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NDVA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON NATIONAL DEFENCE AND VETERANS AFFAIRS

COMITÉ PERMANENT DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES ANCIENS COMBATTANTS

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 28 mai 1998

• 1910

[Traduction]

Le président (M. Robert Bertrand (Pontiac—Gatineau—Labelle, Lib.)): Mesdames et messieurs, j'aimerais vous accueillir à notre assemblée publique de ce soir consacrée aux moyens d'améliorer la qualité de vie du personnel militaire.

Nous avons eu une très bonne participation cet après-midi et je suis sûr qu'il en sera de même ce soir.

Pour commencer, j'ai quelques petits détails de procédure à vous rappeler.

[Français]

S'il y en a qui ont besoin d'un appareil pour l'interprétation, ils peuvent se le procurer à l'arrière. Sharon se fera un plaisir de le leur donner.

[Traduction]

Permettez-moi de vous dire brièvement comment nous allons procéder. Nous avons 24 intervenants d'inscrits. Si vous voulez nous parler, je vous demanderais de donner votre nom à Sharon. C'est uniquement administratif, cela me permet d'appeler l'intervenant suivant.

Chacun des exposés sera suivi d'une petite période de questions.

Quand nous commençons ce genre de réunion, je demande généralement à chaque député de se présenter et je commencerai cette fois-ci par M. Clouthier.

M. Hec Clouthier (Renfrew—Nipissing—Pembroke, Lib.): Je m'appelle Hector Clouthier, je suis le député fédéral de la circonscription de Renfrew—Nipissing—Pembroke, qui englobe la base de Petawawa.

M. John Richardson (Perth—Middlesex, Lib.): Je m'appelle John Richardson. Je suis le secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale. Je représente la circonscription de Perth—Middlesex, qui englobe notamment la ville de Stratford, et je suis libéral.

M. David Pratt (Nepean—Carleton, Lib.): Je suis David Pratt. Je représente la circonscription de Nepean—Carleton, et je suis libéral.

Mme Judy Longfield (Whitby—Ajax, Lib.): Je m'appelle Judy Longfield. Je suis la députée libérale de Whitby—Ajax. J'ai été élue en juin 1997. Je suis les déplacements de ce comité depuis sa constitution après les élections.

Le président: Je m'appelle Robert Bertrand. Je suis le député libéral de Pontiac—Gatineau—Labelle et je suis le président du Comité de la défense nationale.

Nous passons immédiatement aux premiers témoins, Mme Sheila Johnston et Mme Linda Gunning.

Mme Sheila Johnston (présidente, Centre de ressources pour les familles de militaires de la capitale nationale): Bonsoir, monsieur le président, mesdames et messieurs.

Je m'appelle Sheila Johnston. Je suis ici ce soir pour vous parler à titre de présidente du Centre de ressources pour les familles de militaires de la capitale nationale et aussi à titre de conjointe de militaire. Avant de commencer, j'aimerais vous dire un peu d'où je viens. Ma vie a toujours été étroitement liée à l'armée. Je suis née dans un hôpital militaire britannique en Allemagne, où mon père servait dans l'armée canadienne. J'ai été élevée dans les logements militaires familiaux par un père célibataire. Je me suis engagée quand j'avais 17 ans et je suis devenue le premier officier artilleur féminin du Canada. J'ai quitté l'armée après six ans pour passer mon doctorat en études militaires. J'ai fait de la recherche sur le terrain à la fois en Bosnie et en Croatie.

Aujourd'hui, cependant, ce dont je suis probablement la plus fière c'est d'être la conjointe d'un militaire et mère de trois petites fripouilles. L'instruction militaire n'est rien comparé à courir derrière ce genre de troupe.

J'ai consacré beaucoup de temps avec mes collègues du conseil d'administration et mon personnel à passer en revue les difficultés auxquelles sont confrontées les forces armées canadiennes et leurs familles aujourd'hui. Il est difficile de ranger ces problèmes dans des catégories spécifiques. Dans de nombreux cas, c'est un problème qui en entraîne un autre et souvent cela se transforme en cycle. Vous avez déjà entendu parler de la majorité de ces problèmes lors de vos audiences précédentes. Ils méritent quand même d'être répétés même brièvement.

• 1915

J'ai essayé de structurer mon intervention de ce soir en commençant par les problèmes généraux de l'ensemble des Forces canadiennes pour ensuite passer aux problèmes qui sont plus particuliers à la région de la capitale nationale.

Ottawa n'est pas une affectation populaire pour beaucoup de gens à cause des difficultés qui y sont associées. Les commentaires que j'entends souvent à propos d'Ottawa, c'est que c'est une affectation de pénitence pour des crimes passés. Personnellement, c'est parfois mon sentiment car le contexte du soutien familial dans cette ville est tout simplement plus compliqué qu'ailleurs. Ma directrice vous en dira un peu plus tout à l'heure.

La deuxième partie de mon intervention sera consacrée à des recommandations et à des suggestions de solutions à ces divers problèmes. Ma gouvernante me disait toujours qu'il ne sert à rien de se plaindre d'un problème sans offrir une solution—propos fort sage d'une juive qui avait fui la Lituanie pendant la Deuxième Guerre mondiale.

J'ai lu dans vos comptes rendus qu'on ne cesse de vous parler de contrat social. Je crois qu'on vous en a donné une définition assez précise. En fait, c'est une question de responsabilité, de la responsabilité des individus envers le Canada et du Canada envers ces individus. Les obligations des militaires sont soigneusement énoncées dans divers règlements administratifs et juridiques, mais l'engagement du Canada envers ces mêmes militaires n'a jamais été défini. Je crois que c'est le sujet de ces audiences. Les soldats, les aviateurs et les marins remplissent le contrat; le Canada, non. Il est temps que le gouvernement canadien et le public canadien reconnaissent la valeur des forces armées. Tant que cela ne sera pas fait, aucun changement ne sera possible.

J'irais même plus loin en suggérant que ce contrat social ne couvre pas seulement le militaire en uniforme mais aussi sa famille. Je l'ai constaté en octobre dernier. Le général Baril vous a expliqué le concept de responsabilité illimitée. Mais nous, les familles, assumons aussi cette responsabilité illimitée. Nos vies sont directement affectées par la manière dont vous traitez nos conjoints car nous avons également pris cet engagement envers le pays.

Notre responsabilité illimitée à nous est de nous occuper de ce mari blessé et mutilé, de devenir veuve si nos maris sont tués en service commandé. On nous demande de ramasser les morceaux et de continuer, d'élever nos enfants qui auront la même fierté et le même sens de la loyauté que leur père. Nous autorisons ce pays à placer l'être que nous aimons en situation dangereuse, et c'est une réalité avec laquelle nous devons vivre quotidiennement.

Le soutien à la famille est crucial. Le haut commandement ne cesse de répéter que l'efficacité opérationnelle des Forces canadiennes est liée à la qualité des conditions de service des militaires, à leur qualité de vie. M. Eggleton a répété à de nombreuses occasions que c'était sa première priorité.

Ne transformons pas cet exercice en exercice politique permettant aux politiciens de marquer des points auprès des médias sur le dos des conjoints et des enfants. Je crois en ce comité et à ses efforts. Vous avez maintenant pour tâche de vous assurer que notre message est bien transmis et que des résultats suivent.

La qualité de vie des familles militaires s'effrite. De 1975 à 1990, les déploiements consistaient en des tours de six mois au Club Chypre. Les familles étaient envoyées en grand nombre en Allemagne, et tous les services disponibles rendaient passionnante et enrichissante la vie des familles des militaires. Après 1990, cependant, il y a eu une augmentation spectaculaire du nombre d'affectations et de la fréquence des déploiements. La guerre du Golfe, la Croatie, la Bosnie, la Somalie, le Rwanda, Haïti, la République centrafricaine, toutes ces missions ont entamé la capacité de résistance des familles. Aujourd'hui, nous sommes arrivés à la limite du supportable.

Les groupes arrières, généralement, étaient fort utiles, avec plusieurs aumôniers militaires, travailleurs sociaux et des conseillers financiers tous disponibles. Les réductions d'effectifs ont eu pour conséquences soit de réduire, soit d'éliminer ces services, tout cela au nom de l'efficacité. On nous a dit de recourir aux services locaux pour ces services qui n'étaient plus désormais disponibles sur les bases.

Les gouvernements provinciaux et les administrations municipales réduisant eux aussi de manière draconienne leurs budgets, les services locaux sont eux aussi soient réduits, soient éliminés. Nous nous retrouvons aujourd'hui devant des listes d'attente de 18 mois, ce qui n'est pas très utile quand votre mari part dans les deux semaines qui suivent. C'est là que le cycle démarre. Le stress est toujours élevé dans la communauté militaire. Les problèmes tangibles auxquels font face les familles sur une base quotidienne rendent tout cela insurmontable. Comment peut-on s'attendre de vous que vous fassiez face au stress du départ en déploiement de votre mari quand votre logement familial tombe en morceaux? Vous ne pouvez pas trouver de travail, donc vous ne pouvez pas vous engager financièrement. Votre enfant se retrouve dans un nouveau système éducatif, prend du retard et a besoin de votre aide. Les médecins locaux n'acceptent pas de nouveaux patients et vous ne pouvez même pas avoir le papier nécessaire pour aller parler à quelqu'un d'autre, et même au cas où vous l'obtiendriez, la période d'attente est de 14 mois, on vous demande de payer à l'avance et vos moyens n'importe comment ne vous le permettent pas. C'est la situation quotidienne de tous les conjoints. Nous avons besoin d'aide.

• 1920

Je sais que vous avez été épouvantés par les conditions de vie des militaires dans les logements familiaux. Vous avez vu l'état de nos logements. Ce n'est pas différent ici. Je vis dans un logement familial, mes murs ne sont pas droits et je ne peux pas faire marcher ma cafetière et mon réfrigérateur en même temps parce qu'il faut refaire le réseau électrique. Avec mon plombier, nous nous appelons par notre prénom. L'hiver il y a des glaçons qui se forment sur nos fenêtres. Je ne peux pas poser mon bébé par terre à cause des courants d'air. Nos chambres à coucher sont polaires l'hiver et notre toit fuit l'été. Pourtant nous payons presque 800 $ par mois pour cette maison même si la même maison à Petawawa se loue pour 300 $.

La solde n'a pas changé. Le loyer est calculé selon une formule ésotérique négociée par le Conseil du Trésor, que personne ne comprend, et l'agence de logement nous dit que nous sommes privilégiés. J'ai lu le rapport fait par l'Agence de logement des Forces canadiennes à votre comité et je continue à croire qu'ils n'ont pas la moindre idée de ce qu'est une famille militaire. Ils parlent de réduire le parc de logements et de louer sur le marché. Nous ne sommes pas des fonctionnaires. Ils ne comprennent pas la nécessité pour beaucoup de vivre sur la base pour avoir accès au soutien et aux services.

Mme Longfield a mis exactement le doigt dessus le 10 mars 1998. Le marché libre n'offre pas ce dont nous avons besoin tout particulièrement quand nos maris sont déployés pour nous sentir en sécurité, pour nous sentir dans un environnement militaire, dans notre propre environnement.

Le logement est un droit fondamental. Nous n'avons pas le choix des affectations. Le gouvernement devrait pouvoir nous garantir un endroit décent où élever nos familles. Le raisonnement de l'agence de logement est que nombre de ces maisons sont vouées à la démolition, alors pourquoi faire des dépenses. Je peux comprendre, mais ceux qui occupent ces maisons? À quoi sert son budget annuel de 83 millions de dollars? Qui vérifie ses comptes? Pourquoi n'est-ce pas un document public pour ceux qui habitent dans ces logements?

Ici à Ottawa, les logements d'Ottawa-Rockcliffe, situés sur un terrain de grande valeur, vont disparaître. De toute évidence, c'est un trop beau quartier pour être occupé par des militaires, donc on vend. Ce que j'aimerais savoir, cependant, c'est où ira l'argent de la vente de Rockcliffe. À mon avis, il ne servira certainement pas à construire de nouveaux logements militaires. Nous allons donc perdre 600 maisons dans une ville où le loyer moyen est de 1 300 $ par mois, le Conseil du Trésor va empocher l'argent, et, pour les familles, une affectation à Ottawa sera encore plus catastrophique qu'avant.

Comment régler ce genre de problème? Il faut trouver d'autres solutions de logement mais il faut en même temps impliquer les familles et les professionnels du centre de ressources dans la planification. Ne laissez pas cette tâche à un groupe de cadres qui semblent ne pas avoir la moindre idée de la vie militaire. Financez ce groupe mixte et donnez-lui les pouvoirs lui permettant de répondre aux besoins en logement.

Accordez des prestations d'indemnités de coût de la vie pour garantir un niveau de vie constant, quels que soient les lieux d'affectation. Ne nous comparez pas à la fonction publique car la nature du travail dans les forces armées est unique et sans équivalent. Des logements décents et disponibles ne peuvent qu'améliorer l'efficacité des militaires. Une politique en conséquence est indispensable.

Ensuite, je crois qu'il importe d'examiner certains autres besoins fondamentaux qui font souvent partie de la vie dans un cadre militaire. Le premier est l'éducation tant des conjoints que des enfants. Il y a plusieurs normes d'éducation dans notre pays et elles ont des conséquences profondes pour nos enfants. On les fait jouer à saute-moutons. Dans une province, ils sautent une classe, dans une autre, ils retombent un an en arrière. Il n'y a pas de normes nationales et nos enfants en font les frais.

Cela peut causer d'énormes problèmes aux enfants. Depuis la fermeture des écoles dans les bases, nos enfants dépendent des commissions scolaires. Souvent les enseignants n'ont aucune idée du style de vie unique des familles militaires. Ils ne comprennent pas que si Johnny se comporte bizarrement, c'est parce que papa est en Yougoslavie depuis quatre mois.

Il n'y a pas suffisamment de ressources à la disposition de ces enseignants pour qu'ils prennent le temps de comprendre les besoins spéciaux de ces enfants de militaires. Je vous ai montré un livre que j'ai fait récemment publier pour les enfants de militaires. Les enseignants l'adorent, les commissions l'adorent mais les fonds n'étaient pas suffisants pour qu'il ait un véritable impact.

Encore une fois, il y a de longues listes d'attente pour les enfants qui ont des problèmes d'expression et de langue. Souvent nos enfants sont oubliés et ne bénéficient pas de cette aide parce que leur famille est affectée ailleurs avant que leur nom n'arrive au haut de la liste. Les besoins spéciaux restent donc sans réponse.

Les changements constants d'affectation causent également de sérieux problèmes au niveau de l'éducation des conjoints. De nombreuses femmes deviennent d'éternelles laissées pour compte. Chaque école a son propre programme, et souvent les cours ne sont pas transférables d'une école à une autre, d'une province à une autre. Cela rend les choses tout particulièrement difficiles pour les stages.

Les choses sont également difficiles pour les conjoints qui souhaitent poursuivre des études postsecondaires. Vous payez vos frais chaque année, vous obtenez vos crédits, seulement pour apprendre qu'ils ne sont pas transférables dans l'académie de votre nouvelle affectation. C'est très frustrant.

Les problèmes médicaux suivent une route analogue. La santé d'une famille militaire souffre souvent de ces affectations. Contrairement aux Américains, les familles ne sont pas traitées par le personnel médical militaire. En conséquence, il n'y a pas de continuité au niveau de la santé. Dans certains lieux d'affectation, il est impossible de trouver un médecin.

Lors de notre dernière affectation à Kingston, je me suis retrouvée, ainsi que mes enfants, sans médecin. Il nous fallait attendre dans des cliniques et dans des salles d'urgence chaque fois que nous avions des problèmes médicaux. Aucun des médecins de Kingston n'acceptait de nouveaux patients. Chaque fois, il me fallait rappeler une longue liste d'antécédents médicaux, et tout ça pour me faire reprocher le manque de suivi.

• 1925

Encore une fois, il y a le problème des listes d'attente, cette fois pour les diagnostics médicaux. Mon propre fils en a souffert. Il a eu toutes sortes de problèmes de croissance. À Hamilton, à 18 mois nous l'avons placé sur une liste d'attente de l'hôpital pour enfants pour un diagnostic. Nous avons été affectés à Kingston alors qu'il avait 32 mois et il n'avait jamais été vu par quiconque à Hamilton. À Kingston, nous nous sommes retrouvés au bas de la nouvelle liste d'attente. Il n'y a jamais été vu par quiconque non plus. Il avait maintenant pratiquement quatre ans. Nous avons alors été affectés à Ottawa, où il a été réinscrit encore une fois sur une nouvelle liste. Treize mois plus tard, il a vu son premier docteur. C'était pratiquement quatre ans plus tard.

La première chose qu'on m'a dite est qu'il aurait dû être examiné il y a des années. Il a été diagnostiqué comme souffrant d'un trouble envahissant du développement, une forme d'autisme. Le médecin m'a dit qu'une intervention précoce aurait eu un plus grand impact sur son avenir. Heureusement, il a fait des progrès surprenants.

J'aimerais que vous me permettiez de vous citer un autre exemple qui n'a pas tourné aussi bien. J'ai parlé dernièrement à une femme dont le fils est mort victime du jeu de la liste d'attente. Il lui a fallu cinq ans pour le faire diagnostiquer et son état était devenu si grave qu'il n'y avait plus rien à faire. Le médecin lui a dit que s'il avait été traité beaucoup plus tôt, il aurait survécu. Pourquoi culpabiliser cette famille alors qu'elle n'a fait que suivre les règles du système?

Les affectations isolées ne font que compliquer encore plus ces choses. À ces endroits, il n'y a pas de services disponibles. Il n'y a pas non plus de programmes spéciaux pour les couples qui ont des problèmes spéciaux, par exemple des problèmes de fertilité ou des grossesses dangereuses, pour les femmes.

Un autre grave problème que je constate pour les familles est le système actuel de remboursement des ordonnances, ou le racket de la Sun Life comme j'aime l'appeler. Le délai de remboursement est censé être de trois à cinq jours. Cela prend régulièrement de six à huit semaines. Beaucoup de familles hésitent à se faire délivrer des ordonnances chères parce qu'elles n'ont pas les moyens d'attendre d'être remboursées. Et nous sommes un des derniers organismes au Canada qui demande à ses membres de payer avant de se faire rembourser.

Enfin, quand un militaire demande une affectation pour motif personnel à cause du genre de problème que je viens de citer, tant éducatif que médical, il peut faire une croix sur sa carrière. Cela fait un problème de plus à ajouter au cycle. Que faut-il faire?

Pour commencer, il faut que les professionnels—le personnel éducatif, social et médical—soient mis à la disposition des familles des militaires. C'est assez simple. Souvent, sur les bases américaines on trouve des pédiatres, des orthophonistes et des travailleurs sociaux qui travaillent directement pour le ministère de la Défense. Ils ont pour seule tâche de servir des familles militaires. On ne laisse jamais les familles américaines se débrouiller toutes seules.

S'il est impossible d'avoir ces spécialistes, bien que personnellement j'estime que cela devrait être envisagé, il devrait pour le moins y avoir des ententes avec les collectivités locales pour que des considérations spéciales soient accordées aux familles qui arrivent. Il pourrait y avoir des listes nationales. Il pourrait y avoir un ombudsman qui serait chargé d'arrondir les angles et d'aider les familles à trouver leur propre médecin. Si les familles ne sont pas autorisées à utiliser le système d'ordonnances militaire, pourquoi dans ce cas la pharmacie ne peut- elle pas facturer directement Sun Life et qu'ils se fassent ensuite rembourser par les militaires? Pourquoi cette étape de plus, surtout quand tant d'autres organismes—y compris la Gendarmerie royale—ont adopté cette solution?

Ma dernière partie concerne plusieurs choses qui, à mon avis, sont à la fois de nature cyclique et au coeur même de nombre de nos problèmes d'aujourd'hui: la solde, les avantages sociaux et l'emploi des conjoints. Au Canada, nous tirions fierté de bien traiter nos gens, surtout par rapport à d'autres pays. Même nos militaires des grades les plus inférieurs avaient un train de vie largement supérieur à leurs homologues des autres nations. Aujourd'hui, c'est presque le contraire. Aujourd'hui, un capitaine américain gagne la même chose qu'un capitaine canadien mais sa solde lui offre un niveau de vie beaucoup plus élevé et il bénéficie en plus de toutes sortes d'avantages sociaux.

Expliquez-moi je vous prie la raison pour laquelle mon mari, capitaine avec 14 ans de service, une maîtrise directement liée à son domaine professionnel, un homme qui très souvent travaille 60 heures par semaine, gagne moins qu'un chauffeur d'autobus de la Commission des transports d'Ottawa. C'est ainsi que nous reconnaissons la valeur de nos militaires? Ils mettent leur vie en danger. Ils peuvent être déployés presque sans préavis. Ils travaillent couramment pendant les week-ends, pendant les vacances, et font de longues journées. Comment peut-on comparer les deux?

Et que dire de leur pension de retraite. Savez-vous que les Américains et les Britanniques ne contribuent pas à leur pension de retraite de la même manière que nous? On les remercie chaleureusement d'avoir servi leur pays. Chez nous, c'est devenu une forme d'imposition.

Un rapport qui vient d'être publié le 13 de ce mois dit que le revenu moyen d'une famille à d'Ottawa est de 67 243 $ par an. Pour l'ensemble du Canada, il est d'environ 54 000 $. Les spécialistes disent que même un tel revenu ne garantit pas un niveau de vie décent. Or, prenez nos soldats, nos caporaux qui gagnent 32 000 $, nos sergents qui gagnent de 38 000 $ à 40 000 $ ou nos capitaines qui gagnent 45 000 $. Est-ce que c'est vraiment comparable?

• 1930

Je sais que ces chiffres reposent sur la prémisse de deux revenus, mais comme vous l'avez certainement entendu souvent répéter, le style de vie des militaires interdit pratiquement toute possibilité de deuxième revenu. Cela devient un élément crucial du problème de la solde et des avantages. Ce n'est même pas le fait que la solde des militaires soit ridiculement basse, c'est que, dans la majorité des cas, il n'y a rien d'autre qui vient s'y ajouter et le revenu de ces familles est largement inférieur à la moyenne nationale.

Pourtant, en même temps que ce rapport de Statistique Canada, était publié ce même jour un article disant que les parlementaires s'accordaient une augmentation annuelle de 1300 $ et doublaient leur allocation logement pour qu'elle soit, selon les termes de John Bryden, libéral, plus en prise avec la réalité du coût d'un appartement ou d'une maison à Ottawa. Ils auront désormais une allocation non imposable de 21 000 $ et 64 aller-retour en avion pour retourner dans leur circonscription. Chose surprenante, les cinq partis ont donné collectivement leur accord à ces augmentations.

Regardez nos propres avantages. Notre allocation affectation et notre allocation logement sont imposées—facilement à hauteur de 40 p. 100. Nous payons l'impôt provincial dans la province où on nous oblige à vivre. Nous gagnons moins que les fonctionnaires bien que la responsabilité des fonctionnaires, si je peux me permettre, est loin d'être aussi importante que celle des militaires. Pourtant, quand nous faisons la comparaison avec la Gendarmerie royale et le ministère des Affaires étrangères, nous constatons que leurs avantages ne sont pas imposés, et désormais nous savons que ceux des parlementaires ne le sont pas non plus.

Comme je l'ai dit, l'emploi des conjoints est étroitement lié à ce problème. J'étais stupéfaite de lire que, dans un rapport, référence 132, de 1994, le Conseil du Trésor avait rejeté la demande des militaires qui voulaient qu'on reconnaisse comme considération légitime la perte de revenu de conjoint pour déterminer le niveau de qualité de vie. Comment peuvent-ils rejeter un tel élément, surtout quand ce rapport était accompagné de chiffres de Statistique Canada? La majorité des conjoints de militaires qui sont employés sont largement sous-employés. Le revenu moyen d'un conjoint de militaire était de 11 511 $ en 1994 alors que celui d'un conjoint de fonctionnaire était de 26 280 $. Le conjoint de militaire gagnait 60 p. 100 de moins que le conjoint d'un fonctionnaire, et c'était pour le petit nombre de fortunés qui étaient arrivés à trouver du travail.

Les conjoints qui essaient de trouver du travail font face à une montagne d'obstacles. Pour les conjoints qui exercent des professions libérales, les seuls changements en matière d'éducation et d'accréditation peuvent s'avérer des obstacles presque infranchissables. Certains cours d'accréditation coûtent jusqu'à 5 000 $. Pour d'autres conjoints, il est difficile de faire les stages obligatoires et d'acquérir l'expérience nécessaire.

Ensuite, il y a le problème linguistique des francophones dans un milieu anglophone, des anglophones dans un milieu francophone ou, comme pour moi, d'être totalement incompétente en matière linguistique. Ne pas être bilingue à Ottawa est un sérieux problème.

Il y a aussi la réticence de nombreux employeurs à embaucher des conjoints de militaires pour toutes sortes de raisons évidentes. On le constate même au ministère de la Défense nationale. Je vous rappelle le rapport MacBride-King de 1986.

Ensuite, il y a les complications et les difficultés de garde d'enfants quand le conjoint est déployé. La majorité des conjoints n'ont pas d'avantages ou de pensions, et les possibilités de promotion et d'avancement sont très limitées. On nous dit que c'est ainsi. J'ai découvert il n'y a pas très longtemps que les conjoints de fonctionnaires du ministère des Affaires extérieures avaient tous une attestation de sécurité, se voyaient donner la préférence pour les travaux à contrat et bénéficiaient même des services d'un fonctionnaire à plein temps, qui a pour seul travail de s'occuper des problèmes d'emploi des conjoints de fonctionnaires. Ça au moins c'est quelque chose.

Vous voulez des recommandations? J'en ai des dizaines.

Pour commencer, et avant tout, un militaire devrait être rémunéré équitablement en fonction de ses compétences et de son expérience dans le contexte de la nature unique des activités militaires. Un ensemble d'avantages devrait être alors mis en place pour prendre en compte les besoins spéciaux des familles de militaires. Ces avantages devraient être exonérés d'impôt.

L'emploi des conjoints devrait être considéré en fonction de l'importance qu'il représente pour la vie des familles, soit en compensant la perte de revenu du conjoint résultant directement des activités militaires, soit en investissant suffisamment d'énergie pour surmonter certains des problèmes qui font obstacle à cet emploi.

Le remboursement de coûts d'accréditation pour alléger la facture universitaire, des services de garde d'enfant universels, et la formation en langue seconde pour les conjoints ne représentent que quelques-unes de ces recommandations.

J'aimerais avant tout que les conjoints participent à l'élaboration de ces recommandations. Vous allez remettre au Parlement un rapport contenant vos propositions et vos recommandations. Pourquoi ne pas confier cette tâche aux conjoints? Laissez-nous travailler avec vous à la rédaction de ce rapport, plutôt que de le laisser rédiger par des fonctionnaires ou des professionnels anonymes qui ne connaissent rien à notre vie. Employez-nous. Nous sommes plus que disposés à vous aider et nous avons une connaissance intime de ces problèmes. Nous sommes une énorme ressource inutilisée.

Par-dessus tout, que nous faut-il? Comme le général Dallaire l'a dit, les systèmes sont en place mais ça coûte des sous. Si les CRFM doivent assumer plus de responsabilités dans le domaine du soutien aux familles, il faut qu'ils soient correctement financés. Nous consacrons actuellement environ 400 $ par an et par famille au Canada. Les Américains consacrent actuellement plus de 11 000 $ par famille. J'ai travaillé dans le système américain de soutien aux familles et il est excellent. Le soutien aux familles est leur priorité no 1 et ils y mettent l'argent nécessaire. Nous pouvons faire le travail; nous avons simplement besoin des ressources pour le faire efficacement.

• 1935

Deuxièmement, et c'est très important pour moi, il faudrait donner suite à la recommandation du rapport sur l'examen principal des services, daté du 31 mars 1997, et créer un conseil consultatif des conjoints militaires. Les centres de ressources pour les familles sont sans doute excellents, mais ils ne tiennent pas compte de la perspective nationale et se préoccupent uniquement des intérêts et des besoins de leurs propres collectivités militaires.

Le rapport dit ceci:

    Les conjoints militaires n'ont aucun mécanisme pour déterminer ce qui est requis et approprié dans le cadre du plan de soutien aux familles militaires et quel devrait être le niveau minimal de service aux 41 centres de ressources pour les familles.

Le rapport recommande la création d'un conseil consultatif national coprésidé par un conjoint de militaire et un officier supérieur. Ce conseil serait mieux en mesure d'assurer des liens et des services aux 40 000 conjoints des Forces canadiennes en communiquant directement avec eux et en servant de point de mire pour leurs commentaires et leurs initiatives.

Il existe un besoin urgent de créer un conseil consultatif des conjoints de militaires qui facilitera et stimulera la participation directe des conjoints de militaires pour qu'ils puissent prendre en main le plan de soutien aux familles.

Cela fait maintenant un an que je rebats les oreilles du général Dallaire. Le pauvre homme en a assez de me voir. Un tel conseil nous permettrait cependant, à nous les conjoints de militaires, de nous occuper de ces problèmes. Nous pourrions travailler de l'intérieur du système et non pas de l'extérieur. Je sais que le général Dallaire appuie de tout coeur cette initiative et je ne peux trop souligner l'importance d'un tel conseil pour l'ensemble du pays et la qualité de vie des familles de militaires. Nous devons donc encourager le général Dallaire à poursuivre cette initiative jusqu'au bout. C'est le seul moyen pour nous d'avoir un mot à dire sur notre avenir.

Enfin, je me suis vraiment interrogée sur l'utilité de parler de ce qui suit, mais j'ai enfin décidé de le faire. C'est une question qui me tient tellement à coeur que cela irait contre tous mes principes de ne pas en parler. Je crains que les reportages ces dernières semaines n'aient complètement obscurci ce que votre comité avait pu faire pour attirer l'attention du gouvernement et du public canadien. Nous nous trouvons encore une fois au milieu d'un scandale, cette fois-ci à propos de la façon dont les femmes sont traitées dans les Forces canadiennes.

J'en ai moi-même fait l'expérience. J'ai été victime de mauvais traitements physiques et de harcèlement sexuel grave pendant ma formation de jeune officier il y a dix ans. La situation existait et j'y ai été exposée. Je n'ai pas eu la force de protester à l'époque et j'ai aussi vu les autres femmes officiers subir les mêmes mauvais traitements. J'ai maintenant assez de courage pour en parler et je travaille avec les militaires pour découvrir les causes de ces problèmes.

J'ajoute cependant que je suis tout à fait convaincue que le problème était l'oeuvre d'un très petit groupe d'indésirables. Il est foncièrement injuste de ternir la réputation de tous les hommes et de toutes les femmes des Forces canadiennes à cause de cela. On ne peut pas non plus nier maintenant leurs préoccupations.

On m'a souvent demandé pourquoi je continuais à défendre aussi énergiquement les Forces canadiennes vu les mauvais traitements que j'ai subis moi-même. Je vous dirai ce que je réponds toujours. C'est parce que je sais que la très grande majorité de ceux qui servent notre pays le font avec honneur, courage et loyauté. Ce sont les meilleurs du monde. J'ai toujours soutenu que je ne voudrais pas vivre ma vie autrement parce que je me suis rendu compte que je côtoyais tous les jours de véritables héros canadiens. Où trouverais-je un plus grand honneur?

Merci.

Des voix: Bravo!

Le président: Merci.

Madame Gunning.

Mme Linda Gunning (directrice exécutive, Centre de ressources pour les familles de militaires canadiennes): Merci.

Depuis la création du Centre de ressources pour les familles de militaires dans la région de la capitale nationale en 1992, je suis sa directrice exécutive. J'ajoute que le centre pour la région de la capitale nationale a été le dernier à être créé. D'autres centres de ressources pour les familles ont été établis ailleurs, mais à l'époque, nous étions la dernière des grandes bases du Canada à avoir son centre de ressources.

Je le signale parce que c'est important. Quand j'ai accepté ce poste, je me suis demandé pourquoi ce centre n'avait pas été le premier à être créé et n'avait pas servi de modèle aux autres. Six ans plus tard, j'ai compris pourquoi. Essentiellement, les autorités jugeaient que le QGDN n'avait pas besoin d'un centre de ressources pour les familles.

Avant d'accéder à ce poste, j'avais déjà travaillé pendant 25 ans dans le développement communautaire et dans des services sociaux. Mon mari a été sous-marinier pendant 28 ans. Il est maintenant à la retraite. Mon beau-fils est officier dans la marine; il est marié et il a deux enfants. Je ne vois jamais mes deux petits enfants parce que c'est imbattable, la vie dans les forces.

• 1940

Pour vous donner une idée de nos services, je vous dirai que nous avons maintenant 10,5 postes au Centre de ressources pour les familles de militaires. Nous avons du personnel dans deux bases, à Rockcliffe et à Uplands. La distance entre ces deux sites est de 25 kilomètres, ce qui représente 30 minutes en automobile.

La base d'Uplands est une localité particulièrement isolée et bon nombre des militaires de la base travaillent par quart au poste de Leitrim, ce qui veut dire qu'ils doivent souvent prendre l'auto familiale pour se rendre au travail. Il y a un autobus qui fait toutes les heures du site, et qui laisse les gens à une gare d'autobus. Ce n'est que le début du voyage. Le centre communautaire local est seulement à quatre kilomètres de distance, mais il faut prendre deux autobus et mettre 45 minutes pour s'y rendre. De toute évidence, ce n'est pas une ressource communautaire pour ceux qui habitent à la base d'Uplands.

Nous avons dû mener une lutte ardue pour établir les services de soutien pour les familles de militaires dans la région de la capitale nationale. L'année dernière, les familles de militaires de la région ont perdu 40 p. 100 de leurs services de CRFFA par rapport à ce qu'elles avaient deux ans plus tôt. Cette année, on nous dit que nous sommes le seul CRFFA à ne pas avoir reçu de fonds pour les services de deuxième échelon.

Je voudrais vous parler très brièvement d'un certain nombre de points. Je vais d'abord les énumérer et je vous donnerai ensuite un peu plus de détails sur chacun.

(1) Nous essayons encore d'obtenir une liste de nos familles et des listes des militaires déployés pour des missions de maintien de la paix ou en service temporaire.

(2) On a refusé de financer l'établissement de modestes postes satellites.

(3) Notre structure opérationnelle n'est pas la même que sur une base, et cela veut dire que les besoins de nos familles sont mal compris.

(4) Le coût de la vie dans la région de la capitale nationale est élevé, et cela étonne souvent les familles qui arrivent dans la région.

(5) Nos jeunes trouvent difficile d'habiter sur les bases parce qu'il y a de moins en moins d'installations récréatives.

(6) L'incapacité des CRFFA à fournir les soutiens requis aux familles monoparentales militaires nous inquiète.

L'absence d'une liste nominale nous pose de graves problèmes dans la région de la capitale nationale parce que seulement 20 p. 100 des familles de militaires habitent dans les logements des bases de Rockcliffe ou et d'Uplands. Les 80 p. 100 restants sont éparpillés dans toute la région. Cependant, à titre de CRFFA, nous avons nettement le devoir de communiquer avec les 6 000 familles habitant dans la région de la capitale nationale. Nous publions un excellent journal communautaire trimestriel qui atteint actuellement le tiers des familles de militaires.

Quelle est la solution? Il faut donner suffisamment de fonds à l'USFC. J'ai mentionné cette liste de noms. C'est une chose dont je me plains depuis six ans. Les gens ont l'habitude de m'entendre en parler. Ce n'est cependant pas un problème qui vient d'une seule personne. C'est plutôt un problème relié à la structure de l'organisation.

Au QGDN, nous n'avons jamais pris la peine d'avoir des listes de noms parce que nous n'avions pas l'impression qu'il était tellement important d'avoir de tels renseignements dans une base de données. Nous faisons vraiment comme les militaires et, quand il y a un problème, nous savons où trouver le dossier, mais nous n'avons pas les moyens de faire un travail positif.

Je recommanderais donc qu'on affecte suffisamment de ressources humaines et financières quelque part dans le système, probablement à l'USFC, qui est l'unité de soutien, pour préparer une liste de noms afin que nous ne soyons pas obligés d'y passer autant de temps.

Nous avons aussi besoin d'un système de renvoi pour nous assurer que nous avons les noms de tous les militaires en mission de maintien de la paix et en service temporaire et des militaires qui sont éloignés de leurs familles pendant plus d'un mois, pour pouvoir communiquer avec les familles. Pour l'instant, bon nombre de familles sont laissées pour compte. Vous en avez entendu certains exemples cet après-midi.

• 1945

Nous avons le tour d'accueillir les gens. Je pense qu'on a aussi parlé cet après-midi de la possibilité d'organiser un service d'accueil. Les centres de ressources pour les familles font un très bon travail pour accueillir les nouveaux venus quand on les avertit d'avance. La plupart du temps, ce sont les militaires eux-mêmes qui transmettent le message à leurs conjoints. Parfois, ce n'est pas la solution idéale.

Nous voudrions envoyer à chaque famille de militaire un exemplaire de notre journal, Contact, pour lui dire que nous sommes là et que nous offrons certains programmes et services, et nous voudrions aussi communiquer avec toutes les familles qui ont un membre en déploiement, c'est-à-dire avant, pendant et après le déploiement.

Dans le cadre de notre financement de deuxième niveau, nous avions demandé qu'on finance quatre bureaux satellites qui pourraient être ouverts cinq matins par semaine, c'est-à-dire la moitié du temps. Notre demande a été refusée sous prétexte que le besoin n'avait pas été suffisamment bien établi. Le mandat des services de soutien pour les familles consiste à fournir des services de soutien là où habitent les militaires. Sans liste nominale, nous ne pouvons pas donner de chiffres précis, mais le fait que les militaires disent «la base d'Orléans» quand ils veulent parler d'Orléans, est certainement révélateur.

La solution serait donc d'avoir la liste nominale et peut-être un engagement de financer quatre bureaux satellites pendant deux ans à Aylmer, à Gatineau, à Ottawa-Ouest et à Orléans avec un employé à temps partiel à chaque endroit et suffisamment d'espace pour un bureau, un kiosque de renseignements et une salle où pourraient se réunir les conjoints et les enfants.

Notre objectif consiste à avoir l'occasion de protéger les intérêts de nos familles là où elles habitent et de sensibiliser les agences dans ces localités au besoin et au mode de vie des familles de militaires. Nous avons constaté que c'était possible de le faire à partir d'ailleurs, mais si vous allez sur place, cela montre aux gens de la localité que vous vous intéressez à son fonctionnement, et ils ont tendance à vous écouter et à entendre beaucoup mieux vos points de vue sur les besoins des familles de militaires.

Ensuite, la structure opérationnelle: le transfert de tâches militaires à des civils et l'évolution des services de la défense au QGDN a beaucoup nui aux familles à Ottawa. On donne l'impression aux militaires et à leurs familles qu'ils sont plaignards s'ils demandent de l'aide. Les familles de militaires sont bien spéciales et leur droit à des services, à des ressources et à des soutiens particuliers a été établi par suite de recherches solides et des constatations de divers groupes d'examen, de sondages des besoins et d'examens opérationnels. Pourtant, on ne cesse de contester la nécessité de notre existence, surtout du côté civil des services de la Défense nationale. Nous ne devrions pas être obligés de prouver la nécessité de nos programmes à des bureaucrates civils ou compter sur eux pour notre financement.

Le fait est que la chaîne de commandement devrait se terminer par un militaire de grade élevé. Depuis toujours, notre objectif consiste à aider les Forces canadiennes au QGDN à remplir leurs obligations envers les familles de militaires pour que les militaires eux-mêmes puissent être efficaces sur le plan opérationnel.

Sheila a tenu des propos très justes au sujet du coût de la vie dans la région de la capitale nationale, mais je voudrais le répéter. Nous jugeons que le prix du logement et le coût des activités récréatives et sociales est plus élevé dans la région que sur la plupart des autres bases, mais les salaires sont les mêmes dans tout le pays et, comme elle l'a dit, l'indemnité d'aide au logement ne semble pas être efficace. Cela veut dire que les familles ont de vrais problèmes financiers et n'ont plus de choix pour décider, par exemple, que le conjoint doit chercher du travail pour obtenir un deuxième revenu. Pour la famille de militaire moyenne, c'est-à-dire avec trois enfants, le deuxième revenu est une nécessité.

La nécessité de travailler veut dire qu'on fait face ensuite à d'autres obstacles: les possibilités d'emploi, les garderies, le bilinguisme et, bien sûr, si votre conjoint est affecté ailleurs, le même vieux problème de l'assurance-emploi.

Les possibilités d'emploi ne sont pas fameuses. Bon nombre de nos conjoints sont sous-employés. Il y en a beaucoup qui ne sont pas embauchés parce que les employeurs jugent qu'ils sont trop mobiles et qu'on ne peut pas compter sur eux. Les garderies coûtent très cher, de 25 à 40 $ par jour et par enfant, ce qui veut dire que le conjoint n'a pas les moyens d'être sous-employé et ce qui réduit les possibilités d'emploi, ou bien on doit s'adresser à des garderies qui ne sont pas conformes aux normes et où nos enfants ne pourront pas profiter d'un milieu favorable au développement et des avantages que peut procurer le fait d'être séparés des parents.

• 1950

Le bilinguisme est presque une nécessité pour trouver de bons emplois, mais il n'y a pas pour les conjoints de cours d'immersion gratuits ou peu coûteux qui offrent en même temps des services de garde d'enfants, de préférence gratuitement.

Le fait que les conjoints qui doivent quitter leur emploi à cause d'affectations outre-mer ne soient pas admissibles aux prestations d'assurance-emploi est très démoralisant. Une solution serait d'instaurer un programme d'emploi des conjoints semblables à ceux qu'on a au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international ou, même meilleur. Une deuxième solution serait des cours d'immersion gratuits ou très peu coûteux pour les conjoints, accompagnés d'une subvention pour les services de garderie au besoin.

Une troisième solution serait que le MDN négocie avec Ressources humaines Canada pour que l'on mette de côté un certain montant de prestations d'assurance-emploi pour les conjoints envoyés à l'étranger jusqu'à leur retour au Canada, peu importe la durée de l'affectation. La Commission de l'assurance-emploi a le pouvoir discrétionnaire de mettre de côté les prestations d'assurance-emploi jusqu'à 104 semaines si quelqu'un perd son emploi parce qu'il doit purger une peine d'emprisonnement. Il semblerait raisonnable qu'un conjoint qui doit accompagner sa famille à l'étranger et qui doit donc quitter son emploi à cause de cela puisse au moins profiter de prestations d'assurance-emploi à son retour au Canada pour pouvoir trouver un autre emploi.

Notre objectif consiste à avoir un financement de deuxième niveau suffisant pour embaucher quelqu'un qui s'occuperait de l'emploi et de la formation au travail des conjoints, de même qu'un financement pour un cours d'immersion linguistique ou encore l'allocation de places dans les programmes d'immersion du MDN, avec une subvention pour les services de garderie, et la possibilité d'aider le MDN à négocier avec Ressources humaines Canada pour résoudre le problème de l'assurance-emploi.

Pour ce qui est des jeunes, même si le CRFFA offre certains programmes pour les adolescents, nous savons qu'il faudrait consacrer plus de temps et d'énergie à cette question. L'absence d'installations récréatives, surtout sur les bases, est difficile à accepter pour nos adolescents, et nous avons de plus en plus de problèmes de drogue, d'alcool et de vandalisme.

Ces problèmes sont-ils plus graves qu'ailleurs dans la communauté? Peut-être que non. Les autorités civiles ont des programmes pour les jeunes à très peu de distance de chez eux, mais nos adolescents sont pour ainsi dire prisonniers à Uplands, par exemple, ce qui cause un problème pour la communauté. Ils sont défavorisés à trois points de vue: l'isolation géographique, le manque de transport et le manque d'argent.

La solution serait de fournir plus de financement au directeur chargé du soutien aux familles de militaires pour créer des centres des programmes pour les jeunes, et que l'agence des services du personnel affecte à Uplands et à Rockcliffe une personne chargée des loisirs communautaires. Notre objectif consiste à répondre aux besoins des jeunes, à leur offrir des services de loisirs et de soutien appropriés et à assurer la liaison avec les autorités scolaires et les parents pour bâtir un milieu sain pour nos enfants.

Il y a quelques autres petites questions, ou du moins les questions sont importantes mais les paragraphes sont petits.

Dans le cas des familles monoparentales, les services de garde d'enfants en cas de déploiement, de service temporaire et de travail par poste sont les problèmes les plus courants. Je me contenterai de dire que c'est très décourageant d'entendre certains de ces militaires raconter leur histoire et de comprendre que si même eux n'ont pas les programmes de soutien appropriés, nos conjoints à nous devront attendre bien longtemps avant d'y être admissibles. Notre financement est insuffisant pour que nous puissions leur offrir des programmes de garde d'enfants subventionnés toute la journée ou quelque chose qui s'en rapproche. À l'heure actuelle, la seule solution que nous ayons est le registre de garde d'enfants.

Pour ce qui est des autres questions, les conjoints qui ont des enfants à l'école ou qui n'ont pas d'enfants ne veulent pas vraiment de programmes du CRFFA; ce qu'ils veulent, ce sont des emplois. Vous les avez entendus le dire cet après-midi. Ils ne veulent pas non plus de travail bénévole; ils veulent de véritables emplois.

Pour ce qui est du travail par postes, les postes de 12 heures sont malsains. Des études ont démontré que la famille souffre souvent de ce genre d'horaire. Bon nombre de travailleurs par poste ne peuvent s'adapter aux postes de 12 heures, et le travail dans les deux à quatre dernières heures n'est pas aussi productif. Nous avons des familles où les deux conjoints militaires travaillent par postes alternants.

• 1955

Leitrim a bel et bien donné aux militaires le choix des postes, et ils ont choisi le poste de 12 heures parce qu'ils étaient attirés par les quatre jours de congé. Un bon employeur doit-il offrir des choix dont il sait, d'après la recherche, qu'il cause des torts? Est-ce là une politique de valorisation de la famille?

Quand on élimine le logement—par exemple, le parc de logements de Rockcliffe—est-ce que l'on compte utiliser les économies et les gains qu'on a réalisés avec les ventes immobilières pour bâtir des parcs de logements satellites dans les localités où ces gens déménageront? On dirait qu'on espère que les familles se fondront dans l'économie locale, et les autorités n'auront plus alors la responsabilité de fournir des services. Est-ce là l'intention cachée de la politique?

Quand la Défense nationale se penche sur des problèmes familiaux, est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de consulter automatiquement le CRFFA local? Et rappelez-vous que la région de la capitale nationale est unique. Ce n'est pas comme dans n'importe quelle autre base. Cela ne doit pas servir de prétexte à l'élimination des services, il faut au contraire y voir un défi qui consiste à trouver des moyens sans cesse améliorés de desservir cette population considérable et éparpillée dans la région.

Merci.

Des voix: Bravo!

Le président: Judi, vous avez une question.

Mme Judi Longfield: En fait, je veux d'abord faire un commentaire, qui s'adresse à Linda.

Linda, continuez de harceler—non, le mot est mauvais—d'achaler le général Dallaire au sujet du conseil consultatif sur les conjoints de militaires. Il faut faire cela, et plusieurs d'entre nous vous y aideront.

Vous avez fait une observation qui avait trait aux articles récents du Maclean's sur les agressions sexuelles. Pour ma part, je veux qu'on en finisse pour toujours avec ces agressions sexuelles, mais je trouve épouvantable que la direction de Maclean's exploite la misère des militaires pour vendre sa revue. Des agressions sexuelles, il y en a dans tous les segments de la population canadienne, et les cas d'agression sexuelle chez General Motors ou IBM ou ailleurs ne remplissent pas les colonnes des journaux ou des revues locaux. Je pense que vous avez raison, il s'agit ici d'une toute petite minorité, et l'on met tout le monde dans le même sac, et je trouve cela odieux.

Cela dit, le ministre est parfaitement décidé à aller jusqu'au fond des choses et à résoudre le problème, de telle sorte que les femmes que nous voulons recruter dans les forces armées n'auront jamais à craindre ce genre de choses. Je pense que nous voulons tous en venir là.

Linda, vous avez également fait une observation sur ce que Sheila a dit. Je me suis toujours inquiétée au sujet de la question du logement et de la perspective qu'on en sorte totalement, et vous avez parfaitement illustré le problème lorsque vous avez dit que les gens se fondent dans l'économie. C'est ce qui m'inquiète quand on dit simplement que les gens n'ont qu'à se débrouiller. Comment se fait-il que vous ne pouvez pas obtenir la liste des familles militaires que vous pourriez intégrer à votre liste d'envoi et leur dire: «Nous voici, nous voulons vous aider»?

Mme Linda Gunning: Si l'on n'avait pas effectué les compressions au moment où on l'a fait, on aurait pu bien faire les choses, mais les ministères dont nous avions besoin pour faire cela se sont retrouvés eux aussi avec des compressions à ce moment-là parce qu'on allait les doter de nouveaux systèmes informatisés. Il y a donc eu diminution du personnel qui accomplissait habituellement ces travaux d'écriture, et d'autres exigences sont intervenues. Je crois que ça s'améliore, mais pour moi, c'est le symptôme du genre de misère bureaucratique qui fait que je m'arrache constamment les ongles en grattant un mur de ciment.

Sur la base, le commandant est le bon Dieu, et c'est très bien parfois, parce qu'on peut obtenir des choses si on peut le convaincre qu'on peut les faire. Ici, la chaîne de commandement est très longue, et même si l'on obtient la signature d'un assez haut gradé sur son petit bout de papier, on se fait quand même demander par des gens: «Eh bien, je ne crois pas que vous ayez droit à cela. D'où est-ce que ça vient?» Il faut alors revenir en arrière et dire: «Regardez, on y a droit.»

• 2000

Au début, je me suis adressé au commissaire à la protection de la vie privée parce qu'à un moment donné, on nous avait dit que c'était une question relative à la protection de la vie privée et que nous n'avions pas droit à la liste de noms. Mais ne pas avoir cette liste, pour nous, c'était comme dire à un plombier qu'il doit faire son travail, mais sans outil. Il faut être capable de joindre ses clients, sa clientèle, et si vous n'avez pas ces informations, vous ne pouvez pas faire grand-chose.

À un moment donné, je me suis dit: «Eh bien, peut-être que je me trompe. Peut-être que je devrais m'adresser au commissaire à la protection de la vie privée et me renseigner comme il faut. Après tout, c'est nous le centre de ressources pour les familles. Il faut respecter le droit des gens.» Et on nous a dit sans équivoque que non, la loi autorise parfaitement ce genre de chose, que c'était une nécessité pour notre fonction, que c'était dans un but légitime, et que par conséquent il n'y avait aucune raison de ne pas nous fournir ces informations.

C'est donc là qu'on a commencé, et on a alors commencé à nous comprendre, et finalement nous nous retrouvons maintenant dans un milieu où nous avons un excellent commandant qui nous aide. Mais les années ont passé, et c'est vraiment malheureux. Les gens ont aujourd'hui des attentes face aux centres de ressources pour les familles parce qu'ils existent depuis cinq ans, et si on ne peut toujours pas joindre les gens, on commence à nous regarder et à dire: «Hé, il y a quelque chose qui ne va pas chez vous. Cela ne peut pas seulement être la faute du système.»

Donc, nous voulons absolument obtenir la liste nominative, et je suis sûre qu'on l'aura un jour. Elle existe, et il y a ce nouveau programme, et tout est censé marcher ensemble. J'ai hâte de voir les résultats.

Mme Judi Longfield: Eh bien, tenez bon.

J'ai une dernière question pour vous. Vous avez parlé des services de deuxième niveau. Qu'est-ce qui constitue un service de deuxième niveau?

Mme Linda Gunning: Question très intéressante parce qu'il y a environ un an de cela, les directeurs exécutifs et les présidents ont tenu une réunion importante pour discuter justement de cela. Nous avions ce nouveau plan opérationnel et nous allions le mettre en oeuvre, et on se demandait comment faire?

Eh bien, on a décidé d'offrir des services qui sont pas mal essentiels. Tout le monde au Canada aurait droit aux services essentiels. Toutes les familles de militaires pourraient obtenir des services essentiels de tous les centres de ressources pour les familles.

On a décidé qu'il existerait aussi des services de deuxième niveau. Il s'agirait de services propres à l'emplacement. À ce moment, je méfiais beaucoup de ces services de deuxième niveau parce qu'on était censé les traiter comme des services essentiels sur le plan financier; il y aurait seulement des différences d'un emplacement à l'autre.

Le temps a passé, la paperasse a épaissi, et les services de deuxième niveau sont devenus des services pour lesquels il faudrait s'adresser au commandant de la base ou à son homologue ici pour obtenir des fonds supplémentaires qui permettraient de financer ces services.

Eh bien, dans notre cas, il existe des choses comme nos opérations satellites. Il en coûtait un peu plus pour obtenir les services de travailleurs spécialistes de la jeunesse. Aux services essentiels, on dit qu'il faut offrir quatre programmes par année aux jeunes. Nous avons estimé que c'était tout à fait insuffisant pour combler les besoins de nos jeunes. Voilà pourquoi nous avons demandé des services de deuxième niveau.

Les garderies constituent un service de deuxième niveau. Même chose pour le counselling. L'intervention critique non, mais le counselling oui.

Vous savez que vous pouvez avoir des groupes de mamans et de petits, et vous savez que vous pouvez avoir des groupes de jeux, et il s'agit là de services essentiels, mais si on veut un programme de garderie, il faut que le programme s'autofinance, il y a donc des coûts qui sont associés au programme.

C'est la même chose pour les services de garde.

Un de nos grands sujets de querelle—parce que nous sommes à Ottawa, nous sommes censés vivre dans un aquarium—ce sont les services de garde, et quand on en parle, la première chose qu'on nous dit c'est: «Ah, vous n'aurez jamais cela. Le public deviendrait fou. Des services de garde financés par les fonds publics?»

• 2005

Je trouve que les services de garde coûtent très cher dans la région. D'accord, nous avons besoin de services de garde qui répondent aux besoins des gens qui ne peuvent pas se permettre de payer ce qu'il en coûte habituellement. Mais alors comment obtenir des subventions?

J'ai pensé qu'il ne serait pas fou de décider que le programme des centres de ressources pour les familles de militaires, disons, finance les services du directeur. C'est un poste de supervision. Cela entre exactement dans cette catégorie. Si l'espace est payé, si les services publics sont payés, et si le directeur est payé, nous pourrions avoir une subvention pour payer le salaire du directeur. Eh bien, encore là, non, on ne peut pas faire cela parce qu'il s'agit de fonds publics. Jamais de la vie.

La même chose avec cette histoire des Affaires étrangères. Quand on a appris ce qui se passait là-bas, on s'est dit, formidable, voilà une idée extraordinaire. Si on peut le faire là- bas, pourquoi pas ici? Tout à coup, on s'est buté à cette attitude de gens qui disaient que non, on ne pouvait pas faire cela. Ça ne sera jamais accepté parce que la fonction publique va pousser des hauts cris.

Oui, on peut faire cela aux Affaires étrangères, alors pourquoi ne pouvons-nous pas en faire autant ici? Pourquoi faut-il se battre pour obtenir ce genre de chose? Pourquoi est-ce si difficile? Pourquoi faut-il toujours penser qu'on n'est pas assez bon pour avoir ces choses? Nous ne sommes pas des citoyens de seconde zone, alors nous devrions y avoir droit.

J'ai assisté à une rencontre d'un groupe témoin qui réunissait des conjoints des Affaires étrangères et des Forces armées. Ce sont les conjoints des Affaires étrangères qui nous ont dit que nous devions penser qu'ils ont tout et que nous n'avons rien. Si ces personnes étaient là à se plaindre dans ce groupe témoin, nous devions penser qu'elles exagéraient pas mal.

Comment croyez-vous qu'on se sent quand on est un conjoint dans une situation pareille? C'est inacceptable.

Le président: Merci à toutes deux pour vos exposés.

J'invite maintenant le major Nicole Vallée à s'avancer.

Le major Nicole Vallée (témoignage à titre personnel): Je suis le major Nicole Vallée et j'appartiens à la réserve.

Je veux soulever la question des prestations de retraite pour les réservistes. Depuis une dizaine d'années, j'entendais et je voyais des choses qui m'amenaient à croire que les Forces canadiennes allaient prendre des mesures pour offrir des retraites aux réservistes, qui sont les seules personnes de la Défense nationale à qui on refuse l'accès à un régime de retraite. Le commandant de la réserve et des cadets a également soulevé cette question dans le texte qu'il vous a adressé le 9 décembre de l'an dernier.

Vous comprendrez qu'en ma qualité de réserviste comptant plusieurs années de service à temps plein, je trouverais une grande stabilité financière dans un tel régime de retraite. Nous sommes peu nombreux dans ce cas, mais néanmoins, j'estime que nous jouons un rôle important dans le ministère et, à ce titre, on ne saurait nous oublier. En outre, depuis 1993, conformément à la Loi sur les normes de prestations de pension, c'est la loi.

Chaque fois que je soulève la question avec des collègues des Forces canadiennes, j'ai encore le même genre de réaction et de réponse, à savoir deux choses.

Premièrement, les militaires des forces régulières ont tendance à croire que les réservistes ne sauraient avoir droit aux prestations en vertu de la LPRFC, étant donné que leur engagement n'est pas le même. Ils disent souvent qu'ils devraient même se compter chanceux d'avoir un emploi.

D'un autre côté, les réservistes profiteraient de telles prestations de retraite étant donné qu'ils y trouveraient une grande stabilité. Ils craignent que s'ils soulèvent la question trop souvent, ils vont perdre leur emploi. Autrement dit, ils troublent la paix ici. Donc si on s'en débarrasse en ne renouvelant tout simplement pas leur contrat ou quelque chose comme ça, ils disparaîtront.

Quand j'ai soulevé officiellement la question en m'adressant tout récemment au personnel du Quartier général de la Défense nationale, on m'a informée que la Défense nationale semblait peu convaincue de la nécessité d'étudier les exigences relatives à la réserve, et que l'on n'avait pas du tout la volonté qu'il fallait au sein du ministère pour s'attaquer au problème, et que ces deux facteurs entravaient tout progrès dans ce dossier.

• 2010

On dirait qu'on a atteint l'impasse. À mon avis, en ma qualité de personne qui pourrait avoir droit à ces prestations, on n'a fait aucun progrès réel dans ce dossier depuis 1993.

Je soulève la question ici uniquement dans l'espoir de relancer l'affaire et d'obtenir satisfaction en temps utile. J'ai remis une copie de mon texte au greffier du comité, et je pense que cette question nécessite une intervention sérieuse maintenant—une fois pour toutes.

Merci.

Le président: Merci beaucoup. Cette question a été soulevée à quelques reprises devant notre comité.

Major, avez-vous déjà été déployée?

Maj Nicole Vallée: Non, monsieur. Je n'ai jamais été déployée. Dans une carrière de 25 ans, je compte 24 ans de service à temps plein. J'ai passé une bonne partie de ma carrière dans le service du personnel de la réserve, côté infanterie.

Lorsque j'ai fait des relevés statistiques, j'ai constaté que seulement entre 50 et 75 personnes toucheraient ainsi des prestations valables, et j'entends par «prestations valables» le seul revenu de retraite pour ces personnes parce qu'elles ont consacré toute leur carrière à la réserve. Ces personnes consacrent tout leur temps aux questions relatives à la réserve au sein du ministère. Ce sont en fait des experts de la réserve.

Le président: Avez-vous dit entre 50 et 75 personnes?

Maj Nicole Vallée: Oui, dans l'infanterie. J'ai relevé des statistiques sur la réserve de l'infanterie. La dernière fois que je l'ai fait, c'était en 1996, et j'ai constaté qu'il y avait 52 personnes qui avaient plus de cinq ans de service continu, monsieur.

M. John Richardson: À plein temps?

Le président: Seulement à titre de clarification, éprouvez-vous des difficultés avec le versement de votre solde? On a entendu des histoires affreuses à ce sujet.

Maj Nicole Vallée: Oui, monsieur. Tout le temps.

Le président: Après 24 ans?

Maj Nicole Vallée: Ah, oui. Mais ces difficultés changent. On dirait qu'elles ont des roues.

Étant agent des finances dans la réserve et ayant servi de conseillère à l'infanterie pour la réserve pendant quelques années, j'ai agi à titre de médiateur pour les problèmes relatifs à la solde pour les militaires de l'infanterie. Je sais d'où viennent les problèmes et quels sont leur ampleur. Une personne normale ne peut pas les régler. Chose certaine, une seule personne ne peut pas les régler toute seule.

Le président: Éprouve-t-on des difficultés maintenant?

Maj Nicole Vallée: Des tonnes, monsieur.

Des voix: Ah, Ah.

Maj Nicole Vallée: Oui, monsieur. Je peux vous citer quelques exemples particuliers si cela vous intéresse.

Le président: Faites.

Maj Nicole Vallée: Par exemple, le ministère offre depuis quelques temps un avantage social qu'on appelle l'indemnité d'aide au logement, ou l'allocation «triple A» en anglais.

Le président: Oui. L'allocation triple A.

Maj Nicole Vallée: J'y avais droit pour le service de catégories B et C. Depuis 14 mois, le ministère ne peut pas verser l'indemnité de catégorie B, un point c'est tout. Ce n'est pas que le personnel n'essaie pas. C'est que les moyens n'existent pas. Les politiciens disent que ça existe et le système informatique dit: «Et après? On ne peut pas traiter ça.» Mais pour la catégorie C, c'est un système différent et l'on verse l'indemnité.

Donc, j'ai vu ma solde fondre de 15 p. 100, et elle a fondu de 15 p. 100 plus l'indemnité d'aide au logement parce que «on ne peut tout simplement pas vous la verser, madame». C'est là le problème. Le système de la solde ne me verse plus cette indemnité depuis les deux mois que je suis dans la catégorie B, depuis que j'ai quitté la catégorie C. On ne me verse tout simplement rien. Le commis doit tout faire manuellement, et le commis ne reçoit pas beaucoup d'aide dans ce dossier non plus. Vous ne pouvez pas dire que le commis est incompétent. Le commis a été mis dans une situation où il ou elle est incapable d'être efficace.

Donc on se fait engueuler pour ça... On n'a pas assez d'argent pour survivre. J'ai reçu cette semaine mes T-4 pour l'an dernier. Le paiement pour l'impôt sur le revenu tardait beaucoup... C'est typique, à tel point que ça ne vaut pas vraiment pas la peine de se battre. On choisit ses batailles.

• 2015

Le président: Et j'imagine qu'on a dépensé des millions de dollars pour créer un système et le faire marcher.

Maj Nicole Vallée: Oui, monsieur. Je sais que c'est le cas. D'ailleurs, j'ai travaillé à l'un des projets du système de la solde et je sais qu'on y a mis beaucoup d'effort.

Pourquoi est-ce que ça ne marche pas? J'hésite à blâmer les gestionnaires responsables du projet. Je ne crois pas que le problème se situe à ce niveau. Ces gens y ont mis tout leur coeur.

Le président: Où le problème se situe-t-il à votre avis?

Maj Nicole Vallée: Je pense que le problème se pose lorsque la direction donne des instructions sans se demander si on a les moyens de les réaliser. C'est une opinion personnelle. On a instauré l'indemnité d'aide au logement en sachant parfaitement bien que le système était incapable de l'absorber. On a instauré une nouvelle structure d'incitatifs financiers qu'on nous devait depuis très longtemps. Il m'a fallu des années et beaucoup d'encre pour faire approuver ça, mais le système ne peut toujours pas payer le CPR.

Je pense qu'on a réussi à faire quelque chose ce mois-ci, mais personne n'est tombé à la renverse en apprenant qu'on allait toucher une augmentation colossale parce que ça fait des années que le ministère triche là-dessus, et la solde vaut maintenant 85 p. 100 de la solde de nos homologues.

«Ah, oui, qu'ils disent, on ne vous donnera pas l'argent tout de suite parce que le système en est incapable.» Quand McDonald peut payer... Je n'arrive pas à croire que la Défense nationale est incapable de payer... Ça irrite tous les militaires.

Le président: Major, je l'ai dit plusieurs fois et je le répéterai ce soir: je pense que nous devrions avoir pour les réservistes le même système de solde qu'on a pour les généraux, et je vous garantis alors que le problème serait réglé.

Des voix: Bravo!

Maj Nicole Vallée: Oui, mais il y a un officier, là où je travaille, un général, qui est de la catégorie B, et il éprouve les mêmes difficultés relatives à la solde que moi.

Le président: Les généraux des forces régulières.

Maj Nicole Vallée: Ah, oui, ça c'est différent. Ces gens-là ne sont pas comme les autres.

Le président: Merci beaucoup, major. Vous avez fait là une observation très intéressante.

Le matelot-chef Greg Jurchuk. J'espère avoir prononcé votre nom correctement.

Matelot-chef Greg Jurchuk (témoignage à titre personnel): Oui, monsieur.

Je compte 16 ans de service dans les forces régulières. Parmi les faits saillants de ma carrière, j'ai servi avec le Régiment 1 des transmissions du Canada à Kingston, j'ai été Casque bleu au Moyen-Orient, et j'ai servi sur le navire canadien de Sa Majesté, le Kootenay, et j'ai pris part ainsi à la visite de bienveillance à Vladivostok.

Je n'ai pas de mémoire à vous présenter. J'ai regroupé toute mon intervention en quatre questions que j'aimerais poser au comité.

Premièrement, pourquoi cotisons-nous à l'assurance-emploi alors que nous n'avons pas droit à des prestations d'assurance- emploi?

Deuxièmement, j'ai été muté de Borden à Ottawa, et à cause du loyer et du coût de la vie, j'ai calculé que même avec l'indemnité d'aide au logement, ma solde sera réduite de 400 $ par mois net.

Troisièmement, pourquoi est-ce qu'on augmente la solde du soldat, du marin ou de l'aviateur et qu'on augmente ensuite son loyer, ce qui fait que le militaire se retrouve avec moins que ce qu'il avait avant?

Quatrièmement, pourquoi nous, les militaires des Forces canadiennes, devons-nous aller à l'étranger pour être appréciés? J'ai dû me rendre en Hollande, à Nimègue, en mars 1997, et je me sentais plus fier d'être soldat canadien là-bas qu'ici, où on attaque les militaires dans les journaux tous les jours.

Merci beaucoup.

Des voix: Bravo!

Le président: Matelot-chef, vous avez fait quatre observations très importantes. Nous les avons entendues à plusieurs reprises dans notre tournée des bases. On a soulevé à plusieurs reprises la question de l'assurance-emploi, de l'augmentation de la solde, les mêmes choses.

• 2020

Nous étions en Europe la semaine dernière. Nous nous sommes rendus en Allemagne et en Bosnie, et les soldats canadiens en Allemagne nous ont dit exactement la même chose, à savoir qu'on leur témoigne une plus grande reconnaissance à l'étranger qu'au Canada.

Comment allons-nous changer les choses? J'espère sincèrement que les efforts de notre comité susciteront quelques changements. Quant aux autres changements, à savoir comment faire pour que les militaires canadiens soient appréciés au Canada, notre comité va se pencher là-dessus et faire des recommandations en ce sens.

J'ignore si un autre député... David?

M. David Pratt: Merci, monsieur le président. J'ai quelques observations à faire ici.

Il va presque sans dire que les catastrophes naturelles que nous avons éprouvées au cours de ces dernières années ont fait beaucoup pour relever le crédit des militaires au Canada, et il existe des sondages, et je sais que certains députés ici présents les ont vus, qui indiquaient récemment que les militaires—abstraction faite des récents articles de Maclean's—jouissent probablement d'un crédit sans précédent.

L'une des choses que notre comité voudrait faire, entre autres, c'est s'inspirer des bons sentiments qu'un grand nombre de Canadiens ont à l'égard des Forces canadiennes. Ils disent que les militaires font très bien leur travail sans pourtant jouir du respect et de la rémunération qu'ils méritent.

Lorsque nous avons entrepris nos travaux, nous nous sommes rendus à Esquimalt et nous sommes allés dans le Nord, en janvier déjà, et ce qu'on a fait, entre autres, dans plusieurs bases, c'est qu'on nous a montré un vidéo de l'émission This Hour Has 22 Minutes. J'ignore si vous l'avez vu, cela remonte à il y a quelques mois, et Rick Mercer faisait état de l'excellence des militaires canadiens. C'était dit bien sûr d'une façon très comique, mais au même moment, il faisait comprendre sérieusement aux gens que nous n'accordons pas à nos hommes et à nos femmes en uniforme le crédit qu'ils méritent pour une foule de choses.

Notre comité est déterminé à changer les choses de ce côté. Il n'y a pas de députés de l'opposition ici ce soir, mais je sais que s'ils étaient ici, ils seraient pas mal d'accord avec nous quant à la façon de régler ce problème. Pour la plupart d'entre nous, il n'entre presque plus de partisanerie dans cette étude. Nous voulons tous faire quelque chose. C'est aussi le ministre Eggleton qui a lancé cette étude, et je pense qu'il mérite des félicitations pour cela.

Mais à mon avis, le coeur du problème, c'est la reconnaissance que le public canadien doit à ses militaires. Ce n'est pas comme aux États-Unis ici, où il est clair que les gens peuvent reconnaître votre grade selon les épaulettes et les insignes de grade que vous avez. Ce n'est pas comme ça ici. Pour ce qui est du rôle que nos militaires jouent, le Canada est l'un des pays les plus indifférents au monde, et je crois que notre comité aura beaucoup à faire pour changer cet état d'esprit. Le monde des années 90 est à plusieurs égards un monde plus dangereux que dans les années 80, et je pense que la nécessité d'avoir des forces armées, comme le dit la publicité de la Défense nationale, qui soient «capables de se battre», est plus forte aujourd'hui qu'elle ne l'a été pendant longtemps.

Cela dit, je pense que nous avons toute une côte à remonter, mais je crois que notre comité est résolu à changer les choses de ce côté.

Le président: Merci, David.

Monsieur Clouthier.

M. Hec Clouthier: Il y a une chose que nous avons constatée, et qui m'a un peu surpris, lorsque le Comité de la défense a tenu ses audiences en Europe, mais surtout en Allemagne. Si les Hollandais semblent apprécier les militaires, et tout particulièrement les militaires canadiens, c'est, entre autres choses, parce que les enfants à l'école, de l'école élémentaire à l'école secondaire, sont très sensibilisés aux avantages qu'il y a à avoir sur place une armée, et particulièrement l'armée canadienne.

• 2025

Je me promenais ici vers les 18 h 45, et j'ai rencontré un touriste. Je savais qu'il n'était pas anglophone, alors je me suis arrêté et je me suis mis à parler avec lui et, surprise surprise, j'ai appris que lui et sa femme étaient de Hollande. «Pourquoi êtes-vous venus au Canada?» lui ai-je demandé. Je pense qu'il avait 27 ans, et il a répondu: «Parce que mon père et mon grand-père, ma mère et ma grand-mère, m'ont dit que le Canada est l'un des plus grands pays au monde parce que ce sont des militaires canadiens qui ont libéré notre pays.»

Je l'ai interrogé au sujet du système d'éducation. Il pouvait m'énumérer des dates et des faits d'armes des militaires canadiens beaucoup mieux que je ne pouvais le faire, je dois le dire à ma grande honte. Je sais que mes enfants ne pourraient pas en faire autant. Apparemment, il avait appris cela à l'école.

Peut-être qu'avec un livre comme celui que Sheila Johnston a écrit—un petit livre comme celui-ci... il vaudrait peut-être la peine d'envisager d'inscrire cela au programme scolaire canadien pour que les jeunes soient au courant des exploits extraordinaires accomplis par les militaires canadiens. C'est seulement une observation.

Vous avez dit que vous avez perdu environ 400 $ par mois quand vous avez été muté de Borden à Ottawa. Il m'apparaissait évident, au ton de votre voix, que vous ne vouliez probablement pas être muté à Ottawa. Je sais que Sheila en a déjà parlé, je veux dire de la possibilité d'appliquer des motifs de compassion dans les dossiers de mutation. Quelle a été votre expérience des gestionnaires de carrière?

Matelot chef Greg Jurchuk: De quel point de vue, monsieur?

M. Hec Clouthier: Eh bien, vous ont-ils été utiles? On nous a beaucoup parlé d'eux, alors je m'interroge: Avez-vous parlé de cette mutation à votre gestionnaire de carrière?

Matelot chef Greg Jurchuk: En général, pour ce qui est des préférences relatives aux affectations, j'ai été très chanceux, monsieur. Ma mutation à Ottawa était une situation assez inhabituelle. J'ai été à Borden pendant environ sept ans. Le commis que je remplaçais était pour sa part à Ottawa depuis environ sept ans, et le gestionnaire de carrière avait pensé à intervertir nos postes.

J'ai parlé à mon remplaçant, dont j'étais également le remplaçant, et nous avons conclu que nous étions tous les deux très heureux où nous étions. Je suppose qu'on peut dire que c'est la première fois que j'ai reçu une affectation à laquelle je ne m'attendais pas.

M. Hec Clouthier: Bon. Merci.

Matelot chef Greg Jurchuk: Je vous en prie.

Le président: Sherry MacKenzie.

Mme Sherry MacKenzie (présentation à titre personnel): Bonjour. J'ai été dans les forces armées il y a des années de cela, et j'ai été agressée sexuellement, victime de violence et harcelée, je dis bien harcelée méchamment et de façon continue, et j'ai été punie quand je me suis plainte.

On m'a punie de la même manière qu'on a fait souffrir des gens en Irak, comme nous l'avons vu à la télé: des gens ont été tenus en otage et drogués et forcés de sourire devant la caméra.

Depuis, j'ai étudié la guerre et la médecine et j'ai constaté que c'est exactement ce que les médecins de Hitler avaient prescrit pour lui-même et les autres. Je constate par ailleurs que Radovan Karadzic est encore en liberté, bien qu'il ait fait la même chose.

J'ai tout à fait honte des éléments des forces armées qui ont eu quelque chose à voir avec cela. Je n'ai pas honte des gens bien et je ne veux plus voir de concurrence entre les bons et les mauvais. Il faut maintenir la séparation qui existe déjà, mais en inversant les rôles, c'est-à-dire que les mauvais doivent s'en aller et les bons doivent rester ou revenir ou être embauchés.

Quant à ce qu'on a dit au sujet de Maclean's qui s'est servi de cette histoire pour vendre des magazines, je suis fière d'eux et je ne veux pas que quiconque en souffre. Je livre cette bataille depuis 1982, et personne, ni la Commission canadienne des droits de la personne ni personne d'autre, n'a jamais offert de m'aider. Je vis actuellement dans la pauvreté et mon propriétaire me vole, et c'est une situation qui perdure depuis des années.

Le Canada a rejeté tous mes griefs, y compris les militaires, chez qui j'ai fait ma première tentative de carrière, et d'autres tentatives que j'ai faites pour dénoncer le harcèlement dans les lieux de travail civils se sont heurtées à un refus semblable. Et pourtant, j'ai réussi à obtenir le certificat que les militaires affirmaient que je n'aurais jamais. C'est un fait. Ils ont dit qu'il m'était impossible de l'avoir, et pourtant le certificat militaire que j'essayais d'obtenir ne représente qu'une fraction de ce que le ministère des Transports m'a accordé comme mécanicien d'aéronef. Je tenais à le souligner.

• 2030

Je voudrais dire qu'on a dit également que la raison pour laquelle j'avais quitté les forces armées, c'était pour éviter de procéder comme le proposaient les groupes des droits de la personne. Oeil au beurre noir... Je vais continuer d'aider à infliger des yeux au beurre noir, parce que c'est un problème bien réel.

Un jour, j'étais devant le Centre Rideau et je parlais de Hitler et de ses médecins quand un ancien combattant m'a abordé et m'a littéralement menacé avec sa canne, et m'a dit: «Vous n'avez pas le droit de parler de cela. Vous n'avez jamais été sur un champ de bataille». Je lui ai dit: «Vous avez peut-être tiré des coups de feu, monsieur, mais je vais vous dire une bonne chose, vous n'avez jamais réfléchi à ce qui cause la guerre. Vous n'avez jamais essayé. Vous avez seulement vu des gens se faire déchiqueter, mais vous n'avez jamais su comment on réussit à convaincre les gens d'aller se faire tuer».

Depuis ce temps, j'ai entendu dire que les anciens combattants ont refusé une exposition qui devrait être présentée au Musée de la Guerre pour expliquer ce qui se passe. Laissez-moi vous dire que j'ai subi dans les forces armées des sévices identiques. Les souffrances que l'on a étalées dans les pages du magazine Maclean's... Honte à ceux qui ont harcelé ces gens-là et qui ont étouffé leurs plaintes après coup. Il faut que ça cesse. Dorénavant, quand il y a un désastre, il faut reconnaître les gens bien. Il ne faut pas blâmer l'ensemble des militaires, il ne faut pas blâmer tout le monde. En fait, quand je lis le magazine MacLean's, je suis assez fier.

J'ai entendu dire aussi qu'un autre magazine essayait d'en faire autant et j'ignore où ils en sont actuellement, mais je me passerai de leur intervention, parce qu'ils ont publié de la pornographie; ce magazine s'appelle Esprit de Corps. C'est un dénommé Scott Taylor. J'ai vu de mes yeux vu cette pornographie. Et il y a un de mes amis qui est ministre du culte, qui m'a accompagné au bureau du magazine. Quand j'ai vu cela, j'étais en colère, mais personne ne devrait s'en prendre à Maclean's pour nous tendre la perche.

Il est temps de nous verser un dédommagement pour les torts causés à nos carrières, même si nous avons réussi à travailler depuis. Mais même si nous avons du travail, si nos conditions ne sont pas les mêmes que celles que nous visions, nous devrions être dédommagés pour la perte de nos cotisations à la pension de la vieillesse, le tort causé à nos carrières, à notre potentiel de promotion depuis le premier jour où nous avons souffert de cela, et puis aussi pour le fait que nous avons dû recommencer nos carrières à partir de zéro dans le même métier ou dans un autre métier sans pouvoir donner notre carrière militaire comme référence. Cette situation se répète et, oui, c'est un sentiment épouvantable, parce que je me suis engagée en pensant que je pourrais participer aux missions de maintien de la paix dans le cadre de mon métier ou bien parce que je m'imaginais que je pourrais faire partie des Snowbirds.

On a dit que c'est un monde d'hommes, moi je dis que c'est un monde de jérémiades, et ce n'est pas la faute de l'innocent soldat, homme ou femme, blanc ou d'une autre couleur. Ce monde de jérémiades est causé par des gens qui ont besoin de bretelles d'acier, des gens qui pissaient dans nos masques ou bien, et cela je le sais, parce qu'ils l'ont dit, qui pissaient dans nos tasses de café; c'est un crime et nous essayons de nous défendre contre des soldats qui détruisent notre matériel ou même qui répandent sur nous un produit qui est capable de percer le caoutchouc. Nous avons essayé de nous défendre contre cela dans nos entraînements de défense des bases, et qu'est-il arrivé? Nos propres soldats nous infligeaient ce traitement en utilisant contre nous des produits qui nous étaient remis pour assurer notre défense et notre sécurité. Non, non.

Il y avait des cochonneries dans ma tasse de café et certains ont dit qu'ils s'en étaient servis comme exécutoire sexuel, bien qu'on n'ait jamais pris personne. Et puis, je pourrais vous parler de nos problèmes de nourriture... C'est déjà assez dur pour les militaires d'être forcés de s'accommoder de la nourriture qu'on leur donne, même s'ils n'aiment pas cela, mais parfois, la nourriture a beau être mangeable, quand on a affaire à un homme qui dit qu'il a déchargé dans votre assiette, quand on est au travail et qu'on a besoin d'un repas et qu'on n'a rien d'autre à manger... C'est une honte. Par contre, il ne faut pas pointer du doigt ceux qui sont allés aider les victimes d'inondation ou du verglas. Non, non. Il ne faut pas confondre les deux et les mettre en concurrence.

Je vous le demande à vous, Judi Longfield: retirez ce que vous avez dit au sujet du magazine Maclean's. Quand quelqu'un me lance une bouée de sauvetage, je dis merci.

Merci.

• 2035

Le président: Merci beaucoup.

Sergent Michael Martino.

Le sergent Michael Martino (témoignage à titre personnel): Bonjour. Je serai très bref.

Comme bon nombre de personnes ont déjà signalé le sort réservé aux familles de militaires, je voudrais simplement ajouter que pour un soldat célibataire, surtout dans la région d'Ottawa, c'est extrêmement difficile.

Quand je me suis enrôlé, comme recrue, je pouvais vivre dans le casernement; en fait, je n'avais pas le choix, je devais vivre six mois par an dans le casernement et, à l'époque, je m'en plaignais bien sûr. Mais en rétrospective, c'était probablement une bonne idée. Au moins, cela m'a permis de connaître un peu mieux la ville avant d'être obligé de me trouver un logement à louer.

Ici, bien sûr, nous n'avons pas cette option. Surtout pour les simples soldats et les sous-officiers, dont la solde est quelque peu inférieur à la moyenne nationale, c'est presque impossible de trouver un logement dans la région d'Ottawa, du moins un logement abordable et acceptable. Aussi misérable que soit la vie dans les logements familiaux, étant donné ce que le simple soldat moyen peut se permettre comme loyer, ce n'est pas fameux non plus. C'est tout ce que j'avais à dire.

Merci.

Le président: Sergent, j'ai une question à vous poser. Si vous faisiez partie de notre comité et que vous deviez recommander une augmentation de salaire, quelle serait votre recommandation?

Le sergent Michael Martino: Ce que je voudrais, ou bien ce que je recommanderais?

Le président: Ce que vous recommanderiez.

Le sergent Michael Martino: C'est très difficile à dire, monsieur, parce que la situation est tellement différente selon les diverses régions du Canada. En fait, j'y ai déjà réfléchi et j'ai pensé que ce pourrait être une bonne façon de conclure. Je n'ai pas besoin d'augmentation de salaire. Si j'étais bien équipé, bien entraîné, si l'on était reconnaissant de mes efforts et si on prenait bien soin de moi, bien sûr que je serais content, surtout si j'avais les avantages que Mme Johnston a mentionnés en parlant de l'Armée américaine. Toutefois, comme nous sommes laissés à nous- mêmes, une bonne suggestion serait 25 p. 100.

Le président: On nous l'a déjà dit.

Le sergent Michael Martino: Toute augmentation supérieure à 5 p. 100 serait certainement la bienvenue. Je pense que la plupart d'entre nous n'ont rien vu de tel depuis pas mal longtemps.

Le président: Quand vous dites «si l'on prenait bien soin de moi», que voulez-vous dire par là?

Le sergent Michael Martino: Par exemple, pour revenir à ce que je disais au sujet du casernement, quand je me suis enrôlé comme soldat d'infanterie, nous avions des logements peu coûteux. Nous devions bien sûr payer pour notre nourriture, mais elle ne coûtait pas cher et, peu importe où l'on se trouvait au Canada, le prix était essentiellement le même. Pour les soins médicaux, récemment, en fait au cours des trois dernières années—c'est peut-être dans l'air ici à Ottawa—j'ai eu l'occasion de faire appel aux services du CMDN. Il y a à peu près un an et demi, les services étaient excellents. Par contre, depuis un mois, je passe le plus clair de mon temps à attendre dans des salles d'attente à l'Hôpital général d'Ottawa.

Quand on songe à presque tous les avantages que les soldats devraient avoir et qu'ils ont effectivement dans la plupart des autres pays, nous sommes traités comme si notre travail était l'équivalent de n'importe quel emploi dans la fonction publique. Autrement dit, comme les autres fonctionnaires, nous devons nous débrouiller tout seuls. Malheureusement, les déménagements, le service outre-mer, tout cela fait qu'il nous est difficile de nous débrouiller à tous les égards, comme le permettrait un emploi stable ordinaire.

Le président: Merci beaucoup.

Le sergent Michael Martino: Merci monsieur.

Le président: Adjudant-chef Nick Zacharuk.

• 2040

L'adjudant-chef Nick Zacharuk (témoignage à titre personnel): Bonsoir, messieurs.

Je n'avais pas l'intention de prendre la parole, mais j'ai passé tout l'après-midi assis ici, à écouter certaines petites vendettas personnelles et de très bons points soulevés par quelques officiers qui ont pris la parole. Ici, à Ottawa, nous avons 7 000 militaires et à peu près 200 colonels en titre. Il y a 190 adjudants-chefs et je n'en vois pas tellement qui sont ici en train d'écouter les griefs et les suggestions, ce qui m'embarrasse énormément.

Dans 24 jours, j'aurai 36 ans de service dans les Forces armées canadiennes. Je me suis enrôlé à l'âge de 16 ans et j'ai mauditement bien vécu. J'ai commencé à 15 $ aux deux semaines. Oui, je livrais des meubles en été pendant mes vacances parce que je me suis marié jeune et que la paye n'était pas très bonne. Cela pouvait aller, mais je voulais un peu de luxe. Je sais que vous êtes allés partout au Canada. Vous êtes allés dans les bases des armes de combat à Petawawa et à Shilo, et aussi à Esquimalt. Il y a des caporaux, des simples soldats et même quelques sous-officiers supérieurs qui livrent de la pizza, qui conduisent des taxis, etc.

Je m'en vais parce que je me suis porté volontaire pour quitter le service. Ce n'est pas faisable de continuer à travailler. Je peux gagner plus d'argent, parce que mes impôts vont baisser, en restant à la maison et en touchant 70 p. 100 de mon salaire, que j'en gagnerais en restant actif.

Je pense que les trois prochaines années verront de grands changements dans les Forces canadiennes. La plupart de nos chefs sont très bons et ils vont nous orienter dans la bonne direction.

Je veux réitérer ce que vous avez déjà entendu d'un bout à l'autre du Canada: notre paye n'est pas très bonne; il nous faut plus d'argent. Il faut aussi s'occuper de nos logements et il faut revoir certains de nos avantages. C'est vous, parlementaires, qui pouvez faire cela. Vous ne changerez pas mon mode de vie, à moins que vous accordiez une augmentation rétroactive à avril, ce qui pourrait augmenter mon indemnité de départ.

Mon indemnité de départ est assez bonne, bien que ce ne soit pas beaucoup d'argent. Le gouvernement a réussi à retarder le paiement de cette somme depuis la date où j'ai eu 30 ans de service, il y a six ans de cela. Si l'on m'avait donné cette indemnité de départ dès que j'y ai eu droit après 30 ans, je l'aurais investie et je ne l'aurais peut-être pas doublée, mais j'y aurais ajouté une somme de 15 000 $ à 20 000 $, grâce à des investissements judicieux.

J'ai payé l'assurance-chômage pendant 36 ans. Je n'en verrai jamais la couleur. Même si je retourne travailler et que j'ai droit à l'assurance-chômage, je n'en toucherai jamais à cause de ma pension. Je dois vous dire que j'ai payé beaucoup d'argent en assurance-chômage. Je pense qu'il faudrait revoir cela.

Et puis, il y a l'impôt sur le revenu qui varie d'un bout à l'autre du Canada. Un adjudant-chef affecté au Québec gagne autant, après avoir payé l'impôt sur le revenu du Québec, qu'un simple adjudant ici. Quand on est envoyé au Québec, on apprend à parler le français. J'ai eu de la chance. J'ai suivi deux cours de français et j'ai été employé au Québec pendant un maximum de six ans. Ma femme a perdu son emploi parce qu'elle ne parlait pas français et mes enfants ont perdu deux ans de scolarité parce que leur système d'éducation est différent. Il faut faire quelque chose pour les personnes à charge quand on envoie un militaire en affectation au Québec.

Je tiens à vous dire que vous n'aurez aucune influence sur ma vie, mais en tant qu'adjudant-chef, je suis responsable des gens qui sont sous mes ordres et je suis surtout préoccupé par le sort des simples soldats. Il se trouve que j'ai un fils qui est simple soldat. Il habite dans votre circonscription, monsieur, à Petawawa. Sa femme ne peut pas trouver d'emploi là-bas. Ce n'est pas parce qu'elle a trop d'instruction, mais parce qu'il n'y a pas d'emplois là-bas et le gouvernement ne fait rien pour y remédier.

Mon fils en est à sa cinquième mission de l'ONU, la deuxième en Yougoslavie. Il a calculé que cela totalisait deux ans et demi de sa vie sur les cinq dernières années. Il ne s'est pas plaint. Il touche de bons avantages là-bas. Oui, il risque sa vie. J'espère qu'il ne se fera pas tuer. Sa femme est restée là-bas à s'occuper de leur fille. Elle va bien. Le centre de ressource militaire de Petawawa est excellent. Dans les bases, on s'occupe du personnel; le groupe arrière s'occupe des gens dont il a la charge.

Ici, au QGDN, le problème est un peu différent. Ici, on envoie des gens dans des missions de la paix. Le centre de ressource familial est au service des gens seulement si le militaire informe le centre qu'il s'en va.

• 2045

Oui, il y a des listes et des règles disponibles au quartier général de la Défense nationale. Vous avez simplement interrogé les mauvaises personnes. Il y a 200 colonels au quartier général, et ce sont tous des directeurs. Ils savent tous qui travaille pour eux et, s'ils ne le savent pas, ils devraient le savoir.

Il y a une dernière chose que je tiens à dire, monsieur, je vous ai rencontré à Dieppe et je sais que vous êtes un hommes direct. Je me suis entretenu avec vous là-bas et j'ai aussi discuté avec d'autres députés du Parlement qui visitaient les champs de bataille de la Bataille de l'Atlantique, de Vimy, etc. Oui, nous sommes plus respectés à l'étranger que nous ne le sommes ici au Canada. Oui, Maclean's est un magazine à grand tirage; le but de l'opération est d'en vendre. Tout le monde a ses problèmes et nous essayons de les régler. Nous ne sommes pas tous mauvais.

Mesdames et messieurs, nous voulons que vous retourniez au Parlement, que vous déposiez votre rapport et que vous forciez les gens qui peuvent faire quelque chose pour nous à agir. J'espère que c'est ce que vous ferez.

Je vous remercie beaucoup.

Le président: Merci beaucoup.

Premier maître de première classe Ron Wastrodowski.

Premier maître de première classe Ron Wastrodowski (témoignage à titre personnel): Bonsoir, mesdames et messieurs.

Si je suis ici c'est parce que la Défense nationale a de sérieux problèmes de déménagement et à cause de la différence de taux d'intérêt.

Récemment, j'ai été muté de Victoria à Halifax. J'ai passé huit mois à Halifax et ensuite, j'ai été muté à Ottawa en tant que méchant gestionnaire de carrière. Dix mois après mon arrivée ici, j'ai reçu un coup de téléphone des Services de relocalisation de la Prudentielle. On me disait que je devais plus de 6 000 $, soit la différence de taux d'intérêt.

La Défense nationale a fait une vérification de la Prudentielle. On a constaté qu'on avait payé environ 175 000 $ par erreur à des gens qui n'avaient sans doute pas le droit de se faire rembourser ces coûts par l'entremise des services de réinstallation. Nous avons maintenant retenu les services d'un avocat car la compagnie exigeait un paiement immédiat. Nous avons allégué que la compagnie devait prouver qu'elle avait raison et on nous a rétorqué qu'elle n'avait pas à le faire et que nous devions payer. Nous avons maintenant un avocat et nous allons nous présenter devant le tribunal pour contester.

Rien que l'année dernière, ce genre d'incident est arrivé à une centaine de personnes. Certains ont tout simplement contracté des prêts et payé, ce qui est une mauvaise chose.

Les services de déménageurs de la Défense nationale sont de piètre qualité. Les deux fois que j'ai eu à déménager depuis 18 mois, mon mobilier a été détruit. Nous avons dû lutter pied à pied avec la société d'assurance qui, en fait, est en partie propriété de la firme de déménagement. Il a fallu attendre huit mois le règlement de notre dernière réclamation. C'est atroce. Personne ne se soucie des gens qui sont obligés de déménager en raison des exigences du service.

En outre, plusieurs personnes se sont plaintes ce soir au sujet de l'emploi des conjoints. Lorsque j'ai été muté, ma femme a dû abandonner son poste et déménager à Halifax. Il n'y a pas d'emplois à Halifax. C'est extrêmement difficile de trouver du travail. Nous avons été là-bas très peu de temps et personne ne voulait l'embaucher car on savait qu'elle ne serait sur place que pendant une courte période.

Heureusement, la situation de l'emploi est bien meilleure ici à Ottawa, et nous pouvons maintenant compter sur deux revenus. Il est possible que nous devions retourner à Victoria sous peu, et cela ne nous enchante guère. Le coût de la vie y est beaucoup plus élevé, notamment le coût du logement. Comme vous êtes allés à Victoria, vous connaissez certains des problèmes qui règnent là- bas. Nous pouvons nous permettre d'acheter une maison ici à Ottawa, mais si nous retournons à Victoria, cela sera extrêmement difficile.

Je vous remercie.

Le président: Quel service de la Défense nationale exige les 6 000 $?

Le premier maître de première classe Ron Wastrodowski: Il ne s'agit pas d'un service de la Défense nationale. La Défense nationale a un contrat de sous-traitance avec les services de réinstallation de la Prudentielle. C'est cette société qui s'occupe de déménager les gens. C'est elle qui paie pour leurs maisons et qui absorbe les coûts immobiliers connexes. Le contrat est signé entre le militaire et la Prudentielle et, une fois que c'est fait, la Défense nationale n'a plus rien à y voir.

• 2050

La Prudentielle a soumissionné pour le contrat et l'a obtenu. Ils n'ont pas lu les petits caractères et en fait, ils n'ont même pas lu les règlements ni les ordonnances administratives des Forces canadiennes au sujet des réinstallations. Ils ont simplement accepté le contrat. C'est lorsqu'on a procédé à une vérification qu'on a trouvé le problème.

Ce n'est pas la Défense nationale qui réclame l'argent, c'est la société Prudentielle étant donné que mon contrat me lie à la Prudentielle. C'est le Conseil du Trésor qui établit les règles en ce qui concerne la différence entre les taux d'intérêt et le paiement de l'intérêt pour le remboursement d'un prêt ou d'une hypothèque.

Le président: Et lorsque vous avez lu ce qui était écrit en petits caractères, vous avez constaté que dans votre cas, vous deviez rembourser 6 000 $.

PM1 Ron Wastrodowski: C'est exact. Il s'agit d'une OAFC, et la Défense nationale ne rembourse pas la différence de taux d'intérêt. Elle rembourse une pénalité pouvant aller jusqu'à six mois d'intérêt, ce qui, dans la plupart des cas, reviendrait à coûter plus cher. C'est toute la politique qui est faussée.

Le président: Puis-je voir un exemplaire du contrat que vous avez signé?

PM1 Ron Wastrodowski: Je ne l'ai pas avec moi. C'est mon avocat qui l'a.

Le président: Pourriez-vous m'en faire parvenir une copie?

PM1 Ron Wastrodowski: Oui. Je crois savoir que le comité entendra sous peu les gestionnaires de carrière et je l'ai dans mon bureau.

Le président: Mercredi prochain.

PM1 Ron Wastrodowski: D'accord.

Le président: Vous pouvez donc l'avoir?

PM1 Ron Wastrodowski: Je l'aurai à ce moment-là. Je réunirai toute la documentation.

Le président: Merci beaucoup.

PM1 Ron Wastrodowski: De rien.

Le président: Chers collègues, c'était notre dernier témoin.

Nous sommes très heureux que vous soyez tous venus nous aider en prévision de notre rapport. J'avoue que nous terminons un peu plus tôt que d'habitude, mais la journée a été longue, et il sera agréable de rentrer chez soi plus tôt.

Encore une fois, je vous remercie tous de vos exposés. Cela nous aidera énormément au moment de la rédaction de notre rapport. Merci encore.

Madame Longfield.

Mme Judi Longfield: M. Pratt et moi-même nous demandions comment faire pour obtenir d'autres exemplaires?

Mme Sheila Johnston: C'est une longue histoire. On m'a demandé de rédiger ce livre il y a environ six mois. La Défense nationale a publié une première édition d'environ 20 000 exemplaires en anglais et 7 000 en français. Mais les autorités civiles ont décidé que ce n'était pas un projet valable et que, par conséquent, nous ne pouvions plus en imprimer d'exemplaires aux frais du gouvernement du Canada.

Ce qui se passe à l'heure actuelle, c'est que le directeur du système de soutien aux familles des militaires est en train d'en publier une deuxième édition qui se vendra 1,10 $ l'exemplaire. Il suffit donc de communiquer avec le DMSS ou encore avec Linda ou moi-même au CRFM et nous pouvons prendre les commandes.

J'ajouterai qu'en ce qui a trait aux enfants, je suis tout à fait d'accord avec ce que M. Clouthier a dit. Je ne comprends pas pourquoi il faut attendre la troisième année d'université avant de pouvoir prendre un cours d'histoire militaire canadienne. Je trouve cela absolument aberrant.

Depuis quelques mois, je déploie des efforts considérables pour introduire un volet d'histoire militaire dans le système scolaire. Comme je l'ai dit tout à l'heure, les conseils scolaires et les enseignants sont ravis, mais il n'y a aucun financement pour mettre en oeuvre ce genre de projet.

Mme Judi Longfield: Sheila, il s'agit là d'une brochure que j'aimerais remettre à toutes les écoles de ma circonscription. J'aimerais aussi en garder des exemplaires dans mon bureau de circonscription.

Je vais vous dire une chose. Lorsque j'étais en Bosnie—je ne me souviens pas sur quelle base nous étions—nous sommes arrivés et nous avons pris connaissance d'une merveilleuse lettre envoyée aux militaires des Forces canadiennes par des écoliers. Elle était accompagnée d'un certain nombre de photos. Je sais que vous avez pris part à ce projet.

Le président: C'était dans votre circonscription.

Mme Judi Longfield: Oui, c'était dans ma circonscription. J'ai l'intention de communiquer avec le professeur, de rendre visite à cette classe et de rapporter des photos.

C'est quelque chose qui doit être dans toutes les écoles, et je pense que tous les députés ici accepteraient de le livrer aux écoles de nos comtés. Donc nous allons certainement faire des commandes.

Mme Sheila Johnston: Merci

M. David Pratt: J'aimerais en avoir quelques centaines.

Mme Judi Longfield: Moi aussi.

• 2055

Le président: Je demanderais au major Nicole Vallée de bien vouloir venir au microphone.

M. John Richardson: J'aimerais vous poser une ou deux questions, Nicole.

Nous en avons beaucoup entendu, surtout de la part des forces régulières. Mais il semble que dans les réserves, à partir des recrues jusqu'aux commandants, le système de paie est catastrophique. Le programme existe depuis environ 10 ans. Quel est le problème fondamental du programme? Était-il pourri dès le départ, ou est-ce que les modifications qu'on y a apportées ne peuvent pas être appliquées?

Les gens qui font une journée honnête de travail doivent être payés à temps.

Le Maj Nicole Vallée: En effet.

M. John Richardson: C'est ce qu'on nous dit partout, sauf dans les bases des forces régulières.

Je sais que vous avez vécu ces problèmes. D'après vous, quel est le défaut principal du système?

Le Maj Nicole Vallée: Je pense que le défaut principal du système c'est que les gens qui l'appliquent ne connaissent pas ce que c'est qu'un réserviste. À toutes les étapes—l'inscription, le premier cours suivi, la décision de rester dans les réserves et le cycle d'un an dans une unité de la réserve—les réservistes se demandent s'ils sont traités équitablement. Il y a des officiers et des agents d'état-major qui font de leur mieux. Leurs connaissances de la force régulière sont bonnes.

Mais il y a des problèmes quand on leur demande de gérer les réservistes. Lorsque les réservistes demandent quelque chose, on leur répond que c'est impossible, qu'ils ne connaissent pas la réalité, car ils ne sont que des réservistes qui ne comprennent pas comment fonctionne la force régulière, la vraie.

Je suis réserviste à plein temps depuis 24 ans, et je me suis fait en fait dire ce genre de choses. J'ai également vu des gens très compétents qui essayaient de transmettre leur connaissance des réserves, mais si elles ne concernaient qu'une petite équipe. La réaction en est une de prudence, on ne donne pas suite aux suggestions.

Souvent ce n'est pas la bonne volonté qui manque, il s'agit plutôt d'un manque de compréhension de part et d'autre. Il s'agit d'une attitude de «nous contre eux» qui s'aggrave à mesure qu'on monte dans les rangs et dans les postes.

Le général moyen des forces armées canadiennes n'a jamais été dans les réserves, ou s'il l'a été, il a eu un tour de service d'un ou deux ans comme officier de la réserve. Il n'a jamais eu de problèmes, il n'a jamais perdu de paie, on ne lui a jamais causé d'ennuis. Il n'a jamais eu le défi de deux emplois, en plus de sa famille et de ses autres responsabilités. Donc il y a certaines choses qu'il ne comprend tout simplement pas.

Comment améliorer la situation? Je pense que si les réservistes étaient... Je ne dis pas qu'il serait facile de trouver des réservistes. Comme vous le savez, monsieur, j'ai embauché des centaines de réservistes pendant ma carrière, et ils se font de plus en plus rare, parce qu'on n'est pas payé, on n'est pas traité convenablement.

Je dirais même que la situation empire. J'ai vu des changements majeurs à Saint-Hubert, où je travaille, et on avait commencé à faire des progrès. Quand je suis arrivée, à Ottawa, je ne pouvais pas croire le traitement administratif accordé aux réservistes. Dans mon unité, si nous sommes major, nous sommes acceptés et nous faisons notre travail. On nous dit merci, on nous donne notre RAP et notre paie, la plupart du temps.

Mon patron ne comprend pas le régime de paie des réservistes. Il n'y comprend rien. Il ne pense même pas pouvoir me défendre, car il doit tout savoir pour comprendre le problème. Si lui ou quelqu'un de son unité a un problème d'indemnité d'aide au logement, il n'a qu'à appeler l'officier payeur. Je n'ai pas d'officier payeur et personne n'essaie de m'en donner un.

• 2100

En tant que major, ça va. Mais si je suis caporal au manège, personne ne va m'aider. Il n'y a personne pour défendre les intérêts des grades inférieurs. Cela n'existe pas.

J'ai déjà mentionné le problème des pensions. Cela fait 10 ans, et il n'y a toujours pas de progrès. Beaucoup des supérieurs pensent que la somme forfaitaire payée aux réservistes est l'équivalent d'une pension. Ils auraient dû la qualifier d'indemnité de départ. Comme ça, on aurait compris de quoi il s'agissait. Mais non. La somme forfaitaire payée aux réservistes est une indemnité de départ, et les supérieurs pensent que c'est une sorte de pension.

Il faut trouver une équipe qui veut obtenir des résultats. Comme M. Bertrand l'a dit, embauchez des réservistes pour s'occuper de cela.

M. John Richardson: Les gens qui ne sont pas payés doivent en parler dans la collectivité. Cela doit décourager beaucoup de candidats possibles dans tout le pays. C'est comme si on travaillait pour la General Motors et que nous n'étions pas payés. Je me demande si on retournerait travailler la troisième semaine si nous n'avions pas encore été payés.

Le Maj Nicole Vallée: Tout à fait.

M. John Richardson: Nous avons entendu la même chose à Halifax et à Vancouver—dans l'Ouest comme dans l'Est.

Le Maj Nicole Vallée: Le système de paie actuel est désastreux. La situation était épouvantable dans les Maritimes. J'ai parlé aux commandants qui m'ont dit que cela avait causé beaucoup de problèmes dans leurs unités. Ils se sentaient impuissants.

Le MDN a mis en oeuvre ce système de façon systématique dans tout le pays. À quelle fin, je ne le sais pas. Je ne sais pas pourquoi cela a été fait. Il y avait un système de données sur le personnel de la réserve qui était exact à 98 p. 100 pour ce qui est des chèques de paie. Plutôt que d'utiliser ce système on a mis en place un système inefficace.

De plus, il y avait l'indemnité au logement à 85 p. 100, et on a modifié le programme de rémunération au rendement et le RARM, mais je ne sais pas exactement comment. Je ne sais pas qui aurait pu faire face à ce nouveau système. Quel que soit le grade ou le lieu de travail, je pense qu'il faut créer un groupe d'intervention, et je ne suis pas sûre que cela va coûter de l'argent. Il faut consacrer beaucoup d'argent à ce problème, mais cela ne donne rien.

M. John Richardson: Merci de ces précisions. Il va certainement falloir résoudre ce problème ou il n'y aura plus de réservistes—ni dans la marine, l'armée ou l'armée de l'air.

Le Maj Nicole Vallée: Ou bien des réservistes très mécontents.

M. John Richardson: Merci.

Le président: Merci beaucoup.

Je tiens également à remercier le capitaine Harper de son hospitalité et du bon repas qu'il nous a servi ce soir.

Je vous remercie tous et je vous dis bonne nuit.