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HERI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON CANADIAN HERITAGE

COMITÉ PERMANENT DU PATRIMOINE CANADIEN

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 13 avril 2000

• 1106

[Traduction]

Le président (M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.)): Sans perdre de temps, je déclare ouverte la séance du Comité permanent du patrimoine canadien.

[Français]

Le Comité permanent du patrimoine canadien se réunit pour poursuivre son étude sur l'industrie canadienne de l'édition du livre.

[Traduction]

Aujourd'hui, nous accueillons quatre témoins, dont trois ont déjà comparu devant nous, mais comme leur témoignage avait été interrompu par la sonnerie qui nous appelait à voter, ils ont demandé à revenir. Nous accueillons donc avec plaisir M. Larry Stevenson, président-directeur général de Chapters Inc., M. Denis Zook de Pegasus Wholesale, M. Howard Aster, éditeur de Mosaic Press;

[Français]

et Mme Carole Morency, directrice des communications, Groupe Renaud-Bray.

[Traduction]

Nous avons un petit problème de logistique, parce que M. Stevenson et M. Aster ont un avion à prendre.

[Français]

Je crois comprendre que Mme Morency and M. Zook pourront êtes présents jusqu'à la fin de la séance.

[Traduction]

Nous avons donc convenu que M. Stevenson fera d'abord une brève déclaration, qui sera immédiatement suivie d'une période de questions de 20 minutes, puis M. Aster fera lui aussi un bref exposé et nous lui poserons nos questions jusqu'à environ 2 h 45 pour qu'il puisse aller prendre son avion. Je crois d'ailleurs qu'ils prennent le même avion. Après cela, nous pourrons entendre M. Zook et Mme Morency, qui sont plus libres.

Monsieur Stevenson, vous avez la parole.

M. Larry Stevenson (président et directeur général, Chapters Inc.): Merci, monsieur le président.

Tout d'abord, je tiens à vous remercier de nous avoir permis de revenir. Comme notre témoignage avait été écourté la dernière fois, nous apprécions que le comité ait bien voulu nous revoir.

Plutôt que de répéter ce que j'ai déjà dit—nous avions déjà remis un mémoire—j'ai pensé vous en faire grâce et ne parler que des principaux sujets soulevés depuis notre dernière comparution devant le comité. Il y a trois ou quatre autres choses dont je tiens à parler, et ensuite, je suis sûr que vous aurez des questions à poser.

Je commencerai par ce qui me tient probablement le plus à coeur pour mettre les choses bien au clair. Je ne sais pas si cela s'est fait devant le comité ou publiquement, mais on s'est beaucoup interrogé sur l'existence de la liberté d'expression. Je tiens à ce que le comité sache bien que j'ai écrit à l'association des éditeurs pour leur dire qu'à mon avis, ils devraient venir exposer les faits, parce que très franchement, j'ai l'impression que toutes ces insinuations qui sont faites brouillent la réalité, ce qui n'est pas très utile.

À propos de certaines affirmations dont ont parlé certains membres de ce comité, selon lesquelles les éditeurs ne sont pas prêts à venir dire quoi que ce soit de négatif sur Chapters, dans une très large mesure, c'est plutôt le contraire. Plusieurs éditeurs m'ont appelé pour me dire qu'ils ne sont pas très à l'aise de venir rien dire de positif, parce que très franchement, qu'ils parlent dans un sens ou dans l'autre, ils s'en mordront les doigts. C'est sûr que Chapters est un gros client pour eux, et ils craignent de dire quelque chose de négatif à son sujet. Par contre, s'ils disent quoi que ce soit de positif, là c'est tout le reste de l'industrie, à qui ils essaient aussi de vendre des livres, qui leur posera un problème.

Je proposerais donc—quoi que je ne connaisse pas très bien les règles de procédure—qu'il y ait un contre-interrogatoire et que tout le monde soit dans la même salle pour entendre les mêmes faits. Je dois vous dire qu'à mon avis, ces faits démontreront nettement et clairement ce que nous avons fait et ce que nous n'avons pas fait. Il est très difficile pour nous de réagir à une accusation selon laquelle un certain éditeur a dit une certaine chose à notre sujet, si nous ne savons pas de qui il s'agit ni la nature de ses propos.

• 1110

L'un des exemples cités—les journaux en ont parlé à plusieurs reprises—concerne une compagnie qui s'appelle Firefly, l'un de nos fournisseurs. Elle prétendait que nous, chez Chapters, avions usé de représailles contre elle par le biais des retours. Si d'autres exemples me sont donnés pendant la période de questions, je serai très heureux d'y répondre, mais commençons par Firefly, puisque les médias en ont parlé.

Je tiens à bien préciser une chose: nous n'avons jamais usé des retours de livres comme moyen de pression quelconque. Nous retournons des livres continuellement dans le cadre de nos activités. En fait, si vous regardez nos statistiques de cette année sur les retours, c'est en plein dans la moyenne de ces cinq dernières années. Nos retours se situent entre 28 et 32 p. 100 et, cette année, ça a été 30 p. 100. Nous n'avons donc pas retourné beaucoup plus de livres cette année que d'habitude pour inciter en qui que ce soit à faire quoi que ce soit.

Dans le cas précis de Firefly, l'accusation portée par l'une des librairies indépendantes dont ont parlé les journaux est que nous avions retourné tout un tas de produits parce qu'elle n'avait pas choisi de passer par l'intermédiaire de Pegasus. Nos retours à la maison Firefly pendant l'année financière qui s'est terminée il y a à peine deux semaines ont donné un total de 1,07 millions de dollars. L'année dernière, avant Pegasus, donc, nos retours à la maison d'édition avaient représenté un total de 1,08 millions de dollars. Alors je propose qu'on se fonde sur les faits plutôt que de prêter l'oreille à des gens qui, de toute évidence, n'appuient pas leurs affirmations à la presse sur des données tangibles.

Il y a autre chose dont j'aimerais parler. Je sais que le Bureau de la concurrence a comparu devant vous, et j'ai lu les commentaires de ses témoins. Une chose qui est claire, c'est que nous ne nous entendons par sur la définition du marché. C'est normal; même des gens raisonnables peuvent ne pas être d'accord sur tout. Nous avons toujours été convaincus, depuis la fusion, en 1994, quand nous avions entamé le processus, que quiconque vend un livre à un client—même livre, même client—est un concurrent. Manifestement, à l'époque et encore maintenant, je le constate à la lecture du compte rendu de leur témoignage, ils donnaient au marché une définition plus étroite que nous, c'est-à-dire que si vous vendez dans votre librairie autre chose que des livres, vous n'êtes pas considéré comme un libraire. Je trouve cette définition du marché assez bizarre.

J'ai demandé aux employés de notre magasin de prendre des photos—et je vais les faire circuler parmi vous pendant que vous poserez des questions—d'un marché d'alimentation de Vancouver qui s'appelle Save-on-Foods. Ce magasin qui, selon la définition du Bureau de la concurrence, ne ferait pas partie du marché du livre, donc qui ne nous ferait pas concurrence, est en fait plus grand que notre magasin SmithBooks de Vancouver lequel, en passant, fait évidemment partie du marché. C'est une librairie de 2 600 pieds carrés qui se trouve en plein milieu d'un magasin d'alimentation et qui offre un plus grand escompte que nous sur les livres. Nous avons demandé à nos employés de faire un calcul, et ce magasin propose 9 773 titres, comparativement à notre librairie SmithBooks qui en a 7 338. Donc, quelle que soit la définition du marché, à mon avis, ce magasin est un concurrent de Chapters. Pour ceux qui n'ont jamais vu ce genre de magasins, je dirais que quiconque vend des livres comme nous est, de toute évidence, un détaillant concurrent.

Ceci dit, des gens tout à fait raisonnables peuvent ne pas être d'accord. Si l'on accepte la définition étroite du marché, il est clair que notre part du marché est plus grande. Je crois que le Bureau de la concurrence la situe aux environ de 35 p. 100, comparativement à 20 à 23 p. 100 selon la définition plus large.

J'aimerais aussi exposer—j'en ai déjà parlé personnellement à certains membres—un peu de l'histoire de Pegasus. Même si cette société n'est devenue publique que l'année dernière, nous travaillions sur ce projet depuis trois ans, chez Chapters. La raison à cela est que nous étions profondément convaincus que cela aiderait le commerce de détail, mais aussi qu'il nous serait impossible d'offrir des produits en ligne sans l'intermédiaire d'un grossiste national.

Comme je l'ai dit la dernière fois que j'ai comparu, il est impossible d'offrir un service en ligne à des prix qui concurrenceraient ceux des librairies, généralement au sud de nos frontières, qui offrent les mêmes ouvrages et les livrent en 24, 48 ou 72 heures, alors que sur notre site nous devrions dire «Bienvenue sur notre site. Nous sommes une entreprise canadienne, alors veuillez nous appuyer, mais la livraison de votre commande prendra 6 à 8 semaines».

Ce sont les principaux éléments qui sont ressortis, du moins que j'ai vus, à la lecture du compte rendu des autres personnes qui ont témoigné devant le comité. Le besoin est là, et l'on sent une crainte phénoménale des changements qui surviennent dans l'industrie du livre. Je nous encouragerais—et je nous englobe dans cette définition—à essayer de trouver une solution commune. On pourrait faire bien des choses.

Je recommanderais, par exemple, que l'on cherche à comprendre pourquoi il y a tant de retours dans l'industrie et ce que l'on pourrait faire de la chaîne des livres du moment qu'ils quittent la maison d'édition jusqu'à qu'ils soient aux mains des consommateurs, et inversement. Ce serait une démarche utile—utile pour le gouvernement, utile pour les détaillants et utile pour les consommateurs. J'encouragerais donc cette démarche. Nous serions très heureux d'y participer.

De plus, l'une des choses qui a eu une incidence désastreuse sur l'industrie du livre au début des années 90 a été l'imposition de la TPS. J'avais dit devant ce comité, et c'est dans le compte rendu de cette réunion-là, qu'il était bon à mon avis de ne pas imposer la TPS sur les livres. Ce serait bon non seulement pour les libraires indépendants, Chapters ou les maisons d'édition, mais aussi pour tous les participants à cette chaîne, parce qu'ainsi nous vendrions plus de livres.

• 1115

L'une des choses qui me préoccupe dans toute cette question d'intégration verticale est ce qui arriverait si Pegasus devait acquérir des droits exclusifs. Il me semble que cela vaudrait la peine d'envisager de faire une sorte d'amendement aux dispositions concernant les droits de distribution du projet de loi C-32 pour empêcher cela. Nous l'avons dit, et c'est inscrit au compte rendu, nous n'avons pas les droits exclusifs sur Pegasus et nous n'en voulons pas. Donc, si quelque changement législatif était proposé à ce sujet, nous l'appuierions.

Monsieur le président, c'est tout ce que j'avais préparé en fait d'observations.

Le président: Merci.

Afin de gagner du temps, pouvons-nous convenir, pour que tous les membres du comité aient la possibilité d'interroger M. Stevenson, comme je ne doute pas que vous souhaitiez, de nous limiter à une seule question par personne? Est-ce que cela vous paraît juste? Il doit partir de toute façon, alors profitons-en tant qu'il est encore là.

Monsieur Mark.

M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président et merci aussi à nos témoins d'être ici aujourd'hui.

J'ai deux courtes questions. Premièrement, dans tout ce processus, l'une des critiques qui a été formulée à l'égard de Chapters est la lenteur avec laquelle les factures sont acquittées. Pourriez-vous donner des détails là-dessus? L'autre question, c'est combien de maisons d'édition n'ont absolument aucun rapport avec Chapters aujourd'hui comparativement à, disons, il y a un an? Vous avez perdu beaucoup d'éditeurs en cours de route.

M. Larry Stevenson: Au sujet des paiements, vous avez tout à fait raison. Les deux principaux problèmes qui ont été soulevés lorsque j'ai comparu selon les éditeurs en 94 et encore en 95, au moment de la fusion, est que nous retournions trop de livres et que nous ne payions pas assez rapidement nos factures. C'est la complainte éternelle, et c'est dû au taux de renouvellement des stocks. Actuellement c'est 1,8 et notre point de vue, c'est que nous payons dès que nous le pouvons, comme avant, en fait. Nous ne réglons pas nos factures moins vite ou plus vite qu'auparavant. Vous l'avez compris, ce n'est pas spécifique à Pegasus ni à l'année 2000 ou 1999. Les éditeurs étaient exactement du même avis en 1994 et 1995. Malheureusement, ce sont là les modalités de nos échanges avec eux. Ce n'est pas à cause de la fusion. Nous agissons exactement de la même façon qu'auparavant sur ce plan.

Pour répondre à la deuxième question, je ne connais pas d'éditeurs avec lesquels nous faisions affaire il y a un an et plus maintenant. Certains passent par Pegasus et d'autres viennent directement à nos magasins. En fait, il y a eu une très forte augmentation sur trois ans du nombre de maisons d'édition qui traitent directement avec Chapters, ce qui est en grande partie attribuable aux magasins et, depuis un an, à l'essor de l'Internet. Nous vendons maintenant par l'intermédiaire de l'Internet des livres de beaucoup plus de maisons d'édition obscures avec lesquelles nous n'aurions peut-être pas traité en d'autres temps.

M. Inky Mark: Pour revenir à ma première question, qu'est-ce qui, à votre avis, constituerait un délai raisonnable de règlement de factures?

M. Larry Stevenson: Ce serait selon les normes habituelles que nous appliquons avec ces éditeurs depuis 20 ans. Rien n'a changé sur ce plan comparativement à il y a 15 ans. Tous les fournisseurs aimeraient bien se faire payer plus vite. Nous aimerions bien les régler plus rapidement. Cela nous plairait beaucoup de pouvoir renouveler les stocks plus rapidement et ne pas avoir un approvisionnement de huit semaines de manière à pouvoir les payer plus vite.

La solution à cela c'est, en partie, Pegasus, qui nous permettra de payer plus rapidement si nous n'avons pas autant besoin de renouveler les stocks puisqu'il ne sera plus nécessaire de tout avoir en stock dans 320 magasins.

Le président: Alors c'est quoi, 60 jours, 90 jours?

M. Larry Stevenson: En fait, cela dépend de la maison d'édition. Certaines exigent un paiement immédiat. Certaines autres ne nous vendront rien à moins d'être payées d'avance. D'autres nous accordent 30 ou 60 jours; il y en a même avec qui c'est 120 jours. C'est donc différent avec chaque maison d'édition.

Le président: Monsieur Mark, nous reviendrons à vos questions.

M. Inky Mark: Sur le même sujet, tout de même, qu'avez-vous à répondre à ceux qui disent qu'il vous faut un an ou deux ans pour régler vos factures?

M. Larry Stevenson: Eh bien, c'est absolument faux, et je suis tout disposé à ouvrir mes livres à un représentant du gouvernement si vous voulez le vérifier. En passant, c'est exactement ce qu'a fait le Bureau de la concurrence les trois années qui ont suivi la fusion. Ils ont vérifié nos comptes créditeurs sur une base trimestrielle et ils ont été tout à fait convaincus que nous n'avions pas modifié nos modes de paiement. Nous n'avons rien changé depuis. Alors je ne verrais aucun inconvénient à ce que quelqu'un vienne vérifier nos chiffres.

[Français]

Le président: Monsieur de Savoye.

M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Monsieur Stevenson, notre comité n'est pas un tribunal; il n'y a pas de bons et de méchants, et on ne porte pas d'accusations. Nous sommes ici pour envisager l'élaboration de nouvelles lois, de nouvelles réglementations et de nouvelles politiques. Vous n'êtes pas sans savoir que votre arrivée sur le marché a perturbé les habitudes qui existaient précédemment. Le volume d'affaires que vous faites avec les éditeurs, le temps que vous prenez pour payer ce gros volume d'affaires et les retours qui peuvent être massifs perturbent l'ensemble du marché en question.

Avez-vous des suggestions que ce comité pourrait retenir lorsqu'il formulera ses recommandations afin qu'on puisse éviter les perturbations qui découlent de votre présence?

• 1120

M. Larry Stevenson: C'est une très bonne question. J'y répondrai en anglais, si vous me le permettez.

[Traduction]

Premièrement, je ne sais pas vraiment parce que je ne connais pas assez la loi et, par conséquent, ce que peut faire ce comité.

Permettez-moi de dire que je suis d'accord que les changements qui surviennent dans l'industrie et qui à mon avis, en passant, ne feront que s'accroître d'ici deux ou trois ans avec les choix comme l'impression sur demande et le téléchargement électronique des livres, suscitent d'énormes préoccupations. Par conséquent, il y a des choses qui, aujourd'hui, protègent peut-être certains éditeurs et distributeurs canadiens mais qui vont subir de fortes pressions.

D'après moi, ce que ce comité pourrait peut-être faire, c'est recommander que des fonds soient attribués à l'industrie pour que l'ensemble de ses membres—éditeurs, distributeurs, grossistes et détaillants—puissent fonctionner harmonieusement.

Par exemple, devrions-nous renoncer aux retours? Depuis mon arrivée dans l'industrie du livre, je dis que j'y serais favorable. Pendant 50 ans, dans l'industrie de l'édition, il n'y a pas eu de retours, mais on me dit un profane naïf qui ne comprend rien à l'industrie du livre. Cependant, on ne peut pas me dire qu'il n'est pas possible de fonctionner ce mécanisme puis se plaindre qu'il y ait des retours. Ce n'est pas moi qui ai fait les règles. Ce n'est pas Chapters. Nous n'avons pas inventé la reprise des marchandises. Cela vient de l'industrie du livre et, dans l'ensemble, ce sont justement les éditeurs qui y tiennent le plus.

Nous affichons de meilleurs taux de retour qu'il y a deux ans. À l'époque, nous avions retourné 32 p. 100 de nos livres, comparativement à seulement 30 p. 100 cette année. Les retours nous coûtent tout autant qu'aux éditeurs, parce que nous devons payer les employés qui retirent les livres des rayons et débourser tous les coûts du financement. Par définition, nous avions sur nos rayons des livres que nous avions financés, pour lesquels nous avions emprunté à la banque, et que nous n'avons pas vendu. Nous préférerions ne pas avoir à le faire.

D'après nous, la création d'un grossiste national pourrait largement contribuer à améliorer notre degré d'efficience en réduisant vraiment le volume de retours et en accélérant le règlement des factures. Selon notre point de vue, c'est l'une des choses vraiment importantes qu'il faut faire.

Je pense tout de même que ce comité est probablement en meilleure posture pour déterminer quelles autres mesures, du point de vue législatif, pourraient être prises. Je n'en ai malheureusement aucune idée.

Le président: Monsieur Shepherd.

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): J'ai entendu votre commentaire, lorsque vous avez suggéré qu'on mette plus d'argent à la disposition de l'industrie. Nous subventionnons déjà les maisons d'édition. Selon moi, votre entreprise profite indirectement d'une subvention que nous accordons aux éditeurs, par le biais de l'escompte qu'elle leur permet de vous offrir. C'est donc que nous subventionnons déjà Chapters, d'une certaine façon, et vous demandez encore de l'argent.

En plus, vous demandez une exemption de la TPS. Je suis toujours étonné d'entendre des entreprises nous dire qu'il leur faut des politiques fiscales particulières, etc., pour aussitôt se retourner et tendre la main. Le pire, c'est que j'ai aussi examiné vos états financiers, et j'ai constaté que Chapters, très franchement, n'est pas rentable.

Mais il y a une question que j'aimerais vous poser. Vous avez dit dans un document antérieur quelque chose du genre que c'est avec regret que vous aviez dû vous résigner à restructurer l'industrie et à créer un grossiste national. Je vois que vous avez vendu une partie de Pegasus. Seriez-vous prêt à séparer complètement Chapters des actifs de Pegasus?

M. Larry Stevenson: Si on m'en offre le prix que cela vaut, sans problème, mais nous avons investi 54 millions de dollars dans l'entreprise. J'aurais bien voulu n'y être qu'un investisseur minoritaire si quelqu'un avait été prêt à y mettre son argent. Alors si vous voulez dire par là que le gouvernement souhaiterait en acheter une grande partie, je ne verrais pas d'objection à lui céder une part de Pegasus.

M. Alex Shepherd: Non, non...

M. Larry Stevenson: J'aimerais bien vous voir assis à ma place en train de vous justifier d'exploiter Pegasus.

M. Alex Shepherd: Nous aimerions que vous concluiez sur le marché une convention de placement de Pegasus...

M. Larry Stevenson: Sans problème. Je le ferais sans hésiter dans les bonnes conditions, mais vous ne pouvez sûrement pas dire, maintenant donnez-le, ce que d'ailleurs les éditeurs auraient bien voulu lorsque nous avons commencé à mettre l'entreprise sur pied. Ils voulaient que nous y mettions l'argent, sans en avoir la propriété. Ce n'est pas réalisable. Vous ne pouvez pas songer à demander à des investisseurs d'investir 54 millions de dollars en leur disant: «Par contre, ne vous attendez pas à en tirer le moindre revenu».

Moi je veux bien. Toute suggestion... Mais vous devez me dire qui nous donnera cet argent, et si vous voulez être l'intermédiaire dans cette transaction, nous...

M. Alex Shepherd: Avez-vous étudié la possibilité, avec vos placeurs, d'offrir des actions selon cette formule?

M. Larry Stevenson: Non.

M. Alex Shepherd: Alors comment pouvez-vous savoir ce qu'il en coûterait? Vous n'avez pas...

M. Larry Stevenson: Parce que j'ai vendu une part de la compagnie pour 7,5 millions de dollars, alors je sais exactement la valeur de cette transaction-là. Il y a eu une transaction indépendante avec une société d'investissement en capital-risque, alors j'en connais la valeur comptable. Ils ont investi avant que le moindre éditeur s'offre, avant qu'on ouvre nos portes, donc si leur investissement peut leur rapporter et à nous aussi, je n'y verrais pas de problème.

Maintenant, au sujet de ce que vous avez dit sur le fait que Chapters n'est pas rentable, je dois avouer, monsieur, que je ne sais pas vraiment où vous obtenez vos chiffres. Il y a deux compagnies distinctes. Il y a le détaillant Chapters, qui a été rentable absolument chaque année depuis qu'il a ouvert ses portes, et Chapters en ligne, qui n'est pas rentable, à l'instar de d'autres commerces électroniques du globe.

• 1125

La question qui se pose est la suivante: Est-ce que le Canada tient au commerce électronique? Je pense qu'il le devrait. Cependant, il n'est pas possible de nos jours pour une entreprise de mettre sur pied une infrastructure de ce genre—de manière à pouvoir offrir un service en ligne—qui soit rentable. Nous ne sommes pas bien différents de quiconque sur le marché, mais il y a deux volets différents à Chapters.

M. Alex Shepherd: Eh bien, il s'agit de Chapters Inc., et le moyen de tirer des conclusions, c'est en faisant le calcul des gains nets sur les ventes de Chapters en ligne et sur les ventes de Pegasus. Ce sont des transactions sur des livres. Mais si je n'en tiens pas compte et que je ne regarde que les transactions en ligne, il ne me semble pas que c'est une entreprise rentable.

M. Larry Stevenson: Je suis désolé, mais je n'ai pas pu vous entendre. Vous ne pensez pas que notre détaillant fait de l'argent...?

M. Alex Shepherd: C'est ce que montrent vos états financiers.

M. Larry Stevenson: Non. Alors vous ne regardez pas les chiffres de toute l'année. Sur quatre trimestres, il y en a trois où personne, sur le marché du livre au détail, ne réalise des profits; ces profits, on les fait dans la période des Fêtes. Il faut prendre les chiffres de toute l'année. Je ne sais pas quelles données vous regardez, monsieur, mais c'est absolument faux. Le volet détaillant de Chapters a été rentable chaque année.

Maintenant, je ne sais pas comment vous voyez les choses. Je ne sais pas qu'est-ce qui vous gênerait le plus: que vous nous subventionniez et que nous fassions de l'argent, ou que vous nous subventionniez et que nous en perdions? C'est à vous de décider.

Le président: Est-ce qu'il y a quelqu'un d'autre du Parti libéral...?

Monsieur Bélanger.

M. Mauril Bélanger (Ottawa—Vanier, Lib.): Pourriez-vous, je vous prie, décrire la relation de Chapters ou de Pegasus, ou de Pegasus-Chapters avec le groupe Manda. C'est bien cela?

M. Denis Zook (président-directeur général, Pegasus Wholesale): Oui, je le peux. En fait, c'est une relation de Pegasus. Pegasus a son propre personnel de marketing et de vente, qui a été mis sur pied juste avant le lancement de la compagnie, mais il ne suffit pas à offrir un service assez rapide dans tout le pays pour permettre de lancer la compagnie et rencontrer les clients potentiels.

Nous avons donc retenu les services, à contrat, de deux firmes de représentants de commerce indépendants. L'une s'appelle Manda, et l'autre Jacqueline Gross and Associates. Ces deux firmes représentent de nombreux éditeurs et plusieurs autres distributeurs, à titre de représentants de commerce indépendants. Ils communiquent avec des revendeurs potentiels, avec des librairies, à qui elles vendent les livres, et nous leur payons une commission pour les commandes que nous livrons. Nous ne les payons que lorsqu'ils vendent de nos produits.

M. Mauril Bélanger: Est-ce qu'elles ont aussi des droits exclusifs de distribution?

M. Denis Zook: Non.

M. Mauril Bélanger: Vous avez dit qu'elles s'adressent aux maisons d'édition.

M. Denis Zook: Oui, elles représentent certains éditeurs.

M. Mauril Bélanger: Mais en représentant ces éditeurs, elles n'ont pas l'exclusivité...?

M. Denis Zook: Non. Par exemple, je crois qu'elles représentent Sterling. Elles pourraient vous vendre un livre de Sterling. Ce serait à vous de décider de qui vous voulez obtenir ce livre. Vous avez fait le choix d'offrir ce livre dans votre boutique et c'est à vous de décider si vous voulez l'acheter de Sterling, de Book Express, s'ils l'ont, de North 49 ou de Pegasus. Le choix dépend vraiment de vous. Ces firmes ne font que représenter la maison d'édition parce qu'elle n'a pas son propre personnel de vente au Canada.

M. Mauril Bélanger: Ce que j'aimerais comprendre c'est ceci: Est-ce qu'elles deviennent des agents exclusifs de Pegasus si Pegasus a les droits exclusifs de distribution?

M. Denis Zook: Premièrement, nous n'avons pas les droits exclusifs de distribution. Nous l'avons dit à maintes reprises, nous n'avons aucune intention de les acquérir.

Mais non, ce ne sont pas nos agents exclusifs, et personne n'est obligé d'acheter chez nous les produits qu'elles vendent. Il n'y a pas d'exclusivité, ni dans un sens, ni dans l'autre.

M. Mauril Bélanger: C'est donc strictement une force de vente pour vous?

M. Denis Zook: Elles sont strictement une force de vente et c'est une manière pour nous, d'avoir quelqu'un qui communique avec nos clients et d'offrir nos services sans avoir à embaucher 20 nouveaux employés d'un seul coup, bien que nous ayons aussi nos propres représentants des ventes.

Le président: Madame Lill.

Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD): J'aimerais que vous répondiez à une question, ou à une affirmation qui a été faite à plusieurs reprises, selon laquelle Chapters ne sait pas vraiment s'y prendre pour vendre des livres et, plus précisément, ne sait pas vendre les livres canadiens. Nous sommes le comité du patrimoine et c'est ce qui nous réunit ici: nous nous préoccupons des livres canadiens et de leur création constante.

Le problème, c'est qu'il fut une époque où il y avait beaucoup de magasins indépendants qui offraient des ouvrages, avaient des petites activités de promotion de livres et des séances d'autographe. Le livre canadien, que ce soit un recueil de poèmes, une pièce de théâtre, ou quoi que ce soit d'autre, était entouré d'une certaine culture. C'est cette culture qui semble avoir permis l'existence d'un plus grand nombre de créateurs canadiens. On craint beaucoup que cette époque soit finie, qu'en fait les librairies comme Chapters ne sachent pas vraiment s'y prendre pour vendre les livres canadiens. Elles savent bien vendre les livres d'auteurs connus qui en mettent plein la vue. S'il y a des maisons d'édition qui sont prêtes à beaucoup dépenser sur la présentation, ces livres se vendent bien, et aussi ceux qui sont exposés à l'entrée des magasins et sur lesquels il y a un gros escompte. Quant aux livres canadiens pour enfants, aux recueils de poètes canadiens, aux oeuvres canadiennes, ceux-là ne se vendent pas.

• 1130

J'aimerais savoir ce que vous avez à répondre à cela, parce que c'est au coeur de ce qui nous préoccupe. J'aimerais savoir combien de livres canadiens et combien de titres d'auteurs canadiens vous vendez et, selon vous, dans quelle mesure vous réussissez en fait à promouvoir la culture canadienne, plutôt que de seulement vendre des ouvrages.

M. Larry Stevenson: Je vous remercie beaucoup d'avoir posé cette question.

Premièrement, j'appuie de tout mon coeur les auteurs canadiens, et je crois fermement que nous leur avons donné un grand coup de main. Je sais bien que nos compétiteurs disent que nous ne savons pas vendre les livres, mais il faudrait bien se décider entre ces deux choses. Ou bien nous vendons trop de livres et c'est le problème, et c'est pourquoi nous sommes ici, ou encore nous ne savons pas vendre les livres.

La réalité c'est que, selon Patrimoine Canada—ces chiffres ne viennent pas de moi—les livres canadiens, les titres d'auteurs canadiens, qui représentaient 30 p. 100 des livres vendus au pays, en représentent aujourd'hui 46 p. 100. Nous avons contribué à cet essor. Il serait inutile de chercher à déterminer à qui exactement attribuer quelle part de ce gain de 16 points, mais je ne sais pas si nous avons connu une meilleure période en ce qui a trait à la mise en valeur des auteurs canadiens.

Vous voulez savoir ce que nous faisons pour y contribuer? Nous avons toutes sortes de programmes, dont j'ai parlé dans mon dernier mémoire, des pages complètes, du Prix de la première nouvelle au prix Robertson Davis, en passant par le soutien que nous offrons aux finalistes du prix Giller et par notre contribution au Prix du gouverneur général—les gens du Conseil des arts du Canada qui sont ici le confirmeront. Il n'y a pas un seul auteur canadien que nous ne voudrions pas aider.

Nous avons les programmes Small-press Feature, Made in Canada et Write from Canada. Nous faisons tout en notre pouvoir pour aider les auteurs canadiens. Nous avons tenu 18 000 activités dans nos magasins et 90 p. 100 des personnes qui y ont participé étaient des Canadiens.

Pourrions-nous en faire plus? Il y a toujours moyen de faire plus. Je le voudrais bien. Mais je pense que la preuve est dans les faits. Vous voulez savoir si nous vendons plus de livres canadiens? La réponse est: absolument, sans conteste, oui.

C'est donc tout ce sur quoi on peut me juger, dans quelle mesure nous avons réussi à vendre ces livres.

Mme Wendy Lill: Au sujet du nombre de titres, pourriez-vous nous remettre ces statistiques?

M. Larry Stevenson: C'est une excellente question mais je ne peux pas y répondre, et je vais vous dire pourquoi. C'est parce qu'aucune base de données, y compris la nôtre, n'a de poste «vente d'ouvrages d'auteurs canadiens» dans la ventilation des ventes. Il y a des auteurs canadiens dont les oeuvres sont publiées par des maisons d'édition étrangères. Il y a des auteurs étrangers qui font publier leurs oeuvres par des maisons d'édition canadiennes. Je peux vous donner les chiffres de nos ventes à des maisons d'édition canadiennes, mais cela ne dit pas tout, parce que beaucoup d'excellents auteurs canadiens font maintenant affaire avec Random House ou d'autres éditeurs.

Je pense que ce serait une bonne question à poser aux maisons d'édition—vous avez ici le représentant d'une petite maison d'édition—mais je trouve que nous faisons beaucoup pour aider les petits éditeurs canadiens. Je pense que c'est très important pour nous, parce que notre réussite... J'aimerais revenir devant ce comité dans cinq ans et que certaines personnes constatent, eh bien, ne vendons-nous pas plus de livres canadiens au pays? Mais ne serait-il pas juste de dire maintenant: ne vendons-nous pas plus de livres aujourd'hui qu'il y a cinq ans? La réponse est, sans conteste, oui, nous vendons plus de livres canadiens. Donc, ce comité du patrimoine, au lieu de tenir cette audience, devrait demander qu'avons-nous fait depuis cinq ans qu'il faut poursuivre dans les cinq prochaines années pour que ce 46 p. 100 devienne 60 p. 100?

Le président: J'ai un petit problème. Si on veut être juste avec M. Muise, je ne doute pas qu'il veuille vous poser des questions, mais en même temps, je pense à M. Aster qui a un avion à prendre. Ce n'est pas la faute du comité; nous siégeons de 11 heures à 13 heures, et ces deux témoins doivent aller prendre leur avion.

Monsieur Muise, pourriez-vous poser rapidement votre question à M. Stevenson, si vous voulez, puis nous laisserons la parole à M. Aster?

Nous ne vous laisserons pas beaucoup de temps, monsieur Aster. Je suis vraiment désolé. Vous devrez vous en prendre à M. Stevenson, pour avoir trop parlé.

M. Mark Muise (West Nova, PC): Merci, monsieur le président. Comme vous le savez, mes questions sont toujours très courtes et directes, alors j'espère que vous vous en rappellerez à l'avenir.

Je remercie nos invités d'être ici aujourd'hui.

Monsieur Stevenson, le comité a appris qu'il y a des endroits où il n'y a qu'un seul prix de détail pour les livres. J'aimerais savoir ce que vous penseriez de l'adoption d'une politique semblable au Canada?

M. Larry Stevenson: Je crois que ce serait une politique impossible à appliquer à l'ère de l'Internet. La France a aussi une excellente politique à ce sujet. Je ne vois pas comment vous pouvez empêcher le téléchargement d'un livre, même si le prix de détail est réglementé. Je pense qu'il deviendra de plus en plus difficile d'appliquer ce genre de mesure législative visant la protection des prix. Au bout du compte, c'est de toute évidence le consommateur qui doit payer pour ça.

• 1135

L'une des armes de la concurrence, avec le choix et le service, est aussi le prix. Je crois, bien franchement, que ce n'est pas seulement ce qu'a fait Chapters qui a donné lieu à l'explosion des ventes de livres, mais aussi le fait qu'il n'y a jamais eu tant de magasins qui vendent des livres.

L'une des raisons pour lesquelles je pense que Save-on-Foods & Drugs est un compétiteur est qu'on y vend beaucoup de livres, parce que les gens s'y rendent deux fois par semaine faire l'épicerie et, tant qu'à y être, ils achètent des livres. De plus, il y a d'assez gros escomptes sur ces livres. Donc, si vous disiez aux dirigeants de Save-on-Foods qu'ils ne peuvent vendre qu'au prix de détail sans escompte, peut-être seraient-ils moins intéressés à vendre des livres, ce qui ferait que les maisons d'édition vendraient moins, et les auteurs vendraient moins. Je pense que l'industrie du livre souffrirait de l'élimination de ce facteur de flexibilité.

Mais même si vous le vouliez, je ne pense vraiment pas que vous puissiez forcer Amazon.com à vendre les livres à un prix que vous fixeriez. Les Allemands ont un peu de difficulté à déterminer quels livres ils peuvent ou ne peuvent pas vendre, alors je pense qu'il serait assez difficile de les obliger à vendre à un certain prix et pas à un autre.

M. Mark Muise: M. de Savoye a exprimé une vision des choses telles que je les vois. Nous ne sommes pas ici pour juger, mais pour comprendre et pour cerner des faits.

Nous entendons dire notamment que les libraires indépendants se font pousser hors du marché. Ce que j'aimerais savoir, c'est si vous vous êtes engagés à long terme à offrir une vaste sélection de livres dans vos magasins? Peut-être pourriez-vous répondre à cette question en nous disant quel choix vous aviez avant d'ouvrir votre magasin d'Ottawa, comparativement à ce qu'il est maintenant.

M. Larry Stevenson: C'est une excellente question.

Tout d'abord, les grands magasins ne peuvent survivre rien qu'avec les livres d'auteurs très connus; 5 p. 100 des recettes des grands magasins proviennent des best-sellers qui sont vendus avec un escompte. C'est donc que 95 p. 100 des recettes proviennent des ventes de tous les autres titres. C'est tout le contraire.

Dans un petit magasin, nous sommes limités. Lorsque j'ai témoigné devant le Bureau de la concurrence, au moment de la fusion, des gens disaient, eh bien, vous n'avez que 8 000 titres dans vos librairies Coles et SmithBooks. C'est assez juste. La superficie du magasin limite en quelque sorte le nombre d'ouvrages qu'on peut offrir, ce qui signifie qu'avec 40 000 nouveaux titres anglais qui sont publiés chaque année, on n'a pas seulement tendance à n'offrir que les nouveautés, mais aussi celles qui se vendent le plus rapidement. On ne peut pas vraiment sacrifier beaucoup d'espace aux recueils de poésie d'auteurs relativement obscurs.

Par contre, dans un magasin de 42 000 pieds carrés, laissez-moi vous dire que nous avons des sections où les livres sont renouvelés à une fréquence de moins d'une fois par année, ce qui signifie que nous avons une sélection absolument phénoménale parce que c'est ce que les gens veulent dans ces catégories. Je peux facilement vous regarder dans les yeux et vous dire que nous sommes déterminés à améliorer le choix, parce que c'est notre avantage concurrentiel. La principale raison qui amène les gens dans notre magasin Chapters est qu'ils pensent y trouver un meilleur choix qu'ailleurs. Ce serait du suicide pour moi que de ne pas le faire. Quelles que soient les recommandations que ce comité voudrait faire, j'aimerais pouvoir continuellement accroître le choix de titres.

Avec le temps, le magasin s'améliore toujours, parce qu'on commence à mieux cerner son marché. Par exemple, si la science fiction remporte un succès particulier dans un certain magasin, c'est à lui d'offrir une plus vaste sélection d'ouvrages dans ce domaine.

L'on constate que, lorsqu'un magasin ouvre ses portes, il s'y trouve quelque chose, en moyenne, comme 90 000 titres. Au bout de deux ans et demi, c'est de l'ordre de 105 000 titres, et c'est vraiment un signe que les responsables de ce magasin commencent à comprendre quels genres d'ouvrages il devrait offrir.

Permettez-moi de vous assurer, donc, que nous augmenterons le choix. Je dois vous dire, en passant, que l'Internet augmentera le choix, que nous le voulions ou non. Avec les 450 000 titres qu'offre Pegasus et le fait qu'on peut trouver à peu près n'importe quel livre sur le Web, il devient impossible de ne pas trouver un livre, dans quelque région que ce soit au Canada.

Le président: J'aimerais présenter des excuses aux membres du comité.

J'avais pensé savoir lire l'heure, mais je me trompais d'une heure. Alors monsieur Stevenson, si vous vouliez bien rester avec nous, je ne doute pas que les membres du comité souhaiteraient vous poser d'autres questions, mais peut-être pouvons-nous maintenant laisser la parole à M. Aster.

Peut-être pourriez-vous faire une brève déclaration, puis nous vous poserons des questions, et ensuite nous entendrons les témoignages de Mme Morency et de M. Zook.

M. Howard Aster (éditeur, Mosaic Press): Merci, monsieur le président, et je vous remercie de m'avoir convoqué devant ce comité.

Je dois dire, franchement, que j'ai lu les délibérations du comité avec beaucoup d'intérêt depuis quelques temps, et mon point de vue sur les questions qui l'occupent est peut-être différent de ce qu'en pensent beaucoup d'autres personnes.

Ma perception des problèmes est celle d'une petite maison d'édition canadienne que je dirige, qui s'appelle Mosaic Press. Je pense aussi, cependant, que la perspective que je peux présenter sur ces questions au comité se rapporte en réalité à l'évolution de la littérature canadienne, qui m'occupe depuis 25 ans, et à notre perspective de l'évolution du marché depuis dix ou quinze ans, particulièrement aux États-Unis, et des changements qui surviennent au Canada et aussi, je pense, en Grande-Bretagne.

• 1140

J'ai enseigné une partie de ma vie à l'université. Je vais faire une petite observation à l'intention du personnel de recherche qui se trouve ici. Il existe dans ce pays de nombreuses statistiques culturelles qui sont très bonnes à mon avis. Je pense que le service chargé des statistiques culturelles à Statistique Canada fait du bon travail.

Je veux vous parler de deux articles intéressants dont un que j'ai lu ce matin et un autre, hier soir. Ce dont je veux vous faire part immédiatement est tiré de l'édition du 27 avril du New York Review of Books. Il s'agit d'un article de Jaseon Epstein, un homme très intéressant, qui s'intitule The Rattle of Pebbles. Voici le texte:

    Aujourd'hui, l'industrie du livre est en pleine métamorphose, une transformation qui ouvre grande la voie à l'innovation: beaucoup de tentatives, beaucoup d'erreurs et beaucoup d'améliorations. Bien avant la fin d'un autre demi-siècle, l'industrie telle que nous la connaissons depuis les 50 dernières années sera pour ainsi dire méconnaissable.

Je ne pense pas qu'il nous faille songer à 50 ans. Je crois que si nous nous fions aux cinq dernières années nous pouvons anticiper, dans les cinq années à venir, une autre incroyable transformation qui changera profondément mes habitudes tant qu'éditeur et les nôtres entant que lecteurs.

Je veux ensuite vous parler d'un triste événement. Dans l'édition du Globe and Mail d'aujourd'hui, on nous annonce le décès d'un des grands éditeurs de langue anglaise, André Deutsch. Voici un extrait de l'article:

    André Deutsch, qui est mort à l'âge de 82 ans, appartenait à une race d'éditeurs qui a existé et s'est épanouie à l'occasion, avant d'être remplacée par des comptables et des ordinateurs—à une époque où les éditeurs étaient des entrepreneurs de l'imagination, en quête de qualité, fiers de l'influence et de la longévité de leurs découvertes, triomphants s'ils avaient la chance d'être associés à un génie.

    Il a souvent réservé des surprises en périodes de crise.

Ce passage illustre bien la façon, il me semble, dont évolue la littérature canadienne.

Après quelques brèves observations sur Mosaic Press, je vais ensuite aborder certaines des grandes questions.

Nous produisons quelque 20 titres canadiens par année, tous d'auteurs canadiens. Pratiquement tous les auteurs que nous publions dont Canadiens. Nous sommes rarement tentés de déroger à ce principe. C'est un miracle si nous sommes toujours là après 25 ans. Nous avons publié près de 500 livres ce qui constitue un nombre incroyable. Nous avons édité 11 récipiendaires du Prix du gouverneur général, un Prix Nobel—un auteur non canadien mais traduit par un Canadien, je peux le dire fièrement—de nombreux récipiendaires du prix décerné par la Crime Writers of Canada, des lauréats des prix Aurora, d'autres du prix Stephen Leacock, etc. Nous avons contribué, je crois, à l'évolution et à la force de la littérature canadienne.

Nous nous distinguons de beaucoup d'autres petites maisons d'édition canadiennes à plusieurs égards du fait, entre autres choses, que nous effectuons nous-mêmes notre distribution. Nous avons essayé de faire appel à d'autres maisons de distribution, mais ce fut un désastre. Cela nous permet d'établir des liens directs avec tous les libraires et détaillants au Canada de même qu'avec Chapters dont je veux vous parler dans quelques instants.

C'est un miracle si nous ne sommes pas endettés. Nous ne perdons ni ne faisons beaucoup d'argent, mais nous sommes libres de dettes. Nous distribuons beaucoup de nos livres aux États-Unis et, maintenant, au Royaume-Uni. En fait, cette année nos ventes à l'exportation représenteront probablement un peu plus de la moitié de l'ensemble de nos ventes. Au cours du prochain exercice, qui a commencé le 1er avril, la valeur de notre entreprise devrait être d'environ 400 000 $.

Je tiens à dire finalement que nous ne faisons partie d'aucune association à part l'Ontario Publishers Association. Nous ne faisons partie ni de l'Association of Canadian Publishers ni du Literary Press Book. Nous avons déjà été membres de ces deux importantes associations, mais nous avons décidé de rompre nos liens avec elles. Si vous voulez en connaître la raison, je vous le dirai avec plaisir.

Une voix: Pourquoi?

M. Howard Aster: Est-ce que je réponds maintenant ou est-ce que nous...

Le président: Restons-en là pour l'instant. Poursuivez.

M. Howard Aster: D'accord.

J'ai quelques observations générales à faire au sujet de la transformation du marché de détail et du sens que cela revêt pour le petit éditeur canadien que nous sommes. La disparition du petit détaillant indépendant est quelque chose que je regrette, mais cela a eu du bon pour nos affaires. L'arrivée du commerce électronique est encore plus avantageuse pour notre créneau, c'est-à-dire la publication d'auteurs canadiens. Cette transformation a commencé à se manifester aux États-Unis vers 1985. Nous avons alors été quasi hégélien, en ce sens que nous avons dit que c'était inévitable que cela se produise et aux États-Unis et au Canada.

• 1145

Nous sommes alors demandés ce qu'il nous fallait faire en tant que petit éditeur canadien pour survivre dans ce mouvement? Nous avons fait quelque chose de très simple. Nous avons trouvé aux États-Unis un distributeur qui ne vend pas à chaque détaillant. Notre distributeur aux États-Unis vend à 25 points de vente principaux qui rejoignent 80 p. 100 du marché. Nous avons adopté exactement la même stratégie au Canada. Il y a trois ans nous avons réfléchi et en sommes venus à la conclusion qu'il était tout à fait inefficace et non rentable d'essaye de vendre nos livres à chaque marchand indépendant. La raison en est que tout se complique, qu'il s'agisse de l'expédition, du personnel de vente, des collections, etc. Nous avons décidé d'axer nettement nos efforts sur Chapters. Nos ventes par l'entremise de Chapters sont florissantes et il en va de même maintenant avec Indigo. Si un nouveau magasin à grande surface devait voir le jour dans ce pays—et nous espérons qu'il serait canadien—nous agirions exactement de la même façon.

La transformation dans le secteur de la vente de livres au détail ne comporte, je crois, que des avantages pour les petits éditeurs canadiens innovateurs que nous sommes. Pourquoi en est-il ainsi? Parce que nous réduisons nos points de vente. Nous n'avons pas à nous en remettre à des représentants des ventes étant donné que nous vendons directement au siège social. C'est une façon beaucoup plus rentable et beaucoup plus efficace de vendre notre produit, de le commercialiser et de le distribuer. La gestion de la distribution y gagne beaucoup en efficacité. Nous procédons exactement de la même façon aux États-Unis avec notre distributeur, Midpoint Trade Books. Le marché de détail connaît une révolution au moment où nous parlons au Royaume-Uni et nous y allons y procéder de la même manière. Nous avons créé une entreprise qui axera ses efforts sur les gros détaillants.

Les problèmes perpétuels sont les taux d'escompte, les retours et ce qu'on appelle les monopoles. Nous avons notre propre entrepôt. Nous fixons le prix de nos livres. Nous sommes heureux d'offrir aux détaillants deux points supplémentaires dans la liste des remises, s'ils le veulent, s'ils nous achètent davantage de livres. Nous pouvons le faire. Nous le faisons avec nos clients américains. Nous sommes heureux de faire de même au Canada.

Chapters nous renvoie à peu près 11 p. 100 des livres que nous distribuons, ce qui est très bien. Ce pourcentage est beaucoup plus élevé aux États-Unis. Nous essayons, grâce à l'appui suffisant de nos auteurs et des activités de promotion de nos livres, de maintenir les retours au niveau actuel, qui est très acceptable.

En ce qui concerne les monopoles, je dirais tout simplement que je préférerais de loin vendre des livres à un grand détaillant canadien comme Chapters plutôt qu'à Ingram ou Baker & Taylor. Je crois que, tant et aussi longtemps que nous pourrons empêcher les grandes sociétés américaines de venir au Canada, les auteurs canadiens n'ont rien à craindre. S'il fallait qu'Ingram ou Borders viennent s'installer au Canada, nos auteurs n'auraient pas la tâche facile.

J'aimerais faire rapidement quelques observations au sujet du phénomène Chapters et de ce que nous en pensons. Nous n'avons jamais vendu par le passé autant de livres d'auteurs canadiens et c'est simplement grâce à Chapters. Nous obtenons plus d'espace sur les tablettes, une plus grande diffusion et de meilleurs chiffres de vente et de commercialisation. Nous n'avons rien à redire au sujet du paiement. Chapters nous envoie deux chèques par mois. Nous réglons nos factures à temps. Sans Chapters, tout cela serait impossible.

Les magasins spécialisés survivront, il me semble. Les petites librairies indépendantes résisteront tout comme n'importe quel autre petit commerçant indépendant, tant qu'ils seront performants et se cantonneront dans un domaine spécialisé. Si Mosaic veut survivre, elle doit, d'après moi, continuer ce qu'elle a entrepris il y a trois ans, c'est-à-dire axer tous ses efforts sur les grandes entreprises et essayer d'établir des relations d'affaires avec Chapters, ce que nous avons fait.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Aster.

• 1150

Nous allons commencer à interroger M. Aster. Si par hasard vos questions ont un lien avec les autres témoins, vous pouvez également les interroger.

Nous allons commencer par Mark.

M. Inky Mark: Merci, monsieur le président.

J'ai une question que j'ai déjà posée à d'autres témoins qui ont comparu à d'autres occasions. En tant qu'éditeur indépendant—c'est-à-dire qui n'est pas associé à d'autres entreprises—croyez-vous que le débat porte sur la transformation dans l'industrie du livre ou sur le fait que Chapters essaie de s'emparer de l'industrie?

M. Howard Aster: Je ne crois pas que Chapters s'empare de l'industrie de l'édition. Nous leur vendons notre produit. Ils vendent nos livres. Ils vendent des livres publiés par des auteurs canadiens.

Je pense que c'est de la peur qu'il est question dans ce débat. On a peur de la transformation incroyable que subit l'industrie, pas seulement le marché de détail, mais aussi le lectorat, la façon d'écrire et tout ce qui s'en suit.

Stephen Kings vient tout juste de publier un livre qui s'est vendu en ligne, en grandes quantités, en une seule journée. Voilà où se situe vraiment le problème. Voilà ou se situe vraiment le débat. C'est ce que je veux vous faire comprendre aujourd'hui, c'est-à-dire qu'il se produit une incroyable transformation.

Cela dit, les lecteurs au Canada privilégient, selon moi, les auteurs canadiens. Les éditeurs canadiens n'ont jamais connu une si belle époque.

Le président: Monsieur de Savoye.

[Français]

M. Pierre de Savoye: Monsieur Aster, c'est vrai qu'il y a des transformations qui se produisent. Il ne s'agit pas ici de les craindre, mais de les comprendre. Par ailleurs, ce que vous me dites m'inquiète à plusieurs égards. Premièrement, vous semblez mettre tous vos oeufs dans le même panier. Lorsque j'étais en affaires, j'avais toujours peur de n'avoir qu'un seul gros client, parce que le jour où il m'abandonnerait, je serais forcé d'abandonner moi aussi.

Ma deuxième crainte, c'est qu'à partir du moment où vous vous concentrez pour fournir un gros client, vous négligez les petits clients. Vous comprendrez qu'on a un souci tout particulier d'assurer la distribution du livre non seulement chez les gros distributeurs, mais aussi chez les plus petits distributeurs qui se trouvent sur l'ensemble du territoire. Et si tout le monde se met à faire comme vous—parce que vous affirmez que c'est la bonne approche pour être rentable—, eh bien, vous serez probablement rentable tant et aussi longtemps que celui qui distribue vos livres le sera. Mais en même temps, l'accessibilité des livres dans les régions plus petites ou plus éloignées aura été ruinée. J'aimerais vous entendre là-dessus.

M. Howard Aster: Merci, monsieur. Me permettez-vous de vous répondre en anglais? C'est plus facile pour moi.

M. Pierre de Savoye: Faites comme vous le voulez.

[Traduction]

M. Howard Aster: Permettez-moi d'essayer d'être très concret et de vous donner les exemples de livres écrits par des Canadiens que nous publions. Permettez-moi de vous donner des exemples des livres canadiens les plus invendables—à savoir la poésie. Laissez-moi aller plus loin et vous donner des exemples du pire—à savoir la première oeuvre de poètes canadiens. Nous les publions, mais laissez-moi vous parler de la façon dont nous nous y prenons pour rejoindre les lecteurs par l'entremise des détaillants

Nous avons publié le titre d'un jeune poète canadien qui vit par hasard à Oakville. C'est son premier livre. Il s'agit d'un poète très intéressant et très bon qui continuera de briller, j'en suis convaincu. Mais comment vendons-nous ces livres?

Comme, nous vivons à Oakville nous nous adressons au Bookers Bookstore, une petite librairie indépendante qui détient 4 000 titres. Nous avons supplié le libraire d'en prendre cinq exemplaires. Nous l'avons convaincu d'en prendre un exemplaire. Nous lui avons dit que nous ferions de la promotion, que l'auteur viendrait sur place. La librairie n'en a accepté qu'un seul exemplaire.

• 1155

J'ai téléphoné au gérant du Chapters situé dans le centre commercial d'Oakville et je lui ai dit que nous allions organiser une séance de signatures avec le poète. Nous l'avons fait et Chapters a vendu 30 exemplaires de l'ouvrage.

Nous avons produit le premier livre de poésie d'un jeune homme très intéressant du nom de John Wing Jr., qui gagne en fait sa vie comme comédien à Hollywood. J'ai essayé de le rapatrier au Canada. C'est un brillant poète.

Comme il est originaire de Sarnia, j'ai communiqué avec la librairie Book Kepper de cette ville. La propriétaire a organisé une rencontre des élèves de l'école secondaire qui avaient obtenu leur diplôme la même année que John Wing. Elle a organisé un déjeuner et une séance de signatures. Nous avons vendu 100 exemplaires de l'ouvrage.

Il s'agissait donc des deux extrêmes—Chapters et un très bon libraire indépendant et innovateur de Sarnia.

Quel est la morale de cette histoire? Tant les indépendants que les grandes entreprises veulent collaborer avec les éditeurs de notre acabit. Je n'ai peur ni de l'un ni de l'autre, absolument aucune peur, pourvu que nous travaillions directement avec le détaillant et que l'éditeur trouve l'endroit où il est possible de faire la promotion et d'innover.

Je ne peux prédire l'avenir de la librairie Book Keeper à Sarnia. Je ne sais pas ce que l'avenir lui réserve. Je ne peux dire si cette entreprise survivra. Mais ce que je peux vous dire, c'est que nous avons vécu une expérience extraordinaire tant avec la grande qu'avec la petite entreprise.

J'ai une autre observation à faire au sujet de quelque chose qui m'inquiète beaucoup. Je fréquente les bibliothèques publiques. Peu importe l'endroit où je me trouve, je vais à la bibliothèque. Je voyage beaucoup. Je trouve étonnant que le fonds documentaire des bibliothèques publiques canadiennes remonte à 1996-1997. Elles n'achètent plus tous les livres canadiens publiés. Nous avions l'habitude d'avoir des commandes permanentes. Ce n'est plus le cas.

J'aimerais un système qui permettrait de verser de l'argent aux bibliothèques publiques et de leur dire d'acheter cinq exemplaires de chaque livre canadien publié. Il n'y en a pas tant que ça. Il se publie chaque année au Canada moins de 1 000 titres. Le lectorat est à l'heure actuelle privé de livres canadiens parce que les bibliothèques publiques prétendent ne pas avoir les ressources nécessaires pour acheter des livres canadiens.

Je fréquente les bibliothèques de substitution ces jours-ci, c'est-à-dire Chapters. Ma fille a 17 ans. Elle et ses amies se tiennent dans les librairies de substitution, Chapters ou Indigo. Elles vont y flâner parce qu'elles y trouvent des livres contemporains. Elles n'en achètent pas, mais elles vont bouquiner et lire.

Je crois que cet écart est terrible. Les bibliothèques publiques devraient être financées de manière à pouvoir acheter des livres canadiens.

Le président: Monsieur Bonwick.

M. Paul Bonwick (Simcoe—Grey, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je veux tout d'abord faire part de mon point de vue au sujet de deux questions qui ont déjà été soulevées, en raison peut-être, je suppose, de mon passé professionnel. Je veux d'abord m'attarder à la part de marché.

Dans la ville d'où je viens, Collingwood, je m'occupais en tant que conseiller municipal, du porte-feuille de la création d'entreprises. Nous avions sur la rue principale à Collingwood une petite librairie indépendante. Elle y avait pignon sur rue depuis environ trois ans et occupait une place de choix dans le secteur, compte tenu du trafic qui passe par notre région.

Le magasin Loblaws a agrandi ses installations d'environ 11 000 pieds carrés et s'est doté, dans le cadre de cette expansion—et je vais y aller d'une estimation étant donné que je passe souvent de ce côté—d'une librairie dont la superficie oscille entre 1 000 et 1 200 pieds carrés. Le libraire indépendant a dû fermer ses portes en moins d'un an. La cause en est directement attribuable, selon lui, au fait qu'il n'a pas été en mesure de soutenir la concurrence de Loblaws.

Si vous le convoquiez ici et lui demandiez s'il croit que Loblaws fait partie de la concurrence au Canada dans le domaine de la vente de livres, il vous répondrait oui. Il ne s'agit que d'un seul exemple tiré de ma circonscription.

• 1200

L'autre problème dont je veux parler avant de poser mes questions, a trait aux paiements et aux conditions—la critique exprimée au sujet de la négociation des conditions de paiement. Je dirais simplement, une fois de plus en raison de mes antécédents professionnels, qu'à moins que des remises importantes soient consenties pour un paiement rapide, il n'existe vraisemblablement pas de détaillant ou d'entreprise accompli au Canada qui ne prolongerait pas le plus possible le délai de paiement d'un fournisseur, qu'il s'agisse d'un particulier ou d'une entreprise. C'est une pratique courante des entreprises.

Lorsque Larry a fait une observation au sujet de l'achat possible par le gouvernement du Canada d'une partie de Pegasus, je crois qu'il devrait s'inquiéter plus que ses clients du temps que prendra le gouvernement pour payer étant donné que le gouvernement tarde parfois à régler ses factures.

Je nous vois donc traiter de deux questions.

Mme Lill a parlé de la protection de la culture canadienne—les auteurs et la capacité de ces derniers de commercialiser leurs produits de manière à attirer les lecteurs canadiens. Elle est parvenue à faire ressortir cet aspect. Je tiens simplement à signaler qu'il vous faut continuer à explorer toutes les possibilités afin de mieux faire connaître les auteurs canadiens. Qu'il s'agisse de séances de lecture, de signature ou de lancement dans vos magasins ou de directives à vos gérants, je crois qu'il est de toute première importance que vous le fassiez, que vous incluiez en fait cet aspect dans votre énoncé de mission.

Vient ensuite la question de la dominance du marché. Je me demande si vous pouvez faire une comparaison—comme je ne travaille pas au sein de l'industrie, j'essaie de comprendre—entre notre industrie canadienne et peut-être celles des États-Unis ou de pays européens, tant du point de vue de Chapters que de Pegasus, parce que certaines comparaisons ont été établies entre la nôtre et l'industrie américaine—les mesures qu'a prises le gouvernement américain comparativement à ce que nous semblons avoir fait ou ne pas avoir fait.

Le président: Monsieur Stevenson, monsieur Zook.

M. Larry Stevenson: Pour ce qui est du marché de détail, nous avons surtout tendance, au Canada, à effectuer des comparaisons avec d'autres secteurs de la vente au détail. C'est ce que nous avons surtout tendance à faire. Dans presque tous les secteurs de la vente au détail... J'étais président, l'an dernier, du Conseil canadien du commerce de détail, et nous faisions tout simplement... Au Canada, le numéro un dans chaque segment de marché a tendance à détenir une plus grande part du marché que ce n'est le cas aux États-Unis, où le marché est plutôt régional. Si on jette un coup d'oeil au marché de l'alimentation au détail, on constate que le marché américain, dans son ensemble, est extrêmement fragmenté. Par contre, si on jette un coup d'oeil au marché de la Californie, qui est plus grand que celui du Canada, on constate qu'il est très concentré. Il est difficile d'analyser les statistiques qui s'appliquent aux États-Unis.

Au Canada, le problème tient à la façon dont vous définissez le marché. Si vous n'englobez dans celui-ci que les librairies, alors le Bureau de la concurrence dira qu'aux termes de cette définition étroite, nous détenons environ 35 p. 100 du marché, peut-être même 40 p. 100, selon d'autres observateurs.

Si vous englobez dans celle-ci Loblaws, Save-on-Foods et tous ceux à qui nous livrons concurrence, alors notre part se situera entre 20 et 23 p. 100.

À titre de comparaison, d'après les données qui ont été publiées sur les achats au détail, Loblaws détiendrait 31 p. 100 du marché de l'alimentation au détail au Canada. Home Depot détiendrait une part similaire qui oscille autour de 26 ou 27 p. 100. Idem pour Wal-Mart. Donc, les chiffres, dans l'ensemble, sont à peu près les mêmes.

Quand on me pose une question au sujet de la façon dont il faut définir la notion d'entreprise, je dis toujours que si on appliquait à cette notion un définition étroite, alors Toys-R-Us exercerait un monopole sur le marché des jouets. Si on disait, par exemple, vous ne vendez pas plus de x nombre de jouets, et donc vous n'êtes pas un marchand de jouets, alors Wal-Mart, bien qu'il soit le plus gros détaillant de jouets au Canada, ne serait pas perçu comme un concurrent.

Si vous entrez—en vue de vous préparer pour nos discussions—dans un Toys-R-Us, vous allez constater qu'ils ont 24 000 SKU. Wal-Mart, lui, en a 6 000, sauf qu'il est un plus gros détaillant.

M. Paul Bonwick: Je vais aller droit au but.

D'abord, Toys-R-Us n'est pas une composante importante de la culture canadienne. Le secteur de la vente du livre l'est. Donc, la comparaison est plutôt boiteuse.

Je veux avoir une idée des tendances générales. Est-ce que la tendance aux États-Unis et en Europe est aux librairies plus grandes, qui offrent une plus grande gamme de services, qu'il s'agisse de Chapters ou de ABC Bookstore? Par ailleurs, est-ce que les gros détaillants spécialisés dans le livre transigent directement avec les éditeurs...

M. Larry Stevenson: Je vais d'abord répondre à la première partie de la question, et ensuite donner la parole à Pegasus.

Oui, la part du marché des mégalibrairies aux États-Unis a augmenté. La tendance est moins évidente en Europe. Toutefois, au cours des dix dernières années, le secteur qui a enregistré la plus forte croissance sur le marché américain est celui des mégalibrairies, dominé essentiellement par deux compagnies, soit Borders et Barnes & Noble, et des détaillants non traditionnels, dirigés par les clubs-entrepôts. C'est là que la croissance a été la plus forte.

• 1205

Il y a également eu des fusions aux États-Unis. Toutefois, il faut considérer chaque région séparément, parce qu'une compagnie comme Books-A-Million détient une très, très grande part du marché dans le sud-est des États-Unis, sauf qu'elle n'est pas prise en compte dans les statistiques nationales, étant donné la taille du marché.

M. Denis Zook: Pour ce qui est de la vente en gros, ce secteur a toujours joué un rôle plus important en Europe et aux États-Unis qu'au Canada, et il continue de croître. Aux États-Unis, entre 30 et 35 p. 100 des livres qu'achète un détaillant ou un libraire sont commandés par l'entremise d'un grossiste, et non pas directement auprès de l'éditeur. La situation est à peu près la même en Europe. Et dans les deux cas, le chiffre d'affaires des grossistes continue de croître. Certains ont fusionné, ce qui a eu pour effet d'accroître la présence des Ingram, et des Bakers and Taylors. Toutefois, il y a un grand nombre de grossistes régionaux aux États-Unis qui continuent de vendre des livres à des librairies indépendantes et à des grandes chaînes. J'en ai moi-même dirigé une aux États-Unis.

J'avais accès à un marché beaucoup plus grand. Pour ce qui est du débat entourant la part de marché que détient Chapters, en tant que grossiste, j'agirais en fonction du marché que je dessers. Mon objectif serait d'essayer de vendre des livres à tous les segments du marché du livre. Je voudrais avoir comme client tous ceux qui achètent des livres. Ils seraient tous, pour moi, des clients éventuels.

Le président: Monsieur Limoges.

M. Rick Limoges (Windsor—St. Clair, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je tiens à m'excuser de mon retard. Je devais malheureusement participer aux travaux d'un autre comité, qui avait entrepris l'examen article par article d'un nouveau projet de loi, et cela passe en premier. Voilà pourquoi j'ai manqué le début de votre exposé. Mes questions vont peut-être vous paraître redondantes, mais je vais quand même les poser.

Certains témoins ont exprimé des craintes au sujet de la viabilité financière de Chapters-Pegasus. Ils ont laissé entendre que vous vous serviez de leur argent pour financer vos opérations en ralentissant de façon inacceptable le versement des créances, et en traitant en fait leur produit comme des marchandises en consignation. J'aimerais avoir votre opinion là-dessus. De façon plus précise, ils soutiennent que vous dominez le marché. Ils citent des chiffres qui sont beaucoup plus élevés que les vôtres, mais évidemment, ils n'utilisent pas les mêmes définitions puisqu'ils ne tiennent pas compte des manuels scolaires et autre chose du genre.

Quelle est votre opinion là-dessus?

M. Larry Stevenson: Nous ne tenons pas compte, nous non plus, des manuels scolaires. Leur argumentation ne tient donc pas. Ils ont cité des chiffres sans preuve à l'appui. Or, ces chiffres sont stupéfiants, et j'espère que vous allez leur demander de vous fournir des éléments de preuve.

M. Rick Limoges: Vous pouvez peut-être...

M. Larry Stevenson: J'aimerais bien détenir une telle part du marché. Cela voudrait dire que nos méthodes de commercialisation sont efficaces.

Vous soulevez deux points. D'abord, la question de savoir si nous utilisons nos fournisseurs pour financer nos activités. En fait, c'est plutôt l'inverse qui se produit. Comme je l'ai mentionné dans mon exposé, la période durant laquelle nous finançons notre inventaire varie entre 75 et 90 jours. Donc, si vous tenez compte de la fréquence à laquelle nous renouvelons les stocks, c'est exactement l'inverse qui se produit. Le gagnant ici, c'est le consommateur.

Il peut se rendre, en fait, dans ces magasins qui renouvellent leur stock moins de deux fois par année... et comme on ne les paie pas dans les six mois, par définition... Si on les payait dans les six mois, personne n'arriverait à financer ses opérations. Si on les payait dans un délai d'un an, ce serait différent. Toutefois, c'est nous qui finançons les opérations.

Franchement, rien n'a changé. La situation était la même il y a cinq ans. Si le comité avait tenu des audiences au moment où la fusion a eu lieu, on vous aurait surtout posé la question suivante, «Pouvez-vous faire en sorte que Chapters paie plus vite?» Aucun détaillant... Convoquez Wal-Mart. Convoquez-le et demandez-lui ce que ses fournisseurs voudraient qu'il fasse. Il vous dira qu'ils veulent qu'il achète davantage et qu'il paie plus vite. Dans notre cas, nous devons acheter davantage, payer plus vite et avoir un taux de retour moins élevé—parce que les livres peuvent être retournés. C'est une plainte qui revient souvent.

Pour ce qui est de notre situation financière, il s'agit là d'un défi de taille non seulement pour Chapters, mais pour tout le monde. Nous sommes une société ouverte. Nous allons perdre beaucoup d'argent si le Canada met sur pied un système de commande en ligne. J'aimerais pouvoir vous dire, «je sais comment on peut faire de l'argent.» Malheureusement, je ne peux pas. Toutefois, nous devons avoir la possibilité de participer à une telle initiative si nous voulons assurer la viabilité de notre entreprise.

Donc, oui, nous perdons beaucoup d'argent. Nous allons perdre près de 35 millions de dollars cette année parce que nous essayons de livrer concurrence à un géant. J'aimerais bien que vous le convoquiez. Pourquoi ne l'empêchez-vous pas de vendre des livres au Canada pour que je puisse augmenter les prix? Malheureusement, le grand gagnant, c'est le consommateur. Or, de deux choses l'une: soit nous mettons sur pied un système de commande en ligne et nous perdons 35 millions de dollars jusqu'à ce que nous puissions atteindre une certaine viabilité, soit nous disparaissons tout simplement.

• 1210

Il est évident que la situation financière de Chapters a déjà été meilleure. Nous avons réalisé des profits année après année. Les gens qui analysent les données saisonnières prennent un trimestre et disent, «Vous avez perdu de l'argent au cours du dernier trimestre.» Ce à quoi je réponds, «Oui, tout le monde dans l'industrie du livre perd de l'argent au cours de trois trimestres sur quatre.» Mais si vous comparez notre rendement à celui des libraires américains, vous allez constater que nous ne gagnons pas autant d'argent qu'eux. Donc, une partie du problème tient à cette viabilité, et l'autre au fait qu'on pourrait sans doute améliorer notre rendement.

Toutefois, il n'y a pas lieu de s'inquiéter de notre situation La question qu'il faut plutôt se poser est la suivante: combien de temps faudra-t-il avant que le marché n'adopte, par exemple, Internet? Combien d'auteurs feront la même chose que Stephen King et diront, «Vous savez, je me fous de vous, des ouvrages de poésie que vous vendez. Je vais vous contourner complètement.» C'est un fait. Je ne peux pas empêcher Stephen King, John Grisham ou un autre auteur de faire cela.

Donc, vous devriez nous féliciter en tant que détaillant et dire, «Que pouvez-vous faire pour survivre dans un monde où des gens comme Stephen King choisissent de ne pas faire affaire avec vous pour vendre leurs livres?»

M. Rick Limoges: J'aimerais plutôt savoir quel type de stratégie vous avez adoptée, en tant que composante de l'industrie culturelle canadienne, pour faire en sorte que nos auteurs et nos créateurs sont protégés et aussi pour leur permettre de distribuer leurs produits sur une vaste échelle au sein de ce marché.

M. Larry Stevenson: C'est une question fort intéressante. Tous nos efforts devraient être axés sur l'auteur canadien. Je pense que notre avantage concurrentiel s'explique par le fait que, quand les gens entrent dans un Chapters, ils disent, «Vous avez beaucoup de titres, sauf que vous avez plus de titres canadiens que n'importe quel autre libraire.» S'ils cliquent sur Chapters.ca et se rendent comptent que nous ne sommes qu'une version canadienne d'Amazon, nous serons perdants.

Si vous jetez un coup d'oeil à notre site Web, vous allez voir que nous offrons des titres canadiens. Nous faisons de la publicité en faveur des titres canadiens sur la première page de notre site. Pourquoi? Ces livres ne se vendent peut-être pas aussi bien que ceux de Stephen King, mais ils font partie de notre identité. Nous avons préféré l'appeler Chapters.ca au lieu de Chapters.com parce que nous voulons que les gens sachent que nous constituions l'alternative canadienne à tout ce qu'on trouve sur le marché.

Le programme Made-in-Canada a été couronné de succès. Je vous ai fourni des données à ce sujet la dernière fois que j'ai comparu devant le comité. Il en va de même pour le programme Write From Canada. Je pense que notre contribution au programme First Novel Award est très importante. Nous ne vendons pas beaucoup d'ouvrages, sauf si l'auteur est Anne-Marie MacDonald ou Anne Michaels. En général, ceux qui écrivent leur premier roman connaissent un peu plus de succès que ceux qui écrivent leur premier ouvrage de poésie. C'est important, car ils représentent la nouvelle génération de Margaret Atwoods. Nous devons, de concert avec le comité, trouver des moyens d'encourager certaines de ces initiatives.

Il faut faire en sorte que les libraires offrent tous les titres canadiens. En tant que détaillant, nous perdrons des clients si nous ne nous attachons pas à appuyer les auteurs canadiens—et c'est ce que nous faisons. Le fait que plus de 90 p. 100 des 18 000 événements que nous organisons mettent en valeur des Canadiens... nous essayons de mettre l'accent là-dessus. La plupart des poètes qui se présentent dans notre magasin d'Oakville n'arrivent pas directement de New York.

On pourrait verser des fonds à la société d'encouragement aux auteurs pour qu'un plus grand nombre d'auteurs puissent effectuer des tournées au Canada. Ils visiteraient non seulement nos magasins, mais également les libraires indépendants et pourraient participer à un plus grand nombre de séances de lecture. Il est très difficile, pour un auteur qui veut vendre 30 copies de son ouvrage de poésie, de se rendre jusqu'à Calgary. Il y a donc des mesures que nous pouvons prendre.

Le président: Monsieur Limoges.

M. Rick Limoges: Je tiens tout simplement à dire que de nombreux éditeurs s'inquiètent de la taille de votre entreprise. Ils trouvent la situation très inquiétante. Avez-vous recours, du fait de votre taille, à certaines pratiques ou méthodes, et c'est le moment de passer aux aveux, pour pénaliser les éditeurs qui refusent de transiger avec vous?

M. Larry Stevenson: D'abord, je n'ai pas à passer aux aveux. Il est vrai que nous nous servons de notre taille. Et je vais vous donner un exemple. Nous sommes une entreprise importante, et quand un auteur très célèbre arrive en ville, nous voulons obtenir notre juste part de son temps. Donc, je n'hésiterais pas à communiquer avec l'éditeur si j'apprenais qu'un auteur très célèbre...

M. Rick Limoges: Fixez-vous les modalités, les prix?

M. Larry Stevenson: Les modalités, dans l'ensemble, sont déjà fixées. J'essaie tout simplement d'obtenir la meilleure entente possible. Cela dit, ils détiennent un monopole sur le produit. Je l'ai dit la dernière fois que j'ai comparu devant vous. Notre cas est différent de celui des autres détaillants. Ils vont souvent invoquer comme argument le fait qu'ils peuvent uniquement obtenir les 20 copies que vend Howard de... Howard. Donc, de deux choses l'une: soit je décide de ne pas mettre la main sur ces 20 copies, soit j'accepte de faire affaire avec lui. Les autres secteurs, pour la plupart, n'ont pas à composer avec ce genre de situation.

Il existe donc un certain équilibre, malgré notre taille. Il n'y a pas un seul éditeur avec lequel nous n'avons pas fait affaire.

Nous n'avons écarté personne. Posez la question à Wal-Mart, à Home Depot ou à Loblaws. Nous ne pouvons pas le faire parce que nous avons besoin d'eux. Si vous veniez dans notre magasin et que nous vous disions, «En passant, nous ne faisons pas affaire avec cet éditeur parce que nous ne pouvons pas nous entendre avec lui», vous n'achèteriez pas chez nous. Nous n'avons pas autant de pouvoir que certaines personnes semblent le croire.

• 1215

Le président: Wendy Lill.

Mme Wendy Lill: Merci.

Je voudrais vous poser quelques questions, monsieur Aster. D'abord, je suis heureuse d'apprendre que vous publiez les ouvrages des nouveaux poètes. Vous avez utilisé l'exemple de la librairie familiale d'Oakville. Je ne la connais pas. Vous dites qu'ils n'achèteraient qu'un seul de vos exemplaires. Ce n'est pas ce que nous ont dit les libraires. La situation là-bas semble être différente. La librairie est peut-être différente.

J'aimerais savoir si le pourcentage des redevances que reçoivent les auteurs a changé depuis que vous faites affaire avec Chapters. Vous dites que vous mettez l'accent sur Chapters. Nous avons entendu dire que les escomptes plus importants offerts par les éditeurs ont un impact sur le pourcentage des redevances que reçoivent les auteurs. J'aimerais savoir si c'est vrai.

Je trouve votre attitude plutôt curieuse. Vous semblez avoir beaucoup d'animosité à l'égard des autres éditeurs canadiens. Je me demande pourquoi. Pouvez-vous nous éclairer là-dessus?

M. Howard Aster: Je vais d'abord répondre à la question concernant les redevances. Nous continuons de verser 10 p. 100 du prix courant. C'est la politique que nous avons adopté. Nous fixons le prix de détail, et nous incluons dans celui-ci le prix courant, ce qui nous permet d'avoir une marge suffisante et de continuer de verser 10 p. 100 aux auteurs. Nous avons par ailleurs établi une échelle mobile et si, par malheur, nous arrivons à vendre plus de 2 500 ouvrages, le prix est rajusté à la hausse.

Nous vendons un grand nombre de livres au Doubleday Book Club, à New York. Nous venons de vendre un titre canadien, l'ouvrage de Harry Rasky sur Tennessee Williams, à Doubleday. Ils nous ont donné une avance de 3 000 $ et des redevances de 6 p. 100. Donc, quand vous transigez avec certaines personnes, quand vous vendez des droits, le taux de redevance est négocié entre l'éditeur et celui qui achète les droits. Mais nous offrons toujours, pour notre édition, 10 p. 100 du prix courant.

Je ne peux pas vous dire ce que font les autres éditeurs. J'ai entendu dire qu'il y en a qui essaient de soutirer de l'argent aux auteurs. Nous ne le faisons pas, parce que nous pouvons rajuster le prix courant.

J'aimerais vous dire quelques mots au sujet des coûts d'édition. Les coûts d'impression et de reliure, au Canada, sont étonnamment faibles. En fait, quand je dis à mes collègues et amis au Royaume-Uni et en France ce que nous coûte, à l'unité, le service d'impression et de reliure, ils répondent, «Nous allons faire imprimer nos ouvrages au Canada.» Donc, nous ne soumis à aucune pression. Nous sommes très satisfaits de la façon dont nous opérons.

Permettez-moi maintenant de vous parler de l'industrie de l'édition au Canada. Je ne ressens aucune animosité envers les autres éditeurs parce que je ne passe pas mon temps à assister à des réunions ou à les écouter. Ce n'est pas dans mes habitudes. Est-ce que cela veut dire que nous sommes immunisés contre tout ce qui se dit à notre sujet? Non. Nous faisons de bonnes affaires aux États-Unis, et nous sommes présents à l'échelle internationale. Nous participons aux salons du livre qui ont lieu au Mexique, où nous vendons des droits, et aux États-Unis. Je n'écoute pas les racontars.

On ressent de la crainte, c'est vrai, mais je ne sais pas pourquoi. La situation n'a jamais été aussi encourageante pour les éditeurs canadiens. Je pense que les petits éditeurs sont les fers de lance de l'industrie canadienne de l'édition.

Le président: Monsieur Aster, vous avez pris beaucoup de temps, mais vous n'avez pas dit pourquoi vous ne voulez pas faire partie des associations d'éditeurs.

M. Howard Aster: J'essaie d'éluder la question.

Le président: J'en suis conscient.

M. Howard Aster: Je vais être très franc avec vous. Nous faisions partie de l'Association of Canadian Publishers et du Literary Press Group. Je vais me faire des ennemis. Je ne crois pas que les gouvernements fédéral ou provinciaux devraient investir dans des groupes d'intérêt au sein de l'industrie de l'édition. Point à la ligne. Vous pouvez me citer si vous voulez. J'ai quitté le LPG parce que je n'étais pas d'accord avec l'idée d'investir des fonds publics dans un organisme comme celui-là.

Nous faisions partie de l'Association of Canadian Publishers. Je ne voulais pas utiliser notre argent durement acquis, que nous pouvions verser à des auteurs, pour soutenir un groupe de pression. C'était une décision personnelle, et je ne regrette pas d'avoir quitté l'une ou l'autre de ces associations.

• 1220

Le président: Monsieur Muise, dont se sera le tour bientôt, souhaite poser une question, de même que MM. Shepherd et Bélanger. Le temps presse et je ne veux pas que la réunion prenne fin sans qu'on ait eu l'occasion d'entendre les deux autres témoins.

[Français]

Je vous propose d'entendre nos deux derniers témoins, d'abord Mme Morency, puis M. Zook. Je les invite à nous livrer brièvement les grandes lignes de leur présentation, après quoi nous entamerons la période des questions avec M. Muise, M. Shepherd et M. Bélanger.

[Traduction]

Êtes-vous d'accord, Mark?

M. Mark Muise: Monsieur le président, êtes-vous en train de me dire que j'ai pris trop de temps la dernière fois que j'ai posé des questions?

Le président: Non.

M. Mark Muise: J'ai essayé d'être bref. Malheureusement, il m'est impossible de poser une question en deux mots.

[Français]

Le président: Madame Morency, allez.

Mme Carole Morency (directrice des communications, Groupe Renaud-Bray): Bonjour, monsieur le président, mesdames et messieurs. Il y a quelque chose qui est assez étonnant. La mise en marché du livre et le traitement sont très différents au Québec et au Canada anglais. Notre marché est très petit. J'ai été très étonnée par les chiffres qu'a cités M. Stevenson tout à l'heure. Il nous disait qu'il y avait 40 000 nouveaux titres par année en Amérique du Nord.

Des 32 000 titres de la production française européenne, nous en recevons au Québec environ 26 000, et nous avons en plus 8 000 titres québécois. J'ai donc été très étonnée de constater qu'alors que nous recevons 34 000 nouveautés par année dans un marché aussi petit et aussi concentré, le marché anglophone en reçoit 40 000, sans compter ceux d'Europe, j'imagine. Il va sans dire que nos politiques commerciales reflètent davantage celles de nos homologues européens, alors que celles du Canada anglais reflètent davantage celles qu'on trouve aux États-Unis. Ce sont deux mondes très différents.

Vous vous souvenez sans doute que lors de ma première comparution, je parlais constamment des remises accordées aux libraires et je recommandais qu'on consente des remises moindres aux grandes surfaces telles que Costco et Zellers. Nous obtenons des remises de 40 p. 100 sur la littérature générale et de 30 p. 100 sur les dictionnaires, les livres d'informatique, etc. Alors que ces grandes surfaces bénéficiaient il y a 10 ans de remises variant de 20 à 30 p. 100, ces remises sont aujourd'hui de 30 à 50 p. 100. Si Costco majore le prix coûtant de 10 p. 100 et que nous ne bénéficions que d'une remise de 40 p. 100, nous sommes complètement perdants. Je crois que ces entreprises ne devraient bénéficier que de remises contrôlées maximales afin que nous, les libraires, puissions subsister. Cela est très important.

J'ai eu l'occasion de parler à M. Bélanger tout à l'heure. Ce matin, je me disais que ce sont encore nos deux solitudes qui sont mises en évidence. Les choses sont tellement différentes au Québec et au Canada anglais, et je ne peux pas m'empêcher de penser à cette image.

Au Canada, on devrait peut-être promouvoir la lecture à l'échelle pancanadienne, comme le fait le ministère du Patrimoine canadien lorsqu'il fait la promotion des grands personnages de l'histoire canadienne. On devrait faire la promotion de la lecture et de nos auteurs de cette façon tant au Québec qu'ailleurs au Canada. Au Québec, on adopterait sûrement une approche différente de celle du reste du Canada, où il y a déjà un nationalisme beaucoup plus intense à l'égard des auteurs canadiens que chez nous, au Québec, à l'égard de nos auteurs.

Voilà. J'aurai le plaisir de répondre à vos questions.

Le président: Je voyais M. Bélanger vous surveiller pendant que vous parliez du Canada anglais. Il soulève toujours le fait que...

M. Mauril Bélanger: Je ne soulèverai pas de question de privilège. Je vais attendre mon tour, mais je vais en parler.

Le président: Oui, il va sûrement parler de cet aspect.

Mme Carole Morency: Excusez-moi. Je ne vous ai pas...

M. Mauril Bélanger: Vous allez le savoir tout à l'heure.

Le président: Il va vous expliquer son point de vue. Vous entendrez également M. Limoges et M. Muise, qui côtoient les deux cultures ailleurs au Canada.

• 1225

Mme Carole Morency: Est-ce que je peux ajouter une chose?

Le président: Oui.

Mme Carole Morency: M. Stevenson parlait tout à l'heure de la TPS, qui devrait, à notre avis, être abolie sur la vente de livres, tout comme l'a été la TVQ au Québec, où cela s'est avéré une bonne chose.

[Traduction]

Le président: Monsieur Zook, je vous invite à faire quelques commentaires. Il serait bon qu'on puisse consacrer la dernière demi-heure aux questions.

M. Denis Zook: Merci de m'avoir donné l'occasion de comparaître à nouveau devant le comité. J'ai préparé une déclaration, mais au lieu de la lire, je vais uniquement vous en donner les grandes lignes.

D'abord, j'aimerais dire, pour essayer de répondre à certaines des questions qui ont été soulevées depuis notre dernière comparution, que Pegasus représente en fait une nouvelle source d'approvisionnement pour les libraires indépendants, les autres détaillants, les écoles et librairies, une source d'approvisionnement qui n'existait pas avant notre arrivée. Pegasus n'a pas cherché à évincer qui que soit.

Pour cette raison, la situation est fondamentalement différente de celle aux États-Unis, souvent citée, de Barnes & Nobles et Ingram. Dans ce cas précis, Ingram existait depuis plus de 30 ans, c'était le grossiste de livres le plus important des États-Unis qui possédait 10 centres de distribution dans tout le pays et faisait affaire avec pratiquement tous les libraires indépendants des États-Unis. Pour certains d'entre eux, c'était la seule source d'achat de livres. C'était également une grande source de livres pour Borders Borders.com et Amazon.com.

Par conséquent, l'achat de cette société par Barnes & Noble faisait disparaître du marché une des plus grandes sources d'achat de livres qui existait. Là encore, Pegasus est une nouvelle entreprise qui s'ajoute aux sources existantes, qui n'en fait disparaître aucune.

Mon deuxième point, c'est que Pegasus ne possède aucun droit exclusif de distribution sur quelque produit ou livre qu'il a à l'inventaire. On a dit que des gens devaient faire leurs achats chez Pegasus et ainsi contribuer à Chapters, en quelque sorte.

Sur les quelque 500 000 livres et autres produits média que j'ai en inventaire, il n'y en a pas un seul que vous ne puissiez acheter ailleurs. Vous pouvez les acheter chez l'éditeur, chez d'autres distributeurs ou chez d'autres grossistes. Donc, personne n'est forcé de transiger avec nous, que ce soit des éditeurs ou des détaillants.

Nous ne cessons de répéter publiquement que nous sommes un grossiste et non un distributeur. Nous ne recherchons pas des droits exclusifs de distribution comme un distributeur ou une agence et n'avons pas non plus l'intention de le faire dans l'avenir.

Le troisième point concerne les escomptes et il y a eu beaucoup de confusion à ce sujet, notamment entre escomptes de grossiste et escomptes de détaillant. Ce sont deux choses complètement différentes, dans l'industrie du livre, dans pratiquement toutes les industries qui sont dotées d'un secteur de grossistes, soit la plupart des industries.

Les grossistes reçoivent un meilleur escompte du manufacturier, en l'occurrence l'éditeur, car le grossiste est celui qui agit d'intermédiaire et qui accomplit la majorité du travail de vente et de livraison de produits aux détaillants. Pour cette raison, les grossistes reçoivent un meilleur escompte que les détaillants si ces derniers achetaient directement leurs produits auprès du manufacturier ou de l'éditeur.

Dans l'industrie du livre, prenons l'exemple d'un livre qui se vend 10 $; Pegasus ou tout autre grossiste au Canada, North 49, Book Express ou tous les autres petits grossistes, achèteraient ce livre à 50 p. 100 de rabais. Ce serait l'escompte standard pour les grossistes offert par l'éditeur, ce qui veut dire que je paierais donc ce livre 5 $.

Si je faisais cet achat pour Pegasus... disons que j'en achèterais 1 000 exemplaires. Chez la majorité des éditeurs, un détaillant qui achèterait le même livre obtiendrait un rabais de 45 p. 100 dans la plupart des cas. Si vous voulez, je peux vous donner beaucoup d'exemples de liste des escomptes des éditeurs au Canada, qui indiquent que les taux d'escompte varient entre 40 et 48 p. 100, en fonction du volume des achats. Par conséquent, l'éditeur empocherait 50 cents de plus s'il vendait son livre aux détaillants plutôt qu'à moi.

Quand toutefois il me vend le livre, tout d'abord, il faut comprendre que j'achète ce livre, il n'est pas en consignation, je l'ai acheté. Il fait partie de mon inventaire que je dois financer, j'en assume tous les coûts. J'ai en plus l'entrepôt et tous les frais d'entreposage de cet inventaire.

• 1230

J'ai actuellement 10 employés affectés à la vente et à la commercialisation, ce dont j'ai parlé un peu plus tôt, soit 10 personnes actuellement que je paye... sans compter les commissions remises à notre force de vente. Lorsque je prends une commande, j'effectue tout le travail associé au repérage, à l'emballage, tout le matériel d'emballage, toutes les boîtes, tout le carton ondulé, et je paye aussi le coût de l'expédition n'importe où au Canada. L'éditeur ne supporte aucun de ces coûts que je viens de décrire. Par conséquent, pour ces 50 cents supplémentaires d'escompte que j'obtiens de l'éditeur, j'accomplis tout ce travail et supporte tous ces coûts.

Par conséquent, quand certains témoins comparent mon escompte à celui d'un détaillant et disent que je demande un escompte plus élevé qu'un libraire indépendant, ils ont absolument raison, car je ne suis pas un libraire, je suis un grossiste et j'accomplis tout ce travail.

L'autre point que j'aimerais souligner et dont il n'a pas été question dans les autres discussions à ce sujet, c'est que beaucoup de libraires indépendants, membres de la CBA, qui n'ont qu'un magasin, sont eux-mêmes des grossistes. L'une des personnes qui a fait le plus de bruit à ce sujet, Nicholas Hoare, est un grossiste—il y a bien d'autres exemples. Tout en étant libraires indépendants, ils déclarent à huis clos qu'ils sont grossistes et demandent et reçoivent le même rabais de grossiste que moi-même, Book Express et North 49 reçoivent.

Le Children's Bookstore, librairie célèbre de Toronto, a récemment fermé ses portes, le propriétaire partant à la retraite; ce magasin avait une division de vente en gros, que j'ai achetée. Les factures du Children's Bookstore indiquent que ce magasin recevait un rabais plus important en tant que grossiste que moi- même.

Je veux donc indiquer clairement que cela n'est pas inhabituel. Les escomptes de grossistes sont publiés dans les catalogues des éditeurs et je peux vous en donner autant d'exemples que vous le souhaitez. Je peux également vous donner des exemples du journal de la CBA qui, chaque année, publie les listes d'escomptes.

On me demande de me dépêcher.

Le président: Comme c'est la deuxième fois que vous comparaissez, j'aimerais que l'on ait le temps de poser des questions.

M. Denis Zook: Il y a un point de plus dont j'aimerais parler, celui des redevances.

Autant que je sache, et également compte tenu de mon expérience de plus de 20 ans dans l'industrie du livre, il n'y a pas de différence entre les redevances qui sont versées, que le livre passe par un grossiste ou qu'il soit vendu directement au détaillant. On a dit que les redevances étaient liées aux rabais très importants. Cela s'applique aux détaillants, non aux grossistes. Certains éditeurs ont une clause stipulant que lorsque le livre n'est pas vendu et que par conséquent l'éditeur demande, conjointement avec le détaillant, de diminuer le prix de ce livre, et que l'éditeur absorbe une partie du coût de cette baisse, les redevances vont diminuer, car il aura dépensé plus d'argent que prévu en réduisant le prix dans le but de vendre ce livre au détail. Là encore, il y a une confusion entre le détaillant et le grossiste.

Je pourrais, si vous le voulez, vous donner plusieurs exemples de contrats d'éditeurs au Canada, qui tous renferment une liste standard de redevances semblable à ce dont il a déjà été question.

Ceci étant dit, je suis prêt à répondre aux questions.

Le président: Merci.

Monsieur Muise, c'est à votre tour, et bien sûr, vous pouvez poser vos questions à n'importe quel témoin.

M. Mark Muise: Monsieur Zook, vous avez dit plus tôt que vous avez acheté ces livres, qu'ils vous appartiennent maintenant et que vous payez tous les frais de distribution à partir de ce moment-là. Ces livres peuvent-ils être retournés?

M. Denis Zook: Oui, dans toute l'industrie du livre, il est possible de retourner des livres, que vous soyez ou non un détaillant ou que vous soyez un grossiste. Si j'ai vendu un livre à un détaillant, il a le droit de me le retourner parce que c'est à moi qu'il l'a acheté. Par conséquent, si je vous vendais le livre, vous pourriez me le retourner. J'aurais l'option de le retourner à l'éditeur, si je ne peux pas le vendre à quelqu'un d'autre.

• 1235

M. Mark Muise: Si vous achetiez ce livre et téléphoniez ensuite à celui qui vous l'a vendu, ne pourriez-vous pas lui dire que vous avez le choix de lui retourner ce livre ou de le garder si vous en obtenez un meilleur prix? Cela pourrait-il...

M. Denis Zook: Cela pourrait-il arriver? Oui, et cela arrive au niveau des détaillants également. Un libraire peut demander au représentant d'un éditeur s'il peut profiter de la démarque de l'éditeur pour vendre le livre au magasin plutôt que de le retourner. C'est en fait l'exemple que je viens de donner dans ma réponse sur les redevances.

Cela peut donc arriver. Je peux vous dire que cela n'arrive pas très souvent, car en règle générale, l'éditeur ne tient pas à procéder de la sorte.

M. Mark Muise: De son côté, d'accord. De votre côté, pourriez- vous nous dire si cela arrive souvent?

M. Denis Zook: Cela n'est pas arrivé jusqu'à présent, et je ne l'ai pas demandé.

M. Mark Muise: D'accord.

Monsieur Aster, je ne vais pas vous demander pourquoi, mais vous avez dit plus tôt que les livres que vous retournez représentent près de 11 p. 100. Nous avons entendu M. Stevenson dire que les retours de Chapters correspondaient en général à 32 p. 100 l'année dernière et à 30 p. 100 cette année. Je me demande...

M. Howard Aster: Nous sommes supérieurs à la moyenne; c'est un fait.

M. Mark Muise: J'imagine que je vais vous demander pourquoi.

M. Howard Aster: Je ne peux que spéculer. Nous publions des livres d'auteurs canadiens dans certains genres et les commandes sont renouvelées. Les premières commandes du siège social de Chapters sont raisonnables, et si les livres sont écoulés, les magasins renouvellent leurs commandes. Les livres retournés sont donc assez peu nombreux, je crois.

Ce n'est pas la même chose aux États-Unis, car nous essayons de vendre des livres canadiens sur le marché américain. Les livres retournés aux États-Unis sont plus nombreux qu'au Canada.

M. Mark Muise: Je sais que vous dites que vous êtes indépendant, et je comprends ce que cela veut dire, mais Chapters ou Pegasus sont-ils propriétaires d'actions de Mosaic?

M. Howard Aster: Absolument pas. Nous ne vendons même pas de livres à Pegasus pour l'instant. Nous vendons directement à Chapters et nous traitons directement avec les autres grossistes, les bibliothèques ainsi que les libraires indépendants.

M. Mark Muise: Êtes-vous propriétaire d'actions chez eux?

M. Howard Aster: Absolument pas, nous sommes complètement indépendants.

M. Mark Muise: Ils étaient sûrement...

Le président: Vous avez progressivement cassé votre contrat.

Des voix: Oh, oh!

Le président: Monsieur Shepherd, à qui voulez-vous poser votre question? J'aimerais simplement le savoir.

M. Alex Shepherd: À tout le monde, M. Aster et M. Zook, j'imagine.

Le président: Oh, je vois. Je crois que M. Bélanger veut faire de même avant leur départ. Si vous pouviez simplement partager votre temps de parole, on irait plus vite. Nous allons commencer par vous.

M. Alex Shepherd: Vous avez dit quelque chose d'intéressant: vous ne vendez pas à Pegasus. M. Zook, pourquoi ne pas vous utiliser comme grossiste, compte tenu de la rationalisation de l'industrie de l'édition? Pourquoi n'y a-t-il pas de relation ici?

M. Denis Zook: Je peux répondre de mon point de vue et je laisserai Howard répondre du sien.

Nous serions enchantés d'avoir les produits de Howard chez nous. Nous aimerions avoir pratiquement tous les produits des éditeurs dans notre société. Je crois que pour les éditeurs, il y a quelques... Là encore, c'est peut-être une question de taille, mais, s'ils ne prennent pas trop d'ampleur, ils peuvent mettre sur pied un très bon système de distribution sans dépenser une somme phénoménale d'argent. Au fur et à mesure qu'un éditeur prend de l'importance, car il en fait beaucoup plus, s'occuper lui-même de la distribution devient beaucoup plus difficile et beaucoup plus coûteux. Les éditeurs ont tendance à ne pas très bien s'en sortir dans ce domaine, pour être franc avec vous.

M. Alex Shepherd: Quel est votre escompte pour Chapters?

M. Howard Aster: Nous donnons 48 p. 100 à Chapters. Ils aimeraient 50 p. 100. Ce ne sont pas ces deux points qui nous dérangent.

Ces trois dernières années, je crois que nous avons instauré de très bonnes relations avec les acheteurs de Chapters. Lorsque je me trouvais au siège social de Chapters pour vendre mes nouveautés de printemps, j'ai demandé aux acheteurs s'ils me conseillaient de passer par Pegasus. Ils m'ont répondu de façon très intelligente à mon avis. Ils m'ont demandé si j'étais insatisfait de l'entente actuelle. J'ai répondu que j'en étais ravi: «Je vous donne nos livres, des livres d'auteurs canadiens, et vous les vendez.» Je suis ravi du volume des ventes, qui ne cesse d'augmenter. Pour l'instant, je suis parfaitement satisfait de l'entente telle qu'elle existe.

• 1240

Nous vendons également directement à d'autres grossistes, à des bibliothèques, dans tout le pays. Nous vendons à Nicholas Hoare. Nous vendons directement à ses concurrents et nous leur donnons un escompte de 44 à 48 p. 100.

Si Pegasus nous disait qu'il souhaite 50 p. 100 et qu'il s'engage à augmenter notre volume de 30 p. 100, je serais prêt à négocier.

M. Alex Shepherd: Monsieur Zook, quel est le pourcentage de vos ventes à Chapters?

M. Denis Zook: Comme nous venons juste de commencer, il est très élevé pendant pratiquement toute la saison de Noël. Comme je l'expliquais la dernière fois, beaucoup d'éditeurs n'ont pas signé d'entente avec Pegasus pour la saison d'automne de l'année dernière. Étant donné que je n'achetais pas leurs livres, je ne pouvais pas les vendre à d'autres clients.

Depuis, nous avons ouvert pas mal de comptes-clients pour les bibliothèques. Nous faisons chaque jour des expéditions de livres aux bibliothèques à l'échelle du pays. Nous vendons également aux boutiques cadeaux ainsi qu'à de plus gros magasins de détail. Tous les jours, nous essayons d'obtenir davantage de comptes-clients.

M. Alex Shepherd: Cela représente pratiquement 100 p. 100.

M. Denis Zook: Ce n'est pas 100 p. 100. Le pourcentage augmente chaque mois pour ce qui est des autres comptes-clients.

Le président: À combien s'élève-t-il? Quatre-vingt pour cent?

M. Denis Zook: C'est beaucoup plus que 80 p. 100. Comme je le disais, ce n'est vraiment qu'après la période de Noël que nous avons pu essayer d'obtenir de nouveaux comptes-clients.

M. Alex Shepherd: Quelles sont les conditions applicables à Chapters?

M. Denis Zook: Chapters comme tout le monde obtient... Je crois que je l'ai expliqué la dernière fois. Nous avons des conditions standard que nous avons publiées...

M. Alex Shepherd: À quoi correspond la période de recouvrement des comptes clients? À quoi correspond-elle chez Chapters?

M. Denis Zook: Quel est leur délai de paiement en moyenne? Je ne pourrais pas vous le dire.

Le président: Monsieur Bélanger.

[Français]

M. Mauril Bélanger: Combien de temps m'accordez-vous?

Le président: Certaines personnes doivent nous quitter et j'espère...

M. Mauril Bélanger: Je vais prendre une partie du temps que vous m'avez accordé pour faire un commentaire qui n'a pas trait à la question que nous étudions aujourd'hui afin de me chicaner un petit brin avec Mme Morency, ce que je ferai poliment et gentiment.

Je veux lui faire remarquer que l'expression «Québec—Canada anglais» nie l'existence d'une foule de Canadiens. Je suis un Canadien français de l'Ontario et je représente un comté d'Ontario où 40 p. 100 des commettants sont francophones. Il y a 700 000 francophones en Ontario, ainsi que 1 million de francophones dans les provinces autres que le Québec. Il y a une province qui est officiellement bilingue, et c'est le Nouveau-Brunswick. Il y a deux territoires où le français est une langue officielle. Vous niez l'existence de ces francophones lorsque vous utilisez l'expression «Québec—Canada anglais». Vous niez aussi l'existence des Canadiens anglais du Québec. Alors, je vous invite à utiliser un autre vocabulaire, si vous le voulez bien. Si vous voulez utiliser l'expression «Canada anglais» à tout prix, le pendant de cette expression est le Canada français, et là je me retrouve.

Mme Carole Morency: Monsieur Bélanger, je vous prie d'accepter mes excuses. Je ne voulais pas vous offenser. Je ne faisais pas allusion aux personnes, mais plutôt à une conception différente de la distribution et de l'édition. On parle d'édition anglaise et d'édition française. Je m'excuse parce que je ne voulais pas faire une distinction au niveau des personnes.

M. Mauril Bélanger: Je comprends, mais il faut tenir compte du fait qu'il y a plus de 7 millions de Canadiens français ailleurs au Canada. Il arrive souvent que les Canadiens français qui n'habitent pas le Québec aient beaucoup de difficulté à se procurer des livres dans leur langue, y compris chez Chapters, par exemple. La succursale Chapters ici, au coin de la rue Rideau vend des livres en français, mais les quatre autres succursales n'en vendent pas, malgré le fait qu'il y a un pourcentage plus élevé de francophones qui habitent près de la succursale de l'est de la ville. C'est une question de distribution et de coûts. Je suis parfaitement d'accord avec vous qu'il faut travailler pour améliorer les choses à ce niveau-là et je vais encourager les gens du ministère à le faire. J'abonde dans le même sens que vous lorsque vous dites qu'il faut faire davantage pour encourager la lecture. Là-dessus on se rejoint.

Mme Carole Morency: Je suis vraiment désolée de vous avoir...

M. Mauril Bélanger: Non, c'est terminé.

Mme Carole Morency: J'ai écouté les témoignages qu'ont livrés M. Zook de Pegasus et M. Aster de Mosaic Press. Cet éditeur vend des livres directement aux libraires, tandis que nos libraires ne peuvent pas acheter directement chez l'éditeur et ne peuvent pas négocier de bonnes conditions. Chez nous, ce sont les distributeurs qui ramassent tous les profits, tandis que nous devons nous contenter des remises. Vos questions reflètent exactement le point de vue que je tentais d'exprimer.

M. Mauril Bélanger: Oui, et je pense qu'on a beaucoup à apprendre au sujet de l'industrie du livre au Québec, y compris la façon dont est gérée la distribution.

• 1245

Monsieur le président, je voudrais maintenant revenir au sujet qui nous occupe.

[Traduction]

Je conviens avec certains collègues que nous ne sommes pas là pour déclarer Chapters-Pegasus coupable ou non coupable, si vous voulez, ou faire de même pour toute autre entente commerciale. Ce n'est pas notre travail. Cela s'inscrirait dans le cadre du mandat du Bureau de la concurrence, lequel a exprimé, avec tout le respect que je vous dois, certaines préoccupations depuis la création de Pegasus et la propriété d'actions par Chapters.

J'ose espérer que nous sommes arrivés à inciter le bureau à régler cette question et à ne pas la laisser traîner, comme c'est le cas depuis trop longtemps. De deux choses l'une, cela ne pose pas de problème ou cela en pose. J'ose espérer que nos efforts des deux derniers mois l'auront incité à terminer ce travail, dans la mesure du possible.

J'ai une question à poser à M. Aster. J'aimerais avoir son point de vue sur les retours de livres. Faudrait-il modifier les choses à cet égard? Faudrait-il diminuer les possibilités de retour? Faudrait-il le faire au niveau du détail? Au niveau du grossiste?

Je laisse ces questions en suspens. J'en ai d'autres qui sont peut-être plus pertinentes pour le comité.

Ainsi, pourrait-on me dire pourquoi, dans certaines compétences, les détaillants n'ont pas le droit d'être propriétaires de grossiste? Pour moi, c'est le coeur du problème—les difficultés que cela présente. Je crains que dans certaines compétences, dont certaines ne sont pas très éloignées d'ici, il a été décrété: «Tu ne seras pas»—un détaillant ne sera pas—«propriétaire d'un grossiste.» Je me demande ce que vous avez à dire à ce sujet.

J'en arrive à une autre question qui ne va pas manquer d'élargir le débat. Certains disent, à tort ou à raison, que l'on a peut-être fait erreur en 1995 lorsque l'on a autorisé la fusion qui est à l'origine de la société que nous connaissons sous le nom de Chapters.

Je sais que vous le contestez, monsieur, mais le bureau l'a reconnu, la société dont la création découle de cette fusion occupe une position dominante. En théorie, le bureau aurait dû agir à ce sujet, mais il ne l'a pas fait, sauf qu'il vous observe de près depuis plusieurs années, je crois.

Si l'on convient qu'une erreur a peut-être été commise, il faudrait alors examiner la situation de l'époque pour savoir pourquoi cette fusion a été autorisée. Est-ce parce que Borders frappait à la porte à ce moment-là et que l'on avait l'impression qu'il fallait peut-être un équivalent canadien pour repousser Borders? Faudrait-il réexaminer la question? Devrait-on autoriser des sociétés comme Borders à entrer au Canada aujourd'hui? Je n'en suis pas partisan, mais ce sont des questions qui, à mon avis, sont légitimes.

Faudrait-il essayer de corriger une erreur, au cas où une erreur aurait été commise en 1995, lorsque l'on a autorisé cette fusion? Comment régler la question? Le rôle de Pegasus devrait être limité de manière qu'il tende plus à desservir Chapters, son propriétaire, au lieu de desservir toute l'industrie?

Ce sont les genres de questions que, je crois, nous devons envisager. Elles sont difficiles, et je n'ai pas les réponses, mais pour ce qui est de l'exercice dans lequel notre comité s'est lancé depuis maintenant presque deux ou trois mois, je crois que ce sont certaines des questions essentielles. J'espère que nous aurons l'occasion d'entendre ce que vous avez à dire à ce sujet, peut-être pas aujourd'hui si nous manquons de temps, mais au cours des quatre prochaines semaines avant que nous ne concoctions le rapport.

[Français]

Merci, monsieur le président.

[Traduction]

Le président: Qui veut répondre?

M. Larry Stevenson: Je vais répondre à quelques questions seulement, et je vais vous prier de m'excuser, car je dois filer.

La première vise les autres compétences qui n'ont pas autorisé un détaillant à devenir propriétaire d'un grossiste. C'est inexact. Elles n'ont pas autorisé une société à acheter une autre société, alors que cela l'est autorisé en vertu de la politique relative aux fusions et acquisitions. Il s'agissait en fait d'un retrait et par conséquent d'un retrait d'une option qui aurait désavantagé beaucoup de concurrents, car on les privait d'une option.

Je ne connais pas de loi aux États-Unis qui empêche un détaillant d'être propriétaire d'un grossiste. Tout ce que je sais au sujet du détaillant numéro un qui voulait acheter un grossiste particulier—qui, soit dit en passant, occupait la première place et représentait, dans de nombreux cas, 100 p. 100 des ventes—y compris celles de son plus gros concurrent sur Internet, Amazon—il a été décidé que ce serait en fait anticoncurrentiel, car cela supprimait une option.

Il n'a pas été dit qu'ils ne pouvaient pas le faire—s'ils avaient créé quelque chose, s'ils avaient investi leurs propres fonds comme on l'a fait en offrant un choix de plus. Je ne suis pas au courant. Cela n'est absolument pas clair pour moi.

Deuxièmement, je peux dire que lorsque le Bureau de la concurrence a examiné la fusion, il ne l'a pas approuvée, car il croyait que Borders ou Barnes & Noble allaient arriver sur le marché. En fait, ces sociétés ont déclaré, après avoir été contactées, qu'elles n'avaient nullement l'intention de venir. La fusion ne s'est pas faite sous ces auspices.

• 1250

Le fait est que la concurrence était déjà très vive, notamment celle des sociétés non traditionnelles. Ils ont examiné Wal-Mart, Loblaws, et Costco qui arrivaient au Canada en offrant des rabais importants. La concurrence était déjà très vive.

Si je comprends bien, le problème à l'époque, ce n'était pas qu'une autre société allait venir sur le marché et qu'il fallait donc accepter la fusion, mais c'était le fait qu'une société perdait 8 millions de dollars—SmithBooks—par conséquent, il s'agissait de savoir si la concurrence pouvait être viable lorsqu'une seule société était plus ou moins en train de faire faillite ou s'il fallait accepter cette fusion pour au moins pouvoir investir de l'argent et ouvrir ces librairies?

Fallait-il l'autoriser? Je crois que la question essentielle à ce sujet est la suivante: l'industrie du livre est-elle plus forte aujourd'hui qu'il y a cinq ans? C'est la question que je pose au comité. Dites-le-moi. Vend-t-on plus de livres? Vend-t-on plus de livres canadiens? Les auteurs reçoivent-ils plus de redevances? Les consommateurs obtiennent-ils de meilleurs prix? Les consommateurs ont-ils accès à plus de livres? Sous quel aspect voulez-vous l'évaluer? La réponse est oui, pour chacune de ces questions.

Le président: Mme Lill a demandé de poser une brève question, monsieur Stevenson. J'espère que l'auto de James Bond vous attend à la porte si vous devez prendre l'avion à 13 h 15.

Madame Lill, à qui s'adresse votre question?

Mme Wendy Lill: J'ai un commentaire à faire et une question à poser. J'essaie de comprendre ce que nous avons appris ici aujourd'hui. Il y a un éditeur—et je suis désolée qu'il soit déjà parti—qui en fait... Toute notre étude vise à établir les liens qui existent entre Pegasus et Chapters et leur incidence sur l'industrie de l'édition. Il y a un éditeur ici qui ne fait pas affaire avec Pegasus et qui s'adresse directement à Chapters; il n'est donc pas vraiment associé à ce qui semble inquiéter tant de gens.

Pourquoi n'y a-t-il pas plus d'éditeurs qui viennent nous dire ce que vous dites? Comment se fait-il que le seul éditeur qui est présent traite directement avec vous et non pas avec le grossiste qui cause tellement de soucis?

M. Larry Stevenson: Madame Lill, d'abord, je pense que cela montre qu'il peut, comme tout éditeur en affaires, transiger directement avec nous ou en passant par Pegasus. Il a choisi de fonctionner de cette façon et, de toute évidence, il trouve que les choses vont bien ainsi. Nous allons acheter des livres comme on nous le demande, en passant par Pegasus ou directement, comme il a dit.

La raison pour laquelle je pense qu'il n'y a pas plus d'éditeurs... Je vais vous donner un exemple concret. J'ai reçu une lettre fabuleuse—dont l'arrivée a coïncidé justement avec cette séance de comité—de la part d'un éditeur qui nous remerciait d'avoir accordé notre appui à tel auteur canadien et d'avoir contribué à le faire connaître. J'ai trouvé que je recevais cette lettre au bon moment. Je voulais l'envoyer au président. Mais, comme la lettre m'était adressée, j'ai téléphoné à l'éditeur pour lui demander s'il avait des objections à ce que j'envoie sa lettre au comité du patrimoine qui, comme je lui ai expliqué, étudie ce que Chapters fait pour la culture canadienne. Il a refusé catégoriquement que j'envoie la lettre. Il ne voulait pas qu'elle soit rendue publique de peur que toutes les librairies indépendantes ne le boycottent.

C'est une question de liberté d'expression qui... Oui, les gens ne sont pas prêts à dire des choses qui pourraient nuire aux uns ou aux autres, même si j'admets que ça va dans les deux sens. La plupart des éditeurs ne critiqueront pas ici Larry Stevenson parce que nous sommes un de leurs gros clients. Par contre, ils ne vont pas non plus critiquer Costco, ni les librairies indépendantes. Je ne leur fais pas de reproches. Je pense que c'est sage de leur part. Ils essaient de ménager la chèvre et le chou.

Comme beaucoup d'éditeurs sont très heureux de ce que nous avons fait, j'encourage... Je suis d'accord avec vous pour dire que ce n'est pas un tribunal, mais je pense aussi que les insinuations malveillantes sont très dangereuses, parce qu'elles nous empêchent d'entendre les faits. J'ai entendu une auteur dire ici que nous n'avions pas acheté son livre. J'ai fourni au comité... Nous en avons acheté 311. Nous avons acheté son livre. Je ne sais pas où elle a obtenu ces chiffres. Si vous me donnez un exemple concret, je vais vous donner des faits. Je dis simplement qu'il est très dangereux de dire que tel auteur a dit telle chose ou que tel éditeur a dit telle chose, sans nommer personne.

Nous accueillons volontiers leurs plaintes et je suis d'accord. La plupart d'entre elles sont des plaintes de nature commerciale. Ils aimeraient que nous les payions plus rapidement, que nous achetions davantage et que nous retournions moins de livres. Je comprends.

M. Denis Zook: Il y a un autre élément que j'aimerais ajouter. À d'autres réunions, nous avons parlé des 100 principaux éditeurs, avec lesquels je faisais surtout affaire au début de Pegasus, mais plus de 200 éditeurs m'appellent, sans que je les appelle, pour me demander s'ils peuvent faire affaire avec Pegasus. J'ai également reçu des lettres de plus de 200 éditeurs qui me demandent la même chose. Les éditeurs ne refusent pas de faire affaire avec nous parce que nous recevons des demandes tous les jours. En fait, nous n'arrivions plus à répondre à la demande et nous avons dû embaucher d'autres employés pour suffire à la tâche.

[Français]

Le président: Monsieur de Savoye, brièvement.

M. Pierre de Savoye: D'abord, je voudrais dire à Mme Morency que M. Bélanger aurait dû vous remercier d'avoir rappelé, quant au sujet qui nous intéresse, le fait qu'il y a aussi de l'édition française, ce qui lui a permis de mentionner à son tour qu'il y avait également un public francophone dans le reste du Canada. Il faut quand même se l'avouer. Au cours de toutes ces rencontres que nous avons eues, n'eût été de votre présence, on ne se serait pas arrêtés au secteur français de l'édition. Enfin, personne n'en avait parlé ou ne l'avait vraiment évoqué.

• 1255

Cela dit, je voudrais corriger mon collègue Bélanger, qui a dit qu'il y avait 7 millions de Canadiens français au Canada. Je dois dire qu'il y a un certain nombre de francophones canadiens qui ne sont pas des Canadiens français. Nombre d'entre eux sont au Québec. Ils sont d'autres origines. Qu'il y ait des francophones canadiens, oui, mais ils ne sont pas tous des Canadiens français. Il y a des Québécois francophones qui ne sont pas canadiens-français. J'en suis.

Cela dit, Mme Morency a posé une question qui m'apparaît importante. Il y a un marché francophone à l'extérieur du Québec, dont vous n'avez pas parlé.

Mme Carole Morency: Tout à fait.

M. Pierre de Savoye: Vous n'y avez pas touché. Ou peut-être y avez-vous touché. Chapters y touche mais d'une façon qui pourrait être bonifiée. Cependant, je ne pense pas que Chapters soit présent au Québec.

Comment entrevoyez-vous votre présence dans le reste du Canada et celle de Chapters au Québec au cours des années à venir?

Mme Carole Morency: Je pense avoir saisi la question. Dans le reste du Canada, on dessert les bibliothèques; on ouvre des comptes au Nouveau-Brunswick et tout ça. Donc, oui on se préoccupe des Franco-Canadiens, des gens qui s'expriment en français à l'extérieur du Québec.

Nous avons aussi un site Internet pour ce qu'on essaie de promouvoir à l'extérieur. Nous avons des équipes sur la route qui vont rencontrer les libraires. On s'en occupe beaucoup et on va jusqu'aux États-Unis. Cette diffusion est importante.

Cela dit, c'est bien sûr que Chapters, à Montréal, a une surface d'au moins 5 000 pieds carrés consacrée aux livres en français sur la rue Saint-Denis. Nous essayons de vendre un peu plus de livres en anglais dans nos succursales, d'une part parce que la remise est beaucoup plus intéressante, et d'autre part parce qu'il y a un grand nombre de lecteurs francophones qui veulent se procurer des livres en anglais, par exemple en informatique, parce qu'au moment où ces livres sont traduits, ils sont déjà désuets.

Pouvez-vous préciser un peu votre question? J'ai l'impression d'être mal orientée.

M. Pierre de Savoye: Est-ce que vous entendez faire concurrence à Chapters dans le reste du Canada? Et croyez-vous que Chapters va venir vous faire concurrence au Québec?

Mme Carole Morency: Nous ne pouvons pas faire concurrence à Chapters dans le reste du Canada. Il y a des francophones un peu partout, comme on l'a dit plus tôt, mais ils ne sont pas assez nombreux pour justifier l'ouverture d'un magasin ou qu'on se spécialise. Il faudrait à ce moment-là augmenter notre inventaire de livres en anglais, ce qui ne nous intéresse pas, du moins pas pour le moment. C'est sûr que Chapters vient jouer dans nos platebandes à Montréal. C'est un concurrent important.

M. Pierre de Savoye: Merci.

[Traduction]

Le président: Mauril Bélanger.

M. Mauril Bélanger: Pegasus a-t-il jamais acheté, ou essayé d'acheter, tout un tirage canadien, ou quel que soit le terme utilisé?

M. Denis Zook: Non, ni l'un ni l'autre. En fait, plus souvent, les éditeurs vont déterminer, avec nous, ce qu'ils sont prêts à nous vendre. Nous ne pourrions tout simplement pas acheter tout un tirage.

Encore une fois, je peux vous fournir par écrit des exemples qui montrent qu'au cours du dernier mois les éditeurs ne nous vendrons même pas ce que nous voulons. Les éditeurs se protègent en veillant à ne pas fournir à Pegasus plus de livres que ce que nous pouvons vendre selon eux, parce qu'ils veulent vendre des livres ailleurs.

Je peux aussi vous montrer que, si un éditeur trouve que nous avons encore assez d'exemplaires d'un livre qui s'épuise et doit être réimprimé, nous lui en retournons des exemplaires pour d'autres clients avec la promesse qu'il va nous les rendre au moment du nouveau tirage.

M. Mauril Bélanger: Merci.

Le président: Monsieur Bonwick, vous voulez poser une brève question.

M. Paul Bonwick: En fait, ce n'est pas une question qui s'adresse aux témoins. Mauril a soulevé un problème très pertinent que nous n'avons pas complètement examiné, je pense.

• 1300

Plusieurs témoins sont venus nous dire que des groupes ou des propriétaires possédaient à la fois des services d'édition et de vente de détail. Pour eux, cela présente sûrement des problèmes sérieux.

Je veux simplement signaler qu'il est important que le comité se rende compte que ce phénomène n'est pas unique à l'industrie du livre. On le retrouve dans le commerce du pétrole et du gaz. En effet, beaucoup de producteurs de pétrole sont propriétaires de nombreuses stations-service. Beaucoup de fabricants de meubles sont propriétaires de magasins de vente au détail. Le réseau des concessionnaires d'automobiles General Motors appartient à General Motors. La liste de ceux qui sont propriétaires, en partie ou de façon majoritaire, d'activités de production et de vente au détail est longue. Je pense qu'il est important de s'en rendre compte.

M. Denis Zook: Dans l'industrie du livre, le plus important éditeur, Bertelsmann, est à la fois éditeur, grossiste et propriétaire de clubs de livre, de librairies et d'une partie de barnesandnoble.com. En fait, tous les jours, des librairies partout dans le monde...

M. Mauril Bélanger: Pas au Canada.

M. Denis Zook: Pas au Canada, effectivement.

M. Mauril Bélanger: Bien. Si on doit en discuter...

Le président: Je pense que c'est très important de le signaler, mais on a également précisé que, dans le cas des autres industries, il n'est pas question de la culture canadienne.

M. Mauril Bélanger: C'est vrai mais, si on doit en discuter, il reste que, depuis cinq ans, il y a eu plus de librairies indépendantes qui ont fermé qu'il y en a eu qui ont ouvert, tandis que Chapters prend de l'expansion.

Il ne faut pas l'oublier. Je suis bien prêt à en discuter, mais nous n'en sommes pas encore là.

M. Denis Zook: Pour ce qui est de la fermeture des magasins, comme je l'ai dit, quand j'ai établi le plan d'affaires de Pegasus, j'ai examiné tout le marché des vendeurs de livres. Je me poserais des questions sur la fermeture massive des librairies indépendantes. J'aimerais avoir des preuves. D'après mes recherches sur la situation entre 1990 et 1994 et entre 1994 et 2000, il y a plus de magasins de Chapters qui ont fermé leurs portes que de libraires indépendantes. En fait, moins de 20 p. 100 des librairies ont fermé leurs portes depuis six ans.

Le président: Je pense que nous allons nous arrêter là.

[Français]

Je voudrais vous remercier très sincèrement, madame Morency, d'être venue ici nous rencontrer encore une fois.

[Traduction]

Merci beaucoup monsieur Zook.

J'aimerais remercier MM. Aster et Stevenson même s'ils sont partis.

Cette discussion a été très instructive pour nous.

[Français]

Merci beaucoup d'être venus.

Je vais maintenant donner aux membres du comité l'occasion de continuer leur étude de ce sujet très important pour nous tous.

[Traduction]

M. Denis Zook: J'aimerais ajouter une dernière chose, si vous me le permettez.

Le président: Allez-y, monsieur Zook.

M. Denis Zook: On semble penser que Pegasus, parce que c'est une grosse entreprise, ne s'intéresse pas à l'industrie du livre, aux livres ou aux auteurs. J'aimerais vraiment corriger cette impression. J'ai plus de 20 ans d'expérience dans l'industrie du livre. J'ai choisi cette industrie. J'ai travaillé toute ma vie dans ce domaine. Je collectionne des livres.

Le vice-président des achats de Pegasus a 35 ans d'expérience dans l'industrie du livre, dont 25 au Canada. Le vice-président des ventes et du marketing a lui aussi 25 ans d'expérience dans l'industrie du livre. Il a travaillé dans le domaine de l'édition et de la vente au détail.

Nous ne sommes pas une entreprise qui ne s'intéresse pas aux livres et qui ne veut pas faire la promotion des livres et des livres canadiens, au Canada et à l'étranger. C'est une erreur de croire que nous ne nous voulons pas faire la promotion de la culture au Canada.

Le président: Monsieur Zook, personne n'a dit cela, ou du moins pas à ma connaissance. Si vous faites un boniment et si Mme Lill veut poser une question, nous n'en finirons jamais. Je vais lui donner la parole une dernière fois, sinon nous allons nous éterniser, et je pense que nous avons autre chose à faire.

Mme Wendy Lill: Dans le cadre de notre étude, nous devons vous dire que nous avons entendu énormément de points de vue qui sont différents de ce que vous nous dites actuellement. De petits éditeurs du pays ont été nombreux à nous dire que leurs ventes avaient en fait chuté de moitié. Beaucoup de librairies ont fait faillite à cause de la présence de Chapters.

Il faut donc préciser bien clairement que c'est ce qui se passe. Nous restons toujours très inquiets.

Le président: Bien.

Merci beaucoup monsieur Zook.

[Français]

Merci beaucoup, madame Morency.

• 1305

Je vais demander aux députés de rester encore trois minutes afin qu'on finisse de discuter de certaines affaires.

[Traduction]

Comme les membres le savent, nous devons planifier ce que nous allons faire à la reprise des travaux pour que le greffier sache ce sur quoi nous allons travailler à notre retour en mai jusqu'à la fin de la session, à la mi-juin.

Monsieur Zook, pourquoi ne prenez-vous pas rendez-vous pour faire votre boniment plus tard?

Des voix: Oh! Oh!

Le président: Vous êtes très persuasif, mais nous avons des choses à régler maintenant. Merci.

[Français]

Voici ce que nous devons faire maintenant.

[Traduction]

Nous devons bien planifier nos travaux parce qu'il ne nous restera pas tellement de semaines de travail entre le moment où nous reprendrons nos activités et la fin de la session, en juin. Il y a une semaine de congé en mai, et il y a quatre ou cinq études que nous nous sommes engagés à entreprendre d'ici juin.

[Français]

En tout premier lieu, nous devons étudier le projet de loi C-224. Une résolution unanime de la Chambre nous demande d'entendre des intervenants sur ce projet de loi, qui a trait à un musée sur les génocides. On n'a aucun autre choix que de les recevoir, parce que la Chambre nous a ordonné de le faire avant le 15 juin. C'est donc inéluctable.

Il y a ensuite le projet de loi C-27 sur les parcs.

[Traduction]

Il sera soumis à notre étude très bientôt.

M. Inky Mark: Monsieur le président, Mauril pourrait-il nous indiquer à quelle date le projet de loi C-27 doit être renvoyé à la Chambre?

M. Mauril Bélanger: Non. C'est la Chambre qui va décider et je ne veux pas présumer de ce qu'elle va décider. Le gouvernement espère que la Chambre va examiner le projet de loi C-27 rapidement à l'étape de la deuxième lecture, sûrement plus tôt que plus tard. On en discute, mais rien n'est encore décidé.

Le président: Nous espérons quand même que le projet de loi nous sera renvoyé en mai. Avec la bonne volonté de tout le monde, nous devrions en être saisis en mai. Nous pensons bien l'étudier bientôt.

Nous avons aussi accepté d'organiser une séance d'une journée avec les musées à l'occasion de la Journée internationale des musées.

Enfin, nous devons finir notre étude sur l'édition du livre et aussi entendre la Commission de la capitale nationale.

[Français]

M. Pierre de Savoye: Monsieur le président, j'avais aussi demandé, et il me semble que tout le monde l'avait accepté, qu'on se penche sur la question des télévisions communautaires et sur la réglementation du CRTC. Je ne vois pas cela du tout à l'ordre du jour. Vous m'en voyez à la fois surpris, désolé et insistant.

Le président: Oui, vous avez bien raison. On ne vous a certainement pas oublié, monsieur de Savoye. Nous avons essayé de mettre à l'ordre du jour les points que nous pensions avoir le temps de traiter d'ici la fin de la session. Si, avec la bonne volonté de tous... Mais prenons d'abord les choses qu'on ne pouvons pas du tout mettre de côté.

Il y a la matière du projet de loi C-224 et le projet de loi C-27. Nous devons terminer l'étude de l'édition du livre, dont nous ne pouvons nous délester. Alors, on va commencer par cela et ensuite on verra.

M. Mauril Bélanger: Je ne sais si mes collègues accepteraient la suggestion suivante. Je vais la faire. Les comparutions de témoins tirent à leur fin. Si je comprends bien, il n'y a qu'un autre témoin qui viendra nous voir. Est-ce bien ainsi?

Le président: Oui. Ce que nous avons prévu, et vous allez le voir, c'est six heures de travail pour terminer l'étude et rédiger le rapport.

• 1310

M. Mauril Bélanger: J'aimerais suggérer qu'on invite les gens du ministère du Patrimoine canadien, ceux qui sont responsables des programmes, pour essayer d'enrober ce qu'on a entendu et ce qu'on a fait, et pas seulement ce qu'auront fait nos recherchistes. Est-ce une possibilité qu'on pourrait envisager?

Vous vous souviendrez que nous avons reçu une personne qui disait qu'elle ne pouvait faire de commentaire sur les orientations qu'on pouvait se donner parce qu'elle n'avait pas une vue d'ensemble. Ne serait-il pas approprié de prendre une heure pour entendre les gens du ministère nous faire leurs commentaires et peut-être même leurs suggestions, ou nous communiquer leurs réflexions? Cela pourrait être incorporé ou non à notre rapport, selon que nous le jugerons à propos. Vaudrait-il la peine de consacrer une heure à cela?

[Traduction]

M. Inky Mark: Monsieur le président, je suis tout à fait d'accord. Je crois que, au point où nous en sommes, nous devons terminer notre étude sur l'industrie de l'édition du livre et faire les choses comme il faut, au lieu de nous éparpiller et de créer de la confusion. J'accorderais donc la priorité à notre étude actuelle sur l'édition du livre.

Mais également, la Chambre est saisie des prévisions budgétaires qui ont fait l'objet d'un vote et la plupart des comités de notre endroit ont rencontré des ministres à ce sujet. Je proposerais donc que nous demandions à la ministre de comparaître. C'est une demande officielle de ma part.

Le président: Il y a deux demandes à ce que sache pour...

M. Mauril Bélanger: [Note de la rédaction: Inaudible]... la fin de mai, n'est-ce pas?

Une voix: Oui.

Le président: Bien. Vous êtes donc d'accord avec M. Bélanger.

Y a-t-il quelqu'un qui n'est pas d'accord avec M. Bélanger? Nous allons commencer par cela.

[Français]

Monsieur de Savoye.

M. Pierre de Savoye: Monsieur le président, je reviens à mes télévisions communautaires. Depuis un moment, on repousse le banc de neige vers l'avant. Je veux bien reconnaître que nous devons faire le travail dont on nous charge, mais je ne veux pas qu'en même temps, on dise qu'on n'a pas le temps de faire un autre travail qui me semble extrêmement important. En somme, je suis d'accord pour qu'on rencontre les gens du ministère. Toutefois, avant de boucler le calendrier, j'aimerais qu'on y inscrive mes télévisions communautaires, avec des dates, avant qu'on se sépare cet après-midi.

Le président: D'accord. Tout à fait d'accord.

Alors,

[Traduction]

au sujet de l'étude sur l'édition du livre, nous avons deux possibilités: soit que nous ajoutons une heure, soit que nous nous contentons de ces six heures, l'un ou l'autre. Quand même, si nous consacrons six heures—et, d'après ce que nous avons pu vérifier, c'est tout le temps dont nous pouvons disposer d'ici la fin juin...

[Français]

Il y a deux options.

[Traduction]

Soit que nous tenons trois réunions, qui seraient entre autres réservées au témoignage des représentants du ministère et à l'examen de l'ébauche du rapport, soit que nous distribuons le rapport pour que les membres nous fassent part de leurs réactions. Nous consacrerions alors moins de temps à son examen, parce que nous n'allons pas l'étudier page par page. Les membres l'étudieraient par eux-mêmes et nous présenteraient leurs commentaires par la suite. Nous pourrions gagner un peu de temps de cette façon. Quelle option préférez-vous?

M. Paul Bonwick: D'abord, je trouve que nous n'avons vraiment pas le temps d'entreprendre une nouvelle étude, à moins que nous nous réunissions le samedi. Ce ne sera pas possible.

Monsieur le président, j'aimerais vous proposer de demander aux whips s'il ne serait pas possible de tenir une ou deux réunions de quatre heures le mercredi, comprenant le lunch, pour essayer de terminer l'étude du projet de loi C-224 le plus rapidement possible.

Le président: C'est la deuxième option, en fait. Pour le projet de loi C-224, il y a deux possibilités. Nous pourrions tenir trois réunions de deux heures, sur trois jours distincts, ou nous pourrions tenir une seule réunion, lundi après-midi et lundi soir, repas compris, pour finir l'étude.

M. Paul Bonwick: Oui, c'est ma proposition.

Une voix: Bravo, bravo!

Le président: Est-ce ce que veut le comité? L'autre jour, j'ai remplacé un membre du comité des transports qui tenait une importante réunion sur ADM. La réunion a commencé à 9 heures pour s'arrêter à 14 heures; on a servi le lunch aux membres, et on a recommencé à siéger à 15 h 30 pour finir autour de 18 heures. Donc, si vous acceptez de faire cela, nous pourrions étudier le projet de loi C-224 en une journée. Y a-t-il consensus? Bien.

• 1315

Au sujet du projet de loi C-27, nous allons nous réunir pendant 12 heures pour rencontrer des témoins, ce qui veut dire six réunions de 2 heures, ou nous pouvons organiser deux jours d'audiences, mais cela veut dire siéger pendant deux jours, si les membres sont d'accord. Il me semble que c'est ce que nous devrions faire. Je sais que c'est un peu pénible pour nous, mais au moins nous pourrions en finir avec cette étude.

Au sujet de l'édition du livre, nous pourrions aussi essayer de condenser notre étude. Pour les trois sujets que nous devons étudier—le projet de loi C-224, le projet de loi C-27 et l'édition du livre—êtes-vous d'accord pour siéger pendant un ou deux jours aussi longtemps que possible, avec un service de repas, et s'il nous reste du temps en juin, nous pourrions examiner la distribution par câble et la CCN? Si nous ne pouvons pas promettre à M. de Savoye et à d'autres de discuter des sujets qu'ils ont proposés à des dates précises, acceptez-vous que ces sujets soient les premiers que nous examinions à notre retour?

Je ne peux m'engager à les inclure dans notre emploi du temps. Nous avons besoin d'une certaine flexibilité. Si, par exemple, pour l'étude sur les parcs, nous avons une liste de témoins plus longue que nous pensions, je ne peux tout simplement pas promettre aujourd'hui que nous allons pouvoir étudier la CCN ou la distribution par câble.

Monsieur Bélanger.

[Français]

M. Mauril Bélanger: Pourrait-on s'entendre sur la façon de fonctionner suivante? On consacrerait une journée au projet de loi C-224, si tout fonctionne; on entendrait des témoins sur le projet de loi C-27 lorsqu'on l'aurait, ce qui n'est pas encore confirmé; on ferait ce que vous avez suggéré pour ce qui est du livre; et en plus, en priorité, on parlerait des prévisions de dépenses, comme vous le voulez, si j'ai bien compris. Ensuite, on pourrait traiter de la question du CRTC et des réseaux communautaires. La CCN viendrait en troisième.

Le président: D'accord.

M. Mauril Bélanger: Cela rejoint vos souhaits.

[Traduction]

M. Inky Mark: Monsieur le président, je demanderai à Dennis de ne pas prévoir de séance sur les sports le mercredi si vous voulez qu'on se réunisse le mercredi, parce que je fais partie de ce comité et lui aussi.

Le président: Oui, très bien. D'accord.

[Français]

Monsieur de Savoye.

M. Pierre de Savoye: Je veux mentionner à Mauril Bélanger qu'il serait sans doute utile de communiquer au greffier, d'ores et déjà, les noms des témoins qu'on aimerait rencontrer sur la question des télévisions communautaires, de sorte que, le moment venu, il n'y ait rien qui nous empêche de procéder.

Le président: De combien de temps et de témoins pensez-vous avoir besoin? Cela dépendra un peu de la flexibilité dont nous disposons.

M. Pierre de Savoye: J'imagine qu'il faudra au moins inviter Rogers et Vidéotron, qui vont vouloir venir. Le CRTC va vouloir venir. La Fédération des télévisions communautaires du Québec va certainement vouloir être là.

Du côté—j'allais dire anglophone, Mauril—du reste du Canada, je ne sais trop qui pourrait venir. C'est pourquoi je voudrais que tu y penses de ton côté. Par la suite, on verra exactement devant quelle charge de travail on se trouve.

Le président: Est-ce qu'on peut se mettre d'accord dès aujourd'hui?

[Traduction]

Au sujet du projet de loi C-224, le greffier peut-il prévoir une journée de séance? Nous devrions peut-être entendre à la fin le témoignage du Musée des civilisations qui sera mis à contribution. Ses représentants devraient venir nous rencontrer après que nous aurons entendu et assimiler tout le reste. Puis, pour le projet de loi C-27, nous essaierons dans toute la mesure du possible de voir avec les membres si nous pouvons nous réunir toute une journée. Puis, nous ferons la même chose pour l'étude sur l'édition du livre.

Êtes-vous d'accord pour que nous vous remettions le rapport afin que vous puissiez l'étudier par vous-mêmes et que nous ne perdions pas de temps à l'examiner paragraphe par paragraphe ensemble?

[Français]

M. Mauril Bélanger: Monsieur le président, là-dessus, vous aviez dit à la dernière réunion, je pense, que les recherchistes avaient déjà un document qui faisait le décompte des recommandations, des suggestions et des commentaires entendus. On pourrait peut-être les avoir tout de suite pour qu'on puisse commencer à digérer tout cela.

Le président: Tout à fait.

M. Mauril Bélanger: Si nous-mêmes avons des suggestions et des recommandations au moment de la rencontre avec les gens du ministère, nous pourrons dès notre retour, dès la première semaine, arriver assez rapidement à des conclusions.

• 1320

Le président: J'ai aussi une suggestion que les recherchistes m'ont faite. Pour comprendre un peu la nouvelle installation de Pegasus ainsi que sa grandeur, dont on n'a aucune idée, on pourrait faire ce que le greffier me proposait, soit qu'un des recherchistes aille voir sur place ce qu'il en est et nous communique le fruit de ses observations. Il me semble que cela vaudrait la peine d'être fait et il semble que le budget le permettrait.

M. Mauril Bélanger: Moi aussi, j'aimerais aller voir ça.

Le président: Si vous êtes d'accord, on va le faire.

M. Mauril Bélanger: Si c'était pendant les deux semaines où la Chambre ne siège pas, certains d'entre nous pourraient peut-être y aller également.

Le président: Oui, certainement.

Alors, si on se met d'accord,

[Traduction]

nous allons nous limiter à l'étude du projet de loi C-224, du projet de loi C-27 et de l'industrie de l'édition du livre. Je pense que la séance sur la Journée internationale des musées serait utile et nous allons prévoir du temps à cette fin. S'il faut siéger plus longtemps, nous le ferons si vous le voulez.

Pourquoi ne laissons-nous pas le greffier établir le plan des travaux à partir de ce que nous venons de dire, et fixer des dates pour que vous sachiez exactement où nous en sommes? Vous pourrez ainsi partir dans vos circonscriptions et savoir ce que nous allons faire à partir du mois de mai.

M. Pierre de Savoye: Aurons-nous ces dates la semaine prochaine? Où pourrons-nous les obtenir?

[Français]

Le président: On les aura durant la pause, le plus tôt possible.

M. Pierre de Savoye: Durant la semaine sainte.

[Traduction]

Le président: Wendy.

Mme Wendy Lill: J'ai des questions à poser au sujet du rapport sur l'industrie de l'édition du livre. D'abord, je veux m'assurer que nous pensons tous avoir entendu tous les témoignages nécessaires, et je pense plus particulièrement aux attachés de recherches. Quand nous avons préparé le rapport sur la culture, nous nous sommes rendu compte de temps à autre qu'il nous manquait des faits; nous ne les avions pas pour diverses raisons. Je ne veux pas que la même chose se produise dans ce cas-ci. Nous n'avions pas tous les faits voulus et notre rapport n'a pas eu autant de poids qu'il aurait pu en avoir.

Un représentant de Chapters nous a dit que les ventes de livres canadiens augmentent, que les choses vont bien. Ce n'est vraiment pas ce que d'autres pensent de la situation.

Je veux simplement m'assurer que nous connaissons les faits, que nous avons les chiffres sur les ventes de livres, sur les titres canadiens, pour que nous puissions produire un document qui réponde aux besoins des gens qui sont venus nous dire à huis clos que leurs ventes avaient baissé de moitié. Qui devons-nous recevoir? Quels autres travaux de recherche devons-nous faire pour nous assurer que nous avons de la matière?

M. Rick Limoges: Monsieur le président, sur le même sujet, Mme Lill a parlé à quelques reprises des ventes coupées de moitié. Je crois que les témoins ont dit que leurs ventes à Chapters ou à Chapters-Pegasus avaient baissé de moitié d'une année à l'autre. Dans le cas de différences semblables, nous devons vérifier si elles ne sont pas explicables. Par exemple, en période d'expansion, une entreprise peut très bien acheter plus qu'elle ne le ferait en période normale, parce qu'elle veut approvisionner tout un magasin ou plusieurs magasins. Les ventes vont être exceptionnelles. L'année suivante, vous n'avez plus qu'à remplacer ce qui a été vendu et à maintenir les stocks. Cela explique facilement pourquoi les ventes auprès d'un client peuvent baisser, surtout compte tenu de ce qui s'est passé durant cette période.

Je pense que nous devons nous rappeler qu'il y a des différences qui sont explicables.

Le président: J'aimerais rappeler aux membres que nous avons commencé notre étude par une séance à huis clos et que beaucoup de gens sont venus nous fournir des informations. Actuellement, notre séance est publique, et...

Je voulais dire que nous avons deux choix. Nous allons finir, disons, au milieu de juin. Nous pouvons demander aux attachés de recherche de préparer un document que nous allons étudier. Il y a beaucoup d'informations et de statistiques. J'ai toute une série de recommandations formulées par différentes personnes. Nous avons encore entendu Chapters et Pegasus aujourd'hui. Si, quand vous étudierez le document, vous n'êtes pas satisfaits, et préférez en reporter l'étude en septembre, nous pouvons demander les recommandations maintenant pour en formuler de meilleures plus tard.

• 1325

Nous avons des choix à faire. Ce que nous gagnons d'un côté, nous le perdons de l'autre. L'avantage de finir en juin, c'est que nous avons suscité beaucoup d'intérêt. Il semble que le Bureau de la concurrence s'intéresse encore à la question, et ce serait peut-être le moment pour nous de produire quelque chose d'ici la fin de la session. Par contre, si la façon dont le rapport est rédigé ne vous satisfait pas, et que vous préférez attendre, nous avons des choix à faire.

Je pense donc que nous devrions commencer par cela. Évidemment, ce n'est pas un rapport qui va traiter de tout. C'est impossible. Mais il y aura peut-être assez de matière pour formuler des recommandations générales auxquelles le gouvernement pourra donner suite d'une façon ou d'une autre.

[Français]

Monsieur de Savoye.

M. Pierre de Savoye: Il serait sans doute utile, lorsqu'on aura eu la première ébauche du rapport, de prendre ensemble une demi-heure à la fin d'une prochaine séance pour réagir collectivement...

Le président: Tout à fait.

M. Pierre de Savoye: ...de manière à ce que la deuxième ébauche du rapport se trouve déjà bonifiée. Peut-être aussi qu'en échangeant entre nous, nous serons en mesure de nous assurer de la convergence ou de la divergence de nos vues. Le plus tôt serait le mieux, bien sûr, afin que les recherchistes aient rapidement nos points de vue ou nos positions.

Le président: C'est une observation très constructive. J'aimerais demander au recherchiste

[Traduction]

quand pensez-vous pouvoir produire la première ébauche, le premier projet de rapport?

M. Joseph Jackson (attaché de recherche du comité): En tenant compte de la traduction, je pense que nous pouvons le faire pour la mi-mai.

[Français]

M. Mauril Bélanger: Monsieur le président, on s'était mis d'accord pour entendre une sorte de présentation des gens du ministère.

Le président: Oui.

M. Mauril Bélanger: J'espère que nous les entendrons.

Le président: Oui.

M. Mauril Bélanger: Deuxièmement, je suis d'accord sur ce que mon collègue suggère. J'irais même un peu plus loin; je dirais que les recherchistes pourraient s'enquérir par téléphone auprès des membres du comité de leurs suggestions et commentaires afin de les incorporer au rapport immédiatement. Cela pourrait encore accélérer la rédaction.

[Traduction]

Le président: D'accord.

Monsieur Mark.

M. Inky Mark: Monsieur le président, le greffier pourrait peut-être demander aux témoins d'aujourd'hui de nous fournir les bases de données qu'ils ont proposé de nous remettre à l'appui de leurs déclarations. Je pense que ce serait utile pour nos attachés de recherche.

Le président: Oui, nous donnerons suite à cela.

M. Mauril Bélanger: J'aurais aimé que notre rapport soit publié sous la forme d'un livre.

M. Pierre de Savoye: Qui en ferait la distribution?

M. Mauril Bélanger: Nous allons chercher le meilleur prix.

Le président: Pouvons-nous en rester là, Wendy, à savoir que nous allons produire l'ébauche du rapport, puis l'examiner pour décider ce que nous allons faire après en avoir discuté ensemble?

Merci beaucoup. La séance est levée.