce matin.
    Passons à votre déclaration préliminaire.
    Bonjour. Merci, messieurs et mesdames les membres du comité, de nous donner l'occasion de vous présenter nos déclarations préliminaires, ce matin.
    C'est pour moi un plaisir de pouvoir présenter à votre comité le travail absolument innovateur qui se fait en Saskatchewan dans le domaine de la sécurité publique et de lui présenter de nouvelles perspectives en matière de service de police.
    Bien que les taux généraux de criminalité diminuent, comme vous le savez probablement, la Saskatchewan arrive en tête de liste, au pays, pour de nombreuses catégories de crime. Ce n'est pas le genre de tendance dont nous sommes le plus fiers, mes collègues du cabinet et moi-même.
    Des statistiques de ce genre exigent la prise de mesures. En Saskatchewan, le gouvernement, les collectivités et les particuliers ont examiné froidement la réalité des chiffres, tant le nombre de crimes que les coûts que suppose la lutte contre la criminalité.
    Nous savons qu'il est de plus en plus difficile, partout en Amérique du Nord, de trouver des ressources, étant donné que l'environnement policier est de plus en plus exigeant. En même temps, les coûts administratifs des services de police, ou, puisqu'on en parle, du système de justice pénale, sont en train d'augmenter. Les crimes, et les criminels qui commettent ces crimes, sont de plus en plus spécialisés et complexes. Tous ces facteurs, ensemble, font que la situation devient intenable.
    Le sous-ministre des Services correctionnels et de police de la Saskatchewan, Dale McFee, vous a déjà parlé du travail incroyable qui se fait dans plusieurs collectivités de la province dans le but de mettre en place un fondement pour la sécurité et le bien-être des collectivités. Comme il l'a souligné, tout a commencé à Prince Albert, quand la ville a mis en oeuvre une initiative de mobilisation communautaire afin de réduire la criminalité.
    Dans une perspective plus large, les modèles Hub et COR, utilisés à Prince Albert et repris dans plusieurs collectivités de la province, témoignent des raisons pour lesquelles nous, les Saskatchewannais, avons acquis une réputation d'innovateurs. À partir d'une toute petite idée, nous avons lancé un mouvement qui gagne chaque jour en importance. Cela nous fait bien sûr très plaisir.
    La dernière fois qu'il s'est adressé à vous, Dale McFee a expliqué que, selon les rapports concernant Prince Albert, les modèles Hub et COR ont entraîné, à l'échelle de la ville, une diminution du taux de crimes violents de 11,8 p. 100 la première année et de 31,9 p. 100 la deuxième année.
    À titre de ministre responsable des services correctionnels et de police, je puis vous affirmer que nous sommes fiers d'être reconnus pour ce travail, tant au pays qu'à l'étranger. En tant que membre du gouvernement d'une province où la population et l'économie affichent une très forte croissance, je puis vous dire que l'excitation est palpable. Nous croyons que notre potentiel est illimité. Mais je puis aussi vous dire que c'est un peu inquiétant. C'est inquiétant parce que nous savons que nous devons avoir mis en place des fondements appropriés pour nous assurer que cette croissance sera durable et pour atténuer toute conséquence potentielle liée à la croissance, par exemple les conséquences d'un marché de l'emploi en effervescence, des déficits au chapitre de l'infrastructure et de l'augmentation de la criminalité.
    De fait, il y a quelques mois seulement, notre premier ministre, Brad Wall, a annoncé le plan de croissance de la Saskatchewan. Ce programme propose une approche claire et réfléchie en matière de croissance, s'appuyant sur des ressources appropriées en vue d'assurer la stabilité des fondements économiques et sociaux nécessaires. Ces fondements sont entre autres des collectivités sûres et en santé. C'est dans cet esprit que le gouvernement de la Saskatchewan a lancé l'initiative de création de partenariats pour réduire la criminalité. Le soutien du gouvernement se traduit par du financement, des ressources techniques et des services innovateurs, tous fournis par mon ministère, et il donne aux collectivités qui veulent mettre elles-mêmes en place des mécanismes assurant leur sécurité et leur bien-être les moyens de le faire.
    Par sa nature, le volet Hub, qui est un processus de mobilisation de la collectivité, suppose la participation de représentants du système de justice pénale, des services de police et des agents de probation. Il exige la participation de représentants des organismes oeuvrant dans le domaine des services sociaux, de la santé et de l'éducation. Pour être pertinent, le volet Hub doit adopter une approche intégrale, dite « du berceau à la tombe » pour répondre aux besoins des personnes à risque dès le moment où leur comportement à risque se manifeste jusqu'à moment où, en raison de leur âge, ils quittent le système.
    Les experts ont établi que c'est vers l'âge de 12 ans qu'une personne commence à adopter des comportements antisociaux. Le risque reste présent jusqu'à l'âge de 24 ans environ. C'est pour cette raison que la province, lorsqu'elle a annoncé récemment la mise en oeuvre d'un programme axé sur l'enfant et la famille, visant à créer des familles fortes et saines pouvant tirer avantage de la croissance de la Saskatchewan, a tenu compte de cet aspect de la situation au moment d'élaborer ses objectifs.

  (1005)  

    Si nous pouvions prendre ces jeunes en main assez tôt, pour leur assurer un niveau d'éducation suffisant, une bonne santé physique et mentale et l'appui de la famille et de la collectivité, nous pourrions leur éviter de subir les nombreuses influences négatives qui entraînent une perte de potentiel chez nos jeunes.
    Bien sûr, il est question ici de réduire le coût des services de police qui incombent à tous les ordres de gouvernement. Mais nous faisons plus que cela, en Saskatchewan, et j'aimerais vous en parler.
    Grâce à notre travail, axé sur la création de partenariats pour réduire la criminalité, nous mettons l'accent sur les ressources humaines que fournissent nos ministères, dans le cadre du continuum de mesures de soutien. Vous voudriez bien savoir ce que je veux dire par là. Les représentants du système de justice pénale ne peuvent travailler isolément des services sociaux ou des services de santé; nous savons en effet qu'environ 30 p. 100 des personnes arrêtées pour ce que l'on appelle des délits mineurs ont des problèmes de santé mentale. Nous ne pouvons pas assurer la réinsertion sociale des délinquants qui ne peuvent pas obtenir d'emploi parce qu'ils ne savent pas lire. Nous devons aussi inclure les experts du domaine de l'éducation.
    J'aimerais croire que nous avons une vision holistique de la façon dont notre gouvernement s'organise en vue de lutter contre ces problèmes sociaux. Il faut que les stratégies qui en résultent soient axées sur le client. L'ancien paradigme, selon lequel on exécutait des programmes conçus en fonction de la structure bureaucratique, n'a plus de raison d'être. Nous devons chercher à savoir quelle est la meilleure façon de servir les citoyens et organiser nos structures administratives en conséquence.
    J'aimerais maintenant prendre quelques minutes pour discuter des autres avenues que la province explore pour trouver des moyens d'atténuer l'augmentation des coûts des services de police. Nous examinons entre autres solutions d'étendre le modèle déjà en place, celui des gendarmes spéciaux, et de leur donner d'autres tâches. À l'heure actuelle, en Saskatchewan, les gendarmes spéciaux ont suivi une formation qui leur permet d'appliquer la loi dans les collectivités des Premières Nations uniquement. L'avantage, c'est que les Autochtones qui suivent une formation de gendarme spécial et qui exercent ce métier dans leur collectivité d'origine connaissent bien leur propre culture, les normes sociales et les gens avec qui ils travaillent. De la même façon, affecter des gendarmes spéciaux dans d'autres collectivités, où ils peuvent faire appliquer les règlements locaux ou assumer d'autres tâches moins risquées, liées à la police communautaire, libère des agents de police assermentés, qui peuvent assumer les tâches plus difficiles liées aux crimes et aux criminels à risque élevé. Si l'on étendait ce concept à l'échelle du système de justice pénale, on verrait que les agents correctionnels envisagent d'adopter un modèle semblable touchant les délinquants à faible risque en surveillance dans la collectivité. En appliquant le modèle des gendarmes spéciaux aux agents de probation, on pourrait libérer d'autres ressources, qui assureraient une surveillance plus étroite des délinquants exposés à un risque plus grand de commettre des crimes plus graves ou plus violents.
    Ce qu'il faut comprendre, ici, c'est qu'en encourageant cette application innovatrice de ce qui pourrait sembler une ancienne idée, la Saskatchewan crée de nouvelles pratiques qui sont déjà un gage de réussite. Si l'on veut multiplier les histoires de réussite, nous devons nous assurer de recueillir les éléments de preuve les plus précis et les plus pertinents. La Saskatchewan a mis en place des partenariats avec des universitaires du domaine des sciences sociales afin de créer un centre d'excellence de la sécurité des collectivités. Dale McFee vous donnera plus de détails sur cette initiative. Laissez-moi seulement dire que ce travail, qu'il se fasse dans un édifice en bonne et due forme ou sur les réseaux virtuels, nous donnera la capacité de réunir les éléments de preuve universitaires et les éléments médico-légaux dont nous avons besoin pour perfectionner nos méthodes d'élaboration et de mesure des modèles de la sécurité communautaire.
    Je peux vous dire que Dale a l'appui du gouvernement provincial de la Saskatchewan et qu'il peut poursuivre les mesures et les initiatives qu'il a élaborées et qui sont, pour son équipe et pour lui, des priorités. J'espère que mon gouvernement pourra lui aussi compter sur vous et sur votre appui de façon que nous puissions donner plus d'envergure aux solutions que nous proposons pour réduire la criminalité et les coûts sociaux et économiques connexes.
    Merci.

  (1010)  

    Merci, madame la ministre.
    Monsieur le sous-ministre McFee, auriez-vous une déclaration à faire, vous aussi?
    Non. Je suis ici simplement pour répondre aux questions éventuelles.
    Très bien. Merci.
    Nous allons donc tout de suite passer à la première série de questions.
    Madame Bergen, s'il vous plaît. Vous avez sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Merci à tous nos invités d'être venus ici aujourd'hui.
    Il est clair que le message est très similaire, qu'il vienne de Calgary, de Halifax ou de Toronto, ou, comme aujourd'hui, de collectivités rurales comme Selkirk et Stonewall, au sujet de cette approche Hub et COR, ou d'une approche multiorganisationnelle.
    Ce que les membres du comité voudraient savoir, c'est comment, concrètement, ces approches permettent d'économiser les ressources tout en nous assurant que les services de police sont plus efficients, et je crois que c'est ce que nous comprenons, en ce qui concerne la prévention, le nombre réduit d'appels, etc.
    J'aimerais parler surtout du programme START. Lorsque j'ai rencontré Tammy et Walter, la première fois, pendant notre semaine de repos, il y a quelques semaines, j'ai été enthousiasmée parce que cet exemple concernait une collectivité rurale. Nous n'avons pas entendu beaucoup d'exemples de collectivités rurales qui ont été capables de faire cela. C'est un peu différent, également, parce qu'il semble que l'approche soit dirigée non pas par les services de police, mais plutôt par le programme en place, qui fait ensuite intervenir différents organismes.
    J'ai également été impressionnée d'apprendre que des recherches ont déjà été menées. L'université de Winnipeg a effectué une recherche sur le programme START, si je ne me trompe pas. Pourriez-vous nous parler un peu de ces observations? Pourriez-vous nous parler en particulier des observations qui concernent la réduction de la criminalité et des liens directs avec les services de police? Qu'est-ce que la recherche vous a appris?
    La recherche a vraiment mis en relief tous les aspects que nous avions toujours considérés comme étant les plus fructueux. Ce résultat a ainsi dire justifié à lui seul l'évaluation. Nous savions que nous réussissions très bien à réunir les différents organismes, à amener les gens à s'asseoir avec nous et à communiquer, à mettre en place une base communautaire pour nous attaquer au problème des jeunes à risque — ce sont les jeunes qui nous posent problème. Notre objectif était donc de travailler de concert avec ces jeunes, plutôt que de travailler de manière isolée.
    Nous affichons un taux fantastique de retour à l'école de jeunes décrocheurs, ce qui est de toute évidence un facteur important quand on veut que les jeunes restent en dehors des cercles criminels.
    Nous avons observé de formidables retombées. Nous avons interviewé des agents de police au sujet de notre programme. Tous, sans exception, ont dit qu'ils avaient réellement l'impression que le programme avait permis à la GRC d'établir de meilleures relations avec les jeunes de la collectivité, en particulier les jeunes à risque, et que c'est grâce à notre programme que la GRC a vu le nombre d'appels de service diminuer. Les résultats sont tellement nombreux.
    Est-ce que la réduction du nombre d'appels est une opinion des agents de la GRC, ou est-ce que les chercheurs ont réellement observé ce phénomène?
    La recherche s'est faite de trois manières. Nous avons analysé une base de données, nous avons mené des entrevues et nous avons également mené une enquête anonyme. Nous avons compilé le résultat de ces trois processus pour en arriver à cette conclusion.
    Est-ce que la diminution du nombre d'appels était exprimée en chiffres ou en pourcentage?
    Nous n'avons pas obtenu ces détails-là. L'exemple qu'on nous a donné est celui de Stonewall, et Walter en a déjà parlé; c'est le sergent Mark Morehouse qui a affirmé que, la première année où le modèle a été mis en oeuvre, les incidents impliquant des jeunes avaient diminué de 50 p. 100.
    De 50 p. 100?

  (1015)  

    Oui.
    Je sais que vous avez parlé un peu du financement de ce programme, et je crois vous avoir dit que notre gouvernement avait investi 40 millions de dollars dans la stratégie nationale de prévention de la criminalité. Nous avons également décidé que le Fonds de lutte contre les activités des gangs de jeunes serait une initiative permanente. Je vous proposerais donc de jeter un oeil sur ces deux programmes, car il pourrait y avoir pour vous des occasions de collaborer... je sais que vous avez dit qu'il y avait une petite lacune; ce n'est pas une lacune énorme, mais elle a de toute évidence des répercussions sur votre travail.
    Notre gouvernement a toujours été constant et il a en fait pris des mesures proactives pour soutenir des stratégies nationales de prévention du crime et de lutte contre la criminalité, et nous soutenons sans réserve le type de travail que vous faites, c'est-à-dire un travail à petite échelle, à l'échelle locale, axé sur les résultats où il est réellement possible de mesurer les résultats. Vous pouvez donc compter sur l'appui continu du gouvernement. Je vous encouragerais à jeter un oeil sur ces programmes.
    J'ai également trouvé intéressant que vos programmes aient d'autres sources de financement. Différents organismes, par exemple les commissions scolaires, versent des fonds.
    Tout à fait.
    Pourriez-vous nous expliquer rapidement comment ça fonctionne? Je vais ensuite demander à la ministre de la Saskatchewan si le programme de la province fonctionne de la même façon, si l'approche Hub et COR, elle aussi, tire son financement de plusieurs sources.
    Madame Thompson, pourriez-vous, s'il vous plaît nous expliquer comment votre programme est financé?
    Notre programme est véritablement un programme communautaire. Nous sommes dirigés par un conseil d'administration composé de membres de la direction de notre collectivité, de chacun des organismes représentés, et tous ces gens, ou la majorité d'entre eux, sont également des bailleurs de fonds du programme.
    Nos principaux bailleurs de fonds, qui étaient autrefois Service Canada et le ministère de la Justice, sont maintenant le ministère des Enfants et des Perspectives pour la jeunesse, des Services à l'enfance et à la famille du Manitoba; les divisions scolaires de chaque région, en ce qui nous concerne la division scolaire Lord Selkirk; la Ville de Selkirk et les deux municipalités rurales environnantes; et, également, pour l'aide en nature, le détachement de la GRC. C'est de là que viennent nos espaces de bureau et l'ensemble de l'équipement.
    Et la GRC vous a donné une attestation de sécurité, et vous savez donc à quel moment... C'est bien là la nature de votre relation avec le service de police?
    Oui.
    Il me semble me rappeler quelque chose que M. McFee a dit, la dernière fois qu'il était ici, qui m'a surprise et a surpris aussi quelques-uns des membres du comité. Il a dit que cela tenait au leadership, non pas à la propriété, et je crois que nous avons compris que ce que vous dites est vrai.
    Madame Tell, merci beaucoup d'être venue ici, et nous vous félicitons pour tout ce qui se passe de bien en Saskatchewan.
    Pourriez-vous commenter ce que Mme Thompson vient de dire? Le processus est davantage la responsabilité de la collectivité, et pourtant, on semble en tirer les mêmes résultats. Pourriez-vous faire une comparaison avec les programmes Hub et COR? Parlons-nous de la même chose? Encore une fois, c'est ce qu'on appelle un modèle de propriété, mais il est différent.
    Oui, et le programme Hub ne coûte rien, dans les différentes collectivités. C'est tout simplement une réunion de l'ensemble de ces organismes — services sociaux, santé et police. Le programme est également dirigé par un conseil d'administration, et vous avez donc raison quand vous dites que cela n'appartient pas à une organisation ou à une entité en particulier. C'est plutôt, en réalité, à la collectivité.
    La province verse elle-même un financement de 450 000 $ pour le programme COR. Il y a un directeur général et deux analystes. Ce sont eux qui mènent les recherches dans le but de soutenir les diverses entités communautaires. Celles-ci, les services sociaux ou les services de santé, versent chacun 25 000 $ par année pour soutenir les initiatives réalisées par les diverses collectivités et par le programme Hub, et aussi, évidemment, pour soutenir le centre d'excellence, ou le COR, dans les grandes lignes.
    Nous allons maintenant commencer la prochaine série de questions.
    Madame Michaud.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je veux d'abord remercier les témoins de comparaître.
    Mes premières questions s'adressent à Mme Thompson.
     Le programme START, que vous nous décrivez ici, est extrêmement intéressant. J'ai été un peu déçue d'apprendre que votre financement avait été réduit récemment.
     Vous a-t-on donné des explications quand le financement de Service Canada vous a été retiré?

[Traduction]

    Selon ce que j'ai compris, le cadre de financement qui constituait notre source de financement, Connexion compétences, a légèrement été modifié. Le volet qui nous verse un financement n'existe plus.

[Français]

    Pouvez-vous nous donner plus de détails?

[Traduction]

    De quel volet tiriez-vous votre financement?
    Connexion compétences.

[Français]

    Et c'est ce qui a été éliminé en entier.
    Quelles sont les répercussions directes de cette réduction sur le programme?

[Traduction]

    Le budget de fonctionnement du programme START n'est pas très élevé, franchement, et la perte de ce financement peut réellement entraîner la disparition du programme, à long terme.

[Français]

    Pouvez-vous chiffrer la perte que vous avez subie?

[Traduction]

    Le financement que nous recevions de Connexion compétences était de 20 000 $ par année, pour le programme START uniquement. Au total, pour l'ensemble des programmes qui se sont inspirés de notre expérience, au Manitoba, le financement serait de 37 000 $.

  (1020)  

[Français]

    Et quel est le budget de fonctionnement du programme START, exactement?

[Traduction]

    C'est légèrement différent selon le modèle, mais, par exemple, le programme START — notre programme est le plus important — exige un budget de fonctionnement d'environ 70 000 $, en espèces, et il y a aussi un financement en nature d'environ 20 000 $ qui s'ajoute.

[Français]

    Je vous remercie de l'information.
    Pouvez-vous nous parler un peu plus longuement du rôle de la GRC au sein du programme? Quelles sont ses responsabilités spécifiques et comment est-elle reliée au programme?

[Traduction]

    La GRC fait partie de notre comité directeur. Elle fait également partie de notre conseil d'administration, lequel détermine la façon dont le programme va fonctionner et vers où il s'oriente. J'occupe un bureau dans le détachement, mais je ne suis pas une employée du détachement. C'est un peu une relation en symbiose. La GRC m'aide, je l'aide, et tout cela, dans le but d'aider les clients avec lesquels nous travaillons.
    Je suis en mesure d'aider les agents de la GRC lorsqu'ils ont affaire à mes clients et qu'ils n'ont pas toutes les informations, et ils peuvent m'aider quand une situation donnée survient dans la vie de mes clients.

[Français]

    En lisant les documents que vous nous avez fournis, j'ai pu constater que les membres de la GRC ayant participé au programme avaient vu qu'il y avait eu des effets bénéfiques directs et que certains étaient associés à leur participation au programme.

[Traduction]

    Oui, nous recevons une aide précieuse de la GRC.
    Je ne sais pas de quelle autre façon le présenter. Nous savons tous deux que nous nous aidons l'un l'autre. Elle nous aide beaucoup, non seulement sur le plan financier, mais également sur le plan des idées. Les agents sont toujours prêts à prendre notre défense. Une fois que vous avez vu comment le programme fonctionne et ses résultats, quand vous avez vu ses répercussions dans une collectivité, c'est très difficile de ne pas vouloir faire tout ce qu'il est possible de faire pour le soutenir. Nous sommes une petite ville, et nous travaillons dans quatre petites collectivités.
    Il suffit de se promener dans la rue pour voir ce qui a changé. Il nous arrive de rencontrer un jeune qui autrefois se tenait toujours sur un coin de rue, sous l'influence de la drogue ou de l'alcool, et qui, du jour au lendemain, retourne à l'école avec son sac à dos. C'est réellement un résultat, à nos yeux, nous le voyons bien. C'est pour ces raisons que nous sommes tout à fait passionnés par ce programme.

[Français]

     Nos témoins précédents nous ont dit qu'il était extrêmement difficile de réduire la demande dont les forces policières un peu partout faisaient l'objet et que ça les contraignait énormément dans leurs opérations.
    Or un programme comme le vôtre serait une excellente façon d'assurer une meilleure gestion des coûts au sein des forces policières. Ça préviendrait certains appels et ça diminuerait la demande de service.

[Traduction]

    Je ne peux qu'être d'accord.
    Il est certain que les membres du détachement avec lesquels je travaille m'ont dit la même chose. Ils ont vu une réduction des demandes qui leur étaient adressées. Comme je l'ai dit, nous avons comparé les chiffres. Nous avons examiné les dossiers de nos clients, nous avons relevé le nombre de clients qui ont été dirigés vers le programme, et nous avons pu constater qu'il y a beaucoup moins d'appels de service qu'auparavant.

[Français]

    Je vous remercie beaucoup.
    J'aimerais entendre les commentaires de Mme la ministre Tell sur cette dernière affirmation, à savoir que de tels programmes, un peu comme pour l'approche HUB et COR, permettent une meilleure gestion des coûts en réduisant la demande de service.

[Traduction]

    Oui, bien sûr.
    Nous observons de telles réductions à Prince Albert, en particulier. Prince Albert compte environ 40 000 habitants et, comme Dale l'a dit plus tôt, il est évident que le nombre d'appels de service et de crimes signalés a diminué.
    Nous devons cependant faire attention à une chose, et j'aimerais que le comité en soit bien conscient, c'est que nous offrons des services de police et nous affectons des agents de police dans les diverses collectivités en fonction de la population. Je suis convaincue que cela se fait de la même manière partout au Canada. Je ne sais pas si ces initiatives permettront au bout du compte de réduire la demande en agents de police. Cependant, il est évident que nous observerons un changement au chapitre de la mobilisation des services de police à l'échelle du pays, dans toutes les collectivités, dans notre province. Mais nous devrons toujours en embaucher, et les services de police seront toujours, jusqu'à un certain point, nécessaires.

  (1025)  

[Français]

    Certainement.

[Traduction]

    Merci.
    Il vous reste cinq secondes, alors vous êtes retiré.
    Merci beaucoup.
    Donnons la parole à M. Leef, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président, et je remercie tous nos témoins.
    Mes premières questions s'adressent à la ministre Tell.
    Madame la ministre, je suis le député du Yukon. Sur notre territoire, la GRC et les services correctionnels ont l'habitude de collaborer étroitement pour offrir les services du bloc cellulaire, et notre centre correctionnel gère tous les services du bloc cellulaire.
    Est-ce la procédure dans la province de la Saskatchewan ou dans la région du Pacifique? Le cas échéant, quelle est votre expérience?
    Selon nous, il y a un autre degré de soins que nous pouvons offrir à l'extérieur du centre correctionnel... Séparément du centre proprement dit, mais un autre niveau de soins. La police éprouve surtout de la difficulté à offrir les services du bloc cellulaire aux personnes ayant une déficience mentale.
    Pouvez-vous nous donner votre point de vue à ce chapitre?
    Je vais céder la parole à Dale. Il y a certaines nuances ici. Il ne fait aucun doute que nous collaborons dans une certaine mesure avec la GRC dans nos établissements correctionnels.
    Je vais laisser Dale répondre.
    Il s'agit d'une excellente question.
    Nous n'avons pas votre degré d'intégration. Nous regardons le système intégral, dont le transport des prisonniers. Il y a là tout un mécanisme lié à la sécurité. Certes, c'est un secteur de risque élevé; vous le savez bien, j'en suis certain. Une poursuite judiciaire coûte des millions de dollars, et tout revient aux soins de la personne ou du client. Nous nous penchons actuellement sur cet aspect, y compris la fusion des deux volets de notre ministère chargé des adultes et des jeunes. Cela est pour nous une grande source de possibilités. Nous nous trouvons vraiment devant une situation de pénurie chez les jeunes et de surpopulation chez les adultes, alors nous voulons examiner le plan directeur de l'établissement pour tirer le maximum de cet aspect.
    Ensuite, il y a aussi le transport des prisonniers, mais il est aussi question de la gestion et de nos activités sur 24 heures. Beaucoup de services de police ont transféré des professionnels de la santé dans leur bloc cellulaire, de toute évidence, pour atténuer ce risque, parce que nombre de ces gens, plus de 80 à 95 p. 100, sont aux prises avec des problèmes de dépendance. Évidemment, lorsqu'on parle de la dépendance... Il y a environ 30 p. 100 qui ont trait à la santé mentale.
    Il y a ici de véritables possibilités, mais il faut penser différemment, comme pour toute chose. Il s'agit d'une nouvelle façon d'appréhender la réalité, et il nous importe vraiment de le faire en fonction des données probantes et des résultats. C'est pourquoi nous laissons certains experts du milieu universitaire jouer un rôle pour nous aider à comprendre.
    Merci.
    Mesdames et messieurs les représentants du programme START, vous avez fait une bonne transition vers le processus décisionnel axé sur les résultats. Bien sûr, nous étudions les aspects économiques liés aux services de police, et je crois que tous les membres du comité commencent à entendre souvent dire que les services hâtifs, multiorganismes, universels et centrés sur le client donneront les meilleurs résultats à long terme au chapitre de la réduction des coûts et de la réduction des taux de criminalité. Vous avez certes affirmé votre passion pour le programme.
    En ce qui concerne les données probantes, avez-vous établi la comparaison entre votre programme et d'autres programmes? Comment se classe-t-il? Si nous nous entendons pour être centrés sur le client et viser à obtenir le résultat dans son intérêt, alors les programmes peuvent être éphémères, et nous devons être prêts à les abandonner si les données probantes ne démontrent pas qu'ils sont les meilleurs.
    Savez-vous si d'autres entités comparent leurs programmes aux vôtres? Les promoteurs et les gens qui font de l'excellent travail dans le cadre de ces programmes sont-ils disposés à circuler d'un programme à l'autre ou à en favoriser un au détriment de l'autre? Est-ce que cela arrive?
    Parfois, nous observons un environnement compétitif sur le plan des programmes. Je l'observe certainement, car c'est une condition de survie de tout programme. Nous avons à l'esprit l'idéal du service à la clientèle, mais nous voulons tout de même maintenir nos programmes en vie. Alors, comment procède-t-on à la comparaison et à la mise en contraste de différents programmes par rapport au sien?
    Dans le cadre de notre évaluation, nous nous comparons effectivement à d'autres programmes universels en Amérique, et nous nous classons très bien.
    Quant à la comparaison avec d'autres programmes susceptibles d'entrer en concurrence avec nous dans notre région, il n'y en a pas vraiment, car nous comblons l'écart. On a créé le programme START il y a 11 ans parce que des jeunes passaient entre les mailles du filet, et tous les organismes voyaient bien que nous devions faire les choses différemment. Je dis souvent en parlant du programme START que nous appartenons à tout le monde et à personne en même temps. Nous avons été créés pour rétablir ces lacunes, et tout le monde concentre son attention sur le programme START. Si un enjeu fait surface dans la collectivité, notre comité de direction en fera part à tous les dirigeants des organismes communautaires. Nous nous faisons entendre sur cette tribune, et nous discutons de ce que nous pouvons faire pour rétablir la situation. Cela ressemble aussi au modèle Hub et COR.

  (1030)  

    Il n'y a pas beaucoup de chevauchement.
    Non, pas du tout.
    Je ne crois pas qu'il me reste beaucoup de temps. Je vais rapidement vous demander de parler de votre expérience au sein même du détachement. Quelle a été votre expérience en ce qui concerne la mise en commun de renseignements et les problèmes de protection de la vie privée?
    Elle a été très bonne. Il y a certainement des limites à ce chapitre, car la GRC détient beaucoup de renseignements confidentiels; il faut travailler dans le cadre des limites qui s'imposent. Nous n'avons jamais eu de problèmes sur ce plan. Nous menons nos activités à l'intérieur ou à l'extérieur du détachement depuis 11 ans, et il n'y a jamais eu de plaintes en ce qui concerne la communication de renseignements abusive.
    Avez-vous des recommandations à l'intention du comité concernant des décisions législatives ou opérationnelles qui seraient susceptibles de favoriser ce genre de relation à l'appui de services universels? Vous ne semblez pas connaître de problèmes en matière de protection des renseignements personnels, mais y a-t-il d'autres enjeux opérationnels ou administratifs dont nous devrions prendre connaissance pour appuyer ce travail?
    Je crois, certes, que le fait d'avoir une approche descendante... J'estime que, dans le cadre du programme START, nous avons une démarche ascendante. Nous mettons le programme en valeur et, à tout le moins dans notre province, nous tentons de faire participer les gens, et nous avons réussi; nos efforts ont été fructueux.
    Une des choses que nous constatons, c'est que, comme ce n'est pas imposé par un échelon supérieur, certains représentants d'organismes déclarent qu'ils ne croient pas vraiment au modèle, alors ils ne veulent pas participer. Cela crée un trou béant, essentiellement, lorsqu'on essaie d'accomplir quelque chose.
    Je crois que la Saskatchewan a un grand avantage dans la façon dont elle fait les choses. Cela serait pour nous fantastique. C'est cela, et la question du financement. Lorsque nous consacrons du temps à essayer de trouver des fonds, c'est du temps passé loin des jeunes avec lesquels nous travaillons, et c'est très dur, surtout lorsqu'on est dévoué à son travail et qu'on sait qu'on améliore la vie des gens. Consacrer du temps à autre chose est difficile.
    Merci beaucoup.
    Nous allons conclure la première série d'intervenants avec M. Scarpaleggia, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup.
    Je suis seulement curieux. Vous avez touché du financement fédéral en vertu de Connexion compétences. Pourriez-vous seulement me rappeler à quelles fins étaient destinés ces fonds? Quel genre d'activités finançait-on vraiment?
    Le processus de gestion du cas du client; c'est ainsi qu'on l'a nommé.
    Je vois. Alors, maintenant, il n'y a pas de financement fédéral.
    Non.
    Je vous ai entendu dire qu'une chose qui serait utile dans le cadre de votre programme serait d'imposer aux organismes manitobains de collaborer avec vous. Que peut faire le gouvernement fédéral pour vous maintenir en vie et encourager la reproduction de votre modèle partout dans la province et ailleurs au Canada? Que peut faire le gouvernement fédéral?
    Il s'agit d'un modèle très intéressant. De fait, je crois qu'il reflète les propos qu'a tenus ici, l'autre jour seulement, le chef de police de Calgary, M. Hanson. C'est la même chose: le jeune décroche, il a un problème d'intimidation — il en est l'auteur — ou il peut avoir un problème de toxicomanie. Les services collaborent. Le jeune retourne à l'école et il excelle. En fait, il s'agit presque du reflet intégral de ce dont parlait le chef de police Hanson.
    Que peut faire le gouvernement fédéral pour aider à reproduire ou à maintenir en vie les programmes qui existent, en vue d'aider à conserver ce genre d'approches à l'échelle du Canada?

  (1035)  

    Outre le volet du financement, qui est vaste, je crois que nous examinons le soutien du concept. Je comprends cela. Évidemment, d'autres organismes ont adopté des pratiques très semblables aux nôtres, font aussi valoir les avantages de notre modèle, mais je crois que la question de l'acceptation est énorme.
    Un sceau d'approbation fédéral serait bien.
    Oui, je crois que cela aurait une très grande incidence. Je crois que cela aiderait les membres des collectivités à adopter cette voie.
    D'accord.
    Madame la ministre Tell, si je ne m'abuse, vous avez mentionné au début de votre déclaration que le programme de Prince Albert se déroule très bien, mais que les fondements en sont fragiles. Est-ce que je rapporte vos propos correctement? Vous avez parlé des fondements fragiles — ou c'était peut-être Mme Thompson, mais je crois que c'était vous, madame la ministre.
    Non, en ce qui concerne les fondements, j'ignore quelle partie... Les fondements du programme de Prince Albert ont effectivement été reproduits partout dans la province. Il s'agit d'une structure officielle, communautaire, axée sur des priorités communautaires. Le centre d'excellence, ou le COR, comme on l'appelle ici, soutient les techniques novatrices et ce type de recherches en général, à la lumière des données probantes, pour s'assurer que nos collectivités obtiennent ce dont elles ont particulièrement besoin. Les structures sont solides. Une fois qu'elles sont formées — comme je l'ai expliqué, il s'agit d'une initiative communautaire — tous les organismes sont dans le feu de l'action et en font partie intégrante.
    Non, c'est assez solide. La structure est bâtie et reproduite dans chaque collectivité, selon les besoins particuliers de la collectivité en question. Elle a été conçue à l'instar d'une franchise, et elle est assez solide.
    Le sous-ministre McFee, lorsqu'il est venu témoigner, a parlé d'un modèle de franchise.
    Vous semblez avoir créé quelque chose en Saskatchewan, un type de mécanisme de mise en commun des pratiques exemplaires et des travaux de recherche, à l'appui de la coordination des collectivités partout en Saskatchewan, pour qu'on sache quelles sont les meilleures façons d'aborder les enjeux de sécurité publique, comme les services de police.
    Avons-nous aussi besoin de cela à l'échelon fédéral? N'y aurait-il pas chevauchement avec ce que vous faites à l'échelle provinciale?
    Dale va répondre à cette question.
    C'est un très bon point.
    Si on regarde notre expérience à ce chapitre, lorsque nous l'avons mise sur pied — il y a plus de deux ans maintenant —, comme je l'ai dit plus tôt, il était question de trouver le juste équilibre. Le rôle du gouvernement fédéral est en fait très semblable à celui du gouvernement provincial. Nous avons un champion. Nous avons le premier ministre. Je crois que le gouvernement fédéral doit jouer un rôle de champion. Nous avons une structure officielle. Je crois que le gouvernement fédéral a un rôle à jouer dans cette structure. Ses pratiques sont entièrement fondées sur des données probantes. Ce sont des choses que le CNPC pourrait appuyer et auprès desquelles il pourrait intervenir. Elle est essentiellement axée sur le processus, dont les obstacles à la protection de la vie privée.
    L'un des messieurs a posé une question sur la protection de la vie privée. C'était l'un des plus grands obstacles. Nous avons accompli beaucoup de travail sur l'évaluation de la vie privée. Lorsque des personnes et des familles sont exposées à des risques graves, nous devrions systématiquement nous demander ce que nous pouvons faire pour aider, plutôt que d'attendre qu'elles entrent dans le système et d'invoquer le fait que nous ne communiquons pas de renseignements. Je crois que le gouvernement fédéral a un véritable rôle à jouer en ce qui concerne cet aspect législatif.
    Tout le monde respecte la vie privée. Je n'ai jamais vu cela... Jamais. Mais il arrive que la protection de la vie privée devienne un obstacle. Je ne crois pas que les dispositions législatives visant à protéger la vie privée ont été adoptées pour régir les situations où une personne et sa famille sont exposées à un risque grave.
    Encore une fois, la question de savoir où se situe le rôle du gouvernement fédéral... Une partie de l'argent, comme on l'a mentionné, passe par le programme manitobain. Mais on ne parle pas de grosses sommes. Dans toute cette histoire, on a conçu les choses pour que, si chacun est responsable d'un petit aspect, ce soit abordable. Ensuite, on rattache le tout à l'ensemble des services policiers: 75 p. 100 du travail ne sont pas de nature criminelle — seulement 25 p. 100 le sont —, et 5 p. 100 mènent à des accusations au pénal.
    Si vous retirez nombre de ces choses du système, au bout du compte, vous libérez des ressources affectées à des éléments secondaires ou en aval, de sorte que vous puissiez vous attacher à autre chose comme le crime organisé, et maintenir l'équilibre. Il ne s'agit pas de choisir entre les deux. Il s'agit de réinvestir les ressources en fonction de ce que vous tentez réellement d'accomplir.

  (1040)  

    Alors, vous dites qu'un...
    Merci, monsieur Scarpaleggia. Votre temps est écoulé.
    Nous allons donner la parole à M. Harris, s'il vous plaît.
    Bienvenue à la séance du comité.
    Merci, monsieur Sorenson. Je suis reconnaissant d'avoir l'occasion de poser deux ou trois questions.
    Je tiens à remercier les deux groupes de témoins. Dans le cadre de vos témoignages, vous avez démontré que, en Saskatchewan comme au Manitoba, surtout dans les régions rurales, il reste beaucoup à accomplir. J'imagine que je peux parler de résultats préliminaires, car, si vous obtenez des résultats de la sorte après seulement un an ou deux, il me semble que vous ayez trouvé le bon filon.
    J'ai particulièrement apprécié le lien qu'a fait la ministre Tell entre les problèmes d'alphabétisation, de santé mentale et physique et les mesures de soutien communautaire, dans le but de freiner l'admission dans le système judiciaire.
    Premièrement, j'ai remarqué que, à Selkirk, si je me fie à vos statistiques, environ la moitié de votre clientèle est issue de la communauté autochtone. J'ai jeté un coup d'œil et constaté que la population de la région de Selkirk compte environ 25 p. 100 d'Autochtones, alors vous avez une représentation élevée. À la lumière des statistiques que vous obtenez, la situation semble très positive, surtout si on regarde le nombre troublant de détenus autochtones, particulièrement dans l'Ouest canadien, comparativement à la population.
    S'agit-il d'un modèle qui pourrait contribuer à atténuer cela? Est-ce que c'est l'un des résultats que vous envisagez à la suite de programmes de cette nature, que nous puissions offrir de meilleurs débouchés aux jeunes Autochtones en particulier, pour qu'ils jouent un meilleur rôle dans la collectivité et dans la société?
    Cette question s'adresse à M. Tielman.
    Oui, sans aucun doute.
    Les services de prévention sont toujours bénéfiques et empêchent les gens d'être incarcérés pour rien. Si nous travaillons avec un Autochtone, le programme universel tient compte de ses besoins lorsque nous le servons. Sans aucun doute.
    Le seul chiffre que je vous ai entendu mentionner sur le plan des coûts est celui de 21 000 $. S'agissait-il de la contribution provinciale à ce programme?
    Oui, c'est pour la province. C'était autrefois le ministère de la Justice; maintenant, il s'agit d'Enfants et Perspectives pour la jeunesse. Il y a eu transfert entre les ministères.
    Nous parlons des coûts liés à la police. Je sais qu'un agent de la GRC est probablement au moins trois fois plus coûteux, peut-être plus.
    Est-il possible qu'il y ait une corrélation directe entre le type de programmes dont vous parlez ici et ceux dont parle la ministre Tell en Saskatchewan? Compte tenu de l'argent — l'argent n'est pas la seule chose, bien sûr, mais l'investissement — consacré à ce type de programmes et des véritables résultats sur le plan de la réduction de la criminalité et des besoins en matière de services, peut-on réellement réduire les coûts liés à la police?
    À mon avis, oui, certes, et la police serait en mesure de concentrer ses efforts sur les personnes affichant les plus fortes tendances criminelles dans la collectivité.
    Monsieur McFee, le pourcentage de temps que consacrent les policiers à des questions non criminelles semble alarmant, mais pas étonnant, j'imagine.
    Monsieur McFee ou madame la ministre Tell, est-ce un aspect que vous examinez aussi comme mesure potentielle de réduction des coûts? Je sais que vous en avez parlé pour la question d'axer le travail sur les activités criminelles plus graves. Mais, compte tenu des taux de criminalité généralement décroissants à l'échelle du pays, pouvez-vous vous attendre à une véritable réduction des coûts liés à la police?
    Merci, monsieur Harris.
    Eh bien, je crois que vous avez visé juste.
    Premièrement, il s'agit d'une réorientation, et, au bout du compte, il faut s'assurer qu'on adopte toujours une approche du berceau à la tombe en matière d'intervention et de prévention et il faut aussi agir en aval. Logiquement, si on décharge le système...
    À Prince Albert, le taux de criminalité est à la baisse, et il en va de même pour les poursuites judiciaires, le taux d'admission aux services sociaux et le nombre de visites à l'hôpital. Pensez-y, et attribuez une valeur monétaire. L'université étudie actuellement ce facteur.
    Il ne fait aucun doute que c'est le cas.
    Ensuite, on peut se servir de ces fonds pour les réinvestir dans les secteurs qui en ont besoin et qu'on n'aborde peut-être pas à cause du volume qui engorge le système. Plutôt que de concevoir de nouveaux mécanismes ou différents types de tribunaux, comme le tribunal de la violence familiale ou différentes choses en aval, en réalité, beaucoup de ces choses peuvent être faites en amont, ce qui permettrait au système de fonctionner conformément à sa conception et d'accomplir un travail efficace, simplement en le libérant de certains intrants.

  (1045)  

    Merci beaucoup.
    Monsieur Payne, je me fie à l'horloge au mur, qui indique qu'il vous reste environ une minute ou une minute et demie, si vous souhaitez formuler un commentaire ou deux.
    C'est ce que je vais faire. Merci, monsieur le président.
    Je remercie également les témoins d'être venus.
    J'ai quelques questions très brèves à l'intention de Tammy.
    Premièrement, quel est le rôle des parents dans ce processus? En outre, en ce qui concerne la question de la confidentialité d'un organisme à l'autre, j'ignore s'il existe des ententes signées à ce chapitre ou quel est le fonctionnement exact.
    Merci. Ce sont de bonnes questions.
    Nous avons un formulaire de consentement, à l'intention des parents qui veulent participer au programme, et il permet la mise en commun de renseignements entre tous les organismes en jeu. Cela peut signifier que d'autres organismes doivent intervenir, ce que nous déterminons ultérieurement, concernant des préoccupations touchant les jeunes. Mais ils sont tous protégés par le consentement.
    Les parents participent, tout comme n'importe quel autre membre de l'équipe. Je crois que c'est l'un des meilleurs aspects du programme. Parfois, c'est un peu épeurant pour un parent qui n'a eu que des interactions négatives avec les Services à l'enfant et à la famille ou la GRC — c'est habituellement ces deux grandes entités qui font peur à tout le monde —, qui doit participer et comprendre qu'il n'est pas là pour subir de blâme, se faire pointer du doigt ni se faire dire quoi faire et que, en vérité, nous sommes là pour aider. Ce sont eux qui dirigent les activités, et ils nous disent... Ils sont beaucoup plus ouverts, et nous apprenons davantage ainsi.
    Merci.
    Vous...
    Votre temps est essentiellement écoulé maintenant.
    J'allais seulement poser une brève question à la ministre Tell.
    Je crois que vous devrez attendre de le faire une autre fois.
    Je tiens à vous remercier tous de vos exposés aujourd'hui. Il est toujours plaisant d'entendre M. McFee et la ministre Tell. Continuez votre bon travail en Saskatchewan et aussi ici.
    Merci beaucoup d'être venus et d'avoir informé le comité au sujet du programme START et de vos réussites et, peut-être, de vos déceptions. Certes, nous vous sommes reconnaissants de votre apport aux travaux du comité aujourd'hui.
    Merci, chers collègues. Notre temps est écoulé, alors la séance est levée.
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