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HEAL Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON HEALTH

COMITÉ PERMANENT DE LA SANTÉ

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 19 mars 1998

• 0915

[Traduction]

La présidente (Mme Beth Phinney (Hamilton Mountain, Lib.)): Mesdames et messieurs, je déclare la séance ouverte.

Il s'agit de la 29e réunion du Comité permanent de la santé et nous nous penchons sur les produits de santé naturels.

Aujourd'hui, deux groupes sont représentés. De l'Association nationale des organismes de réglementation de la pharmacie, la directrice générale, Barbara Wells; Jim Dunsdon, président du Comité de réglementation interprovincial et directeur général de l'Ordre des pharmaciens de l'Ontario ainsi que la Dre Linda Suveges, qui est présidente du Comité national consultatif de classification des produits pharmaceutiques. Et de USANA Canada—peut-être que vous pourrez nous expliquer par la suite en quoi consiste votre organisme—nous avons Warren Te Brugge, qui est le directeur général.

Nous allons suivre cet ordre, et j'espère que chaque groupe s'en tiendra à des commentaires d'environ cinq minutes. Je ne sais pas si vous aviez prévu cette durée d'intervention, si c'est le cas tant mieux. Plus vous prendrez de temps à vous exprimer, et moins nous aurons de temps pour la période des questions. Les membres sont très désireux de vous poser des questions, mais ils ne disposent que de cinq minutes aussi, et cela inclut vos réponses. Aussi, essayez de répondre brièvement. Encore une fois, si vous dépassez un peu, nous serons indulgents, à moins qu'un membre du Comité se plaigne qu'une intervention est trop longue. Je laisse cette décision à leur discrétion.

Barbara, voulez-vous commencer?

Mme Barbara Wells (directrice générale, Association nationale des organismes de réglementation de la pharmacie): Avec plaisir.

Madame la présidente, membres du Comité, je voudrais vous remercier de me donner l'occasion de prendre la parole devant votre comité ce matin. Je m'appelle Barbara Wells et je suis directrice générale de l'Association nationale des organismes de réglementation de la pharmacie, l'ANORP.

Je suis accompagnée de Jim Dunsdon, directeur général de l'Ordre des pharmaciens de l'Ontario et de Linda Suveges, présidente de notre comité national consultatif de classification des produits pharmaceutiques, le CNCCPP.

L'ANORP est une association qui regroupe les organismes provinciaux de réglementation de la pharmacie. Elle a été fondée pour soutenir les activités de ces organismes et servir ainsi l'intérêt public. Vous devriez avoir reçu ce matin une brochure vous donnant des informations sur l'ANORP.

Le CNCCPP, notre comité de classification des produits pharmaceutiques, a été créé par l'ANORP pour conseiller les organismes provinciaux de réglementation de la pharmacie sur les conditions de vente des médicaments, c'est-à-dire leur indiquer quelles restrictions imposer sur certains produits et ce que les médecins et les pharmaciens devraient faire pour assurer une utilisation appropriée et sans danger de ces produits.

Nous voulons vous présenter aujourd'hui un plan pour la réglementation des produits de santé naturels. Ce plan s'appuie sur un système crédible et éprouvé qui s'applique déjà à la réglementation des médicaments. Il met l'accent sur la sécurité des consommateurs. Nous sommes convaincus qu'il sera jugé acceptable par les groupes clés que vous avez déjà entendus: les consommateurs, les fabricants, les détaillants, les professionnels de la santé et les organismes de réglementation. Nous avons cette conviction parce que le CNCCPP a déjà fait ses preuves en permettant au Canada de remplacer les dispositions hétéroclites antérieures par un système de classification des produits pharmaceutiques qui fonctionne sans anicroche, à un coût raisonnable, et qui jouit par ailleurs de l'appui des intervenants.

Madame la présidente, nous savons que vous avez entendu de nombreux mémoires qui vous ont présenté toute une gamme de points de vue et donné de nombreux renseignements au sujet des produits de santé naturels. Nous aimerions consacrer le temps que nous allons passer ici avec vous à la discussion de notre plan.

Premièrement, j'aimerais résumer notre position en ce qui concerne les produits de santé naturels. La sécurité du consommateur doit être le principal principe présidant à la décision de mettre un produit de santé à la disposition du public.

Deuxièmement, le public doit avoir un accès optimal aux produits de santé naturels de son choix tout en étant protégé contre tout risque inutile et en ayant accès aux renseignements requis pour utiliser chaque produit sans danger.

Troisièmement, un cadre réglementaire s'appliquant aux produits de santé naturels est nécessaire.

Quatrièmement, ce cadre réglementaire ne doit pas imposer des exigences inutiles aux fabricants et aux détaillants de produits de santé naturels.

Cinquièmement, ce cadre réglementaire va compléter le système de réglementation des médicaments, des aliments et des suppléments alimentaires.

Sixièmement, la recommandation du Comité consultatif sur les produits de santé naturels relative à la création d'une troisième catégorie de produits placés entre les médicaments et les aliments nous paraît un moyen efficace d'assurer la sécurité des consommateurs.

Septièmement, il est nécessaire de créer au sein de Santé Canada une nouvelle organisation dotée d'un personnel ayant une solide connaissance théorique et pratique des produits de santé naturels.

Huitièmement, une information objective et facile à comprendre sur les différents produits doit être offerte aux consommateurs, et l'information fournie aux professionnels de la santé doit être améliorée.

• 0920

En terminant, nous sommes en faveur de l'application des lignes directrices sur les bonnes pratiques de fabrication pour assurer la qualité des produits de santé naturels.

Maintenant quelques mots au sujet du CNCCPP. Au Canada, la commercialisation de tous les produits thérapeutiques doit être autorisée par Santé Canada qui détermine si un médicament peut être offert à la vente et s'il doit être délivré seulement sur ordonnance. Les conditions applicables aux produits pouvant être vendus sans ordonnance ne relèvent toutefois pas de Santé Canada mais des provinces.

Au fil des ans, des différences sont apparues d'une province à l'autre en ce qui concerne les conditions de vente pour un même produit thérapeutique, celles-ci étant fixées individuellement par chaque province. Par conséquent, un consommateur qui se rendait d'une province à une autre constatait que les conditions de vente relatives à un même produit pouvaient varier. Ces différences étaient injustifiables, coûtaient très cher aux fabricants et paraissaient absurdes au public.

Le Canada dispose maintenant d'un modèle national harmonisé comportant quatre catégories de conditions de vente pour les médicaments. Les restrictions les plus strictes s'appliquent aux médicaments inscrits au Tableau I, qui ne peuvent être vendus que sur ordonnance; les tableaux II et III concernent les médicaments pouvant être vendus sans ordonnance avec un niveau valable d'intervention du pharmacien; les médicaments non inscrits dans un de ces tableaux peuvent être vendus par n'importe quel détaillant parce qu'ils présentent un risque très faible.

Le modèle utilisé pour les recommandations relatives à la classification des médicaments est basé sur le principe de la réglementation en cascade. Le CNCCPP commence par évaluer un médicament en fonction des critères correspondant à l'inscription au Tableau I. Vous trouverez en annexe un diagramme illustrant ce principe.

Tout médicament qui répond à un nombre suffisant de ces critères est alors placé dans cette catégorie. Dans le cas contraire, on l'évalue en fonction des critères correspondant au Tableau II et, le cas échéant, à ceux correspondant au Tableau III. Si aucun de ces critères ne s'applique, ce médicament n'est inscrit à aucun de ces tableaux et est considéré comme pouvant être vendu par n'importe quel détaillant puisqu'il ne présente aucun risque particulier.

Le CNCCPP est composé de sept experts de l'ensemble du pays choisis en fonction de leurs connaissances et de leur expérience relativement à des domaines appropriés qui intéressent directement la population canadienne et le système de soins de santé. Ils ont été nommés en consultation avec les intervenants. Dans ce cas aussi, nous avons inclus en annexe une liste des membres actuels du CNCCPP.

Les membres de ce comité doivent servir l'intérêt public et chercher à promouvoir une utilisation optimale des médicaments, tout en reconnaissant le rôle et la responsabilité des patients en matière de soins de santé.

Outre ces experts, le comité compte également un représentant de l'Association des consommateurs du Canada pour faire en sorte que la population canadienne ait directement voix au chapitre dans ses délibérations. Le comité examine la demande soumise par le fabricant, les documents présentés par Santé Canada et le fruit des recherches de ses propres membres avant d'émettre des recommandations. Une procédure est prévue pour faire appel des recommandations du comité.

Les principes suivants ont présidé à la création du CNCCPP et régissent son fonctionnement: la sécurité des consommateurs est primordiale; l'harmonisation des conditions de vente dans l'ensemble du pays est une mesure logique, réduit les coûts, profite à tous les intervenants et facilite l'harmonisation internationale; le système examine le risque relatif que pose un produit pour la santé humaine; les recommandations sont fondées sur des facteurs objectifs.

Il est important de signaler que, bien que le CNCCPP ne représente pas directement les intervenants, il a su gagner leur confiance grâce à la qualité de son travail. Nous avons inclus une lettre de l'un de nos principaux intervenants qui exprime son appui à l'égard de notre structure de classification.

Jusqu'à présent, le CNCCPP a émis des recommandations concernant la classification de 67 médicaments—et j'aimerais signaler que ces recommandations ont été faites depuis 1995—dans huit cas, il a recommandé qu'un produit puisse désormais être vendu sans ordonnance et, dans 35 autres cas, qu'aucune restriction ne soit imposée à la vente du produit concerné, celui-ci ne présentant pas un risque suffisant pour justifier son inscription à un des tableaux.

Madame la présidente, il existe donc déjà un système crédible et objectif de classification des médicaments. Nous proposons qu'on adopte pour les produits de santé naturels un plan inspiré de ce système qui a fait ses preuves et dont il reprendrait certains des éléments.

Nous proposons un système dans le cadre duquel tous les produits de santé naturels seront réglementés en fonction du risque qu'ils posent pour la santé humaine. Nous approuvons les principes directeurs énoncés par le comité consultatif et nous remarquons que le cadre réglementaire qu'il propose s'appuie, comme celui du CNCCPP, sur le principe de la sécurité des consommateurs. Les facteurs de risque présentés dans ce rapport sont également évalués en fonction du principe de la réglementation en cascade, c'est-à-dire qu'on détermine d'abord si un produit présente un risque élevé, avant de décider si le niveau de risque est seulement moyen ou faible, ce qui correspondrait probablement aux critères correspondant au Tableau II et, le cas échéant, à ceux correspondant au Tableau III, et si aucun de ces critères ne s'applique le médicament n'est inscrit à aucun de ces tableaux.

Notre plan complète le système actuel de réglementation des médicaments. Pour qu'il puisse être efficace, nous recommandons qu'il soit considéré comme un tout, parce que tous ces éléments sont reliés et interdépendants.

Madame la présidente, je ne passerai pas en revue toutes les étapes d'examen en vue de la demande de licence pour la commercialisation d'un produit, parce que je sais que ce comité a reçu des renseignements à ce sujet de Santé Canada. Je m'attacherai plutôt aux conditions de vente.

• 0925

Nous recommandons que les mêmes conditions s'appliquent dans tout le pays et que le modèle de classification des médicaments du CNCCPP soit utilisé étant donné qu'il a déjà fait ses preuves et que ce système est d'un coût raisonnable que les intervenants jugent acceptable. S'il s'adjoint des experts en matière de produits de santé naturels, le CNCCPP pourrait présenter des recommandations sur les conditions de vente et sur l'étiquetage de ces produits. Ainsi, avec la création d'une nouvelle unité au sein de Santé Canada et le recours du CNCCPP à des experts de ce domaine, le Canada se doterait d'un moyen efficace d'assurer dans de bonnes conditions la commercialisation des produits de santé naturels.

Il faut également signaler que l'ANORP et le CNCCPP ont contribué de façon déterminante à améliorer la pratique pharmaceutique en établissant des normes et en présentant des recommandations au sujet de l'étiquetage. Il faut en particulier que les pharmaciens reçoivent une information objective parce que 56,9 p. 100 des consommateurs de produits de santé naturels effectuent leurs achats dans les pharmacies. Les pharmaciens doivent pouvoir parler de la sécurité et des avantages des produits de santé naturels avec leurs clients en connaissance de cause.

Je n'ai pas l'intention d'aborder non plus la question de la collecte des renseignements obtenus après la commercialisation parce que je sais que vous êtes au courant de cette question.

Nous savons que le Canada doit régler la question de la gestion des produits de santé naturels de façon rapide et efficace. Notre plan donne la possibilité de le faire. De nombreux professionnels de la santé et le grand public connaissent mal la valeur des produits de santé naturels. Les consommateurs, qui en sont conscients, ne sont pas toujours prêts à dire qu'ils en utilisent, alors que de tels renseignements sont importants pour les professionnels de la santé quand ils traitent leurs patients. Notre plan remédierait à cette importante lacune en accordant un statut particulier aux produits de santé naturels et en offrant un système logique et objectif pour les classifier.

Madame la présidente, je voudrais remercier les membres de votre comité et vous-même d'avoir écouté notre exposé ce matin. C'est avec plaisir que nous répondrons à vos questions.

La présidente: Je vous remercie.

Monsieur Te Brugge.

M. Warren T. Te Brugge (directeur général, USANA Canada Inc.): Madame la présidente et membres du comité, je vous remercie de me donner la possibilité de m'adresser à vous aujourd'hui.

Je représente une compagnie appelée USANA. Nous sommes une société ouverte qui a ses bureaux à Salt Lake City, en Utah. Notre fondateur est le Dr Myron Wense. Sa vision était de créer ce qu'il appelle la «famille la plus saine possible sur terre», cette famille étant formée de tous les individus de la planète. Notre approche consiste à établir des normes extrêmement élevées pour ce qui est des produits que nous fabriquons, et parce que nous sommes convaincus que le public est en droit de recevoir les meilleurs produits et les produits fabriqués selon les normes les plus rigoureuses.

USANA vient d'une société appelée Gull Laboratories que le Dr Myron Wense a aussi créée. À un moment donné, il a réalisé qu'il était en mesure de nourrir les cellules au niveau individuel. Mais il était en train d'oublier de nourrir son propre organisme et celui des membres de sa famille dans son ensemble, aussi il a mis au point le concept de USANA. C'était il y a cinq ans.

Je suis convaincu que toutes les parties en cause conviennent que la réglementation actuelle doit être modifiée. Toutefois, la nature d'une telle réforme est difficile à déterminer. Vous avez entendu un grand nombre d'intervenants et chacun avait divers points de vue à exprimer. Nous croyons que nous avons besoin d'un système souple et fluide et qui veille à la protection et à la promotion du bien-être général de tous les Canadiens et de toutes les Canadiennes.

Notre système actuel classe les produits en deux catégories principales, soit les aliments et les médicaments, avec quelques exceptions mineures telles que les produits de beauté et les écrans solaires. Les produits de santé naturels entrent dans une zone grise, entre les agents thérapeutiques et les suppléments alimentaires. Par conséquent, il nous faut songer à les catégoriser de façon à ne pas dérouter et à ne pas tromper le public.

Les niveaux d'éléments nutritifs inclus dans les produits de santé naturels doivent être réexaminés de manière à refléter les taux d'éléments nutritifs dont l'organisme a besoin pour demeurer en bonne santé. Pour cela, nous devons nous reporter aux travaux de plusieurs organismes, tels que le Council for Responsible Nutrition, aux États-Unis, qui ont investi d'importantes ressources pour établir l'apport suffisant de chaque élément. On parle habituellement de niveaux sans effets nocifs observés ou NOAEL.

• 0930

Il est impératif que nous n'apportions aucun changement important aux bonnes pratiques de fabrication des produits de santé naturels, mais plutôt que nous apportions des modifications qui permettront à l'industrie de participer à un niveau plus global, afin d'aligner nos règlements sur ceux de nos partenaires commerciaux à l'échelle internationale.

Néanmoins, alors que nous nous proposons d'offrir aux Canadiens et aux Canadiennes un choix plus vaste de produits à utiliser, pour assurer la sécurité du public, nous devons veiller à ce que ces produits soient fabriqués conformément à des normes élevées. Toutefois, en abordant cette question de la réglementation, nous devons aussi veiller à ne pas négliger le petit fabricant en imposant des exigences qui limitent la concurrence.

Actuellement, les activités de vérification de la conformité, d'application des règlements et de contrôle sont laissées aux soins de Santé Canada, dont les ressources sont limitées. Bien que le gouvernement veille certainement à la conformité des produits, j'estime qu'un système qui ferait appel au gouvernement et au secteur privé pourrait être plus efficace. Le gouvernement devrait établir avec précision quels sont les règlements et, de concert avec l'industrie, comment les appliquer, afin d'assurer la sécurité des produits et un étiquetage honnête. L'industrie peut, au niveau de l'association, contrôler et veiller à la conformité aux règlements en ayant recours à un processus de déclaration par les membres. L'association peut ensuite prendre des mesures contre les contrevenants, soit directement, soit en collaboration avec d'autres associations, le cas échéant.

Confier le procédé de vérification de la conformité à l'industrie contribuerait à créer un environnement et une participation plus équitable entre les secteurs de l'industrie. Si une infraction ne peut être résolue au niveau de l'industrie, la division de la vérification de la conformité du gouvernement peut alors s'en charger. La plus grande partie du travail préliminaire aurait été effectuée et les faits auraient déjà été documentés, permettant ainsi au gouvernement d'agir promptement et de façon décisive après avoir examiné les faits et preuves présentés. Cette collaboration contribuerait à améliorer les relations entre le secteur privé et le secteur public et à créer un environnement dans lequel tous les participants coexistent en vertu du même ensemble de règlements.

Bien que de nombreuses discussions aient été conduites à propos de l'enregistrement des établissements et de l'autorisation de mise en marché des produits, une meilleure coordination des activités est nécessaire dans ce domaine. L'enregistrement des établissements et l'autorisation de mise en marché des produits font partie intégrante du procédé soutenu de la vérification de la conformité et du contrôle. Toutefois, l'incidence globale des droits perçus par le gouvernement et des programmes de recouvrement des coûts doit être prise en compte. Ceci est particulièrement important lorsque nous travaillons dans un environnement qui encourage la création des petites et moyennes entreprises.

Des droits sont perçus aux niveaux fédéral, provincial et municipal. L'incidence et l'importance de ces droits ne devraient pas créer d'obstacle à la concurrence. Ils devraient être gérés et coordonnés de façon à promouvoir un environnement dans lequel le public a plus de choix, et qui donne la primauté à la sécurité et à la qualité élevée des produits.

L'éducation est un domaine du ressort commun du gouvernement et du secteur privé. Si le public avait accès à du matériel éducatif sur les produits de santé naturels, les renseignant sur les composants de ces produits plutôt que sur le marketing ou la marque, ils seraient mieux informés et mieux équipés pour faire des choix intelligents sur les éléments à utiliser. La «marque» serait alors une considération secondaire, ce qui contribuerait à diminuer la confusion sur le marché.

Il est essentiel de réformer la méthodologie et l'idéologie courante relativement à ce qui constitue un régime alimentaire bien équilibré et un système de santé efficace. Il est généralement reconnu qu'une personne peut obtenir tous les éléments nutritifs dont elle a besoin pour demeurer en bonne santé dans un bon régime alimentaire. Avec la prolifération d'aliments transformés et de plats cuisinés, de moins en moins de Nord-Américains parviennent aux taux quotidiens/apport nutritionnel recommandés avec le régime alimentaire normal. Il est de plus en plus évident que nous devons compléter nos régimes alimentaires avec d'autres sources d'éléments nutritifs vitaux pour vivre en meilleure santé plus longtemps, plutôt que de vivre malades plus longtemps.

Nous nous fions presque exclusivement aux produits chimiques et aux autres formes invasives de traitement et cures, consacrant plus de 95 p. 100 de notre budget national des soins de la santé à des programmes visant à traiter la maladie et à prolonger la vie, plutôt que d'utiliser davantage de ces ressources pour prévenir ou réduire l'occurrence des maladies dégénératives. En consacrant davantage des ressources à disposition à la prévention de la maladie et à l'éducation du public, nous parviendrions à réduire le fardeau fiscal global du public à moyen et à long terme.

Nous devons investir davantage dans le domaine des essais cliniques. Malgré le nombre assez important d'études effectuées dans le monde, les domaines de la nutrition et de la prévention de la maladie semblent avoir été négligés. Le problème est relativement complexe, impliquant droits d'auteurs, facteurs économiques et profit. Après tout, comment peut-on breveter ou protéger par le droit d'auteur une vitamine ou une substance minérale naturelle? Toutefois, j'estime qu'avec l'encouragement et la participation du gouvernement, des études conjointes peuvent être entreprises dès maintenant. Et l'accent devrait être mis sur les éléments plutôt que sur la marque, afin d'assurer que ces études sont conduites dans le meilleur intérêt de l'ensemble du public.

Merci, madame la présidente.

• 0935

La présidente: Merci beaucoup.

Nous allons procéder aux questions. Monsieur Elley.

M. Reed Elley (Nanaimo—Cowichan, Réf.): Merci, madame la présidente.

J'aimerais remercier chacun d'entre vous d'être venus participer à cette étude que nous avons entreprise sur les produits de santé naturels.

Si j'ai bien compris, les représentants de l'Association nationale des organismes de réglementation de la pharmacie—et corrigez-moi si je me trompe—sont en train de suggérer que nous utilisions leurs bureaux et leurs installations, de même que celles de Santé Canada, pour faire l'élaboration du plan que vous venez de nous proposer.

D'un côté, je dois dire que je trouve assez rafraîchissant qu'un groupe vienne nous présenter un plan. C'est à mon avis une action digne de mention, et très certainement le genre d'initiative que ce comité recherche, pour trouver des solutions à ce problème. Dans les grandes lignes, je pense que nous avons bien cerné le problème au cours du dernier mois écoulé. Nous savons en quoi il consiste, mais nous sommes à la recherche de solutions.

Toutefois, ayant entendu les commentaires de nombreuses personnes, j'ai une préoccupation au sujet de la perception du public—et je ne dis pas que cela est vrai ou non; je ne fais aucun commentaire sur la véracité, seulement sur la perception—selon laquelle les grandes sociétés pharmaceutiques occupent déjà une trop large place dans ce domaine. Le public semble aussi penser que les pharmaciens, à cause de leur nom peut-être, sont en quelque sorte liés au sort des grandes sociétés pharmaceutiques. Si nous acceptions votre plan, cela amènerait de l'eau au moulin de ceux qui pensent ainsi. J'aimerais vous entendre sur ce point. S'agit-il d'une préoccupation légitime du public? Peut-être pourriez-vous commencer avec ce sujet.

La présidente: Monsieur Dunsdon.

M. Jim Dunsdon (président, Comité de réglementation interprovincial, ANORP; et directeur général, Ordre des pharmaciens de l'Ontario): Merci. Je ferai les commentaires qui suivent à titre de représentant d'un organisme de réglementation.

Je prends bonne note de votre remarque. Il s'agit sans doute d'un problème de perception. Toutefois je tiens à souligner que le modèle du CNCCPP est, avant toute chose, un modèle objectif qui n'est en rien lié aux sociétés pharmaceutiques comme telles, comme vous semblez le suggérer. Même si le comité a l'appui des intervenants, dont le secteur pharmaceutique et d'autres groupes, comme les organismes de réglementation eux-mêmes, le secteur de l'alimentation, le secteur des médicaments en vente libre, il ne s'agit pas pour autant d'un processus animé par les intervenants. C'est plutôt un processus objectif motivé par des facteurs qui ont été élaborés de la manière la plus objective possible.

Je suis sûr que la Dre Suveges, qui est avec nous depuis les tout débuts du processus, voudra faire des commentaires à ce sujet.

Je pense pouvoir dire que ce processus a bien fonctionné pour les médicaments. De toute évidence, il faudrait apporter certaines modifications afin d'élargir l'expertise, si vous voulez, du processus, afin de pouvoir traiter cette troisième catégorie de produits qui ne sont ni tout à fait des médicaments ni tout à fait des aliments. Cependant, nous sommes convaincus qu'il s'agit d'un bon modèle au départ qui pourrait être amélioré. Linda, je ne sais pas si vous voulez faire quelques commentaires concernant la crédibilité du processus.

Dre Linda Suveges (présidente, Comité national consultatif de classification des produits pharmaceutiques, Association nationale des organismes de réglementation de la pharmacie): Merci de me le demander. Notre organisme n'existe que depuis deux ans et demi, mais je suis convaincue que nous avons réalisé un travail très crédible en faisant des recommandations qui ont été à la fois utiles pour les intervenants et pour le public canadien.

L'un des membres les plus importants de notre comité est aussi membre de l'Association des consommateurs du Canada, et nous accordons beaucoup d'importance à ses commentaires.

Les membres du comité sont principalement des chercheurs ou des médecins praticiens. Donc il y a plusieurs médecins, plusieurs pharmaciens, des personnes ayant une expertise dans le domaine des renseignements sur les médicaments, bien entendu, et nous ne représentons pas un groupe d'intervenants en particulier.

• 0940

Cependant, je prends bonne note de votre remarque en ce qui concerne les apparences. Peu importe ce que nous disons, c'est la perception que les gens en ont.

M. Reed Elley: Je vais vous poser une question qui pourrait nous permettre d'avancer sur ce point. Dans le cadre de vos discussions au sujet de cette préoccupation, avez-vous tenté de discuter avec des gens dans le secteur des aliments de santé naturels afin d'obtenir leur réaction à cette suggestion? Autrement dit, avez-vous fait une certaine étude de marché? Ce sont les principaux intervenants à cet égard, en ce qui concerne l'autre côté de la médaille.

Dre Linda Suveges: Personnellement je ne l'ai pas fait. À titre de présidente du comité, ma fonction consiste à trier l'information, mais peut-être que Barbara a eu l'occasion de le faire.

Mme Barbara Wells: Je l'ai fait—pas sur cette question précise dont nous débattons ce matin, mais nous avons établi une très bonne relation avec l'Association canadienne des aliments de santé. Au tout début du comité sur la classification des médicaments, ils ont participé à l'un des groupes d'intervenants. Je ne veux pas parler en leur nom, mais ils ont donné un appui très encourageant à un modèle national en quatre catégories parce qu'ils avaient l'impression que cela contribuerait à mettre un peu d'ordre dans leur domaine. C'était bien avant que les audiences commencent. En fait c'était au tout début du CNCCPP. Aussi, je dirais que nous sommes arrivés à établir une bonne liaison avec ce groupe de toutes façons.

M. Reed Elley: Il me semble que cela aurait été une bonne idée de mettre ce modèle à l'essai auprès d'un groupe quelconque.

La présidente: Merci beaucoup.

Avant que je passe à Mme Picard, j'aimerais poser une question qui m'a été suggérée par nos recherchistes. Pouvez-vous me dire si les experts du CNCCPP ont de l'expérience en ce qui concerne les produits de santé naturels? Sur les 67 produits qui ont été examinés par le CNCCPP, y avait-il des produits de santé naturels? Et dans l'affirmative, lesquels?

Mme Barbara Wells: Non, jusqu'à maintenant ce comité ne s'est occupé que de médicaments, et ses membres ont été choisis précisément pour cela. Toutefois, je réitère que nous faisons la promotion du modèle et du processus plutôt que des questions qui font l'objet de la discussion, et le comité possède réellement une expertise en ce qui concerne les facteurs de pondération et l'obtention de l'appui des intervenants et ainsi de suite. Il me semble que nous avons déjà reconnu que nous devrions obtenir un complément d'expertise en ce qui concerne les produits de santé naturels.

Dre Linda Suveges: Je voudrais simplement ajouter que même si plusieurs des produits que nous avons étudiés n'étaient pas étiquetés comme des produits de santé naturels... Nous avons effectivement examiné la catégorie des laxatifs avec le groupe des 37 produits à l'étude. Des produits comme le séné et l'aloïne en faisaient partie. C'est le genre de produits naturels qui ont été classés comme des médicaments pendant des années, mais je sais qu'ils existent aussi dans certains produits de santé naturels et qu'on peut se les procurer dans divers points de vente.

La présidente: Madame Picard.

[Français]

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Madame la présidente, vous avez posé une question qui faisait partie des miennes. Ce n'est pas grave, puisque, de toute façon, j'aimerais avoir plus de précisions.

Alors, je vous souhaite la bienvenue. J'imagine que si vous nous proposez des solutions, c'est parce que les membres de votre association vivent des problèmes par rapport à la vente des produits naturels. Tout comme Mme la présidente, j'aimerais savoir si vos membres possèdent une expertise pour conseiller les consommateurs. Si Santé Canada adoptait votre plan tel que vous nous le présentez, quelles seraient les actions que devraient entreprendre vos membres pour être en mesure de se conformer à ce plan? Est-ce que vos membres accepteraient de faire des études ou seraient capables de développer une expertise pour conseiller judicieusement la clientèle qui fréquente vos pharmacies?

[Traduction]

Mme Barbara Wells: Je vais laisser l'un de nos membres s'exprimer sur ce point.

M. Jim Dunsdon: Merci. Cette fois encore je m'adresserai à vous à titre de membre d'un organisme de réglementation. Comme vous le savez, comme au même titre que l'Ordre des pharmaciens du Québec, nous avons la responsabilité de la protection de l'intérêt public par l'entremise de la réglementation de nos membres. Nous avons exprimé certaines positions à nos membres en ce qui a trait à la question des connaissances et de l'expertise. Toutefois, pour des questions aussi fondamentales que celles-ci, nous avons toujours compté, et nous aimerions pouvoir continuer à le faire, sur des processus tels que celui-ci. En Ontario, nous avons mené une étude assez poussée sur la naturopathie, et nous attendons avec intérêt les résultats. Je suis convaincu que les autres provinces ont des projets similaires en cours.

• 0945

J'aimerais parler encore un peu au nom de l'Ordre des pharmaciens de l'Ontario. Nous nous attendons à ce que les pharmaciens, d'abord et avant tout, évaluent les produits de façon critique et possèdent les connaissances nécessaires en ce qui concerne les ingrédients qu'ils contiennent. Notre principal point d'intérêt est la sécurité parce que l'efficacité des produits reste à prouver. Nous tenons à nous assurer que nos membres font en sorte que le public qui les consulte s'assure de la sécurité des produits. Le pharmacien doit donner aux consommateurs la possibilité d'avoir accès à divers produits, mais le consommateur doit pouvoir le faire dans un environnement sûr.

De plus, nous nous attendons de la part des pharmaciens qu'ils reconnaissent à quel moment une intervention médicale serait appropriée. Le pharmacien est bien placé pour cela. Il dispose de dossiers concernant certains consommateurs qui pourraient vouloir demander des conseils. Il pourrait, par exemple, fournir des renseignements utiles en ce qui concerne les effets secondaires qui pourraient résulter de la prise de médicaments d'ordonnance avec des médicaments de la médecine parallèle. Notre présentation a abordé le problème de certaines personnes qui pourraient hésiter à demander conseil à ce sujet. En tant qu'ordre professionnel, nous n'avons pris aucune position en ce qui concerne le mérite thérapeutique, et une fois encore, il s'agit d'un domaine controversé, comme vous le savez.

Pour résumer, nous nous attendons à ce que les pharmaciens donnent des conseils—et d'après les normes de pratique, ils doivent être disponibles et accessibles pour le faire—qui soient vraiment axés sur la sécurité des consommateurs; ils devraient aussi être en mesure de bien évaluer à quel moment le consommateur a besoin d'une consultation médicale.

Mme Barbara Wells: J'aimerais ajouter quelque chose sur ce point. L'ANORP a établi des normes de pratique en ce qui concerne les médicaments en vente libre et vous avez une copie de ces normes devant vous. Nous sommes aussi prêts à publier des normes de pratique en ce qui concerne les médicaments prescrits et ces normes seront terminées le mois prochain. Je pense que Jim et ses collègues, les directeurs des autres ordres des pharmaciens du reste du Canada, prévoient établir des normes de pratique et inclure les produits de santé naturels aussi.

On s'attend de la part des pharmaciens qu'ils possèdent des connaissances poussées au sujet de tous les produits de santé qui sont vendus dans une pharmacie, et on leur donnera à cet effet les outils nécessaires. On travaille déjà à l'élaboration de certaines normes de pratique pour les produits de santé.

[Français]

Mme Pauline Picard: Est-ce que la formation universitaire que vous recevez pour devenir pharmaciens vous donne des connaissances de base sur les produits naturels qui existent actuellement?

[Traduction]

Dre Linda Suveges: Je peux peut-être répondre à cette question. Je suis membre du corps enseignant à l'Université de Saskatoon. Les choses sont différentes d'un programme à l'autre, mais il me semble qu'à titre d'institution d'enseignement, nous avons identifié un besoin et nous avons l'intention de faire des ajouts dans ce domaine.

Bien entendu, il y a 20 ans, les étudiants apprenaient passablement de choses au sujet des médicaments tirés des plantes. Puis, nous avons dit que nous n'avions plus besoin de cela et nous nous en sommes débarrassés, mais ces enseignements reviennent dans les programmes de cours. Dans mon programme particulier—et je peux seulement parler pour ce programme—nous offrons un cours aux étudiants. Je sais que d'autres programmes ajoutent des cours dans ce domaine, mais ce n'est pas encore uniformisé.

Mme Pauline Picard: Merci.

La présidente: Monsieur Myers.

M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): Merci, madame la présidente. Je tiens à remercier les témoins de ce matin. Leur présentation a été très utile et intéressante.

Je voulais demander tout d'abord à l'ANORP... En ce qui concerne votre résumé des points 1 à 9, je m'intéresse plus particulièrement au point 7. C'est celui qui concerne la réorganisation au sein de Santé Canada. Est-ce que cette suggestion est faite à la lumière des problèmes qui existent maintenant ou encore en fonction des problèmes perçus dans ce domaine?

Mme Barbara Wells: Non.

M. Lynn Myers: Alors, quel est votre objectif en faisant cette affirmation?

Mme Barbara Wells: Nous reconnaissons qu'il n'existe pas de centre d'expertise reconnu dans ce domaine à l'heure actuelle. Il y a les aliments, les médicaments...

M. Lynn Myers: Je comprends votre problème.

• 0950

Mme Barbara Wells: C'est une lacune que nous avons identifiée dans le cadre de ce comité, mais elle ne nous est pas apparue comme un vaste problème. Il s'agit tout simplement de cerner un besoin qui existe.

M. Lynn Myers: Merci.

J'aimerais poursuivre sur la question de l'étiquetage mentionnée dans votre point 8. Il me semble que vous avez parlé un peu plus tard des conditions de vente et ainsi de suite. M. Dunsdon a aussi mentionné le fait que les pharmaciens doivent être satisfaits et le besoin d'information médicale et ainsi de suite. Je me demande si vous pourriez élaborer sur le sujet et nous expliquer comment vous voyez la mise en place de ce modèle à la satisfaction à la fois des consommateurs et des pharmaciens.

Mme Barbara Wells: Voulez-vous dire que vous vous demandez comment le point 8 pourrait évoluer?

M. Lynn Myers: Je veux parler des conditions de vente en ce qui concerne l'étiquetage et du fait que les pharmaciens disposent de bons renseignements afin d'être en mesure de conseiller les gens.

Dre Linda Suveges: Peut-être puis-je répondre à cette question.

Le modèle de classification utilisé pour les médicaments en vente libre est fondé sur la catégorie des médicaments prescrits et sur ce qu'il faut faire avec les autres. Un médicament relevant du Tableau II est sous l'autorité du pharmacien. Un médicament relevant du Tableau III est en vente libre dans la pharmacie, mais les gens peuvent faire eux-mêmes leur choix.

L'objectif visé est de se donner la possibilité d'exercer un contrôle plus serré. En d'autres mots, le professionnel de la santé poserait certaines questions, il obtiendrait des renseignements, et il pourrait répondre à la personne qui s'informe au sujet du produit «Oui, c'est très bien. Allez-y. Vous pouvez certainement prendre ce produit pour»—ou peu importe. Si le produit fait l'objet d'un certain contrôle dans une pharmacie, mais pas dans les autres points de vente, au moins les consommateurs peuvent s'informer, parce qu'il y a un professionnel de la santé sur place.

Nous pouvons appliquer le même principe aux produits de santé naturels et nous obtiendrons, disons, trois niveaux de risque: élevé, moyen et faible. Les produits comportant de faibles risques pourraient être vendus dans n'importe quel point de vente, avec une licence particulière ou peu importe, dans la mesure où ils sont correctement étiquetés de sorte que les gens puissent comprendre à quoi ils servent, comment s'en servir et les précautions à prendre. Peut-être qu'en ce qui concerne les produits comportant des risques moyens, il faudrait établir un autre genre de cadre, peut-être une pharmacie ou quelque chose du genre. Quant aux produits à risques élevés, même si ce sont des produits très valables assortis d'une faible possibilité de toxicité par rapport aux effets thérapeutiques, ces produits devraient peut-être devenir des médicaments prescrits ou au moins se trouver sous l'autorité d'un professionnel de la santé comme le pharmacien.

C'est donc de cela qu'il est question dans les conditions de vente, c'est-à-dire de ce qu'il advient d'un produit, selon l'endroit à partir duquel il est vendu. Ce qui se trouve sur l'étiquette est intimement lié à cette question, aussi il faut déterminer comment étiqueter correctement le produit pour que les personnes puissent en prendre connaissance et se dire «Oui, cela me convient» ou «Non, j'ai le diabète et je ne devrais pas prendre ce produit».

Nous nous sommes interrogés passablement sur la quantité d'information à mettre sur les étiquettes même pour les médicaments, de sorte que les consommateurs puissent les lire et les utiliser en toute sécurité. Ce que nous essayons de dire, c'est que ce genre de questions doit être traité de la même façon en ce qui concerne les produits de santé naturels pour permettre aux gens de faire un choix éclairé.

M. Lynn Myers: Toujours sur le même point, j'aimerais demander à M. Te Brugge de répondre lui aussi. Est-ce que vous êtes en faveur de la tenue d'essais en laboratoire afin de déterminer si les produits sont sûrs, efficaces et ce genre de chose en ce qui concerne n'importe lequel de ces produits?

Deuxièmement, si vous prenez l'exemple de la médecine traditionnelle chinoise, que pouvez-vous répondre à ceux qui vous disent: «Nous utilisons ce produit depuis 5 000 ans et nous n'avons jamais eu à nous inquiéter à leur sujet ou pensé qu'ils pourraient causer du tort aux gens de quelque façon»? Comment pouvez-vous répondre à cela? Peut-être que je demanderai d'abord à l'ANORP et ensuite à M. Te Brugge.

Mme Barbara Wells: Nous n'avons pas réellement de position en ce qui concerne l'efficacité, parce que notre hypothèse est que ce point a déjà été réglé par Santé Canada. Lorsque notre comité travaille sur la classification, comme l'a fait remarquer M. Dunsdon, c'est plutôt une question de sécurité que d'efficacité.

M. Warren Te Brugge: Une objection que nous pourrions faire à ce sujet est qu'à l'heure actuelle les produits à base d'herbes médicinales en particulier sont relativement non réglementés et qu'il y a une prolifération de produits sur le marché. Lorsque les produits à base d'herbes médicinales n'ont plus été soumis à la réglementation officielle, cette décision a été interprétée quasiment comme une invitation à l'anarchie.

Notre position est la suivante: les produits devraient être mis à l'essai et ils devraient respecter certaines normes. Les exigences relatives aux bonnes pratiques de fabrication doivent être maintenues afin de garantir que les gens recevront des produits de haute qualité qui ont été fabriqués conformément aux bonnes pratiques.

• 0955

Nous ne croyons pas que cela soit onéreux au point où cela nuira à la concurrence. Nous pensons que cela devrait être une exigence et qu'elle devrait être maintenue.

De plus, l'étiquetage devrait identifier clairement le produit et les ingrédients qui le composent, mais en ce qui concerne ses utilisations réelles, cette information devrait être fournie par l'éducation, à la fois au niveau du public de même qu'au niveau du produit, la réglementation étant établie par Santé Canada.

Actuellement, c'est très difficile à réaliser, particulièrement avec un produit DIN (comportant une identification numérique de la drogue) qui ne permet pas de faire certaines affirmations, ou la plupart des affirmations quant aux vertus curatives et, par conséquent, on peut difficilement en fait donner au public l'information dont il a besoin pour prendre une décision éclairée.

La vice-présidente (Mme Elinor Caplan): Merci.

Judy.

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): J'aimerais m'adresser aux représentants de l'ANORP.

Nous apprécions le plan que vous avez présenté. J'ai lu votre document, et il me semble que le point central ou la recommandation clé est la création d'une certaine capacité au sein de Santé Canada et la présence d'un comité consultatif, afin d'obtenir l'expertise nécessaire pour pouvoir jouer un rôle significatif.

Il me semble que c'est presque accessoire à... Votre recommandation à l'égard d'une troisième catégorie ne découle pas nécessairement de votre plan, de votre recommandation. Selon moi, on pourrait prendre votre plan et l'appliquer à une recommandation aux termes de laquelle nous laisserions le système réglementaire en place et nous nous contenterions d'adhérer à la loi ou encore nous pourrions en fait, accepter l'une ou l'autre des recommandations qui ont été faites à ce comité et faire en sorte que tous les produits de santé naturels soient supprimés de l'appellation «médicaments» dans la Food and Drugs Act (Loi sur les produits alimentaires et pharmaceutiques). Nous pourrions appliquer ces mécanismes qui ont été suggérés et arriver au même résultat.

Par conséquent, pourriez-vous nous dire si vous tenez absolument à l'idée d'une troisième catégorie ou encore si, dans l'éventualité où nous obtiendrions une entente de ce genre sur cette question, vous ne pourriez pas aller dans l'une ou l'autre direction.

Mme Barbara Wells: Vous avez tout à fait raison lorsque vous dites que le modèle de classification des médicaments ne dépend pas d'une troisième catégorie. Il y avait deux questions distinctes. Vous êtes aussi tout à fait justifiée de penser qu'il n'est pas nécessaire de se doter d'une troisième catégorie pour que ce modèle soit efficace.

Mme Judy Wasylycia-Leis: En rapport avec cela, pouvez-vous nous donner une idée de la façon dont vous pondérez ces trois différentes options qui sont déposées devant le comité.

En ce qui concerne la troisième catégorie, devrions-nous la laisser telle qu'elle est, mais appliquer la loi et faire appel à l'expertise pertinente en ce qui concerne toute cette surveillance scientifique et l'étiquetage ainsi que les revendications qui ont été identifiées.

L'option suivante consisterait à éliminer les produits de santé naturels de la définition des médicaments et à mettre en place les procédures nécessaires.

Laquelle de ces trois options nous recommanderiez-vous?

Dre Linda Suveges: Je ne peux pas vous pointer une réponse. Je ne suis pas une experte en matière de produits de santé naturels. En tant que pharmacienne, je possède certaines connaissances, mais je ne me considère pas du tout comme une experte dans le domaine des produits naturels.

Je pense que la difficulté vient du fait que nous considérons des produits qui se classent très loin des aliments, qui pourraient être considérés comme des suppléments ou encore comme des produits à part entière ou des produits apparentés à des médicaments, mais qui seraient probablement plus faciles à catégoriser. Ensuite, vous pouvez retrouver des produits tout à fait à l'opposé, comme ceux de la médecine chinoise qui sont souvent le résultat de la combinaison de divers ingrédients préparés d'une certaine façon.

Je ne sais pas si vous pouvez regrouper tous ces produits dans une seule et même catégorie. L'avantage de nous doter d'une troisième catégorie est peut-être au fait que nous pourrions régler cette question une bonne fois pour toutes. En essayant de classer à tout prix ces produits dans le modèle des aliments ou des médicaments, nous pourrions arriver tout simplement à les séparer. En réalité, peut-être qu'ils ont davantage de points communs entre eux qu'ils ne ressemblent aux aliments ou aux médicaments.

M. Jim Dunsdon: Laissez-moi ajouter quelque chose. Nous sommes enclins à appuyer l'idée d'une troisième catégorie en adaptant le modèle qui s'est avéré une réussite avec les médicaments, moyennant certaines modifications.

• 1000

En ce qui concerne la question de M. Myers au sujet des essais en laboratoire et ainsi de suite, nous pourrions en venir à la conclusion qu'il s'agit de produits comportant de faibles risques, et qu'il est inutile de procéder ainsi, cela serait un exemple de l'adaptation de notre modèle de base. Nous aurions besoin d'autres paramètres à appliquer dans ce cas précis.

Toutefois, je pense que notre thèse s'appuie sur la réussite du modèle de l'ANORP avec lequel nous avons accumulé une bonne expérience—même si nous n'avons eu que trois ans pour le mettre à l'épreuve, mais ce fut une bonne expérience. Il nous est apparu que le modèle de l'ANORP pourrait être appliqué à cette catégorie de produits, de toute évidence moyennant certaines adaptations.

Donc, c'est l'avenue que nous privilégions, même si comme le dit Mme Wells, ce n'est pas une absolue nécessité de se doter d'une troisième catégorie. Vous pourriez procéder différemment un peu comme nous l'avons expliqué, mais je pense que ce serait une option souhaitable.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Juste pour faire un suivi rapide, monsieur Te Brugge, vous avez affirmé que ces produits devaient être classés de telle sorte qu'ils ne puissent dérouter ou tromper le public. Qu'est-ce que cela signifie en rapport avec votre préférence en ce qui concerne les mécanismes de réglementation?

M. Warren Te Brugge: En ce qui concerne les mécanismes de réglementation, ces produits sont certainement des produits à faibles risques et, par conséquent, ils ne conviennent pas vraiment à la catégorie qui a été créée à l'origine pour les médicaments. Ils ne conviennent pas non plus à celle des aliments. Nous pensons qu'il devrait y avoir une adaptation ou une combinaison des deux qui pourrait déboucher sur la création d'une catégorie séparée qui permettrait d'administrer et de réglementer ces produits et, ce faisant, uniformiserait les règles du jeu dans tous les secteurs en ce qui concerne la façon dont ces produits sont commercialisés.

La présidente: Madame Caplan.

Mme Elinor Caplan (Thornhill, Lib.): Merci, madame la présidente.

Peut-être est-ce une question de sémantique, mais il me semble qu'il ne s'agit pas de créer une troisième catégorie, mais plutôt un autre processus qui nous permettrait d'évaluer un produit qui ressemble à un médicament sans en être un ou sans prétendre en être un ou même qui pourrait être un aliment, mais assorti de prétendues vertus curatives et d'une posologie.

Je m'inquiète du fait que le terme «troisième catégorie» crée une fausse impression; il nous faut trouver un autre processus qui nous permettrait de déterminer ce qui est sans danger pour le public et si le produit est de bonne qualité.

Votre présentation a suscité chez moi certaines préoccupations parce que vous n'avez pas discuté du rôle de Santé Canada en ce qui a trait à l'efficacité des produits. Vous dites que vous pouvez entrer dans les détails de la procédure une fois que Santé Canada aura déterminé l'efficacité, et je pense qu'une des questions que se pose ce comité, en ce qui concerne un produit naturel à faible risque, est la suivante: quel devrait être le rôle de l'organisme de réglementation—en l'occurrence celui de Santé Canada—dans la détermination de l'efficacité du produit? Est-ce que ce produit devrait respecter les mêmes normes que s'il était un médicament? Voulez-vous répondre à cette question?

Je poserai une deuxième question pendant que vous réfléchissez à la première. Si un produit affirme avoir des vertus curatives, est-ce que cette affirmation devrait être prouvée? Et si oui, quel genre de preuves devraient être fournies? Est-ce qu'une expérience de 5 000 ans ou le fait que le produit comporte de très faibles risques et n'a tué personne jusqu'à maintenant est suffisant?

Voilà deux bonnes questions, il me semble.

M. Jim Dunsdon: Oui en effet ce sont de bonnes questions, et comme vous le voyez, nous réfléchissons avant de répondre. Je ne pense pas que quiconque a une réponse toute faite, avec tout le respect que je vous dois.

Je me rappelle du processus qui avait été suivi avec les médicaments brevetés. Je ne voudrais pas jouer les empêcheurs de tourner en rond, mais pendant de nombreuses années, l'ancien système des médicaments brevetés a reposé uniquement sur la sécurité, la sécurité et encore la sécurité. Un point c'est tout. C'était le mot magique pour les médicaments brevetés.

Mais par la suite, vers le milieu des années 70, il y a eu un changement. Ce n'était pas Santé Canada à l'époque, mais un organisme équivalent, et il s'est ensuite introduit dans le domaine des médicaments brevetés. Un élément d'efficacité est venu s'ajouter dans le processus à l'élément de la sécurité. Cet organisme essayait de vérifier à quel point les produits étaient efficaces et il a tenté de marier ces deux éléments, mais dès que vous vous engagez sur cette voie, vous êtes pris dans un dilemme.

Comme je le disais il y a une minute, nous étions très impatients de prendre connaissance des conclusions du conseil consultatif de la réglementation des professionnels de la santé de l'Ontario au sujet de la naturopathie, parce que ce conseil a étudié la question de façon très détaillée. Malheureusement, nous n'avons pu encore obtenir cette information.

Je me contenterai de dire qu'il y a effectivement un certain nombre de questions en suspens, mais que les réponses tardent à venir, en quelque sorte. À cet égard, je pense que nous n'avons pas la solution parfaite nous non plus.

• 1005

Mme Elinor Caplan: Si je peux me permettre de vous interrompre pour un instant, nous sommes à court de temps et la présidente fait preuve de rigueur...

Avec le processus que vous proposez—il s'agit bien d'un processus—à la condition que nous puissions percevoir une certaine indépendance et la nécessité de s'assurer que l'intervenant appuie ce processus, est-ce qu'il ne serait pas possible, sans devoir passer d'abord par l'exigence sur l'efficacité, que cela se fasse sans que vous ayez à tenir compte des produits à faible risque?

Dre Linda Suveges: Oui, cela pourrait être possible.

L'efficacité est une question intéressante. Lorsqu'un consommateur vient acheter un produit, même un médicament, est-ce qu'il pense automatiquement qu'il doit être efficace parce que quelqu'un le vend et il se dit qu'étant donné qu'il est déjà rendu à ce point, il doit être sûr? Eh bien, évidemment nous savons que ce n'est pas le cas, tout particulièrement si le consommateur ne suit pas les directives. Vous prenez alors ce produit et vous vous dites que les gens suivent des régimes bizarres. Ils mangent un aliment pendant des jours et des jours. Pouvons-nous les protéger contre cela? L'aliment est bon, mais il pourrait ne pas convenir à leur santé.

Je ne sais pas quelle attitude adopter à l'égard de l'efficacité. Il arrive certainement des fois qu'un médicament en vente libre soit soumis au CNCCPP et que nous ayons demandé où étaient les études d'efficacité. Ce médicament existe depuis longtemps et il se pourrait que les risques ne soient pas aussi évidents que nous aimerions qu'ils le soient. Par contre, vous analysez le tout et vous vous dites qu'il semble fonctionner pour certaines personnes et qu'il n'est pas particulièrement un grand risque et que, par conséquent, les consommateurs canadiens devraient pouvoir se le procurer. C'est peut-être à ce point précis où nous devrons intervenir.

Dans le cas de produits présentant un risque élevé, il importe peu qu'ils soient efficaces ou non, à moins que vous puissiez les réglementer d'une façon ou d'une autre. Dans le cas de produits où le risque est véritablement faible, lorsque les gens sont convaincus qu'ils fonctionnent, est-ce qu'il y a un problème. C'est peut-être alors, au milieu de ce processus, que vous vous dites que vous devez prendre certaines mesures, ce pourrait être une étiquette, une interaction avec un spécialiste de la santé ou une autre personne, et que nous devons ajouter cette information de façon à ce que l'on puisse utiliser le produit en toute sécurité.

Mme Elinor Caplan: Avez-vous envisagé la possibilité d'une stipulation d'exonération, si vous deviez passer directement au processus que vous proposez?

Dre Linda Suveges: Nous n'avons pas pensé à cela. C'est un aspect que nous pourrions envisager.

M. Jim Dunsdon: Dans une lettre d'information qui traitait de ce sujet il y a environ huit ou neuf ans, il y avait une suggestion que l'étiquette renferme une stipulation d'exonération disant que ce produit n'a pas été éprouvé scientifiquement. Oui, cette suggestion a déjà été faite.

La présidente: Monsieur Te Brugge, voudriez-vous répondre à cette question?

M. Warren Te Brugge: Il s'agit d'une question passablement difficile. Il est certain que de la façon dont nous considérons les choses—nous ne fabriquons aucun produit à base d'herbes; nous fabriquons de façon précise des vitamines et des suppléments minéraux—lorsque nous considérons les éléments—et nous aurons tendance à considérer les choses du point de vue de l'élément plutôt que du produit—nous cherchons effectivement des travaux de recherche, de la documentation et des références. Donc, si nous donnons à quelqu'un des renseignements sur, par exemple, la vitamine C, nous lui dirons quel est le fondement général pour utiliser de la vitamine C, pourquoi c'est efficace, dans quelles circonstances c'est efficace et nous donnerons aux gens au moins de 20 à 30 références s'ils le veulent, références qu'ils peuvent effectivement consulter afin de déterminer d'eux-mêmes s'il est en fait aussi efficace que nous avons pu le dire et prendre eux-mêmes la décision.

C'est une question difficile, particulièrement lorsque vous considérez les renseignements non scientifiques, ce qui est la plupart du temps le cas quand on a affaire à des produits à base d'herbes médicinales. Toutefois, un usage prolongé a démontré qu'il s'agissait de produits relativement à faible risque. Par conséquent, je reviendrai au fait que nous devons nous assurer qu'une formation et des documents de formation sont disponibles et qu'on peut les présenter de façon efficace avec les règlements en place pour permettre aux gens de prendre des décisions éclairées plutôt que de se fier à une personne pour les convaincre.

La présidente: Maintenant que vous avez la parole, je vais vous poser une question provenant de l'un des recherchistes ici. Vous avez abordé la question des bonnes pratiques de fabrication et vous avez suggéré que nos règlements devaient s'aligner sur ceux de nos partenaires internationaux. Pourriez-vous donner aux membres du comité de plus amples renseignements sur les BPF dans d'autres pays? Est-ce que les BPF requises au Canada en ce qui concerne les produits de santé naturels sont plus ou moins restrictives que celles exigées ailleurs?

M. Warren Te Brugge: Si nous regardons ce qui se passe dans d'autres pays... Prenons nos voisins du Sud, les États-Unis. Les BPF en ce qui concerne les produits de santé naturels, sur le plan technique, n'existent pas en fait aux États-Unis. Il y en a pour les produits pharmaceutiques et certaines compagnies acceptent, décident ou choisissent de se conformer à ces pratiques, tout comme nous. Toutefois, ce n'est pas tout le monde qui est tenu de le faire. Nous ne suggérons pas non plus que ce devrait être le cas. Nous suggérons plutôt qu'il devrait y avoir un niveau de bon processus ou de bonne pratique de fabrication en place et qu'ils devraient s'aligner de façon à nous permettre d'être présents sur la scène mondiale.

• 1010

Si nous regardons ce qui se passe en Australie et en Nouvelle-Zélande, nous sommes assez étroitement alignés. Toutefois, s'il y a un élément qui vient à l'esprit dans le domaine de la concurrence, par exemple, c'est que des parties de leurs règlements permettent aux petits fabricants de participer de façon efficace. Toutefois, au Canada, il est extrêmement coûteux de ce point de vue, c'est-à-dire que tous les fabricants sont tenus d'avoir une personne d'un certain niveau ou détenant une certaine qualification qui exécute les tâches de base relativement aux BPF. Cette façon de faire n'est pas rentable pour une petite compagnie parce qu'elle est extrêmement onéreuse.

En fait, tout cela revient à dire qu'il n'y a aucune exemption pour les petites entreprises. La façon d'aborder le tout dans les BPF au Canada constituerait un bon exemple.

La présidente: Diriez-vous que le taux d'efficacité pour une petite entreprise passe avant la sécurité ou l'intérêt du consommateur?

M. Warren Te Brugge: Certainement pas. Nous croyons que la sécurité vient en premier lieu, mais qu'il y a des moyens d'atteindre cette sécurité tout en permettant à d'autres personnes et à de petites compagnies de faire une concurrence dans ce processus.

La présidente: Que seraient ces moyens?

M. Warren Te Brugge: Particulièrement lorsqu'une compagnie est une filiale d'une autre provenant d'un pays étranger, cela inclurait la notion qu'il doit y avoir en quelque part au sein de cette compagnie une personne qualifiée qui répond aux exigences. Les gens qui travaillent dans les plus petites divisions de la compagnie—par exemple une compagnie établie au Canada—pourraient alors compter sur une personne à l'interne qui relèverait directement de cette personne, mais qui pourrait se charger également de faire exécuter les tâches quotidiennes de façon rentable, notamment recevoir les produits et s'assurer qu'ils sont envoyés pour les essais. L'interprétation réelle de certains résultats d'essais pourraient alors se faire par l'intermédiaire d'une personne qualifiée qui n'est pas nécessairement à cet endroit, mais qui pourrait être au siège social.

La présidente: Monsieur Elley, aviez-vous une autre question?

M. Reed Elley: J'ai une question, mais je laisserai la parole à Mme Carroll.

La présidente: Très bien, vous avez la parole.

Mme Aileen Carroll (Barrie—Simcoe—Bradford, Lib.): Je serai brève.

Monsieur Te Brugge, je viens tout juste de me rendre compte que vous avez dit que vous aviez abordé la question de l'efficacité en ce qui concerne, disons la vitamine C. Comme vous le dites, vous fabriquez et distribuez des vitamines et des suppléments de vitamines. Une étude récente a reçu une attention considérable dans les médias. Il s'agit d'une étude à laquelle ont participé plusieurs milliers d'infirmières qui ont formé un groupe de contrôle et ont reçu beaucoup plus que la quantité moyenne de vitamine B6 et d'acide folique. Je pense que cette étude s'est poursuivie pendant plus d'une douzaine d'années, et que les résultats semblent être ou indiquent réellement une réduction de l'incidence des maladies cardiaques chez les femmes lorsqu'elles utilisent ces deux produits. En me fondant sur ce type d'étude, je serais curieuse de voir si en tant que fabricant, vous estimeriez pouvoir inclure ce genre de résultats sur l'étiquette des, disons, vitamines B6 et de l'acide folique.

M. Warren Te Brugge: Lorsqu'on a mené des études de cette nature—et il y en a un certain nombre sur des produits tels la vitamine E, la vitamine C, le supplément de calcium, mais nous allons utiliser votre exemple—lorsque nous avons un groupe qui a fait l'objet d'une étude de cette nature utilisant une épreuve à double placebo anonyme telle celle à laquelle vous avez fait référence, nous estimons qu'elles donnent suffisamment de preuves pour nous permettre d'annoncer les vertus curatives de ces produits. Nous croyons que cela aiderait le grand public à prendre des décisions éclairées, que de le renvoyer aux études en ce qui concerne les résultats et les avantages d'éléments précis.

Mme Aileen Carroll: En tant que membre du comité, je fais alors face à un dilemme quant à savoir à quel moment une étude atteint un niveau acceptable de critères, c'est-à-dire des normes scientifiques suffisamment crédibles ou des études de pratiques médicales acceptées, autorisant un fabricant à la considérer comme étant une recommandation appropriée pour ce qui est de l'efficacité, et quand elle n'y parvient pas. Je pense que nous nous posons des questions à ce sujet et j'aimerais savoir ce que vous en pensez.

• 1015

M. Warren Te Brugge: Nous avons également beaucoup discuté de cette question. Notre effectif compte 21 titulaires d'un doctorat. Nous nous réunissons pour des discussions sur le produit et la R et D, et nous tenons compte des deux aspects de la question. Notre principale préoccupation à cet égard, et je suis convaincu que c'est également la préoccupation des membres du comité, c'est que les résultats ne peuvent être pris hors contexte et doivent être évalués en conséquence.

Par conséquent, si nous examinons une application précise d'un produit donné, nous allons prendre des études où les critères sont respectés. S'ils ne le sont pas, nous allons alors de façon générale—et je parle alors en tant qu'entreprise individuelle en ce sens que nous avons les ressources pour le faire—utiliser des parties de cette étude en guise de point de départ pour une étude clinique que nous entreprendrons afin peut-être de vérifier les éléments ou les parties. Dans le cas de produits que nous estimons n'avoir pas été éprouvés, nous allons mettre sur pied une étude pour effectivement les mettre à l'épreuve.

Mme Aileen Carroll: Vous avez donc vos propres installations de R et D.

M. Warren Te Brugge: Oui, c'est bien ça. À titre d'exemple de notre participation, notons l'efficacité de la nutrition pour les personnes qui sont VIH positifs, et les patients atteints du sida. Nous n'avions pas l'impression qu'il y avait suffisamment de preuves que qui que ce soit avait pris les mesures pour étudier quelque chose de cette nature, et par conséquent nous avons amorcé une étude dans le cadre de l'initiative de recherche communautaire de Toronto où 450 patients font partie d'une étude à double placebo anonyme qui se déroulera au cours des trois prochaines années. Elle est déjà en cours depuis six mois.

Ce sont là les étapes que nous estimons nécessaires pour être en mesure de dire avec une certaine assurance qu'effectivement vous en tirerez certains avantages et quels sont ces avantages.

Mme Aileen Carroll: Merci.

La présidente: Monsieur Elley.

M. Reed Elley: Merci, madame la présidente.

Monsieur Te Brugge, vous êtes de toute évidence un intervenant dans ce processus du point de vue de votre compagnie. Je me demande si je pourrais vous mettre un peu sur la sellette et vous demander si vous vous sentez à l'aise, par exemple en tant qu'intervenant, d'accorder ce pouvoir à un groupe tel le CNCCPP, maintenant que vous connaissez certaines de leurs suggestions. Quel est votre sentiment à ce sujet?

M. Warren Te Brugge: Franchement, je suis un partisan de ce type de processus, et nous le sommes en tant que compagnie. Nous croyons qu'à ce moment-ci le gouvernement n'est pas en mesure de réaliser ses propres objectifs au sein de Santé Canada parce qu'il concentre une quantité incroyable d'efforts à essayer de réglementer un très vaste éventail de négociants, si nous pouvons nous exprimer ainsi, ou de participants de l'industrie.

Je crois que par l'entremise du... Dans mon introduction, j'ai mentionné qu'il n'était pas nécessaire d'être une association précise qui a l'autorité nécessaire, mais que les associations qui transigent de façon générale avec différents segments du marché ont le pouvoir d'agir à l'égard de ces plaintes de façon à créer des règles du jeu plus équitables.

Nous croyons qu'il doit y avoir des règles du jeu équitables et que certains secteurs du marché ne sont pas réglementés dans la mesure où Santé Canada ne peut les joindre parce que ce ministère n'a pas les ressources nécessaires. Par conséquent, des vertus curatives sont attribuées aux produits, des produits sont fabriqués mais ne sont pas de grande qualité et le grand public est de façon générale trompé. Par conséquent, nous serions en faveur d'un transfert de cette autorité qui passerait du gouvernement à l'industrie.

M. Reed Elley: Donc cela ne vous dérangerait pas que le CNCCPP utilise son expertise...

M. Warren Te Brugge: Nous ne sommes pas nécessairement à l'aise avec le CNCCPP, mais quelque chose dans ce genre, oui.

M. Reed Elley: Très bien. C'est ce que je veux entendre, et nous avons besoin de l'entendre. Mais vous seriez d'accord pour faire appel à un groupe tel le CNCCPP qui a une certaine expertise dans ce domaine avec les médicaments, mais qui se doterait de l'expertise d'un groupe de gens comme vous et d'autres dans le domaine des produits alimentaires de santé naturels qui travaillent avec eux dans ce domaine, avec un cadre étendu. Vous dites que vous n'avez aucun problème avec cela.

M. Warren Te Brugge: Oui, c'est bien ça. J'estime que cela uniformiserait les règles du jeu dans le marché.

M. Reed Elley: Et est-ce que cela vous donnerait le genre d'autoréglementation que vous recherchez? Vous dites que vous pouvez voir l'industrie d'une certaine façon fournir ses propres règlements à cet égard?

M. Warren Te Brugge: Je continue de croire que le gouvernement doit continuer de déterminer la réglementation. Dans mon esprit, cela ne devrait jamais changer. Toutefois, je crois que les questions de conformité et la mise en application des règlements peut se faire de façon efficace au niveau de l'industrie.

M. Reed Elley: Merci.

• 1020

La présidente: Merci.

Madame Caplan, aimeriez-vous prendre la parole?

Mme Elinor Caplan: Oui. J'aimerais approfondir, si possible, ce processus de remplacement et ce que vous estimez que devrait être, le cas échéant, le rôle de Santé Canada. Si nous convenons que nous avons besoin d'un processus de remplacement pour ces produits au sujet desquels Santé Canada dit aujourd'hui—je pense que c'est un énoncé juste—«Si cela ressemble à un médicament, prétend agir comme un médicament, alors c'est un médicament et on devrait le traiter comme tel»... Nous entendons dire par un très grand nombre de personnes que ce n'est pas un médicament uniquement parce qu'il ressemble à un médicament, que ce n'est pas un produit synthétique, donc ce n'est pas un médicament. C'est un peu ainsi que je vois les deux côtés des présentes discussions.

Nous avons affaire à des produits qu'un grand nombre de gens considèrent ne pas être des médicaments, des produits qui devraient être des aliments ou quelque chose d'équivalent—des produits de santé naturels. Quel devrait être le rôle de Santé Canada, selon vous?

M. Warren Te Brugge: Je vais répondre en premier. Notre opinion à ce sujet est que le rôle de Santé Canada devrait être de continuer à s'assurer que les produits sont approuvés.

Mme Elinor Caplan: Approuvés pour quoi? Je veux dire que vous dites «Voici un produit que je veux fabriquer, donnez-moi un permis», «Une autorisation». Que veut dire ce permis?

M. Warren Te Brugge: Je crois que le permis devrait comporter un certain nombre d'éléments. Le permis devrait inclure une identité—les éléments réels et l'identification des éléments en ce qui concerne leur efficacité, en se fondant sur de la recherche qui devrait être présentée—de même que l'étiquetage et les pratiques de commercialisation. Il devrait y avoir un règlement et le gouvernement devrait participer à ce niveau. S'il ne le fait pas, nous aboutissons avec une situation où il y a la possibilité que le public soit trompé quant à ce qu'il y a effectivement dans la bouteille.

Mme Elinor Caplan: Permettez-moi d'approfondir ce point. Ce que je vous ai entendu dire, c'est que vous pensez que Santé Canada a un rôle à jouer pour s'assurer que ce que vous prétendez être dans la bouteille est effectivement dans la bouteille et, deuxièmement, que le produit est de bonne qualité parce qu'il a été fait en fonction des BPF—bonnes pratiques de fabrication. Ai-je raison?

M. Warren Te Brugge: Correct.

Mme Elinor Caplan: Efficacité—s'il s'agit d'un produit de santé naturel, est-ce que le niveau d'efficacité devrait avoir un rapport avec les vertus curatives annoncées pour le produit, ou devrait-il avoir un rapport...? Je veux dire que nous nous trouvons sur un terrain glissant. Quel devrait être le rôle de Santé Canada à l'égard d'un produit qui répond aux bonnes normes en matière de pratiques de fabrication; dont les fabricants peuvent démontrer que le contenu de la bouteille s'y trouve effectivement et que, par conséquent, il comporte un faible risque; que le produit est donc sans danger et qu'il n'annonce aucune vertu thérapeutique. Il reste la posologie, mais les fabricants n'ont aucune prétention à l'égard des qualités curatives.

M. Warren Te Brugge: En autant qu'ils n'annoncent aucune vertu curative, alors la personne utilise ce produit en se fondant sur son propre choix. Lorsque les fabricants annoncent des qualités toutefois, nous devons établir des normes afin que ces affirmations puissent être vérifiées.

Mme Elinor Caplan: Donc la question tourne autour de la norme établissant les vertus curatives annoncées du produit... Il y a différentes façons d'annoncer les vertus thérapeutiques. Vous pouvez dire «solution pour» ou uniquement «pour les pieds endoloris».

M. Warren Te Brugge: Je continue d'être d'accord avec le point de vue actuel de Santé Canada qui affirme que «ce n'est pas un remède pour quoi que ce soit». Je crois que ces types de produits donnent aux gens la possibilité d'améliorer leur bien-être général. Je ne pense pas que personne parmi ces gens devrait pouvoir faire des affirmations gratuites ou mal informer le public en prétendant que ces produits peuvent guérir quelque chose en particulier.

Mme Elinor Caplan: La question est alors quelles preuves sont nécessaires pour affirmer ce que vous dites?

Est-ce que quelqu'un voudrait parler de ce sujet?

Dre Linda Suveges: Je pense que c'est une question avec laquelle j'ai moi-même de la difficulté. Je suis une scientifique de sorte que je peux comprendre le contrôle du placebo, les études à double anonymat et c'est parfait. Cela m'enseigne quelque chose s'il y a suffisamment de gens, etc.

Les aspects avec lesquels je suis moins à l'aise, mais qui, d'une certaine façon, continuent de vouloir susciter la confiance sont ceux qui proclament qu'un produit est efficace depuis les «500 ans ou 5 000 ans et, par tous les saints, regarde ça. Ils le mettent sur mon éruption cutanée et cette dernière disparaît, donc quelque chose se produit». Je suppose que je ne sais pas encore exactement quoi faire à ce sujet. Je suis d'accord que des mots comme «remède» ne devraient peut-être pas faire partie du vocabulaire. Je ne sais pas si nous pouvons tout couvrir l'ensemble des affirmations qui peuvent être faites—et cela aurait trait aux produits à faible risque.

• 1025

Pour ce qui est des produits dont le risque n'est pas faible, la situation est différente parce qu'ils doivent être en mesure de démontrer l'efficacité et que c'est uniquement la façon de le faire. Si vous ne pouvez pas la démontrer d'une façon acceptable, le produit n'est pas mis en marché, comme c'était le cas, dans l'une de ces catégories. Mais je ne connais pas vraiment la réponse à la question quant à ce que nous devrions faire dans le cas de produits à faible risque pour lesquels les gens veulent pouvoir dire que c'est ce qu'il fait.

La solution de rechange est, si nous ne mettons rien sur l'étiquette ou si nous ne disposons pas d'un processus, que se produit-il si le consommateur entend dire que le produit est efficace. Nous nous dépêchons tous de l'essayer et nous trouvons une façon de nous le procurer, même s'il n'est pas disponible au Canada. Il s'agit donc également d'un aspect où nous voulons tenir ferme.

J'espère que les fabricants de ces produits aimeraient compter sur une forme de structure. J'incline à penser que c'est un avantage pour eux. Si nous ne les classons pas comme des substances alimentaires et si nous ne voulons pas les classer non plus comme des médicaments, si nous conservons la même définition de médicament, il est évidemment à leur avantage de pouvoir l'appeler quelque chose et de dire qu'il répond à une forme de structure.

Cela manquait de structure; je ne pense pas avoir répondu à votre question.

La présidente: Monsieur Volpe.

M. Joseph Volpe (Eglinton—Lawrence, Lib.): Toujours dans cette même veine, je vous demanderais de vous concentrer pendant un instant sur le rôle de Santé Canada pour ce qui est d'exiger des producteurs, en plus de suivre les autres règlements, d'indiquer ce qui pourrait se produire à l'usage d'un produit donné, en n'oubliant pas qu'un grand nombre de ces produits sont prévus pour une utilisation non indiquée sur l'étiquette.

J'espère que je choisis mes mots attentivement. Je ne veux discréditer qui que ce soit.

C'est une chose pour nous de dire que c'est ce que fait le produit et que cela pourrait être le résultat si vous le prenez selon cette posologie, mais dans un grand nombre de thérapies indiquées par les praticiens aujourd'hui dans des médecines douces et de remplacement, ils utilisent vraiment deux ou trois ou quatre ou cinq, et parfois plus, de ces produits à base d'herbes et, dans certains cas, des produits très définis.

Que proposez-vous de faire à ce sujet? Ou devrions-nous nous en occuper nous-mêmes?

Dre Linda Suveges: Ceci se produit avec des médicaments avec lesquels, évidemment, je suis plus familière, lorsque les gens ne suivent pas les conseils qui sont donnés soit sur l'étiquette, soit les conseils d'un spécialiste de la santé, et lorsqu'ils ne font que ce qu'ils veulent. Je suppose que la question est de savoir si vous pouvez protéger toutes les personnes contre elles-mêmes. Évidemment, la réponse est non. Santé Canada doit trouver une façon de dire qu'il s'agit d'un produit relativement sûr ou qu'il y a un certain danger, à la condition que les gens le fassent de la bonne façon et suivent les conseils.

• 1030

Je ne sais pas si vous allez être en mesure d'assurer une protection contre quelqu'un qui peut prendre une combinaison de produits ou prendre des produits sans respecter les doses recommandées. Tout ce que vous pouvez dire, c'est que s'il fait cela, voici les répercussions? S'il devait en prendre même un peu plus ou s'il devait mélanger à un autre produit, c'est dangereux, et cela en ferait un produit à risque élevé, même si en soi, c'est peut-être un produit à risque faible.

Je pense donc que vous devez poser quelques-unes de ces questions du point de vue du consommateur et vous demander ce qui pourrait survenir dans le présent cas. Si vous pouvez dire quelle serait la probabilité et vous pouvez démontrer que ce sera un problème, vous devez le traiter comme un produit à risque élevé.

M. Joseph Volpe: Que faites-vous dans le cas de la médecine chinoise traditionnelle où un praticien donnera de façon générale à un patient cinq ou six, peut-être même plus, produits distincts, tous à base d'herbes ou naturels, mais dont la combinaison donne une incidence particulière?

Dre Linda Suveges: Je ne suis pas du tout familière avec ce domaine et je ne pense pas pouvoir formuler de commentaires. Je suppose que si on me présentait le cas... C'est dans un cas comme celui-ci que le modèle que nous proposons... De toute évidence, les personnes qui font partie de notre comité spécial n'ont pas ce type d'antécédents. Elles peuvent apporter une certaine contribution, mais nous devons également avoir une ou plusieurs personnes qui ont exploré cette avenue et fait le lien avec l'autre médecine, la médecine occidentale ou biomédicale, de sorte que chacun puisse comprendre le point de vue. Nous n'avons plus affaire à seulement un système de sorte que vous devez avoir ces deux groupes de gens qui communiquent entre eux et qui disent voilà, c'est ce qui se produit. Alors, vous pouvez mettre les deux ensemble. En tant que personne seule, je ne me sens pas qualifiée pour faire cela, mais un groupe pourrait.

Mme Elinor Caplan: Donc, y a-t-il entente pour dire que Santé Canada déterminera le niveau du risque? En d'autres mots, est-ce un rôle qui convient à Santé Canada... si un produit présente un risque élevé ou un risque faible, et alors peut-être de déterminer le processus?

Dre Linda Suveges: Je pense qu'un groupe consultatif, votre comité, le CNCCPP ou un groupe semblable, pourrait jouer ce rôle. Vous pourriez devoir prendre conseils ou obtenir des preuves auprès de plusieurs sources. Il est certain que Santé Canada serait une telle source. Collaborer avec un groupe consultatif tel le CNCCPP pourrait également être utile dans le cadre de ce processus.

M. Warren Te Brugge: Je suis d'accord avec cette formule et à l'heure actuelle Santé Canada fait précisément cela. Les spécialistes de Santé Canada examinent le processus. J'ai assisté à un grand nombre de réunions pour recueillir de l'information, et très certainement des membres de notre compagnie et d'autres compagnies qui oeuvrent dans le même domaine que nous, pour déterminer le risque. Ce n'est pas une décision qui doit être prise en vase clos, si je peux m'exprimer ainsi.

Mme Elinor Caplan: En vase clos par...?

M. Warren Te Brugge: En d'autres mots, que Santé Canada prenne unilatéralement la décision quant à l'efficacité ou au risque du produit sans obtenir les commentaires des parties intéressées et d'autres intervenants.

M. Jim Dunsdon: On est en présence de deux éléments de risque. Il y a le risque lié à la commercialisation où Santé Canada... Je fais référence à notre mémoire. On y indique les éléments pour lesquels Santé Canada interviendrait, soit la demande de licence, l'examen de la demande et l'approbation de la commercialisation—il s'agit d'un processus à risque—et alors le CNCCPP ou un autre processus semblable pourrait se concentrer sur les conditions de vente, encore une fois fondées sur le risque relatif, élevé, moyen ou faible. C'est en quelque sorte un lien de ces deux aspects, à mon point de vue.

Mme Elinor Caplan: Je tiens à dire à quel point les exposés ont été utiles et nous ont aidé à comprendre les nuances et les différences. C'est intéressant et utile qu'on nous propose des solutions. Je trouve par contre frustrant que vous soyez aux prises avec les mêmes difficultés que le comité. Si vous pensez à des réponses à quelques-unes des questions qui ont été posées et que vous voulez en faire part au comité, vous pourriez les faire parvenir au greffier et il les remettra aux membres du comité.

Merci.

La présidente: Je vous remercie à nouveau, au nom de tous les membres du comité, d'être venue et de nous avoir fait part de vos idées. Nous avons entendu beaucoup de plaintes, mais nous avons besoin de suggestions quant à ce que nous devons faire.

Nous allons prendre une pause pendant que le nouveau groupe de témoins se prépare.

• 1035




• 1047

La présidente: Nous reprenons les travaux.

Nous entendons trois groupes au cours de notre séance d'une heure et demie.

Nous entendrons deux personnes de Health House. Andrew Boychuk, bienvenue. La Dre Jennifer Armstrong est une spécialiste en médecine environnementale.

Du département des sciences de la nutrition de l'Université de Toronto, nous entendrons Harvey Anderson, Venket Rao, le Dr David Jenkins et Peter Shin.

Monsieur Boychuk, nous commencerons par vous. Tel qu'on l'a suggéré avec l'autre groupe, nous aimerions vraiment avoir des idées de façon à ce que nous puissions commencer à nous concentrer sur les conclusions auxquelles nous allons venir.

M. Andrew Boychuk (chercheur, Health House): Tout d'abord, j'aimerais préciser que je parle du point de vue d'un chercheur, mais qu'avant tout je suis un patient qui a absolument besoin de certains produits de santé. Nous ne sommes aucunement affiliés à des compagnies ou à des entreprises comme tel.

Health House a été conçue par un petit groupe de personnes dans le but d'améliorer la science des soins de santé à l'intention des humains, de la perfectionner. C'est ce que nous appelons la gestion de la santé.

Vous savez que la plupart des gens n'ont aucune idée de ce dont nous parlons lorsque nous disons cela. Les gens ne pensent pas à s'intéresser à leur propre santé.

Cela signifie tout ce que nous faisons, c'est-à-dire manger, dormir, faire des exercices, notre hygiène, eh oui aller aux toilettes, et c'est une science passablement vaste.

Je ne sais pas si je devrais vous mentionner ce qu'est la santé, mais je vais le faire très rapidement. La santé, c'est le fonctionnement optimal de tous les organes et l'absence de maladies infectieuses.

Certaines personnes, même des professionnels, considèrent uniquement l'absence d'une maladie pour définir la santé. Eh bien non, je pense qu'être en santé devrait signifier que nous fonctionnons de façon optimale.

• 1050

Je ne vais pas vous ennuyer avec tout ce que j'ai écrit. Vous pouvez le lire vous-mêmes.

Je vais aller directement au coeur du problème de la réglementation. Il est assez évident que notre industrie des soins de santé est contrôlée par les compagnies pharmaceutiques, ce qui n'est décidément pas très bon. Elles n'ont pas une... c'est un point de vue biaisé; comment peuvent-elles vraiment régir l'industrie des soins de santé de quelque façon que ce soit?

En outre, je pense que toute décision significative que nous voudrions prendre pour confirmer cela devrait signifier que l'industrie des soins de santé devrait se contrôler elle-même. D'après ce que je sais de l'industrie des soins de santé, elle compte certainement des gens très compétents et, si ce n'est pas le cas, on peut y remédier facilement. C'est important pour la santé de la nation.

Il y a des gens qui se précipitent aux magasins de soins de santé et aux magasins d'aliments de santé pour trouver de l'aide, mais ils ne savent vraiment pas quoi. Certains savent qu'ils ont besoin de suppléments qui sont un petit peu plus élaborés, et ils sont probablement un peu plus utiles et plus efficaces. Ce sont précisément ces produits que l'industrie des médicaments veut éliminer.

Nous ne devrions pas le permettre. Si le gouvernement estime que l'industrie des soins de santé doit être réglementée, il devrait en établir les lignes directrices si celles qui sont actuellement en vigueur ne sont pas satisfaisantes. J'estime qu'il vaudrait la peine de donner l'argent nécessaire pour créer un tel organisme; évidemment pas à qui que ce soit qui est lié aux industries pharmaceutiques ou à la profession médicale. Cet organisme devrait se composer de gens qui ont reçu une formation axée sur la santé car la science est très différente des soins médicaux.

Si vous me le permettez, j'aimerais vous faire part de mon expérience avec les médicaments, uniquement pour vous donner une idée. En 1985, j'ai subi un pontage coronarien et on m'a littéralement obligé à prendre de l'aspirine ou de l'Entrophen tous les jours, et ce de façon permanente, si je peux m'exprimer ainsi.

Au bout de deux ans, je me suis rendu compte que mon état de santé se détériorait gravement. J'avais toutes sortes de problèmes et je devenais comme un vieillard. J'ai donc, contrairement à l'avis des médecins, décidé que j'aimerais mieux être en santé que mort et je me suis mis à la recherche d'une autre solution. J'ai arrêté de prendre tous ces médicaments et, naturellement, ma santé s'est améliorée.

Grâce à cette considérable amélioration, j'étais encouragé et je me suis dit que j'aurais tout intérêt à en savoir davantage sur la santé. Je me suis donc inscrit dans un collège et j'ai commencé à étudier. J'ai étudié passablement de façon à vraiment mieux comprendre la santé et la façon de la gérer.

La conséquence de tout cela a été qu'à la fin... Certains des problèmes que j'avais lorsque je prenais l'Entrophen était l'ulcération de l'estomac au duodénum, du psoriasis, de la fasciite plantaire aux deux pieds, du tinnitus, de la polyurie, de fréquents maux de tête et de la névralgie. Je n'avais aucun entrain. Je glissais et je tombais partout, je me faisais des entorses aux chevilles. Je ne pouvais pas patiner ni lancer une balle et comme j'étais un lanceur au baseball, je voulais lancer. Lorsque j'ai dit à mon cardiologue que je voulais continuer de jouer au baseball, il m'a dit «j'espère que vous ne lancerez pas».

• 1055

Je vous assure qu'aujourd'hui, à 70 ans, je peux lancer beaucoup mieux que dans mes meilleures années. Je pensais à ça l'autre jour. C'est très rare que je glisse, je n'ai pas tombé, je ne tombe plus. Je ne me fais pas d'entorses aux chevilles—ce qui m'arrivait très fréquemment. Je ne porte pas de verres, je marche comme un cerf de montagne. J'ai envie de marcher, j'ai envie de courir. Et tout cela à 70 ans alors que je pouvais à peine le faire à 60 ans. À ce point-ci, je ne suis pas encore un chercheur très professionnel ni un spécialiste en santé. J'ai tout accompli cela uniquement en m'occupant de ma santé.

À mesure que nous avons amélioré nos connaissances dans l'utilisation des éléments nutritifs, nous avons constaté que nous pouvions faire des choses encore plus élaborées en utilisant des aminoacides. Ce domaine des aminoacides n'est apparemment pas très bien exploité et les médecins ont de nombreuses idées différentes à cet égard. Je me suis rendu compte que les médecins n'ont même pas sur leur liste de tests une disposition pour une évaluation de votre niveau d'aminoacides, et c'est très important pour votre santé.

J'ai d'excellents livres et heureusement, je suis un excellent chercheur. Je suis devenu très à l'aise pour suppléer les aminoacides individuels, mais je dois les obtenir illégalement, sur le marché noir. Je pense que je devrais pouvoir les obtenir en toute légalité. J'ai demandé un permis à Santé Canada pour pouvoir les obtenir et je n'en ai pas entendu parler depuis de sorte que je suppose que Santé Canada attend d'obtenir la permission des fabricants de médicaments.

J'ai constaté qu'ils avaient d'excellents avantages. Depuis que je mets en pratique cette science, je peux courir et ne sentir aucune raideur à la poitrine, en particulier un jour de temps froid. J'en déduis que cela doit avoir une incidence considérable. J'estime que je devrais avoir le droit à ces produits.

La présidente: Monsieur Boychuk, pourriez-vous terminer rapidement afin que nous puissions vous poser des questions?

M. Andrew Boychuk: Oui. J'arrive à la fin.

Uniquement pour vous donner une idée encore plus précise de tout cela, lorsque mon état de santé s'est bien amélioré, j'ai commencé à devenir plus fringant. Je me suis trop ambitionné et j'ai développé une fibrillation. Je me suis donc rendu à l'hôpital, à l'urgence, pour une défibrillation et ce fut toute une aventure.

Je me suis dit, la prochaine fois, j'ai tout ce qu'il me faut ici et je vais procéder moi-même à la défibrillation, et c'est que j'ai fait à trois reprises. Évidemment, je sais maintenant contrôler ma propre fibrillation sans devoir procéder moi-même à une défibrillation.

• 1100

Et bien, un très grand nombre de gens se rendent à l'hôpital pour obtenir ces services. Nous ne pensons jamais que nous pouvons le faire nous-mêmes.

Je veux tout simplement que vous sachiez ce que cela peut faire pour vous. Ça ne vous aide pas seulement à vous tenir sur vos deux pieds et à devenir meilleur, c'est un très grand stimulant pour la confiance et la relaxation.

J'aimerais ajouter un point. Même si c'est bien connu, j'aimerais savoir que c'est très sérieux. Les compagnies pharmaceutiques essaient sans même se gêner de convaincre nos jeunes mères de ne pas donner à leur enfant la meilleure nourriture; c'est-à-dire l'allaitement. C'est un point que je m'étais fait la promesse de vous mentionner.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Boychuk. Vous aurez probablement une chance d'apporter d'autres précisions au moment des questions.

Docteure Armstrong.

Dre Jennifer Armstrong (témoigne à titre personnel): Madame la présidente, permettez-moi d'abord de vous remercier de m'avoir invitée ainsi aujourd'hui. J'aimerais féliciter les membres du comité pour leur excellent rapport provisoire, même si je ne suis pas d'accord avec tous les points.

Je suis une médecin qui se spécialise dans les maladies environnementales—ce que nous appelons les «ME»—fatigue chronique, fibromyalgie, allergies. Même si je me spécialise dans ces malaises, je suis ici pour protéger les droits de tous les patients au Canada, quelle que soit leur maladie.

Quoi qu'il en soit, j'aimerais signaler que les maladies environnementales ont atteint des proportions épidémiques au Canada. C'est la nouvelle plaie du prochain millénaire et la situation ira en empirant encore beaucoup avant de pouvoir s'améliorer.

Les vitamines et les minéraux font partie intégrante de ma pratique. Les médicaments prescrits ne sont qu'une option. La santé de mes patients s'améliore sans eux. J'ajouterais même que c'est également mon cas.

Pendant six ans j'ai combattre une maladie environnementale. C'était l'enfer. Je me suis battue et j'ai gagné. Mon expérience personnelle, quoique dramatique, m'a vraiment ouvert les yeux. Pour me rétablir, j'ai dû explorer et utiliser des services parallèles et des produits complémentaires. Les aliments fonctionnels—c'est l'expression que vous utilisez—constituaient un élément important du rétablissement de ma santé. Ils sont maintenant un élément principal du rétablissement de la santé de mes patients.

En ce qui concerne le rapport provisoire, j'aimerais poser quelques questions.

La présidente: Je vais vous interrompre ici uniquement pour vous dire que nous ne sommes pas le comité consultatif. Nous faisons partie d'un comité permanent de la Chambre des communes. Le comité consultatif a produit un rapport provisoire. Les membres du comité consultatif vont d'ailleurs venir témoigner devant nous pour nous présenter le rapport.

Dre Jennifer Armstrong: Je m'excuse.

La présidente: Nous assurons ainsi une... Oui?

Mme Aileen Carroll: Nous avons lu votre mémoire avant votre exposé, et bien qu'effectivement la présidente ait raison, il me semble que vous soulevez tout de même des questions qui méritent notre considération.

La présidente: Je ne voulais pas l'interrompre. Je lui apportais seulement cette précision.

Veuillez poursuivre.

Dre Jennifer Armstrong: Je me demandais simplement de quelle façon le gouvernement allait contrôler toutes les compagnies, canadiennes et étrangères, en ce qui concerne les bonnes pratiques de fabrication. De quelle façon est-ce que les gouvernements sauraient si chaque produit étiqueté est effectivement pur ou fait ce qu'il prétend faire? Le gouvernement va-t-il procéder à des essais dans ses propres laboratoires? Est-ce que le gouvernement a les ressources humaines nécessaires pour réglementer les aliments fonctionnels de la façon décrite dans le rapport?

Je me demandais s'il y avait un autre moyen de surveiller les aliments fonctionnels autrement que de la façon que nous avons décrite aujourd'hui. Je me demandais s'il existait un registre de surveillance pour les médecins, les praticiens de médecine douce et les éducateurs.

J'essayais de savoir aussi à quel point le gouvernement pouvait être rigide dans sa réglementation. Juste un exemple en ce qui concerne les produits alimentaires, le lait par exemple a été sérieusement lié au diabiète insulino-dépendant, et pourtant nous ne réglementons pas le lait et nous n'éduquons pas le public sur ce sujet.

J'aimerais aussi exprimer les préoccupations suivantes. Ma première préoccupation concerne les vitamines et les minéraux hypo-allergènes pour les patients les plus sensibles. Les produits hypo-allergènes que j'utilise habituellement ne se trouvent pas dans les magasins d'aliments naturels ou encore il est difficile de connaître la qualité de ceux qui sont vendus dans ces magasins, aussi parfois je dois commander des produits directement de fournisseurs américains, et ce sont des produits que je connais bien, même des produits que j'ai essayés moi-même et je sais qu'ils sont bons. Je suis inquiète de ce que la réglementation pourrait limiter l'approvisionnement de certains de ces produits excellents et purs.

Ma deuxième préoccupation concerne la possibilité que des coûts exorbitants soient associés à l'homologation des aliments fonctionnels.

• 1105

Je m'inquiète par ailleurs par rapport aux besoins des patients et à leur situation particulière.

En règle générale, quand ils viennent me voir, les patients sont malades depuis longtemps, soit entre cinq et quinze ans. La plupart ont vu des douzaines de médecins, de dentistes, de praticiens de médecine douce. Ils ont parfois dépensé jusqu'à 100 000 $ pour leur santé, sans résultat probant. Il est déjà difficile pour eux de payer le prix des produits purs que je leur recommande et, en ce sens, j'aimerais que l'on examine attentivement le coût associé au processus très long de guérison des maladies environnementales telles que la fibromyalgie et le syndrome de fatigue chronique. Il serait mal venu d'augmenter le stress des patients, déjà au bout du rouleau.

En dernier lieu, une vaste campagne de sensibilisation doit aider les Canadiens à faire des choix éclairés quant aux bienfaits des nutraceutiques, qu'ils soient à risque élevé, moyen ou faible.

En conclusion, j'espère que le rapport final du Comité comprendra des recommandations relatives à un programme de sensibilisation d'envergure à l'intention des médecins et des pharmaciens, de même que de l'ensemble de la population canadienne, à partir de l'école primaire. Je serais honorée de collaborer avec tout comité ou groupe de travail voué à l'éducation des Canadiens aux bienfaits d'une alimentation saine, ainsi qu'à l'utilisation éclairée et adaptée des nutraceutiques.

Pour appuyer mon point de vue, j'aimerais mentionner des rapports de recherches clés que vous pourrez consulter: Nutritional Therapy and Medical Practice, par les Drs Alan Gaby et Jonathan Wrigth; Nutritional Influences on Illness, par Melvyn Werbach; et Mental and Elemental Nutrients, par le Dr Carl Pfeiffer. J'ai aussi apporté une étude de cas d'une patiente qui a guéri sa schizophrénie au moyen de produits nutritionnels et d'une diète saine.

Merci beaucoup, madame la présidente.

La présidente: Merci beaucoup, docteure Armstrong.

Je ne sais pas qui prendra la parole en premier dans l'autre groupe. Monsieur Anderson?

Dr G. Harvey Anderson (professeur en sciences de la nutrition et physiologie, et codirecteur du programme «Food Safety» du département des sciences de la nutrition de l'Université de Toronto): Merci, madame la présidente.

Peut-être que M. Volpe, en sa qualité de professeur, apprécierait beaucoup notre situation. Par essence, un expert et professeur se définit comme étant quelqu'un qui est à l'extérieur et qui possède une série de diapositives. Nous avons bien des transparents, mais nous n'avons pas de rétroprojecteur; nous allons donc poursuivre. C'est peut-être aussi bien qu'il ne voie pas mes transparents, parce qu'ils ne sont pas les meilleurs du point de vue didactique.

Vous avez entre les mains un document, auquel je ne ferai pas référence directement; j'aimerais plutôt vous expliquer pourquoi nous sommes ici, ce que nous faisons et qui nous sommes, bien entendu, quelle contribution nous pouvons apporter et quelles sont nos suggestions eu égard à vos questions.

Je suis professeur de sciences de la nutrition et de physiologie à la faculté de médecine de l'Université de Toronto. À mes côtés se trouve le Dr David Jenkins, professeur en science de la nutrition et de médecine, et directeur du centre «Clinical nutrition and risk factor modification» à l'hôpital St. Michael. Il pourra, j'en suis sûr, répondre aux questions portant sur les risques et les bienfaits. Le Dr Venket Rao est quant à lui professeur et codirecteur du «Program in Food Safety». Tous deux s'intéressent aux domaines des aliments fonctionnels, aux nutraceutiques, aux constituants des aliments et à la santé en général. Ils font de la recherche dans ces domaines et nous aimerions en discuter ici.

Peter Shin est aussi avec moi; il est gérant des programmes «University-Industry Affiliates Office», que je décrirai brièvement.

Le programme de sécurité alimentaire, dont nous sommes les codirecteurs, s'intéresse particulièrement aux fondements scientifiques de la sécurité alimentaire, de la nutrition, de la santé et des règlements qui touchent l'industrie alimentaire, les organismes de réglementation gouvernementaux, les professionnels de la santé et les consommateurs. Notre programme est unique parce qu'il s'inscrit dans un contexte universitaire et que les universitaires s'intéressent peu ou pas en général à la réglementation et aux questions liées. Cela s'explique par le fait que ce domaine revêt peu d'intérêt sur le plan de la recherche.

Nous avons donc proposé ce programme et avons reçu des subventions grâce auxquelles nous avons trouvé des partenaires en vue d'étudier certains des problèmes soulevés. Nous sommes subventionnés par le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie (CRSNG), un organisme subventionnaire canadien que vous connaissez sûrement, par des membres de l'industrie alimentaire et par l'Université de Toronto.

Voilà pour les bâilleurs de fonds de nos programmes et activités affiliées. Notre groupe compte quinze membres, dont l'Institut canadien du sucre, la Canada Bread Company, Les producteurs laitiers du Canada, General Mills Canada, des multinationales comme Mead Johnson, Monsanto Life Sciences, Nestlé Canada, Procter & Gamble, et d'autres. Comme vous l'expliquera le Dr Jenkins, notre recherche tient compte aussi des nombreuses petites industries qui seront touchées par les règlements en matière de nutraceutiques et d'aliments fonctionnels.

• 1110

Outre l'Université de Toronto, nous comptons parmi nos rangs des membres du «Food Council» de l'Université de Guelph—avec qui nous collaborons pour la recherche et la programmatique—et de l'Institut polytechnique Ryerson.

Notre programme comporte deux volets, ce qui démontre encore une fois qu'il s'agit d'un programme universitaire. Ce partenariat—entre l'industrie et le CRNSG—a permis la création d'une chaire de recherche en toxicologie alimentaire au département des sciences de la nutrition de l'Université de Toronto. Nous collaborons aussi avec le «University Affiliates Office», dirigé par Peter Shin, qui traite les questions scientifiques qui intéressent autant les universitaires, l'industrie que le gouvernement.

Notre programme vise à augmenter la recherche en milieu universitaire, ainsi que la collaboration avec le secteur privé et le gouvernement. À la base, bien entendu, se trouve notre intérêt pour la santé des Canadiens en général, et surtout pour l'alimentation saine.

Alors pourquoi sommes-nous ici? Eh bien, nous voulons discuter avec vous—ce que nous aurons certainement l'occasion de faire durant la période de questions—de la nécessité de réglementer les vertus curatives prétendues des aliments et de leurs constituants fonctionnels. Comme vous le savez, une telle réglementation n'existe pas ici, alors qu'elle existe dans de nombreux pays.

Peut-être considérez-vous que nous représentons l'aile conservatrice des sciences de la nutrition. Les choses ont changé. Nous reconnaissons dorénavant que les vitamines, les minéraux et les constituants alimentaires ne fournissent pas simplement des nutriments qui sont bénéfiques pour la santé et autres bienfaits connus, dont certains ont été mentionnés ce matin.

Au département, des recherches sont actuellement en cours sur les fibres alimentaires, les lycopènes, les vitamines, les minéraux, les constituants des plantes et les phytoestrogènes, en raison de leurs propriétés thérapeutiques et de prévention. Nous nous intéressons beaucoup plus à la prévention des maladies qu'à leur traitement.

Dans ce contexte, nous aimerions apporter notre appui au rapport, mentionné auparavant, du programme sur les produits thérapeutiques et de la direction des aliments relativement à l'analyse des politiques possibles en matière de nutraceutiques et d'aliments fonctionnels. Le Dr Jenkins faisait partie du groupe consultatif, et j'ai moi-même participé au processus de consultation; il en est ressorti des options très claires, présentement à l'étude. Nous aimerions beaucoup que Santé Canada donne suite à ces travaux; nous sommes tout à fait d'accord pour que l'on associe des vertus curatives prétendues aux aliments et à leurs constituants, sur le plan de la structure, des fonctions, de la réduction des risques ou des effets thérapeutiques On peut sans hésitation définir les nutraceutiques comme étant des constituants alimentaires.

Nous souhaitons évidemment mettre notre expertise à profit en vue de l'élaboration de normes scientifiques qui serviront de fondement aux vertus curatives prétendues, dont il a été question auparavant.

Donc, pour résumer notre point de vue, nous sommes en faveur de l'indication de vertus curatives prétendues qui aideront les Canadiens à adopter une alimentation plus saine. Ce qui importe, c'est de réglementer les vertus curatives prétendues, et non la définition des produits et de leurs constituants. Il faut absolument que les affirmations quant aux vertus curatives d'un produit soient formulées en fonction d'exigences précises.

Il faut réglementer les affirmations quant aux vertus curatives des produits, parce qu'elles permettront aux Canadiens d'adopter une alimentation plus saine et des comportements favorisant la prévention des maladies. Ces affirmations doivent être fondées sur des faits scientifiques liés aux aliments et aux constituants alimentaires; elles ne doivent pas être traitées comme les médicaments. Autrement dit, il faudrait évaluer les facteurs de risque en regard des bienfaits, une question qui mérite d'être approfondie.

Je vais maintenant passer la parole au Dr Jenkins et au Dr Rao.

Dr David Jenkins (professeur de sciences de la nutrition et de médecine, département des sciences de la nutrition, Université de Toronto; directeur du «Clinical Nutrition and Risk Factor Modification Centre»): Merci. Je suis David Jenkins.

Je suis désolé. Mes collègues n'ont pu s'empêcher de remarquer que, si j'avais eu une meilleure alimentation, je serais plus en forme aujourd'hui. J'espère que les règlements adoptés contribueront à améliorer les choses dans les prochaines années.

• 1115

Cette question m'intéresse depuis longtemps, de même que le Dr Rao. Voilà de nombreuses années que nous tentons de convaincre l'industrie de produire des aliments véritablement dotés de caractéristiques fonctionnelles. C'est très important. Vous serez sûrement d'accord avec moi, les facteurs démographiques indiquent un vieillissement irréversible de la population; il serait donc étonnant que nous assistions à la diminution de la souffrance et des coûts liés aux maladies chroniques, telles les maladies cardiovasculaires, le diabète et le cancer. Nous ne pouvons plus nous contenter de dire aux gens qu'il faut mieux manger.

Nous croyons entre autres que, si nous convainquons l'industrie alimentaire qu'il faut aller dans cette direction, nous obtiendrons des résultats intéressants. Notre action est double. Tout d'abord, le citoyen ordinaire doit acquérir un plus grand contrôle sur ses affaires—ce qui serait souhaitable pour nos affaires internes et externes puisque le Canada est un producteur important de matières premières, telles que le ginseng ou le soja, ou encore de matières exportées vers les pays orientaux, comme le bétaglucane de haute qualité fabriqué à partir de grains d'avoine, une substance qui contribue à diminuer le taux de cholestérol sérique. Nous pouvons produire n'importe quoi. Des compagnies canadiennes font actuellement des essais, sans grand succès toutefois, car elles n'ont pas le droit d'associer des vertus curatives prétendues à leurs produits. Elles cherchent donc à pénétrer d'autres marchés, ou encore à faire fabriquer les produits ailleurs.

Nous possédons les matières premières. Il existe des besoins dans la population. Il est donc urgent d'instaurer une législation adéquate, comme l'a mentionné le Dr Anderson. Autrement dit, si Santé Canada menait à terme son projet de permettre aux compagnies d'indiquer les vertus curatives prétendues des produits, elles seraient prêtes à investir puisqu'elles en tireraient des profits, un aspect très important à mon avis. Les enjeux sont de taille. Nous avons la possibilité à la fois de diminuer la souffrance et de faire de l'argent. Voilà pourquoi je crois, en ma qualité de chercheur dans le domaine des sciences de la nutrition affilié à un hôpital, que ce secteur doit être exploité.

Je n'entrerai pas dans plus de détails pour l'instant; je me limiterai à dire que j'ai collaboré avec plusieurs compagnies, grandes et petites, et que les barrières sont importantes. Si vous souhaitez en discuter, je suis à votre disposition. Certaines grandes compagnies avec lesquelles j'ai travaillé, comme Loblaws, font affaire avec de plus petites compagnies. En fait, c'est pour satisfaire ce genre de besoins que Loblaws a mis sur le marché la gamme de produits «Too Good to be True». Si vous connaissez cette gamme de produits, vous savez ce que je veux dire. Elle a mis cette gamme au point avec notre collaboration.

C'est ce genre d'initiatives que je souhaite voir de plus en plus au Canada, où tout est possible. Mais les règlements actuels constituent une barrière majeure. Les progrès faits par l'ancienne DGPS, puis par Santé Canada, en ce qui a trait aux initiatives et aux politiques structurées couvrant les aliments, les nutraceutiques et les aliments fonctionnels m'apparaissent comme très importants. Il faut cependant agir vite avant de nous faire damer le pion.

Merci.

La présidente: Monsieur Rao.

Dr A. Venket Rao (professeur, sciences de la nutrition; codirecteur, «Program in Food Safety», département de sciences de la nutrition, Université de Toronto): Merci, madame la présidente.

Je n'ai pas grand-chose à ajouter aux propos de mes collègues. Je suis tout à fait en faveur de l'intérêt croissant de la science de la nutrition envers les constituants alimentaires et leur rôle sur le maintien de la santé et la prévention des maladies. Je crois qu'il a déjà été dit que le rapport sur les options de stratégies énonce quelques lignes directrices. Comme l'a souligné le Dr Anderson, nous sommes en faveur de cette démarche et je crois que les trois points que nous défendons sont déjà connus, soit le droit de faire des affirmations quant aux vertus curatives des aliments, la nécessité de formuler des lignes directrices et des règlements, et la nécessité d'appuyer les affirmations et la description de l'activité intrinsèque des produits sur des faits scientifiques.

• 1120

De plus, il faut ajouter qu'il existe déjà des règlements, et qu'il n'est donc pas nécessaire de créer une nouvelle catégorie. Comme l'a mentionné le Dr Jenkins, nous parlons de soja, de tomates ou de lin, soit de simples aliments. La réglementation doit être conséquente.

L'indication de vertus curatives prétendues contribuera à une meilleure information du public, et partant, nous permettra de remplir notre mandat de santé publique. J'appuie donc les trois aspects.

Je vous remercie beaucoup.

La présidente: Merci à tous. Les membres peuvent maintenant poser leurs questions.

Monsieur Elley.

M. Reed Elley: Merci, madame la présidente. Une fois de plus, j'aimerais vous remercier de vous être déplacés pour nous faire entendre votre point de vue sur les questions soulevées dans le dossier.

J'aimerais revenir sur un point que j'ai déjà abordé devant ce Comité. Il s'agit de l'étiquetage des aliments et de leur sécurité.

Par exemple, un certain nombre de représentants de l'industrie des aliments naturels et des produits de santé naturels sont venus nous exposer certaines préoccupations. Par exemple, qu'adviendrait-il si des règlements très stricts contrôlaient l'étiquetage d'un produit comme l'ail? À l'heure actuelle, on peut l'acheter dans un magasin et l'ingérer comme un aliment sans que, apparemment, cela soit problématique. Mais si on le décompose, on l'écrase, on le met en capsules, on l'embouteille et on l'étiquette, l'ail ferait alors partie d'une autre catégorie, qui exigerait l'indication des vertus curatives prétendues et autres renseignements sur la bouteille.

Il y a donc ce type d'aliments et les autres, comme le beurre d'arachide. Ma fille est très allergique au beurre d'arachide. Il lui suffit de le sentir pour faire aussitôt une réaction anaphylactique. Mais qui penserait à étiqueter le beurre d'arachide? Jamais je n'ai vu un pot de beurre d'arachide avec une étiquette comportant un avertissement «Ce produit peut causer la mort.»

Quel est le rôle du gouvernement dans ce dossier? Comment peut-il réglementer un aliment qui peut avoir des effets sur la santé de certains individus? Quelqu'un peut-il répondre à cette question?

Dr David Jenkins: Merci. C'est effectivement une question importante. Pour ma part, j'espère que l'on fera appel au bon sens quand on formulera les règlements.

Par exemple, il existe actuellement des règlements liés aux fibres et à leur effet laxatif; certains nouveaux produits dérivés des fibres, les cosses de pois pulvérisées par exemple, sont parfois ajoutés à la composition du pain. Santé Canada s'est déjà prononcé sur cette question afin de décider si les produits ont effectivement un effet laxatif, et si, tout bien pesé, ils pourraient être dommageables pour la santé.

Tout bien pesé, Santé Canada a considéré que les produits ne sont pas dommageables et, sans qu'il soit besoin d'en faire plus, ce type de produits a été permis. Nous n'avons reçu aucun commentaire négatif depuis.

Alors, pour ce qui est des produits comme l'ail et le soja [...] et s'il ne semble y avoir aucune raison, je crois qu'il faut faire appel au bon sens. S'il n'y a aucune raison de s'en faire, alors pourquoi s'en faire?

Cependant, nous avons aussi affaire à des produits qui pourraient avoir un effet thérapeutique très faible comparativement à un médicament. Par conséquent, on s'attendrait à ce que leur indice de toxicité soit aussi très faible. En d'autres mots, on s'attend à ce qu'ils soient faibles partout.

Mais l'effet n'est pas le même pour l'ensemble de la population, et des différences très importantes peuvent se manifester sur le plan de la santé.

Je serais donc plutôt du même avis que vous. Nous sommes en zone grise, mais il est impossible d'examiner en détail chacun des produits mis en marché. En effet, et heureusement, la science évolue, de nouvelles idées émergent et, dans leur sillon, de nouveaux produits. Ainsi, les épidémiologistes mettent au jour de nouveaux concepts auxquels nous devons nous adapter.

• 1125

Je ne crois pas que nous pourrons formuler des règlements définitifs aujourd'hui. Ce qui importe, c'est que nous mettions le processus en branle et que nous accordions nos pas sur le chemin.

M. Reed Elley: Merci. Puis-je poser la même question...

La présidente: Le professeur Anderson tout d'abord.

Dr Harvey Anderson: Nous avons parlé de la diminution des maladies chroniques, telles que les maladies cardiovasculaires et les cancers, et des affirmations quant aux vertus curatives des aliments qui peuvent prévenir ces maladies et contribuer à assurer une meilleure santé de la population.

Notre but est de protéger la santé de la population. Quand on fait référence à un produit qui entraîne de fortes réactions allergiques chez un grand nombre d'individus, nous traitons, à mon avis, deux aspects différents du problème. Les conseils et les renseignements qu'il faut donner à une personne afin qu'elle évite ces réactions n'ont pas rapport à notre sujet, soit les affirmations quant aux vertus curatives et aux bienfaits. Si on peut améliorer les produits alimentaires et faire en sorte de rendre l'alimentation de la population plus saine, nous devons aussi l'informer sur les façons de mieux s'alimenter afin de prévenir les maladies chroniques.

M. Reed Elley: Pouvez-vous approfondir ces deux thèmes? Il s'agit de deux sujets différents, dans un certain sens. Comment le gouvernement aborde-t-il ces deux sujets sur le plan de la réglementation?

M. Peter Shin (gérant des programmes, «University-Industry Affiliates Office, Program in Food Safety», Université de Toronto): Prenons l'exemple des arachides. Il est obligatoire de mettre la liste des ingrédients sur tous les produits alimentaires. En présence d'une allergie aux arachides, il faut regarder les ingrédients.

Comme l'a mentionné le professeur Anderson, ce sur quoi nous insistons est que ces produits s'adressent à l'ensemble de la population, et non à des individus en particulier. Nous espérons que ces messages, fondés sur la recherche scientifique passée et future, seront profitables à la population.

Sur le plan des allergies, je crois que Santé Canada tente d'amener la population à consulter la liste des ingrédients. Si on se met à mettre des mises en garde du type «Ce produit peut causer la mort«, beaucoup de gens n'achèteront plus de beurre d'arachide.

M. Reed Elley: À votre avis, docteure Armstrong, comment le gouvernement devrait-il réglementer ce type de produits?

Dre Jennifer Armstrong: Eh bien, l'une des principales difficultés pour nos patients est le potentiel allergène des produits. On ne parle pas seulement des arachides, mais aussi des produits laitiers, des produits à base de blé ou de maïs. Nous avons trouvé que les agrumes étaient à l'origine des allergies les plus communes. Il arrive qu'on ne mentionne pas les produits laitiers que contient un produit. Il faut donc s'inquiéter surtout de la composition des produits et des constituants allergènes qu'ils peuvent renfermer, qu'il s'agisse de suppléments ou d'aliments.

Je pense que l'aspect le plus important pour nos patients est l'obligation d'étiqueter précisément les produits, en énumérant tous les constituants, y compris les additifs.

Ils le font pour les médicaments. Quand j'ouvre mon CPS, j'obtiens la composition exacte d'un médicament. Si j'ai des questions, je peux les poser au pharmacien.

Mais pour ce qui est des autres suppléments, on ne connaît pas le processus de fabrication. Par exemple, on utilise parfois un solvant pour l'extraction de certaines huiles, et certains patients font une intolérance au solvant. Il serait donc bien de connaître tous les processus de fabrication, mais je ne sais pas comment cela pourrait être fait.

L'étiquetage est important, bien entendu, mais je ne sais pas quel niveau de détail est souhaitable pour assurer la sécurité des patients. Oui, il faut assurer de bonnes pratiques de fabrication, mais pour ce qui est des prétentions thérapeutiques, il existe de nombreuses études relatives à l'activité intrinsèque des vitamines et des minéraux. Ces derniers produits m'intéressent particulièrement. Ainsi, la vitamine B6 est indiquée pour une foule de raisons, pas seulement pour les pathologies coronariennes.

Ces sujets me préoccupent. S'il faut indiquer chaque fois les vertus curatives prétendues des produits, la liste pourrait être longue. Peut-être serait-il plus facile d'instituer des mesures de sensibilisation et d'éducation?

La présidente: Merci.

Madame Picard.

[Français]

Mme Pauline Picard: Bonjour. Un autre groupe de témoins nous recommandait tout à l'heure d'investir davantage dans les essais cliniques dans le domaine de la nutrition. Est-ce que votre groupe à l'université possède à l'heure actuelle un appui financier pour poursuivre ses recherches? Deuxièmement, pensez-vous qu'à l'heure actuelle, Santé Canada possède l'expertise nécessaire pour faire la preuve de l'innocuité et de la sûreté des produits naturels, et pour élaborer de nouvelles règles pour satisfaire les consommateurs de produits naturels?

• 1130

[Traduction]

Dr Harvey Anderson: C'est une suggestion très intéressante. Si vous proposer d'insuffler plus de fonds dans la recherche, nous sommes tout à fait d'accord.

En fait, les programmes du CRSNG de coopération entre l'université et l'industrie, ou entre l'université et le gouvernement sont un appui modeste en ce sens et, à ce titre, ils méritent d'être encouragés. Le Dr Jenkins est un grand défenseur de ces programmes; il supervise l'un des rares programmes au Canada qui étudient les bienfaits des plantes et des constituants alimentaires au moyen d'essais cliniques ou d'expériences sur les humains qui permettront d'édicter des affirmations quant aux vertus curatives.

Nous commençons tout juste à comprendre l'importance des connaissances en nutrition pour les pharmaciens. À l'Université de Toronto, nous donnons des cours à la faculté de pharmacie. L'Université de la Saskatchewan a créé une école de pharmacie et nutrition. Le milieu est de plus en plus conscient des besoins en ce sens. Il faut mettre en place des programmes plus efficaces de recherche participative et, pour ce faire, la participation du secteur privé est primordiale.

Dr David Jenkins: Je suis tout à fait d'accord. Il faut encourager les organismes subventionnaires à considérer ce domaine comme étant très sérieux car, jusqu'à maintenant, il a été grandement négligé. Il faut intégrer les connaissances aux programmes éducatifs.

Dr Venket Rao: Vous avez sûrement constaté à quel point la recherche nous tient à coeur. Souvent dans le passé, on s'est perdus en conjectures à savoir s'il s'agissait de recherche fondamentale, de sciences de la santé ou je ne sais quoi encore. Il faut faire plus de recherches.

Le public accordera sa confiance aux produits si les règles de sécurité tiennent compte des composants et de fondements scientifiques. Par contre, si tout un chacun se met à faire des affirmations quant aux vertus curatives des produits en se fondant sur de vagues recherches... Les lignes directrices devraient être édictées à partir de fondements scientifiques.

Dre Jennifer Armstrong: J'ai oublié ce que j'allais dire, mais c'était intéressant.

Il est important que les consommateurs sachent que les produits qu'ils achètent sont sûrs. Il serait aussi intéressant que les universités donnent des cours en nutrition qui ne portent pas seulement sur les aliments. Quand j'ai fait mon cours en médecine, voilà 20 ans, je me souviens très bien qu'on nous disait «qu'on n'avait pas besoin de prendre des vitamines». C'était la philosophie du temps.

Il semble que votre approche ait changé, et c'est très rafraîchissant, parce que je n'avais pas réalisé que les écoles avaient changé leurs perspectives. On me réfère beaucoup de patients maintenant. Beaucoup de médecins qui ont été formés voilà plus de 20 ans ne reconnaissent pas certains de ces facteurs et leurs patients ne guérissent pas, parce que les médicaments ne règlent pas tout. Si des subventions pouvaient permettre d'inclure cela aux programmes de cours, ce serait merveilleux.

Il reste encore à assurer la sécurité des produits vendus aux patients. Je me demande si on pourrait mettre en place des mécanismes de déclaration des produits inefficaces par les consommateurs, afin qu'il y ait des enquêtes ou des recherches. [...] C'est le moyen qui me semble le moins lourd.

La présidente: Pour votre information, nous entendrons M. Volpe, M. Myers, Mme Carroll et Mme Caplan, dans cet ordre. Vous pourrez débattre de cette question entre vous.

Monsieur Volpe, vous avez la parole.

• 1135

M. Joseph Volpe: Merci beaucoup.

À la lumière de vos témoignages, messieurs les docteurs de l'Université de Toronto, il semble que vous soyez en faveur d'une troisième catégorie. J'en suis heureux. Cela prouve que mes déductions étaient justes.

Dr Harvey Anderson: Monsieur Volpe, pour clarifier notre position, nous ne sommes pas en faveur de l'établissement d'une troisième catégorie, parce que nous n'en voyons pas la nécessité. Si on établit une catégorie vertus curatives prétendues, comme il est proposé dans le document de politique discuté ici, alors tous les produits comportant des nutraceutiques, des aliments fonctionnels et, on pourrait en débattre, des composants d'origine végétale, qu'il s'agisse de nutraceutiques ou de [...] Nous sommes confrontés à un problème de définitions. Il faut s'attarder aux vertus curatives prétendues. Quand nous parlons de nourriture, qu'il s'agisse de boissons, d'aliments, ou même de nutraceutiques, qui incluent aussi les comprimés, qui satisfont aux normes relatives aux vertus curatives prétendues, ils doivent être réglementés selon les mêmes critères, différents de ceux appliqués aux médicaments. Il faut définir le degré de preuve scientifique à respecter dans le cas des vertus curatives prétendues. Je ne crois pas qu'il faille exiger le même degré que pour les médicaments, qui visent le traitement d'un individu ayant un problème, et s'attend donc à ce que les bienfaits retirés compensent pour les risques courus.

Dans une perspective très générale, on peut dire que les facteurs de risque associés aux produits naturels sont beaucoup moins importants que ceux qui sont reconnus comme étant acceptables pour les médicaments. Par contre, il ne faut pas s'attendre à ce que les bienfaits des produits naturels soient aussi spectaculaires. Pour ce qui est des maladies chroniques, de la prévention et des effets à long terme, je crois que l'on peut établir des critères adéquats qui guideront la recherche expérimentale en vue de trouver les vertus curatives prétendues des produits. À mon avis, il n'importe pas de savoir s'il faut créer ou non une troisième catégorie, mais plutôt quels sont les résultats attendus de la consommation d'un produit X, Y ou Z.

M. Joseph Volpe: Il est évident que vous avez réfléchi à ces questions, mais vous n'avez pas encore réussi à définir, à en juger par votre présentation, une «norme adéquate» quant aux preuves scientifiques.

Dr Harvey Anderson: Non, nous n'avons pas défini une telle norme, mais nous avons offert à Santé Canada notre collaboration pour y parvenir, ce dont traite en partie le document de politique. Après consultation, et après la rédaction du document original auquel le Dr Jenkins a participé, il a été entendu qu'il fallait poursuivre la réflexion sur une catégorie qui tiendrait compte des vertus curatives prétendues. Mais auparavant, il est essentiel de définir les critères scientifiques qui seront à la base de ces affirmations. Il n'en demeure pas moins que nous avons fait un grand pas, avec l'ensemble des participants, parmi lesquels se trouvent sûrement des personnes que vous avez rencontrées, en nous accordant sur l'importance des vertus curatives prétendues

M. Joseph Volpe: Pourriez-vous formuler des normes relatives aux preuves scientifiques de l'activité intrinsèque des produits utilisés en médecine chinoise traditionnelle, ou s'adresse-t-on aux mauvaises personnes?

Dr Harvey Anderson: Je dirais que oui, c'est possible. Considérez-vous le ginseng comme étant un produit utilisé par la médecine chinoise traditionnelle?

M. Joseph Volpe: Mais le ginseng n'est que l'un des produits.

Dr Harvey Anderson: Je le sais, mais nous pouvons citer l'exemple de producteurs de ginseng de l'Ontario ou du reste du Canada qui appuient la recherche visant à définir les propriétés thérapeutiques du produit.

M. Joseph Volpe: Je crois que le cas du ginseng est relativement simple. En parlant avec d'autres collègues tout à l'heure, j'ai fait référence à un magasin chinois qui fait office d'herboristerie et de pharmacie. On y trouve des milliers de produits qui doivent être administrés en combinaison afin de produire un effet curatif.

C'est plutôt à ces cas que je pensais. Votre recherche en tient-elle compte aussi?

• 1140

Dr Harvey Anderson: Je laisserai un vrai médecin répondre dans une minute. Je crois que le problème, c'est qu'il y a deux niveaux. À titre de professionnels, à titre de médecins traitant un patient et croyant avoir ou ayant une preuve suffisante qu'un produit peut être efficace s'il est combiné à un autre, il s'agit de leur choix en terme de gestion d'un cas personnel et de traitement d'une personne.

Je m'intéresse à la santé de la population et aux vertus curatives prétendues et je considère qu'une combinaison de médicaments chinois ne peut être utilisée sans que l'on ne puisse se fonder sur une «preuve scientifique», ce sur quoi travaillent les producteurs de ginseng.

M. Joseph Volpe: J'aimerais aussi entendre la réponse de la Dre Armstrong.

Allez-y docteur Jenkins.

Dr David Jenkins: Il est impossible d'appliquer la même norme partout. Un produit peut servir à abaisser le taux de cholestérol, un autre peut modifier les effets de la glycémie ou les effets du glucose et un autre aura des propriétés laxatives. Il faudra des critères particuliers pour chacun d'entre eux.

Par exemple, les critères en matière d'effets laxatifs sont les seuls que Santé Canada permet actuellement dans ce système. Rien ne peut nous empêcher de considérer d'autres facteurs, mais je pense que vous devez pouvoir dire, «Si vous voulez faire valoir une vertu curative prétendue, quel est exactement l'objet de votre prétention? À quoi cela sert-il?» Puis vient la question sur le plan scientifique: «Quelle est la preuve de cela?» Tout dépend. Un produit peut empêcher les ongles incarnés, donc les études qui démontreront que ce produit empêche les ongles incarnés seront vraiment différentes de celles qui serviront à démontrer qu'un produit peut abaisser le taux de cholestérol de 5 ou 6 p. 100.

Ce que je dis, en fait, c'est que, oui, il faut obtenir une preuve scientifique. Ce sera votre réponse, si vous voulez, si des gens désirent revendiquer une quelconque vertu curative. Si des gens veulent simplement commercialiser quelque chose sans prétendre à une vertu curative particulière, alors je ne vois pas de raison—pourvu que le produit soit inoffensif—qu'ils ne puissent continuer de le faire.

Mais s'ils souhaitent qu'une vertu curative lui soit attribuée, c'est dans ce domaine, je crois, que nous devons apporter notre soutien et notre encouragement; c'est dans ce domaine que les compagnies combleront réellement un vide entre les notions de bonne alimentation et de médicament. Il y a ici un grand vide à combler. Force nous est d'admettre qu'il y a quelque chose à faire dans ce secteur; tout ce vaste secteur n'est pas balisé.

Tout ce que nous disons, c'est qu'il faut s'attaquer à ce vaste secteur. Nous devons agir dans ce domaine. Nous devons commencer à nous assurer qu'il y a des produits qui se situent entre la bonne alimentation et les médicaments et la pharmacothérapie, des produits qui doivent être réglementés sur des bases scientifiques et en fonction du risque que représente le produit. Toutes ces choses sont différentes. Elles méritent toutes plus ample réflexion.

M. Joseph Volpe: Docteure Armstrong, juste avant votre réponse, vous avez dit quelque chose dans votre présentation qui a retenu mon attention et c'était—et je paraphraserai ce que vous avez dit—que vous testez vraiment certains des produits avant de les prescrire. Vous pourriez peut-être trouver dans votre réponse, trouver un moment pour expliquer comment vous procédez.

Dre Jennifer Armstrong: OK. Vous me demandez de répondre à deux questions.

Tout d'abord, je ne prétends pas être une spécialiste des herbes, mais je connais des personnes qui ont utilisé même des herbes orientales.

Je conviens qu'il y a un grand nombre d'herbes. Je ne suis pas certaine que les médecins orientaux qui pratiquent l'acupuncture et utilisent des herbes voient la médecine de la même façon que nous voyons la médecine traditionnelle, s'ils la considèrent du point du vue de cause à effet, comme ceci: si je fais A, alors l'organe B ira mieux. Je crois qu'ils appréhendent leur médecine en terme d'approche énergétique, d'équilibre entre les méridiens. C'est une façon tellement différente de considérer la médecine. Je ne sais pas vraiment—à moins que je ne me sois assise et que j'en aie parlé davantage—comment leur pratique pourrait être mise à l'étude à l'Université de Toronto de la même manière que l'enseignement que l'on m'a prodiguée à l'école de médecine.

Cela me préoccupe donc et c'est pourquoi je réitère mon autre suggestion. Si l'on a des interrogations à propos des herbes médicinales et s'il y avait une sorte d'organisme composé de médecins orientaux et de médecins de l'U de T ainsi que de médecins qui pratiquent la médecine douce... si l'on pouvait se rapporter à cette instance, peut-être que ce serait utile pour certaines herbes qui peuvent poser des problèmes. Je ne sais pas. Ce n'est qu'une idée.

• 1145

Lorsqu'il s'agit de tester différents suppléments, oui, je les essaie moi-même. Je peux souvent dire jusqu'à quel point un produit est pur parce que j'ai déjà été très sensible. Je trouve qu'il y a de très grandes différences entre les différents types de vitamine C. Certaines vitamines C sont meilleures que d'autres.

Quand je suis venue à Ottawa pour la première fois, je suis allée chez un pharmacien et je lui ai demandé de quel produit provenait la vitamine C et il ne le savait pas. Pour lui, ce n'était pas important, mais pour nos patients, et tenant compte de la façon dont nous étudions la médecine, c'est important, parce qu'une bonne partie de la vitamine C provient du maïs, et que parmi les gens qui sont allergiques au maïs, un bon nombre ne toléreront pas la vitamine C provenant du maïs; il ne doit pas y avoir de maïs dans la vitamine C qu'ils ingèrent. Ces petits détails concernant les vitamines sont importants, et j'aimerais les essayer toutes avant de les recommander à mes patients.

La présidente: Nous poursuivrons avec M. Myers maintenant, s'il vous plaît.

M. Lynn Myers: Je veux revenir sur la question des normes qui satisferaient la preuve scientifique. Vos propos à ce sujet m'ont grandement intéressé, et je me demandais ce que vous aviez en tête. S'agit-il d'essais cliniques ou d'essais en laboratoire. Quel genre de choses? Je voulais d'abord connaître la signification de cela. Je crois que je comprends maintenant le qui et le quoi et que je sais comment procéder, mais je veux continuer sur la question du peuple traditionnel chinois et des traditions autochtones en matière de médecine. Quel argument opposeriez-vous à ceux qui diraient—et nous avons entendu ce témoignage de leur part—que nous avons 5 000 ans de preuve pour ce qui est de savoir ce qui pourrait arriver, ce qui devrait arriver et ce qui arrivera? Comment alors leur dites-vous, «Attendez un peu, nous pensons qu'il faudrait procéder à des études scientifiques et nous devrions participer à ces recherches»? Comment répondez-vous aux gens dans ce genre de situation?

Dr Harvey Anderson: Je ne crois pas que nous puissions assurer la sécurité et la santé des gens en nous fondant sur des croyances et des pratiques historiques. Ceci étant dit, cependant, je pense que nous devrions prendre en considération ce témoignage et voir ce qui devrait être fait pour l'intégrer dans une structure qui garantirait la santé et le bien-être du public.

Vous êtes encore réductionniste en revenant au ginseng, mais il me semble qu'il s'agit d'un exemple probant d'un produit où le pont peut être érigé. Combien d'argent, combien de temps dépensez-vous pour construire ces ponts? Je crois, ici aussi, que l'on en vient au degré de preuve. Si une étude épidémiologique démontre que pour une population donnée les bénéfices semblent s'accroître, il se peut bien que le groupe qui observe cette situation dise, oui, c'est une preuve suffisante, et c'est une preuve suffisante étant donné que le degré de risque est très faible. L'usage traditionnel en a démontré la sécurité.

Par ailleurs, lorsque l'on est plutôt sur le terrain des composants alimentaires ou des produits naturels qui peuvent, par exemple, traiter le cancer, alors je crois qu'il est nécessaire de procéder à des études scientifiques beaucoup plus approfondies et à des essais cliniques. C'est donc d'un gradient que nous parlons tous. Je ne crois pas que ce soit incompatible avec...

Seulement pour expliciter, il y a vingt ans, alors que j'enseignais probablement le cours auquel vous faites référence, nous n'étions pas conscients des questions d'hypersensibilité à l'environnement et d'autres choses du genre. Mais j'ai présidé plusieurs comités et j'ai fait la promotion de ce sujet pour la province de l'Ontario. Nous avons financé des recherches dans le but d'essayer de comprendre mieux et d'aider les gens qui pratiquent dans ce domaine.

Par ailleurs, j'ai aussi été l'un des présidents du groupe de travail canadien sur les acides aminés. En introduisant une réglementation dans ce domaine, nous avons évité que le tryptophane ne cause plusieurs décès au Canada. Il faut donc s'en remettre au jugement scientifique.

M. Lynn Myers: Est-ce que ces jugements scientifiques, comme vous dites, ou les études requises ont été quantifiés? Nous entendons des gens dire, attendez un peu, je vais devoir me retirer des affaires, nous allons devoir nous retirer des affaires, vous allez nous enlever notre gagne-pain. Vous répondez, non, nous devrions en fait avoir des preuves scientifiques et des normes adéquates et des essais pour vérifier la sécurité et l'efficacité et nous devrions avoir un bon étiquetage et tout ce dont vous avez parlé précédemment. Est-ce que tout ceci a été quantifié? Pouvons-nous répondre à ces gens en leur disant que cela représente en réalité x dollars, selon nous, en moyenne. Avez-vous fait cette recherche?

Dr Harvey Anderson: C'est pour cela que je crois qu'il est important que nous ayons une catégorie de vertus curatives. Ensuite, vous pouvez commencer à répondre à ces questions de façon plus précise, parce que dans certains pays, la preuve épidémiologique est acceptée et qu'il n'en coûterait strictement rien. J'insiste, cela dépend du type de vertu curative auquel vous prétendez.

• 1150

Pourquoi en arriverions-nous donc à forcer ces gens à se retirer des affaires si leur problème est jugé...? Nous parlons maintenant de la sécurité de sa composition, et ainsi de suite, et c'est indiqué sur le produit, mais je ne crois pas que vous vouliez soudainement dire que vous pouvez indiquer sur l'étiquette que ce produit guérira le cancer sans que la preuve en ait été faite. Il y a d'autres façons de faire savoir qu'un produit est bénéfique, comme des articles dans les journaux, etc., et si cela se vend, ils pourront continuer à poursuivre leurs affaires.

Vous ne demandez pas que chaque produit, chaque article soit examiné et qu'une vertu curative lui soit attribuée, ou quoi que ce soit d'autre qui n'existe pas. Je pense que c'est à cela que le Dr Jenkins faisait référence. Il y a une assez grande compatibilité.

Dr David Jenkins: Ils ne veulent pas nécessairement revendiquer une vertu curative particulière. Ils veulent peut-être simplement commercialiser leur produit et dire qu'il peut améliorer la santé. Ils veulent peut-être dire qu'en Orient, on considère que le produit a telle ou telle vertu. Cela semble donc raisonnable.

Ce que nous essayons de faire en réalité, c'est d'encourager les gens, comme ceux avec qui le Dr Rao travaillera concernant le lycopène de la tomate en Ontario. Cet élément peut prévenir le cancer de la prostate. Devrions-nous vraiment cultiver des tomates qui produisent du lycopène? Devrions-nous avoir davantage de ketchup riche de ce pigment rouge, ce lycopène, qui peut avoir des effets bénéfiques pour la santé?

Comment pouvons-nous inciter les entreprises à se lancer dans ce genre de production? C'est la question que nous posons. Ce n'est peut-être pas la même que la vôtre, mais je veux que vous compreniez que pour nous c'est un problème réel. Comment amener les entreprises à innover et à produire des éléments qui seront utiles au consommateur?

La seule façon, c'est d'au moins leur donner quelque chose à dire, pouvoir affirmer une vertu curative. C'est ce que nous examinons. Nous considérons donc cette question d'un point de vue positif, non du point de vue négatif d'essayer d'amener des gens à abandonner les affaires. Nous voulons essayer de stimuler l'industrie canadienne à se lancer dans ce domaine.

Elles n'iront pas dans ce domaine. Je travaille depuis 20 ans à les inciter à s'engager dans ce domaine. J'ai réussi auprès d'un petit nombre d'entreprises, mais leur passage a été bref.

M. Lynn Myers: Je crois qu'il s'agit d'une distinction intéressante. Il vaut la peine de la noter. Je suis content d'avoir entendu ce témoignage.

Docteure Armstrong, je n'ai qu'une brève question.

Je suis très intéressé par—c'est aux pages 2 et 3 des questions que vous soulevez—la façon dont le gouvernement pourra exercer un contrôle. C'est la première. La deuxième, c'est: comment le gouvernement apposera-t-il les étiquettes?

En fait, je devrais plutôt utiliser le conditionnel. Je vous demande, comment devrions-nous faire, par exemple pour exercer un contrôle? Comment devrions-nous faire l'étiquetage? Quel traitement devrions-nous accorder aux nutraceutiques en ce sens? Avez-vous des conseils à nous donner?

Dre Jennifer Armstrong: Pour ce qui est de l'étiquetage, je le répète, peut-être est-ce ce que vous disiez, certains produits pourraient comporter des vertus thérapeutiques, mais pas tous les produits.

Comment étiquetterait-on une multivitamine? Nous avons tous nos idées propres sur les vertus des multivitamines. Je pense que pour certaines vitamines, il serait peut-être difficile de prêter des vertus thérapeutiques précises, mais l'étiquette devrait à tout le moins indiquer les ingrédients, les composants et les additifs, même en petite quantité, qui pourraient se trouver dans le produit en raison du processus de fabrication.

Pour ce qui est du contrôle, je pense qu'il s'agit d'une tâche difficile. J'ai travaillé pendant un an au Bureau des matériaux médicaux. Nous avons dû affronter ce problème, car on invente tellement d'appareils médicaux qu'il n'est pas facile d'assurer le contrôle.

Je pense donc que l'une des façons d'y arriver était de demander qu'on fasse rapport sur ceux-ci. Je ne crains pas d'avoir à préparer des rapports sur les vitamines ou sur quoi que ce soit, mais je suis préoccupée par les dépenses que cela représente pour les compagnies qui fabriquent ces vitamines. S'il faut de la main-d'oeuvre pour effectuer ce travail, il faudra la rémunérer. C'est donc une préoccupation.

Les fabricants de vitamines que j'ai rencontrés veulent produire des vitamines de qualité. Ils veulent rester en affaires. Aussi, si vous partez du point de vue que les gens désirent rester en affaires, ce qui ne se produira pas s'ils offrent de mauvais produits, alors, je crois qu'avec un minimum de contrôle sur les pratiques de fabrication ou une certaine forme de rapport minimal, ce serait relativement facile. Par la suite, si le public ou les praticiens qui utilisent le produit ont des inquiétudes, peut-être que s'il y avait un endroit où ils pourraient rapporter leurs inquiétudes, cela minimiserait le nombre de règlements qu'il faudrait adopter.

• 1155

La présidente: Madame Carroll.

Mme Aileen Carroll: Tout comme mes collègues, j'ai trouvé cet avant-midi exceptionnellement enrichissant, et je suis ravie que vos interventions aient eu lieu à la fin de nos discussions. Nous avons ainsi pu commencer à cristalliser les différents concepts.

Pour ma part, au début, je connaissais très peu la médecine chinoise traditionnelle et, dans une large mesure, tout ce que nous examinons dans ce comité. Mes études me prédisposent vers le scientifique, mais dans une optique occidentale.

Aussi, au début c'était pour moi une énigme, et ce l'est encore, même après vous avoir écoutée aujourd'hui, pour les raisons qu'a fait ressortir la Dre Armstrong, je crois. En effet, il est très difficile d'extrapoler à partir du système de médecine chinois à propos d'un groupe d'herbes ou de remèdes et de les soumettre à notre système et de les valider selon notre perspective, ce qui constitue vraiment une approche—je déteste utiliser ce mot dont on abuse—holistique, toujours, en fonction du point de départ. Je lutte encore avec cette énigme, malgré les éclaircissements dont vous nous avez fait profiter ce matin.

Mais vous êtes venue contribuer au processus final. J'ai écouté très attentivement ce que vous disiez dans le sens de ne pas recommander une troisième catégorie. J'ai bien regardé les mains du Dr Jenkins lorsqu'il a décrit ce que sont les aliments et ce que sont les médicaments. Il reste une zone entre les deux. Mais vous ne voulez pas appeler cela une catégorie. Je vous ai entendu utiliser le mot catégorie dans l'expression «catégorie de vertus curatives». Il y a encore une bataille à livrer.

Docteur Jenkins, je suis vraiment emballée par vos travaux. Ils ont vraiment eu un impact sur l'industrie en faisant ressortir la menace que font peser sur les fabricants canadiens les entreprises américaines non réglementées qui vendent des produits par commande postale. C'est vraiment emballant—au lieu de voir quel genre de croissance est possible pour nous, de devenir l'industrie elle-même et la fabrication.

Vous dites, comment faisons-nous pour encourager des entreprises à produire lorsqu'elles désirent effectuer des recherches en collaboration avec l'U de T, ou de leur propre chef? Les empêchons-nous actuellement? Dites-moi, docteur Jenkins, comment les en empêchons-nous actuellement, et comment pouvons-nous nous débarrasser de ces formes d'obstruction.

Dr David Jenkins: Merci beaucoup. Vous avez touché un aspect important.

Je crois en effet qu'il y a des blocages. Je crois que c'est ce qu'ont dit les Drs Anderson et Rao. Probablement que dans une certaine mesure, la Dre Armstrong serait aussi d'accord pour dire qu'il est nécessaire de promouvoir ces domaines.

Il y aura toujours une espèce d'énigme avec les aspects que nous ne pouvons mesurer—systèmes médicaux différents, problèmes différents—et nous ne voudrions probablement pas que l'on empêche la croissance de ces choses. Ce que nous devons faire, en fait, c'est d'empêcher l'accroissement des industries du pays.

Ainsi, nous travaillons avec Yves sur les produits du soja—le soja qui peut avoir des vertus curatives dans le cas des cancers hormono-dépendants, comme celui du sein et celui de la prostate et, en raison de sa protéine, la propriété d'abaisser le taux de cholestérol. Le soja est une culture endogène qui pourrait être très utile et qui pourrait constituer un produit d'exportation majeur.

Le problème que nous avons pour attirer ces entreprises à développer davantage de produits dans ce domaine—simili-viande de soja et autres du même genre—bien qu'ils soient très populaires... Je sais, à l'école, lorsqu'il y a des activités ou quand nous avons un barbecue, ils commandent du soja, et le soja part toujours très rapidement et il reste des hamburgers réguliers. Donc, ces choses ne sont pas impopulaires, mais elles n'ont pas l'impact qu'elles devraient avoir. Les travaux de recherche n'avancent pas, car il n'y a pas l'incitation que susciterait la possibilité de prétendre à des vertus curatives. Rien ne dit que ce produit peut aider à abaisser le degré de cholestérol. Ce que l'on dit en général, c'est de cesser de manger des burgers et des saucisses, ou à tout le moins de les consommer faibles en gras. Ils sont donc considérés comme faisant partie d'une catégorie générale de choses dont on dit, sur le plan de la santé, d'en consommer moins.

• 1200

Ce sont des substituts, si vous voulez. Ils possèdent la plupart des caractéristiques propres au goût, et certainement l'apparence, ce qui pourrait être très utile, pourrait être développé et pourrait réellement avoir un effet sur la chute du taux de lipide sérique. Peut-on dire qu'ils peuvent avoir une incidence sur la diminution du taux de cholestérol sérique? C'est de cette sorte d'affirmation que nous parlons. Pouvons-nous permettre ce genre de choses? Des études nous démontrent que oui, mais il n'est pas encore possible de poser une telle affirmation.

Je pense que ce serait particulier à une catégorie de produits. Je ne sais pas si cela irait toujours si l'on mélange quelque chose avec du gras saturé. Je pense que c'est même pire dans le domaine où travaille la Dre Armstrong, alors qu'il y a un nombre incalculable d'allergènes variés. Mais dans notre domaine, si une chose n'est pas produite adéquatement, elle perdra sûrement ses effets bénéfiques.

D'ailleurs, on aimerait que les entreprises qui ont consenti des efforts pour créer des produits qui sont utiles pour nous soient en mesure de dire quelque chose dans leur publicité, de dire quelque chose qui fasse partie de leur stratégie de marketing. Sinon, elles ne s'engageront pas dans ce domaine.

La présidente: Docteur Rao.

Dr Venket Rao: Je voulais seulement aborder le point qui a été soulevé en ce qui a trait aux herbes médicinales chinoises et à la façon de les réglementer.

J'ai eu la chance de participer à un récent forum—c'était il y a quelques mois en Inde—dans le cadre d'une initiative parrainée par le gouvernement du Canada portant sur les plantes médicinales. Nous faisions partie d'un groupe qui comptait un grand nombre de médecins pratiquant l'ayurvédisme, et nos visions s'opposaient. Nous avons commencé par essayer de parler de la vraie question. Nous avons dit que cela ne pouvait être fait, qu'on ne pouvait pas nous dire comment tester nos produits. À la fin de la journée, nous en sommes venus à un ensemble d'éléments communs—ce n'était pas des règlements—sur lesquels nous étions d'accord. Peu importe le côté de la table où nous étions assis, nous étions tous d'accord pour dire que la pureté d'un produit était importante. Certains types d'études qui doivent être réalisées pour documenter ces choses ont de l'importance.

Il s'agit d'un défi de taille, mais pour répondre à ce que M. Myers a aussi soulevé dans son témoignage la dernière fois, je crois que c'est réalisable. Je crois qu'il est possible d'élaborer ces lignes directrices, mais le défi demeure.

La présidente: Avez-vous un rapport sur ce voyage?

Mme Aileen Carroll: Pouvez-vous nous le faire parvenir?

Dr Venket Rao: C'est pour bientôt. Aussitôt que le rapport sera publié, je vous en ferai parvenir une copie madame la présidente.

La présidente: Oui, particulièrement vos conclusions. Si vous pouviez le faire parvenir au greffier le plus tôt possible...

Dr Venket Rao: Bien sûr.

La présidente: Monsieur Boychuk, nous avons atteint notre limite de temps, nous allons donc...

M. Andrew Boychuk: Je n'ai qu'une brève question pour le Dr Anderson.

Vous avez mentionné que le tryptophane était dangereux. Je tiens cela d'un éminent médecin américain qui fait des recherches dans le domaine des acides aminés...

La présidente: Puis-je vous demander de parler en direction de la présidente et non pas indirectement, de cette façon.

M. Andrew Boychuk: ... et il prétend que les seuls décès dus au tryptophane résultent d'un lot déficient qui a été importé de la Chine. C'est tout. Je pense que ce serait assez difficile de qualifier cette raison de suffisante pour interdire un très bon supplément.

La présidente: Oui, vous avez déjà dit cela quelques fois.

C'est au comité de décider s'il permet à madame Wasylycia-Leis de poser sa question. Il est midi. Peut-elle poser sa question?

Mme Elinor Caplan: Elle peut la poser, mais nous ne nous attarderons pas.

Des membres: Oh, oh!

La présidente: Madame Wasylycia-Leis.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Je m'excuse de n'avoir pu assister à la présentation de vos mémoires, mais j'ai parcouru les documents et je veux soulever très rapidement une question qui je crois bien n'a pas été abordée. C'est en rapport avec la capacité, à la fois au sein du gouvernement et en partenariat avec le gouvernement, de faire ce qui est décrit dans vos documents. Ce serait pour assurer la salubrité, l'efficacité et la qualité de tous ces produits et pour promouvoir la valeur nutritionnelle de certains produits.

Nous sommes présentement devant la situation où le Bureau de recherche sur les médicaments subit des restrictions, alors que le Bureau de recherche sur les aliments fait, quant à lui, l'objet d'un moratoire sur la question des réductions budgétaires. Selon ce que je comprends de vos documents, il serait nécessaire de s'assurer d'avoir du personnel efficace et compétent au sein du gouvernement dans le domaine des médicaments, des aliments et des produits naturels, à la fois en terme de salubrité et d'efficacité et en terme de nécessité de promouvoir des solutions de rechange en matière de santé dans notre société d'aujourd'hui.

• 1205

Quelle est votre position sur la situation qui prévaut à la Direction générale de la protection de la santé? Les conséquences peuvent être sérieuses pour ce que nous faisons en tant que comité relativement aux produits thérapeutiques.

Dr Harvey Anderson: Le point qu'il vous faut reconnaître est que le talent scientifique dont nous disposons au pays est limité. Je pourrais commenter ce qui se passe au sein du gouvernement, mais il me semble que nous pouvons travailler en partenariat. D'autres pays utilisent efficacement des organismes consultatifs pour prendre des décisions et arrivent ainsi à franchir le processus de façon rapide et éclairée.

Nous devons travailler ensemble au Canada. On ne peut compter seulement sur le gouvernement, l'Université de Toronto, UBC ou peu importe pour construire l'expertise globale nécessaire. Il nous faut des mécanismes concernant ce que la Dre Armstrong a mentionné: réunir les praticiens et les faire participer au processus de prise de décision. D'autres pays y sont arrivés. Il n'est pas nécessaire que tout soit fait à l'interne.

Mme Judy Wasylycia-Leis:

[Note de la rédaction: Inaudible]

Dr David Jenkins: Jusqu'à un certain point, nous le faisons déjà. Nous avons des comités formés d'experts. Ces personnes proviennent des groupes universitaires ou de groupes de services généraux. Nous apportons déjà notre contribution.

Comme l'a dit le Dr Anderson, si nous pouvons poursuivre ce processus, nous sommes capables de trouver les ressources. Je ne pense pas que vous puissiez diminuer les ressources, mais il est peut-être possible d'exiger aussi un genre de cotisation raisonnable, de façon à ce que l'on puisse recouvrer les coûts de certaines de ces activités.

La présidente: Merci beaucoup, docteur Jenkins.

Mme Aileen Carroll: Je veux juste dire quelque chose très brièvement. Je suis habituellement un membre très discret ici, mais il m'arrive parfois d'être très emballée, et l'avant-midi qui se termine a été vraiment emballant.

J'espère que ce dernier point fera partie de nos notes et sera présent à nos esprits, même si nous sommes moins nombreux et que c'est la fin de la journée. Les partenariats qui existent déjà ont toutes les possibilités de réussir. La reconstruction de l'interne n'est pas nécessairement la voie à suivre.

Rien ne surclasse mon audace pour ajouter un post-scriptum après les savants médecins, mais j'adore faire cela.

La présidente: Nous vous remercions infiniment d'avoir participé à nos audiences.

La séance est levée à l'invitation de la présidente.