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SPER Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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SUB-COMMITTEE ON THE STATUS OF PERSONS WITH DISABILITIES OF THE STANDING COMMITTEE ON HUMAN RESOURCES DEVELOPMENT AND THE STATUS OF PERSONS WITH DISABILITES

SOUS-COMITÉ SUR LA CONDITION DES PERSONNES HANDICAPÉES DU COMITÉ PERMANENT DU DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES ET DE LA CONDITION DES PERSONNES HANDICAPÉES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 16 mai 2000

• 1534

[Traduction]

La présidente (Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.)): La séance est ouverte. C'est avec plaisir que nous accueillons aujourd'hui la présidente de la Commission canadienne des droits de la personne, Mme Falardeau-Ramsay. Nous avions espéré pouvoir la recevoir l'année dernière, et nous sommes donc ravis d'y être enfin parvenus. Comme vous le savez, nous nous intéressons particulièrement à votre expérience relativement aux personnes handicapées du Canada, et nous sommes impatients... Oh, madame est venue aussi. C'est très bien.

Merci et bienvenue

• 1535

Mme Michelle Falardeau-Ramsay (présidente, Commission canadienne des droits de la personne): Merci beaucoup, madame la présidente.

Permettez-moi de vous présenter tout d'abord mes collègues. M. Michael Small est le directeur des politiques à la Commission des droits de la personne; et M. Michel Paré est le directeur adjoint, Normes et autres voies de recours.

Je vous remercie, madame la présidente et membres du comité, de m'avoir invitée à me joindre à vous aujourd'hui. Je suis heureuse d'avoir l'occasion de vous parler des problèmes que connaissent les personnes handicapées qui, comme vous le savez, continuent d'affronter de sérieux obstacles dans les domaines de l'emploi et de l'accessibilité.

[Français]

Le rapport annuel 1999, que la Commission canadienne des droits de la personne a présenté au Parlement, mentionne que, comme par les années précédentes, la discrimination fondée sur la déficience a été le principal motif des plaintes déposées à la commission.

Au cours de l'année, nous avons examiné 604 plaintes liées à la déficience. Nous en avons réglé 73 par voie de médiation ou de conciliation ou, encore, en cours d'enquête. Nous en avons rejeté 70 pour insuffisance de preuve, nommé un conciliateur dans 102 cas et renvoyé 11 affaires au Tribunal canadien des droits de la personne.

[Traduction]

Le rapport sur l'équité en matière d'emploi que la Commission a présenté au Parlement en 1999 fait également remarquer les résultats pitoyables obtenus par les employeurs sous réglementation fédérale des secteurs public et privé dans le domaine du recrutement et du maintien en fonction des personnes handicapées. De toute évidence, il reste encore beaucoup à faire pour que ces personnes aient une part équitable de tout ce que le Canada a à offrir sur le plan des occasions d'emploi et de l'accessibilité des services, et que beaucoup d'entre nous tiennent pour acquis.

Je crois, cependant, que de récentes décisions de la Cour suprême du Canada ont apporté d'importants changements positifs à l'interprétation de la législation sur les droits de la personne. Deux de ces décisions précisent la responsabilité qu'ont les employeurs et les fournisseurs de service de veiller à la suppression de tous les obstacles à la participation des personnes que cette législation doit protéger, aux stades de la conception et de la mise en oeuvre de l'ensemble des politiques, pratiques, normes et services.

[Français]

La décision Meiorin, rendue en septembre 1999, a infirmé la décision de renvoyer une femme pompier qui s'était toujours bien acquittée de ses fonctions, mais qui n'avait pas été en mesure de satisfaire aux nouvelles normes minimales de condition physique imposées.

La cour a établi un critère à trois volets permettant de déterminer si une exigence professionnelle justifiée invoquée par l'employeur est acceptable. Ce critère a joué un rôle de premier plan dans la décision rendue par la cour dans l'affaire Grismer.

En effet, la cour a rejeté la décision du gouvernement de Colombie-Britannique de refuser d'accorder un permis de conduire aux personnes ayant un certain type de déficience de la vue. D'autres pays leur permettent d'obtenir leur permis si elles peuvent démontrer leur capacité de conduire d'une manière sûre au cours d'une épreuve au volant.

Les décisions Meiorin et Grismer obligent les employeurs et les fournisseurs de services sous réglementation fédérale à veiller à ce que les normes favorisent une égalité réelle par l'adoption de mesures d'adaptation systémiques au lieu de mesures d'exception destinées à assurer l'égalité, mais de façon ponctuelle seulement.

La commission élabore actuellement du matériel de sensibilisation et distribue des avis aux employeurs et aux fournisseurs de services pour faire connaître ses décisions, et surtout leurs répercussions, et en favoriser ainsi le respect.

[Traduction]

Tout récemment, dans l'arrêt Mercier rendu le 3 mai, madame le juge Claire L'Heureux-Dubé de la Cour suprême du Canada a fourni des indications claires sur l'interprétation à donner au mot «handicap». Une définition étanche et sans souplesse ne convient pas. Le handicap ou la déficience s'applique non seulement à un état réel, mais aussi à la perception d'un tel état ou d'une déficience future. Le plaignant n'a pas à faire la preuve d'une limitation fonctionnelle ou d'une anomalie physique ou mentale puisque la loi vise non pas les effets de la déficience, mais la discrimination fondée sur celle-ci.

• 1540

La cour a ensuite exposé des critères d'interprétation, qui obligent à «tenir compte non seulement de la condition biomédicale de l'individu, mais aussi des circonstances dans lesquelles une distinction est faite», selon le contexte sociopolitique de la déficience. Dans cet arrêt qui fait jurisprudence, la cour a fait part de son intention de «mettre un terme au phénomène social du handicap».

[Français]

La décision rendue par la Cour suprême du Canada en octobre 1997 dans l'affaire Eldridge nous rappelle qu'il ne suffit pas aux fournisseurs de services d'assurer les mêmes services à tous leurs clients. La cour avait alors statué que le refus du gouvernement de la Colombie-Britannique d'accorder les services d'interprètes gestuels aux personnes sourdes qui reçoivent des soins médicaux portait atteinte à leur droit à un traitement équitable en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés.

Le gouvernement ne doit pas se limiter à accorder les mêmes services à tous. Il doit, en fait, veiller à ce que les groupes défavorisés retirent des services les mêmes avantages que les autres membres du public.

[Traduction]

Je vois que cela vous pose des problèmes.

[Français]

Une voix: Oui, on a des problèmes.

[Traduction]

Mme Michelle Falardeau-Ramsay: D'accord, alors je vais poursuivre.

[Français]

Je vais continuer de toute façon. Je parlais donc de la décision Eldridge.

[Traduction]

Une étude financée par Santé Canada et réalisée sous la direction du Dr Jamie MacDougall a révélé les changements qui ont résulté de la décision Eldridge. Dans la plupart des provinces et des territoires, des mesures ont été prises en vue de mettre en place des systèmes permettant d'appliquer la décision. Malheureusement, le rapport ne précise pas si les nouveaux systèmes ont apporté des améliorations concrètes à la prestation des services.

Le rapport met en lumière divers problèmes qui préoccupent particulièrement la Commission, notamment les difficultés d'accès aux services de santé offerts aux personnes sourdes ayant des problèmes mentaux, aux personnes sourdes vivant au Nunavut et dans les Territoires du Nord-Ouest ainsi qu'aux Autochtones sourds partout au Canada. En fait, deux ans et demi après la publication de la décision Eldridge, les gens qui ont besoin des services d'interprètes gestuels compétents et expérimentés pour obtenir des soins de santé n'ont pas encore accès à ces services, surtout dans les régions rurales et isolées.

Même si les responsables se sont engagés à régler ce problème, les organisations représentant les personnes sourdes ont signalé à la Commission que la situation avait peu changé en réalité. Nous exhortons le comité à étudier les recommandations du Dr MacDougall et à exercer des pressions pour obtenir une réponse rapide à celles-ci du ministre de la Santé et des ses homologues des provinces et des territoires.

[Français]

Bien que ces décisions représentent des développements importants pour l'intégration des personnes handicapées, il n'en reste pas moins que ces dernières sont encore loin d'avoir atteint l'égalité.

• 1545

Le programme d'action fédéral concernant les personnes handicapées ne pourra être efficace sans l'apport des ressources et des outils nécessaires à sa mise en application.

Avant de passer aux questions, je voudrais aborder un dernier point. Il s'agit de la révision de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Comme vous le savez, nous nous attendons à recevoir le rapport du panel de révision le mois prochain. La commission souhaite assumer un rôle plus actif dans la suppression des obstacles systémiques que les personnes handicapées doivent affronter.

Nous avons donc proposé que notre mandat soit modifié de façon à nous permettre d'entreprendre des vérifications chez les fournisseurs de services, comme nous le faisons en vertu de la Loi sur l'équité en matière d'emploi pour les employeurs. Nous serions alors en mesure d'identifier clairement les obstacles rencontrés par les personnes handicapées et d'aider les employeurs et les fournisseurs de services à les éliminer.

Je serai maintenant heureuse de répondre à vos questions et à vos commentaires, de même que mes collègues. Merci.

La présidente: Merci.

[Traduction]

Monsieur Elley.

M. Reed Elley (Nanaimo—Cowichan, Alliance canadienne): Merci, madame la présidente. Je ne suis pas un membre régulier de ce sous- comité, mais c'est un plaisir pour moi de remplacer mon collègue, M. Vellacott, aujourd'hui.

Je suis ici non seulement pour l'aider, mais aussi parce que je suis le père d'une enfant très handicapée qui est confinée à un fauteuil roulant. Sur une certaine période, nous nous sommes occupés, dans notre famille, de plusieurs enfants qui avaient un handicap ou un autre.

Tandis que ma fille, qui a maintenant neuf ans, grandit et commence à prendre sa place dans un monde qui n'est pas toujours très réceptif à l'égard des personnes handicapées, il est important pour moi de comprendre ce à quoi elle peut s'attendre de ce monde, ce que nous, les Canadiens, faisons pour protéger les personnes handicapées contre une petite partie de notre société qui ne les traite pas très bien. J'ai donc un intérêt direct pour le sujet; je ne suis pas seulement ici pour remplacer quelqu'un, comme vous pouvez le voir.

J'ai été intéressé par ce que vous disiez au début de vos observations, comme quoi vous avez examiné 604 plaintes liées à la déficience l'année dernière, et que ça a été le principal motif des plaintes déposées à la Commission des droits de la personne. Je trouve cela très troublant.

Ma première question est donc pourquoi, dans une société qui semble si tolérante, qui tire orgueil de sa tolérance, pourquoi le principal motif des plaintes que traite la Commission se rapporte- t-il aux personnes handicapées? Y a-t-il une réponse à cela?

Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Je conviens avec vous que c'est très troublant. Cela fait des années que c'est ainsi. Aussi loin que je puisse me rappeler—je suis à la Commission depuis 1988, et alors j'occupais un autre poste—ça a toujours été le principal motif des plaintes que nous recevons. Près de un tiers des plaintes que traite la Commission sont fondées sur l'incapacité.

Pourquoi? Je dévoilerai mon âge en vous disant cela, mais c'est la question à 64 000 $. Bien que nous vivions dans une société très tolérante à de nombreux égards, de bien d'autres façons, nous n'acceptons pas les personnes qui ont des déficiences et des handicaps. Nous le constatons d'après le genre de cas que nous devons traiter.

Par exemple, nous avons eu une plainte sur l'accessibilité au bureau de vote d'Élections Canada. Nous recevions et nous recevons encore des plaintes sur l'accessibilité aux boîtes postales des bureaux de poste. C'est étonnant, parce qu'on pourrait comprendre si je parlais seulement d'accessibilité à de vieux immeubles, dont le réaménagement, pour qu'ils soient accessibles, pourrait être problématique, mais lorsqu'il s'agit de nouvelles installations, c'est très difficile à comprendre.

• 1550

M. Reed Elley: Madame, diriez-vous que les plaintes que vous recevez relativement aux personnes handicapées concernent plus souvent des ordres de gouvernement et leurs services, plutôt que des individus qui manquent de respect à des personnes handicapées?

Mme Michelle Falardeau-Ramsay: C'est une question difficile, parce que nous ne tenons pas de statistiques à ce sujet. Mais je dirais que ce sont la plupart du temps des problèmes d'aménagement du milieu de travail, et les cas sont répartis assez également entre les secteurs privé et public.

Je vais demander à monsieur Paré s'il a quelque chose à ajouter, parce que la question relève de son domaine.

M. Michel Paré (directeur, Normes et modes substitutifs de règlement des différends, Commission canadienne des droits de la personne): Je pense que madame a bien répondu. Environ 80 à 85 p. 100 des plaintes que reçoit la Commission se rapportent à l'emploi, et c'est la même proportion pour les plaintes fondées sur les handicaps. La plupart des plaintes sont liées à l'emploi, et le plus souvent à l'aménagement des lieux de travail.

M. Reed Elley: Mais je vous demande si, peut-être, ces cas sont répartis assez également entre les secteurs privé et public?

M. Michel Paré: Oui, c'est cela.

M. Reed Elley: Est-ce qu'il me reste encore un peu de temps?

Le président: Oui, bien sûr.

M. Reed Elley: Est-ce que cela signifie en fait que le cadre législatif qui régit ce genre de situations n'a pas suivi l'évolution des sentiments des Canadiens à l'égard des personnes handicapées? Y a-t-il un écart?

Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Je pense que si vous observez les événements survenus récemment à la Cour suprême du Canada, vous verrez les premiers signes d'une amélioration relativement à la manière dont les employeurs et les fournisseurs de services devraient envisager les mesures d'adaptation. C'est pourquoi j'ai parlé de ces décisions dans ma déclaration préliminaire. Je crois qu'avec les arrêts Meiorin, Grismer et Mercier, les employeurs et les fournisseurs de services commenceront à comprendre le sens réel de ce que sont des mesures d'adaptation.

Ce qui est tellement intéressant dans ces arrêts est qu'ils ne touchent pas seulement au facteur individuel, mais aussi au facteur systémique. Ils indiquent aux employeurs que lorsqu'ils définissent une norme, ils doivent veiller à répondre aux besoins d'autant de gens que possible dès le départ, plutôt que de ne voir dans l'adaptation du milieu qu'une préoccupation secondaire.

Dans son jargon juridique, le tribunal a cerné quels types de questions devraient être posées dans un tel cas. Les employeurs devraient se demander si la norme qu'ils établissent est nécessaire, si elle est raisonnablement liée au travail qui doit être fait et si elle est établie de bonne foi. Ils devraient ensuite se demander s'il y a d'autres moyens de parvenir au même résultat, en tenant compte du handicap. Je paraphrase le tribunal, mais cela veut dire en gros qu'il faut se pencher sur la question dès le départ plutôt qu'en bout de ligne.

• 1555

Donc, ce que nous faisons maintenant—en fait, nous sommes en train de le faire—c'est que nous traduisons toutes ces nouvelles règles en un langage facile à comprendre et nous donnons des ateliers, d'abord à nos employés et à nos commissaires, bien entendu, mais ensuite aux employeurs, aux fournisseurs de services et aux gens qui s'intéressent à la question pour qu'ils puissent comprendre de quoi il retourne avec ces nouvelles règles. Ce sera utile, sans le moindre doute. C'est le plus gros changement que j'aie vu, je pense, depuis une vingtaine d'années. La loi devient plus consciente de ce que signifient les mesures d'adaptation, mais aussi de la nécessité de prendre ces mesures avant le fait, si on veut.

M. Reed Elley: Je vois.

Mme Michelle Falardeau-Ramsay: En même temps, il faut beaucoup sensibiliser et renseigner. Par exemple, la semaine dernière, à Banff, a eu lieu un congrès de tous les organismes des droits de la personne de compétence provinciale, fédérale et territoriale du Canada, et ils ont assisté à un atelier, qu'animait Michael, d'ailleurs, sur la portée de ces décisions du tribunal. Il est très important que les organismes de défense des droits de la personne y soient sensibilisés.

Nous prendrons toutes les mesures d'information et de sensibilisation possibles avec les ressources qui sont à notre disposition.

Je m'excuse. C'était une longue réponse à votre question.

M. Reed Elley: Merci beaucoup.

La présidente: Madame.

[Français]

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Bonjour, madame Falardeau.

Il me fait plaisir de saluer la présence de mon collègue du Parti réformiste. Avant de vous poser mes questions, j'aimerais faire un commentaire.

Mon voisin de droite a demandé comment il se faisait que la majorité des plaintes venaient des personnes handicapées. Cet après-midi, ici, vous avez presque la raison. On n'est pas très préoccupé par les personnes handicapées.

Je regrette qu'il n'y ait que trois députés et personne du côté ministériel, sauf la présidente, qui est très fidèle. Même si je comprends que tout le monde est très occupé sur la Colline et qu'il y a beaucoup de comités qui siègent le mercredi, je ne peux m'empêcher de regretter ce qu'on voit depuis les années que ce comité siège. Il y a effectivement une évidence de non-intérêt. C'est un peu comme si, pour bien paraître, il faut dire que c'est important. Mais on cherche les gestes.

J'ai trois questions à vous poser. La première a trait à votre présentation. À la fin de celle-ci, vous dites que le programme d'action fédéral concernant les personnes handicapées ne pourra être efficace sans l'apport des ressources et des outils nécessaires à sa mise en application.

Dans le dernier rapport du sous-comité qui s'occupait des personnes aux prises avec un handicap, on a demandé qu'il y ait la mise sur pied d'un secrétariat d'État. On voit très clairement qu'il y a beaucoup de bonnes intentions qui émanent des différents ministères, mais que, dans les faits, comme il n'y a pas de coordination avec un certain pouvoir, il n'y a à peu près rien qui se fait ou les choses se font un peu à la miette, ce qui ne donne aucun résultat.

J'aimerais vous entendre, madame Falardeau, sur votre vision d'un secrétariat d'État bien organisé et conscient de la réalité des personnes handicapées, du nombre sans cesse croissant de ces personnes et de la responsabilité qu'on a, en tant qu'État civilisé, de répondre à leurs besoins essentiels. Voilà pour ma première question.

• 1600

Ma deuxième question est un peu plus pointue.

Vous avez fait allusion à un récent jugement de la Cour suprême qui visait particulièrement les personnes malentendantes. Croyez-vous qu'un recours à la Commission des droits de la personne, pour ce qui touche particulièrement l'utilisation du langage des signes dans les émissions télévisées, serait une voie pour qu'on puisse être entendu et qu'il y ait un suivi?

On sait qu'au niveau de la télévision anglophone, le bassin de population est plus important. Dans presque 90 p. 100 des émissions, le langage des signes est utilisé. Ce n'est pas le cas pour la télévision francophone, eu égard, bien sûr, au nombre moins important.

Est-ce une bonne raison de décider une telle chose? Est-ce que ça fait partie des contraintes excessives qui justifient que ça n'existe qu'à 35 ou 40 p. 100? Est-ce une raison suffisante pour décider de ne pas rendre ce service?

Il y a 50 ans, la télévision n'existait pas comme instrument de transmission d'information, de communication et d'éducation. On parle des besoins en matière de santé des personnes handicapées et notamment, dans le dernier arrêt, des personnes sourdes et malentendantes. Je pense que le droit à l'information juste, à jour et en même temps que tout le monde est aussi un droit fondamental.

Vous pourrez probablement répondre à cette question rapidement.

J'aurai une dernière question, s'il me reste du temps.

[Traduction]

La présidente: Nous serons appelés à voter, probablement vers 16 h 25. Est-ce bien cela?

Une voix: À 16 h 20.

La présidente: Mais c'est à propos de l'attribution du temps, donc ce ne sera pas très long. Nous devrons néanmoins aller voter, puis revenir.

Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Oui, nous devrons y aller. D'accord.

[Français]

Ma dernière question porte sur le projet de loi S-5, qui a cerné davantage les mesures pour les personnes handicapées. Cette loi existe depuis deux ans. Quelle est votre évaluation de l'impact de cette loi? Généralement, quand le Parlement s'avise de voter des lois, il prétend toujours que c'est pour améliorer les choses.

J'aimerais avoir votre opinion sur la réalité de S-5, sur la situation actuelle comparée à la situation antérieure à S-5.

Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Je vais commencer par la fin.

Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Tel était mon objectif en vous posant les trois questions.

Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Je vais essayer d'être le plus concise possible parce que je sais qu'il y a des contraintes de temps.

Quant à l'évaluation de l'impact de S-5, c'est intéressant parce que, d'après moi, les dernières causes de la Cour suprême viennent établir ce que S-5 veut dire exactement. Je pense que c'est très positif et que cela va vraiment nous aider à accomplir quelque chose dans le domaine de l'adaptation pour les personnes ayant des déficiences.

Pour ce qui est de la deuxième question, je pense qu'une plainte à la commission concernant la télévision française aurait certainement un impact. Nous avons reçu dans le passé des plaintes concernant les canaux anglais de télévision et, effectivement, ces institutions ou ces organismes ont été obligés d'augmenter la quantité de sous-titrages qui, d'après moi, devrait être très près de 100 p. 100, à au moins 99,9 p. 100.

La notion de contrainte excessive a été redéfinie par la Cour suprême. Il est très difficile pour un organisme qui fait des profits mirobolants—je parle surtout des compagnies privées—et qui, en plus, a des commanditaires qui paient une partie du sous-titrage de prétendre que le coût est tel qu'il représente une contrainte excessive. Il y a des limites parce que cela ne représente pas des montants énormes.

• 1605

Un cas a récemment été soumis à la commission. Il me semble qu'on parlait d'environ 150 000 $ ou 75 000 $ pour une émission. Surtout pour des émissions d'information publique, je pense que c'est important que ce soit fait.

Donc, il serait bon que des plaintes soient faites par rapport au réseau français.

En ce qui a trait à votre première question concernant la formation d'un secrétariat d'État permanent, actuellement, c'est le Bureau de la condition des personnes handicapées qui s'occupe du secrétariat du programme fédéral. S'il y avait un secrétariat d'État qui se consacrait entièrement aux personnes qui ont des déficiences, ce serait de beaucoup préférable.

Dans le moment, il existe un programme fédéral pour les personnes handicapées dirigé par un comité directeur de sous-ministres adjoints. Ce comité directeur, qui a plusieurs sous-comités, est évidemment rempli de bonnes intentions, comme vous le disiez, et veut accomplir quelque chose. Toutefois, on n'a pas donné de ressources spécifiques à ce comité directeur ou aux sous-comités.

On demande à ces sous-ministres adjoints, qui viennent des différents ministères, de prendre à même le budget de leurs programmes spécifiques l'argent pour financer les activités des sous-comités.

D'après ce que je peux voir—et je vais demander à mon collègue qui a suivi de beaucoup plus près que moi les séances de ces sous-comités et du comité directeur—, très peu de ministères, sinon aucun, se sont montrés très enthousiastes à cette idée-là. D'après moi, c'est un des problèmes majeurs: si vous n'avez pas l'argent, les choses se font difficilement.

[Traduction]

Auriez-vous quelque chose à ajouter, Michael?

M. Michael Small (directeur adjoint, Direction des politiques et de la planification, Commission canadienne des droits de la personne): Oui, madame.

Comme l'a dit notre présidente, j'ai suivi de près les travaux du comité directeur, qui se préoccupe des progrès de la question des personnes handicapées dans le plan d'action du gouvernement fédéral. Il est certainement très encourageant pour la Commission de voir les sujets à l'ordre du jour du plan d'action sur l'invalidité. Il s'y trouve des initiatives extrêmement positives et prospectives.

Cependant, comme l'a dit la présidente, l'enthousiasme et la détermination que démontrent les diverses parties à l'oeuvre et les groupes qui ont été mis sur pied pour faire les travaux de base pour ce comité sont mis à rude épreuve parce qu'aucune ressource ne lui a été spécifiquement assignée pour la réalisation du mandat qu'il a reçu.

Cela ne veut pas dire que tout est perdu. Les divers comités font tout en leur pouvoir, et certains des groupes de travail ont déjà obtenu d'excellents résultats. Il convient d'ailleurs, à ce propos, de mentionner le rapport qu'a déposé le groupe de travail interministériel mixte du Conseil du Trésor et du Conseil national de recherches sur l'intégration des employés handicapés par l'entremise des technologies de l'information et des communications, qui a été livré au Conseil du Trésor il y a quelques semaines seulement et qui proposait quelques stratégies en vue de rendre la technologie des communications, au gouvernement fédéral, accessible à tous les employés potentiels. Cela devrait avoir d'importantes répercussions sur les taux d'employabilité et de participation des employés handicapés.

• 1610

Le problème restera cependant toujours de savoir si les ressources nécessaires seront attribuées à la mise en oeuvre des recommandations de ces comités et de ces groupes de travail. Les idées sont excellentes. La Commission estime, et nos personnes- ressources dans la collectivité des personnes handicapées semblent en convenir, que de nombreux éléments du plan d'action présentent un potentiel énorme. Cependant la réalisation de ce potentiel dépend de la disponibilité des ressources et de l'engagement des ministères.

Puis-je ajouter un commentaire sur le sous-titrage à la télévision? Si j'ai bien compris, le CRTC, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, dans l'examen qu'il a fait des règlements en 1999, a bien dit que les programmes diffusés en français devront désormais avoir le même volume de sous-titrage que les programmes diffusés en anglais. La Commission, comme l'a indiqué la présidente, accueille favorablement cette décision mais précise néanmoins que les volumes de sous-titrage qui avaient été prescrits en 1995 reflètent la technologie qui existait en 1995. Je pense que nous pourrions nous rapprocher beaucoup plus du volume de 100 p. 100 de sous-titrage des émissions.

La présidente: Voulez-vous poser une question ou préférez-vous attendre?

Mme Wendy Lill (Darmouth, NPD): Quand devons-nous revenir?

La présidente: Aussitôt que nous aurons voté. J'espère que cela ne durera qu'une dizaine de minutes. C'est maintenant la double sonnerie qui retentit, et le vote doit avoir lieu à 16 h 20, je crois.

Mme Wendy Lill: Alors nous devrions y aller tout de suite.

La présidente: Voulez-vous y aller maintenant et réserver votre question?

Mme Wendy Lill: Oui, bien sûr.

La présidente: Entre temps, peut-être pourriez-vous réfléchir, à propos des vérifications à venir, à certaines des choses dont nous avons parlé au sujet du sous-titrage la dernière fois. Nous nous demandions pourquoi les messages de sécurité, sur les aéronefs, ne sont pas affichés visiblement plutôt qu'en sous- titres. Bien des témoins ont dit que c'est facultatif... Cela pourrait aider quelqu'un dont la langue maternelle n'est pas l'anglais à comprendre le message, s'il le voit écrit. Donc si le comité dit que vous pouvez procéder à des vérifications, est-ce que vous pourriez le recommander?

[Note de la rédaction: Inaudible]

Mme Michelle Falardeau-Ramsay: ...

Des voix: Oh, oh!

La présidente: Nous serons de retour aussitôt que possible.

Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Nous vous attendrons en toute quiétude.

La présidente: Servez-vous donc une tasse de thé.

• 1613




• 1645

La présidente: À l'ordre, je vous prie. Wendy Lill doit partir à 17 heures, alors nous lui céderons les 15...

Mme Wendy Lill: Ce n'est pas absolument nécessaire. Vous me mettez sur la sellette. Les questions que j'ai à poser pourraient ne pas prendre les 15 minutes.

La présidente: Mais c'est le temps alloué aux questions et aux réponses.

Mme Wendy Lill: D'accord.

Et bien, je vous remercie d'être venus. Je suis seulement un peu frustrée qu'à chaque réunion importante—et ceci en est une—nous devions être interrompus par des appels au vote, avec tout le monde qui se presse dans un sens ou dans l'autre. Cela doit être frustrant pour vous aussi, parce que c'est un comité important et vous êtes des intervenants importants. Ces choses arrivent constamment.

Lors de la dernière réunion, plusieurs témoins nous ont parlé des répercussions de la décision rendue dans l'affaire Eldridge. Les nouvelles ne sont pas toutes bonnes, comme vous le savez, même s'il y a eu des progrès. Il y a eu beaucoup de... Henry Vlug, qui est sourd, juge les progrès plutôt décourageants, tout comme David Baker, du CDPH.

Vous dites dans votre exposé que l'affaire Eldridge nous rappelle qu'il ne suffit pas aux fournisseurs de services d'assurer les mêmes services à tous leurs clients. Nous devons en fait veiller à ce que les groupes défavorisés tirent des services les mêmes avantages que les autres membres du public, ce qui veut dire que nous devons souvent, aux fins d'équité, fournir des services additionnels. C'est ce qu'on entend, je suppose, par l'obligation d'accommodement.

Cela dit, il y a de très, très nombreux exemples—et j'en ai également discuté à la dernière réunion—où des gens attendent des années avant de pouvoir s'adresser à la Cour suprême et obtenir une décision sur une question touchant les droits de la personne ou la Charte, comme dans le cas Eldridge. On coupe de plus en plus dans les programmes d'éducation pour les enfants ayant des besoins spéciaux, de sorte que de très nombreux parents se demandent maintenant, quel choix s'offre à nous? Devons-nous nous adresser à la Cour suprême? Invoquer la Charte? Faire appel à la Commission des droits de la personne?

Les familles et les personnes handicapées considèrent la Cour suprême du Canada et la Commission des droits de la personne comme des sauveurs tout-puissants. Elles se disent: «Je vais m'adresser à la Commission des droits de la personne.» Nous avons donc la Commission canadienne des droits de la personne, que vous représentez, et la Loi sur les droits de la personne, qui fait l'objet d'un examen. Nous savons qu'elle n'est pas parfaite, et nous espérons l'améliorer. Mais que disons-nous aux parents qui se demandent ce qu'ils vont faire dans trois mois, quand leurs enfants vont retourner à l'école et qu'ils ne bénéficieront d'aucun service? Les règles du jeu ne sont pas équitables. Ils ne disposent pas de services additionnels qui permettent à leurs enfants de bénéficier de l'égalité d'accès à l'enseignement, et c'est ce que vous dites dans votre texte.

J'aimerais avoir votre opinion là-dessus.

Mme Michelle Falardeau-Ramsay: La question est difficile, et la réponse, encore plus.

D'abord, vous avez raison de dire que la situation est très, très complexe. Les parents peuvent s'adresser—et vous avez parlé d'éducation—aux commissions provinciales des droits de la personne. On pourrait aussi envisager d'étendre le programme de contestation judiciaire à ce type d'affaire, ce qui permettrait aux parents, grâce à cette source de financement, de s'adresser à la Cour suprême.

Je pense également, du moins en ce qui concerne le gouvernement fédéral, que si la loi prévoyait certaines normes d'accessibilité, il serait possible de vérifier si les employeurs et les fournisseurs de service les respectent ou non.

• 1650

Nous étions en train de discuter de cela avant votre arrivée. Nous parlions, entre autres, de l'accès au Web. C'est quelque chose d'objectif, qu'on peut mesurer et vérifier, et qui pourrait, à mon avis, aider les personnes handicapées—c'est-à-dire les enfants handicapés et leurs parents, mais également les adultes.

Des progrès doivent être réalisés dans ce domaine. J'espère que c'est le genre de recommandation que formulera le comité qui est en train d'examiner la loi.

Mme Wendy Lill: Le problème, c'est que nous avons la Loi canadienne sur la santé, et nous sommes nombreux à penser qu'elle est menacée par le projet de loi 11 sur la privatisation, adopté par l'Alberta, mais pas de loi nationale sur l'éducation. Les programmes d'éducation offerts à l'échelle nationale varient beaucoup. Or, ne devrait-on pas établir des normes nationales dans ce domaine?

Ne faudrait-il pas établir des normes nationales de comportement envers les personnes handicapées, tous les groupes qui sont victimes de discrimination? Vous dites qu'ils peuvent s'adresser aux commissions provinciales des droits de la personne. Je peux leur recommander la même chose, mais pourquoi ne puis-je pas leur dire de s'adresser à la Commission des droits de la personne? Pourquoi ne puis-je pas leur dire qu'ils n'auront pas à attendre cinq ou six ans avant que la question se règle?

Mme Michelle Falardeau-Ramsey: À cause de la façon dont la Constitution est libellée. Comme vous le savez, nous avons des compétences à la fois provinciales et fédérales. En ce qui concerne l'éducation, sauf dans des cas très précis qui se font de plus en plus rares... Je pensais à l'enseignement dispensé à l'intérieur des réserves aux Autochtones, aux Premières nations, mais cela ne s'applique plus parce que ce sont maintenant les Premières nations qui sont essentiellement responsables de l'éducation. Cela ne relève pas...

Malheureusement, c'est ce que dit la Constitution, et il en va de même pour la santé. Même si le gouvernement fédéral adopte des normes nationales pour la prestation des services de santé, nous n'exerçons aucun contrôle sur la façon dont ces services sont offerts au public. C'est une question qui relève des provinces.

Nous sommes responsables des services qu'offrent, par exemple, les ministères fédéraux, les sociétés d'État, les employeurs et les fournisseurs de services du secteur privé—par exemple, les banques, Postes Canada, les compagnies aériennes, les radiotélédiffuseurs, des moyens de communication entre deux provinces et, entre autres, du transport du grain et des ports. Ce sont là des domaines qui relèvent de notre compétence. Toutefois, cela ne nous empêche pas de travailler en étroite collaboration avec les commissions provinciales des droits de la personne. Nous collaborons avec elles, surtout dans les domaines de l'information et de l'éducation.

• 1655

Mme Wendy Lill: David Baker, qui a comparu devant nous, a parlé de la Commission des droits de la personne et a dit, comme vous l'avez vous-même indiqué, que la Commission n'a pas fait preuve de leadership au sujet des problèmes systémique, et qu'elle a été trop occupée à régler des problèmes cas par cas.

Il a ajouté, et je cite:

    Dans une large mesure, c'est en raison du manque de ressources dont dispose la Commission, laquelle constitue le mécanisme que le Canada possède pour supprimer les obstacles.

Nous avons la Commission des droits de la personne. Nous avons des lois. Nous avons l'arrêt Eldridge, rendu par la Cour suprême. Et Marcia Rioux, de CACL, a déclaré qu'on ne s'entend toujours pas sur la question des contraintes excessives. Quel est exactement... L'obligation d'accommodement existe, mais seulement s'il n'y a pas de contraintes excessives. On ne s'entend toujours pas sur ce point.

Est-ce que la Commission des droits de la personne est en mesure de bien protéger mes droits, ceux de mes enfants et des citoyens que je représente?

Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Comme vous l'avez dit, nous essayons de faire de notre mieux avec les ressources que nous avons. Voilà pourquoi on a créé ce comité d'examen, parce que les choses ont beaucoup changé au cours des 20 dernières années.

Il y a 20 ans, nous nous occupions surtout de plaintes individuelles. Aujourd'hui, les problèmes sont de nature systémique. La Commission a été mise sur pied dans le but d'examiner les plaintes individuelles, et nous essayons progressivement de trouver des solutions aux problèmes de discrimination systémique, sauf que nous devons avoir le pouvoir légal de le faire. Vous pouvez étendre ce pouvoir, mais jusqu'à un certain point. Il faut tenir compte de ce que la loi vous autorise à faire.

Il y a un autre point que je juge important... À l'heure actuelle, nous essayons de collaborer le plus possible à ce chapitre avec d'autres organismes, comme l'Office national des transports et le CRTC, sauf que nous n'avons pas les moyens de nous pencher, comme ils sont en mesure de le faire, sur les problèmes de discrimination systémique. D'ailleurs, nous n'avons pas le pouvoir de nous occuper de tels cas.

Madame Dalphond-Guiral a parlé du sous-titrage. Nous pouvons résoudre les problèmes qui se présentent au cas par cas, sauf que nous faisons affaire ici avec un organisme, ou une division d'un organisme située dans une ville particulière. Mais si nous communiquons avec le CRTC et lui disons, «Vous savez, vous devriez adopter une autre approche, car les choses ont changé», ainsi de suite, il peut très bien répondre, «D'accord, merci de nous l'avoir indiqué», et ne rien faire.

Je pense qu'il est possible d'intégrer ces domaines. Il est important que le CRTC ait son mot à dire pour ce qui est de la radiotélédiffusion, parce qu'il est le spécialiste en la matière, et il en va de même pour l'ONT. Or, on devrait trouver le moyen d'organiser, par exemple—et ce n'est qu'un exemple—des audiences auxquelles nous participerions de concert avec le CRTC, quand il est question de personnes handicapées, ou l'ONT, quand il est question des tarifs payés par les personnes qui accompagnent des handicapés à bord des avions.

• 1700

Cela ne coûterait sans doute pas trop cher puisque, de toute façon, ils le font déjà. En ce qui nous concerne, nous n'avons pas les moyens d'organiser de telles audiences parce qu'elles coûtent trop cher.

Toutefois, nous pourrions peut-être, ensemble, avoir accès à l'expertise qui existe au sein des divers groupes, des diverses ONG, qui s'occupent de ces questions précises, et ensuite analyser la situation sous l'angle des droits de la personne. Ils peuvent l'analyser de leur point de vue, s'ils oeuvrent au sein de l'industrie du transport, sauf qu'ils ne sont pas habitués à l'examiner dans le contexte des droits de la personne. Cela permettrait aux deux parties de mieux saisir le problème.

Enfin, c'est le public qui sortirait grand gagnant de ce processus.

Mme Wendy Lill: Merci beaucoup. Cela nous ramène à ce que vous avez dit plus tôt, à savoir que si la loi fédérale prévoyait des normes d'accessibilité—et nous revenons toujours là-dessus—eh bien, ces normes pourraient être appliquées par tous les ministères et définies dans toutes les lois.

Merci beaucoup.

Mme Michelle Falardeau-Ramsay: C'est moi qui vous remercie.

Mme Wendy Lill: Je dois partir. Encore une fois, je regrette que les choses se passent ainsi, mais je lirai le compte rendu...

La présidente: J'aimerais clarifier un point avant que vous ne partiez. Si on confiait à la Commission un mandat de vérification, est-ce que celui-ci aurait le même poids que les dispositions du projet de loi concernant les Canadiens handicapés? Certains soutiennent que la Charte est déjà complète en soi, contrairement à l'Americans with Disabilities Act, sauf que nous n'avons pas le pouvoir de procéder à des vérifications et de prendre des mesures proactives.

Si le comité de révision propose qu'on fournisse à la Commission les ressources dont elle a besoin pour effectuer des vérifications quand certains cas reviennent trop souvent, et aussi pour prévenir les problèmes futurs, est-ce que le fait d'étendre le programme de contestation judiciaire et d'accroître les ressources consacrées aux vérifications nous permettrait d'atteindre les mêmes objectifs que ceux que visent le projet de loi concernant les Canadiens handicapés? Obtiendriez-vous les mêmes résultats si vous aviez le pouvoir d'assurer le respect de la loi?

Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Je pense que oui, bien que je n'ait pas examiné la question en détail. L'effet serait le même. L'important, c'est que les normes seraient clairement définies dans la loi. C'est sans doute le facteur le plus important—prévenir les contestations judiciaires inutiles, puisqu'elles ne sont qu'une perte de temps, dans une certaine mesure. Il serait utile d'avoir des normes clairement définies. Je pense que...

La présidente: Est-ce que ces normes seraient établies au moment de la révision de la Loi sur les droits de la personne?

Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Oui.

La présidente: Et qu'en est-il des décisions de la Cour suprême? Elle révise les normes tout le temps, de sorte que...

Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Oui. Voilà pourquoi il faut établir des normes souples qui vont vous permettre de vous adapter, par exemple, aux changements technologiques.

Il y a dix ans, on ne parlait pas de l'accès au Web, n'est-ce pas? Les normes, si elles sont trop rigides, peuvent nous empêcher de nous adapter aux changements qui pourraient survenir dans dix ans. Il n'est pas facile de changer la loi. Toutefois, nous pouvons le faire par le biais des règlements, parce qu'il est beaucoup plus facile de modifier les règlements que de modifier la loi. C'est quelque chose que nous pouvons faire, et ce serait là une bonne façon de procéder.

La présidente: Merci.

Monsieur Elley.

• 1705

M. Reed Elley: Merci.

Les notes d'information décrivent les étapes qui sont suivies quand une personne dépose une plainte auprès de la Commission des droits de la personne. Si le dossier est soumis à un tribunal et que ce dernier ordonne à un employeur d'apporter des changements, qui s'occupe de voir à ce que l'ordonnance soit respectée? Qui s'occupe de vérifier que l'employeur apporte les changements exigés?

Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Habituellement, il y a une clause dans la décision du tribunal qui précise que l'affaire continue de relever de la compétence du tribunal jusqu'à l'exécution de l'ordonnance. Le plaignant revient ensuite nous voir pour nous dire qu'aucun changement n'a été apporté. C'est plus ou moins sa responsabilité. C'est ce qui s'est produit dans bien des cas.

Dans d'autres cas, c'est la commission qui assume cette responsabilité. Le tribunal va dire que la Commission doit assurer le suivi du dossier. C'est ce qui est arrivé, par exemple, dans le cas de la décision concernant l'ACNRI. Nous avons reçu, tous les trois mois, des rapports sur les progrès réalisés.

Il était très difficile, jusqu'en 1998, de mettre en oeuvre les décisions du tribunal. Il existe maintenant une disposition qui précise que les décisions du tribunal ont le même poids que celles de la Cour fédérale. Elles ont automatiquement le même poids que les décisions de la Cour fédérale. Il est ainsi plus facile d'assurer l'exécution de la décision qui a été rendue.

En fait, il arrive rarement... Depuis que j'assume la présidence de la Commission, nous avons menacé quelqu'un de poursuites une seule fois seulement.

M. Reed Elley: Ma prochaine question allait porter là-dessus. S'il y avait un problème et que vous étiez obligée d'exercer des pressions sur quelqu'un qui ne respectait pas... Toutefois, vous dites que cela ne se produit pas très souvent.

Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Non.

M. Reed Elley: À votre avis, et compte tenu de la révision dont fait l'objet la Loi sur les droits de la personne, est-ce que la loi donne à la Commission les pouvoirs dont elle a besoin pour faire en sorte que les changements sont apportés?

Ma collègue, Mme Lill, a fait état de la frustration que ressentent les gens qui s'adressent aux tribunaux, à la Commission, à cause de ces longs délais. Ils exigent qu'on apporte des changements, tout va mal dans leur vie et ils sont bouleversés. Ensuite, si, une fois la décision de la Commission rendue, ils sont obligés d'attendre longtemps avant que des changements ne soient apportés, ils vont se sentir encore plus frustrés, probablement en raison de l'hostilité qu'a générée toute cette affaire du fait qu'elle a été portée devant les tribunaux.

J'aimerais avoir votre avis là-dessus. J'ai soulevé plusieurs points, et j'aimerais que vous y répondiez.

Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Les questions que vous posez cet après-midi sont toutes étroitement liées. Le fait est que notre organisme est chargé d'examiner les plaintes individuelles, sauf que les problèmes auxquels nous faisons face maintenant sont systémiques. Or, nous n'avons pas les ressources voulues pour résoudre ces problèmes. C'est aussi simple que cela. Par exemple, si nous pouvions régler la question d'accessibilité dès le départ, les choses seraient plus simples.

• 1710

Par exemple, si on obligeait les employeurs et les fournisseurs de services à respecter des normes d'accessibilité, on créerait alors une obligation et on pourrait, à ce moment-là, prévoir des dispositions dans la loi pour en assurer le respect.

On le fait déjà dans d'autres domaines, par exemple dans celui de l'équité en matière d'emploi. Or, pourquoi ne pas instituer le même genre d'obligation à l'égard des personnes handicapées? On pourrait obliger les employeurs à établir un plan d'action. Vous ne voulez pas les acculer à la faillite, mais vous voulez vous assurer qu'ils prennent les mesures nécessaires. C'est ce que nous avons fait avec...

Par exemple, nous avons reçu, à un moment donné, une plainte concernant Postes Canada. La Société a accepté, dans le cadre des discussions, de faire en sorte que tous ses comptoirs postaux soient accessibles d'ici 10 ans. Elle a établi un plan d'action, même si elle n'était pas légalement tenue de le faire, mais nous lui avons demandé de faire en sorte que les employeurs ou les fournisseurs de services l'acceptent.

Elle a donc établi un plan d'action, et chaque année, elle nous soumet un rapport sur les progrès réalisés au cours de l'année. Nous lui indiquons si nous sommes satisfaits ou non, et lui proposons, par exemple, d'accélérer les travaux au cours de l'année—ce qu'elle fait habituellement—pour que les divers comptoirs postaux qu'elle possède à l'échelle nationale soient accessibles. C'est le genre de démarche qu'il faut entreprendre.

[Français]

Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Il y a sûrement un pourcentage assez important du budget de la commission qui va à la préparation et à la diffusion de l'information. Actuellement, les lois sur les droits de la personne traitent particulièrement du système public qui, par définition, est un système où les groupes de personnes sont mieux organisés.

Autrement dit, ceux qui sont le mieux traités ou qui sont susceptibles d'être le mieux traités ne sont peut-être pas ceux qui en ont le plus besoin. Ils ne sont pas en haut de la liste de ceux qui en ont le plus besoin.

Dans votre programme d'éducation, avez-vous ciblé des façons de faire qui seraient susceptibles d'atteindre particulièrement les secteurs de la société où on sait très bien qu'il y a des faiblesses, voire même des injustices dont sont victimes au quotidien un grand nombre de personnes contre lesquelles on fait de la discrimination, particulièrement les personnes handicapées?

Mme Michelle Falardeau-Ramsay: La plupart des frustrations quotidiennes sont malheureusement dans des domaines de compétence provinciale, c'est-à-dire le logement, l'éducation et les soins de santé, mais on fait du travail avec les commissions provinciales.

Les commissions provinciales, sauf celles du Québec, de l'Ontario et de la Colombie-Britannique, sont relativement petites et elles n'ont pas souvent la possibilité de faire le type de travail qu'on peut faire.

• 1715

On peut les aider, par exemple, à élaborer des curriculums pour l'éducation dans les écoles. Il faut commencer alors que l'enfant est jeune pour enlever les stéréotypes.

Il existe des projets auxquels on va s'associer. On ne leur donne pas d'argent, mais on leur donne des personnes-ressources. Par exemple, on les aide à faire l'impression de certains documents.

Je visite régulièrement des régions du pays. En général, je vais consulter les groupes. J'y vais avec mon homologue provincial, de sorte que si les gens viennent nous voir dans la salle, je suis en mesure de leur répondre que même si ce n'est pas sous ma juridiction, il y a quelqu'un qui peut leur dire ce qu'ils doivent faire. Il n'y a rien de plus insultant pour quelqu'un qui se rend à une réunion que de se faire dire: «Ah, je n'y peux rien. Ce n'est pas ma juridiction.»

Ce sont des façons par lesquelles on essaie de faire de la communication et de l'information.

Quand moi-même ou les agents de notre commission visitons des endroits, nous n'allons pas seulement dans les grands centres. Nous allons aussi dans les petits centres. Par exemple, je suis allée récemment à Prince George et à Kitimat. Il est important que les gens de ces endroits aient de l'information et de l'éducation sur ces points.

C'est ce qu'on essaie de faire avec les ressources qu'on a.

Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Vous avez fait allusion à la santé, à l'éducation et au logement social, qui sont de compétence provinciale. Je ne sais pas si vous pourrez me répondre, mais disons que depuis plusieurs années, les transferts aux provinces ont été passablement réduits dans ces différents domaines.

Quand on regarde, entre autres, le logement social, on sait très bien que les personnes handicapées sont probablement les moins bien logées de toutes, particulièrement les personnes handicapées qui sont des charges. C'est encore pire.

Croyez-vous que le ministre des Finances ou le gouvernement actuel devrait faire preuve de plus de compassion pour aider les provinces à faire face à leurs obligations? Il en a les moyens, comme tout le monde le sait.

Les provinces ont des obligations. Par contre, elles sont amputées de beaucoup de ressources. Est-ce le genre de recommandations que vous pouvez faire, comme commissaire, à un gouvernement ou si c'est un sujet trop délicat?

Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Vous savez, on n'est pas dans le domaine des relations interprovinciales et provinciales-fédérales.

Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Vous avez quand même un droit de regard.

Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Oui. Comme vous le voyez dans nos rapports annuels, tout ce qu'on peut faire, c'est soulever des questions, mais sans dire quels moyens prendre, parce que ce n'est pas à nous de dire aux gouvernements quels moyens ils devraient prendre.

Est-ce que ce seront les provinces qui vont le faire? Est-ce que ce sera le fédéral? Est-ce que ce sera du financement direct ou indirect? Ça ne me regarde pas. Ce qui m'importe, c'est que les personnes handicapées aient accès à de bons logements. La façon dont c'est fait ne me regarde pas, mais j'aimerais bien que le résultat arrive un jour.

• 1720

Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Madame, vous dites que la façon dont c'est fait ne vous préoccupe pas. Je suis sûre que vous n'admettriez jamais qu'on passe par-dessus les juridictions provinciales pour arriver à un résultat.

Vous n'êtes pas obligée de me répondre.

Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Ce sont des questions plus politiques que techniques.

Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Ce n'était pas une question, mais un commentaire. Je me serais bien gardée de poser une question là-dessus.

Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Je l'apprécie.

[Traduction]

La présidente: Merci beaucoup. Nous avons beaucoup appris, surtout sur les mesures qui doivent être prises, et c'est ce qui intéresse avant tout le comité.

J'espère que, par suite de l'analyse de l'arrêt Eldridge et de votre comparution aujourd'hui, nous serons en mesure de rédiger une petite lettre exposant notre position sur la question. Nous attendons avec impatience de voir le rapport du comité de révision, et nous espérons qu'il répondra à vos attentes. C'est le message que nous espérons transmettre au ministre.

Encore une fois, merci. J'espère que nous aurons l'occasion de nous rencontrer à nouveau.

Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Je l'espère aussi. Merci de nous avoir invités à comparaître devant vous.

[Français]

Cela a été très intéressant pour nous. Merci.

[Traduction]

La présidente: Merci.

La séance est levée.