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FOPO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des pêches et des océans


NUMÉRO 032 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 7 décembre 2006

[Enregistrement électronique]

  (1105)  

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte. Conformément à l'article 108(2) du Règlement, notre ordre du jour prévoit l'étude du projet de renouvellement du programme scientifique du ministère des Pêches et des Océans.
    Je souhaite la bienvenue à nos témoins, M. Paradis, Mme McClung, Mme Watson-Wright, M. Labonté et Mme Narayanan.
    Bienvenue à tous et en particulier aux membres du comité.
    Madame McClung.
    Merci beaucoup à vous, monsieur le président, et aux autres membres du comité.
    Merci de nous donner l'occasion de discuter un peu plus en profondeur du programme des sciences au ministère. Je suis accompagnée de plusieurs personnes que je vais vous présenter avant de céder la parole à Wendy Watson-Wright qui est la sous-ministre adjointe, Sciences. Je suis donc accompagnée de Serge Labonté, directeur général chargé du programme de renouvellement scientifique auquel vous vous intéressez ce matin; de Sylvain Paradis, directeur général, Science des écosystèmes; et de Savi Narayanan, directeur général, Sciences des océans et Service Hydrographique du Canada.
    Comme on vous a remis notre exposé et que nous n'avons qu'une heure, je ne vais pas prendre beaucoup de votre temps. Je vais tout de suite demander à Wendy Watson-Wright de vous faire notre exposé et ainsi de dresser la table pour vos questions.
    Merci.
    Bonjour tout le monde. Merci de nous avoir invités au comité.
    Je vais passer au travers de ce document aussi vite que possible et nous serons ensuite heureux de répondre à vos questions.
    Pour commencer par la diapositive 2, je vais un peu vous parler de la genèse de notre examen des sciences.
    Tout a débuté en 2004. Il était alors question d'évaluer les programmes et les activités scientifiques du ministère en regard de ses nouveaux objectifs stratégiques et de ses grandes priorités. Il fallait aussi faire le point sur les changements à apporter pour améliorer le programme scientifique afin de mieux répondre aux besoins du MPO et de mieux nous conformer à l'orientation du gouvernement.
    Cet examen nous a permis de dégager les domaines clés auxquels nous devions apporter des améliorations. Nous avons notamment constaté l'absence d'un processus bien défini d'établissement des priorités; dans certains cas, nous avons estimé que la prestation du programme n'était pas aussi efficace qu'elle le devrait; nous avons conclu à la nécessité de renouveler nos effectifs afin de combler les trous laissés par les départs à la retraite et par l'élimination naturelle des effectifs; il est également arrivé que nous éprouvions des problèmes budgétaires à cause de l'élargissement du mandat du ministère et des nouvelles priorités qui lui ont été confiées. Ce qu'il faut retenir à ce sujet, c'est que les ressources n'ont pas suivi l'élargissement de notre mandat.
    La diapositive 3 présente l'objectif de renouvellement des sciences au MPO. Il est question de disposer d'un programme des sciences aquatiques stimulant, fondé sur l'excellence — comme toujours — qui soutienne le MPO et le gouvernement et réponde à leurs besoins, en plus de servir les intérêts des Canadiens.
    La diapositive 4 présente notre cadre pour l'avenir qui est appliqué au programme des sciences du MPO. Comme vous pouvez le constater, ce cadre s'appuie sur quatre piliers qui sont: la pertinence, l'efficacité, l'abordabilité et la valorisation. Je vais reprendre en détail chacun de ces piliers à partir de la diapositive suivante.
    La diapositive 5, qui concerne la pertinence, présente l'architecture des activités du programme des sciences au MPO. Je dois vous dire qu'il était plutôt ambitieux de partir de trois grandes activités, qui rappelleront certainement quelque chose aux membres du comité — soit les pêches et les sciences océaniques, les sciences environnementales et l'hydrographie — pour en arriver à un inventaire de 1 250 projets environ répartis en 11 familles d'activités. Nous espérons, nous en sommes même sûrs, que cette nouvelle architecture reflète davantage ce que nous faisons, qu'elle est plus facile à expliquer et aussi plus facile à interpréter en ce qui vous concerne.
    Les trois cases du haut sont les résultats stratégiques du MPO. Nous en avions déjà parlé en comité. En dessous, vous avez les thèmes scientifiques nationaux qui recoupent les résultats stratégiques après quoi, comme je le disais, on trouve les 11 familles d'activités qui constituent en fait l'architecture des activités du programme.
    Je dois vous dire qu'il n'est pas évident de faire correspondre les thèmes et chacune de ces activités aux résultats stratégiques visés parce que, comme vous le comprendrez, tous nos projets scientifiques contribuent dans des proportions variées à la réalisation des résultats stratégiques, selon la façon dont l'information est exploitée.
    Le graphique circulaire de gauche présente les fonctions des sciences. Il y en a cinq qui sont: la recherche, la surveillance, les processus avancés, les produits et services et la gestion des données. Je vais vous en parler un peu, mais sachez en partant qu'il ne s'agit-là que d'une autre présentation de nos activités scientifiques, soit ce que nous faisons pour fournir des informations aux décideurs.
    Toujours en ce qui concerne la pertinence, la diapositive 6 traite du Conseil de gestion des sciences qui est essentiel au renouvellement des sciences. Il est présidé par le sous-ministre. Il a pour mission de formalisé un processus stratégique structuré d'établissement des priorités en science. C'est la première fois que cela se produit au ministère et nous sommes le seul ministère à disposer d'une structure de ce genre ou d'un processus de cette nature qui permet de formaliser l'établissement des priorités en science.
    Les membres du conseil ont pour responsabilité de débattre les priorités du soutien scientifique. Je dois préciser qu'il est composé du sous-ministre, comme je le disais, de moi-même, des représentants des deux secteurs clients les plus importants, soit la gestion des océans et des habitats et la gestion des pêches et de l'aquaculture, du président de mon comité consultatif scientifique externe, Arthur Colin, et de deux autres scientifiques principaux du ministère. On y trouve également deux directeurs généraux régionaux, l'un pour l'Est et l'autre pour l'Ouest, qui représentent donc les régions.

  (1110)  

    Nous nous sommes rencontrés trois fois et, la toute dernière fois, nous avons examiné de près notre ébauche de plan de recherche quinquennal. Nous avons toujours d'intéressantes discussions et je serai heureuse de vous parler davantage de ce conseil si vous le souhaitez.
    À la diapositive suivante, qui concerne l'efficacité, il est question de l'approche scientifique des écosystèmes dont j'ai déjà parlé à ce comité. Lors de la première rencontre du Conseil de gestion des sciences, nous sommes tous tombé d'accord sur le fait qu'il fallait suivre cette orientation. Si vous me permettez de revenir un peu sur la genèse, certains d'entre vous savent que, dans le passé, nous avions un grand client, en fait un seul client, la Gestion des pêches, mais que nous en avons beaucoup plus aujourd'hui. Nous avons l'Aquaculture, les Océans et l'Habitat. C'est pour essayer de répondre à toutes ces demandes concurrentielles que nous avons mis sur pied le Conseil de gestion. Nous serions heureux de pouvoir vous parler davantage de ce que sous-entend la science des écosystèmes, mais, pour l'instant, je vais passer à autre chose.
    Diapositive 8. Tout à l'heure, j'ai mentionné les fonctions des sciences que nous avons d'ailleurs revues en détail lors de notre examen. Nous avons produit un rapport très complet sur tout ce que nous faisons partout au Canada en matière de surveillance. La surveillance revient en fait à collecter les données surtout à bord des navires. Nous avons d'ailleurs déjà parlé ici des navires scientifiques. Le rapport que nous avons produit est disponible et nous serions heureux de vous en remettre des exemplaires. Nous disposons à présent d'un plan opérationnel pour l'Atlantique, le Pacifique, l'Arctique, les eaux douces et le saumon du Pacifique.
    La gestion des données est un élément essentiel. Nous devons pouvoir accéder à des données et nous devons pouvoir les organiser. Compte tenu des futurs départs à la retraite, nous devons avoir la certitude que nous savons où se trouvent les données et que les gens pourront y accéder.
    Les produits et services concernent presque exclusivement le Service hydrographique canadien; il s'agit des cartes marines, des annuaires des marais et de bien d'autres choses. Nous pourrons y revenir.
    À propos de la recherche, j'ai dit que nous disposons maintenant d'une ébauche de plan de recherche que nous serons heureux de transmettre au comité quand le document sera terminé.
    Tout cela relève des conseils scientifiques et il se trouve que nous disposons d'un processus consultatif très poussé. On peut consulter la liste de nos processus consultatifs sur notre site Internet, pour l'année à venir. Il est question d'évaluation des stocks, d'évaluation des habitats, de l'état des océans et de bien d'autres sujets.
    La diapositive 9 concerne l'efficacité. Nous voulons moderniser la prestation de nos services. Tout d'abord, nous avons toujours travaillé en partenariat avec d'autres, mais nous sommes conscients de la nécessité d'insister davantage sur ce plan et de parvenir à des partenariats plus efficaces. Nous avons donc travaillé sur une stratégie de partenariat et de collaboration. Nous faisons aussi beaucoup de travail sur ce plan en liaison avec les autres ministères et organismes à vocation scientifique.
    De plus, nous avons mis en oeuvre un mécanisme de prestation différent pour le programme des sciences. Nous avons créé un certain nombre de centres d'expertise dont il est question à la diapositive suivante, la 10. Il existe deux grands types de CE. Le premier est géographique, tous les scientifiques étant regroupés en un seul et même emplacement. Il y en a deux ou trois du genre. Toutefois, nous nous concentrons de plus en plus sur les centres d'expertise virtuels qui sont tous interreliés, même s'il y a un chef de file par région. Dans ce cas, il s'agit davantage d'un réseau de chercheurs.
    Quatre de ces CE sont opérationnels depuis quelques années et je pense que vous en avez déjà entendu parler, comme le CREPGE, qui est le Centre de recherche environnementale sur le pétrole et le gaz extracôtiers. Mais il y en a d'autres en cours de formation, soit le Centre de recherche sur les répercussions de l'énergie hydraulique sur le poisson et son habitat, et le Centre d'expertise en évaluation des risques biologiques sur les espèces envahissantes.
    Toujours pour ce qui est de l'efficacité — et nous passons à la diapositive 11 — nous avons affaire à une main-d'oeuvre hautement qualifiée. Dans le passé, votre comité nous a montré qu'il comprend bien les défis qui nous attendent sur ce plan. Nous venons juste de produire une stratégie et un plan de RH qui est axé sur le recrutement stratégique et le maintien en poste de nos chercheurs, sur la promotion de l'apprentissage continu et du mentorat, sur le renforcement de notre capacité scientifique et de gestion, de même que sur le règlement des écarts sur le plan de l'équité en matière d'emploi. Nous sommes conscients de la nécessité d'élaborer une culture scientifique qui encourage la collaboration, la multidisciplinarité et l'interdisciplinarité du travail, de même que la collaboration avec tout un éventail de partenaires.
    Comme vous le savez, l'abordabilité, dont il est question à la diapositive 12, est le moteur de l'action du ministère ainsi que de notre programme scientifique.

  (1115)  

    Le renouvellement du programme des sciences repose sur des stratégies clés intégrées à un processus formalisé. Nous appliquons une stratégie intégrée des finances et des ressources humaines. Pour la stratégie des sciences en mer, nous travaillons en étroite relation avec la Garde côtière afin de nous assurer d'avoir accès aux navires dont nous avons besoin. La stratégie de l'équipement scientifique et de l'infrastructure, qui fait partie d'un projet dirigé par le Conseil du Trésor, consiste à déterminer dans quels laboratoires scientifiques fédéraux le gouvernement du Canada va réinvestir.
    Toujours au sujet de l'abordabilité, je tiens à préciser qu'en 2006-2007, nous avons débloqué certains fonds. Le plan de transformation, dont vous avez entendu parler a, jusqu'ici, donné lieu à une injection de 15,5 millions de dollars dans les sciences. Sur cette somme, 2 millions de dollars ont servi à des acquisitions majeures, 4 millions ont abouti dans la flotte et 9,5 millions ont servi directement à la recherche scientifique, à la surveillance et à la cartographie des éléments à haut risque des écosystèmes.
    Comme vous l'avez appris, cette année, le ministre nous a demandé de maintenir notre investissement de 6 millions de dollars dans l'évaluation des stocks, investissement qui devait être interrompu conformément aux décisions prises à la suite de l'examen des dépenses. Il nous a, par ailleurs, ordonné de maintenir le Wilfred Templeman en service jusqu'à ce que nous percevions notre nouveau bâtiment, en 2011, pour un coût additionnel de 3 millions de dollars.
    À cause de la décision Larocque, dont nous pourrons reparler un peu plus tard, nous sommes aux prises avec un véritable défi financier. Cette décision interdit essentiellement au ministre d'allouer des quotas dont les recettes serviraient à financer les activités scientifiques du ministère.
    Enfin, pour ce qui est de la valeur des sciences, nous sommes conscients que rares sont ceux qui savent ce que nous faisons. D'ailleurs, un des membres de mon comité consultatif en science m'a dit, après avoir visité une de nos installations, que c'est dans ces endroits qu'on voit des choses dignes d'être racontées.
    Nous travaillons très fort dans ce sens. Nous travaillons sur la stratégie, mais avant cela, nous avons effectué un certain nombre de choses. Nous allons publier le tout premier rapport annuel sur le programme des sciences au MPO. Il est actuellement sous presse et nous serons heureux de vous en faire parvenir des exemplaires dès qu'il sera imprimé. Nous faisons paraître des articles de fond sur notre site Internet. Nous en publions de nouveaux toutes les deux semaines et nous serons heureux d'inclure votre nom sur la liste de distribution, si vous le désirez. Nous organisons aussi la série des conférences du SMA, à Ottawa. Encore une fois, si vous désirez en être informé, nous pourrons mettre votre nom sur la liste. D'ailleurs, demain à 13 h 30, Jean-Denis Dutil, de la région du Québec, donnera une conférence intitulée « Le rétablissement de la morue: matière à réflexion ».
    Enfin, toujours à la même rubrique, nous mesurons la valeur des sciences d'après le Cadre de gestion intégrée du rendement et du risque. Nous devons, en effet, pouvoir mesurer et prouver ce que nous faisons et établir, pour les décideurs et pour les Canadiens, pourquoi tout cela est si important.
    Je vais m'arrêter ici, monsieur le président. La dernière diapositive se passe de commentaires. J'estime que le renouvellement des sciences est en bonne voie, mais nous sommes bien sûr ouverts aux suggestions du comité sur la façon de faire davantage et d'améliorer ce que nous faisons.
    Merci beaucoup.

  (1120)  

    Merci beaucoup pour votre exposé. Je suis certain que nous aurons quelques suggestions à vous faire. Habituellement, les membres du comité sont plutôt réservés, mais il est possible qu'ils acceptent de sortir de leur coquille cette fois-ci.
    Monsieur Byrne.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup pour ce très bon exposé qui renfermait d'excellents renseignements qu'il va nous falloir digérer.
    S'il est une chose à laquelle les députés et leurs électeurs, ainsi que vos parties prenantes tiennent le plus, c'est à l'existence d'informations fiables dans lesquelles les pêcheurs peuvent avoir confiance.
    Je vais vous citer deux cas de gestion des pêches où la confiance placée dans la capacité du ministère à effectuer des analyses scientifiques valables pour aider les gestionnaires a été plutôt ébranlée.
    Il y a d'abord eu la situation de la morue dans le golfe du Saint-Laurent. Beaucoup d'entre nous se rappellent qu'en 2003 il avait été décidé d'imposer un moratoire sur la morue dans le nord et dans le sud du golfe. À l'époque, cette décision avait été fondée sur des données scientifiques et avait occasionné énormément de remous sur les plans politique, économique et social. Elle a fini par coûter environ 22 millions de dollars à l'économie locale en dépenses directes et davantage sans doute en dépenses indirectes. Sur l'avis des scientifiques, les pêches ont donc été fermées. Nous savons aujourd'hui que l'avis des scientifiques était relativement contestable, puisque les pêches ont été rouvertes dès l'année suivante et que, depuis lors, les quotas n'ont cessé d'augmenter année après année, ce qui a amené les pêcheurs à se demander si la décision initiale d'imposer un moratoire sur les pêches étaient bien fondée.
    Le deuxième exemple est celui de la crevette, dans le secteur 4 du golfe du Saint-Laurent, c'est-à-dire dans la région de l'estuaire. Il avait été décidé de réduire cette pêche de 27 p. 100. Les autres stocks étaient en augmentation. La décision fut prise sur l'avis des scientifiques. Même si les gens du MPO et de l'Institut Maurice Lamontagne avaient estimé que les stocks voisins se portaient bien, on avait jugé que le stock de crevette dans le golfe du nord était menacé. À l'origine, il avait été recommandé de réduire la pêche de 27 p. 100. Finalement, elle n'a été réduite que de 20 p. 100 avant que le quota ne soit presque entièrement rétabli.
    Ce que je veux dire, c'est que les pêcheurs doivent avoir la certitude que, quand le MPO applique le principe de précaution, il mobilise tous les éléments et toutes les ressources possibles pour conduire une véritable évaluation des stocks et recommander aux gestionnaires les TAC et les quotas à appliquer.
    Avez-vous placé cet aspect au centre des décisions prises à la suite de votre examen parce que, dans ces deux pêcheries seulement — et je pourrais vous donner d'autres exemples —, les répercussions économiques se chiffrent en dizaines de millions de dollars et, a posteriori, beaucoup estiment que c'était inutile?
    Je vais essayer de vous répondre, après quoi j'inviterai M. Labonté à prendre le relais.
    Je tiens tout d'abord à vous remercier pour cette question. Nous sommes conscients que les pêcheurs et les scientifiques doivent apprendre à se connaître les uns les autres et que nous devons tous travailler en plus étroite collaboration. Nous essayons de faire mieux et nous allons continuer ainsi.
    Comme vous le savez peut-être, la consultation n'est pas limitée au ministère. Nous réunissons tous les experts que nous pouvons trouver pour chaque stock. Pour ce qui est de la morue dans le nord du golfe, par exemple, nous avons amplement consulté non seulement les scientifiques du MPO — et pas uniquement ceux qui travaillent sur des stocks donnés —, mais tous ceux qui peuvent apporter quelque chose. Nous soumettons tout cela à l'examen rigoureux de nos pairs dans l'industrie et dans le milieu universitaire. Nous faisons de notre mieux pour recueillir les meilleurs avis scientifiques possibles.
    Il y en a toujours qui ne sont pas d'accord avec les recommandations ou les décisions qui découlent pourtant d'un examen scientifique où le pour et le contre sont représentés, mais j'ai personnellement l'impression que nous dispensons les meilleurs conseils spécialisés possible.
    Comme je connais moins ce qu'il en est de la pêche à la crevette, je vais demander à M. Labonté de vous en parler.
    Je vous dirai, cependant, que je suis d'accord avec vous. Nous devons communiquer les meilleurs renseignements scientifiques possibles. Nous prenons cette responsabilité très au sérieux. Tout le monde n'est pas d'accord avec tout, mais il s'agit d'un processus d'examen par les pairs et, en fin de compte, tout le monde participe à la formulation des conseils qui sont donnés et qui sont pris en regard d'informations socioéconomiques.
    Serge.

  (1125)  

    J'ajouterai que, selon moi, nos scientifiques essaient de travailler le plus près possible des pêcheurs lors des campagnes d'évaluation et dans le cadre de leurs échanges en cours d'année, afin de s'assurer qu'ils disposent de toutes les informations nécessaires. Comme Mme Watson-Wright vous l'a dit, quand on se soumet à une évaluation confraternelle, on arrive forcément au meilleur avis possible sur la base des données interprétées. C'est, en fin de compte, la science qui sous-tend le processus décisionnel. Les décisions ne sont pas prises uniquement à partir de données scientifiques, mais plutôt d'après les meilleurs conseils fondées sur ces données. Il y a toujours des variantes dans les données disponibles et c'est pour cela qu'il convient de les soumettre au plus grand nombre possible d'experts.
    Monsieur Labonté, les deux exemples que je vous ai donnés présentent des caractéristiques et un thème commun. Dans les années en question, le Teleost a effectué des relevés en périphérie dans le cadre de la campagne d'évaluation, et les documents scientifiques du MPO eux-mêmes indiquent que ces reconnaissances au chalut étaient insuffisantes pour établir de bonnes données de base et ainsi connaître l'évolution des stocks.
    Il y a eu des problèmes d'engins. Le nombre de remorquages a été limité. Le navire est tombé en panne et il a passé la majeure partie de l'été à quai. Malgré tout cela, et bien que le navire n'ait pas effectué la tâche minimale pour recueillir ce qu'on aurait pu considérer comme des paramètres normaux, le MPO est allé de l'avant et a fait des recommandations qui, il faut l'indiquer toutefois, ont été fondées sur le principe de précaution. Je pense toutefois que c'est là que la fracture est apparue. Bien que le personnel de la Direction scientifique du ministère des Pêches et des Océans et le personnel chargé d'effectuer ces relevés aient exprimé des réserves, les décideurs et les parties prenantes n'ont jamais vraiment été informés. Cela nous préoccupe tous beaucoup, surtout quand on apprend ce genre de chose.
    Soyons justes, monsieur Byrne, quant à la façon dont l'évaluation de la morue a été effectuée à l'époque. Les reconnaissances au chalut réalisées par le ministère ne sont qu'une des façons d'obtenir des paramètres qui seront retenus dans la campagne globale d'évaluation. Nous nous fondons sur bien d'autres indices. Il y a la pêche indicatrice, par exemple, avec les engins mobiles et les engins fixes, et l'on discute en permanence de l'état des pêches. Pour autant que je me souvienne — et j'ai les évaluations sous les yeux — il y a toujours eu un parallèle entre les données de la pêche indicatrice et celles des reconnaissances au chalut effectuées par le ministère. Ce parallèle existe depuis bien des années.
    Je ne pense donc pas qu'il existe de gros écarts entre les indices. Je reconnais avec vous que les gros navires qui effectuent des évaluations ne peuvent pas se rapprocher de la côte jusqu'à la baie, mais c'est pour ça que nous utilisons d'autres genres d'indices afin de déterminer la santé de la ressource.
    Je ne dirai donc pas que le ministère s'est montré négligeant dans l'examen de toutes les informations dont il dispose pour produire des avis. Toutefois, les stocks sont très déprimés par rapport à ce qu'ils étaient naguère, puisque la biomasse du stock de reproduction représente sans doute 10 p. 100 de ce qu'elle était au milieu des années 80. En ce sens, le stock est donc très faible. La question est de le reconstituer plutôt que de le maintenir à son niveau d'passé. Pour autant que je sache, dans les conseils donnés, nous avons tenu compte de cette réalité.

  (1130)  

    Vous avez 46 secondes.
    Je vais poser une brève question à la SMA, à Mme Watson-Wright.
    En réponse à une question de M. Byrne, madame Watson-Wright, vous avez parlé de la morue du Nord et d'évaluation confraternelle. À quoi peut ressembler cet examen par les pairs dans le cas de la morue du Nord? De quelle information part-on et qu'en fait-on pour arriver à une évaluation confraternelle? Je crois savoir qu'on n'a effectué que très peu de recherches sur la morue du Nord. J'aimerais donc savoir à quoi peut ressembler un examen par les pairs dans de telles conditions.
    J'aurais dû préciser qu'il s'agit de la morue du nord du golfe du Saint-Laurent. C'est ce que je voulais dire.
    Vous parliez donc du même problème que celui mentionné par M. Byrne.
    Tout à fait. Excusez-moi.
    D'accord.
    Je crois que mon temps est écoulé.
    Effectivement. Nous vous donnerons la parole une autre fois.

[Français]

    Monsieur Blais.
    Bonjour, mesdames et messieurs. Je vais d'abord vous poser une question facile, puis une question très difficile.
    Voici la plus facile : où sont situés les centres d'expertise?
    On les retrouve un peu partout. Il y en a, entre autres, deux ou trois à Mont-Joli, un à Moncton et deux à Halifax.
    Est-ce que vous parlez d'une concentration de scientifiques?
    Non. Pour la plupart, les centres d'expertise sont virtuels. Les scientifiques se trouvent à plusieurs endroits, mais il y a un chef. C'est comme un réseau.
    Autrement dit, ils peuvent se trouver n'importe où.
    En effet.
    Est-ce qu'il y en a ici, à Ottawa?
    Non. Le but des centres d'expertise est de faciliter la recherche. On ne fait pas de recherche à Ottawa. Les chercheurs se trouvent dans les régions.
    D'accord. On va maintenant passer à la question difficile, qui concerne les changements climatiques. J'ai pris connaissance de votre document et j'ai déjà lu des présentations que vous avez faites. En outre, ce n'est pas la première fois qu'on se rencontre. Il reste que j'aimerais connaître vraiment votre plan d'action relativement aux changements climatiques, dans une perspective scientifique.
    J'en comprends, selon ma propre logique, que compte tenu des changements climatiques, les ressources marines, dont dépendent un bon nombre de nos communautés, sont probablement en sursis. En effet, on ne sait pas vraiment ce qui nous attend. Je me dis que dans ces conditions, les seuls à qui je peux me fier sont les devins ou les scientifiques. Tout le monde peut être devin, mais tout le monde n'est pas scientifique.
     J'aimerais que vous ne me parliez pas seulement des plans généraux qui sont abordés ici, à savoir les sciences, le travail avec d'autres ministères fédéraux, les universités et d'autres pays, dans le but d'aborder les enjeux mondiaux. À mon avis, aborder cet enjeu, c'est beaucoup plus que cela. Je veux savoir quelle a été votre approche face à ce dossier au cours des dernières années et ce qu'elle va être dans l'avenir.
    Serge ou Savi, voulez-vous répondre?

[Traduction]

    Nous le faisons de différentes façons. D'abord, pour ce qui est du changement climatique, il faut disposer de données historiques et d'informations suivies. À cela viendra se greffer le plan de surveillance que nous sommes en train d'élaborer, mais dans le passé, nous surveillions des éléments comme la variabilité de l'océan, les changements atmosphériques et ainsi de suite.
    Deuxièmement, nous collaborons avec d'autres ministères comme Environnement Canada pour élaborer des modèles intégrés de prévision des changements climatiques et nous collaborons avec d'autres pays. Vous ne devez pas oublier que les changements climatiques sont un problème planétaire. Récemment, nous avons pris langue avec la France pour travailler sur un modèle global destiné à étudier la variabilité du climat.
    Nous travaillons aussi avec les universités. Vous connaissez sans doute la Fondation canadienne pour les sciences climatiques et atmosphériques avec qui nous travaillons en étroite liaison. D'ailleurs, Wendy Watson-Wright est membre du conseil de cette organisation qui dispose de fonds considérables.
    Il est très difficile de s'attaquer à cette question et le ministère des Pêches et des Océans n'est pas seul pour cela; nous collaborons avec Environnement Canada, avec les université et avec des partenaires à l'étranger.

  (1135)  

[Français]

    Excusez-moi de vous arrêter. J'aimerais vous entendre parler, non pas de l'aspect global de la chose, mais de la façon dont le ministère des Pêches et des Océans entend faire face aux changements climatiques, en termes de ressources marines.
    Je comprends tout l'aspect global, mais j'aimerais que vous parliez de façon plus spécifique des mesures que prend Pêches et Océans Canada face à cet enjeu. Il est mondial et environnemental, certes, mais ma préoccupation porte avant tout sur la ressource marine. J'irais même jusqu'à dire qu'elle concerne précisément le golfe Saint-Laurent.
    L'aspect des changements climatiques ou de variabilité climatique fait partie intégrante de notre plan et de notre stratégie de recherche concernant les stocks de poisson.
    Je dois dire qu'en termes de gestion des ressources, on peut se positionner. Il s'agit de mieux comprendre quel impact ces changements auront sur nos ressources et comment les ressources changeront en termes de distribution, d'abondance et d'espèces, et ce, afin de pouvoir fournir des conseils en vue de s'adapter à ces changements.
    Les changements climatiques n'arrêteront pas du jour au lendemain. La distribution des espèces va se modifier. On a un rôle important à cet égard. On tente d'intégrer dans la recherche et les stratégies de gestion des éléments qui nous permettent de faire ces prédictions.
    Mais de façon concrète, que veut dire tout cela?
    En ce qui concerne le saumon de la côte du Pacifique, par exemple, on étudie comment les changements dans l'environnement affectent la productivité des stocks et comment cela va affecter le retour du saumon dans l'avenir. En tenant compte des changements environnementaux, on tente de faire des prédictions, de façon à pouvoir fournir des conseils.

[Traduction]

    Merci, monsieur Blais.

[Français]

     Mme McClung voulait ajouter quelque chose.

[Traduction]

    Très rapidement, madame McClung, s'il vous plaît.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Mis à part l'appui scientifique relatif à ces questions, qui va se maintenir pendant plusieurs années, on en convient, d'autres stratégies du ministère sont gérées par d'autres secteurs. Vous êtes au courant des discussions auxquelles participent présentement plusieurs provinces et représentants des industries concernant l'avenir et la viabilité des ressources. Les discussions ne portent pas précisément sur les changements climatiques, mais sur l'avenir des pêches. Ces discussions prennent en considération l'environnement de façon globale, et ça inclut les changements climatiques de même que leurs effets. De plus, le ministère veut présenter une stratégie de viabilité de l'aquaculture, qui pourrait être une alternative viable, plus naturelle, si on peut dire, pour les pêcheurs et le secteur des pêches.
    Enfin, il y a tout ce travail concernant le plan de gestion des océans ou des larges nappes d'eau qu'on voudrait bien continuer afin de voir comment l'intégration de toutes les variables pourrait avoir un impact sur le fleuve Saint-Laurent. Bref, il y a des stratégies qui visent à ajuster les ressources.

[Traduction]

    Je vais devoir vous interrompre. Je suis sûr que nous pourrons explorer davantage ce sujet à la faveur d'une prochaine série de questions.
    Monsieur Stoffer.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Merci, mesdames et messieurs, de vous être déplacés aujourd'hui.
    Je consulte les prévisions du programme scientifique pour 2008-2009 où l'on constate une diminution de près de 23 millions de dollars par rapport à 2005-2006. Dites-moi, compte tenu de tout ce qu'on vous demande de faire dans le cadre du programme scientifique — et vous nous avez effectivement parlé des pressions qui s'exercent sur les scientifiques à cause de cela — comment le ministère peut-il justifier une diminution de budget à ce titre. Je sais que les membres du comité et d'autres, à l'extérieur, réclament qu'on accorde davantage de ressources humaines et financières à la recherche scientifique.

  (1140)  

    Merci beaucoup.
    Les chiffres sont un peu trompeurs, puisque certaines donnés de 2006-2007 n'existaient peut-être pas en 2005-2006, et vice-versa. Je me souviens, par exemple, que le poste des navires apparaissait en 2005-2006, mais pas en 2006-2007.
    Ainsi, le budget de 2006-2007 a été augmenté et non diminué. Ça, c'est pour le total.
    Je dois également vous préciser que la répartition du budget entre les différents objectifs stratégiques pour 2005-2006 est un peu trompeuse parce que c'est la première année que nous produisions ce rapport et que nous ne sommes pas vraiment parvenus à établir tous les postes de dépenses. Il demeure que nous n'étions pas très loin de la réalité. Dans l'ensemble, toutefois, nous avons bénéficié d'une augmentation.
    Je comprends la situation pour 2005-2006, mais j'examine les chiffres de votre ministère pour 2008 et 2009. En 2005-2006, le total est de 240,2 millions de dollars et il est de 217,4 millions de dollars pour 2008-2009.
    Je ne suis peut-être pas très fort en calculs, mais cela m'indique une diminution. Je me demande donc, compte tenu de votre cadre scientifique pour l'avenir et des pressions qui vont s'exercer sur le programme des sciences, comment le ministère peut justifier une diminution sur une période de deux ans?
    Monsieur le président, je crois qu'on a répondu à ce genre de questions à l'occasion d'autres rencontres du comité, quand vous avez accueilli le SMA, Ressources humaines et Services intégrés. On vous a alors indiqué qu'une partie des prévisions budgétaires est fondée sur la situation à un moment donné, mais que les chiffres peuvent varier en même temps que la situation évolue.
    Je vous ai, par exemple, mentionné que le total varie selon que le poste des navires apparaît ou pas dans le budget. Et puis, comme certains programmes arrivent à terme, ils peuvent donner lieu à une augmentation ou à une diminution dans une année donnée. J'ajouterai à cela que, même si je vous ai indiqué tout à l'heure que le ministre nous avait donné pour consigne de ne pas réduire le programme d'évaluation des stocks de 6 millions de dollars, les chiffres indiquent tout juste les répercussions de cette décision. Ces ajustements ne se font donc pas encore sentir, outre que nous essayons de nous mettre à jour à la suite d'autres ajustements, sans compter les initiatives qu'on pourrait nous confier dans l'avenir.
    Madame Watson-Wright, je crois que M. Stoffer est en train de vous citer les dernières données chiffrées que le personnel du ministère nous a communiquées la dernière fois qu'il était ici.
    Il s'agit effectivement des dépenses révisées.
    Nous avons prévu de remettre un récapitulatif à tous les députés au début de la semaine prochaine, histoire de permettre un rapprochement avec ces données et de faire en sorte que les choses soient bien claires.
    J'ai deux ou trois autres questions à vous poser. Il y en a une qui concerne la décision Larocque. Où le ministère envisage-t-il de trouver les fonds nécessaires pour remplacer ceux auxquels il avait accès avant la décision Larocque? Que pensez-vous de cette décision?
    De plus, madame Wright, quand vous parlez d'évaluation par les pairs, qu'entendez-vous exactement? S'agit-il d'un exercice conduit au sein du ministère ou vous adressez-vous à l'extérieur du MPO pour soumettre à une analyse particulière les données que vous transmettent les pêcheurs?
    Monsieur le président, je vais commencer par répondre à la dernière question. L'examen par les pairs est réalisé par des experts extérieurs au ministère. Comme je l'ai dit, nous faisons appel à des universitaires, à des représentants de l'industrie et à des experts internationaux, au besoin, et nous sollicitons les autres régions. Nous sortons donc des cadres du ministère.
    Pour ce qui est de la décision Larocque, les choses ne sont pas simples, pas plus qu'en ce qui concerne les autres activités du ministère et le programme des sciences. Nous avons analysé de près les modalités des partenariats que nous avons conclus avec l'industrie, modalités qui pourraient être considérées comme des quotas de pêche servant à alimenter les budgets scientifiques. Nous allons aussi devoir nous demander si c'est quelque chose à maintenir, si nous devrions poursuivre cela nous-mêmes ou si l'industrie serait prête à payer la facture d'une autre façon. Certaines parties de l'industrie ont d'ailleurs réagi de façon positive en nous indiquant qu'elles sont disposées à s'asseoir avec nous pour trouver une solution.

  (1145)  

    Merci.
    Votre temps est écoulé, monsieur Stoffer.
    Deux choses. Vous avez parlé des articles de fond que vous allez publier sur le programme scientifique et que vous pourriez communiquer au comité. J'aimerais les obtenir. Vous avez aussi dit que vous disposez de plans à court et à long terme.
    Nous avons effectivement préparé une ébauche de plan de recherche quinquennal que nous pourrions transmettre au comité, si vous le désirez, une fois que nous l'aurons travaillé davantage au sein du ministère et en collaboration avec les personnes de l'extérieur parce que, pour l'instant, il est plutôt technique.
    Vous seriez surprise de voir à quelle vitesse nous pouvons absorber des documents techniques.
    Le premier rapport annuel est-il disponible?
    Il est sous presse.
    Il nous serait également utile que vous nous précisiez, par écrit, où vous en êtes de vos analyses sur les pesticides et les produits chimiques toxiques. Nous apprécierions que vous puissiez nous en faire parvenir copie.
    Je vais faire une remarque avant de céder la parole au prochain intervenant. À l'occasion de notre étude sur la morue du Nord, une chose est ressortie régulièrement. Je veux parler de la coupure qui s'est créée entre les scientifiques et les pêcheurs, ceux qui sont sur les bateaux et qui, comme vous, observent ce qui se passe et possèdent une excellente connaissance de la ressource, du climat et de la géographie, à cause d'ingérance politique dans le fonctionnement du ministère des pêches, et croyez bien que cette remarque ne se veut pas politicielle. Beaucoup de ces gens-là disposent d'années, voire de décennies d'informations très importantes dans votre travail de scientifique. J'estime personnellement que c'est une grande perte.
    Je ne veux pas excuser les politiciens qui se sont ingérés dans le fonctionnement du ministère et ont entravé les pêches en prenant des décisions politiciennes. Toutefois, je constate que l'écart entre les pêcheurs et les scientifiques ne cesse de s'accroître et je me demande si vous pensez que les choses vont s'améliorer et si vous n'auriez pas de conseil à nous donner sur la façon de réinstaurer de bonnes relations entre les scientifiques et les pêcheurs.
    Je me rends bien compte que les politiciens comme nous peuvent parfois occasionner des problèmes, mais voyez-vous une façon de rapprocher ces deux groupes?
    Merci, monsieur le président.
    Pourriez-vous me préciser une chose à propos de votre première question sur les produits chimiques toxiques et les pesticides. J'ai parlé des centres d'expertise. Voulez-vous que je vous en parle davantage ou voulez-vous connaître le détail du travail que nous y effectuons?
    J'aimerais recevoir des renseignements sur le travail que vous effectuez à propos des pesticides et des produits chimiques toxiques.
    Très bien, nous vous ferons parvenir une réponse par écrit.
    Pour ce qui est de l'écart entre les pêcheurs et les scientifiques, c'est effectivement un problème qui m'empêche de dormir parfois. Je crois que c'est un vrai problème. Nous avons essayé de le régler et nous allons continuer de travailler dans ce sens.
    Vous vous souviendrez peut-être que nous avons mis en oeuvre le programme de pêcherie indicatrice (iciici) que nous exécutons de concert avec les pêcheurs. Ils se chargent de l'évaluation et de l'analyse des résultats.
    Nous administrons aussi un programme de collaboration scientifique dans les pêches, dans le cadre duquel nous essayons d'élargir les partenariats en science. Dans votre propre province, il y a la Fishermen and Scientists Research Society dans le cadre de laquelle nous travaillons en étroite relation avec les pêcheurs.
    Ce qu'il faut faire, c'est rapprocher les deux parties. Il y aura toujours des désaccords si les avis produits ne correspondent pas aux attentes des pêcheurs. Vous disiez que les gens n'y croient plus. Cela préoccupe beaucoup le ministère et nous incite à travailler en plus étroite relation avec les pêcherus. C'est ce que nous allons faire.
    En fait, le partenariat dans le cadre de la stratégie de collaboration dont je parlais prévoit davantage d'activités de diffusion externe auprès de l'industrie de la pêche, pas uniquement pour expliquer ce que nous faisons, mais pour chercher à... Je veux savoir comment nous allons parvenir à prendre en compte ce savoir, qui n'est pas forcément quantitatif, dans les modèles que nous appliquons pour produire nos avis?
    Tout le monde a de la difficulté avec cela, mais comme il s'agit, selon moi, de l'un des grands problèmes de l'heure, je suis ouverte à vos suggestions. Nous allons essayé d'avancer de notre côté, mais je pense que nous sommes sur la même longueur d'ondes.

  (1150)  

    Je le crois aussi.
    Monsieur Lunney.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens, moi aussi, à souhaiter la bienvenue aux représentants du ministère.
    Dans sa brève intervention, je pense que le président a fait ressortir une réalité, celle de l'évidence invisible, des échanges subtiles et des cercles d'influence. Il y a les pêcheurs qui sont sur zone, d'un côté, et le cercle des scientifiques qui essaie de rassembler des données, et puis, il y a le cercle des politiciens. Ces mondes ne s'excluent pas mutuellement et les influences jouent dans tous les sens.
    Nous voulons tous fonder nos décisions sur des données scientifiques, mais il m'arrive souvent de penser que les scientifiques sont frustrés à cause de politiciens qui, dans leur désir de répondre aux besoins des pêcheurs, portent tort à la ressource.
    Quoi qu'il en soit, dans le cadre de ce dialogue, nous essayons de faire en sorte que les décisions soient fondées sur les meilleures données scientifiques disponibles. Je crois que c'est ce que veulent la plupart d'entre nous, mais je comprends que les scientifiques puissent être frustrés de temps en temps à cause des jeux d'influence.
    Vous avez commencé par nous parler des récits qui ne sont pas racontés et donc des défis que nous avons sur le plan des communications à cet égard. J'estime que le MPO excelle dans la recherche scientifique. Dans mon coin de pays, il a la Station biologique du Pacifique qui est l'une des institutions scientifiques de premier plan dans le monde. Je vais vous poser une question à son sujet. Nous avons donc, dans cet établissement, des scientifiques de renommée mondiale comme Dick Beamish et d'autres, et je pense effectivement que nous ne vantons pas assez ce que nous faisons de bien.
    Comme l'océanographie est un vaste domaine, non seulement les scientifiques ne savent pas tout, mais la population en général ignore presque tout de ce qui se fait sur ce plan. Je vis sur la côte et je n'en reviens pas du nombre de résidents côtiers qui n'ont jamais été sur l'eau, qui se contentent de se promener le long de la côte en voiture pour jeter un coup d'oeil sur la mer.
    Il y a tant de choses que nous ignorons. C'est sur cette côte que j'ai effectué ma première plongée autonome. Dès qu'on est sous l'eau, on découvre un tout autre monde. Tout le monde devrait aller voir un peu ce qui se passe là-dessous pour apprécier davantage ce que nous faisons. Les pêcheurs eux-mêmes devraient piquer une petite tête.
    Tout ce que je veux dire par là, c'est qu'étant donné tout ce que nous devons apprendre afin de mieux apprécier l'écologie des océans, les interactions délicates entre les différentes espèces, ce qui se passe vraiment là-dessous, nous devons donner à nos scientifiques toutes les ressources dont ils ont besoin pour correctement s'acquitter de leur travail et nous devons les écouter. J'estime donc nécessaire d'envisager d'appliquer des stratégies de communication.
    Vous avez mentionné un autre défi, celui de l'élargissement du mandat. Avant, vous deviez simplement vous occuper de la gestion des poissons, des stocks. Soudain, on vous a demandé de veiller à ce que nous ayons: des écosystèmes marins sains et productifs, des pêches durables, et des voies navigables accessibles, outre qu'on vous a demandé de vous charger de missions hydrogéographiques. Voilà un énorme mandat pour lequel j'estime que vous manquez nettement de ressources.
    Nous voulons donc essayer de vous aider pour que la communauté scientifique dispose des outils nécessaires afin de progresser sur ces plans et pour que vous puissiez également faire connaître leur réussite. Avec les défis auxquels les océans vontt être confrontés sous l'effet des changements climatiques et du reste, dont nous avons parlé ici, nous savons que d'autres groupes s'appuient sur la science pour leurs propres fins et présenter les enjeux de sorte à infléchir la prise de décision, parfois même quitte à manipuler les données scientifiques à leurs propres fins. Nous avons pourtant tous intérêt à disposer de bonnes données scientifiques afin de prendre les meilleures décisions possibles.
    Revenons-en à la question de l'argent soulevée par M. Stoffer. Pouvez-vous m'expliquer une chose? Vous avez dit que les chiffres concernant les navires sont inclus là-dedans. Je pense que vous vouliez, par là, parler du nombre de navires, à moins qu'il ne s'agisse des frais d'exploitation de ces navires. Avez-vous acheté des bâtiments? Ces coûts d'acquisition se retrouvent-ils ici? Pourriez-vous nous expliquer cela davantage?
    Excusez-moi, je voudrais revenir sur l'une des premières choses que vous avez dites dans votre intervention, après quoi je répondrai à votre question concernant les navires.
    Je suis entièrement d'accord avec vous sur la nécessité de faire savoir ce que nous faisons. Vous m'avez donné l'occasion de vous indiquer qu'en 2008 nous allons célébrer le centenaire de deux de nos plus anciennes stations au Canada, soit la Station biologique du Pacifique et la première station permanente de St. Andrews, qui était une station flottante au début, qui auront toutes deux 100 ans. 2008 sera donc une grande année.
    Nous allons accueillir au moins trois conférences internationales. L'une sur la côte ouest, PICES — qui veut dire North Pacific Marine Science Organization, bien que cela n'ait rien à voir avec l'acronyme. Halifax accueillera le CIEM en 2008, soit le Conseil international pour l'exploration de la mer. À Ottawa, nous recevrons l'American Fisheries Society. Nous invitons le comité à nous aider à faire passer un message.
    Revenons-en à la question des chiffres concernant les navires. Je voulais parler des chiffres apparaissant dans le budget de 2005-2006, mais pas dans celui de 2006-2007. Normalement, ce budget oscille aux alentours de 36 millions de dollars.

  (1155)  

    Je vois. Ainsi, les 26 millions de dollars en question apparaîtraient ailleurs, mais pas dans la partie gestion. Celle-ci représente environ 23 millions de dollars.
    Ce montant est apparu pour une année, mais pas pour l'année suivante, parce que la somme avait déjà été utilisée. Tous les ans, je transfère cette somme à la garde côtière.
    Merci pour cette précision qui est très utile.
    Soit dit en passant, vous avez mentionné que vous alliez nous inscrire sur nos livres. Si je me souviens bien, il s'agissait des conférences par les scientifiques qui font le point sur les informations disponibles, cette formule nous permettant d'être au courant des discussions en cours. Vous constaterez que la plupart des membres de ce comité s'intéressent beaucoup aux sciences. Nous aimerions savoir ce qui se passe et nous estimons d'ailleurs ne pas être suffisamment informés.
    Nous avons bien des petits-déjeuners-causeries, ici, à Ottawa. Certains d'entre vous y participent sans doute. Nous avons été invités et la plupart d'entre nous s'y rendent dans toute la mesure du possible.
    Nous sommes particulièrement intéressés par les questions concernant les océans. Nous serions très heureux de recevoir une invitation à assister à un exposé sur ce thème.
    Je voudrais à présent que nous parlions plus particulièrement de la Station biologique du Pacifique et je dois dire que je me suis réjouis d'entendre votre boniment sur les célébrations prochaines de son 100e anniversaire. Pourriez-vous nous en parler davantage? Avons-nous suffisammetn de fonds pour effectuer toute la recherche dont nous avons besoin là-bas? Est-il prévu d'augmenter ou de réduire le budget de la station? J'aurais sans doute dû poser cette question quand nous parlions du budget des dépenses principal, l'autre jour. Pouvez-vous nous dire si les scientifiques en première ligne ont assez d'argent pour faire avancer les projets qui leur sont confiés?
    Merci pour cette question.
    N'importe quel scientifique vous dira bien sûr qu'il pourrait faire davantage avec plus d'argent, et je ne peux qu'être d'accord avec cela.
    Le budget des sciences a augmenté. Notre ministre veut que nous renforcions le programme des sciences, comme il vous l'a indiqué quand il est venu vous voir et comme il nous l'a répété à maintes reprises. Nous avons les chiffres concernant la répartition des budgets entre les régions, en ce qui concerne le plan de transformation, par exemple. La région du Pacifique et la plus dotée de toutes, tout juste devant celle des Maritimes.
    Comme je le disais, le ministre nous a donné des consignes au sujet de l'examen des dépenses, relativement à l'évaluation des stocks. Nous avons effectué d'autres investissements et, je le répète, nous avons obtenu des augmentations budgétaires.
    Pour ce qui est de la situation actuelle, nous bénéficions de la présence d'un ministre qui nous appuie beaucoup, ce dont nous nous réjouissons.
    Merci.
    Je veux vous poser une autre question, celle-ci au sujet de la décision Larocque qui interdit l'utilisation de ressources comme moyen de financer le programme des sciences. Je ne sais pas si je la comprends vraiment. À quand remonte-t-elle et quelles en sont les répercussions?
    Quelqu'un pourrait-il me donner quelques détails entourant cette décision de même que les conséquences qu'elle représente pour le ministère?
    Elle a été rendue en juin de cette année par la Cour fédérale d'appel qui a décrété que les ressources halieutiques n'appartiennent pas au ministère des Pêches et des Océans et que le ministre n'est pas autorisé à financer les activités du ministère par la vente de licences de pêche, dans ce cas, de pêche au crabe.
    Le 18 octobre, la cour fédérale a rendu un autre jugement fondé sur les principes de la décision Larocque; il s'agit de la décision APPFA, pour Association de pêcheurs de poisson de fond acadien. Il s'agit essentiellement de la même chose, autrement dit c'est une décision qui nous interdit cette forme de financement.
    Sur ce, nous avons entrepris d'examiner, à l'échelle du pays, tous les accords en fonction desquels nous vendons des quotas de pêche dont les recettes permettent de financer ce genre d'activités. On peut interpréter les résultats de différentes façons, mais nous avons assez rigoureusement analysé ce que représentent ces ententes — ce qui ne nous a pas permis d'avoir des certitudes — et ce dont nous avons absolument besoin pour alimenter la recherche scientifique. Je crois que nous allons devoir examiner de très près la situation avec l'industrie pour établir la façon dont les choses se dérouleront dans l'avenir.

  (1200)  

    Nous effectuons des pêches expérimentales qui permettent d'évaluer le déplacement des espèces migratoires. Est-ce qu'on considère la vente de ce genre de poisson, par exemple le saumon du Fraser qui migre le long de l'île de Vancouver? Le poisson remonté lors de ces pêches expérimentales est-il vendu pour permettre de financer...?
    Dans ce cas, c'est la décision Larocque qui s'applique, et c'est un peu différent de la décision concernant la côte est.
    Sylvain pourrait peut-être vous en dire un mot.
    La décision Larocque a-t-elle été rendue en appel? Ces décisions font-elles actuellement l'objet d'un appel ou est-ce qu'un cour d'appel a déjà tranché?
    La décision Larocque a été rendue par la Cour fédérale d'appel. La première décision remonte à mai 2005 et elle avait été favorable au ministre. L'appel, lui, a été rendu en faveur de Larocque.
    Je pense qu'avec cela vous avez épuisé votre temps, monsieur Lunney.
    S'il vous plaît, monsieur le président, M. Paradis allait me répondre.
    Les pêches expérimentales sont soumises à la même évaluation. Nous avions conclu différentes ententes. Afin de déterminer la façno dont les recettes des licences sont utilisées, il faut partir du genre d'accord qui avait été conclu avec les diverses associations de pêche ou les différentes flottes, dans ce cas.
    J'ai une dernière chose à dire au sujet de l'évaluation des stocks qui, je crois, mérite d'apparaître au compte rendu. Nous avons tous examiné la question de l'effondrement des stocks de morue. Nous avons vu ce qui s'est produit dans d'autres pêcheries, nous en avons étudié un certain nombre en détail et, afin de réagir comme il se doit à la déclaration de M. Byrne, j'estime que certaines précisions s'imposent.
    Dans tous les dossiers que nous avons étudiés, nous avons constaté des ingérances politiques exercées par absolument tous les gouvernements qui se sont succédé. Nous avons vu que des sous-ministres ont pris de mauvaises décisions, mais nous n'avons jamais constaté — du moins je n'ai jamais vu et je tiens à le souligner pour mémoire — de travers sur le plan scientifique.
    Un excellent travail a été accompli sur le plan scientifique, mais de mauvaises décisions ont été prises à partir de là. Il n'y a pas eu suffisamment de recherche scientifique, mais ce qui a été accompli était de bonne qualité et, malgré des circonstances difficiles, vous avez fait du bon travail. Je tenais à préciser cela pour la retranscription.
    Merci beaucoup.
    Je vous en prie.
    Merci beaucoup pour ces mots, monsieur le président. Ils signifieront beaucoup pour nos scientifiques.
    Très bien.
    Comme nous devons accueillir un autre groupe de témoins, nous allons prendre une brève pause de 30 secondes pour permettre à ce groupe de quitter la table. Après cela, nous accueillerons le Fonds mondial pour la nature.

    


    

  (1205)  

    Quand on se presse, 30 secondes se transforment en cinq minutes.
    Avant de commencer — et je crois que la plupart des députés ont reçu ce document — je tiens à préciser que Jean-Denis Dutil, scientifique du MPO à l'Institut Maurice Lamontagne, donnera une conférence intitulée « Le rétablissement de la morue: matière à réflexion », vendredi prochain, 8 décembre, de 13 h 30 à 14 h 30 dans la salle Peter Mitchell au 200 de la rue Kent.
    Certains membres du comité voudront peut-être y assister, s'ils sont ici vendredi après-midi.
    L'article 108(2) du Règlement, étude sur les questions de conservation marine sur la côte Est, j'ai le plaisir d'accueillir notre prochain témoin du Fonds mondial pour la nature au Canada, Robert Rangeley, vice-président, Région de l'Atlantique.
    Bienvenue. Je vous invite à débuter votre exposé et je ne doute pas que les députés ont hâte de pouvoir vous poser des questions.
    Je remercie le comité de m'avoir invité aujourd'hui. Je m'appelle Rovert Rangeley, je suis biologiste de la vie marine et je suis également vice-président, Région de l'Atlantique, pour WWF-Canada.
    Je tiens, avant tout, à vous présenter mes excuses. Comme il s'agit d'une invitation de dernière minute, nous n'avons pas eu le temps de faire traduire mon exposé. J'en ai fait remettre un exemplaire au président.
    Je suis accompagné de Lorne Johnson qui est directeur à notre bureau d'Ottawa.
    Je vais brièvemen vous parler de WWF-Canada avant de passer aux questions que nous désirons aborder avec le comité.
    WWF-Canada a été fondée en 1967 par le sénateur Alan MacNaughton et est devenue à cette occasion l'une des principales organisations de conservation au Canada. Nous bénéficions de l'appui actif de 60 000 Canadiennes et Canadiens. Notre réseau international intervient dans plus de 100 pays de par le monde. Nous cherchons, par l'intermédiaire de nos partisans et partenaires à mettre la vision de WWF en oeuvre, vision qui consiste à arrêter la dégradation de l'environnement naturel de la planète et à bâtir un avenir où l'être humain vivra en harmonie avec la nature. Pour cela, nous voulons protéger la diversité biologique mondiale, veiller à ce que les ressources naturelles renouvelables soient utilisées de façon durable et promouvoir la réduction de la pollution et de la consommation excessive.
    Je vais ouvrir ma présentation en vous parlant d'un de nos objectifs de conservation prioritaires, soit le rétablissement des stocks des Grands bancs. Je vais vous parler des mesures précises qui s'imposent pour parvenir à la durabilité des ressources dans nos eaux océaniques ainsi que des conséquences de l'inaction. Des années et des années de décisions à courte vue, prises dans le domaine des pêches, des tout début de la la pêche industrielle, dans les années 50, jusqu'à nos jours, ont eu des répercussions négatives sur les ressources océaniques dans le monde entier, mais c'est peut-être dans les Grands bancs où ces répercussions ont été les plus dramatiques. Les décisions prises ont conduit à un effondrement écologique, à des difficultés économiques et à l'instauration d'un climat d'incertitude.
    On avait pensé que l'effondrement des pêches, certains stocks ayant décliné jusqu'à atteindre 1 p. 100 de leurs zones historiques, se serait stabilisé après l'application des moratoires, au début des années 90. Nous ne pouvions pas nous tromper davantage. La plupart des gens supposent que, comme le prélèvement de certaines espèces est interdit, on ne remonte plus les poissons en question, mais ce n'est de toute évidence pas le cas.
    Par exemple, nous savons qu'en 2003 seulement, jusqu'à 5 400 tonnes de morue dans le sud des Grands bancs ont été remontées sous la forme de prises accessoires. À l'époque, cela représentait quelque 90 p. 100 du stock estimé. Pourtant, il s'agissait d'une ressource qui était déjà sérieusement en déclin et avait fait l'objet de moratoire depuis 1994. Malgré ce tableau peu reluisant, tout n'est pas perdu dans les Grands Bancs. La productivité y est encore considérable et on y trouve les bases du rétablissement. Pour renverser cette situation, il faut d'abord adopter une vision positive pour les Grands bancs.
    Pour essayer de lancer la discussion, WWF a proposé une vision pour les Grands bancs qui prévoit qu'on retrouve, d'ici 2050, les niveaux de productivét et d'abondance des espèces que l'on a connus dans les années 50. Il serait question de revenir à un écosystème sain et équilibré permettant de soutenir des pêches lucratives susceptibles d'avoir des retombées économiques durables pour les flottes du Canada-Atlantique et les flottes étrangères. Tout n'est pas perdu et WWF ainsi que bien d'autres sont déterminés à ce que le rétablissement devienne réalité.
    Si le Canada veut vraiment déployer des efforts en vue de favoriser le rétablissement des stocks, il devra changer la façon dont il gère ses océans, ce qui se fait attendre depuis longtemps. Bien que près de 15 ans se soient écoulés depuis l'adoption du premier moratoire sur la morue, nous n'avons mis en oeuvre aucun programme de rétablissement, ni aucun plan d'action. Que faut-il donc faire? Essentiellement, plutôt que de porter sur les espèces commerciales, il faut que la gestion des pêches soit axée sur les écosystèmes dont les valeurs de base sont la biodiversité et les habitats. Cela n'a rien de nouveau, ni de controversé. Comme le groupe de témoins précédent vous l'a indiqué, c'est même inscrit au programme du ministère.
    S'il parvenait à réaliser cet exploit, le Canada s'alignerait sur d'autres éléments progressistes, comme l'Alaskan North Pacific et la CCFFMA, qui sont les organisations de gestion des pêches régionales dans l'Arctique. Elles sont parvenues à appliquer une gestion axée sur les écosystèmes afin d'instaurer des pêches durables qui permettent aux pêcheurs de gagner leur vie. Ce sont de bons modèles à suivre pour le Canada.
    Il convient d'appliquer trois mesures que je vais vous décrire dans toutes les eaux canadiennes; elles sont simples et non contestées. Le ministère des Pêches et des Océans a pris un engagement. Le problème, c'est de joindre le geste à la parole. De plus, les dirigeants canadiens, ceux qui doivent passeer aux actes, devront influencer l'Organisation des pêches de l'Atlantique nord-ouest, l'OPANO, et alimenter la réforme entreprise. Cela est essentiel pour assurer le rétablissement des stocks des Grands bancs et c'est notre dernière chance d'y parvenir.

  (1210)  

    Comme première mesure, le MPO doit diriger la mise en oeuvre de plans de rétablissement pour les stocks décimés. Comme on l'a bien vu, les moratoires seuls ne suffisaient pas. De telles mesures radicales doivent être accompagnées de plans de rétablissement efficaces assortis d'objectifs mesurables, d'échéanciers et de mesures de gestion complètes concernant toutes les causes de la mortalité du poisson, y compris les prises accessoires et la protection des habitats importants.
    S'il y avait eu une véritable stratégie de rétablissement de la morue, des décisions comme celles qui ont été prises au printemps dernier, soit la rouverture de la pêche à la morue du Nord et l'autorisation de la pêche sportive à la morue, auraient été évaluées en regard des objectifs du plan. Le fait que tel n'a pas été le cas montre une propansion à jouer aux apprentis sorciers à propos du rétablissement de la morue et des futurs moyens de subsistance des pêcheurs.
    Deuxièmement, le MPO doit élaborer et appliquer des mesures destinées à réduire sensiblement les prises accessoires. Les taux de mortalité actuels du poisson, surtout à cause des prises accessoires, sont tels qu'ils entravent le rétablissement des stocks visés par les moratoires. Les prises accessoires contribuent aussi à la surexploitation des stocks dont la pêche est autorisée et a aussi des effets négatifs sur les espèces non commerciales. Il faut, au minimum, fixer des limites absolues de prise secondaire, et cela à des niveaux qui favoriseront le rétablissement.
    Troisièmement, le MPO doit protéger les habitats. Le Canada doit accélérer l'expansion de son réseau de zones de protection marine. Pour l'instant, 0,5 p. 100 seulement des eaux canadiennes sont protégées, soit beaucoup moins que l'objectif que s'était fixé le gouvernement et qui aurait consisté à établir un réseau de zones de protection marine représentatif couvrant au moins 10 p. 100 de nos océans d'ici 2012.
    Il est également fondamental de recenser et de protéger les zones sensibles, comme les massifs coralliens et les zones qui servent de nurserie. Un réseau de zones de protection maritime correctement conçu et mis en oeuvre sera un objectif essentiel à la réalisation des objectifs de rétablissement et de gestion axée sur les écosystèmes. La santé des océans en dépend.
    Les progrès réalisés dans l'établissement de zones de protection sont lents, mais il serait possible d'agir immédiatement.
    Par exemple, le ministre pourrait rapidement autoriser l'initiative de gestion intégrée de l'est du plateau néo-écossais, le GIEPNE. Il doit approuver le plan qui est prêt. Celui-ci représente sans doute la mesure la plus déterminante qui fait appel à toutes les parties prenantes dans la gestion des océans. Il est assorti d'un plan pour les zones de protection.
    De plus, le MPO et d'autres organismes gouvernementaux concernés ont indiqué que trois secteurs pourraient bientôt être officiellement désignés ZPM, cette désignation étant promise depuis de nombreuses années. Il s'agit de zones exceptionnelles sur le plan écologique dont la désignation fait l'objet d'un solide appui local. Si le gouvernement respectait ses engagements, il serait possible de désigner rapidement le nom sous-marin Bowie, sur la côte Pacifique, la zone de conservation marine nationale de l'ouest du Lac Supérieur, et la zone faunique nationale Igaliqtuuq.
    Cela étant, quelles pourraient être les conséquences de l'inaction ou du statu quo? Eh bien, le monde a récemment été choqué d'apprendre que l'effondrement général des stocks de poissons et de fruits de mer pourrait devenir réalité avant 2050 à moins qu'on mette en oeuvre les réformes dans les pêches. L'étude publiée par Boris Worm dans le magazine Science, montre que cette catastrophe est due à un déclin soutenu de la biodiversité essentiellement occasionné par de mauvaises pratiques de pêche. À cause de ce déclin, l'océan ne parvient pas à produire autant de poissons et de fruits de mer et il ne peut pas non plus résister à la propagation des maladies, il ne filtre plus les polluants et il ne parvient pas à se remettre des stress que lui imposent la surpêche et le changement climatique.
    Les Canadiens sont parfaitement au fait des répercussions sociales et économiques qu'un tel désastre pourrait avoir. S'il est évident que nous sommes sur une pente dangereuse, la bonne nouvelle, c'est qu'il est possible de rétablir les stocks de poisson à condition d'adopter des mesures puor promouvoir et pour protéger la biodiversité.
    WWF met cette législature au défi de contribuer à la réalisation de notre vision du rétablissement des stocks des Grands bancs en agissant maintenant et en donnant suite à l'engagement du Canada d'assurer la gestion des océans.
    Je vous remercie de votre temps et de votre attention. Je me tiens à votre disposition pour discuter de ces questions.

  (1215)  

    Merci pour cet exposé, monsieur Rangeley.
    Nous allons entamer la première série de questions par M. Matthews.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Rangeley, de vous être déplacé.
    J'ai suivi votre exposé avec grand intérêt et je dois vous dire bien honnêtement que je suis très intéressé à la morue des Grands bancs et aux ressources halieutiques de ce secteur en général, et cela pour un certain nombre de raisons. Je me préoccupe de l'approvisionnement de la planète en protéine, mais je représente une région de Terre-Neuve-et-Labrador, sur la côte sud, qui a été durement frappée à cause du fléchissement des stocks de morue. C'était pourtant cette ressource qui nous avait amené à nous installer là, et la population est en déclin dans cette région. Nous sommes obligés d'aller chercher du travail ailleurs, parce que le stock de morue a été décimé.
    D'une certaine façon, j'ai de la chance, parce que la région que je représente vit de deux types de pêche commerciale, celle des 3PS et celle de la morue du golfe. Comme nous sommes dans le Sud, cela est sans doute en grande partie dû au fait que les eaux sont plus chaudes et aussi plus riches en substances nutritives. Je pense que cela joue, mais nous sommes tout de même très loin de nos niveaux historiques.
    À propos du plan de rétablissement dont vous avez parlé, je pense que personne ne peut être contre. Personnellement, je pense être d'accord avec cela. Les gouvernements successifs se sont montré négligeants en n'adoptant pas de plan de rétablissement convenable.
    Il est évident qu'il faut réduire les prises secondaires, mais j'ai une petite question à vous poser à ce sujet. Qui sont les principaux responsables des prises secondaires? On parle bien du secteur sud des Grands Bancs. Qui remonte les prises secondaires là-bas?
    On n'insistera jamais assez non plus sur la nécessité de protéger les habitats. Je vais vous dire ce que j'ai trouvé de plus intéressant dans votre exposé — et j'aimerais que vous répondiez à ma question sur les prises secondaires, si vous le pouvez.
    Nous parlons de gestion de l'écosystème et d'instauration d'un écosystème équilibré. Plusieurs facteurs interviennent dans le déclin des stocks de morue et il faudra donc s'attaquer à ces différents facteurs pour regénérer ce stock de morue.
    Vous n'avez absolument pas parlé du comportement des prédateurs. J'aimerais avoir vos réactions à ce sujet, parce que c'est un facteur qui s'ajoute aux trois que vous avez mentionnés, qui sont importants et avec lesquels je suis d'accord. Celui-là, en revanche, vous n'en avez pas parlé, mais j'estime qu'il est essentiel que nous nous en occupions.

  (1220)  

    Très bien.
    Je vais rapidement vous répondre au sujet des prises secondaires, après quoi je passerai aux autres facteurs que vous avez mentionnés.
    Ce qu'il y a d'étonnant dans le cas du secteur sud des Grands bancs — et cela montre la valeur de ce modèle qui fait ressortir ce que nous avons fait de travers et ce que nous pourrions améliorer — c'est que c'est l'un des secteurs les plus productifs. Le courant froid qui descend du Labrador transporte des éléments nutritifs depuis l'Arctique; le golfe stream vient réchauffer les eaux et stimuler ainsi la production. C'est dans ce secteur sud des Grands bancs que beaucoup de scientifiques estiment que débutera le rétablissement de la morue.
    Malheureusement, depuis 1994, depuis l'adoption du moratoire, les niveaux de prises secondaires n'ont cessé d'augmenter année après année. Je vous ai parlé de l'année qui a sans doute été la pire, 2003. Les flottes espagnoles, portugaises et russes remontaient différentes espèces et les flottes canadiennes pêchaient surtout la sériole à queue jaune dans le sud des Grands bancs. Les flottes canadiennes et étrangères ont donc contribué au phénomène.
    La flotte canadienne et le ministère se sont vraiment efforcé de réduire le nombre de prises secondaires, notamment en modifiant les engins.
    Pour ce qui est des prédateurs — et il est éviden tque vous voulez parler des phoques — je vous dirai deux choses. D'abord, il y a lieu de se demander ce que nous en savons. Chez n'importe quelle population animale fragilisée, on constate une diminution de la capacité de résister à des facteurs environnementaux, comme la variabilité du changement climatique ou la prédation. Un stock de morue sain et fort peut mieux résister qu'un stock décimé aux effets d'une prédation soutenue ou à une forte présence de prédateurs.
    Comme on a pu le constater partout dans le monde, l'abattage massif des phoques, le contrôle des prédateurs, ne fonctionnent pas et ne représentent pas un bon moyen de gérer les écosystèmes.
    Si vous voulez savoir si nous en faisons assez à propos des prédateurs, de la chasse aux phoques, qui est durable, je répondrai que c'est une question différente. Je ne mélange pas les deux enjeux.
    Est-ce que je réponds à votre question?
    Dans la partie du monde d'où je viens, on a l'impression que les organisations comme la vôtre préféreraient que la population de phoques soit de 20 millions d'individus plutôt que de rétablir le stock de morue et ainsi de favoriser un mode de vie rurale. Je vais être très honnête avec vous. Nous subissons de plein fouet les conséquences de cette situation, puisque un tiers ou un quart de notre population doit s'expatrier pour trouver du travail ailleurs, tandis que la population de phoques augmente
    J'ai demandé à d'autres pourquoi ils se préoccupent davantage de la santé des phoques que de celle des êtres humains. J'ai personnellement l'impression que les gens font une fixation sur le loup marin. Je suis d'accord sur le fait qu'il faut régler plusieurs facteurs tout à fait légitimes, comme les prises secondaires, les habitats et le plan de rétablissement. En revanche, je ne m'explique pas cette résistance à reconnaître un autre facteur.
    Le troupeau de phoques est viable à 2 millions de têtes, mais nous savons qu'il y a au moins 6 millions de phoques du Groenland auxquels il faut ajouter les phoques gris, les phoques à crête et les phoques communs. Vous voyez ce que je veux dire? Faisons donc preuve de maturité à ce sujet et attaquons-nous à cet autre facteur.

  (1225)  

    Je tiens à préciser notre position à ce sujet, et elle est connue: nous ne sommes pas opposés à la chasse aux phoques. Nous n'avons pas de position particulière au sujet du phoque. C'est une chasse durable.
    Je vais essayer de croire ce que vous dites, monsieur Rangeley et, pour être juste envers le Fonds mondial pour la nature, je dois préciser que votre organisation ne s'est pas prononcée contre la chasse aux phoques, du moins pas ces dernières années, et qu'elle a appuyé une chasse durable. D'autres groupes, que l'on confond souvent avec le WWF, comme le Fonds international pour la défense des animaux, ont combattu la chasse aux phoques, mais le Fonds mondial pour la nature—
    Je vais conclure ma remarque, monsieur le président.
    Pourquoi n'avez-vous pas mentionné ce quatrième facteur? Pourquoi n'avez-vous pas parlé des quatre facteurs? Il peut être pratique, parfois, de taire certains détails.
    Nous voulons gérer nos activités, mais nous ne pouvons pas gérer l'écosystème. Quand on parle de gestion axée sur les écosystèmes, on ne veut pas dire « gestion des écosystèmes ». On sait depuis très longtemps qu'on ne peut pas manipuler les écosystèmes. Les prédateurs sont présents et je suis tout à fait d'accord avec vous pour dire qu'ils constituent un facteur, mais nous ne croyons pas qu'il est possible de les contrôler, de les gérer en appliquant une démarche scientifique.
    Merci.
    M. MacAulay.
    J'ai une simple question à vous poser. Dois-je comprendre ce que vous dites que, si la population de phoques passait de 6 millions à 2 millions d'individus, cela n'aurait pas d'effet sur les stocks de morue?
    Corrigez-moi si j'ai tort, mais j'ai l'impression qu'un des plus importants consommateurs de morue dans le monde, c'est le phoque. Y a-t-il quelque chose que je ne comprends pas? S'il y a moins de phoques, si la population de phoques est contrôlée... J'ai l'impression que 6 millions de phoques peuvent prendre davantage de poissons que 2 millions et que ce n'est donc pas simplement une question...
    Nous avons beaucoup de mal au Canada à éduquer le reste du monde à ce sujet. Vous dites que vous n'êtes pas opposé à la chasse aux phoques, mais vous savez parfaitement que bien d'autres organisations et des nababs ne font rien d'autre que de dénoncer la façon dont se pratique la chasse aux phoques — et je suis sûr que vous êtes conscient qu'ils déforment la réalité — en s'appuyant sur des photos vieilles de 10 ou 15 ans.
    On a du mal à comprendre que vous puissiez dire que les phoques ne sont pas un facteur parmi d'autres.
    Le lien entre le nombre de phoques et le nombre de morues consommées, de même que les répercussions sur les populations n'est pas scientifiquement établi. Il est certain que... Je ne vais pas défendre...
    La dynamique des interactions entre les prédateurs et les proies est complexe; elle n'obéit pas et n'obéira jamais à un lien direct. Les phoques mangent bien d'autres choses; les populations de morue ne varient pas en fonction du nombre de phoques. Si le stock de morue se portait bien, il pourrait résister aux prélèvements par les phoques.
    En fait... Il faut faire table rase de l'idée voulant qu'un prédateur égale une proie. C'est tout ce que je veux dire: nous devons envisager d'appliquer un système de gestion axé sur les écosystèmes, nous devons restaurer des refuges et permettre aux systèmes que nous stressons en permanence, comme les coraux, les autres habitats et les zones de reproduction de la morue, par exemple, de retrouver leur santé et leur résistance.
    Les phoques sont un facteur, mais personne ne pourra vous dire combien il faudrait en abattre pour favoriser le rétablissement de la morue.
    Le président: Allez-y, monsieur Cuzner.
    Je ferai très, très vite, c'est promis.
    Lors du passage des témoins précédents, le président a dit que nous avions un programme scientifique de qualité. Pouvez-vous nous parler de façon générale de ce programme des sciences au MPO? Est-il suffisant? Est-il correctement orienté?
    Très vite, je vous prie.
    Pas de problème. Vous posez une bonne question.
    Il est certain que le MPO peut compter sur d'excellents scientifiques. Quant à savoir si le ministère a adopté les bonnes priorités, il se trouve que nous travaillons en permanence en étroite relation avec le MPO du point de vue de la gestion de la politique en science. Beaucoup de scientifiques du ministère savent ce qu'il faut faire. Il n'y a rien de nouveau en ce qui concerne la gestion axée sur les écosystèmes. Les scientifiques du ministère font partie du peloton de tête sur la scène internationale en matière d'élaboration des outils et des modèles à appliquer. Le problème, c'est la mise en oeuvre. S'il y a un aspect sur lequel il faudrait insister davantage — parce que tout ne peut entièrement reposer sur les scientifiques, pas plus que sur le MPO — c'est celui des décisions que les gestionnaires du ministère prennent relativement aux approches à retenir et à la façon de les mettre en oeuvre.
    Autrement dit, nous n'avons pas besoin de faire davantage de recherches pour faire bouger les choses. La science n'est pas un frein.

  (1230)  

    Merci, monsieur Rangeley.
    Monsieur Blais.

[Français]

    Merci de votre témoignage, monsieur Rangeley.
    Je n'ai pas d'autre choix que d'aborder le dossier des loups-marins. Je représente la Gaspésie et les Îles-de-la-Madeleine. Je ne vais pas me lancer dans un débat scientifique, mais je vais vous faire part de mon opinion et je vous poserai ensuite une question.
    Compte tenu de la baisse de population de la morue, le « facteur loup-marin » prend plus d'importance. Il ne s'agit plus d'une situation où la population de morue est saine et les ressources marines abondantes. Dans ces conditions, qu'on le veuille ou non, le loup-marin a plus d'impact. Vous dites qu'il n'existe pas de lien de cause à effet. Ça me fait penser au fait qu'il y a plus de crevettes parce qu'il y a moins de morue. C'est un lien de cause à effet. C'est mon opinion. Je ne vais pas me lancer dans un débat scientifique, à moins que vous y teniez absolument. C'est à vous de voir.
     Vous dites être d'accord pour qu'il y ait une chasse au phoque faite de façon correcte, comme c'est le cas actuellement. En revanche, les gens du Fonds international pour la protection des animaux et de la Humane Society me donnent l'impression d'agir uniquement pour l'argent que ça leur rapporte. Ils veulent peut-être simplement qu'il n'y ait plus de chasse au phoque, mais je n'en suis même pas sûr. Ils ont peut-être intérêt à ce qu'elle subsiste, ce qui leur permettrait de faire encore plus d'argent. Leurs arguments n'ont aucun fondement scientifique. C'est de la désinformation, de la démagogie.
    Que pensez-vous de la campagne contre la chasse au phoque que mènent les gens du Fonds international et de la Humane Society pour la protection des animaux?
    Vous hésitez. Qui ne dit mot consent?

[Traduction]

    Je vais essayer de vous répondre et je pense avoir compris.
    À la façon dont nous concevons la chasse aux phoques, socialement et économiquement, nous estimons que cette activité est légitime. Elle est ancrée dans la tradition culturelle, comme beaucoup de pêches. Elle constitue une activité de prélèvement légitime qui est durable. Je n'en dirai pas plus au sujet de la chasse aux phoques. Nous n'avons pas de problème avec cette chasse.
    Par ailleurs, nous comprenons bien le rôle qu'elle joue dans le golfe et dans les provinces de l'Atlantique. Nous comprenons. En fait, nous avons travaillé avec les chasseurs de phoques. Nous n'y voyons pas de problème.
    Je ne sais pas ce que je pourrais ajouter d'autre, à moins que j'aie mal compris votre question.

[Français]

    C'était davantage un commentaire qu'une réponse.
     Je serais tenté d'utiliser des termes antiparlementaires, mais je ne le ferai pas.
    Je veux savoir ce que vous pensez de la campagne de démagogie et de désinformation du Fonds international et de la Humane Society pour la protection des animaux.

[Traduction]

    Je n'ai rien à dire à ce sujet. Je suis atterré chaque fois que je vois quelqu'un, quelque part, communiquer des renseignements erronés. Je sais que cette question est particulièrement volatile. En ce qui me concerne, je reconnais que les groupes de défense des animaux ont droit à leurs opinions, même si je ne suis pas particulièrement d'accord avec eux. Nous sommes une organisation vouée à la promotion de la conservation. Nous nous en tenons à ce que nous connaissons, c'est-à-dire la conservation. Nous ne touchons pas aux questions de défense ou de protection des animaux.
    Que pourrais-je vous dire de plus? Je comprends votre douleur. J'ai du mal à m'imaginer au coeur de cette tempête, comme c'est le cas des résidents de l'Île-du-Prince-Édouard, de la côte Nord et de Terre-Neuve.

  (1235)  

[Français]

     Si votre groupe ou organisme pouvait dénoncer cette campagne de démagogie et de désinformation, ça nous aiderait et ça contribuerait à faire ressortir la vérité. Je ne vous demande pas de dire que la population de phoques dans son entier devrait être exterminée ou de proposer une quelconque mesure du genre. Toutefois, il faut à mon avis dénoncer ceux qui doivent être dénoncés. Je ne dénonce pas le fait que ces gens se préoccupent des espèces en voie de disparition, mais je dénonce le fait qu'ils utilisent la désinformation et la démagogie pour arriver à leurs fins sur le plan financier.
    Je ne vous demande pas d'aller aussi loin que moi, mais je vous demande de participer au combat, parce que nous sommes en effet en plein combat. Nous combattons un groupe qui fait de l'argent à nos dépens, sur la place publique. En fin de compte, ces gens disent que les chasseurs de phoques sont des barbares et que cette chasse est complètement inutile.
    Plus les gens voudront connaître la vérité et plus ils dénonceront ceux qui font des campagnes de démagogie, plus la situation s'améliorera pour tout le monde et plus la vérité ressortira.

[Traduction]

    Pouvez-vous nous donner une réponse très brève, monsieur Rangeley?
    Pour vous répondre rapidement, je dirai que nous avons fait ce que vous décrivez et que nous avons fait tout notre possible. Autrement dit, nous ne nous sommes pas opposés à la chasse aux phoques. Le fait que la première organisation de conservation au monde ne s'oppose pas à cette chasse en vertu du principe qu'elle défend en dit long sur la science. Croyez-moi, nous étudions la chasse aux phoques. Si un jour elle devait poser un problème sur le plan de la conservation, nous aurions alors un mot à dire du point de vue de la conservation. Pour l'instant, ce n'est pas un problème. Il demeure que ce dossier détourne énormément l'attention d'autres questions que je juge plus importantes, comme celle des ressources et toutes les autres. Nous recevons des millions de lettres venant du monde entier à ce sujet.
    Vous devez savoir que nous sommes présents dans des centaines de pays et que nous avons à composer avec des différences culturelles énormes qui sont sources de difficultés. Nous avons examiné cette question de près au sein de l'organisation, à cause de certaines de ces différences culturelles. Notre organisation présente une position unifiée à l'échelle de la planète qui n'est donc pas uniquement celle de WWF-Canada. C'est là, je pense, que se situe notre force.
    Nous n'allons pas nous lancer dans une campagne contre d'autres organisations. Nous avons déjà beaucoup à faire pour maintenir le cap dans les questions de conservation et j'estime que notre position en dit suffisamment sur notre point de vue au sujet de la crédibilité des données scientifiques.
    Merci pour cela, monsieur Rangeley.
    Monsieur Stoffer.
    Merci, monsieur le président, et merci à vous, monsieur, d'avoir accepté notre invitation.
    Vous avez parlé des zones de protection maritime et je dois vous dire que je suis entièrement d'accord avec ce que vous en avez dit. Tout comme vous, nous sommes nombreux à être extrêmement frustrés par la lenteur des progrès réalisés à cet égard. On nous ressert jusqu'à plus soif les mêmes discours creux voulant que ces zones sont importantes et qu'il faut passer aux actes, mais rien n'est fait. Qu'en pensez-vous? Qu'est-ce qui explique, selon vous, la réticence du gouvernement, par le truchement du ministère des Pêches et des Océans et des autres ministères, à agir rapidement dans ce dossier très important à propos duquel nous disposons de données scientifiques? Comme vous le disiez, rien de cela n'est nouveau. Pourquoi, selon vous — c'est-à-dire le WWF — le gouvernement aborde-t-il de façon aussi étrange cette question par ailleurs très importante?
    J'aimerais pouvoir vous répondre. Le gouvernement s'est engagé à créer des ZPM représentant 10 p. 100 de la totalité de nos eaux d'ici 2012, c'est-à-dire d'ici très peu de temps. Les zones de protection maritime actuelles sont grandes comme trois timbres-poste et représentent plus ou moins 0,5 p. 100 de nos océans.
    À partir de ce que nous avons conclu de notre analyse des meilleures données disponibles sur les zones de protection de par le monde, nous avons préparé un cadre de planification pour les zones de protection et nous venons juste d'apporter la touche finale à un rapport scientifique complet, que je n'ai pas avec moi parce qu'il est encore sous presse, sur la façon de mettre ces zones en oeuvre.
    Vous devez savoir deux ou trois choses au sujet des zones de protection. L'approche que nous recommandons ne consiste pas à annoncer — de façon arbitraire et autoritaire — le tracé sur une carte de zones interdites aux pêcheurs. Nous proposons, par exemple, de reprendre le modèle adopté pour l'est du plateau néo-écossais. Comme vous le savez, il s'agissait d'un processus dirigé par le MPO qui a découlé de la création de la ZPM Gully.
    La reconnaissance de la ZPM Gully — la toute première dans l'Atlantique Canada — a été l'aboutissement d'un processus plutôt désordonné. Il s'agit d'une vaste zone qui est importante au titre de la protection du plus grand canyon de la côte est nord-américaine fréquenté par la baleine à bec commun et où l'on trouve des coraux profonds et d'autres espèces qu'il convient de protéger maintenant que nous en avons appris davantage à leur sujet.
    Je me suis beaucoup entretenu avec des représentants de l'industrie à l'époque et il nous a semblé que le problème était dû au caractère circonstanciel de ce projet. Il sortait de nulle part et les gens ne savaient pas comment réagir.
    On peut se demander comment inclure tous les utilisateurs dans un plan concernant les zones de protection. Eh bien, nous avons décidé de relever le défi. Une façon de s'y prendre consiste à participer et à contribuer à la formulation des objectifs de gestion intégrée. Sur ce plan en particulier, il y a eu le projet pilote de GIEPNE.
    C'est précisément ce que je disais tout à l'heure. Il faut que le ministre autorise ce plan l'année prochaine et tout semble indiquer qu'il le fera. C'est un bon plan.
    Passons aux zones de protection. Nous ne préconisons pas de créer de façon ponctuelle des zones de protection, ici et là. Nous favorisons la planification systématique de réseaux représentatifs, et ce qu'il y a de bien avec cette approche et avec les outils que nous avons utilisés — inspirés des meilleurs modèles en vigueur dans le monde — c'est qu'ils sont synonyme de souplesse. On commence par s'entendre sur les objectifs et sur les valeurs à protéger, puis on mobilise les autres parties prenantes.
    On dispose d'une assez bonne souplesse dans le tracé du contour des ZPM dont beaucoup sont destinées à des types d'utilisation différents.
    Nous recommandons d'appliquer une formule de zonage qui permettra de couvrir 10 p. 100 de nos océans pour protéger les lieux les plus précieux et les habitats les plus représentatifs en mobilisant l'industrie et les autres décisionnaires plutôt qu'en créant une carte immuable de ces zones.
    Une partie du problème qui explique la résistance initiale de l'industrie — laquelle est selon moi à l'origine de la résistance du ministère — tient au fait que les gens ont vu dans la création de la première ZPM une pente glissante qui allait inexorablement aboutir à une augmentation du nombre de ZPM et du nombre de règles qui empêcheraient l'industrie de pêcher.
    Eh bien, c'est tout à fait l'opposé. Il est plutôt question de gérer les écosystèmes parce que c'est le genre de mesure qui contribuera au rétablissement que nous recherchons et à l'instauration d'une viabilité à long terme. C'est l'approche que nous recommandons.

  (1240)  

    L'autre question que je veux vous poser — et je pense que vous êtes sur la bonne voie, parce que, comme le comité le sait, j'ai posé la question au ministre — concerne les deux lacs dans le centre de Terre-Neuve qui, en vertu du processus de l'annexe 2, ont été cédés à une compagnie minière qui veut les transformer en bassins de résidus miniers. Bien évidemment, il est question que cette compagnie restaure l'habitat ou en aménage un autre ailleurs pour qu'il n'y ait pas de perte nette sur ce plan. Cela revient donc à autoriser la compagnie à se livrer à ses activités à condition qu'elle s'occupe de l'habitat.
    Je compare ce genre de situation au fait d'autoriser quelqu'un à raser tous les arbres d'un parc national à condition qu'il en plante quelques-uns dans son jardin.
    Allez-vous poser une question?
    J'y viens.
    Eh bien, comme votre temps est écoulé, je vous invite à faire très vite...
    Comme vous le savez, le gouvernement n'a pas appuyé le moratoire que les Nations Unies recommandaient d'imposer sur la pêche au chalut en haute mer.
    Je ne vous ai pas entendu en parler, mais est-ce que WWF est favorable à un quelconque moratoire, pas uniquement en ce qui concerne ce genre de pêche dans les eaux internationales, mais aussi pour la pêche au chalut dans la limite des 200-milles?
    Non.
    À propos de la décision récente prise par le gouvernement de ne pas appuyer le moratoire sur la pêche au chalut en haute mer, nous estimons qu'il s'agit d'une pêche non réglementée. Le Canada siégeait au groupe de travail international sur la pêche illégale, non réglementée et non déclarée. Nous avons pris les engagements voulus en matière de gestion axée sur les écosystèmes et sur les autres aspects dont je vous parlé. Pourquoi donc ne serions-nous pas d'accord avec un moratoire visant à suspendre la pêche de façon temporaire~— et comme, dans ce cas, il s'agissait de chalut, tout le monde s'est inquiété de voir qu'on visait un type d'engin...
    En fin de compte, nous ne pouvons pas être d'accord avec une pêche non réglementée. Nous avons assez de difficultés avec la pêche réglementée qui concerne des stocks préoccupants. Voilà la situation. Je ne comprends absolument pas pourquoi le Canada n'a pas pris position à cet égard.
    Merci pour cela, monsieur Rangeley.
    Monsieur Kamp.

  (1245)  

    Merci, monsieur Rangeley. Une autre fois peut-être je pourrai vous expliquer pourquoi nous avons adopté cette position dans ce dossier, mais je ne vais pas essayer de le faire maintenant.
    J'aimerais avoir des précisions sur deux points.
    Votre organisation a-t-elle calculé l'effet que pourrait avoir sur les pêches canadiennes le fait de réserver 10 p. 100 de nos zones océaniques à des ZPM, conformément à notre objectif de 2012? Je crois vous avoir entendu dire deux choses à ce sujet: d'abord que l'industrie va adorer cette formule parce que les stocks se rétabliront, mais aussi qu'elle devra pêcher moins. Ne va-t-elle pas devoir composer avec toutes sortes de secteurs où la pêche sera interdite, ce qui aura des effets négatifs sur les pêcheurs? Je ne veux pas savoir si c'est bon ou mauvais. Je veux simplement savoir si, selon vous, c'est ce qui va se produire.
    Je dirai deux choses à ce sujet. D'abord, je n'affirme pas que l'industrie est favorable à la création de zones de protection. Je vais vous lire un passage d'un de nos récents communiqués de presse à ce sujet :
L'industrie a légitimement le droit de s'interroger sur le genre de répercussions que les mesures de conservation auront sur elle et nous avons justement conçu cette étude pour montrer qu'il est possible de tenir compte de ce genre de préoccupations.
    Certains membres de l'industrie ont compris et veulent participer, mais d'autres résistent pour des raisons que je vous ai mentionnées.
    N'oubliez pas que l'objectif n'est pas de créer des ZPM qui ne sont finalement qu'un des outils disponibles. Nous devrons appliquer tout un ensemble de solutions y compris des zones de protection, à partir des constats les plus récents, notamment ceux de l'article scientifique de Boris Worm que j'ai cité et qui ont quelque chose de rassurant. Par exemple, la consolidation de la biodiversité que favorisent notamment les ZPM permet d'accroître la production des océans, surtout dans le cas des pêches. Ce que nous disons, c'est que les zones de protection sont un instrument. Nos pêches et nos écosystèmes sont dégradés et nous ne parviendrons pas à les améliorer si nous ne restaurons pas une partie des refuges et si nous ne protégeons pas les zones clés pour le bien de la pêche et des pêcheurs.
    Nous n'avons pas pour objectif de mettre les pêcheurs au chômage. Ce que nous voulons, c'est parvenir à des pêches durables qui soient de préférence plus rentables et plus stables grâce à une plus grande diversité des stocks de poisson et à une diminution de notre dépendance des invertébrés sur lesquels nous misons actuellement beaucoup, surtout sur la côte Atlantique où nous pêchons les espèces qui sont tout au bas de la chaîne alimentaire, à la suite de l'élimination des prédateurs.
    La création de ces zones de protection va-t-elle entraîner une réduction de la pêche? À l'échelle planétaire, on ne connaît pas la réponse. Cela va ressembler à une mosaïque où tout dépendra des objectifs visés. C'est précisément pour cela qu'il faut inciter l'industrie de la pêche à contribuer à ce genre d'efforts, mais on ne peut prendre la décision de désigner ou non telle ou telle zone que dans le cadre d'une politique de zonage. Les zones de protection ne sont qu'un instrument parmi d'autres, car il en existe toute une gamme. Cela ne revient pas à ériger des clôtures pour tenir les pêcheurs à distance. Il est en fait question de protéger les valeurs de conservation qui sont essentielles à une pêche véritablement durable. C'est cela l'objectif que vous ne devez pas perdre de vue quand vous parlez de zones de protection, parce qu'il n'est pas question d'ériger des clôtures.
    Je comprends cela. Votre argument est convaincant, mais si vous pouviez vous trémousser le nez pour devenir ministre des Pêches et des Océans et pouvoir instaurer ce genre de ZPM en fonction des objectifs fixés, il faudrait d'abord que vous ayez une certaine idée de l'emplacement de ces futures zones et de la façon dont les pêcheurs seront touchés.
    Pour l'instant, à la suite de nos analyses, nous avons formulé une série d'options. À partir de là, à partir de la cartographie que nous avons établie avec le SIG et de notre travail d'analyse, nous avons déterminé où se trouvent les valeurs de conservation clés. Cela ne veut pas dire que chacune de ces zones de valeur sur le plan de la conservation vont devenir une ZPM. Voilà ce dont je parlais; je parlais d'un processus consistant à mobiliser l'industrie et les décideurs afin de prendre des décisions difficiles et de protéger les bonnes zones pour les bonnes raisons et en fonction des objectifs fixés. Comme je le disais, cet instrument est souple et, tant que vous ne l'appliquerez pas et ne l'utiliserez pas pour effectuer une analyse coûts-avantages... On pourrait toujours décider de sacrifier une valeur de conservation pour réaliser un gain économique, mais au moins cette décision serait prise ouvertement plutôt que sans planification et hors de tout processus décisionnel.
    Je ne chercherai pas à vous faire croire qu'il y a eu entente sur d'éventuels tracés, mais il faut commencer par une analyse des facteurs clés et cela n'a pas été fait.

  (1250)  

    Estime-vous, en ce qui concerne les Grands bancs, que l'espèce ne se rétablit pas à cause de la surpêche qui continue?
    Quand nous avons effectué notre étude, nous nous étions dit que, logiquement, le stock se rétablirait après le moratoire de 1992, mais force nous a été de constater qu'il ne l'a pas fait de façon notoire. C'est du moins ce qu'on nous a dit. Nous cherchons à en connaître les raisons éventuelles. Ce qui m'intrigue, c'est que vous semblez dire que la surpêche se poursuit.
    Elle contribue au problème. D'abord, je crois que tout le monde reconnaît à présent que la surpêche a été une des causes du problème. Nous sommes arrivé à une certaine situation à cause de la surpêche. On entend parler d'autres facteurs, comme les prédateurs et les facteurs environnementaux qui contribuent à freiner le rétablissement. Les prises secondaires de nombreux stocks sont aussi un facteur, tout comme la pêche illégale non déclarée. Les facteurs ne manquent donc pas.
    Nous soutenons que, pour stimuler le rétablissement, il faut recourir à tout un ensemble d'outils. Nous ne parviendrons au rétablissement que si nous nous fixons des objectifs que nous chercherons à atteindre en mettant en oeuvre les bonnes protections, c'est-à-dire: limiter la mortalité indirecte et les sources directes de mortalité comme les prises secondaires et la mortalité indirecte due à la disparition des habitats, par exemple. Nous y arriverons que si nous nous fixons des objectifs de rétablissement précis. Or, il n'y a pas de plan pour le rétablissement.
    Nous savons que les moratoires sont des mesures radicales, mais insuffisantes, parce que nous en avons déjà imposés et que nous avons encore neuf stocks chevauchants qui font toujours l'objet de moratoires et qui ne se sont pas rétablis. Cela ne suffit donc pas et il nous faut faire autre chose. Le statu quo ne donne rien. D'ailleurs, bien d'autres stocks continuent de décliner. Ils ne se sont même pas stabilisé après l'application du moratoire, ce qui est plutôt triste.
    Je crois que nous sommes d'accord avec vous. D'ailleurs, l'une des choses que nous avons trouvé surprenantes, c'est qu'il n'y a pas de plan de rétablissement, mais je pense que nous en avons parlé.
    Dois-je comprendre que vous n'êtes pas d'accord avec la décision de permettre la pêche récréative et une pêche commerciale limitée à la morue du Nord, cette saison?
    Peu importe la décision, elle a été prise sur de mauvaises bases. Vous vous souviendrez ce qui s'est produit avant l'ouverture de cette pêche. Il avait été recommandé d'inscrire la morue du Nord sur la liste des espèces en péril, mais le ministère et le ministre se sont prononcé contre. Cette décision a été en partie justifiée par l'absence de stratégies de rétablissement.
    Il existe un document qui concerne la stratégie de rétablissement, qui est intitulé : « Vers une stratégie de rétablissement et de gestion des stocks de morue à Terre-Neuve-et-Laborador », mais ce document n'a rien d'une stratégie, puisque c'est un document de travail, un document cadre. Il n'a donc rien de stratégique et il ne propose aucune action ni aucun plan. Il faut disposer d'un plan d'action.
    J'estime qu'en l'absence d'un plan il était irresponsable d'ouvrir cette pêche à la morue, y compris la pêche sportive.
    Je ne vais pas ergoter sur la contribution éventuelle de cette pêche sur la réduction des stocks de morue. J'ai examiné l'évaluation des stocks en question et j'ai constaté que bien des données sont erronées et qu'on a semblé faire tout cela un peu au petit bonheur de la chance. Quoi qu'il en soit, la décision a été prise sans s'appuyer sur un plan.
    De plus, quel message de conservation envoie-t-on au reste du monde après tout cela? Nous faisons beaucoup de bruit — bien souvent de façon justifiée — au sujet du genre de répercussions que peuvent avoir les activités des signataires de l'OPANO à l'extérieur de notre ZEE. Pourtant, quand nous prenons des décisions à propos desquelles les gens s'interrogent parce qu'ils se demandent s'il s'agit bien de conservation, je n'ai pas l'impression que nous faisons acte de leadership éclairé.
    Merci.
    Reste-t-il du temps pour M.~Lunney?
    Malheureusement pas. Il nous reste 17 secondes et si vous pouvez vous en sortir avec si peu...
    Nous allons passer à M. Cuzner.
    Ma question sera brève et 17 secondes suffiront.
    Au début, je crois vous avoir entendu parler de plan de gestion intégrée. Vous avez dit qu'il était sous presse. Ai-je mal compris? Est-ce que WWF-Canada a produit un plan de gestion intégrée pour la région des Grands bancs ou a-t-elle formulé des commentaires à cet égard?

  (1255)  

    Non. Le terme « gestion intégrée » est utilisé à la Direction des océans pour décrire la mobilisation des parties prenantes autour de la planification relative à l'utilisation des océans. La GIEPNE, soit la gestion intégrée des l'est du plateau néo-écossais dont je parlais, est le modèle ou le pilote le plus avancé en la matière. Nous avons aussi participé au projet Baie de plaisance-Grands bancs un. Beaucoup d'éléments interviennent pour produire un plan de gestion intégrée, notamment un tour d'horizon des écosystèmes, et le recensement des zones biologiques et écologiques importantes. Il y a lieu de se demander ce que nous faisons de tout ce savoir et comment nous allons changer notre mode de gestion quand on voit que les choses ont bien fonctionné avec la GIEPNE, mais pas avec le projet Grands bancs un. Il faut replacer tout cela en contexte, d'où la notion de « gestion intégrée » qui fait appel à toutes les parties prenantes. C'est cela dont je voulais parler. Nous reconnaissons donc cette réalité.
    Nous fonctionnons partout de la même façon dans le monde : si cette démarche n'est pas appliquée en un endroit, nous en faisons la promotion. En fait, c'est grâce à la Loi sur les océans et à la Direction des océans que nous sommes parvenu à la gestion intégrée. C'est un modèle auquel WWF adhère et qui nous amène à investir davantage de nos ressources pour faire en sorte qu'il fonctionne. Ce serait triste que le gouvernement décide, un jour, de renoncer à la gestion intégrée.
    Nous voulons nous assurer que celle-ci fait l'objet d'un véritable appui et tout semble d'ailleurs indiquer que le ministre va approuver le plan concernant l'est du plateau néo-écossais. N'oubliez pas que, comme cela concerne l'ensemble du Canada, il est essentiel que ce projet pilote aboutisse et que le ministre l'approuve. C'est cela que nous visons.
    Je tiens à signaler pour mémoire que j'aurais aimé avoir plus de temps pour poursuivre la discussion. Merci beaucoup.
    Je n'en doute pas, monsieur Lunney.
    Avant de passer au dernier intervenant, je vais moi-même vous poser une petite question qui s'apparente davantage à un commentaire.
    Nombre d'entre nous autour de cette table se sont penché sur la question du rétablissement de la morue du Nord et ont recommandé, en comité, que l'on autorise la pêche de subsistance ou la pêche sportive, si vous préférez, dans la Baie de la Trinité de Terre-Neuve. Nous avons pris cette décision en fonction de ce que nous savions de la situation à l'époque. Il semblait, en effet, que nous avions affaire à un stock distinct de celui de la tête et de la queue des Grands bancs. Il y a de bonnes raisons de penser que la morue en question vient sûrement du Banc Hamilton. Il y avait sans doute davantage de morues le long des côtes de ces baies que par les années passées, bien que nous n'ayons pas vu de morue ailleurs.
    Je respecte donc ce que vous dites, mais je rappelle au comité que nous avions formulé cette recommandation en partant du principe qu'il existait un écart énorme entre la science et les pêcheurs. Comme nous voulions gagner l'adhésion des gens, et le ministre s'est rallié à nos arguments en acceptant notre recommandation, nous sommes parti du principe qu'en l'absence d'une aggravation de la dégradation des stocks, cette petite pêche serait durable.
    Ce que noue disons, c'est qu'il s'agit d'un enchaînement de décisions qui nous ont amenés à la situation actuelle. Pourquoi n'avions-nous pas de plan?
    L'autre chose dont il faut se souvenir à propos de cette décision — et je lance cette invitation au comité — c'est qu'il avait été publiquement annoncé que les résultats de cette pêche commerciale et de cette pêche sportive seraient publiés à l'automne de cette année —
    Tout à fait.
    Nous avions alors hâte de voir cette analyse...
    Tout comme nous.
    ...et le mois de décembre est déjà bien entamé.
    Oui.
    Monsieur Cuzner, pour une dernière question.
    Pour en revenir à la question des sciences, sachez que j'ai apprécié ce que vous avez dit à ce sujet. Vous pensez que l'information existe. Les scientifiques du MPO disent que nous devons changer notre façon d'appréhender les choses, mais ce que vous préconisez représente un véritable changement de paradigme dans la façon de gérer nos océans.
    Connaissez-vous une situation à citer en exemple le long de nos côtes? Y a-t-il quelqu'un, quelque part, qui fait ce qu'il faut et qui applique la gestion axée sur les écosystèmes pour sa pêche?
    Il existe deux bons exemples. Je les ai brièvement mentionnés et il en est question dans notre rapport sur la gestion axée sur les écosystèmes. C'est le rapport que nous avions commandé à Andrew Rosenberg, expert dans le domaine des pêches de renommée internationale. Nous lui avons demandé de produire deux rapports, l'un sur les prises secondaires et l'autre sur la gestion axée sur les écosystèmes dans la région de l'OPANO, ce qui n'empêche qu'il a couvert beaucoup plus que cela. Je recommande deux modèles dans le cas du Canada, et les scientifiques les connaissent parce qu'ils participent aux réunions. Le premier est en vigueur dans l'océan Arctique; c'est en fait un OPANO de type AGPR — mais il est en haut de l'échelle de nos AGPR —, soit la Convention pour la conservation de la flore et de la faune marines ou CCFFM. Le deuxième concerne la partie alaskienne du Pacifique Nord. Ces modèles permettront d'accomplir beaucoup sur le plan de la gestion axée sur les écosystèmes et ils seront économiquement rentables pour les pêcheurs.
    Vous me rappelez un autre point important. Je n'ai pas dit grand chose de l'industrie ni des bonnes nouvelles dont elle est porteuse. Tout cela tient en fait à la façon dont nous travaillons. Nous aimons dire que nous passons de l'échelle locale à l'échelle planétaire, autrement dit que nous commençons par agir près de nous pour exercer ensuite notre influence à l'échelle planétaire.
    Nous avons conclu des partenariats avec un certain nombre d'industries de la pêche et nous avons constaté — j'en ai parlé aux gens de Terre-Neuve — que beaucoup de riverains au Canada prennent les choses en main. C'est une bonne nouvelle qu'il conviendrait de faire savoir. Vous êtes sans doute au courant de la situation d'Eastport, par exemple, où l'on a fermé la pêche au homard, mais il y a bien d'autres initiatives intéressantes.
    Nous pourrons donc atteindre nos objectifs en partie grâce à la science des écosystèmes, en comprenant les écosystèmes et en changeant de paradigme, comme vous le disiez, mais nous devons aussi encourager les initiatives locales et la prise en main de l'intendance de l'environnement par les pêcheurs qui se préoccupent de ce qui se passe sur le pas de leur porte, pour ainsi dire.

  (1300)  

    Merci beaucoup, monsieur Rangeley. Cette discussion a été intéressante. Nous apprécions que vous vous êtes déplacé et je suis certain que quelques députés auraient eu d'autres questions à vous poser. Ils devront attendre que vous reveniez nous voir.
    Vous avez mentionné deux rapports dont un au moins que nous n'avons pas. Nous apprécierions beaucoup que vous le fassiez parvenir à la greffière, parce que nous pourrions le remettre aux membres du comité.
    Merci beaucoup.
    Merci
    La séance est levée.