Passer au contenu
Début du contenu

CIMM Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain

STANDING COMMITTEE ON CITIZENSHIP AND IMMIGRATION

COMITÉ PERMANENT DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 25 novembre 1999

• 0915

[Traduction]

Le vice-président (M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.)): Bonjour. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous faisons une étude sur tous les aspects du processus de détermination du statut de réfugié et migrants clandestins.

D'après le règlement du comité, nous pouvons siéger quand trois membres sont présents. Les autres membres du comité, les représentants de l'opposition, vont apparemment bientôt arriver.

Les exposés seront faits dans l'ordre inverse de celui prévu à l'ordre du jour et ce sont les représentants du ministère du Solliciteur général du Canada qui parleront les premiers. M. Paul Kennedy est sous-solliciteur général adjoint principal, Secteur de la police et de la sécurité; M. Jamie Deacon est directeur de la Division de la lutte contre le crime organisé; en outre, je vois le nom de M. Ken Moreau qui n'est toutefois pas sur la liste officielle.

Je ne sais pas très bien quel est votre titre, monsieur.

M. Ken Moreau (adjoint exécutif du sous-solliciteur général adjoint principal, ministère du Solliciteur général du Canada): Je suis adjoint exécutif du Secteur de la police et de la sécurité.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Merci bien.

Messieurs, nous avons environ 10 minutes pour écouter votre exposé, puis quelques minutes pour la période de questions. Soyez les bienvenus.

M. Paul Kennedy (sous-solliciteur général adjoint principal, Secteur de la police et de la sécurité, ministère du Solliciteur général du Canada): Merci beaucoup, monsieur le président.

Si vous me le permettez, je voudrais faire une déclaration préliminaire qui vous donnera un bref aperçu du rôle du ministère du Solliciteur général en ce qui concerne diverses questions que vous examinez depuis deux semaines. Je voudrais également décrire brièvement plusieurs initiatives capitales qui ont été prises dernièrement par le ministère du Solliciteur général et ses partenaires clés pour lutter contre le crime organisé, y compris le trafic d'êtres humains.

Comme vous le savez, le ministère du Solliciteur général conseille et épaule le solliciteur général du Canada dans l'exercice de ses fonctions. Le solliciteur général est responsable, à l'échelle nationale, de la surveillance policière, des services correctionnels, des libérations conditionnelles et de la sécurité nationale. Le ministère est en outre chargé de conseiller le solliciteur général en ce qui concerne la direction des organismes qui relèvent du ministère, à savoir la GRC, le SCRS, le Service correctionnel du Canada et la Commission nationale des libérations conditionnelles, dont il est responsable devant le Parlement.

La GRC, qui est le service de police fédéral du Canada, a pour principal objectif de faire respecter les lois, de faire de la prévention contre le crime et de maintenir la paix, l'ordre et la sécurité.

Le Service canadien du renseignement de sécurité ou SCRS a été créé en 1984 dans le but de fournir des renseignements de sécurité au gouvernement du Canada. Le SCRS est plus particulièrement chargé d'épauler et de conseiller le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration. Il le conseille en matière d'immigration et de citoyenneté dans le cadre du programme des enquêtes de sécurité.

Au cours des quatre dernières années, le gouvernement du Canada s'est attaché à mettre en oeuvre un programme de sécurité publique. La lutte contre le crime organisé en fait partie et elle est devenue une priorité capitale en ce qui concerne l'exécution des lois fédérales. Le crime organisé est extrêmement rentable et a recours à des méthodes très sophistiquées; en outre, la plupart de ses activités couvrent toutes les régions de la planète. Par conséquent, la lutte contre le crime organisé est un défi de taille à l'échelle mondiale.

Au cours des dernières années, diverses initiatives clés ont été prises en matière de lutte contre le crime organisé, initiatives auxquelles participent plusieurs ministères fédéraux avec le concours de la police, des provinces ou des territoires et des collectivités internationales.

En septembre 1996, le ministère du Solliciteur général et le ministère de la Justice du Canada ont organisé un Forum national sur le crime organisé réunissant des représentants de la police, des gouvernements fédéral et provinciaux, du secteur privé, des milieux juridiques et des milieux universitaires. À ce moment-là, il a été clairement établi que le Canada avait besoin d'une stratégie plus coordonnée de lutte contre le crime organisé. Les participants se sont entendus sur la nécessité d'une structure de coordination nationale.

À la suite de cette recommandation, le ministère du Solliciteur général du Canada, en collaboration avec les provinces et les corps policiers, a créé cinq comités régionaux de coordination et un comité national de coordination en 1997. Ces comités permettent de jeter les bases d'une collaboration accrue et de mettre au point une stratégie multidisciplinaire de lutte contre le crime organisé.

• 0920

Le comité national, dont font partie des représentants régionaux, se penche sur les questions relatives aux politiques et à la législation que peut poser l'application de la loi. Ces comités regroupent des membres de services de police ainsi que de hauts représentants des gouvernements fédéral et provinciaux.

Afin de lutter contre les activités liées au crime organisé des deux côtés de la frontière canado-américaine, le gouvernement fédéral collabore avec ses partenaires américains dans le cadre du Forum sur la criminalité transfrontalière. Depuis sa création, en 1997, le Forum s'est réuni trois fois pour se pencher sur des questions telles que l'incidence des crimes transfrontaliers, la fraude par télémarketing, le blanchiment d'argent, les enfants disparus ou enlevés, la criminalité faisant appel aux technologies nouvelles et d'autres questions d'actualité. La dernière réunion du forum a eu lieu en juin de cette année. Au cours de cette réunion, à laquelle ont participé plusieurs forces provinciales et municipales, des stratégies binationales communes en matière d'application de la loi ont été établies et un système binational d'évaluation des menaces a été élaboré.

La Déclaration commune sur le crime organisé marque un jalon dans le partenariat qui a été scellé entre les provinces, les territoires et le gouvernement fédéral. Cette déclaration a été sanctionnée en octobre 1998 par les ministres responsables de la justice. Cette déclaration souligne publiquement leur volonté de faire des efforts concertés et de collaborer dans la lutte contre le crime organisé. Afin d'aider les parties signataires de la déclaration commune à appliquer les principes auxquels ils ont souscrit dans ce contexte, un comité spécial composé de sous-ministres a été institué. Son rôle consiste à établir une orientation stratégique aux paliers fédéral, provincial et territorial en ce qui concerne l'élaboration de politiques, de lois et de programmes.

En avril 1999, la GRC a reçu 115 millions de dollars afin de moderniser le Centre d'information de la police canadienne, mieux connu sous l'acronyme CIPC. C'est le système informatique des forces policières canadiennes. Le CIPC sera remplacé par un système informatique plus moderne afin d'améliorer la mise en commun des informations avec les bases de données fédérales et provinciales d'autres forces policières, ce qui aura pour effet de prévenir ou de régler un plus grand nombre de crimes et de favoriser une action concertée contre le crime organisé.

En juin 1999, le solliciteur général a annoncé qu'environ 15 millions de dollars seront versés à la GRC chaque année pour la lutte contre le crime organisé aux trois principaux aéroports internationaux canadiens: Montréal, Toronto et Vancouver. Cette initiative permettra l'ajout de 100 membres de la GRC affectés exclusivement à la surveillance des criminels organisés qui utilisent ces aéroports comme points d'entrée au Canada.

Les enquêtes sur le crime organisé sont complexes et elles obligent la police à franchir les frontières interprovinciales et souvent les frontières internationales. C'est pourquoi les partenaires nationaux et internationaux et les échanges d'informations sont essentiels.

Sur la scène internationale, les ministres de la Justice et de l'Intérieur se sont réunis à Moscou les 19 et 20 octobre de cette année pour discuter de la lutte contre le crime organisé transnational. Un des trois points à l'ordre du jour concernait les problèmes qui se posent à l'échelle mondiale dans le contexte de cette lutte. Au cours des délibérations, tous les représentants des pays du G8 ont reconnu que le passage clandestin et le trafic d'immigrants sont des problèmes particulièrement préoccupants.

Enfin, j'insiste sur le fait que le passage clandestin et le trafic de migrants sont des activités du crime organisé qui prennent de plus en plus d'ampleur. La création soutenue de partenariats entre les divers paliers de gouvernement et organismes, à l'échelle nationale et internationale, joue un rôle capital dans le cadre des efforts de lutte contre ce fléau.

Merci de m'avoir donné l'occasion de faire cet exposé.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Merci.

Monsieur Benoit, vous avez 10 minutes pour poser des questions.

M. Leon E. Benoit (Lakeland, Réf.): Merci, monsieur le président.

Je m'excuse d'être arrivé en retard. Je suis sincèrement désolé d'avoir manqué votre exposé car ce que vous avez à dire et ce que les autres groupes de témoins ont à dire à ce sujet m'intéresse beaucoup. J'ai oublié les notes que j'avais préparées au sujet des questions que je voulais vous poser mais j'en ai quand même beaucoup.

Je pense que vous avez parlé du document du solliciteur général sur le crime organisé qui est paru en janvier, où il signalait que c'est un problème très grave et annonçait qu'il ferait l'objet d'une attention toute particulière. D'autres personnes qui occupent des fonctions qui les incitent à porter attention à cette question, comme le directeur du SCRS, ont dit que le crime organisé constitue une menace très grave.

• 0925

C'est un problème qui prend des proportions de plus en plus inquiétantes, au point de menacer la stabilité économique si on ne le règle pas. C'est donc extrêmement grave. J'ai assisté à des assemblées de parlementaires de l'OTAN en Europe et un des principaux sujets débattus par le comité dont je fais partie est précisément le crime organisé et les répercussions qu'il pourrait avoir sur l'économie des pays du G8. Bien sûr, au sein de cette assemblée, on se préoccupe surtout des pays membres de l'OTAN, mais c'est un fléau qui menace également tous les pays en développement.

Le crime organisé et l'incapacité des autorités à prendre la situation en main sont ce qui a entravé le plus le développement économique de pays comme ceux de l'ex-Bloc soviétique.

Je voudrais d'abord que vous disiez, d'après les informations que vous possédez, à quelle rapidité ce problème prend de l'extension. Estimez-vous que la criminalité organisée progresse à un rythme assez soutenu pour inciter le gouvernement à faire des efforts extrêmes pour essayer de le régler rapidement? Pensez-vous au contraire que c'est un problème qui a toujours existé et qui subsistera? Pensez-vous qu'il progresse très lentement et qu'il n'y a par conséquent aucune urgence?

M. Paul Kennedy: C'est une question très importante que vous avez posée. Pour mieux situer le problème, je signale qu'il y a environ deux ou trois ans—je ne sais plus à quel moment au juste—, les Nations Unies ont dit qu'elles considéraient le problème du crime organisé transnational comme le problème le plus menaçant à l'échelle mondiale. Par conséquent, il serait malvenu de tenter de minimiser la gravité de la situation et...

M. Leon Benoit: En ce qui concerne le Canada et les États-Unis en particulier, ou le Canada seulement? Parlez-nous du Canada. C'est notre pays et le gouvernement du Canada est celui sur lequel nous avons quelque influence.

M. Paul Kennedy: Dans le récent discours du Trône, le gouvernement a indiqué qu'il était préoccupé au sujet du crime organisé et qu'il comptait prendre des mesures.

Au cours des dernières années—à partir de 1996, comme je l'ai signalé—, nous avons organisé des conférences fédérales-provinciales-territoriales parce que nous étions préoccupés au sujet du crime organisé et de ses manifestations.

Il est exact que le crime organisé ne date pas d'hier. Il a toujours existé en ce sens que les activités criminelles concertées de groupes de deux personnes ou plus ne sont pas un phénomène récent. Nous sommes toutefois confrontés à des défis comme nous n'en avions encore jamais eus. La mondialisation de l'économie, la technologie et divers autres facteurs analogues ouvrent de nouvelles perspectives de coopération à ces groupes criminels et leur permettent de neutraliser dans une certaine mesure les outils dont nous disposons actuellement pour lutter contre ce problème. Par conséquent, ces groupes sont plus efficaces parce que les outils mêmes qui augmentent notre efficacité sur le plan économique permettent également aux criminels d'être plus efficaces, ce qui accroît les difficultés.

M. Leon Benoit: Exactement. La plupart des spécialistes estiment que la façon la plus efficace de lutter contre le crime organisé consiste probablement à supprimer les profits qu'en tirent les criminels, ce que vous faites notamment par la prévention du blanchiment de l'argent. Êtes-vous de cet avis? Si oui, quelles initiatives ont été prises par votre ministère ou avez-vous prises personnellement pour essayer de lutter avec efficacité contre ce genre d'activité?

M. Paul Kennedy: Vous avez raison. Vers 1989, le gouvernement a adopté des dispositions législatives concernant non seulement le problème du blanchiment de l'argent... Cette lutte comporte deux volets. Le premier concerne les produits de la criminalité et la capacité de saisir les biens acquis par le biais d'activités criminelles. L'autre concerne la mise en place de dispositions législatives supplémentaires concernant le blanchiment d'argent. On a donc, en fait, procédé en trois étapes.

Cette approche a été très efficace. L'entreprise a débuté par un projet pilote dont le but était de déterminer si c'était réalisable. Plusieurs infractions prévues dans le Code criminel ont été désignées aux fins de la saisie des produits de la criminalité. Il s'agit d'une liste. Ce critère ne s'applique pas à toutes les infractions mais à celles qui figurent sur une liste spéciale.

• 0930

En outre, la même tactique a été adoptée vers 1989 à l'égard des dispositions de la Loi sur l'accise ou de la Loi sur les douanes portant sur le trafic de stupéfiants et de certaines dispositions portant sur la contrebande. Je dirais que la législation n'a commencé à être efficace que vers 1992-1993, quand le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux a commencé à participer à la gestion de ces biens.

Des biens d'une valeur de plus de 100 millions ou 110 millions de dollars ont été saisis et je crois qu'environ 60 millions de dollars ont été versés au Trésor. Par conséquent, ce projet pilote s'est avéré un outil très efficace qui a effectivement permis de soustraire à ces individus des capitaux leur servant à financer ces entreprises. Il s'agit en effet d'entreprises. Ces individus doivent engager du personnel qu'ils devront peut-être corrompre et ils doivent faire de faux documents, par exemple. La méthode qui consiste à les priver de ce qui leur permet de financer leurs activités est donc très efficace.

Il nous reste à décider s'il est possible d'étendre notre champ d'action. Nous avons conclu des accords bilatéraux avec plusieurs autres pays pour les encourager à aider le Canada dans le cadre des enquêtes. Ces ententes contiennent une clause qui prévoit le partage des biens saisis au Canada ou à l'étranger, selon l'endroit où ces individus commettent leurs infractions.

C'est donc un outil efficace. Il est clair désormais que c'est un modèle que d'autres ministères devraient examiner et envisager d'intégrer à leur législation.

M. Leon Benoit: Ainsi, vous comptez étendre le champ d'application d'un projet pilote précis. De quels nouveaux outils avez-vous besoin dans le cadre de cette lutte? Je pense en particulier au blanchiment de l'argent et à la confiscation des produits de la criminalité. De quels nouveaux outils avez-vous besoin pour mener une lutte plus efficace dans ce domaine?

M. Paul Kennedy: Il y en a deux. Le premier est l'ex-projet de loi C-81 qui avait été présenté à la Chambre avant sa prorogation. C'était un nouveau projet de loi visant à instaurer un centre de renseignements financiers chargé de dépister les activités de blanchiment d'argent et de nous permettre d'établir un bilan plus exact de la situation. Ce même projet de loi nous permettait d'exiger la déclaration des devises au passage des frontières.

Ce seraient des outils très efficaces, surtout le centre qui obligerait les institutions financières et autres intervenants à nous signaler les transactions suspectes qui, selon les critères que nous avons établis, pourraient être liées à des activités illégales et viseraient par conséquent à blanchir l'argent. Ce serait un outil très efficace.

M. Leon Benoit: D'après les informations que vous avez recueillies, quel est le degré d'infiltration du crime organisé dans certains types d'institutions, à commencer par les établissements bancaires et les diverses forces policières du pays? Je suppose qu'il est inutile d'essayer de s'infiltrer dans la fonction publique et dans les milieux gouvernementaux parce que je ne crois pas que l'on puisse en tirer profit. Par contre, le crime organisé a intérêt à s'infiltrer tout particulièrement dans les forces policières et dans le secteur bancaire, ou dans tout autre secteur où c'est très utile...

M. Paul Kennedy: J'admets en toute sincérité qu'il y a eu quelques cas isolés au Canada, ce qui ne signifie pas pour autant que je soupçonne nos institutions bancaires d'être impliquées consciemment de quelque façon que ce soit dans ce type d'activités. Il est notoire que les individus qui ont fait des profits mal acquis recherchent, comme tout autre citoyen, des pays où l'économie est stable et où l'on offre de bons services qui assurent la protection de leurs fonds, leur permettent de les investir et en assurent la libre circulation. C'est pour cette raison que nos régimes présentent de l'attrait à leurs yeux.

Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question.

Nous n'avons pas beaucoup d'informations anecdotiques sur l'étendue du problème à l'échelle internationale. J'ajouterais toutefois que si le Parlement jugeait utile d'adopter ce projet de loi et d'instaurer ce nouveau centre financier pour permettre d'analyser ces données, nous serons mieux informés sur la nature et l'ampleur des abus éventuels.

M. Leon Benoit: Notre système d'immigration joue, bien entendu, un rôle extrêmement important dans la lutte contre l'implantation du crime organisé au Canada. C'est précisément la question que nous sommes chargés d'examiner.

Vous avez parlé de passage clandestin d'immigrants. Vous pourriez peut-être expliquer brièvement quelle envergure a pris cette activité et les profits qu'elle représente pour les membres du crime organisé, au Canada et à l'étranger, par rapport aux profits du trafic de stupéfiants ou du commerce de la drogue en général et par rapport aux autres formes de crime organisé. Je voudrais avoir une idée de ce que cette activité peut représenter par rapport aux autres activités du crime organisé.

• 0935

M. Paul Kennedy: Je laisserai au témoin suivant, M. René Charbonneau, de la GRC, le soin de donner des informations plus précises à ce sujet. Je suis toutefois convaincu, à la lumière de l'expérience que nous avons acquise jusqu'à présent dans le domaine de la drogue, que le commerce des stupéfiants est un problème d'envergure mondiale et qu'il représente des sommes d'argent considérables. Les réseaux propices au trafic des stupéfiants ou d'autres produits faisant l'objet de contrebande peuvent servir au passage clandestin d'immigrants, mais je pense que la GRC pourrait vous citer des chiffres plus précis à ce sujet. Ce sont deux problèmes très graves mais je crois que l'un des deux n'a commencé à prendre des proportions très inquiétantes que depuis peu.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Merci bien, monsieur Benoit.

Monsieur McKay, vous avez 10 minutes.

M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Ma question sera brève: existe-t-il une différence de sens importante entre le trafic et le passage en contrebande ou ces deux termes sont-ils employés dans le même sens?

M. Paul Kennedy: Je laisserai répondre M. Deacon.

M. Jamie Deacon (directeur, Division de la lutte contre le crime organisé, Secteur de la police et de la sécurité, ministère du Solliciteur général): Je crois que la différence n'est pas toujours claire. Il s'agit de passage en contrebande quand quelqu'un verse une certaine somme à un passeur pour le faire entrer dans un pays. Il y a trafic lorsqu'une personne en fait entrer une autre dans un pays, en se faisant éventuellement rémunérer mais pas nécessairement, notamment dans des circonstances où le droit de passage est remplacé par une rémunération en nature dans le contexte d'une activité comme la prostitution. C'est donc du trafic parce que le «passeur» ne se contente pas d'aider la personne à pénétrer dans le pays mais qu'il compte exploiter cette personne à des fins lucratives après son arrivée à destination.

M. John McKay: Cette différence est-elle reconnue dans le Code criminel?

M. Jamie Deacon: Non. Elle est toutefois officielle dans certains organismes internationaux comme les Nations Unies.

M. John McKay: Estimez-vous qu'il serait utile pour l'instant d'apporter d'autres modifications au Code criminel que celles qui sont prévues dans le projet de loi C-81? Dois-je présumer que les dispositions du projet de loi C-81 seront intégrées au Code s'il renaît de ses cendres?

M. Jamie Deacon: Le projet de loi C-81 devait devenir en fait une nouvelle loi sur les produits de la criminalité et le blanchiment de l'argent.

M. John McKay: Il s'agissait donc d'une loi nouvelle.

M. Jamie Deacon: Une loi destinée à remplacer la loi actuelle.

J'hésite à faire des commentaires au sujet d'éventuels amendements ou de l'ajout de nouvelles dispositions au Code criminel. Comme l'a signalé M. Kennedy, je crois qu'il faut penser à tous les nouveaux outils possibles. On cherche toujours de nouvelles options.

M. John McKay: Comme vous le savez, on envisage de présenter une nouvelle Loi sur l'immigration. M. Price, après avoir assidûment contre-interrogé le ministre hier, a dit que ce nouveau projet de loi serait le «premier du millénaire».

Un des cas les plus étranges est celui d'un individu qui a commis une infraction criminelle, a été condamné, purge une peine d'emprisonnement et a été mis en libération d'office ou sur autorisation, malgré une ordonnance d'expulsion. Il me semble illogique de remettre un contrevenant en liberté alors que l'ordonnance d'expulsion qui le concerne ne peut être exécutée parce qu'il n'a pas fini de purger sa peine. Est-ce une question qui mérite notre attention?

M. Paul Kennedy: Je ne prétends nullement être un expert en matière de Loi sur l'immigration. J'ai lu dernièrement un article où il était question d'une récente décision de la cour à ce sujet, indiquant qu'il était nécessaire de régler ce problème parce que ça pourrait être considéré comme un traitement discriminatoire à l'égard des détenus. Je ne sais pas si...

M. John McKay: Je pense que l'argument de la double incrimination avait été invoqué.

M. Paul Kennedy: Oui.

Il est clair que dans ce cas-ci, il s'agit de deux facteurs contradictoires. L'un est la nécessité de dissuader de commettre des infractions donc, d'imposer une peine. L'autre est, bien entendu, la présence de la personne incriminée au Canada, étant donné qu'elle n'a pas le droit d'y être. Il faut concilier les deux. On ne peut pas renvoyer le contrevenant dans son pays parce que dans ce cas, il n'y a pas dissuasion. Par conséquent, il faut faire un compromis.

Je signale qu'il n'est pas de solution qui permette de régler tous nos problèmes à la fois comme par enchantement; c'est un défi perpétuel. Nous disposons des meilleurs modèles actuels mais, à peine avons-nous adopté un modèle que nous en préparons déjà un autre et ce, parce que d'autres problèmes surgissent du fait que les criminels réagissent aux efforts que nous faisons pour régler les problèmes en changeant de tactique.

J'espère que le comité fera diverses recommandations qui nous permettront d'améliorer une partie de notre arsenal—la Loi sur l'immigration en l'occurrence—, mais nous avons plusieurs autres problèmes à régler pour être plus efficaces en matière d'application de la loi. C'est pourquoi je situe ce type d'activité dans le contexte du crime organisé. En effet, l'individu qui fait passer clandestinement diverses personnes dans un pays s'adonne aussi à d'autres activités liées à la contrebande et est impliqué dans d'autres types d'activités illégales. Si nous parvenons à appréhender les coupables dans le contexte d'une de ces autres activités, nous espérons faire du même coup une brèche dans leur réseau.

• 0940

M. John McKay: Akwesasne est un des endroits où ce problème prend des proportions énormes. Nous avons affaire à une multitude de compétences qui se chevauchent et à un groupe puissant affirmant que personne d'autre que lui n'a compétence en la matière. Pouvez-vous donner des renseignements sur ce genre de situation où, non seulement on fait passer clandestinement des immigrants, mais où l'on s'adonne en outre, comme vous l'avez d'ailleurs fait remarquer, à d'autres activités criminelles? Votre ministère et d'autres services ont-ils réalisé des progrès à cet égard?

M. Paul Kennedy: Je crois pouvoir dire que nous sommes très conscients des problèmes de compétence que vous avez mentionnés; ils sont liés à une brèche qui s'est ouverte en matière de passage clandestin d'immigrants. Douanes Canada et la GRC ont intensifié les activités de répression dans cette région et nous collaborons, bien entendu, avec les forces policières autochtones de la réserve pour essayer de mettre un terme à cette situation. Si vous voulez des renseignements plus précis sur l'exécution de la loi et sur son efficacité, vous devriez vous adresser à Douanes Canada et à la GRC. Nous savons toutefois que cette région se trouve dans une situation unique en raison du chevauchement des compétences, et qu'elle pose des défis uniques.

M. John McKay: Dans le contexte de l'arrivée d'immigrants illégaux originaires de Chine au cours des derniers mois, votre ministère a notamment envoyé des agents de la GRC en Chine. J'imagine le tableau insolite que représente une police montée en grand uniforme parcourant la Chine pour faire de la prévention. Comment vous y prenez-vous au juste pour faire respecter les interdictions dans cette région du monde?

M. Paul Kennedy: Je me ferais un plaisir de laisser le soin au prochain témoin de répondre à cette question. Je crois en effet qu'il est accompagné d'une personne qui est allée en Chine à ce moment-là; il pourra donc vous dire si cette formule est efficace.

Quoi qu'il en soit, nous essayons de prendre conscience de la portée mondiale du problème du passage clandestin et du trafic d'immigrants; c'est une décision que nous avons prise après la réunion du G8 à Moscou et nous essayons d'y sensibiliser les membres d'autres organisations. C'est un problème auquel tous les pays sont confrontés. Il nous est impossible d'intervenir sans la collaboration d'autres pays, tantôt des pays sources, tantôt des pays de transit, qui doivent de toute façon en subir les conséquences. On aurait tendance à croire que ces départs massifs n'ont aucune importance, mais ils sont déstabilisants pour les pays concernés.

Par conséquent, nous voulons inciter les autorités concernées à reconnaître qu'elles ont des problèmes et à collaborer avec nous de leur mieux. Si nous arrivons à faire des échanges d'informations et à collaborer, nous parviendrons peut-être à intercepter quelques bateaux avant leur départ par exemple. Cependant, notre but est d'instaurer un système de coopération internationale, d'encourager l'harmonisation des lois et de faire en sorte que l'on accorde la même priorité à ce problème.

Par conséquent, ce problème est d'envergure mondiale mais pour ce qui est des renseignements précis, vos prochains témoins seront peut-être en mesure de vous aider.

M. John McKay: Merci.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Monsieur Price, vous avez cinq minutes.

M. David Price (Compton—Stanstead, PC): Merci, monsieur le président.

Je vous remercie d'être ici, messieurs.

J'ai d'abord une question toute simple à vous poser: combien de passeurs d'immigrants illégaux ont fait l'objet d'accusations et de poursuites au Canada l'année dernière?

M. Paul Kennedy: Je laisserai... Je ne sais pas. La GRC devrait avoir ce renseignement. Je signale toutefois que ce n'est pas nécessairement ainsi que l'on peut évaluer la gravité d'un problème. Je laisserai toutefois à M. Charbonneau le soin de vous donner des renseignements précis à ce sujet.

M. David Price: D'accord. Nous avons bien entendu cherché des solutions dans les mesures législatives. Je vous poserai toutefois une autre question qui peut paraître assez générale mais je vous saurais gré d'y répondre de façon aussi précise que possible: comment pourrait-on, d'après vous, dissuader les passeurs, les contrebandiers et les trafiquants?

M. Paul Kennedy: Il me semble que ce qui dissuade le plus, c'est la crainte d'être appréhendé. J'ai dit tantôt qu'une bonne méthode consistait à confisquer les produits de la criminalité et à incarcérer les coupables pour une durée suffisante, puisque c'est notre arme de dissuasion au Canada. Par conséquent, c'est l'impression que les chances de réussite sont de plus en plus réduites et que l'on ne conservera pas le profit du crime qui a un effet dissuasif. En outre, en ce qui concerne les produits de la criminalité, nous ne nous intéressons pas uniquement aux profits tirés d'une activité criminelle en particulier. En effet, si nous arrivons à prouver que vous avez d'autres biens acquis grâce à d'autres activités criminelles, nous pouvons les saisir également.

• 0945

Je crois que c'est ce qu'il faut faire. Nous devons vous donner l'impression que vous courez de plus grands risques et que vous ne risquez pas de perdre uniquement les 100 000 $ que vous allez gagner cette fois-ci mais que vous perdrez également le million de dollars ou tous les biens sur lesquels nous pourrons mettre la main. Nous pourrons même procéder à des saisies à l'étranger si vous avez placé votre argent dans un compte en Suisse ou dans d'autres pays refuges. Nous serons aussi en mesure de récupérer cet argent. Ce que nous voulons vous faire comprendre, c'est qu'il n'y aura aucun refuge sûr dans le monde. Bien entendu, nous prendrons également diverses sanctions pénales plus ou moins lourdes selon la gravité de vos activités.

La peine sera établie en fonction de la somme des infractions et de leur gravité. Bien entendu, c'est au juge qu'il appartiendra de décider de la peine appropriée.

Je crois que c'est la combinaison de ces deux types de mesures qui est efficace.

M. David Price: C'est bien pourquoi j'ai posé la première question. On n'entend pas beaucoup parler de poursuites, alors que c'est un facteur de dissuasion, comme vous venez de le confirmer.

Il me semble également que nos procédures de déportation laissent à désirer. Pourriez-vous dire comment on pourrait les rendre plus efficaces?

M. Paul Kennedy: Je suis assez spécialisé dans ma branche pour savoir que je ne suis pas un expert. Je crois que cette question relève des fonctionnaires de l'Immigration. Je ne veux pas prendre le risque de me prononcer.

M. David Price: Le solliciteur général n'intervient-il toutefois pas dans ce domaine?

M. Paul Kennedy: Chaque ministre a un mandat bien précis. Nous essayons de coordonner notre approche en réunissant tous les intervenants pour essayer de trouver une solution aux problèmes et leur faire connaître d'autres modèles. J'ai parlé du Forum sur la criminalité transfrontalière. Immigration Canada y participe de même que nos collègues américains. Cette initiative nous permet de comparer les stratégies et les chances de réussite ou d'échec.

Toute stratégie que nous adoptons doit revêtir un caractère typiquement canadien étant donné que nous avons un bagage législatif et, bien entendu, une Constitution et une Charte des droits et libertés qui nous sont propres. Par conséquent, nous devons établir des stratégies sur mesure pour le Canada. Nous ne pouvons pas nous contenter de copier un modèle étranger sous prétexte qu'il est efficace dans le pays concerné.

M. David Price: Vous avez parlé du Forum sur la criminalité transfrontalière. Il semble qu'il s'agisse d'une initiative axée principalement sur la mise en commun de l'information. Cette coopération s'étend-elle également aux poursuites et à la surveillance policières comme telles?

M. Paul Kennedy: Oui. Il ne faut pas oublier que si le crime organisé pose un tel défi, c'est précisément parce qu'il est organisé. Les criminels se concertent; ils collaborent, s'échangent des données et se communiquent leurs connaissances pratiques, ou leurs «trucs», si vous préférez.

M. David Price: C'est pourquoi nous devons nous organiser.

M. Paul Kennedy: Exactement. Bien que nous possédions les ressources nécessaires, celles-ci ne sont pas nécessairement intégrées de la façon la plus efficace—à l'échelle nationale comme à l'échelle internationale. Un des principaux avantages du Forum sur la criminalité transfrontalière est qu'il réunit des représentants des forces de police fédérales, provinciales et municipales—les principales—du Canada, des représentants des principaux organismes d'exécution fédéraux et nos homologues américains, à savoir les représentants du service d'immigration et de naturalisation, du service des douanes américain, de la Drug Enforcement Administration ou du FBI. Ce forum est placé sous la responsabilité du solliciteur général et de Mme Reno, procureur général des États-Unis.

Dans le cadre de nos réunions, trois sous-groupes sont chargés respectivement de l'échange de renseignements, du ciblage de l'exécution et des poursuites. On s'attend notamment à ce que nous échangions des renseignements signalant la présence de menaces communes. Nous transmettons des messages analogues aux organismes d'exécution américains et canadiens de sorte que nous avons la même connaissance du problème.

En ce qui concerne l'exécution, nous devons échanger nos renseignements afin de savoir qui nous ciblons, pour vérifier s'il s'agit bien des mêmes malfaiteurs puisqu'ils exploitent nos frontières au détriment des deux pays. C'est ainsi que deux pays et diverses forces policières unissent leurs efforts pour viser les mêmes groupes. Cette collaboration réduit incontestablement leurs chances de nous échapper.

En outre, bien que nous considérions que nos régimes législatifs sont très semblables, ils ne sont toutefois pas identiques. Par conséquent, nous devons communiquer et expliquer pourquoi nos lois sont différentes. Nous expliquons la différence entre les méthodes de mise sur écoute utilisées par la police au Canada et celles utilisées par la police américaine dans le but de collaborer. Nous parlons des différences entre les peines imposées au Canada et les peines imposées aux États-Unis. Nous essayons de détecter la présence d'éventuelles lacunes dans nos lois.

• 0950

Pour citer un exemple classique, nous avons constaté que, en matière de télémarketing frauduleux, une autre activité dans laquelle s'infiltre le crime organisé, des escrocs avaient établi un réseau à partir du Canada pour arnaquer des retraités américains. Au Canada, nous avons mené une campagne de sensibilisation du public assez efficace mais c'était au tour de nos voisins du Sud de se faire arnaquer.

Nous avons intégré à la Loi sur la concurrence des dispositions stipulant qu'il s'agit d'une infraction criminelle. Nous avons en outre adopté des dispositions nous octroyant les pouvoirs nécessaires pour saisir les produits de la criminalité. La Loi sur l'extradition a été modifiée en conséquence. En outre, nous avons prévu des dispositions spéciales dans le Code criminel parce qu'en matière de télémarketing frauduleux, le nombre de victimes peut aller jusqu'à 300 personnes. Il est très coûteux de faire témoigner toutes les victimes et, par conséquent, le ministre de la Justice a fait adopter des dispositions permettant aux victimes de se présenter à un lieu précis aux États-Unis, d'où leur témoignage peut être diffusé par des techniques audiovisuelles, ce qui leur évite de gros frais de voyage au Canada.

Par conséquent, grâce à la collaboration transfrontalière, c'est un secteur où nous avons détecté une faille qui était exploitée. Nous avons examiné nos lois et nous les avons adaptées en conséquence. Nous avons donc amélioré la situation et il est à espérer...

Une voix: Le but a été atteint...

M. Paul Kennedy: Exactement.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Merci bien.

Madame Augustine.

Mme Jean Augustine (Etobicoke—Lakeshore, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je vous prie de m'excuser d'être arrivée au milieu de votre exposé.

Je pense au nombre d'appels téléphoniques que je reçois à mon bureau de circonscription et de l'absence de confiance de la plupart des citoyens dans le système. Notre tâche consiste notamment à essayer, que ce soit par le biais de l'orientation des politiques ou de la législation, de rétablir la confiance des Canadiens dans le système et les convaincre de son efficacité.

On a souvent l'occasion d'entendre ou de lire dans le journal les commentaires d'un juge au sujet de la procédure: quand quelqu'un est expulsé, il va aux États-Unis mais il revient au Canada dans les 90 jours. D'après un avocat renommé, tout le monde est au courant de cela. Êtes-vous au courant? Connaissez-vous des gens qui retirent leur demande ou des demandeurs de statut de réfugié qui arrivent à aller aux États-Unis puis qui reviennent ici pour faire une autre demande? Si c'est un juge ou un avocat renommé qui affirme que tout le monde est au courant de la situation, vous devez certainement l'être aussi.

M. Paul Kennedy: Je crois que vous parlez de la décision de la juge McGillis parce que j'ai lu le même article que vous. J'ai déjà dit que je ne prétends pas être en mesure d'en parler. Vous feriez mieux de poser la question au ministère de l'Immigration car il s'agit de ses procédures. Ses procédures permettent-elles de tels abus?

Je suis au courant de quelques autres cas où des demandeurs sont allés à Buffalo pour quelque temps, puis sont revenus au Canada, mais je ne prétends pas être en mesure de dire si c'est très grave ni si c'est fréquent.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Avez-vous d'autres questions?

Mme Jean Augustine: Non. J'ai terminé.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): M. Benoit ou M. Anders. Qui veut...?

M. Leon Benoit: Je prendrai la parole le premier.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Vous avez cinq minutes.

M. Leon Benoit: D'accord.

Je voudrais seulement me renseigner. Je vous ai demandé tantôt ce qu'il faudrait faire, d'après vous, pour aider le Canada à mener une lutte plus efficace contre le crime organisé. Vous avez parlé d'un projet pilote qui avait donné d'excellents résultats, laissant ainsi entendre que c'était suffisant. Je crois que vous avez fait allusion à quelques autres initiatives. Pourriez-vous préciser quelles autres initiatives seraient nécessaires pour mener une lutte plus efficace contre le crime organisé au Canada?

M. Paul Kennedy: Je voudrais donner des précisions sur un point sur lequel je n'avais pas insisté. Dans le cadre de ce projet pilote, des unités spéciales intégrées sur les produits de la criminalité ont été créées. Nous en avons d'abord instauré trois—une à Montréal, une à Vancouver et une à Toronto. En fait, vers 1997, le nombre d'unités spéciales a été porté à 13 pour desservir d'autres régions du pays.

Divers mécanismes ont été instaurés. Ils sont toutefois axés sur des types d'infractions précises prévues au Code criminel—car il contient une liste de ces infractions—ou dans diverses lois fédérales. J'ai signalé que ces infractions étaient liées au trafic de stupéfiants ou à la contrebande de boissons alcoolisées et des produits du tabac.

Cependant, il est assez évident que d'autres types d'activités criminelles sont pratiqués dans un but lucratif. Le passage clandestin d'immigrants n'est de toute évidence pas un service personnel gratuit mais une activité à but lucratif. Par conséquent, dans le contexte de l'immigration—comme ce fut le cas dans celui du télémarketing frauduleux—il serait incontestablement utile de s'inspirer du modèle suivant: saisie des produits de la criminalité, donc saisie des biens acquis en ayant recours à des méthodes illégales, pour essayer d'enrayer le problème à ce stade du cycle. Je crois qu'il serait également utile d'envisager d'intervenir par le biais d'autres lois fédérales.

• 0955

M. Leon Benoit: Par conséquent, vous estimez que s'attaquer aux produits de la criminalité est la meilleure solution que le ministère de l'Immigration puisse adopter pour régler le problème du passage clandestin d'immigrants.

M. Paul Kennedy: Je pense que ce serait effectivement très utile.

M. Leon Benoit: En ce qui concerne le crime organisé, estimez-vous qu'il serait efficace comme mesure préventive d'imposer des peines très lourdes, notamment des peines minimales variant selon le degré de participation?

La question qui a été posée tantôt par notre collègue conservateur, M. Price, portait sur la condamnation des passeurs d'immigrants clandestins. Le problème doit être dû en partie à la loi et en partie au processus judiciaire. Je ne suis pas très bien renseigné sur le problème mais, de toute évidence, les mesures adoptées sont de la frime. Quelques amendes ont été imposées. Je crois que, dans un cas, le contrevenant a été condamné à une peine d'emprisonnement, mais je serais curieux de connaître les chiffres exacts. Tout ce que je sais à ce sujet, c'est ce que j'ai lu dans les journaux.

Ainsi vous considérez qu'il faut surtout mettre l'accent sur la saisie des produits de la criminalité. Que diriez-vous de faire de la prévention en imposant des peines d'emprisonnement très lourdes, notamment des peines minimales?

M. Paul Kennedy: J'estime pour ma part qu'il faut utiliser à la fois plusieurs de ces méthodes. J'ai commencé ma carrière de procureur à l'époque où la loi prévoyait une peine minimale d'emprisonnement de sept ans et une peine maximale d'emprisonnement à vie pour le trafic de stupéfiants. J'ai participé à plusieurs procès, ce qui prouve qu'une peine minimale n'est pas nécessairement dissuasive.

Il est évident qu'il est bon de communiquer certains messages, notamment un message visant à produire un effet dissuasif général et individuel—général en ce sens que si le public sait que les conséquences sont graves, lorsqu'un individu se prépare à commettre une infraction, il se pose des questions avant d'être trop impliqué. En prévoyant des peines maximales ou minimales, les régimes de détermination de la peine créent un contexte incitant les contrevenants potentiels à réfléchir sérieusement avant de passer à l'action.

M. Leon Benoit: D'après vous, quelle est ou quelle pourrait être ou devrait être l'efficacité de cette formule?

M. Paul Kennedy: Il est difficile d'en évaluer l'efficacité parce que nous n'avons affaire qu'à des personnes qui enfreignent les lois. C'est la même situation qu'en ce qui concerne les meurtres. Même si une peine maximale d'emprisonnement à vie et une peine minimale de 25 ans sont prévues, les meurtriers n'ont pas disparu pour autant.

Je dirais que ça doit faire partie d'un ensemble de mesures dissuasives. En effet, s'ils pensent qu'ils ne se feront pas prendre, les contrevenants ne se préoccupent pas des peines maximales ou des peines minimales. Ils sont convaincus que les risques de se faire attraper sont minimes.

J'ajouterais qu'il faut utiliser plusieurs tactiques à la fois. Dans certains cas, les perspectives de profits sont telles que, malgré la durée de la peine d'emprisonnement, on peut juger que c'est plus rentable que toutes les autres façons de gagner sa vie.

M. Leon Benoit: Est-ce la raison pour laquelle le crime organisé s'intéresse de plus en plus au passage illégal d'immigrants?

M. Paul Kennedy: Je n'en suis pas sûr. Je ne peux pas lire dans les pensées des criminels.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Merci.

Monsieur Telegdi.

M. Andrew Telegdi (Kitchener—Waterloo, Lib.): Merci, monsieur le président.

Monsieur Deacon, votre réponse à la question de M. McKay portant sur la différence entre le passage clandestin et le trafic me laisse perplexe. En effet, j'ai passé pas mal de temps dans les cours criminelles, où je travaillais...

Mme Jean Augustine: Je suis heureuse que vous ayez précisé que vous y avez travaillé.

Des voix: Oh, oh!

M. Andrew Telegdi: ... et l'un des chefs d'accusation qui revenait fréquemment était le trafic de stupéfiants. De toute évidence, des sommes considérables étaient en jeu. En fait, je n'ai connu aucun cas d'inculpation qui ne soit pas relié à de l'argent. Vous avez dit que le passage clandestin d'immigrants était une activité lucrative mais qu'il ne s'agissait pas nécessairement de trafic. Je ne comprends pas très bien.

• 1000

M. Jamie Deacon: Je peux donner quelques explications supplémentaires puisque ma réponse n'était pas assez claire. Le trafic est nécessairement une activité à but lucratif. Le paiement ne se fait pas nécessairement d'avance; il peut se faire après que l'intéressé ou l'intéressée ait passé la frontière. Si le paiement se présente sous la forme de services tels que la prostitution, ça devient de l'exploitation. La somme due est remboursée au passeur ou à l'organisation dont il relève. Par conséquent, l'argent est nécessairement lié à cette activité.

M. Andrew Telegdi: Autrement dit, le passage clandestin et le trafic sont deux notions pratiquement identiques.

M. Jamie Deacon: Je dirais qu'elles sont très apparentées.

M. Andrew Telegdi: Le ministre a dit que la stratégie que nous adoptons en matière de lutte contre le passage clandestin d'immigrants consiste à faire en sorte que ce ne soit pas rentable pour les passeurs. Cette tactique consiste à repérer les bateaux—rappelez-vous l'incident des bateaux—, à les intercepter, à détenir la cargaison humaine et à prendre une décision. Pour autant que nous soyons capables d'intervenir à toutes les étapes de ce processus, on arrive à empêcher les passeurs de faire des profits.

Je me demande si notre système de détection est vraiment efficace, étant donné que nous sommes maintenant sensibilisés au problème. Quelles sont nos chances d'arriver à repérer un bateau si l'occasion se présente?

M. Paul Kennedy: Je crois que cette question pourrait être adressée à René Charbonneau, le commissaire adjoint de la GRC, qui participe sûrement à ce genre d'intervention avec les fonctionnaires du ministère de l'Immigration et d'autres organismes gouvernementaux.

Mme Jean Augustine: Nous aurions dû les inviter.

M. Paul Kennedy: Ils sont là. Je crois qu'ils prendront la parole juste après nous.

M. Andrew Telegdi: Monsieur Kennedy, est-il exact que si nous étions en mesure d'utiliser toutes ces tactiques, le passage de clandestins par bateau cesserait?

M. Paul Kennedy: Comme je l'ai déjà signalé, ça dépend de la perception des risques d'être repéré ou des chances de ne pas l'être. Les passeurs utilisent la voie la plus facile. S'ils pensent qu'ils ne seront pas repérés dans les eaux canadiennes, c'est la voie qu'ils emprunteront. Si nous sommes capables de renforcer nos services de détection, cette voie de passage leur semblera inintéressante compte tenu des risques de se faire saisir leur bateau et des autres mesures de répression auxquelles ils s'exposent.

M. Andrew Telegdi: J'attendrai que la GRC ait témoigné pour poser la question suivante.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): D'accord.

Je vous remercie pour votre exposé. Merci d'être venus. Nous apprécions votre collaboration.

M. Paul Kennedy: Nous avons remis au greffier un document qui pourrait vous être utile. Il s'agit d'une feuille d'information concernant le Plan d'action fédéral contre le crime organisé. Ce document décrit diverses initiatives qui ont été prises dernièrement. Par conséquent, il pourrait vous être utile.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): C'est parfait. Merci beaucoup.

Avant de donner la parole à l'autre groupe de témoins, je suggère de faire une pause de cinq minutes. Nous ferons en quelque sorte une relève de la garde puisque certains d'entre nous doivent s'en aller et que d'autres arrivent. Nous ferons donc une pause de cinq minutes.

• 1003




• 1007

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Nous poursuivons nos délibérations portant sur l'étude du processus de détermination du statut de réfugié et migrants clandestins. Nous souhaitons la bienvenue aux représentants de la GRC.

Nous recevons le commissaire adjoint, M. René Charbonneau, directeur des services fédéraux; le surintendant Raymond Lang, sous-directeur responsable des affaires fédérales et de l'immigration, Direction des services fédéraux—c'est un long titre—et le sergent Bill MacDonald, réviseur analyste senior des affaires fédérales et de l'immigration, Direction des services fédéraux.

Bonjour. Soyez les bienvenus. Je vous remercie d'être venus. Nous vous écoutons d'abord. Ensuite, mes collègues vous poseront des questions.

Commissaire adjoint René Charbonneau (directeur, Services fédéraux, Gendarmerie royale du Canada): Merci, monsieur le président.

Je me demande si je devrais remercier M. Kennedy de m'avoir laissé un si grand nombre de questions.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Il vous a fait un cadeau empoisonné.

Comm. adj. René Charbonneau: Je vous permettrai de me poser ces questions. Je verrai bien si je peux y répondre. À propos, je signale que ce n'est pas moi qui suis allé en Chine. Je commence.

De nos jours, certaines organisations internationales suggèrent qu'il y a jusqu'à 125 millions de migrants à travers le monde. Pour plusieurs d'entre eux, notre stabilité politique, notre richesse et notre générosité font de l'Amérique du Nord une destination de choix. Ces facteurs agissent aussi comme incitatifs auprès des personnes qui recherchent un asile pour la première fois, ainsi qu'auprès de celles qui ont épuisé leurs options ou qui, pour d'autres raisons, choisissent de quitter le pays dans lequel elles résident actuellement.

L'amélioration des moyens de transport a accru de façon formidable les options de mobilité d'une grande partie de la population mondiale. Les communications modernes ont aussi joué un rôle important en créant un village planétaire.

[Français]

La technologie perfectionnée actuelle a eu aussi pour résultat la prolifération de documents frauduleux de voyage et d'identité qui mettent les autorités du monde entier au défi d'établir leur authenticité. Nous faisons face aujourd'hui à des défis de plus en plus divers et sérieux que posent les migrations mondiales accrues et l'irruption illégale en Amérique du Nord.

Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme est d'avis que le respect des droits fondamentaux des migrants ne doit pas porter préjudice au droit souverain de tous les États de décider qui doit ou ne doit pas entrer sur leur territoire, ou de limiter ce droit de quelque autre manière.

• 1010

[Traduction]

Aujourd'hui, le Programme d'exécution de la loi en matière d'immigration et de passeport de la GRC s'exerce avec la mise en place d'un peu moins de 200 membres réguliers, en poste dans 17 sous-directions des questions d'immigration et de passeport dans l'ensemble du Canada. Dans les régions où il n'y a pas de sous-directions des questions d'immigration et de passeport, la fonction est exercée par des sous-directions de l'exécution des lois fédérales ou du personnel de police à contrat, selon les besoins.

Actuellement, plus que jamais auparavant, ces ressources limitées font face à des défis de plus en plus divers et sérieux, que posent la migration mondiale accrue et l'irruption illégale en Amérique du Nord.

[Français]

En reconnaissant cette réalité et en maintenant les priorités établies par le gouvernement du Canada à propos de la santé et de la sécurité des Canadiennes et des Canadiens et en maintenant l'offensive correspondante entreprise par les organismes d'exécution des lois contre la criminalité organisée, le Programme d'exécution de la loi en matière d'immigration et de passeports de la GRC a mis celle-ci en mesure d'assurer un service plus efficace.

Pour renforcer nos buts et mesures, nous avons établi un large éventail d'initiatives et trois priorités précises conçues pour combattre et éradiquer les organisations criminelles qui participent au trafic d'êtres humains. Cette adaptation du programme a été faite en réponse aux réalités mondiales et nationales et en consultation avec une vaste gamme de partenaires et de clients sur les plans national et international.

En conservant notre objectif de dispenser un service de qualité et en reconnaissant les réalités mondiales actuelles, nous avons défini la stratégie nationale du Programme d'exécution de la loi en matière d'immigration et de passeports comme suit: «combattre et éradiquer le passage d'illégaux». Nous avons déterminé que la promotion de cette stratégie devenait une composante de toutes les activités du programme. Cette stratégie est mise en oeuvre en conformité avec le mandat national concernant l'immigration et les passeports, l'exécution des responsabilités liées au programme national et la prééminence des priorités du programme national.

[Traduction]

Le thème et les principes directeurs de notre programme proviennent du mandat relatif à l'immigration et aux passeports qui énonce:

    Le Programme d'exécution de la loi en matière d'immigration et de passeport travaille en collaboration avec des services canadiens et étrangers, à tous les niveaux, et avec l'ensemble de la collectivité afin de maintenir et d'améliorer la qualité de vie au moyen de la sensibilisation, la prévention et l'application de la loi.

Ces trois réponses au mandat, sensibilisation, prévention et application de la loi, sont reconnues comme étant les outils les plus importants pour la résolution de problèmes dans le cadre du programme. Nous attendons de nos membres non seulement qu'ils les prennent en compte et les appliquent dans leurs activités, mais nous les encourageons aussi à reconnaître que le programme met bien l'accent sur la prévention et leur obligation d'utiliser cette réponse par elle-même ou en combinaison avec les autres. Nous sommes convaincus que la prévention est l'outil le plus sûr et le plus efficace pour combattre les passeurs de migrants clandestins.

Dans notre effort constant pour combattre le trafic de migrants et en reconnaissance de la relation interactive entre les programmes de l'immigration, de la citoyenneté et des passeports, le Programme d'exécution de la loi en matière d'immigration et de passeport a reconnu et clairement exprimé ses responsabilités principales:

    Le Programme d'exécution de la loi en matière d'immigration et de passeport, conformément à la stratégie nationale, est chargé d'enquêter sur les infractions à la Loi sur l'immigration, à la Loi sur la citoyenneté et au Code criminel, notamment celles qui sont reliées à la citoyenneté, aux passeports, aux fraudes, aux faux et aux complots.

Nous avons développé ces responsabilités en étroite collaboration avec les ministères et elles peuvent faire l'objet de modifications ou de révisions pour répondre à de nouvelles tendances ou à de nouveaux défis.

[Français]

En vue d'exécuter de manière proactive notre stratégie nationale, nous avons établi trois priorités d'exécution de la loi dans le cadre du programme. L'établissement de ces priorités a été le résultat de sondages, de réunions avec les personnes oeuvrant au programme sur le terrain, ainsi que de consultations et de discussions avec les ministères associés concernés. Nous pensons que l'accent mis clairement sur un nombre précis de priorités a rendu plus claires les mesures qui ont permis aux sections locales de se concentrer sur la stratégie du programme visant à éliminer le passage de migrants clandestins au Canada.

• 1015

Cet établissement des priorités a également fait en sorte d'harmoniser le programme aux priorités du gouvernement fédéral et de la GRC, dans la mesure où le crime organisé est, de façon claire et sans équivoque, la cible de nos efforts.

[Traduction]

La première priorité est la lutte contre les organisations criminelles impliquées dans le passage de migrants non autorisés au Canada. Les Nations Unies ont calculé que 15 millions de personnes de la population mondiale totale de migrants étaient transportées vers leurs pays actuels par des passeurs professionnels.

Le passage d'étrangers clandestins est une activité lucrative et attrayante pour les groupes considérés comme des groupes du crime organisé «traditionnels» et pour des groupes du crime organisé qui se consacrent spécifiquement à cette tâche. Le Centre international pour l'élaboration des politiques en matière de migrations estime que, mondialement, les passeurs de clandestins font des profits s'élevant jusqu'à 9,5 milliards de dollars par année, soit deux fois les gains annuels du cartel de la cocaïne de Medellin, au sommet de sa puissance. Il existe de grandes potentialités de profit pour les passeurs de clandestins, car l'on a établi qu'une organisation criminelle fera payer à un migrant éventuel jusqu'à 70 000 $ pour faciliter un voyage illégal en Amérique du Nord.

Les groupes qui participent activement à ce commerce illégal incluent les sociétés triades d'Asie et les groupes criminels de l'Europe centrale et de l'Est. Plusieurs de ces organisations participent à d'autres entreprises criminelles et utilisent des photos, et des documents de voyage frauduleux et des migrants illégaux en vue de faire progresser leurs activités dans des domaines comme le trafic de stupéfiants, le recyclage d'argent, la prostitution et les jeux d'argent.

Comme exemple de nos efforts, en 1998, notre programme a été engagé dans plus de 1 000 cas liés au passage de migrants clandestins effectué par la criminalité organisée. Plus de 6 000 documents de voyage ou d'identité frauduleux, ayant une valeur de revente évaluée à plus de 95 millions de dollars, ont été saisis en vertu du programme.

[Français]

La deuxième priorité est l'application de mesures dissuasives afin de contrer les activités illicites ou illégitimes des facilitateurs professionnels en matière d'immigration.

Les membres de la GRC ont le pouvoir de faire enquête sur des délits d'action ou de corruption de la part d'employés du gouvernement. Nous faisons aussi des enquêtes sur des plaintes portées contre des conseillers en immigration et des avocats spécialisés en droit de l'immigration, plaintes qui proviennent souvent de membres du public qui pensent avoir été victimes de ces fournisseurs de services. Ce genre d'enquête est généralement de nature complexe et peut se faire non seulement au Canada mais aussi dans des missions canadiennes à l'étranger.

[Traduction]

La troisième priorité est de recueillir et partager en temps opportun des renseignements se rapportant à l'amélioration de la stratégie nationale du programme. Le Programme d'exécution de la loi en matière d'immigration et de passeport de la GRC recueille, analyse et diffuse des renseignements tactiques concernant toutes les organisations étrangères de passage d'étrangers clandestins, auprès des organes judiciaires étrangers nationaux. Ces renseignements sont entrés dans une base de données de la GRC. Il y a actuellement près de 16 000 suspects entrés dans ce système et une partie de ces renseignements est partagée avec INTERPOL en vue de la création et de la diffusion de bulletins d'information dans tous les pays membres.

Pour respecter cette priorité, nous avons créé un certain nombre de banques de renseignements et les avons mises à la disposition d'un large éventail de partenaires, sur les plans national et international. Par des consultations et dans le cadre du mandat du programme, les organes judiciaires internationaux sont des partenaires conjoints actifs des initiatives canadiennes d'exécution de la loi en matière d'immigration. Afin de combattre le problème du passage de migrants clandestins. Dans le but de travailler de manière plus efficace avec les organes judiciaires nationaux et internationaux, notre programme soutient et fait la promotion de l'établissement de niveaux plus élevés de collaboration et de communication au sein de la collectivité chargée de l'application de la loi.

[Français]

Le but stratégique général du Programme d'exécution de la loi en matière d'immigration et de passeport, en vue de combattre et d'éradiquer le passage de migrants clandestins, a été élaboré à partir de ce que nous avons appris au cours des 30 dernières années et en fonction des priorités canadiennes actuelles gouvernementales et organisationnelles. À cause du grand nombre, toujours croissant, de migrants mondiaux et des défis internes auxquels font face nos enquêteurs, nous reconnaissons que cette stratégie n'atteindra pas son but sans un effort important et l'élaboration de partenariats multiples.

• 1020

[Traduction]

L'expérience nous a appris que ce n'est qu'en travaillant ensemble dans des partenariats mutuellement avantageux et coopératifs que nous aurons un impact sur les phénomènes créés par la migration mondiale de masse et les groupes de la criminalité organisée qui profitent de cette expression de la détresse humaine. Dans ce but, le plan de notre programme national, la brochure d'information de la sous-direction, les exemples récents et un éventail croissant d'indicateurs statistiques valables illustrent notre engagement complet envers cet objectif. Nous sommes convaincus que nos efforts et nos réalisations, ainsi que la démonstration claire de notre fermeté et de notre détermination pour relever ce défi, se révéleront être un modèle et une inspiration pour d'autres, et seront, au fil du temps, confirmés comme éléments clés dans notre lutte contre la criminalité organisée et ceux qui cherchent à profiter de l'exploitation de la misère et de la souffrance humaines.

Je suis prêt à répondre à vos questions.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Merci bien.

Allez-y, monsieur Telegdi.

M. Andrew Telegdi: Merci bien, monsieur le président.

Parlez-vous chinois?

Comm. adj. René Charbonneau: Je ne parle pas chinois, mais les Chinois ont été très aimables à notre égard. L'adjoint du ministre responsable de la sécurité en Chine m'a dit qu'il n'y avait qu'une langue, celle de la police. Nous étions entre policiers et c'était très aimable de sa part.

M. Andrew Telegdi: Certains membres de la GRC parlent toutefois chinois.

Comm. adj. René Charbonneau: Oui. Un des nôtres est actuellement à Hong Kong; il nous représente en Chine.

M. Andrew Telegdi: Merci.

Comme je le disais précédemment, si nous faisons en sorte que l'entreprise cesse d'être lucrative, on cessera de passer des immigrants par bateau. La question que je voudrais poser concerne la surveillance que nous exerçons. Le repérage des bateaux en mer est-il suffisant maintenant que nous sommes en alerte?

Comm. adj. René Charbonneau: J'ai essayé de mettre l'accent sur l'importance des échanges d'informations. Il faut que les renseignements viennent d'abord de l'extérieur. Nous devons être capables d'établir un système efficace d'échange d'informations au moment opportun. Je crois que c'est la base du travail de la police. C'est une des principales raisons pour lesquelles je suis allé en Chine—c'est entre autres pour examiner le problème du crime organisé en général.

Nous devons savoir d'avance ce qui se passe. Nous devons être capables de suivre l'activité criminelle pour faire, si possible, de la prévention; cependant, si l'activité se poursuit, nous devons être capables d'identifier les dirigeants de ces organisations. C'est ce qui est difficile pour les forces policières.

M. Andrew Telegdi: Est-il toutefois exact que le trafic en haute mer est surveillé par les États-Unis et par nos forces armées? Quand vous voyez approcher un navire qui correspond au profil des bateaux utilisés pour le passage d'illégaux, avez-vous une idée assez précise de ce dont il s'agit avant qu'il n'atteigne nos côtes?

Comm. adj. René Charbonneau: Si nous arrivions à obtenir des renseignements du pays de départ—la Chine, par exemple—et que nous pouvions empêcher le bateau de partir, ce serait de loin préférable. C'est ce que nous essayons de faire. Cependant, il y a beaucoup d'autres pays que les États-Unis et le Canada qui participent à la surveillance, comme l'Australie. C'est pourquoi j'insiste tant sur l'importance de la collaboration en matière d'application de la loi, au Canada et à l'échelle mondiale. J'en ai parlé maintes fois au cours des deux ou trois dernières années, surtout depuis un an.

Ma vision est celle d'une force policière mondiale colossale. C'est à cette échelle qu'il faut faire des projets. En matière d'application de la loi, on ne peut pas se contenter de penser à l'échelle d'une ville, d'une province ou d'un pays. Il faut avoir une vision mondiale.

M. Andrew Telegdi: Il y a une petite pensée qui m'obsède. En raison de son régime politique, la Chine est un des pays d'origine des réfugiés. Par conséquent, quand un Chinois demande le statut de réfugié, nous devons l'écouter.

• 1025

En ce qui concerne la surveillance, je crois que nous en parlerons avec les militaires. Ils participent à la surveillance, bien entendu, mais je voudrais savoir si vous avez de bons contacts avec les forces armées, et particulièrement avec la marine.

Comm. adj. René Charbonneau: Nous avons de très bons contacts avec le ministère de la Défense nationale. Il y a des employés du ministère qui ont leur bureau juste à côté du mien et nous avons des programmes spéciaux communs de lutte antidrogue.

Il faut, bien entendu, tenir compte des règles complexes du droit international. Comme je l'ai dit tantôt, dans le contexte de la mondialisation, un des grands défis auxquels les législateurs et les forces policières du monde entier seront confrontés est l'harmonisation des lois dans le but d'empêcher les malfaiteurs de sévir dans un pays. Plusieurs pays pauvres seront ciblés par le crime organisé et par conséquent, nous devons veiller à harmoniser nos lois. Nous avons déjà commencé à faire des efforts en ce sens et nous les poursuivons.

Je suis allé en Amérique du Sud pour y rencontrer mes homologues. Je suis allé en Asie ainsi que dans les Caraïbes. Je suis allé dans de nombreux pays. Nous avons de très bons contacts avec les forces policières de nombreux pays.

Par conséquent, dans les milieux policiers, il est indispensable non seulement que nous accordions nos violons mais aussi que tous les pays démocratiques se mobilisent pour lutter contre le crime organisé et harmoniser leurs lois.

M. Andrew Telegdi: Merci.

L'autre question que je voudrais poser concerne les passeports dont vous avez beaucoup parlé. Nous avons eu des cas de trafic de faux passeports. Il y a même eu des cas graves où des citoyens de pays étrangers ont utilisé des passeports canadiens pour faire du contre-terrorisme.

Je trouvais alors que l'on n'était pas assez sévère dans ces cas-là. Estimez-vous qu'il faudrait alourdir les peines pour trafic de passeports? Estimez-vous qu'il serait utile d'être plus sévère?

Comm. adj. René Charbonneau: C'est une priorité importante pour la GRC. Un des problèmes actuels est qu'en raison des progrès de la technologie, il est très difficile de détecter toutes les fraudes. Vous avez peut-être déjà vu par exemple des photocopieurs au laser semblables à ceux dont se servent les faux-monnayeurs. C'est un défi supplémentaire à relever.

En ce qui concerne mes opinions sur la détermination de la peine, je dirais que j'adopte une approche dosée en la matière. Je suis un fervent partisan de la prévention. Cependant, il faut faire en sorte que les personnes qui exploitent la démocratie, qui exploitent abusivement le Canada... Les Canadiens sont assez bons de nature mais j'estime que ceux qui exploitent le système doivent être punis, surtout quand il s'agit de trafic de stupéfiants ou de n'importe quelle autre activité liée au crime organisé, y compris le passage clandestin de migrants.

Il faut punir les individus qui sont à la tête de ces organisations. Ils abusent de notre système. Le problème est qu'ils sont loin de la rue. Ils ne sont pas armés. Ils sont dans des bureaux situés dans des gratte-ciel. Ils ont des coffres-forts, de l'argent—bref, ils ont tout. Ils possèdent la technologie nécessaire. Ils ont à leur service des experts, des comptables et des conseillers.

Dans le cadre de la plupart de nos opérations de lutte contre le crime organisé, nous collaborons en permanence avec de cinq à dix pays. Lorsque je pense à la tâche qui nous attend d'ici cinq à douze ans, ça m'effraie. Je suis toutefois convaincu qu'aussi bien à la GRC que dans les forces policières canadiennes en général, nous nous sommes efforcés de trouver des solutions.

Par conséquent, nous n'avons pas trop de craintes. Nous avons du personnel compétent et de très bons plans. Cependant, la tâche à accomplir à l'échelle mondiale est énorme.

• 1030

M. Andrew Telegdi: Dans votre rapport, vous avez parlé de «conseillers dénués de scrupules». Les députés et certains avocats ont souvent affaire à des personnes qui ont recours aux services de conseillers qui sont, dans certains cas d'une honnêteté douteuse. Si nous avons des soupçons, pouvons-nous appeler votre bureau pour vous en parler?

Comm. adj. René Charbonneau: C'est un des domaines où nous demandons la collaboration de tous les citoyens. Le crime organisé n'est pas un problème policier, c'est un problème de société et il faut essayer de faire de la prévention dans ce domaine. Si un citoyen a des renseignements susceptibles de nous mettre sur la piste d'un criminel, il doit nous les communiquer. Nous tenons à être mis au courant.

Plusieurs affaires dans lesquelles sont impliqués des conseillers sont actuellement devant les tribunaux. Je ne peux pas trop en parler, mais nous nous chargeons aussi de ce genre de criminalité.

Tous les moyens sont bons pour faire de l'argent mais quand il s'agit de migrants, c'est de l'exploitation de la misère humaine. Ces malfaiteurs abusent de la détresse de certaines personnes qui sont au Canada et qui ne connaissent pas le système ni le pays. Ces immigrants ont peut-être eu des difficultés dans leur pays d'origine et, par conséquent, lorsqu'elles sont ici, elles ont peur de parler à la police à cause des préjugés qu'elles ont à son égard.

Voilà un des aspects des difficultés que nous rencontrons dans le domaine de l'immigration.

M. Andrew Telegdi: Merci.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Monsieur Bigras.

[Français]

M. Bernard Bigras (Rosemont, BQ): J'aimerais surtout traiter de votre deuxième priorité. M. Telegdi en a parlé tout à l'heure, mais j'aimerais surtout obtenir des réponses quant au pouvoir d'enquête que vous avez dans les cas de corruption parmi les employés du gouvernement. Naturellement, il y a souvent des conseillers, des spécialistes et des avocats qui sont impliqués, mais il y a aussi des employés du gouvernement.

Au mois d'août dernier, on apprenait qu'au consulat de Hong Kong, 2 000 visas vierges avaient subitement disparu comme par enchantement, par l'opération du Saint-Esprit peut-être. On ne savait pas où ils étaient allés; ils avaient tout simplement disparu. On apprenait aussi que 700 noms dans un fichier liés aux Triads étaient disparus.

On a aussi appris que des enquêtes étaient menées, dans certains cas depuis 1995, mais qu'elles n'avaient pas été concluantes. Je dois vous dire que les réponses de vos services, datées du mois d'août dernier, étaient très peu convaincantes.

J'aimerais d'abord savoir quels paramètres sont retenus dans de telles enquêtes portant sur les risques de corruption chez les employés du gouvernement. Quels sont les paramètres qui sont pris en considération en matière de corruption des employés du gouvernement dans nos bureaux à l'étranger?

Comm. adj. René Charbonneau: Le mandat de la GRC est de travailler en utilisant les paramètres relatifs au Code criminel et aux lois fédérales. On mène une enquête criminelle. Dans le cas que vous mentionnez, je ne crois pas être capable de vous donner une réponse plus concluante que celle du mois d'août parce que l'enquête est toujours en cours. Ce n'est vraiment pas le moment et le lieu pour commenter une enquête qui est encore en cours.

Je puis vous dire que chaque cas de corruption est considéré comme une priorité par la GRC. Qu'il s'agisse de Canadiens, ici au pays ou à l'extérieur, de policiers ou de n'importe qui d'autre, une personne soupçonnée de corruption devient une priorité pour la GRC.

L'enquête administrative ne relève pas de nous. Certaines enquêtes prennent énormément de temps, parfois des années, avant que nous puissions les conclure. Alors, je ne peux vraiment pas être plus précis à propos du cas que vous mentionnez, parce qu'il y a déjà une enquête en cours. Je m'en excuse.

M. Bernard Bigras: D'accord, mais vous comprenez l'importance de la question. Naturellement, quand on veut faire la lutte au crime organisé, quand on veut faire la lutte au trafic, il faut quand même démontrer qu'on a patte blanche dans nos propres services. Sinon, on est très mal placé pour être des porte-parole du crime organisé en certaines matières.

Je voudrais savoir, s'il vous est possible de me répondre, s'il y a d'autres enquêtes actuellement en cours sur d'autres bureaux à l'étranger que celui qu'on connaît déjà, soit celui de Hong Kong. Est-ce qu'il y a d'autres enquêtes menées par la GRC dans des consulats du Canada par rapport à la disparition de fichiers, de visas vierges ou de tout autre document?

• 1035

Comm. adj. René Charbonneau: Monsieur le président, encore une fois, je ne crois pas que la GRC ait le mandat de divulguer des informations de cette nature. Par contre, je peux vous répéter que la corruption est considérée comme une priorité; on mettra de côté bien des enquêtes pour s'occuper particulièrement d'un seul cas de corruption.

Vous avez sûrement lu ou entendu, depuis un an ou deux, que nous avons été passablement actifs dans les cas de corruption, concernant aussi bien des personnes qui travaillent pour le gouvernement fédéral que des avocats ou des juges ou qui que ce soit d'autre. Beaucoup de causes sont en appel et on ne peut donc les commenter. Cependant, je peux vous assurer que je suis entièrement d'accord avec vous que tout ce qui est rattaché aux institutions publiques doit être absolument au-dessus de tout soupçon. Je suis 100 p. 100 d'accord avec vous, et c'est pourquoi c'est notre priorité numéro un.

M. Bernard Bigras: Monsieur le président, y a-t-il eu dans le passé des enquêtes dont les conclusions ont permis de porter des accusations contre des fonctionnaires fédéraux travaillant dans des bureaux à l'étranger?

Comm. adj. René Charbonneau: Je n'aimerais pas vous donner de fausses indications. Je dirais que oui, mais je préférerais vérifier avant de vous donner une réponse officielle à cette question.

Il faut comprendre que des personnes du pays où les choses se passent, qui ne sont pas nécessairement des Canadiens, travaillent dans nos ambassades. Il faut faire la distinction entre le personnel canadien officiel et les contractuels qui travaillent pour le gouvernement du Canada à l'extérieur du pays.

M. Bernard Bigras: Si des accusations avaient été portées dans le passé, vous serait-il possible de faire savoir au comité quel bureau était visé?

Comm. adj. René Charbonneau: Il faudrait que je vérifie auparavant. Je vous ai bien dit que je croyais qu'il y en ait eu, mais je dois absolument vérifier auparavant. C'est quelque chose de très important et je ne veux pas informer faussement votre comité, monsieur le président.

M. Bernard Bigras: Merci.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Merci beaucoup.

[Traduction]

Monsieur Limoges.

M. Rick Limoges (Windsor—St. Clair, Lib.): Merci, monsieur le président.

En ce qui concerne la deuxième priorité, M. Telegdi a posé des questions que je trouve particulièrement intéressantes. Vous avez également entendu les commentaires désabusés de M. Bigras sur quelques problèmes d'ordre plus général.

Il n'y a pas très longtemps que je suis député et je serai honnête avec vous—maintenant, je suis en quelque sorte un ancien parce qu'il y a eu quelques nouveaux depuis lors. Je dois dire que je suis stupéfait par le genre de commentaires que j'ai entendus cette année en ce qui concerne la corruption au niveau des formalités d'immigration par exemple. Il est généralement très difficile de mettre le doigt sur la plaie. Par exemple, selon la rumeur populaire, si vous voulez obtenir des résultats, vous devez vous adresser à tel ou tel conseiller ou, dans le cas dont je parle, à des avocats résidant aux États-Unis pour qu'ils viennent défendre votre dossier au Canada. Grâce à leur intervention, la question est réglée très rapidement et définitivement. Ils obtiennent ce qu'ils veulent.

Il me semble que nous devons tous collaborer pour mettre un terme à ce genre d'abus. On n'arrivera peut-être jamais à éradiquer le problème mais nous tenons à vous aider de notre mieux. Je sais que mes collaborateurs se feraient un plaisir de se rendre utiles et je suis certain qu'il en est de même pour la plupart des employés du gouvernement. La GRC ou un autre organisme pourrait-elle organiser un programme spécial de formation qui pourrait aider à détecter ce genre d'abus, qui permettrait aux participants de connaître les indices à surveiller, de savoir comment détecter une situation louche et quelles questions il faut poser pour démasquer les coupables. Ça nous permettrait de collaborer avec vous de façon efficace et de faciliter vos enquêtes.

• 1040

Comm. adj. René Charbonneau: Merci beaucoup. C'est une excellente question.

Comme je l'ai signalé tantôt, je suis un fervent partisan de la prévention et de la sensibilisation. La GRC a effectivement des programmes. Appelez le bureau local de la GRC ou le bureau d'Ottawa et je suis certain que l'on fera le nécessaire pour vous offrir le programme de sensibilisation qui convient. Nous avons fait de gros efforts dans ce domaine.

Notre formation a été modifiée il y a cinq ou six ans; elle est maintenant axée sur la résolution des problèmes. J'en ai d'ailleurs parlé dans mon exposé. Nous voulons être une force policière axée sur la résolution des problèmes notamment par une application vigoureuse de la loi. Ça fait partie du processus.

Par contre, en ce qui concerne le domaine de la lutte antidrogue, la situation est différente; en effet, parmi les personnes qui vendent de la drogue au coin des rues, plusieurs sont davantage des victimes que des criminels. C'est pourquoi la police doit trouver des solutions avec le concours des services de traitement, des services sociaux et de la collectivité. L'incarcération n'est pas nécessairement la solution par excellence. D'autres options sont possibles. Nous devons contribuer à la recherche d'une solution.

Si nous pouvons être utiles, nous serons là. Nous élaborons de nombreux programmes de prévention. Mon collègue le sergent MacDonald est allé diriger quelques séances d'information à l'étranger et, en menant des campagnes de prévention actives à l'étranger, nous avons peut-être dissuadé quelques personnes de se cacher dans des conteneurs où elles auraient pu trouver la mort.

Bill, vous pourriez peut-être...

M. Rick Limoges: Avant de poursuivre cette discussion—étant donné que nous n'avons que très peu de temps pour les questions—, nous pourrions peut-être vous demander... Je sais que vous ne disposez pas de ressources considérables, mais existe-t-il une possibilité de faire de la prévention de manière plus active en rendant ces programmes de formation accessibles au personnel politique, aux citoyens, aux collectivités d'immigrants établies dans nos municipalités et aux employés du gouvernement? Y a-t-il une possibilité de les mettre au courant de ces programmes et de rendre ceux-ci accessibles...?

Comm. adj. René Charbonneau: Comme je l'ai signalé tantôt...

M. Rick Limoges: Ça comprend tout, des enregistrements aussi bien qu'un programme officiel.

Comm. adj. René Charbonneau: ... je ne tiens pas à ce que nos employés essaient uniquement de faire des arrestations. Je veux qu'un certain pourcentage de nos ressources humaines se consacre à la prévention. Ça fait partie des fonctions policières. Nous avons distribué quelques brochures; vous les verrez. Comme je l'ai dit tout à l'heure, cette approche dosée, c'est-à-dire la prévention, est une priorité importante pour la GRC. Vos employés pourraient peut-être se mettre en rapport avec notre bureau et nous leur dirons tout ce que nous pouvons faire.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Le sergent MacDonald a-t-il d'autres commentaires à faire?

Sergent Bill MacDonald (réviseur analyste senior des affaires fédérales et de l'immigration, Direction des services fédéraux, Gendarmerie royale du Canada): Oui, si vous me le permettez. Le commissaire adjoint Charbonneau a parlé de l'exécution de la loi par le biais de la prévention: il s'agit d'empêcher des individus ou des groupes de criminels organisés de pénétrer sur le territoire canadien.

Dans le cadre de notre programme, j'ai eu l'occasion d'intervenir au sujet d'un incident concernant le passage d'illégaux dans des conteneurs. Le passage était assuré par une compagnie maritime en particulier, qui utilisait le port de Halifax comme point d'entrée et le Royaume-Uni comme point de départ. Nous sommes allés avec des enquêteurs de Halifax au Royaume-Uni et avons formé des partenariats avec divers organismes britanniques qui s'intéressaient à ce type d'activité. Nous avons fait de la sensibilisation au problème.

• 1045

Grâce à cette sensibilisation—ça se passait au mois de juin—, les autorités du port de Liverpool, au Royaume-Uni, ont mis en place diverses mesures préventives; elles ont notamment renforcé la sécurité physique dans la région portuaire, fait installer un système de surveillance par caméras de télévision en circuit fermé et offert des primes aux débardeurs signalant les individus se trouvant dans la zone portuaire sans y être autorisés. Depuis que nous avons fait ce petit investissement dans la prévention, on n'a signalé aucune autre arrivée, au port de Halifax, de personnes ne possédant aucun document ou possédant de faux documents qui soient arrivées à passer à travers les mailles des programmes de Citoyenneté et Immigration Canada.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Très bien.

Monsieur Price.

M. David Price: Merci, monsieur le président.

[Français]

Monsieur Charbonneau, on sait que depuis plusieurs années, vos budgets ont été coupés et même massacrés. Cela signifie une diminution des effectifs dans les ambassades et les consulats dans d'autres pays.

Je vous poser une question sur cela. Est-ce que cela veut dire que des contractuels des pays étrangers remplacent ces agents? Je vous pose une autre question avant que vous répondiez à celle-ci.

M. Kennedy a mentionné que vous aviez 100 officiers de plus dans les trois aéroports ici au Canada. Avec les diminutions d'effectifs et de budgets, de quelle façon arrivez-vous à payer ces 100 officiers supplémentaires?

Comm. adj. René Charbonneau: Votre première question a trait à ce que j'ai dit plus tôt en réponse à une question de M. Bigras. Les contractuels sont des personnes qui travaillent dans les ambassades en tant que soutien administratif. Elles n'exercent aucune fonction policière. Nous avons des officiers de liaison à l'extérieur du pays.

M. David Price: Je comprends cela. Tout de même, avant que les budgets ne soient coupés, est-ce que vous aviez plus d'officiers sur place qui accomplissaient une partie des tâches que font maintenant des gens du pays?

Comm. adj. René Charbonneau: Non. Le travail de policier est vraiment particulier, surtout à l'extérieur du pays. Les contractuels ont leur propre mandat. Le mandat de policier est vraiment spécial, particulièrement à l'extérieur du pays, où on n'a pas aucun pouvoir en tant qu'agent de la paix.

Maintenant, j'ai vraiment mis l'accent sur la mondialisation, sur la dimension internationale de nos enquêtes. Avec l'accroissement du défi mondial sur le plan technologique, en rapport avec le crime organisé, etc., il est clair, net et précis qu'il faut plus d'effectifs à l'extérieur du pays pour s'assurer de recevoir l'information à temps. C'est extrêmement important.

Nos demandes au gouvernement fédéral ont été faites en fonction de cela. Pour combattre le crime organisé, il faut être extrêmement présent à l'extérieur du pays, dans les pays où se trouve la source des crimes dans le domaine de la drogue, dans les pays où il existe des problèmes majeurs. Il nous est facile de les identifier.

Je peux vous répéter ce que je dis depuis un bon bout de temps, à savoir qu'il nous faut être proactifs et échanger rapidement l'information parce que les criminels voyagent. Ils voyagent énormément et très rapidement. Ils ont toute la technologie à leur portée. En quelques jours, ils font trois ou quatre pays. Je ne parle pas de villes ou de provinces situées seulement en Amérique du Nord, mais de villes situées en Europe, en Asie et au Canada. Ils voyagent autant que cela.

Il faut donc avoir quelqu'un sur place à qui transmettre l'information et auprès de qui s'assurer qu'on donne suite à cette information. Si vous n'êtes pas présent...

J'ai été à Bangkok. Si nous n'étions pas présents aux côtés de la police nationale thaïlandaise, nous n'aurions sans doute pas un service aussi rapide que celui que nous souhaitons avoir.

Cela fait partie de l'action à l'aube de l'an 2000. Les choses vont vite et c'est ainsi partout dans le monde.

M. David Price: Mais sans effectifs...

Comm. adj. René Charbonneau: Il faut des effectifs. Il en faut.

M. David Price: Comment pouvez-vous y arriver sans en avoir plus?

• 1050

Comm. adj. René Charbonneau: En ce qui touche aux aéroports, sans transgresser la règle qui protège les renseignements privilégiés, je crois qu'il est tout à fait normal que je vous dise qu'en toute logique, les points d'entrée au Canada, que ce soit sur la côte ouest ou sur la côte maritime de l'est, que ce soit aux postes frontières ou dans les aéroports, sont considérés comme des endroits stratégiques sur le plan policier. Il faut donc dans ces endroits une présence importante et marquée, en particulier dans les aéroports internationaux. Je peux vous dire qu'il y a énormément de crimes commis dans les aéroports mêmes, mais aussi dans toute la zone qui les ceinture. C'est un endroit propice au crime, à cause des gens qui voyagent énormément et de plus en plus. J'en ai parlé au début de ma présentation.

En mettant en place des agents, comme on le fait actuellement, on encourage les contacts et on développe un réseau de transmission de l'information. Si vous voyez un policier près de vous, vous savez qu'il y en a. C'est plus facile; vous allez penser à votre affaire et peut-être vous confier ou donner un renseignement. C'est la première forme d'aide.

On sera aussi en mesure d'élaborer des plans pour identifier les réseaux criminels qui utilisent l'aéroport ou les alentours de l'aéroport, ce qui inclut le cargo, etc.

M. David Price: Je suis d'accord avec vous, entièrement d'accord avec vous, mais je cherche à savoir si, pour affecter 100 personnes aux aéroports, vous avez dû réduire vos effectifs à d'autres endroits.

Comm. adj. René Charbonneau: Ah, non. Je m'excuse d'avoir...

[Traduction]

Le vice-président (M. Steve Mahoney): C'est une question qui a duré cinq minutes. Quelqu'un pourrait peut-être y répondre.

[Français]

Comm. adj. René Charbonneau: Ce sont des effectifs qui se sont ajoutés. Je m'excuse de ne pas avoir répondu à votre question. Ce sont des ressources complètement nouvelles qui ont été ajoutées.

M. David Price: Où avez-vous pris l'argent?

Comm. adj. René Charbonneau: L'argent nous a été donné grâce à une initiative du gouvernement fédéral.

[Traduction]

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Peut-être les produits de la criminalité.

Madame Augustine.

Mme Jean Augustine: Merci beaucoup, monsieur le président.

Messieurs, je vous remercie d'être venus.

J'ai été très heureuse de vous entendre parler de prévention, de réhabilitation et de diverses solutions dans le cadre du programme parce que, à première vue, je pensais que votre mémoire ne contenait aucun commentaire positif au sujet des réfugiés et des 125 millions de migrants qui se déplacent dans le monde. On peut avoir des raisons parfaitement légitimes de vouloir aller s'établir dans un endroit comme le Canada. Par conséquent, ça m'a fait plaisir de vous entendre dire que vous ne portez pas uniquement attention à l'aspect illégal de la tâche que vous accomplissez.

Je voudrais poser deux ou trois questions. Il y a un certain temps, quelques années en fait, on m'a volé mon passeport. J'avais beaucoup voyagé, mais mon passeport ne contenait aucun cachet et on aurait dit qu'il était neuf, bien que je sois allée dans plusieurs pays. A-t-on apporté depuis lors certains changements pour s'assurer qu'un passeport n'ait pas l'air d'être flambant neuf du fait que les pages sont restées vierges? Ça m'étonnait que mon passeport ne contienne aucun cachet, même si j'avais beaucoup voyagé. De toute apparence, dans certains pays, on ne met pas de cachet sur les passeports.

Comm. adj. René Charbonneau: Avant de répondre à votre question, je voudrais faire un commentaire au sujet de la remarque que vous avez faite sur l'aspect négatif de la tâche de la police. Nous mettons peut-être trop l'accent sur une application énergique de la loi. Nous devons faire des arrestations, par exemple. Je signale que, dans toutes les régions du Canada, les agents de police font partie de la collectivité. Nous voulons de plus en plus former des partenariats et trouver des solutions avec l'aide des citoyens. La GRC est présente dans toutes les régions du Canada—dans le nord, le sud, l'est, l'ouest, les petits villages; partout—et nous voulons contribuer à trouver la solution.

• 1055

Je ne peux toutefois pas répondre à votre question, parce que je ne le sais pas. C'est un sujet qui concerne Immigration Canada. Ray, je ne sais pas si tu as des renseignements à ce sujet, mais ce n'est pas de mon ressort.

Le surintendant Raymond Lang (Direction générale des affaires fédérales et de l'immigration, Gendarmerie royale du Canada): Je suis allé dans quelques pays au cours des dernières années étant donné que j'étais en charge du programme d'immigration. Parfois, surtout en Europe, on n'examine même pas votre passeport. Par conséquent, tout dépend de la politique du pays où l'on va. Ce sont eux qui décident de mettre un cachet sur le passeport. Dans certains pays, on m'a demandé si je voulais que l'on mette un cachet sur mon passeport. Ça dépend du pays. Mais, surtout en Europe...

Le vice-président (M. Steve Mahoney): C'est un souvenir.

Sdt Raymond Lang: Exactement. C'est une politique du pays où l'on va.

Mme Jean Augustine: Je me disais que la personne qui avait volé mon passeport avait un document vierge qu'elle pouvait utiliser comme elle voulait.

L'autre question que je voulais poser est la suivante. Vous avez parlé de collaboration et d'échanges avec les forces policières de tous les pays. Pourtant, les lois et le modus operandi sont différents. Comment faites-vous pour collaborer avec les forces policières de certains pays, où le système peut être corrompu et où certains types de comportements peuvent être jugés acceptables, sans enfreindre les lois canadiennes?

Comm. adj. René Charbonneau: C'est une bonne question. Dans le cadre de mes fonctions actuelles, et même avant, j'ai eu des contacts avec de nombreux pays. Je suis allé dans la jungle du Pérou mais je suis également allé dans d'autres pays d'Amérique du Sud. Je ne veux pas citer des pays, parce que...

Mme Jean Augustine: Je vous comprends.

Comm. adj. René Charbonneau: On peut toujours rester chez soi ou ne pas aller du tout dans ces pays-là. À la GRC, nous avons pour politique d'aller dans ces pays-là. Nous invitons les intéressés à participer à nos programmes de formation internationaux. Nous essayons de trouver des personnes honnêtes. Personnellement, j'ai rencontré des personnes extrêmement honnêtes au Canada, mais j'ai aussi rencontré des personnes très honnêtes à l'étranger. Par conséquent, il faut investir dans l'être humain et, en fin de compte, ça permet d'établir des contacts et des réseaux.

C'est une question de gestion des risques. Nous estimons toutefois que c'est nécessaire pour trouver les personnes qui nous conviennent et il y a d'excellentes personnes dans tous les pays. Nous devons donc trouver des policiers honnêtes et travailler avec eux—selon nos méthodes. Nous avons parfois des ennuis, mais...

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Merci beaucoup.

Merci, madame Augustine.

Mme Jean Augustine: Puis-je poser une dernière...?

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Nous devons être partis pour 11 heures et M. Gouk veut poser des questions. S'il reste du temps après ça, je vous donnerai à nouveau la parole.

Mme Jean Augustine: D'accord.

M. Jim Gouk (Kootenay—Boundary—Okanagan, Réf.): Merci, monsieur le président. Messieurs, je vous prie de m'excuser d'être arrivé en retard. Je devais prendre la parole à la Chambre et ça dure parfois un peu plus longtemps que prévu.

Je tiens à signaler que je n'ai jamais vu une organisation qui arrive à faire tant de travail avec si peu de ressources, compte tenu des contraintes budgétaires actuelles.

Il y a quelque temps, j'ai participé à une émission du réseau anglais de Radio-Canada avec d'autres spécialistes. Je ne me souviens plus comment elle s'appelle mais il s'agissait d'une émission préenregistrée à Montréal. Les autres participants étaient Barbara McDougall—dont la plupart d'entre vous se souviennent certainement—et deux Américains: un attaché de presse ou un journaliste haut placé, ayant des relations avec la Maison blanche, et le gouverneur d'un État frontière américain. La discussion a d'abord porté sur le fait que les Canadiens qui vont aux États-Unis devaient présenter des documents d'identité, des preuves de citoyenneté et se faire enregistrer à l'entrée et à la sortie.

Le gouverneur américain a expliqué en bref qu'il existait des lois sur l'immigration aux États-Unis, que l'on estimait que ces lois étaient justes et qu'elles étaient strictes pour protéger les Américains, qu'il s'agisse d'Américains de longue souche, de personnes établies aux États-Unis depuis plusieurs générations, ou de tout nouveaux citoyens et immigrants qui commençaient à faire partie du tissu américain. Il a dit que le problème des États-Unis, c'est que la frontière n'est pas surveillée à bien des endroits et que nos lois sur l'immigration et leur exécution étaient très différentes des lois américaines. Il est inutile d'avoir des lois sur l'immigration strictes si la plupart des personnes non admissibles aux États-Unis peuvent entrer au Canada et passer ensuite la frontière à pied.

• 1100

Nous avons évidemment entendu parler du récent incident avec les immigrants illégaux chinois. La plupart d'entre eux disparaissent et leur destination probable est New York.

Par conséquent, je voudrais savoir si vous avez eu des entretiens avec vos homologues américains à ce sujet et ce que vous faites pour régler le problème; je voudrais savoir en outre si les contraintes budgétaires constituent un gros obstacle.

Comm. adj. René Charbonneau: Comme je l'ai déjà dit, des opérations d'une telle envergure sont coûteuses. Si nous voulons vraiment lutter contre le crime organisé, nous devons investir les fonds nécessaires. La technologie est un gros problème. Les voyages dans ces pays coûtent cher. Par conséquent, ça coûte cher à la GRC et nous avons demandé des fonds supplémentaires.

Certains de nos agents font volontairement des heures supplémentaires. Ils devraient pourtant être rémunérés, comme tout autre Canadien. Par conséquent, il est clair que nous avons besoin de fonds supplémentaires. Nous l'avons d'ailleurs fait savoir au gouvernement fédéral.

J'ai rencontré mes homologues américains; je les ai rencontrés régulièrement. Je les ai rencontrés à Washington en septembre. Nous avons parlé d'immigration mais nous avons surtout parlé du crime organisé en général. Notre objectif était en fait d'améliorer notre système d'échange d'informations et d'identification des principaux intervenants, parce qu'ils ne participent pas tous au passage clandestin de migrants. Ils participent aux principales formes de criminalité. Ils essaient de tirer des profits de toute activité qui peut être lucrative.

Nous devons cibler les principaux intervenants. S'ils sont impliqués dans le crime organisé, nous devrons démontrer aux tribunaux que leur présence est néfaste pour la société. Ensuite, c'est au juge et au système judiciaire de faire leur travail.

M. Jim Gouk: Avez-vous toutefois des commentaires à faire sur la différence entre nos politiques en matière d'immigration et les politiques américaines et pouvez-vous dire s'il existe des problèmes d'incompatibilité?

Comm. adj. René Charbonneau: Nos lois sont différentes, non seulement dans le domaine de l'immigration, mais dans la plupart des autres domaines. Je suis convaincu que le projet de loi C-95, qui porte sur le crime organisé, nous obligera à tester nos lois concernant le crime organisé et nos lois anti-gang. Nous n'avons pas tellement de causes à défendre devant les tribunaux pour le moment. Nous verrons comment ceux-ci réagiront. Nous devrons toutefois être beaucoup plus stricts et beaucoup plus sévères pour mettre la main sur les individus qui s'adonnent à des activités liées au crime organisé.

Le vice-président (M. Steve Mahoney): Merci bien. Merci d'être venus, messieurs. C'était très intéressant.

Je suis désolé, mais il ne nous reste plus de temps. Un autre comité attend que nous sortions. Par conséquent, nous devons lever la séance. Merci encore.

La séance est levée. Notre prochaine réunion se tiendra le mercredi 1er décembre 1999.