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FAIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FOREIGN AFFAIRS AND INTERNATIONAL TRADE

COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 16 novembre 1999

• 0940

[Traduction]

Le président (M. Bill Graham (Toronto-Centre—Rosedale, Lib.)): Chers collègues, mesdames et messieurs les témoins, nous allons commencer.

Je suis heureux de voir autant de personnes intéressées par la SEE. Je suis convaincu que votre apport nous sera très utile. Toutefois, je ferai appel à votre sens de la coopération. Si vous le pouvez, essayez de vous en tenir à 10 minutes chacun car avec huit intervenants, vous comprenez que cela nous fera déjà 80 minutes, et nous souhaiterions aussi pouvoir vous poser des questions. Donc si vous pouviez même être plus brefs encore, nous vous en serions reconnaissants, sauf pour M. Allmand évidemment, lui qui était un spécialiste de l'obstruction systématique au Parlement. Oh, il dit qu'il ne dépassera pas cinq minutes, c'est un véritable défi. Dans ce cas, il va falloir que tout le monde s'en tienne à cinq minutes. Merci beaucoup.

Nous allons commencer par le Groupe de travail sur la SEE. Qui va commencer, M. Freeman ou Mme Foster?

Madame Foster, gardez vos béquilles à côté de vous pour le cas où vous devriez prendre la fuite précipitamment.

Des voix: Oh! oh!

Mme Pamela Foster (porte-parole, Groupe de travail sur la SEE): Merci, monsieur Graham.

Je suis coordonnatrice de la Halifax Initiative. Avant de commencer, j'aimerais vous dire dans quel ordre les intervenants vont prendre la parole ce matin car ce n'est pas tout à fait le même que sur votre ordre du jour, si vous êtes d'accord.

Le président: Certainement. Si vous voulez changer l'ordre, je n'ai aucune objection.

Mme Pamela Foster: Bien. Après moi, vous entendrez Kimy Pernia Domico, qui sera présentée par Bill Fairbairn, du Comité inter-Églises pour des droits humains en Amérique latine. Vous entendrez ensuite Jacques Bertrand, de Développement et Paix, puis Aaron Freeman, du Groupe de travail de la SEE, M. Allmand, du Centre international pour les droits de la personne et le développement démocratique, Linda Nowlan, de la West Coast Environmental Law Association, Gail Whiteman, de l'Institut Nord-Sud et Joan Kuyek, de Mines Alerte.

Le président: Je voudrais plus particulièrement saluer M. Pernia, qui est passé à mon bureau à Toronto, et le remercier. Je précise aux autres membres du comité et aux autres témoins qu'il vient de Colombie.

Monsieur Fairbairn, pourriez-vous lui expliquer que nous n'avons que 10 minutes par personne ce matin, et que comme notre temps est limité, nous allons devoir respecter rigoureusement notre horaire?

Allez-y, madame Foster.

Mme Pamela Foster: Comme je vous l'ai dit, je suis coordonnatrice de la Halifax Initiative. Il s'agit d'une coalition de 14 ONG canadiennes profondément préoccupées par les politiques et pratiques des institutions financières internationales.

Depuis 1995, nous nous efforçons collectivement de pousser la Banque mondiale et le Fonds monétaire international à réformer leur façon d'agir de façon à protéger les droits de la personne et l'environnement, à réduire la pauvreté et à créer une situation plus équitable. Ces dernières années, nous nous sommes rendu compte que les quelques petits progrès qui avaient pu être faits en ce sens à la Banque mondiale et au FMI étaient menacés et même sapés à la base par les organismes de crédit à l'exportation, y compris la SEE.

Le montant de la dette que les pays en développement ont auprès de l'ensemble de ces organismes de crédit est plus élevé que le montant combiné de leurs dettes auprès de la Banque mondiale et du FMI. Les organismes de crédit à l'exportation sont aussi les plus importantes sources de financement public de projets d'infrastructure à grande échelle dans le monde en développement, ce financement étant supérieur au total des investissements infrastructurels annuels consentis par l'ensemble des banques multilatérales de développement et des organismes d'aide latérale. Au cours des 10 dernières années, qui ont été caractérisées par un recul des montants d'aide consentis, les prêts et les garanties pour les crédits à l'exportation ont quadruplé.

Alors que la Banque mondiale se dotait de directives sociales et environnementales, d'une procédure d'appel et d'obligations contractuelles en matière de protection des droits fondamentaux des travailleurs, et évoluait dans le sens de la transparence et de la divulgation des informations, les organismes de crédit à l'exportation, à l'exception des organismes américains, cultivent le secret et fonctionnent à toutes fins pratiques en l'absence de toute politique sociale et environnementale. Et contrairement à la Banque mondiale, ces organismes de crédit à l'exportation n'ont accepté aucune responsabilité pour la crise que traversaient les pays fortement endettés et les pays les plus pauvres.

Plusieurs ONG qui comparaissent aujourd'hui appartiennent à un groupe de travail sur la SEE composé de 12 membres au sein de la Halifax Initiative. Aujourd'hui, nous soutiendrons entre autres que, pour respecter les engagements de la politique étrangère du Canada en matière de développement durable et de travail international, de droits de la personne et de conventions sur l'environnement, il faut exiger que la SEE veille à ce que les entreprises nuisent le moins possible à l'environnement, respectent les droits de la personne et tiennent compte des besoins sociaux des collectivités en matière par exemple de santé, de bien-être général ou de droit de se réétablir volontairement ailleurs.

Il faudrait mettre en place des mécanismes de contrôle extérieurs pour vérifier le respect de ces engagements. Il faudrait encourager la SEE à rendre des comptes au public en mettant en place des politiques exigeant une divulgation satisfaisante des informations. Et lorsque la SEE intervient auprès des pays les plus pauvres, il faudrait qu'elle prenne tout particulièrement soin de ne pas aggraver encore leur dette, qui les plonge dans des crises économiques et sociales.

• 0945

Dans les domaines qui nous préoccupent, le rapport Gowlings propose des recommandations que nous appuyons et d'autres que nous souhaiterions voir formulées de façon plus énergique. Le rapport ne mentionne pas la contribution de la SEE à l'endettement de certains pays ni la nécessité de veiller aux besoins sociaux des collectivités dans lesquelles elle intervient. Je vais me concentrer sur ces deux points.

Quand le Mexique s'est enfoncé dans l'endettement, les organismes de crédit à l'exportation, comme l'a souligné le FMI, ont investi dans un terrain où les banques commerciales n'osaient plus s'aventurer.

Ces organismes de crédit à l'exportation détiennent maintenant 56 p. 100 de la dette des pays du tiers monde. Il est généralement admis désormais que la dette extérieure des pays fortement endettés et des pays les plus pauvres est un obstacle majeur à leur développement social et économique.

Contrairement aux prêts des banques commerciales, les prêts de la SEE peuvent aboutir à la conversion de dettes privées en dettes publiques. Les garanties offertes par les gouvernements bénéficiaires deviennent en fait des subventions pour les entreprises canadiennes qui veulent exporter leurs marchandises, et incitent ces entreprises à se lancer dans des activités commerciales et des exportations qui sinon ne seraient pas économiquement justifiables.

Dans une certaine mesure, l'accroissement des prêts répond plus au souhait de développer des activités commerciales axées sur l'exportation plutôt qu'à un besoin de financement de l'emprunteur. On encourage ainsi la pratique de prêts excessifs en toute immunité, puisqu'il n'y a ni transparence, ni responsabilité auprès des collectivités locales.

Par le biais de la SEE, les populations les plus pauvres du monde doivent environ 2,5 milliards de dollars au Canada. Il s'agit des 55 pays les plus pauvres du monde. Sur ce montant, 76 millions de dollars sont des arriérés. La SEE peut le vérifier. C'est une dette que ces pays sont incapables de payer et que la SEE n'est absolument pas en mesure de recouvrer.

La SEE a effacé les dettes commerciales qu'elle ne pouvait pas recouvrer, mais la situation est différente dans le cas des prêts consentis à un État souverain. Dans ce cas, la SEE compte sur le gouvernement du Canada pour couvrir ces pertes.

Nous recommandons que désormais, en cas de prêts à des États souverains, la SEE ne parte pas du principe que de toutes façons elle se fera rembourser par le gouvernement du Canada. Dans ces conditions, la SEE devra tenir compte de l'endettement très élevé des pays les plus pauvres lorsqu'elle procédera à l'évaluation des risques de ces projets.

Nous recommandons aussi que la SEE tienne compte de la situation socio-économique des collectivités en précisant les problèmes sociaux et en adoptant des politiques adéquates. La définition utilisée dans la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale est la suivante, et je cite:

    a) les changements susceptibles d'être apportés au projet du fait de l'environnement; sont comprises parmi les changements à l'environnement les répercussions de ceux-ci soit en matière sanitaire et socio-économique, soit sur l'usage courant de terres et de ressources à des fins traditionnelles par les Autochtones, soit une construction, un emplacement ou une chose d'importance en matière historique, archéologique, paléontologique ou architecturale.

La définition des besoins sociaux énoncée dans cette loi, ainsi que les politiques de la Banque mondiale en ce qui concerne les peuples autochtones, la préservation de la propriété culturelle et le réétablissement imposé devraient constituer des lignes directrices de base pour la SEE.

Il faudrait modifier la Loi sur l'expansion des exportations afin d'exiger que les considérations sociales fassent partie du financement et des garanties offerts par la SEE.

En conclusion, la SEE a soutenu que c'était au pays hôte de protéger sa population et son environnement. Toutefois, ce n'est pas au pays hôte de veiller à ce que le mandat public confié à la SEE soit conforme aux autres politiques, intérêts et valeurs publics du Canada. C'est à vous, en tant que gouvernement du Canada, qu'il appartient de vous en assurer.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, madame Foster.

Je crois que nous devions passer à M. Fairbairn ensuite.

M. Bill Fairbairn (coordonnateur du Programme pour l'Amérique du Sud, Comité inter-Églises des droits humains en Amérique latine): Merci et bonjour. Le Comité inter-Églises des droits humains en Amérique latine est une coalition oecuménique pour la justice sociale regroupant plus de 20 Églises et ordres religieux au Canada.

Le comité inter-Églises a demandé à comparaître devant votre comité aujourd'hui parce que nous pensons qu'il faut modifier la Loi sur l'expansion des exportations qui régit la Société pour l'expansion des exportations. Nous sommes parvenus à cette conclusion après avoir constaté avec consternation l'expérience des Embera Katio du nord de la Colombie, qui ont été victimes ainsi que leur source de survie, des dégâts irréparables entraînés par un projet hydroélectrique qui avait bénéficié de l'aide de la SEE.

L'an dernier, notre comité s'est joint aux Embera et à 24 organisations éminemment respectées de Colombie et d'une douzaine d'autres pays pour soumettre à la cour constitutionnelle de la Colombie une injonction demandant l'arrêt du mégaprojet de Urr« pour éviter la poursuite des violations des droits de la personne dans cette région.

Une injonction n'est qu'une mesure palliative qui n'empêche pas la répétition de situations analogues dans le futur. C'est pourquoi nous avons amené ici Kimy Pernia Domico, un des dirigeants Embera qui vit dans l'une des localités directement touchées par le barrage.

Notre comité et les Églises membres approuvent pleinement le témoignage et les recommandations que va vous présenter Kimy Pernia.

• 0950

M. Kimy Pernia Domico (chef autochtone, Nation Embera Katio; Comité inter-Églises des droits humains en Amérique latine (Interprétation)): Buenos dias. Je m'appelle Kimy Pernia Domico, et je suis membre de la Nation Embera Katio. Mon peuple vit dans la zone amont de la rivière Sin«, dans la province de Cordoba au nord de la Colombie. Jusqu'à tout récemment, notre rivière et nos marais étaient caractérisés par une biodiversité incroyablement riche, et accueillaient une foule d'espèces de poissons et d'animaux. Notre région abrite les derniers vestiges de la forêt tropicale de la côte antillaise de la Colombie.

Les protéines des multiples espèces de poissons de notre rivière ont toujours constituées la base de l'alimentation des Embera Katio, du moins jusqu'à il y a quatre ans. En 1995, la société Urr« a construit un barrage qui a détourné le cours de la rivière Sin«. Depuis, tout a changé. Le barrage a entraîné la mort pour notre peuple, la mort pour le poisson, et la mort pour les membres de notre communauté qui ont vu disparaître leur source de protéines, la mort pour nos dirigeants qui ont protesté ou se sont élevés contre ce barrage.

Le barrage d'Urr«, qui barre la rivière Sin« comme un grand mur, a arrêté la migration des poissons qui remontent la rivière jusqu'à leur lieu de frai. Cette situation a durement frappé mon peuple. De nos jours, maintenant qu'il n'y a plus de poissons, on voit couramment des gens s'évanouir parce qu'ils sont épuisés par la malnutrition, et les gens sont devenus vulnérables à des maladies qui ne nous touchaient jamais auparavant. Le pire, c'est que de nombreux enfants sont morts.

Il y a un autre problème. Le barrage a entraîné la création d'une étendue d'eau stagnante, qui a attiré les moustiques. Les moustiques ont amené le paludisme. Au moment où je quittais mon pays pour venir au Canada, ma petite-fille âgée de quatre mois a eu une attaque de paludisme. Vous pouvez imaginer à quel point je m'inquiète pour elle.

• 0955

Quand on a construit ce barrage, on n'a pas consulté tous ceux d'entre nous qui étaient directement touchés. Cet état de choses est une violation des droits prévus par la Constitution colombienne et par les pactes internationaux. En novembre, le tribunal a ordonné l'arrêt provisoire du projet en attendant que des consultations appropriées aient eu lieu et qu'un accord ait été conclu. Mais nous avons appris qu'en dépit de cette ordonnance du tribunal, le projet d'Urr« allait se poursuivre de toutes façons. Alors, la terre sur laquelle nous faisons pousser nos récoltes, la terre où nous puisons nos médecines traditionnelles, la terre où sont enterrés nos ancêtres, la terre où sont situés nos sites sacrés va disparaître engloutie sous l'eau du barrage.

La situation est en train de s'aggraver en ce moment même. La Société Urr« et le ministère des Affaires indigènes utilisent des tactiques sournoises afin de tâcher de diviser nos collectivités, et le ministère de l'Environnement a accordé un permis environnemental à l'entreprise sans nous consulter. On nous a offert un petit montant d'argent pour que nous acceptions le barrage. Des pressions ont été exercées sur certains membres de la collectivité Embera pour qu'ils acceptent le barrage, mais pour beaucoup d'entre nous il est clair qu'un tel pot-de-vin ne permettra pas de compenser les dommages irréparables qui seront causés à notre environnement, ni la perte de notre sécurité. À moins que nous parvenions à obtenir d'autres terres où cultiver nos récoltes et qui nous donnent accès à des sites de pêche, la survie de notre peuple et de notre culture est sérieusement compromise.

Je tiens à souligner que les membres Embera Katio ne sont pas contre le développement, mais nous tenons à ce que vous sachiez que la situation dans laquelle nous nous trouvons à l'heure actuelle n'aurait jamais dû se produire. Nous ne voulons pas que d'autres gens souffrent comme nous.

Je tiens à préciser qu'en vous disant ces choses aujourd'hui, je mets ma vie en danger. Quatre dirigeants Embera ont déjà été tués par les forces paramilitaires pour avoir contesté les effets nuisibles du projet de la Société Urr«. Ces bandits armés ont mis le feu à nos bateaux pour nous empêcher d'aller à des réunions. Ils ont établi des postes de contrôle sur les rivières et ont détenu nos compatriotes.

• 1000

Tous ceux qui osent parler de la compagnie Urra sont accusés d'être membres des guérilleros, et c'est le prétexte qui a été utilisé pour désigner comme cible militaire nos collectivités et leurs dirigeants. Vous pouvez comprendre pourquoi mon peuple vit dans la plus grande peur, la peur d'une attaque imminente et la peur d'affronter un avenir incertain sans territoire et sans poisson.

C'est pour toutes ces raisons que je comparais devant vous au nom des Embera Katio de Cordoba pour vous demander un appui dont nous avons tant besoin. Ma première recommandation à votre intention concerne vos politiques d'investissement à l'étranger. Si une entreprise canadienne ou une société d'État canadienne comme la Société pour l'expansion des exportations veut participer à un projet de développement dans un pays comme le mien, il faut qu'il y ait des consultations transparentes, exhaustives et authentiques avec tous ceux qui seront directement touchés par le projet avant qu'aucune décision ne soit prise.

Après la construction du barrage par la société Urr«, lorsque le poisson commençait déjà à disparaître, nous avons engagé un expert conseil afin qu'il fasse une étude. Il a constaté que le méga projet avait eu plus d'une centaine d'effets nuisibles. Nous préconisons qu'à l'avenir il soit obligatoire de faire une étude indépendante et crédible des répercussions économiques, sociales, culturelles et environnementales d'un projet d'investissement prévu, et d'une étude d'impact qui tienne compte des commentaires des collectivités touchées, avant que le projet soit approuvé. Il est inadmissible qu'un projet de développement comportant des investissements étrangers ne serve qu'à enrichir une poignée d'investisseurs au prix d'une dégradation environnementale, sociale et culturelle qui appauvrit des collectivités entières.

Dans un pays comme la Colombie, victime de nombreux conflits armés, il est également primordial de prévoir comme condition supplémentaire, la tenue de consultations préalables avec des organisations nationales et internationales respectueuses des droits de la personne. De telles consultations auraient pour objectif d'évaluer la façon dont un projet de développement pourrait exacerber la violence existante et accroître les violations des droits de la personne.

• 1005

De plus, étant donné que la Société pour l'expansion des exportations a contribué au mégaprojet de la société Urr« qui a causé tant de tort à la population Embera et aux autres habitants non indigènes de la région, nous estimons que le gouvernement canadien partage la responsabilité de s'assurer que nous serons suffisamment indemnisés pour les torts causés. Cette indemnisation comprendrait, entre autres, les principaux éléments suivants: de nouvelles terres arables pour les collectivités touchées avant que leurs terres soient inondées; la réinstallation adéquate des 600 membres des collectivités de Vegido, Doza, Amborromia, Sambuda et Nagua, dont les maisons seront inondées; des réservoirs suffisants pour pratiquer la pisciculture dans chaque collectivité afin de garantir la sécurité alimentaire; l'adhésion, de la part du gouvernement de la Colombie, au plan d'ethno-développement de la population Embera Katio; des mesures de protection et de conservation conformes à la culture traditionnelle de la population Embera; et garantir à la population indigène des droits de participation aux profits.

Nous croyons également que la participation de la Société pour l'expansion des exportations au développement du barrage Urr« I et tous les événements qui se sont produits depuis, impose au Canada la responsabilité d'exercer des pressions auprès du gouvernement de Colombie pour qu'il garantisse la sécurité des collectivités Embera, pour faire enquête et traduire en justice ceux qui sont responsables de l'assassinat de nos dirigeants, et désarmer les groupes paramilitaires qui terrorisent la région.

Enfin, nous demandons aux membres du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international de presser le gouvernement de Colombie de respecter sa propre Constitution, ainsi que ses obligations internationales. On ne peut pas nous priver de notre droit de vivre en tant que peuple indigène.

Voilà l'information que je tenais à vous transmettre, et je vous remercie de votre attention.

Le président: Muchos gracias, Senor Pernia. Nous vous sommes particulièrement reconnaissants d'être venu de si loin pour nous faire part de vos préoccupations. Je vous remercie.

Nous allons maintenant céder la parole à M. Bertrand.

[Français]

M. Jacques Bertrand (recherchiste, Développement et Paix): Bonjour aux membres du comité. Moi aussi, je viens de parcourir la même distance que Kimy parce qu'au cours derniers jours, j'étais justement dans le territoire Embera Katio. Je suis arrivé à minuit hier soir à Montréal, ce qui explique pourquoi je n'ai pas de présentation écrite.

Le président: Si vous sommeillez pendant votre présentation, on en comprendra la raison.

M. Jacques Bertrand: Vous pourrez toutefois retrouver les principaux éléments d'analyse de la situation dans le territoire Embera Katio dans la lettre que Développement et Paix a adressée à la SEE et que je mettrai à la disposition des personnes présentes dans cette pièce. Je déposerai également la réponse de la SEE à cette lettre.

• 1010

Mon intervention sera de très courte durée parce que le temps dont nous disposons est limité. Je m'en tiendrai donc à cet échange de lettres et je vous en expliquerai brièvement le contexte.

Développement et Paix oeuvre dans le domaine du développement international et des droits humains. Cette organisation a été mise sur pied par l'Église catholique du Canada et elle est active dans toutes les régions du pays. Depuis 1966, elle a appuyé des milliers d'organisations en Amérique Latine, en Afrique et en Asie, dont des groupes de défense des droits humains et des groupes autochtones.

Dans le cas de la Colombie, nous appuyons directement le groupe Embera Katio, ainsi que l'organisation nationale des autochtones de la Colombie.

Ce qui ressort surtout de la visite que je viens d'effectuer chez les Embera Katio, c'est la situation dans laquelle ils se trouvent. Ils sont coincés entre les paramilitaires, l'armée et la guérilla. Un élément de contexte qu'il est important de saisir, c'est qu'en Colombie, le conflit armé a fait en sorte qu'un peu plus de un million et demi de personnes se sont réfugiées à l'intérieur du pays, se sont déplacées. Toutes les organisations qui se préoccupent des droits humains affirment que les paramilitaires sont responsables de trois à quatre fois plus de meurtres, de massacres et de tortures que la guérilla ou encore l'armée.

Un lien a toutefois été établi à maintes reprises entre l'armée et les paramilitaires. Ce qui complique la situation dans le cas des Embera Katio, c'est le fait que le grand chef de l'organisation paramilitaire colombienne se trouve justement dans cette région-là. C'est une région où il y a de grands propriétaires terriens, dont Carlos Castano, qui est le chef des paramilitaires.

On se dispute donc ce territoire malgré les conséquences qui s'ensuivent et que nous a décrites Kimy tout à l'heure. Des leaders Embera Katio ont été tués. En passant, il n'y a aucun doute dans mon esprit qu'en venant témoigner ici, Kimy met sa vie en danger. Des maisons ont été brûlées. Des gens ont été chassés de leurs foyers. Des bateaux essentiels à la survie de ces gens été détruits. Ces gens vivent véritablement dans la peur constante.

Lorsque Développement et Paix a examiné cette situation, elle a été préoccupée par le fait que ce projet de barrage avait été financé en partie par la SEE. Le printemps dernier, nous écrivions une lettre à la SEE afin d'obtenir des éclaircissements. Je vais vous donner une idée de la nature des questions qu'on a posées. Comme je l'indiquais plus tôt, je vous remettrai copie de notre lettre. Nous demandions entre autres:

    1. Au départ, la SEE a-t-elle pris en considération le fait—pourtant annoncé—que le projet risquait d'accroître la violence et l'injustice à l'encontre des autochtones de la région?

C'est une question assez fondamentale qu'elle aurait dû se poser avant d'appuyer un projet comme celui-là.

    2. La SEE a-t-elle tenu compte des craintes, des analyses, et des dénonciations exprimées par les autochtones de la région quant à l'impact environnemental du projet et ses répercussions sur leur mode de vie?

    3. La SEE a-t-elle consulté les communautés autochtones pour entendre leur point de vue sur les impacts social et environnemental du barrage?

Voilà quelques questions que nous avons posées à la SEE. Nous avons également demandé à la SEE d'intervenir et de poser six actes fort simples. Nous lui demandions entre autres d'écrire de façon urgente au président Pastrana, le président de la Colombie, afin qu'il assure la protection du peuple Embera Katio. Nous croyions qu'une telle action était très importante parce qu'il y avait encore des tueries et que les menaces persistaient.

On a demandé à la SEE d'inviter les actionnaires de ce projet et la société qui possède le barrage à se prononcer en faveur du respect du jugement de la Cour constitutionnelle, qui oblige le ministère de l'Environnement de la Colombie et le ministère de l'Intérieur à négocier avec les Embera Katio.

En réponse, dans une lettre fort brève, la SEE nous a exprimé toute l'importance qu'elle accorde aux droits humains et aux questions environnementales. Elle a essentiellement cherché à minimiser son implication dans ce projet. De fait, son implication n'est pas dominante puisqu'elle a investi environ 18 millions de dollars américains dans un projet qui nécessitera un investissement total de 700 millions de dollars américains. Mais il reste que nous jugeons qu'il s'agit d'une question de principe qu'il est important de défendre.

La SEE nous a invités à communiquer avec les autorités colombiennes afin d'obtenir de plus amples renseignements. Voilà les lignes essentielles de sa réponse. Cette réponse nous amène à nous poser de nombreuses questions au sujet du sens de la responsabilité qui anime la SEE dans ce dossier. Nous savions dès le départ qu'il s'avérerait assez mauvais, et nos craintes ont été confirmées.

• 1015

Notre préoccupation est encore plus grande lorsque nous examinons le contexte général de la Colombie, un pays qui bénéficie d'énormément d'investissements directs de la part d'entreprises canadiennes. J'ai visité ce pays à deux reprises au cours des 18 derniers mois et on me parle d'entreprises canadiennes au sud, au nord et au centre, ainsi que des préoccupations qui sont exprimées.

Dans combien de cas la SEE est-elle impliquée? Dans combien de cas les entreprises canadiennes respectent-elles ou ne respectent-elles pas l'environnement et les droits humains? Ce sont autant de questions qui nous préoccupent énormément et qui nécessiteraient encore plus de recherche. Nous jugeons que le cas Embera Katio est assez inquiétant pour que des mesures soient prises quant à la transparence et à l'imputabilité de la SEE.

En ce sens, nous croyons que votre comité a vraiment une grande responsabilité. Je vous remercie.

Le président: Merci, monsieur Bertrand. Vous êtes sans doute au courant du fait qu'un sous-comité de ce comité entreprendra en décembre une étude au sujet de la Colombie. Y serez-vous présent?

M. Jacques Bertrand: Oui, nous espérons y participer.

Le président: D'accord. Je préférerais que nous étudiions ce matin la SEE de façon assez générale et que nous évitions de nous pencher sur des cas trop précis. Soyez toutefois assuré que j'apprécie vos observations parce qu'elles nous permettent de comprendre le genre de problèmes auxquelles elle fait face. Mais nous devons garder en tête que nous étudions ici la SEE et ses fonctions. La question de la Colombie sera examinée par le sous-comité.

M. Jacques Bertrand: Absolument. Je suis heureux des précisions que vous avez apportées. L'échange de lettres que je partagerai avec vous vous permettra essentiellement de voir ce qu'on pense du rôle de la SEE et de la réponse qu'elle nous a donnée.

Le président: D'accord. Merci beaucoup.

[Traduction]

Nous allons maintenant passer à M. Freeman.

M. Aaron Freeman (porte-parole, Groupe de travail sur la SEE): Je m'appelle Aaron Freeman, et j'aborderai la question de la divulgation de l'information et de l'accès à l'information.

Dans une certaine mesure, l'accès à l'information est le fondement de tout ce qui touche la responsabilisation parce que, comme plusieurs membres du comité l'ont signalé lors d'audiences précédentes, sans information suffisante, il est impossible de déterminer si une institution se conforme aux normes éthiques.

Malgré les avantages dont jouit la SEE en tant qu'institution financière publique, y compris son immunité fiscale, sa clause de responsabilité limitée, sa cote de crédit garantie par le gouvernement et le fait que son capital social provient des contribuables, la SEE révèle très peu d'information au public. Comme l'indiquait le rapport Gowlings, «la législation actuelle n'oblige presque en rien la SEE à divulguer au public de l'information».

La SEE est exemptée des obligations prévues par la Loi sur l'accès à l'information, sauf pour le financement du Compte du Canada administré par la SEE. En outre, la Loi sur l'expansion des exportations ne prévoit aucune disposition qui oblige la SEE à fournir au public une information quelconque sur le financement de projets.

Cette manie du secret est inacceptable pour une institution publique, quelle qu'elle soit. La SEE devrait communiquer suffisamment d'information pour permettre au public de déterminer si les normes minimales prévues par les lois ou les politiques de la SEE sont respectées et si les projets nuisent aux collectivités où ils sont réalisés.

Cette manie du secret est aussi remarquable si on examine la situation chez notre principal partenaire commercial, les États-Unis. La Export-Import Bank des États-Unis fournit la liste de tous ses projets et de leur emplacement sur le site Web de l'organisme. Bien qu'il existe des mesures destinées à assurer la confidentialité commerciale, elles sont prises en fonction de chaque projet. Contrairement à ce qui se passe à la SEE, qui a le pouvoir de retenir toute information relative à un projet, la divulgation va de soi pour les organismes américains de financement des exportations.

Les organismes américains sont également assujettis à la Freedom of Information Act. Même si la FOIA prévoit une exemption pour l'information commerciale confidentielle, cette exemption est moins restrictive que celle prévue par la Loi sur l'accès à l'information du Canada en matière de confidentialité commerciale.

• 1020

Comparativement à la SEE, la divulgation va aussi de soi dans les organismes de financement de la Banque mondiale. Chaque organisme de financement privé de la Banque mondiale fournit de l'information déterminante, non seulement sur les projets qui sont financés, mais aussi sur ceux qui sont à l'étude. De même, la Banque interaméricaine de développement met à la disposition du public de l'information factuelle et technique sur les répercussions environnementales de ses projets.

Bien qu'il ne faille pas prendre à la légère les inquiétudes touchant la confidentialité commerciale, le rapport Gowlings a traité en détail de ces préoccupations et a conclu ce qui suit:

    [...] que la publication d'information générale sur la clientèle et les activités de la SEE ne devrait pas, dans la plupart des cas, nuire aux intérêts commerciaux des clients de la SEE. En outre, compte tenu du statut d'organisme gouvernemental de la SEE, la clientèle de celle-ci ne devrait pas s'attendre à ce que ses rapports avec la SEE échappent entièrement à la connaissance du public.

Au Canada, le fait d'assujettir la SEE à la Loi sur l'accès à l'information permettrait au public d'accéder à de l'information importante. Le fait que l'ACDI, y compris le PCI de l'ACDI et d'autres organismes de l'État, de même que le financement du Compte du Canada par la SEE, relèvent de la loi n'a pas nui aux relations de ces organismes avec le secteur privé.

En plus d'assujettir la SEE à la loi, il faudrait garantir au public l'accès à l'information de base sur les projets que soutient la SEE. Le groupe de travail est favorable aux mesures du rapport Gowlings prévoyant que la SEE divulgue les noms de l'emprunteur, du pays et de l'exportateur, le montant et le type d'aide financière, sa durée ainsi qu'une brève description des biens, services ou projets dont il est question.

Il faut souligner que chaque année jusqu'au milieu des années 80, la SEE avait une liste de ses prêts et du financement bancaire connexe, y compris le nom du client, les produits financés, le nom de l'exportateur, le pays et la somme en question. Comme pour d'autres institutions financières, notamment l'Ex-Im Bank, l'OPEC et les organismes de financement de la Banque mondiale, une telle information devrait être fournie au stade de la proposition—et c'est là où notre recommandation diffère de la recommandation Gowlings—et il faudrait prévoir des dispositions destinées à protéger certains renseignements de nature délicate.

Certains ont prétendu que la SEE ne se compare pas à ces organismes parce que, contrairement à ceux-ci, la SEE n'est pas un organisme prêteur de dernier ressort. Cependant, aucun de ces organismes, qui consentent des prêts en dernier ressort et d'autres types de prêts, n'a de dispositions distinctes destinées à régir des situations où le client est un emprunteur de dernier ressort. Toute la clientèle est assujettie aux mêmes dispositions fondamentales en matière de divulgation.

Nous venons d'entendre un témoignage à propos du barrage Urr« en Colombie. Je tiens à indiquer au comité que ces types de projets risquent de n'être que la pointe de l'iceberg, mais jusqu'à ce que la SEE fonctionne de façon plus transparente, nous ne serons au courant de la participation de la SEE à ces projets qu'une fois que leurs conséquences catastrophiques font les manchettes.

Je vous remercie.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Freeman.

D'après ce que je crois comprendre, vous êtes le dernier porte-parole du Groupe de travail de la SEE. Est-ce exact?

M. Aaron Freeman: C'est exact, bien qu'il y ait d'autres membres du groupe de travail qui parleront au nom de leurs propres organisations.

Le président: Très bien. Je tenais simplement, au nom des membres du comité, à remercier votre groupe pour son rapport très utile, surtout pour votre sommaire. Et le fait que vous ayez réussi à rassembler toutes vos recommandations sur une seule page a épaté notre attaché de recherche... Vous êtes son témoin préféré jusqu'à présent.

Vous avez été très utile. Merci beaucoup.

Nous passerons maintenant à M. Allmand. Il n'a pas besoin d'introduction, comme nous le disons toujours, lorsqu'il comparaît devant notre comité.

M. Warren Allmand (président, Centre international des droits de la personne et du développement): Bonjour, monsieur le président. Je suis heureux de constater qu'hier soir la ville de Montréal a dépêché auprès du gouvernement un défenseur remarquable des droits de la personne à l'échelle internationale en la personne d'Irwin Cotler. Je suis persuadé qu'Irwin jouera un rôle important dans les dossiers dont vous êtes saisis ce matin.

Le président: Prévoyez-vous partir...?

[Français]

Par personne interposée?

M. Warren Allmand: Exactement.

[Traduction]

Le président: Très bien. Un homme averti en vaut deux.

M. Warren Allmand: Nous l'avons perdu. Il était membre de notre conseil d'administration. Il sera des vôtres.

Le président: C'était un de mes collègues aussi.

M. Warren Allmand: En tant que président du Centre international des droits de la personne et du développement, je suis heureux que se déroulent ces audiences parlementaires sur la Loi sur l'expansion des exportations, et je suis particulièrement heureux que les droits de la personne fassent partie de cet examen. L'un des programmes prioritaires du Centre international des droits de la personne concerne l'impact de la mondialisation et du commerce sur les droits de la personne et la démocratie, ce qui explique ma présence ici aujourd'hui.

Étant donné que le gouvernement canadien et de nombreux organismes multilatéraux reconnaissent de plus en plus les liens qui existent entre le commerce et les droits de la personne, il est important d'examiner la façon dont la Société pour l'expansion des exportations peut contribuer à faire avancer la cause des droits de la personne, qui est un pilier central de la politique étrangère du Canada.

• 1025

Il y a deux semaines, j'ai rencontré le ministre Pettigrew lors des réunions sur la ZLEA à Toronto. Il a très clairement indiqué dans son exposé qu'il existe un lien évident entre l'activité économique et les droits de la personne. Le ministre Axworthy a reconnu à plusieurs reprises que le commerce et les droits de la personne doivent aller de pair.

L'année dernière à Edmonton il a déclaré, et je cite:

    Cette semaine même j'ai rencontré les directeurs canadiens des institutions financières internationales afin de discuter de la façon de renforcer le bon gouvernement et la démocratie en tant que facteur dans les décisions de prêt. Par ailleurs, nous devons mieux intégrer les préoccupations en matière de droits de la personne dans les tribunes internationales portant sur le commerce. Cela n'a rien d'utopique—c'est tout simplement logique sur le plan commercial.

Je conviens avec M. Axworthy qu'il n'est pas suffisant que nous fassions la promotion du commerce et de l'investissement canadien dans les pays en développement, en partant du principe que les droits et la démocratie suivront automatiquement. Nous ne pouvons pas d'une part défendre les droits de la personne et le développement démocratique par le biais de l'ACDI, l'Agence canadienne de développement international, et d'autre part défendre des politiques qui n'appuient pas ces mêmes objectifs dans certaines tribunes multilatérales ou dans le cadre d'activités que nous entreprenons pour appuyer l'entreprise canadienne à l'étranger. Nous devons intégrer nos politiques qui favorisent l'entreprise canadienne à nos politiques qui assurent la promotion des droits de la personne. La SEE a un rôle fondamental à jouer à cet égard.

Le Centre international estime qu'il est impossible de réaliser de réels progrès en matière de droits de la personne en nous limitant aux organismes traditionnels des droits de la personne au niveau international, aussi importants qu'ils puissent être. Les décisions prises par l'Organisation mondiale du commerce, les politiques adoptées par la Banque mondiale, le Fonds monétaire international, et de nombreuses grosses sociétés qui fonctionnent dans le monde à l'heure actuelle influent sur les droits de la personne. Et certaines de ces organisations n'ont pas fait preuve de respect pour les droits de la personne.

En tant que société d'État, la Société pour l'expansion des exportations doit établir des règlements qu'elle respecte aussi, et ne devrait certainement pas compromettre l'engagement pris par le gouvernement canadien en matière de politique étrangère à l'égard des droits de la personne. Quelle est la meilleure façon d'y parvenir?

Premièrement, en ce qui concerne l'accès à l'information, je n'ai pas l'intention de répéter tout ce que Aaron Freeman a dit, mais nous appuyons entièrement sa position et ses propos. Vu que ce sont les contribuables du Canada au bout du compte qui sont les garants des prêts de la SEE, il est absolument essentiel d'assurer une meilleure divulgation de l'information, car autrement il est pratiquement impossible pour tout groupe de la société civile au Canada, ou ailleurs, d'évaluer les risques possibles de violation des droits de la personne.

Deuxièmement, il faut assurer la cohérence entre les politiques en matière de droits de la personne et en matière de commerce. Il faut instaurer des mécanismes permettant de s'assurer que la SEE ne contrevient pas directement aux priorités établies par le Canada en matière de droits de la personne et de sa politique étrangère.

Certains problèmes devraient être vérifiés. Le Canada appuie les normes du travail fondamentales, telles que les définit le BIT, et reconnaît que ces normes du travail constituent des droits de la personne. Toute entreprise qui reçoit un financement de la SEE devrait être tenue de respecter ces normes du travail fondamentales. Le rapport Gowlings recommande que la SEE adopte une politique consistant à demander à ses clients d'indiquer s'ils ont adopté ou non un code de conduite volontaire. Notre organisation a fait des recherches exhaustives sur les codes volontaires, et nous avons constaté que ces codes ne sont en vigueur que dans une petite proportion d'entreprises canadiennes. De plus, un nombre encore plus restreint d'entreprises ont des codes qui incluent les droits de la personne et plus rares encore sont celles qui ont des mécanismes efficaces de mise en oeuvre et de contrôle.

Par conséquent, nous estimons qu'au lieu de dépendre de codes volontaires qui ne sont par appliqués, la SEE devait exiger que chaque contrat qu'elle passe avec des entreprises canadiennes renferme une clause les obligeant à se conformer aux normes internationales en matière de droits de la personne.

Le Canada est également un important défenseur des droits de la femme sur la scène internationale. La Société pour l'expansion des exportations devrait être en mesure de s'assurer qu'aucun des contrats qu'elle aide à financer ne renferme de clauses discriminatoires en fonction du sexe, ce qui de toute évidence remettrait en question nos objectifs en matière d'égalité des sexes; la SEE ne devrait pas non plus accepter d'appuyer des contrats qui renferment des clauses discriminatoires en fonction de la race, de l'origine ethnique, de la religion ou pour d'autres motifs.

• 1030

Même si une partie du mandat de la SEE consiste à évaluer le risque politique et à assurer ce risque, les droits de la personne ne semblent pas faire partie de l'évaluation du risque politique. Cela est totalement inacceptable. Des tendances persistantes en matière de violation de droits de la personne ne peuvent qu'entraîner de l'instabilité et des risques politiques. Car le fait de ne pas tenir compte des droits de la personne dans l'évaluation des risques politiques est non seulement moralement répréhensible mais témoigne également d'un manque de vision sur le plan commercial.

En ce qui concerne le soutien de la SEE aux exportations à des pays coupables d'atteintes graves aux droits de la personne, la mondialisation et la concurrence internationale signifient que nous n'avons recours aux sanctions économiques que dans les situations les plus exceptionnelles et il est fort probable que le commerce continue dans les pays où la situation des droits de la personne est extrêmement précaire, y compris les pays en pleine guerre.

Le Canada impose certaines restrictions à l'exportation d'équipement militaire à de tels pays, mais nous nous préoccupons de la façon dont on établi la liste de contrôle et du fait qu'on ne sait pas comment sont établis les critères qui déterminent quels pays figurent sur cette liste.

À notre avis, il y a quelques pays où on ne devrait permettre aucun commerce ni investissement international parce qu'il est impossible d'y entreprendre des activités économiques sans, d'une façon ou d'une autre, se montrer complice des violations des droits de la personne.

L'exemple évident, c'est la Birmanie, comme en témoigne le consensus généralisé au sein de la communauté de défense des droits de la personne. Dans un tel cas, il est approprié d'imposer des sanctions économiques, toutefois, le commerce continuera dans les pays où l'on emprisonne et l'on exécute régulièrement les dissidents, où la liberté d'association est interdite, où l'on pratique la torture, où il n'y aucune liberté de parole et où la corruption est loi.

Dans ce contexte, j'ai été un peu dérouté de lire dans un communiqué de presse récent du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, que la SEE a envoyé des représentants pour accompagner le ministre Chan dans sa mission commerciale en Chine. J'ai été encore plus ébranlé hier lorsque j'ai lu qu'il avait déjà été entendu d'admettre la Chine au sein de l'OMC, alors que les droits de la personne auraient dû être la monnaie d'échange de l'adhésion de la Chine.

Le centre international estime qu'il ne faut pas que le gouvernement offre de l'aide aux entreprises qui cherchent à faire affaire dans des pays qui ne garantissent pas les droits fondamentaux tout en reconnaissant que les entreprises privées vont continuer leurs activités dans ce pays.

Le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, en consultation avec les ONG canadiennes, doit établir une liste des pays qui ne recevront plus d'aide au commerce ni à l'investissement de la part du Canada, ni d'aide de la SEE, de l'ACDI, des missions de Team Canada, etc. On pourrait revoir la liste périodiquement et cela permettrait au Canada d'exercer des pressions afin de limiter les activités des entreprises canadiennes dans des pays où l'on viole de façon flagrante et systématique les droits de la personne.

On ne doit pas utiliser les deniers publics pour appuyer des régimes répressifs ou dont le comportement en affaire est immoral. Un réexamen systématique de la situation sur le plan des droits de la personne dans différents pays est essentiel afin de formuler une politique étrangère uniforme.

Bien que cette recommandation dépasse largement le mandat de la SEE comme tel, et exige la coopération et les ressources du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, y compris les missions à l'étranger, les milieux de défense de droits de la personne se réjouiraient certes s'il y avait moyen de s'entendre avec la SEE pour établir une telle liste.

Monsieur le président, je tiens à vous remercier de l'occasion qui m'a été donnée de comparaître ici ce matin, et j'espère que mes commentaires vous seront utiles dans le cadre de votre examen de la question. Je suis à votre disposition pour répondre aux questions et pour échanger des idées avec vous. J'ai très hâte de lire votre rapport.

Merci beaucoup.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Allmand.

Mme Nowlan de la West Coast Environmental Law Association va maintenant prendre la parole.

Mme Linda Nowlan (porte-parole, West Coast Environmental Association): Merci, monsieur le président, et bonjour.

La West Coast Environmental Law Association est un centre de droit sur l'environnement d'intérêt public situé à Vancouver. Nous fêtons notre 25e anniversaire cette année, nous sommes donc l'un des plus anciens centres de droit sur l'environnement au Canada.

Je suis très heureuse d'être ici, surtout devant mon ancien—non pas mon vieux—professeur de droit international de l'Université de Toronto.

Mme Colleen Beaumier (Brampton-Ouest—Mississauga, Lib.): Non, il est vieux.

Le président: Vous voyez que les choses tournent mal. Vous auriez mieux fait de ne pas en parler.

Mme Linda Nowlan: Je ne vais pas continuer dans cette veine. Je ne sais pas si vous enseignez toujours, outre vos fonctions ici, mais je suis persuadée que si c'est le cas, vous enseignez fort probablement que le Canada ne s'acquitte pas, comme il le devrait, de ses engagements internationaux en matière d'environnement. Une façon d'améliorer la situation serait d'avoir une politique étrangère uniforme ce qui sous-entend que la SEE doit respecter les normes environnementales .

• 1035

Avec la mondialisation d'aujourd'hui, nous ne pouvons pas nous attendre à ce que les entreprises canadiennes se conforment à certaines normes au Canada et à des normes moins strictes à l'extérieur du pays. Je pense que c'est essentiellement le thème de mon mémoire.

Je vais me concentrer sur les normes environnementales et les recommandations du rapport Gowlings qui s'y rapportent. Ce sont d'excellents premiers pas qui ne sont pas poussés assez loin.

Avant d'entrer dans les détails sur les modifications à apporter à la loi sur l'expansion des exportations que nous jugeons nécessaires, j'aimerais d'abord faire valoir trois choses. La première dont j'ai parlé et M. Allmand l'a abordé dans le cadre des droits de la personnes—c'est qu'il est très important que nous ayons une politique étrangère uniforme, ce qui n'est pas le cas actuellement.

L'ACDI applique un ensemble de normes. Il y a des responsables de l'environnement au ministère de l'Environnement et il y a des responsables de l'environnement au ministère des Affaires étrangères qui vont à l'étranger, qui négocient des traités et qui consacrent beaucoup de temps et d'énergie—le temps et l'énergie du gouvernement et le temps et l'énergie des contribuables—à négocier des engagements qui nous assurent que le Canada va intervenir vigoureusement dans le domaine de l'environnement, mais la SEE n'est pas obligée, en vertu de la loi, de le faire. Cela donne un message incohérent.

Au lieu d'exporter les problèmes environnementaux—on nous en a cité des exemples aujourd'hui—nous devons exporter des solutions. Nous avons quelques solutions. Nous avons beaucoup de solutions. Nous avons de bonnes lois sur l'environnement au Canada. Ce sont ces lois et ces solutions, et non les problèmes que nous devons exporter.

Deuxièmement, la SEE ne prend pas encore l'environnement au sérieux. Il y a eu quelques améliorations comme le mentionne Gowlings, mais la SEE n'en est pas encore rendue à prendre la situation au sérieux. Comme preuve, il suffit de regarder le propre mémoire présenté par la société à l'examen Gowlings. On mentionne très brièvement l'environnement à la dernière page, en deux phrases.

Je ne pense pas que ce soit suffisant, à notre époque, de dire qu'on s'intéresse sérieusement au problème de l'environnement lorsque dans le cadre d'un examen en profondeur sur sa loi dominante il n'est pas du tout question de l'environnement.

La société laisse entendre que les normes volontaires suffisent, qu'on a pris des mesures tout à fait louables en introduisant un cadre d'examen rapide sur l'environnement, tout à fait volontaire. Encore une fois, c'est une amélioration, mais ce n'est pas suffisant.

Les études révèlent que les normes volontaires n'entraînent pas le changement de comportement au même titre que la réglementation. Je cite certaines de ces études dans mon mémoire écrit. Je vous renverrai au sondage des institutions financières du Programme de l'environnement des Nations Unies effectué en 1998. Ces institutions financières, partout au monde, reconnaissent que c'est la réglementation qui les pousse à changer leur comportement. Ainsi, nous pensons qu'il faut forcer, en vertu de la loi la SEE à examiner sérieusement les normes environnementales, ce qui n'est pas le cas actuellement.

Troisièmement, la SEE répondra que le problème, c'est la compétitivité, qu'elle ne peut pas demander à ses clients de respecter des normes environnementales obligatoires parce que cela nuirait à leur compétitivité. En réponse à cet argument, il suffit de nous tourner vers le sud, vers notre principal partenaire commercial et concurrent, les États-Unis. Les deux agences américaines de crédit à l'exportation doivent se conformer à des normes environnementales légiférées.

Les normes environnementales américaines sont exhaustives. Non seulement les lois habilitantes de la banque d'export-import et de la Société d'investissement privé à l'étranger prévoient-elles des normes environnementales, mais ces deux organismes doivent également respecter la loi nationale sur l'environnement, c'est-à-dire l'équivalent de notre loi canadienne sur l'évaluation environnementale.

Je crains que Gowlings ne se soit trompé en déclarant que les organismes américains ne se conformaient à la NEPA, c'est-à-dire à leur loi sur la politique nationale en matière d'environnement, aux États-Unis, ses territoires et en Antarctique. En fait, les organismes américains respectent la loi dans le cas de tout projet qui aura une incidence marquée sur l'environnement du patrimoine commun qui échappe à l'autorité d'une nation.

De nombreuses ONG, y compris les nôtres, font valoir que cela inclut des projets qui ont des répercussions considérables sur les changements climatiques et les pertes de biodiversité parce que cela échappe à la compétence d'une seule nation et qu'il s'agit en fait de problèmes qui touchent le patrimoine mondial.

• 1040

Comme on vous l'a dit, la loi exige aux États-Unis des consultations publiques étendues ainsi que le respect des exigences en matière d'accès à l'information. Les organismes de crédit à l'exportation sont aussi tenus aux États-Unis d'accorder la priorité aux projets qui ont un effet positif sur l'environnement comme les projets énergétiques qui mettent l'accent sur l'exploitation de ressources renouvelables et la gestion de l'offre.

Quant aux recommandations du rapport Gowlings qui porte sur l'environnement, la première de ces recommandations est que la SEE doit continuer de favoriser l'élaboration d'un consensus international au sujet des lignes directrices et des procédures environnementales que doivent respecter les OCE. La SEE prend prétexte du fait que ce consensus n'existe pas encore pour refuser de prendre des mesures immédiates dans ce domaine.

Cette position est inacceptable, et une intervention immédiate s'impose. Si les États-Unis, notre principal partenaire commercial, peuvent se permettre de prendre des mesures unilatérales, nous pouvons aussi le faire. Le Canada a déjà montré qu'il n'hésitait pas à intervenir unilatéralement quand l'objectif à atteindre en vaut la peine. Le Canada l'a d'ailleurs fait à maintes reprises.

J'ai écrit pour la première fois en 1996 au MAECI au sujet de l'aide financière accordée par la SEE aux entreprises canadiennes participant au projet du barrage des Trois-Gorges. C'était il y a plus de trois ans. On m'a répondu à l'époque qu'il fallait attendre qu'il y ait un consensus international dans le domaine environnemental pour intervenir. Nous attendons toujours ce consensus. Cette situation nous paraît inadmissible.

Le rapport Gowlings se prononce en faveur d'un cadre d'examen environnemental qui serait soumis à des consultations publiques étendues. Je suis certainement d'accord pour qu'il fasse l'objet de consultations publiques. Je ne m'étendrai cependant pas sur le cadre d'examen environnemental qui, à notre avis, est inadéquat.

Si le comité veut plus de détails sur le cadre d'examen environnemental, je me ferai un plaisir de lui envoyer le mémoire assez long que nous avons préparé sur cette question. Je regrette de vous dire qu'il est même plus long que celui que je viens de vous remettre.

Ma collègue, Gail Whiteman, vous donnera plus de détails sur cette question.

Le rapport Gowlings fait de bonnes suggestions au sujet du mandat officiel de la SEE qui ont notre aval, mais que nous ne considérons pas comme étant suffisantes. À notre avis, ces recommandations ne se traduiront pas par un changement d'attitude au sein de la Société. À notre avis, elles ne vont pas assez loin.

Nous estimons qu'il est nécessaire d'apporter des amendements de portée plus vaste à la Loi sur l'expansion des exportations. Je vous renvoie plus précisément à la dernière page de notre mémoire où nous recommandons d'inclure au mandat de la SEE deux éléments supplémentaires, la promotion du développement durable et la participation publique au processus décisionnel. Ces deux éléments devraient figurer dans le mandat de la Société.

Il ne s'agit pas de faire de la SEE un organisme voué à la promotion du développement, mais pour assurer une politique étrangère uniforme, la promotion du développement durable devrait constituer l'un de ces objectifs. Le libellé que nous proposons figure dans d'autres lois canadiennes comme la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Nous ne voyons pas pourquoi il ne devrait pas figurer dans la loi créant la SEE.

En outre, la SEE devrait être tenue de se conformer à des procédures d'évaluation environnementale dès les premières étapes de planification d'un projet avant que des décisions irrévocables n'aient été prises. Kimy nous a malheureusement dit que ces procédures n'existaient pas à l'heure actuelle. Nous aimerions donc que la loi oblige la SEE à procéder à une évaluation environnementale dès l'étape de planification d'un projet.

Il importe aussi d'établir une liste de projets qu'il sera interdit à la SEE d'appuyer. Les OCE américaines ainsi que le groupe d'OCE relevant de la Banque mondiale ont déjà adopté cette pratique. Ils ont une liste de projets qu'ils n'appuieront à aucun prix.

Ainsi, ces organismes n'appuient aucun projet visant l'exploitation des forêts anciennes. D'une part, le Canada travaille d'arrache-pied pour faire adopter une convention mondiale sur les forêts et, d'autre part, la SEE finance des projets dont les buts vont à l'encontre de l'objectif de la convention. On ne peut pas parler dans ce cas de politique étrangère cohérente. Obligeons la SEE à respecter certaines normes fondamentales.

Prenons aussi l'exemple des changements climatiques. La U.S. Export-Import Bank a entrepris la tâche difficile mais nécessaire d'établir les émissions de Co2 produites par certains projets pour voir s'ils sont incompatibles avec la convention sur les changements climatiques. La SEE devrait être tenue de faire de même.

Il est aussi nécessaire d'apporter des modifications à la loi afin d'exiger que la SEE soit tenue, de par son mandat, d'appuyer davantage de projets qui comportent des avantages positifs pour l'environnement. Le Canada compte une industrie environnementale très importante en pleine expansion. Il faut reconnaître que la SEE a établi un programme visant les exportations environnementales, mais ce programme n'est pas suffisant. Nous ne voyons pas pourquoi la loi n'obligerait pas la SEE à adopter les mêmes orientations politiques que les autres organismes de crédit à l'exportation.

• 1045

J'ai déjà signalé le fait que la SEE appuie souvent des projets sur lesquels nous n'avons pas beaucoup de détails parce qu'on nous prive de l'accès à certains renseignements, qui vont directement à l'encontre d'engagements pris par le Canada aux termes de traité. Il devrait être interdit par la loi à la SEE de le faire. Je pourrais vous donner beaucoup d'exemples de cas de ce genre et vous en trouverez d'ailleurs dans mon mémoire.

Les organismes de crédit à l'exportation doivent collaborer à la mise en oeuvre des traités environnementaux et non pas contrecarrer ceux-ci. Il est question de l'intégration de la politique environnementale et de la politique économique; c'est d'ailleurs l'un des aspects fondamentaux du mandat en matière d'affaires étrangères. Le site Web du ministère des Affaires étrangères aborde explicitement la question de l'intégration de la politique environnementale et de la politique économique. Cet objectif ne pourra pas être atteint si la SEE fait cavalier seul.

Nous proposons deux autres modifications législatives qui dépassent le cadre de la question que nous étudions. La première vise à faire que la Loi sur l'expansion des exportations fasse en sorte que la SEE soit tenue de se conformer à certaines lignes directrices en matière environnementale. Il s'agit de faire en sorte que la LCEE s'applique à la SEE. À l'heure actuelle, la SEE n'est pas tenue de respecter la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. La seconde modification législative vise à obliger la SEE à établir une stratégie en matière de développement durable conformément à la Loi sur le vérificateur général. De nombreux autres organismes, et notamment le ministère des Affaires étrangères, sont tenus d'établir ce genre de stratégie. La SEE doit prendre au sérieux ses responsabilités en matière de développement durable et établir une stratégie à cette fin.

Je terminerai en répétant ce que j'ai dit dans ma déclaration préliminaire. Le Canada a joué un rôle de chef de file dans le domaine environnemental en se faisant le promoteur de certains accords environnementaux. Malheureusement, nous n'avons pas réussi à maintenir notre réputation dans ce domaine ces dernières années. Cessons d'exporter des problèmes environnementaux et commençons à exporter des solutions à ces problèmes.

Je vous remercie.

Le président: Je vous remercie beaucoup, madame Nowlan. Notre attaché de recherche aime beaucoup votre mémoire et dit qu'il mérite un A. Je lui ai dit que vous étiez sans doute une étudiante qui méritait des A parce que vous êtes venue vous installer à Vancouver. Cela montre votre intelligence.

J'accorde maintenant la parole à Mme Whiteman, de l'Institut Nord-Sud.

Mme Gail Whiteman (attachée de recherche principale sur la responsabilité sociale des entreprises, Institut Nord-Sud): Bonjour. Je vous remercie de tenir cette séance. Je m'appelle Gail Whiman et je suis attachée de recherche principale à l'Institut Nord-Sud. Pour ceux qui ne connaissent pas l'Institut Nord-Sud, nous faisons de la recherche sur les questions liées au développement international et à la politique étrangère. Nous ne sommes pas une ONG bien que nous appuyons certainement les recommandations que les ONG vous ont présentées ce matin.

Je travaille dans le domaine de la responsabilité sociale et environnementale des entreprises. J'ai donné à Janice des exemplaires d'un aperçu d'un rapport que nous avons préparé sur la responsabilité sociale des entreprises canadiennes en 1998.

Au sujet de la responsabilité des entreprises, j'aimerais d'abord dire que la SEE accuse du retard à cet égard par rapport au secteur privé. La SEE n'a pas une politique aussi progressiste en matière de gestion environnementale que le secteur privé. Je crois que c'est très surprenant.

J'aimerais vous entretenir aujourd'hui de deux questions: la première a trait au cadre d'examen environnemental et la seconde, à des recommandations qui s'ajoutent aux recommandations environnementales que vous a présentées Linda Nowlan.

Le rapport Gowlings signale que le cadre d'examen environnemental ne propose pas d'objectifs ou de repères précis. Le cadre n'est pas suffisamment clair. Le rapport Gowlings conclut que le cadre d'examen environnemental de la SEE ne semble pas reposer sur des méthodes très précises. Qu'est-ce que cela signifie? Nous sommes certainement d'accord avec cette affirmation.

J'aimerais simplement vous montrer quelque chose. Voici le cadre d'examen environnemental de la SEE. Par comparaison, voici celui de la Banque mondiale. Donc, lorsque nous disons qu'il est vague, qu'il n'est pas clair, qu'il n'est pas précis, vous pouvez constater que c'est vraiment le cas.

Nous avons à certaines reprises vivement recommander à la SEE d'adopter les pratiques et les politiques de la Banque mondiale, pour un certain nombre de raisons. De facto, beaucoup d'entreprises sur la scène internationale utilisent déjà les lignes directrices de la Banque mondiale. Elles ont été mises à l'essai. Il y a des aspects qui peuvent être améliorés, mais ces lignes directrices existent: pourquoi alors réinventer la roue? Pourquoi adopter une approche aussi vague que celle-ci? Je pense que nous reconnaissons que la SEE essaie de faire quelque chose; nous la félicitons de cette initiative. Je pense que nous pourrions nous inspirer des travaux qui ont déjà été faits dans ce domaine, et il n'est pas nécessaire de réinventer la science et la méthodologie. Utilisons donc ce qui existe déjà.

• 1050

En particulier, si on examine le cadre de la Banque mondiale, non seulement présente-t-il une méthodologie détaillée, mais il prévoit aussi des procédures précises afin d'assurer la transparence, la consultation publique et une procédure d'appel. De plus, la Banque mondiale possède des politiques concernant les peuples indigènes et leur réinstallation, entre autres choses.

Par exemple, si j'examine ce cadre, et j'ai fait une recherche par mot, on n'y mentionne absolument pas les peuples indigènes. Pourquoi? Le témoignage présenté par Kimy aujourd'hui indique qu'il faudrait peut-être parler des peuples indigènes, et c'est une mesure que nous encourageons fortement.

Donc, à mon avis, si le cadre de référence que s'est donnée la SEE est le meilleur dont elle dispose, alors je pense qu'elle a besoin d'une orientation sur le plan législatif destinée à le consolider. Par conséquent, les recommandations émanant de l'Institut Nord-Sud mettraient l'accent précisément sur la façon dont elle peut procéder.

En plus d'être d'accord avec l'organisation West Coast Environmental Law qui propose que le mandat de la SEE prévu par la loi inclut l'adhésion aux principes et aux pratiques du développement durable, nous aimerions aussi recommander que la loi soit modifiée afin d'y ajouter une disposition générale prévoyant que la SEE établisse des procédures d'examen environnemental conformes avec celles établies par la Banque mondiale. Il faudrait que cela figure dans la loi.

Le rapport Gowlings convient que l'utilisation des normes en vigueur à la Banque mondiale faciliterait l'obligation de rendre compte, étant donné que les facteurs scientifiques et la méthodologie utilisés sont relativement clairs. J'ai eu quelques entretiens avec des représentants du secteur privé à ce sujet, et ils ont dit être tout à fait à l'aise avec les détails présentés dans ce rapport. Je ne crois pas que la SEE peut se contenter de dire que nous avons besoin de mesures plus souples que celles en vigueur à la Banque mondiale, parce que la Banque mondiale utilise des critères de différents niveaux. Donc, nous ne proposons pas que chaque transaction qui passe par la SEE doive y adhérer. Ce que nous proposons c'est que les principaux projets ou ceux qui risquent d'avoir des effets nuisibles adoptent cette approche.

Deuxièmement, nous aimerions que la loi énonce clairement le processus législatif en matière de consultation publique, d'appel public, et en ce qui concerne la tenue d'un examen indépendant. Je pense que les collectivités touchées comme celles de Kimy's devraient avoir un ombudsman auquel elles pourraient s'adresser et avec qui elles pourraient parler directement des questions sociales, environnementales et des droits de la personne.

Enfin, nous aimerions proposer que la SEE sollicite des commentaires sur l'évaluation des incidences environnementales pour une période de 60 jours, préalablement au financement. Cela est facile à faire à l'aide d'Internet, et il s'agit ici d'une autre norme internationale qui existe. À l'heure actuelle cela ne fait pas partie de leur pratique, et nous les encouragerons à le faire.

De plus, nous proposons que la SEE tienne immédiatement des consultations publiques sur son cadre de référence. Même si divers groupes ont fait connaître leur avis sur les questions qui devaient en faire partie, ce cadre n'a jamais fait l'objet de consultation, et je pense que ce serait une entreprise vraiment profitable.

Pour terminer, j'aimerais simplement souligner une fois de plus que la SEE est à la remorque du secteur privé. Même si dans un témoignage précédant devant ce comité, la SEE a insisté sur le fait qu'elle répondait aux besoins des Canadiens, je considère qu'il s'agit d'une façon très étroite d'évaluer le rendement, parce qu'en fait ce qu'elle dit, c'est qu'elle répond aux besoins d'un certain nombre de ses clients. Je pense qu'il serait bon qu'elle examine la satisfaction des principaux intéressés et essaie d'évaluer elle-même comment elle répond aux besoins des collectivités touchées et aux préoccupations des groupes environnementaux, et de déterminer comment elle peut répondre aux besoins de ces intéressés en plus de répondre à ceux de certains de ses clients.

C'est tout ce que j'avais à dire, et je demeure à votre disposition pour répondre à vos questions. Merci.

Le président: Merci, madame Whiteman; nous vous en sommes reconnaissants.

Représentant Mines Alerte Canada, madame Kuyek.

Mme Joan Kuyek (coordinatrice nationale, Mines Alerte Canada): Je vous remercie de me donner l'occasion de m'adresser au comité aujourd'hui.

Je m'appelle Joan Kuyek, et je suis la coordonnatrice nationale d'un nouvel organisme pancanadien appelé Mines Alerte Canada, lequel jouit du soutien d'organisations environnementales, sociales, juridiques, autochtones et syndicales des quatre coins du pays. La création de notre organisme découle du besoin urgent de coordonner la réaction du grand public face aux menaces qui pèsent sur la santé publique, la qualité de l'air et de l'eau, l'habitat du poisson et de la faune, de même que sur les intérêts communautaires en raison des politiques et pratiques minérales irresponsables en vigueur tant au Canada que dans le reste du monde.

Les membres fondateurs de Mines Alerte Canada sont le Environmental Mining Council of British Columbia, la Fédération canadienne de la nature, l'Association canadienne du droit de l'environnement, North Watch, la Nation innue, la Yukon Conservation Society, le Comité canadien des ressources arctiques, et Inter Pares. Nous sommes petits, mais nous avons de larges appuis.

Les collectivités et les organisations non gouvernementales qui s'intéressent à l'exploitation minière effectuée à l'étranger pas des sociétés canadiennes ont attiré notre attention sur la Société pour l'expansion des exportations. Elles veulent savoir quel rôle jouent les institutions canadiennes, qui perpétuent le problème qu'elles doivent surmonter, et ce que font les citoyens canadiens pour les aider.

• 1055

Le principal marché pour les macarons «Keep Mining in Canada» de l'Association minière, ce sont les gens à qui nous nous adressons à l'extérieur du pays.

Le 19 août 1995, la doublure du bassin de résidus miniers s'est déchirée sur 200 mètres à la mine d'or Omai au Guyana. Le bassin était rempli de résidus cyanurés. En quelques secondes, des millions de mètres cubes d'effluents ce sont déversés dans la rivière Omai qui coule à proximité. Ils ont été charriés jusqu'à la rivière Essequibo, le principal cours d'eau du Guyana, détruisant les pêcheries, empoisonnant les résidents et modifiant à jamais leur mode de vie. Cette mine appartient à des Canadiens, le gouvernement guyanais n'ayant que 5 p. 100 des parts. Plusieurs mois avant le déversement, un géologue a sonné l'alarme. Le barrage fuyait depuis sa construction.

La mine a été rouverte en 1996, et on dit qu'elle n'est toujours pas sûre. Aucune indemnité ne pourra compenser les pertes subies. Dans une lette datée du 19 août 1999 et adressée au président de Cambior, Louis Gignac, la population d'Essequibo disait ceci:

    Notre rivière auparavant intacte dans la forêt pluviale du Guyana, qui selon les scientistes constitue la plus grande région de forêt pluviale toujours vierge en Amérique du Sud, est maintenant polluée. Nous avons appris que certains des produits chimiques toxiques que votre mine déverse dans notre cours d'eau vont demeurer dans l'environnement pendant des centaines d'années.

En 1992, la SEE a émis une assurance-risque politique de 163 millions de dollars à Cambior pour cette mine. L'assurance-risque politique est une invention très intéressante.

Au Canada, il est interdit de rejeter des résidus miniers dans un cours d'eau. Néanmoins, la SEE a dernièrement garanti un prêt consortial de 29,6 millions de dollars de l'Union de banques de la Suisse à des investisseurs dans la mine aurifère Lihir en Papouasie, Nouvelle-Guinée. Ce projet appartient à Lihir Gold Limited. C'est l'un des plus vastes projets d'exploitation aurifère dans le monde, sur une île située à proximité d'une barrière de corail vierge. L'or se trouve dans un volcan géothermiquement actif. Pour l'extraire, il faudra abaisser la nappe aquifère, utiliser l'eau de mer pour refroidir le minerai ardent, et rejeter l'eau dans l'environnement marin, ceci, à moins de 100 mètres de la côte à partir d'un puits qui pourrait atteindre 300 mètres en dessous du niveau de la mer. On s'attend à ce que la mine soit exploitée pendant 15 ans, mais les stériles et les résidus, soit 400 millions de tonnes, seront rejetés directement dans l'océan.

Même la compagnie reconnaît que l'eau d'exhaure, l'eau géothermique et le lixiviat provenant du dépôt du minerai vont détruire 7 km de barrière de corail, ainsi qu'une principale zone de nidification de la sauvagine mélanésienne. L'OPIC américain a refusé de soutenir le projet, estimant qu'il viole les conventions internationales interdisant le rejet de résidus dans la mer. J'ignore pourquoi le Canada n'a pas fait de même.

Parmi les projets qui ont bénéficié de l'appui de la SEE, il y a eu certaines des catastrophes minières les plus graves au monde. L'exploitation minière comporte un degré de risque très élevé. Le risque existe non seulement pour les investisseurs, mais pour les localités et les écosystèmes où elle se fait. Il faut avoir l'assurance que le projet minier ne causera pas des torts irréparables à l'environnement. La mine en tant que telle dure rarement plus de 20 ans, mais les habitants et les terres sont là pour toujours. Ces préoccupations sont d'autant plus sérieuses que la performance réelle de l'industrie minière est souvent loin de ses prévisions de départ optimistes quant à sa compétence technique. Une grande mine, même si elle est relativement propre, peut perturber l'équilibre d'un écosystème fragile dont les indigènes dépendent pour leur survie.

La construction d'infrastructures routières peut avoir des effets secondaires en raison, par exemple, d'un accroissement des activités agricoles et forestières, et pendant le temps où la mine est en activité, les effets de la pollution indirecte sont une préoccupation. L'extraction et la préparation du minerai consomme des quantités énormes d'eau et d'énergie, et dans les deux cas les effets se font sentir sur l'environnement.

Certains procédés d'extraction, comme la lixiviation par cyanuration, sont très dangereux, mais ce qui doit surtout retenir l'attention, ce sont les fermetures de mine. Tout dépendant de la qualité du minerai et du procédé d'extraction, la gangue stérile peut représenter jusqu'à 99 p. 100 de la roche qui est extraite, et les surfaces rocheuses qui sont exposées à l'air et à l'eau s'oxydent de sorte que l'eau qui s'en écoule devient acide. L'eau acide dissout les métaux lourds qui sont rejetés avec la roche stérile et les emporte dans les cours d'eau, les aquifères et les lacs, emportant aussi d'autres métaux lourds. Le problème ne se manifeste généralement que bien des années après la fermeture de la mine et peut durer des centaines d'années.

Le drainage minier acide est le plus important problème environnemental pour l'industrie minière et celui qui grève le plus son budget. C'est ce qui coûte le plus cher, mais les dépenses à ce chapitre figurent rarement sur les comptes de la société minière. Il ne suffit pas de faire faire une évaluation environnementale avant la mise en oeuvre du projet. Il faut effectuer des évaluations environnementales de façon systématique et mesurable et, dans le cas de projets où elle a un intérêt financier important, la SEE doit être en mesure d'intervenir et d'obliger la société minière à apporter des améliorations avant qu'il ne se produise une catastrophe.

• 1100

L'évaluation des projets miniers doit notamment permettre de s'assurer qu'il existe une garantie financière suffisante pour couvrir le coût d'un éventuel accident ou encore de toute réclamation ou indemnité devant être payée au moment de la fermeture de la mine.

En 1982, la SEE a prêté 1,36 million de dollars à Placer Dome pour sa mine Marcopper dans la petite île de Marinduque, dans les Philippines. Entre 1975 et 1991, Marcopper a déversé plus de 200 millions de tonnes métriques de résidus de sa mine du mont Taipan dans les eaux peu profondes et riches en corail de la baie de Calancan. Les 12 000 pêcheurs ainsi que leurs familles pour qui la baie était la principale source de nourriture sont catastrophés par sa contamination. À cause du déclin de la pêche et de la baisse de revenus qui en découle, certains villageois n'ont plus les moyens d'acheter du riz, et certains sont tombés malades après avoir mangé des fruits de mer ou des poissons pris dans la baie.

Une étude réalisée en 1997 est venue confirmer les pires craintes des villageois. Une équipe médicale de l'université des Philippines et le ministère de la Santé des Philippines ont constaté un niveau de mercure et de plomb élevé dans le sang des enfants de la région avoisinant la baie de Calancan. Les enfants intoxiqués par le plomb sont emmenés par avion à Manille pour y être traités.

Les problèmes des gens de Marinduque ne s'arrêtent pas là. En 1992, Marcopper a commencé à déverser ses résidus dans le puits de mine du mont Taipan dont elle avait extrait tout le minerai qu'elle pouvait en extraire. Le 24 mars 1996, un tunnel creusé sous le puits s'est effondré et, au cours des quelques semaines qui ont suivi, plus de deux millions de mètres cube de résidus se sont écoulés par le tunnel jusqu'aux rivières Makulit et Boac. Au moins 20 000 personnes ont été touchées par ce déversement.

D'après les enquêteurs des Nations Unies, Marcopper n'a pas su assurer une bonne gestion à sa mine. Les résidents locaux n'ont toujours pas été indemnisés, et Placer Dome refuse d'accepter la responsabilité financière de la remise en état du site, en dépit d'une décision d'un tribunal philippin qui l'a trouvé responsable.

Il est dans l'intérêt de la SEE de publier des informations sur les projets, les gouvernements et les entreprises qu'elle appuie, si ce n'est pour d'autres raisons que d'éviter d'être blâmée pour avoir refusé certains projets.

Le public canadien a le droit de savoir ce qu'on fait de son argent et de sa réputation.

Je vous remercie beaucoup de cette occasion qui m'a été donnée de vous présenter mon témoignage, et j'espère que les exemples que j'ai évoqués vous seront utiles.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.

Nous accueillons maintenant, de Probe International, Patricia Adams.

Mme Patricia Adams (chef de la direction, Probe International): Merci, madame la présidente. Je m'appelle Patricia Adams, et je suis chef de la direction de Probe International. Nous sommes un groupe de recherches sur les questions d'intérêt public qui a son siège à Toronto, et nous suivons depuis plus de 20 ans les effets sociaux, environnementaux et financiers de l'action de la Société pour l'expansion des exportations. Nos recherches sur la SEE sont sans doute plus exhaustives que celles de n'importe quel autre groupe indépendant au pays. Nous publions les résultats de ces recherches dans des livres, dans des articles, dans les principaux journaux canadiens et dans des magazines.

J'ai déposé auprès du comité certains des documents que nous avons ainsi publiés. Nous comptons 20 000 adeptes dans tout le Canada, dont beaucoup ont écrit des lettres aux divers premiers ministres qui se sont succédé au fil des ans, aux ministres du Commerce international ainsi qu'à leurs députés pour leur faire part de leurs préoccupations au sujet des activités coûteuses et dommageables de la SEE.

Nous participons également à l'étude en cours et nous avons transmis au ministre du Commerce international nos observations sur le rapport Gowlings. Selon nous, la SEE présente des problèmes fondamentaux dont il n'est pas du tout question dans les recommandations du rapport Gowlings.

La Société pour l'expansion des exportations transfère au secteur public les risques privés d'entreprises internationales. En socialisant ces risques, elle engendre un aléa de moralité, permettant à des entreprises de réaliser des exportations, des investissements et des projets non rentables.

La SEE court-circuite des messages importants que le marché transmettait normalement aux gouvernements qui bénéficient de ses largesses, messages les encourageant à bien gérer les affaires de l'État et à se conformer à la primauté du droit pour ne pas éloigner les entreprises soucieuses d'honnêteté. La SEE a ainsi servi de bailleur de fonds à de mauvais gouvernements qui agissent à l'encontre de l'intérêt de leur peuple et donner naissance au néocapitalisme.

Profitant de l'accès privilégié qu'elle a aux fonds publics pour consentir des prêts ainsi que des avantages fiscaux et réglementaires dont elle jouit, la SEE finance et assure la réalisation de projets rentables que le secteur privé aurait financé en son absence, puis se sert des bénéfices qu'elle réalise ainsi comme d'une manne lui permettant de financer les projets qui sont tombés dans l'oeil des politiciens que ce soit ici ou sur les nouveaux marchés.

Il s'agit de projets que le secteur privé refuse d'appuyer par prudence. Comme elle n'est pas soumise à la Loi sur l'accès à l'information, les activités de la SEE sont à l'abri de tout examen public. En l'absence d'un droit de regard du public ou d'une discipline imposée par le marché, les activités de la SEE favorisent à souhait la corruption et les activités commerciales qui détruisent l'environnement, qui font sombrer les habitants des pays du tiers monde et de l'Europe de l'Ouest dans l'endettement et qui coûte de l'argent aux contribuables canadiens.

• 1105

Probe International est d'accord avec le doyen de l'école de gestion de Yale, Jeffrey Garten, et avec le magazine The Economist. Les deux soutiennent que les gouvernements devraient se retirer complètement du secteur du crédit à l'exportation et disent que le marché à été corrompu par leur présence dans ce secteur.

Un vif débat est en cours, à l'échelle tant nationale qu'internationale, qui met en doute l'objet même de la politique gouvernementale que sont censées servir les agences de crédit à l'exportation en général et la SEE en particulier. Les auteurs du rapport Gowlings n'ont tout simplement pas tenu compte de ce débat, sans même se donner la peine d'expliquer pourquoi. À notre avis, le rapport Gowlings témoigne d'un parti pris favorable à l'endroit de ceux qui souhaitent maintenir le statut privilégié de la SEE, à savoir une poignée de grandes sociétés très visibles et influentes sur le plan politique qui sont à la merci des subventions gouvernementales, écartant du revers de la main l'idée que les activités rentables de la SEE devraient être privatisées et que son rôle de prêteur de dernier recours pour financer des entreprises à risques élevés soit supprimé.

Voici quelques-unes seulement des principales lacunes du rapport Gowlings. Le groupe Gowlings a entendu des arguments très clairs et très convaincants de la part du secteur des assurances qui souhaitait voir la SEE se retirer du secteur de l'assurance-crédit. Le groupe Gowlings a plutôt recommander de mettre en place, et ce, pour une période indéfinie, une espèce de dictature du secteur des assurances, par laquelle la SEE et le secteur privé produiraient une seule police d'assurance-crédit. Dans les faits, il s'agirait d'un cartel des secteurs public et privé créé, comme le dit le groupe Gowlings, «afin de développer le marché [et de] créer la capacité du secteur privé canadien».

Pour faire taire les banques qui se plaignent de ce que la SEE leur enlève leur clientèle, le groupe Gowlings a recommandé également que le gouvernement transfère le risque privé au trésor public au moyen de garanties qui récompenseraient les banques privée qui participeraient à des opérations commerciales officiellement sanctionnées. Cette collusion des secteurs public et privés en vue de créer un cartel, cette socialisation des risques du secteur privé, cette aide sociale en faveur des sociétés, cette pratique consistant à acheter le silence des adversaires à même les fonds publics sont offensantes pour les contribuables et dommageables pour l'économie canadienne.

Bien que je sois en désaccord sur nombre des recommandations du rapport Gowlings, je me dois de louanger le rapport Gowlings pour une contribution très importante au débat sur la justification de l'existence de la SEE. Le rapport Gowlings dissipe, peut-être par inadvertance, le mythe que la SEE s'efforce depuis longtemps d'entretenir, à savoir qu'elle est une entreprise commercialement viable et autosuffisante.

La SEE finance ses activités à des taux préférentiels alimentés par la bonne foi et le crédit des contribuables. Elle ne verse pas d'impôts au gouvernement ni de dividendes à des actionnaires et elle n'a pas à obtenir de réassurance ou à respecter les mêmes règles que celles qui régissent le secteur privé. Le rapport Gowlings reconnaissait que ces avantages financiers confèrent vraisemblablement à la SEE, grâce à son statut de société de la Couronne, «un avantage compétitif» sur ses concurrents du secteur privé.

Le rapport Gowlings confirmait également que la SEE devait prospecter le secteur rentable des services financiers privés, tant les banques que les assurances, pour financer les projets commercialement non viables et à haut risque. Ces projets à haut risque, connus sous le doux euphémisme d'activités de bailleur de derniers recours, représentent environ 70 p. 100 des activités de la SEE. Le rapport Gowlings ajoutait:

    En bref, sans activité commerciale de qualité pour compenser ces activités à haut risque, il faudrait à la SEE beaucoup plus de capitaux, en plus de crédits gouvernementaux annuels.

C'est extrêmement important. En effet, le rapport Gowlings admettait que sans ces avantages la SEE aurait été dans l'incapacité de financer la vente réacteurs CANDU à l'Europe de l'Est et à des pays du tiers monde, le barrage des Trois-Gorges, en Chine, le projet hydroélectrique Urrb, en Colombie, et l'exploitation de mines d'or en Guyane et au Kirgizstan. Elle n'aurait pas pu non plus éviter la colère annuelle des contribuables.

• 1110

Cette notion de SEE institution commercialement viable est une sombre plaisanterie.

Enfin, permettez-moi de dire un mot sur la question de la divulgation et des comptes rendus. L'exonération de la SEE de la Loi sur l'accès à l'information donne à celle-ci le pouvoir de cacher ses activités et les obligations financières qu'elle créée au nom des contribuables. La recommandation du rapport Gowlings réclamant que la SEE publie une liste des projets qu'elle finance ne fait que restaurer ce qui était une pratique standard en 1983 lorsque la SEE annexait à son rapport annuel une analyse statistique qui incluait tous les détails que le rapport Gowlings recommande de publier.

C'est totalement inacceptable. Le public veut en savoir beaucoup plus. Tant que la SEE ne sera pas assujettie à la Loi sur l'accès à l'information, nous n'aurons pas la possibilité de déterminer, par exemple, si le portefeuille de la SEE est suffisamment diversifié pour protéger les contribuables. Pas plus que nous ne pourrons confirmer les preuves anecdotiques qu'un nombre relativement minime de grosses compagnies se partagent la part du lion du financement de la SEE.

Nous ne pourrons analyser quelle partie des activités de la SEE en subventionne d'autres. Nous ne saurons pas si la SEE respecte les règles et les règlements énoncés par le Bureau du surintendant des institutions financières et la Banque des règlements internationaux. Nous ne saurons pas quels projets d'exportations et d'investissements étrangers la SEE envisage de financer, comme nous le savons pour la Banque mondiale. Nous ne saurons pas non plus quelles sont les pertes de la SEE.

En 1990, j'ai écrit à Robert Richardson, qui était alors président de la SEE, lui demandant des détails sur le rééchelonnement par le Club de Paris du prêt de la SEE à l'Argentine pour le réacteur CANDU. Il m'a répondu que ces renseignements étaient confidentiels. Simultanément, j'ai écrit pratiquement la même lettre à la Banque Import-Export des États-Unis, lui demandant les détails de son prêt aux Philippines pour la centrale nucléaire de Bataan. Elle m'a répondu diligemment en me fournissant les détails du prêt initial et les chiffres des accords de rééchelonnement plus un calendrier de remboursement.

L'honorable Paul Martin refuse de me dire combien d'argent les contribuables canadiens ont donné à la SEE, après que celle-ci eut radié des créances douteuses d'un certain nombre de pays du tiers monde et de l'Europe de l'Est. D'après mes calculs—et je fonde ce chiffre sur l'analyse de l'historique de la SEE et de ses rapports annuels—depuis 1990, les contribuables ont versé à la SEE près de 700 millions de dollars pour radier les dettes de pays tels que le Zaire, le Bénin, le Cameroun, la République du Congo, la Guyane et la Côte d'Ivoire.

Aucune autorité publique ne prend fait et cause pour le droit de regard du public sur les activités de la SEE. Tous les cinq ans le vérificateur général soumet la SEE à un examen spécial et rédige un rapport en conséquence. C'est une analyse de la rentabilité et de l'efficacité des activités de la SEE.

L'année dernière, j'ai demandé au Bureau du vérificateur général une copie de son rapport d'examen spécial sur la SEE de 1994. Le Bureau du vérificateur général m'a répondu qu'il n'était pas autorisé à le divulguer et m'a dit de m'adresser à la SEE. C'est ce que j'ai fait. La SEE a refusé au motif qu'elle était une entreprise privée. J'ai alors fait une demande au nom de l'accès à l'information au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Une recherche exhaustive dans les dossiers n'a pas permis de trouver une copie. Le rapport de 1994 avait été communiqué au conseil d'administration de la SEE, mais jamais au ministre du Commerce international.

Il y a deux semaines, j'ai demandé à la SEE de me communiquer le rapport d'examen spécial de 1999 du vérificateur général, et de nouveau cela m'a été refusé au motif que l'examinateur, le vérificateur général, n'avait pas requis que ce rapport soit communiqué au Parlement. Il demeure donc, lui aussi, confidentiel.

Le statu quo est un affront pour notre démocratie. Ceux d'entre nous qui suivent depuis des années la SEE savent et ont pu constater qu'elle n'exerce pas de diligence raisonnable et se soumet aux pressions politiques. La SEE a financé le barrage des Trois-Gorges en Chine simplement parce que le premier ministre, M. Chrétien, lui a dit de le faire à la veille du premier voyage d'Équipe Canada en Chine.

Le barrage des Trois-Gorges est un désastre potentiel tant sur le plan environnemental que sur le plan humain et pourrait très bien devenir l'éléphant blanc le plus notoire du monde. Tout comme un autre barrage qui n'a pas de clients pour une grande partie de son électricité, les Trois-Gorges auront du mal à trouver des clients. À 8c. le kw/h, son électricité sera au moins deux fois aussi cher que celle produite par les turbines super-efficientes à gaz, qui sont également plus propres, plus efficaces et plus facilement réalisables. Le barrage des Trois-Gorges est un produit typiquement canadien. Aucun financier étranger, public ou privé, n'aurait financé ce barrage sans le coup de pouce de départ de la SEE. Le barrage des Trois-Gorges hypothéquera la réputation des Canadiens pendant des générations.

• 1115

Chaque fois que je fais des recherches sur la SEE, l'expression que j'entends le plus fréquemment utiliser par les fonctionnaires de l'industrie, par les clients de la SEE, et même par d'anciens employés, pour la décrire, c'est: la caisse noire du gouvernement. Malgré les efforts désespérés de la SEE pour se peindre sous une autre couleur, c'est ce que pense aussi un nombre croissant de Canadiens.

Votre comité a la responsabilité de défendre les intérêts des citoyens de ce pays. Beaucoup trop d'activités de la SEE sont moralement condamnables, écologiquement insoutenables et financièrement absurdes. Le Parlement devrait remplir ses obligations envers le pays et démanteler, de manière ordonnée, la SEE.

Merci.

Le président: Merci beaucoup.

Cela met un terme à notre longue liste de témoins. Nous passons maintenant aux questions.

Monsieur Rocheleau.

[Français]

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): J'ai deux questions à l'intention de M. Allmand, un peu dans la veine des propos de Mme Adams. On parle beaucoup, comme c'est le cas ce matin, de la responsabilité sociale de la SEE et, par conséquent, des entreprises. Que faut-il penser de ce point de vue, que je partage, devant l'argument invoquant que si le Canada est le seul à le faire, il se discrédite lui-même? Les règles du jeu sur le plan international font que les préoccupations de ce côté, sauf exception, sont rares. Donc, si le Canada adopte une telle position, il diminue sa propre capacité concurrentielle. C'est là ma première question. Que peut-on répondre à cela, d'après vous?

En voici une deuxième. On entend de nombreuses critiques sur le manque de transparence du fonctionnement de la SEE. En tant qu'ex-parlementaire chevronné, vous devez avoir côtoyé ces gens-là. On l'a d'ailleurs senti ici, quand j'ai demandé si on avait la ventilation par province des entreprises encouragées par la SEE dans une relation d'affaires; on m'a immédiatement déclaré que c'était d'ordre confidentiel. Pourtant, ce n'est pas un point si délicat. Comment expliquez-vous, compte tenu de votre expérience, que la SEE soit si cachottière?

M. Warren Allmand: Je traiterai de la deuxième question en premier. J'ai toujours proposé des amendements visant à inclure dans la loi la Société pour l'expansion des exportations. Comme l'ont déjà expliqué plusieurs témoins ce matin, aux États-Unis, on peut encore avoir un système d'aide aux investissements et faire plus ou moins le même genre de travail si on se conforme à des modalités concernant la formation et la transparence.

Si je comprends bien la première question, c'est plus ou moins la même chose. Nous n'avons pas envisagé de faire la même recommandation que celle de Mme Adams concernant l'abolition. Je ne suis pas contre cette recommandation, mais nous ne l'avons pas envisagée. Nous avons fait des propositions en vue d'assujettir la SEE à la Loi sur l'accès à l'information et à la transparence et aussi d'exiger que les contrats respectent les conventions internationales du travail et des droits de la personne.

Par exemple, nous ne demandons pas que les autres pays, dans ces contrats, respectent les normes canadiennes, mais les normes internationales incluses dans les grandes conventions sur les droits de la personne, sur les droits économiques, socioculturels, civils et politiques que ces pays, qui sont au nombre de 140 à l'heure actuelle, ont ratifiées.

• 1120

Nous demandons simplement qu'on reconnaisse et qu'on mette en vigueur ces droits, celui du travail et ceux de la personne, qui sont reconnus sur le plan international. Par exemple, les sociétés faisant affaire au Canada doivent respecter la Charte des droits et libertés. Pourquoi, sur le marché international, pourrait-on oublier totalement les lois sur l'environnement et les conventions sur les droits de la personne?

M. Yves Rocheleau: D'après vous, est-ce que les autres pays respectent ces conventions?

M. Warren Allmand: Pas tous les autres pays, mais...

M. Yves Rocheleau: Alors, c'est le Canada qui devient délinquant.

M. Warren Allmand: Oui, le Canada se rend délinquant avec d'autres. Ce qui concerne tous les pays d'Europe ne m'est pas très familier. Peut-être d'autres témoins ici peuvent-ils répondre. Nous avons donné ce matin des exemples relatifs au plus grand acteur dont la situation est meilleure que la nôtre au Canada. Mme Whiteman a même dit que les normes de la Banque mondiale étaient plus efficaces et plus exigeantes que celles de la SEE du Canada. Il y a donc beaucoup d'exemples où les autres pays, pas tous, mais... Peut-être d'autres personnes qui sont ici pourraient-elles vous donner d'autres exemples.

M. Yves Rocheleau: Cela m'apparaît fondamental. Est-ce qu'on doit exiger plus du Canada que des autres ou si c'est le Canada qui est délinquant en rapport avec les traités qu'il a lui-même signés?

[Traduction]

M. Warren Allmand: Je ne sais pas si vous avez compris. Ils veulent d'autres exemples que celui des États-Unis, qui respectent des normes plus élevées que celles de la SEE.

Le président: Je crois que la question de M. Rocheleau concernait également les cas où nous ne respectons pas les normes internationales que nous avons nous-mêmes ratifiées. Je crois que vous-même ou Mme Nowlan ou quelqu'un d'autre avez mentionné le fait que nous ne respectons pas tout à fait certains traités; nous avons des obligations et nous ne faisons pas en sorte que la SEE...

[Français]

M. Warren Allmand: Il est difficile de connaître tous les cas si ces sociétés ne sont pas soumises à la Loi sur l'accès à l'information. Nous avons essayé de trouver des exemples, mais ce n'est pas toujours possible parce que tout est caché.

[Traduction]

Le président: Je vois. Y a-t-il d'autres commentaires?

Oui, madame Whiteman.

Mme Gail Whiteman: En plus de la Banque mondiale, par exemple, je crois que la Banque européenne pour la reconstruction et le développement est un excellent exemple d'approche très sophistiquée de l'évaluation des impacts sur l'environnement, et nous aussi encourageons la SEE à s'intéresser à ce que fait cette banque. Un de ses services a pour unique mission de s'occuper des évaluations de l'impact environnemental, ce qui n'existe pas à la SEE. C'est donc un exemple de ces autres normes auxquelles la SEE pourrait s'intéresser, parce qu'elles sont largement supérieures aux siennes.

Linda, vous voulez dire un mot sur les traités signés par le Canada que la SEE ne respecte pas?

Mme Linda Nowlan: Encore une fois, il est très difficile de citer des exemples, car une grande partie de ces informations sont confidentielles. Joan a donné l'exemple d'un projet minier aux Philippines qui ne respectait pas la Convention du droit de la mer, qui interdit les rejets en milieu marin.

La liste des traités auxquels, à mon avis, le Canada n'accorde habituellement pas suffisamment d'attention ou qu'il ne met pas en oeuvre comme il se doit est bien longue et inclut entre autres choses la Convention sur le changement climatique. Nous établissons des limites d'émissions, pourtant nous n'en imposons pas aux projets dont la SEE fait la promotion à l'étranger, ce qui va tout à fait à l'encontre de ce que préconise la Convention sur le changement climatique. De la même manière, la Convention sur la biodiversité contient tout un ensemble de dispositions—comme l'interdiction de réaliser des mégaprojets dans des zones protégées. Je ne crois pas que la SEE ait des obligations similaires. Je ne peux pas soumettre d'exemple de projet, mais je suppose que l'exemple de la Colombie que Kimy a cité se trouve probablement à proximité d'une zone protégée, sinon à l'intérieur d'une telle zone.

Il existe tout un ensemble de conventions internationales qui reposent sur la participation du public. Toute convention moderne portant sur l'environnement et les droits de la personne exige la participation du public, ce dont ne tient manifestement pas compte la SEE.

Mme Gail Whiteman: Si vous me permettez de revenir brièvement sur l'exemple de la Colombie, l'une des choses que prévoir le cadre d'examen environnemental de la SEE, c'est que les clients doivent respecter les lois du pays hôte. Nous dirions que c'est loin d'être suffisant. Mais, en fait, en ce qui concerne la Colombie, ce pays a ratifié la Convention 169 de l'OIT et a des lois exigeant une consultation préalable des peuples autochtones en ce qui concerne les projets à réaliser. Il est bien clair que dans ce cas il n'y a pas eu consultation.

• 1125

Le président: À ce propos, ce que la SEE dit au sujet de la Colombie révèle que c'est environ 2,5 p. 100 du total, et qu'en réalité le responsable c'était la Banque nordique d'investissement. Pensez-vous qu'on puisse dire que si nous sommes un petit intervenant, nous pouvons compter sur le principal prêteur pour avoir l'assurance que les conditions sont respectées? C'est souvent le cas quand on accorde des prêts syndiqués; il y a un prêteur principal. À mon avis, la Banque nordique d'investissement dit que nous avons là-bas quelqu'un que nous avons toujours admiré, dont les politiques sont encore plus irréprochables que les nôtres. Quand je vois ce nom, je me dis qu'on peut supposer qu'il y a là-bas une certaine forme de surveillance, ce qui serait une bonne chose quand on est un petit intervenant. Il me semble que c'est ce qui est implicite dans leur lettre. Est-ce une vision réaliste?

Mme Gail Whiteman: Je pense bien sûr que la SEE ne peut pas tout surveiller; elle peut toutefois demander des rapports de surveillance et les rendre publics, mais on ne l'a pas fait.

Le président: Monsieur Freeman, puis Pamela.

M. Aaron Freeman: Il faut certainement, et du reste le groupe de travail l'a bien mentionné, concevoir des normes internationales cohérentes dans tous les secteurs dont nous parlons. Je crois que les normes internationales les plus strictes qui existent maintenant sont celles de la Banque mondiale. Les agences de cette dernière s'y conforment. S'y conforment également les organismes américains de crédit à l'exportation.

Vous avez parlé des gros intervenants. Ce sont les gros intervenants. Autre chose à souligner, c'est que la SEE elle-même a souvent déclaré que d'autres organismes de crédit à l'exportation se tournent vers elle pour assurer un leadership. On a dit à de nombreuses reprises. Récemment—en septembre—la SEE a tenu une réunion avec tous les organismes internationaux de crédit à l'exportation pour débattre de l'évaluation environnementale. Selon la SEE, si le Canada a été choisi pour cette réunion, c'est que de nombreux pays attendent d'elle qu'elle assure un leadership dans ce domaine. C'est l'occasion pour nous de promouvoir des normes élevées plutôt que l'abaissement des normes.

Le président: Madame Adams.

Mme Patricia Adams: J'aimerais traiter de trois points qui ont été soulevés. D'abord, la réduction de la compétitivité canadienne. Il me semble important de comprendre que la concurrence est celle que se livrent les contribuables d'un pays par rapport à ceux d'un autre. Il ne s'agit pas d'une concurrence où des sociétés ont à offrir un produit d'une qualité supérieure à celle du produit offert par un autre pays. C'est une concurrence entre contribuables. Il me semble donc qu'il y a alors lieu de se demander si l'on veut créer ce genre d'emplois, car il s'agit là d'emplois très coûteux, et je pense que l'argent serait plus utilement dépensé s'il ne transitait pas par la Société pour l'expansion des exportations.

L'autre question qu'on a soulevée, c'est pourquoi se montre-t-on si discret? Je pense qu'il y a à cela deux raisons. L'une d'elles a été mentionnée. Si les ONG savaient ce qu'il en est des activités de la SEE, elles pourraient dénoncer les violations des traités, par exemple. C'est donc dans son intérêt de garder ces renseignements secrets. En outre, je crois qu'il est important pour eux, face à divers tribunaux commerciaux, de garder l'information secrète, parce que, comme l'a révélé l'enquête de l'OMC, il se peut que des subventions illégales soient versées par la SEE dans le compte du Canada à divers exportateurs dans ce pays.

En outre, à propos du fait d'être un petit participant, le Canada a souscrit quelque 230 millions de dollars pour le barrage des Trois-Gorges; cela coûtera probablement 55 milliards de dollars. Bien que nous soyons un petit participant à ce barrage, nous avons une très grande influence.

Le président: Très intéressant. Merci beaucoup.

La parole est à Mme Augustine.

Mme Jean Augustine (Etobicoke—Lakeshore, Lib.): Merci, monsieur le président. Je me réjouis vraiment des exposés que j'ai entendus aujourd'hui, car certaines des questions que nous avions posées à la dernière comparution des représentants de la SEE ont trouvé réponse dans certaines des déclarations qui ont été faites aujourd'hui. Au sujet des questions que nous avons posées relativement aux lois sur le travail, aux lois environnementales et aux droits de la personne, la SEE a répondu qu'on respectait les politiques des Affaires étrangères et qu'en dehors de cela on ne s'occupait pas de politique. C'est vraiment ce que j'ai retenu des diverses réponses fournies. D'après les critiques que vous avez formulées ce matin, il me semble que les politiques ne sont pas uniformément appliquées, et je me demande par quel genre de processus ou de quelle manière nous pourrions appliquer toutes ces directives que vous proposez en ce qui concerne notamment l'environnement et les droits de l'homme.

• 1130

À votre avis, comment pourrait-on le faire dans une organisation comme la SEE, qui a un conseil d'administration? Envisageriez-vous un changement à ce conseil? Pensez-vous qu'il faudrait restructurer l'administration? Comment croyez-vous que vos recommandations pourraient être élargies ou mises en oeuvre si nous voulons concrétiser certaines des propositions que vous faites?

J'espère avoir été claire, monsieur le président.

Le président: Vous l'êtes toujours. Quoi qu'il en soit, votre intervention suscitera certainement une riposte.

M. Warren Allmand: Modifiez la loi. On a recommandé que vous recommandiez de modifier la Loi sur l'accès à l'information pour qu'elle s'applique à la SEE. C'est une chose. Le Parlement peut modifier les lois pour exiger que dans les contrats que finance la SEE on exige la conformité aux normes internationales en matières de droits de la personne.

D'autres ont suggéré la même chose en ce qui a trait à l'environnement, soit que dans l'évaluation des risques politiques on tienne compte du respect ou du non-respect des droits de la personne, parce qu'à la longue ces facteurs ont une incidence sur le monde des affaires.

Voilà des recommandations que nous espérons vous voir présenter, puis mettre en oeuvre. En outre, nous avons recommandé qu'on dresse la liste des pays n'ayant plus droit à un soutien public en matière de commerce et d'investissement, liste que devraient respecter la SEE, l'ACDI et les missions d'Équipe Canada. C'est une autre chose qu'on pourrait faire. Ce qu'on a déjà fait pour certains pays. Je me rappelle qu'on avait interdit l'aide étrangère, l'aide bilatérale, dans le cas du Salvador au pire moment des violations des droits de la personne. On l'a aussi fait dans le cas de l'Afrique du Sud. Il devrait y avoir une liste des pays aux comportements si répréhensibles qu'on ne leur accorde aucun soutien, ni commercial ni financier.

M. Aaron Freeman: Pour faire suite aux suggestions de M. Allmand, je dirais que nous avons entendu des représentants du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international et de la Société pour l'expansion des exportations, et nous les avons tous entendus dire qu'ils agissent conformément à la politique étrangère du Canada. Ce que je demanderais à la SEE à sa prochaine comparution, c'est de nous montrer l'argent. Quels sont les mécanismes qu'on emploie pour s'assurer que les politiques de la SEE sont conformes à celles du gouvernement du Canada? Il n'y en a aucune. Elles ne sont inscrites nulle part.

Nous tapons constamment sur ce clou, mais comme il n'y a aucune transparence nous ne pouvons pas savoir. Il n'y a aucun moyen pour nous de savoir quelles sont ces politiques ni comment la SEE est censée agir en conformité avec les politiques du gouvernement du Canada.

Nous avons une série de recommandations. Je vous demanderais instamment d'en examiner le résumé, qui comporte essentiellement trois types de recommandations. Il y a d'abord des modifications que nous apporterions à la Loi sur l'expansion les exportations; il s'agit notamment d'assurer la cohérence de la politique étrangère du Canada en matière de droits de la personne, d'environnement, et des autres sujets dont nous avons traité, et cela serait inscrit dans le mandat de la SEE. On l'a déjà fait dans le cas des organismes américains de crédit à l'exportation.

Nous avons également une série de recommandations portant sur des changements de politiques à la Société pour l'expansion des exportations. Il y est question d'un bon nombre des obligations de transparence que nous avons mentionnées tout au long de la journée, ainsi que de recommandations au gouvernement du Canada, notamment d'assujettir la SEE à la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale et à la Loi sur l'accès à l'information.

Nous avons aussi besoin de mécanismes indépendants de révision des comptes, comme un protecteur des droits du citoyen. Encore là, il y a déjà des précédents dans des organismes américains de crédit à l'exportation et dans des organismes de la Banque mondiale où des intervenants indépendants, ceux qui sont touchés par les projets de financement de la SEE, disposent d'un mécanisme pour se plaindre de projets de la SEE et disposent d'un financement pour qu'on fasse enquête sur ces projets.

• 1135

Le président: Sur la liste des intervenants suivants, j'ai les noms de Mmes Nowlan, Foster et Adams. Je vous prie d'être brèves, parce que nous avons d'autres questions à poser.

Mme Linda Nowlan: D'accord, je serai brève. Aaron a parlé d'un des principaux moyens d'assurer la cohérence. Nous avons présenté des recommandations sur la façon de modifier la loi. Je pense que c'est le principal moyen de changer les comportements.

Un mécanisme d'appel permettant aux ONG et aux simples citoyens de se plaindre des politiques qui ne sont pas observées constitue un outil très puissant. Un éminent Canadien, Tom Berger, qui a mené un examen indépendant du barrage Sardar Sarovar Dam, en Inde, a incité la Banque mondiale à créer son tout premier groupe spécial d'inspection. Il existe des précédents de par le monde. Les entités du secteur privé de la Banque mondiale, c'est-à-dire la SFI, la Société financière internationale, et l'AMGI, l'Agence multilatérale de garantie des investissements, ont récemment créé un poste de protecteur des droits du citoyen. C'est donc un moyen bien concret de s'assurer que le public exige des comptes de la SEE.

Le président: Des membres du comité sont allés rencontrer la Banque mondiale quand nous procédions à l'examen de la politique étrangère au tout début du mandat du présent gouvernement, et à l'époque on ne faisait qu'entamer le processus d'examen environnemental. Je reconnais avec vous que nous avons beaucoup à apprendre de ce qu'ils font.

Madame Foster, puis Mme Adams.

Mme Pamela Foster: J'aimerais vous faire part d'une anecdote. Il y a quelques semaines, à Paris, j'ai assisté à une rencontre des organismes de crédit à l'exportation en ce qui concerne le développement durable, où des représentants de la SEE participaient à un atelier sur cette question. Pendant les travaux de cet atelier, le représentant de la SEE a dit qu'elle était assujettie aux lois environnementales canadiennes, ce qui m'a étonnée, puisqu'elle en est exemptée. Puis je me suis dit: je suppose que d'une certaine manière si l'on est exempté et que l'on agit en conséquence, on est en quelque sorte assujetti au droit environnemental canadien.

Je pensais aussi à un autre intervenant d'une ONG des États-Unis qui a raconté une petite histoire, et cela me semblait tout à fait opportun. Il a dit que ce que font les organismes de crédit à l'exportation quand ils prétendent qu'ils agissent de façon responsable à l'égard des normes internationalement reconnues en matière d'environnement et de droits de la personne, c'est qu'ils agissent comme des gamins qui ne veulent pas manger leurs légumes. Ils disent qu'ils n'ont pas à manger leurs légumes parce qu'ils pensaient les manger.

J'aimerais revenir sur l'observation qu'a faite Aaron quand il a dit qu'il n'y avait aucun mécanisme en place. On ne peut se conformer à une politique étrangère sans mettre en place des mécanismes permettant de s'y conformer. Je pense que le résumé des recommandations que nous proposons l'explique bien.

Le président: Madame Adams.

Mme Patricia Adams: Comme Aaron et Pam l'ont bien dit, outre qu'on demande à voir leur méthode pour s'assurer de sa cohérence à l'égard des politiques établies, on peut également leur montrer des preuves, et il y en a pas mal. Vous avez entendu ce matin un excellent témoignage de Kimy et Joan. Nous avons une longue liste d'une bonne vingtaine de projets que la SEE a soutenus au fil des ans qui figurent dans notre mémoire pour l'examen Gowlings, et je me ferai un plaisir d'en fournir des copies au comité. Les exemples de préjudices dont la SEE s'est rendue coupable en matière d'environnement et de droits de la personne ne manquent pas.

Le président: Merci beaucoup.

Excusez-moi, mesdames et messieurs, mais nous devons maintenant nous occuper de questions d'administration interne, sinon nous ne pourrons pas fonctionner la semaine prochaine, et je sais que vous souhaitez nous voir poursuivre nos travaux.

À l'intention des membres du comité, il ne s'agit pas d'un budget de déplacement. Ce n'est que le budget de fonctionnement courant. Pour ce qui est de l'impression des rapports de la ZLEA, c'est chose faite, mais nous avons besoin d'une approbation. Nous avons besoin d'une approbation pour l'impression du rapport de la SEE. Cela représente 6 000 $. Nous avons aussi les dépenses des témoins.

[Français]

C'est 6 000 $ pour les deux rapports, celui sur le libre-échange en Amérique du Nord et ce rapport-ci. Le nombre de témoins de la SEE, en comptant ceux du sous-comité, est d'au moins 22, ce qui donne un montant de 22 000 $. Il y a les 1 200 $ que nous devons normalement prévoir pour le café et autres petites dépenses, qu'on ne dépense pas entièrement d'habitude et dont le montant est ici de 980 $. Nous avons donc au total environ 30 000 $. Tout cela a été préparé par notre greffière, en laquelle j'ai toute confiance. Je crois donc que tous ces chiffres-là sont corrects.

• 1140

[Traduction]

M. Bob Speller (Haldimand—Norfolk—Brant, Lib.): Je ne suis pas d'accord. Qui paie? C'est vous ou Janet?

Une voix: Bill et Janet.

Le président: Vous n'êtes pas d'accord. Nous ne sommes pas d'accord. Je vais demander à Probe International de payer, car je vois que Gail Regan, qui est une de mes voisines, en est la présidente. Elle a assuré avec brio la présidence du Women's College Hospital, et je sais qu'elle viendrait en aide au comité.

Des voix: Oh, oh!

Le président: Le total est de 30 000 $. C'est normal. Plaît-il au comité d'accepter ce budget?

Des voix: Adopté.

Le président: Merci. Merci beaucoup.

Madame Beaumier, puis-je vous demander de me remplacer à la présidence? Je dois partir.

Toutefois, auparavant, je tiens à remercier personnellement chacun des témoins.

Je dois dire que quand nous avons entrepris ces tâches, je ne saisissais pas toute la complexité et l'importance du rôle de la SEE. Bien sûr nous connaissions l'importance du rôle de la SEE, mais je ne saisissais pas toute la complexité de la tâche que nous allions entamer. Nous vous sommes reconnaissants de toute l'aide extrêmement compétente que vous nous avez apportée, et merci pour vos mémoires fort utiles.

Merci en particulier à notre collègue de la Colombie, qui est venu de très loin. Il ne fait aucun doute qu'il va décider de rester à Ottawa pour l'hiver, car il adore le froid. Il me fait signe que non.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Je crois que c'est à moi de poser la question suivante.

Il me semble que l'une des choses que le groupe spécial doit comprendre, c'est qu'un bon nombre d'entre vous expriment pas mal des préoccupations que nous avons depuis des années. J'ai essayé d'en savoir plus à propos de la SEE, et je me suis heurtée aux même obstacles que vous. Si donc il n'y a que peu de gens qui s'empressent de poser des questions, c'est que quand vous avez terminé nous avons généralement acquiescé, et qu'il n'y a plus grand-chose à ajouter.

J'ai dû partir avant qu'on en ait terminé, mais Patricia parlait du fait que la SEE ne représentait pas une concurrence entre les entreprises et les contribuables. Mais en tant que politiciens, nous croyons savoir que c'est effectivement ce en quoi consiste le commerce international. Si les sociétés canadiennes ne peuvent pas commercer, nous ne pourrons pas nourrir les gens dans nos circonscriptions.

Vous avez assez bien répondu à la plupart des questions, mais celle que je vous poserai est celle-ci: comment pouvons-nous faire en sorte que la SEE corresponde à notre vision de ce qu'elle devrait être? Si nous devions établir des normes eu égard au respect des ententes et l'assujettir à la Loi sur l'accès à l'information, pensez-vous que la SEE demeurerait un véhicule viable pour aider les petites sociétés qui ne seraient pas admissibles au crédit des banques ou des compagnies d'assurance?

Mme Patricia Adams: Je pense que vous soulevez là un point important sur le plan économique. Je crois que les exportateurs canadiens s'en tireraient mieux si les services financiers du secteur privé étaient bien développés.

Vous avez entendu les témoignages, et je suis sûre que vous avez vu certaines des lettres de l'Association des banquiers canadiens et du Bureau d'assurance du Canada, qui disent qu'ils s'en occuperaient si la SEE ne le faisait pas. Mais comme la SEE bénéficie d'un traitement préférentiel—en tant que société d'État elle a accès à des fonds moins coûteux, sans compter d'autres mesures—elle peut en fait évincer le secteur privé. Je crois que les exportateurs canadiens seraient mieux servis.

Je vais simplement vous relater un fait, que je trouve assez regrettable. La section de la Générale Électrique qui produit ce qui est en voie de devenir une technologie dépassée, la technologie hydroélectrique, se trouve au Canada.

Adressez-vous au secteur privé; vous allez constater qu'il ne finance pas la construction de grands barrages parce qu'ils ne sont pas économiques, comme on l'a vu dans le cas des Trois-Gorges.

• 1145

Donc, grâce aux subventions gouvernementales, on maintient une industrie en vie au lieu de tirer parti des changements dans l'industrie de l'électricité pour trouver des moyens plus compétitifs, plus propres et plus efficients de générer de l'électricité. Au bout du compte, je crois que nous causons du tort à l'économie canadienne.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Je suis d'accord avec vous, mais si nous avions en place ces filets de sécurité pour les principes que la SEE devrait respecter à notre avis... Quand vous parlez de céder cela à l'industrie et aux banques, je me rappelle l'époque où je prenais part à l'étude sur l'accès au capital pour les petites entreprises. Je sais que les banques, par le passé, ont toujours hésité à financer la petite entreprise. Ce que je crains, c'est que les banques ne prennent pas au sérieux les petits exportateurs. J'ai l'air de généraliser, mais une femme propriétaire d'une petite société d'exportation serait prise moins au sérieux par les banques et se trouverait ainsi défavorisée.

Je vous dirai que, pour les besoins de la discussion, si ces conditions étaient en place, et si la SEE était assujettie à la Loi sur l'accès à l'information, ne croyez-vous pas qu'on pourrait la réchapper?

Mme Patricia Adams: Non, je ne crois pas. Je pense que cela ralentirait la SEE, et ce serait un pas dans la bonne direction. Ce serait une bonne chose, parce qu'il lui serait plus difficile de financer certains projets particulièrement aberrants, mais je ne crois pas que ça l'arrêterait. On a vu comment le gouvernement a essayé de contourner les règlements pour financer la vente du CANDU à la Chine.

C'est une chose que les ONG craignent toujours, et voilà pourquoi bien sûr nous privilégions l'adoption de lois: ainsi, nous pouvons exiger des comptes des diverses entités du gouvernement.

Mais je ne crois pas qu'il vaille la peine de la réchapper. Tout est là. Vous devrez demander aux banques si elles sont disposées à financer ce genre de projets, parce quÂévidemment je ne peux pas parler en leur nom. Mais je ne crains pas le marché. Quand il existe de bonnes règles, le marché est souvent parfaitement en mesure de saisir les risques de diverses exportations. Ce que vous allez constater à la SEE, c'est que sur les 70 p. 100 de leurs opérations qui ne sont pas commercialement viables, un fort pourcentage ne sont pas commercialement viables parce qu'elles ne sont pas soutenables sur le plan environnemental, parce qu'il y a d'énormes risques politiques associés à ces projets, parce que l'on attente aux droits de la personne et parce que ces projets ne seraient pas financés au départ.

M. Warren Allmand: À ce sujet, je tiens à clarifier ce que j'ai dit plus tôt. Bon nombre d'entre nous n'ont pas pris la même position que Patricia Adams, à savoir que la SEE devrait être démantelée.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): J'aimerais entendre l'avis de quelques autres. Le financement des exportations a-t-il un avenir?

M. Warren Allmand: On n'a pas à choisir entre l'abolition totale et le statu quo. Nous ne nous opposons pas à cela. Nous n'y avons pas songé.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): D'accord.

Linda.

Mme Linda Nowlan: Oui, même réponse.

Ce n'est pas une option que nous avons vraiment envisagée. Étant donné qu'il s'agit d'une société d'État, elle devrait se conformer aux normes environnementales.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): D'accord.

[Français]

Monsieur Rocheleau.

M. Yves Rocheleau: Ma question s'adresse à tout le monde. Une des recommandations du rapport Gowlings est que la SEE ne fasse plus l'objet d'une vérification par le vérificateur général mais plutôt d'une vérification par un vérificateur privé ou un vérificateur interne indépendant. J'aimerais connaître votre réaction à cette recommandation qui nous apparaît un peu bizarre.

[Traduction]

M. Aaron Freeman: Un mot, si vous le permettez. Le groupe de travail croit que la recommandation du rapport Gowlings devrait être rejetée. Il faut que la SEE soit visée par la Loi sur le vérificateur général, particulièrement pour ce qui concerne l'articulation d'une stratégie de développement durable, ce que doit faire tout autre organisme gouvernemental en vertu de la loi, et elle devrait aussi faire l'objet d'un rapport de la part du commissaire à l'environnement et au développement durable.

Mme Patricia Adams: Puis-je ajouter quelque chose?

Je ne suis pas sûre que ce serait une mauvaise chose. Je n'ai pas assez d'information, mais je pense que cela pourrait contraindre la SEE à adhérer à certaines règles auxquelles le secteur privé doit adhérer, qui sont beaucoup plus sévères. Mais je serais nerveuse si une instance publique comme le vérificateur général ne procédait pas non plus à une vérification.

• 1150

J'aimerais beaucoup que le comité songe sérieusement à modifier le statut de la SEE en vertu de la Loi sur la gestion des finances publiques, ce que Gowlings a recommandé. Je ne comprends pas les conséquences qu'une telle mesure aurait, mais je me demande si cela contraindrait la SEE à rendre davantage de comptes.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Madame Marleau.

L'hon. Diane Marleau (Sudbury, Lib.): Je vous avouerai que je ne suis pas une grande admiratrice des organismes gouvernementaux ou des sociétés d'État. J'ai eu maintes fois affaire à ces instances, et c'est une espèce tout à fait particulière. Cela dit, dans certains cas ils constituent une espèce nécessaire. Ce qui ne veut pas dire qu'ils doivent s'engager dans les projets commercialement viables au même titre que dans les projets qui n'ont aucun soutien.

Je tiens à vous remercier pour vos interventions, parce que vous avez soulevé une foule d'arguments avec lesquels nous sommes tous d'accord, comme on l'a dit plus tôt. Ce qui m'amène à vous parler d'une chose dont j'ai été personnellement témoin au cours des quelques dernières années. Il existe cette tendance, à l'échelle internationale aussi bien qu'au Canada, à isoler le milieu financier du milieu social, du milieu environnemental, du milieu de la pauvreté. On dit: «Ah, eh bien, c'est l'affaire des financiers, et des gars—pardonnez-moi d'employer l'expression Àles garsä—les gars s'y connaissent en affaires, ils vont donc se réunir dans cette pièce et discuter de la manière de faire des affaires, pendant que vous autres, les filles, vous allez parler de la manière dont on peut nourrir les pauvres.» Je suis très méchante dans ma façon de le dire...

M. Warren Allmand: Il y a des hommes qui aboutissent dans cette salle-là aussi.

L'hon. Diane Marleau: Certains hommes aboutissent dans cette salle-là, c'est vrai, mais ce que vous dites décrit exactement ce qui se passe dans cette société d'État en particulier à maints égards.

Depuis la crise financière en Asie, j'espérais que nous, les gouvernements, en tant que pays—particulièrement les gouvernements et les pays du monde développé—aurions appris certaines leçons. Faire des affaires rien que pour faire de l'argent, ça ne paie pas toujours, et, chose certaine, ça ne paie pas pour les gens qui sont à l'autre bout. C'est ce que nous avons dit en Indonésie, et c'est encore ce qui se fait là-bas.

Il nous faudra longtemps pour imposer bon nombre des orientations que vous préconisez, et la SEE n'est qu'un tout petit élément là-dedans. Il faut faire encore beaucoup à l'échelle internationale pour que nous agissions de concert. Malheureusement, très peu de gens donnent suite à leurs engagements. Ils parlent, ils parlent, mais ils ne font rien.

L'un des très grands défis du XXIe siècle, c'est bien sûr l'environnement. Tout le monde le voit. Il faut que les entreprises canadiennes s'y intéressent plus et qu'elles fassent davantage à l'échelle internationale. Comment amener les entreprises canadiennes à faire cela? Je pose la question parce qu'elles sont bonnes; elles se conforment à de bonnes normes. Comment pouvons-nous nous assurer qu'elles vont respecter les normes partout où elles vont?

De la même manière, comment allons-nous faire évoluer la démocratie jusqu'à la prochaine étape? C'est une question très complexe. Bon nombre de nos entreprises sont régies par des règles diverses. Bon nombre de ces pays ont des lois magnifiques, mais ils n'en font respecter aucune. Le Canada étant un intervenant important, mais mineur, dans cette sphère, nous devons passer à la prochaine étape, de telle sorte que le petit Canada ne sera plus le seul à dire: «Ah, soit dit en passant, on est ici, nous. Ne faites pas ça. C'est mal.»

Est-ce que quelqu'un a déjà songé à la manière de faire avancer le développement social et le développement durable vers cette autre sphère? De manière générale, j'ai constaté que les entreprises canadiennes sont bien intentionnées, soit dit en passant. Est-ce qu'elles font toujours ce qu'il y a à faire? Eh bien, la question reste posée, mais de manière générale elles ne vont pas à l'étranger pour détruire. Mais comment pouvons-nous les aider? Si elles font affaire avec d'autres qui ne sont pas aussi bien intentionnés, c'est très difficile pour elles.

• 1155

Je vous demande donc comment l'on pourrait utiliser la Société pour l'expansion des exportations pour aider nos propres entreprises à mettre au point de meilleures pratiques outre-mer en faisant certaines des choses que vous dites, mais non en abolissant la Société pour l'expansion des exportations. Cela ne réglera rien, croyez-moi. Si un projet est financièrement viable, les grandes banques vont se précipiter de ce côté, et l'argent suivra, tout comme ce fut le cas en Indonésie. Ne vous racontez pas d'histoires. Ce ne sera pas mieux. Elles vont faire de l'argent, mais ce ne sera pas nécessairement mieux. Le secteur privé ne fera rien tout seul; alors comment notre pays, nos institutions, peuvent-ils faire avancer ce processus?

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.

Gail.

Mme Gail Whiteman: Comme première réponse, il faut se tourner vers les grands courants. Je viens de défendre ma thèse de doctorat à la Queen's University School of Business, avec une spécialisation en gestion environnementale. Je dirais que les entreprises vont de l'avant et que l'éducation des entreprises fait en sorte que les grandes questions sociales et environnementales font maintenant partie du processus décisionnel en matière d'économie. Je pense que c'est un excellent progrès.

J'encourage la SEE à conclure de solides alliances avec le World Business Council for Sustainable Development, un groupe de grandes entreprises internationales très progressistes, qui ont fait du développement durable une partie intégrante de la prise de décisions au sujet de leur exploitation. Elles ont fait beaucoup de travail et pourraient certainement envisager d'agir comme mentors et de transmettre le fruit de cette expérience à de petites entreprises.

L'idée que les entreprises ne s'occupent que des questions économiques est déjà bien ancienne. Le Dow Jones a maintenant un indice de durabilité. Je pense que cela prouve que les entreprises elles-mêmes voient un avantage concurrentiel dans leur attitude au sujet des affaires sociales et environnementales.

L'hon. Diane Marleau: Certaines d'entre elles.

Mme Gail Whiteman: C'est vrai, certaines d'entre elles. Mais il faudrait voir comment la SEE peut encourager cette tendance, et, à mon avis, la priorité serait d'intégrer le développement durable dans son propre mandat.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Linda Nowlan.

Mme Linda Nowlan: Merci.

Oui, je crois que c'est une excellente question. Je suis tout à fait d'accord avec vous, beaucoup d'entreprises ont de bonnes intentions, créent de l'emploi et font de bonnes choses qui reçoivent notre appui, au Canada.

Je le répète, nous n'avons pas envisagé sérieusement l'abolition de la SEE, mais je trouve plus intéressant les commentaires de Patricia Adams au sujet des subventions pour les projets à risque très élevé. Je me demande si on ne pourrait pas encourager la SEE à en faire plus, à exercer davantage de pression sur les entreprises canadiennes afin qu'elles se lancent dans le développement durable, dans le cadre des grands courants de développement durable, par exemple en accordant des subventions ou, si vous préférez, un traitement préférentiel aux projets qui sont positifs pour l'environnement et la société. Il faut les encourager à travailler davantage avec l'ACDI. Je sais que c'est une chose qui vous intéresserait particulièrement. Il faudrait demander un traitement préférentiel pour certains types de projets. Comme nous l'avons déjà dit, il y a des précédents, et j'en donne un exemple dans mon mémoire.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.

Madame Foster.

Mme Pamela Foster: Merci. J'ai moi aussi aimé vos commentaires.

Comme je l'ai dit au début, beaucoup d'ONG du Canada sont à l'oeuvre depuis 20 ou 30 ans pour faire changer l'attitude des entreprises et des institutions financières. Dans notre propre rôle dans ce domaine auprès de la Banque mondiale, il n'a pas été facile de lui faire adopter les normes actuelles. Il est même encore parfois difficile de les faire observer en toute circonstance, puisqu'il s'agit d'une imposante bureaucratie, mais sur papier, ce sont d'excellentes politiques. Voilà le genre de pouvoir que nous avons.

Quand on fait la promotion de ce genre de réforme, on entend toujours le même scénario pessimiste: le ciel va nous tomber sur la tête, des emplois canadiens disparaîtront, et nous nuirons aux entreprises canadiennes. À maintes reprises, nous avons prouvé que c'était un mythe. Nous avons démontré que lorsqu'il y a une plus grande surveillance publique des droits de la personne, de l'environnement, de la transparence et de la divulgation publique, cela ne nuit pas aux entreprises canadiennes. On l'a constaté aux États-Unis, les entreprises n'en souffrent pas.

Je pense que les tests n'ont pas été suffisants au Canada, mais aux États-Unis les entreprises ne s'en trouvent pas plus mal. Chez Exxon, la liste des clients s'est allongée. Cela n'a pas nui à la Société financière internationale. Le World Business Council for Sustainable Development ne cesse de répéter que c'est en fait une bonne chose pour les entreprises.

Avec une meilleure surveillance gouvernementale au Canada, il y aurait des incidences pour les principaux organismes de crédit à l'exportation, comme on l'a déjà dit. Il serait possible d'entraîner dans ce mouvement d'autres institutions financières publiques et privées, en détruisant le mythe selon lequel une surveillance publique accrue dans ces domaines nuirait à l'économie canadienne.

Nous avons assisté à une course du moindre effort, en nous faisant dire et répéter qu'on ne peut faire cela sans... Je pense que c'est faux. Ce que nous vous disons, c'est d'instaurer ces réformes, et on verra le mouvement s'inverser. Ce sera avantageux pour l'économie, pour l'environnement et pour le public.

L'hon. Diane Marleau: Je suis d'accord.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.

Oui?

M. Warren Allmand: Puis-je dire quelque chose, rapidement?

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Oui, rapidement.

• 1200

M. Warren Allmand: Diane a dit qu'il était difficile d'aller de l'avant au Canada, sans un consensus international allant dans le même sens. J'abhorre ce processus du consensus international, puisque cela signifie habituellement que les plus gros...

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Dites non.

M. Warren Allmand: ... qui ne veulent pas suivre, comme la Chine ou les États-Unis, ont un droit de veto de fait même si 80 p. 100 des pays du monde sont en faveur de quelque chose. Cela signifie aussi qu'on accepte le plus petit dénominateur commun.

Le Canada est allé à l'encontre de ce principe du consensus au sujet du traité sur les mines terrestres et pour le tribunal pénal international. Dans les deux cas, la Chine et les États-Unis n'ont pas suivi, mais le Canada a fait preuve de leadership et est allé de l'avant. La majorité des pays du monde nous appuient au sujet des mines terrestres et du tribunal pénal international, et nous devrions agir de même sur cette question. Tant pis pour la Chine et pour les États-Unis.

L'hon. Diane Marleau: Non, je ne parlais pas d'un consensus au niveau international. Je suis d'accord avec vous; en tant qu'institution, les Nations Unies ne sont pas un lieu où il est possible de faire ce que je demande. C'est pourquoi j'ai posé la question. J'ai demandé comment on pouvait faire bouger les choses. Il est vrai que nous pouvons faire des choses, en tant que pays, mais il faut faire bien davantage. Comment pouvons-nous utiliser notre position pour accélérer le processus au niveau international? Et il ne s'agit pas simplement d'une question, comme les mines terrestres ou le tribunal pénal international, puisqu'il y en a beaucoup d'autres.

M. Warren Allmand: Nous pouvons faire ce que Pamela vient de suggérer. Si nous faisons une chose au Canada, elle aura une plus grande priorité à l'échelle mondiale.

L'hon. Diane Marleau: Eh bien, parfois oui et parfois non, étant donné les problèmes au niveau international. Il faut travailler avec des gens qui pensent comme nous et qui font le genre de choses que nous avons l'intention de faire nous-mêmes.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci.

Patricia Adams, et vous devrez être très brève.

Mme Patricia Adams: J'aimerais simplement répondre à votre question sur ce que nous pouvons faire. Je pense qu'il faut cesser de prémunir le secteur privé contre les risques associés à ces projets. Il faut cesser de le subventionner, et je vais vous donner un exemple.

Dans le cas des mines aurifères Omai, j'ai rencontré le vice-président des relations avec les actionnaires de Cambior. Je lui ai demandé s'il aurait investi dans cette mine sans l'assurance risque politique de la SEE. Il m'a répondu qu'il avait des actionnaires, et que s'ils avaient 10 $ à investir soit en Guyane, soit au Canada, ils préféreraient l'investir au Canada, évidemment.

Là où je veux en venir, c'est qu'il s'agit d'entreprises pour qui le risque est très élevé, qui cherchent à réduire le risque pour elles-mêmes en le refilant aux contribuables. Il faut cesser d'accepter cela.

La vice-présidente (Mme Colleen Beaumier): Merci beaucoup à chacun et chacune d'entre vous. On pourrait dire que nous chantons presque tous la même chanson. Nous apprécions vraiment vos suggestions et nous espérons certainement que nous pourrons produire un document qui au moins enclenchera le processus visant à trouver des solutions pour contrer les violations des droits de la personne.

La séance est levée. La prochaine aura lieu à 15 h 30, dans la Salle du Comité des chemins de fer, et nous accueillerons alors le ministre Pettigrew.