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HEAL Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON HEALTH

COMITÉ PERMANENT DE LA SANTÉ

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 10 mars 1998

• 0908

[Traduction]

La présidente (Mme Beth Phinney (Hamilton Mountain, Lib.)): La séance est ouverte. C'est la vingt-quatrième séance du Comité permanent de la santé. Nous étudions les produits de santé naturels.

Bienvenue à nos témoins de ce matin. Nous accueillons M. Stephen Case, éducateur en santé et représentant de la revue Alive. Je pense que nous en avons des numéros. De l'organisation Ma Santé, Mes Droits Inc., nous accueillons Ronald Dugas et Gertrude Whelan; et de Nutri-Chem, Kent MacLeod et Debbie Clements. Nous allons d'abord entendre M. Case.

Plus votre exposé sera court, plus les membres auront de temps pour vous poser des questions.

M. Stephen Case (témoigne à titre personnel): C'est très bien.

La présidente: Merci.

M. Stephen Case: Bonjour, madame la présidente, mesdames et messieurs. Je suppose qu'il y a quatre...

La présidente: Félicitations pour votre ponctualité. Tous les témoins sont à l'heure ce matin.

M. Stephen Case: Merci. Je tiens à remercier tous les participants et les invités. J'aimerais aussi remercier Grant Hill qui a proposé mon nom afin que je puisse comparaître aujourd'hui en tant que témoin, Sharon Scullion qui s'est occupée de mes réservations de vol et d'hôtel, et Roger Préfontaine qui malgré un horaire très chargé a pris le temps de répondre à mes questions, et merci bien sûr aux attachés de recherche.

• 0910

Je prends la parole aujourd'hui à titre de consommateur et de chercheur indépendant du domaine de la santé.

En outre, mon employeur m'a donné l'autorisation d'agir en tant que porte-parole du lectorat du magazine Alive, qui informe les consommateurs sur les produits de santé naturels depuis près de 25 ans, et du Healthy Living Guide. Je crois que vous en avez tous des exemplaires. Ces deux magazines nationaux comptent au total environ 1,5 million de lecteurs. Je suis honoré de parler au nom de ces derniers, mais j'estime qu'il serait irresponsable de compromettre l'entreprise de mon employeur du fait des répercussions que pourraient avoir les déclarations bien franches que je m'apprête à faire, si bien qu'après y avoir bien réfléchi, j'ai décidé de prendre la parole à titre personnel.

Ma principale préoccupation tient au fait que Santé Canada et la Direction générale de la protection de la santé mettent inutilement la vie des Canadiens en danger en allouant leurs ressources à une sur-réglementation des produits de santé naturels qui présentent peu de risques au lieu de s'occuper des milliers de décès attribuables à la consommation de médicaments pharmaceutiques à haut risque. Pour étayer ma déclaration, permettez-moi de dire ce qui suit.

Les produits de santé naturels sont des produits à faible risque. Ils incluent des aliments courants, des acides aminés, des vitamines et des minéraux essentiels, des herbes, des épices et des préparations homéopathiques. Tous ces produits sont traditionnellement utilisés, et certains le sont depuis des milliers d'années. Les fruits, les légumes, les grains, les tubercules, les plantes courantes, les herbes douces, les acides gras essentiels, les vitamines, les minéraux et les enzymes sont tous des aliments ou des concentrés alimentaires. Ils devraient par conséquent toujours être réglementés en tant qu'aliments en vertu de la Loi sur les aliments et drogues parce qu'ils sont essentiels à la vie humaine.

Selon Statistique Canada, en 1995 seulement, 193 personnes sont mortes de déficiences sur le plan nutritionnel. La majorité de ces décès sont survenus en Ontario et au Québec.

Les remèdes homéopathiques et les remèdes à base d'herbes peuvent en fait être réglementés en tant qu'aliments en vertu des articles 4 et 5 de la Loi sur les aliments et drogues. Adéquatement appliquées, ces deux dispositions protégeront dans une large mesure les Canadiens.

Ces produits devraient être largement accessibles, et les étiquettes devraient indiquer les numéros de lot, les instructions, la posologie, les usages traditionnels et les contre-indications connues, les précautions à prendre et les mises en garde, surtout pour les femmes enceintes et les enfants.

Il faut bien comprendre que ces produits sont naturels. Il ne s'agit pas de médicaments de synthèse. Ils ne sont pas assortis de longues listes de contre-indications et, par conséquent, il ne faudrait pas exiger d'identification numérique de la drogue. Compte tenu des écrits anciens et de l'usage traditionnel, ces produits naturels devraient être présentés comme tels à moins de s'être révélés nocifs si on les utilisait comme il est suggéré— présomption d'innocence.

La Loi sur les aliments et drogues doit être modifiée pour définir le mot drogue afin d'exclure les produits de santé naturels.

Les Canadiens meurent par milliers pour avoir absorbé des médicaments d'ordonnance à haut risque qui sont pourtant réglementés. Les médicaments d'ordonnance régis par la Direction générale de la protection de la santé de Santé Canada tuent des Canadiens et demeurent ultimement responsables de ces décès. La publication de Statistique Canada intitulée Causes de décès fait état de plus de 8 500 décès attribuables à la consommation de médicaments pharmaceutiques entre 1988 et 1995. Pour la seule année 1995, le total dépasse 1 794 morts attribuables à l'absorption de médicaments pharmaceutiques. C'est considérable.

Je tiens à souligner que ces décès ne sont pas le résultat de suicides, comme on peut le constater en lisant les définitions de l'Organisation mondiale de la santé à la dernière page du document de Statistique Canada. Il y a beaucoup d'autres morts qui résultent de la prise de médicaments pharmaceutiques et qu'on cache derrière des noms spécifiques et des réactions allergiques, et plus je regarde cela de près, plus j'en trouve.

• 0915

En 1995, la Colombie-Britannique a enregistré 181 empoisonnements médicamenteux accidentels. C'est le plus grand nombre au Canada. Le document de statistiques vitales que je vous ai remis montre qu'en 1996, ce nombre a grimpé à 267 décès. C'est une augmentation de 69 p. 100 en un an.

En outre, selon Statistique Canada et la Direction générale de la protection de la santé, il n'y a eu aucun décès attribuable à la consommation de produits naturels alors qu'il y en a eu 8 512 attribuables à la consommation de produits pharmaceutiques entre 1988 et 1995.

Quand allons-nous nous réveiller? C'est incroyable. Pour citer Santé Canada, notre mission est d'aider les citoyens canadiens à rester en bonne santé et à améliorer leur état de santé. Il est tout à fait effarant de voir que nos précieuses ressources de santé servent à étudier la possibilité de réglementer davantage les produits naturels à faible risque quand d'année en année des milliers de nos concitoyens meurent inutilement pour avoir consommé des produits pharmaceutiques à haut risque.

Je recommande donc de lancer immédiatement une vaste enquête publique sur la Direction générale de la protection de la santé et de prendre immédiatement des mesures en ce qui concerne les produits à haut risque qui ont causé et continuent de causer des morts inutiles. Ces produits pharmaceutiques doivent peut-être être retirés du marché sur-le-champ. Je crois aussi fermement que nous devrions rouvrir des laboratoires gouvernementaux pour tester des produits à haut risque et procéder à une analyse aléatoire de tous les produits. Après quoi, si le gouvernement insiste toujours pour qu'on réglemente les produits naturels, je recommanderai que nous nous en tenions à l'annonce que le ministre de la Santé, l'honorable Allan Rock, a faite le 4 octobre et que nous procédions à un examen public complet. Nos concitoyens le méritent et si l'on extrapole les données de 1995, on peut prévoir que d'ici la fin de la journée cinq autres Canadiens mourront.

Merci beaucoup.

La présidente: Merci.

J'aimerais préciser un point aux fins du compte rendu. Les instructions que nous suivons sont contenues dans la lettre de M. Rock. Dans cette lettre, M. Rock ne parle pas d'alourdir la réglementation. Il propose d'examiner ce qui existe et de voir si nous pensons que ces règles sont adéquates. Peut-être y aura-t-il moins de règles, qui sait, quand nous aurons terminé, et c'est exactement pourquoi nous sommes réunis aujourd'hui. Nous ne sommes pas ici pour imposer de nouveaux règlements.

Nous procédons à un examen public. La seule raison pour laquelle nous ne voyageons pas, c'est qu'un parti représenté au comité a décidé qu'il ne souhaitait pas que nous nous déplacions. Cet exercice se veut donc un examen public, et nous sommes désolés s'il n'en est pas ainsi.

Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.): On pourrait peut-être demander au Dr Hill pourquoi nous ne nous déplaçons pas.

M. Stephen Case: D'accord. Des gens se sont étonnés que je sois au courant. On m'a demandé comment j'avais été informé.

La présidente: Nous l'avons largement annoncé.

M. Stephen Case: Très bien.

La présidente: Nos prochains témoins sont Ronald Dugas et Gertrude Whelan de l'organisation Ma Santé, Mes Droits.

[Français]

M. Ronald J. Dugas (président national, Ma Santé, Mes Droits Inc.): Bonjour, madame la présidente. Je vous remercie de nous donner l'occasion de comparaître devant le Comité permanent de la santé.

[Traduction]

Je m'appelle Ron Dugas, et je suis le président de Ma Santé, Mes Droits. Je fais également partie du Comité consultatif sur les produits de santé naturels. J'aimerais vous présenter Trudy Whelan, qui est la directrice de Ma Santé, Mes Droits.

Ma Santé, Mes Droits repose en somme sur les principes directeurs suivants: le droit à une information complète pour pouvoir en tant que consommateur responsable faire des choix éclairés en matière de soins de santé; le droit d'accès à tout type de produit ou de service de soins de santé sûr; et enfin le droit de se faire entendre relativement à l'élaboration et à la mise en application de la politique gouvernementale en matière de soins de santé.

Ma Santé, Mes Droits est constitué en corporation en vertu d'une charte fédérale et compte plus de 6 000 membres.

• 0920

La question des produits de santé naturels ne se limite pas à celle de savoir qui peut en produire, en acheter ou en vendre. Les questions que nous portons à votre attention ne sont pas que de simples questions commerciales, mais d'importantes questions de vie et de liberté qui sont garanties par la Charte et la Constitution. Elles ont particulièrement trait à la liberté de choix du consommateur et à des questions de soins de santé.

Nous nous adressons à vous au nom des consommateurs de services de santé qui choisissent d'autres façons de se soigner et qui, de plus en plus, prennent en main la responsabilité de leur propre bien-être. Ce choix leur permet non seulement d'améliorer leur qualité de vie et de prolonger, mais il présente également l'avantage d'alléger considérablement le fardeau budgétaire des gouvernements fédéral et provinciaux et des autorités locales.

Depuis 1992, plus de 500 pages de règlements se sont ajoutés à la Loi sur les aliments et drogues, qui ne compte elle-même qu'une vingtaine de pages. Ces règlements n'ont pas été rigoureusement assujettis à la procédure ou à des examens parlementaires.

La LAD ne fait aucune mention des produits naturels pour la santé. On n'y trouve que les termes «aliments» et «drogues», sans aucune autre nuance. Les définitions d'aliments et de drogues de la loi sont entièrement subjectives. Un produit est considéré comme un aliment selon la façon dont il est employé. Il en va de même pour les drogues, dont la définition repose sur l'utilisation qui en est faite ou les allégations à visées thérapeutiques qui sont présentées à leur égard, et non sur leurs ingrédients ou sur leurs effets. Le but visé, et non les faits, constitue le fondement de ces définitions.

Devant les tribunaux, ce qu'une personne considère habituellement comme un aliment devient une drogue lorsqu'on lui attribue des vertus curatives, ou lorsque son usage est recommandé pour soigner certaines maladies.

Cette définition erronée fait en sorte que des aliments sont transformés en drogue à des fins de réglementation. Une allégation à visée thérapeutique honnête et franche concernant des aliments inoffensifs et sains peut devenir un crime aux yeux du gouvernement fédéral, en raison des exigences réglementaires établies.

Récemment, dans de nombreux pays, notamment aux États-Unis et au Japon, on a assisté à un revirement dans ce domaine: en effet, ces pays qui auparavant voyaient d'un mauvais oeil les allégations à visée thérapeutiques concernant des produits naturels pour la santé, ont saisi que l'étiquetage et la publicité de ces produits constituent un mécanisme utile de promotion de la santé, et qu'il faudrait approuver cette démarche.

Aux États-Unis, la Dietary Supplement Health and Education Act autorise expressément l'approbation, l'étiquetage et la publicité des compléments alimentaires. De plus, la Nutrition Labelling and Education Act des États-Unis, qui régit l'étiquetage, permet aux consommateurs de connaître les propriétés de certaines catégories particulières d'aliments et de produits.

Au Japon, la réglementation favorise la création et la mise en marché d'aliments fonctionnels. C'est ce que l'on appelle les aliments à usage médical déterminé.

La tendance à l'échelle internationale indique que les autorités se préparent à adopter une approche à la réglementation qui mettrait l'accent sur la sécurité et la qualité des remèdes à base de plantes. Nous sommes en faveur de cette formule qui fixerait des normes de sécurité et créerait un mécanisme permettant d'en garantir le respect.

Il devrait y avoir également des normes de qualité assorties des garanties voulues, y compris l'assurance que ce qui figure sur l'étiquette correspond bien au contenu du contenant.

Pour ce qui est de déterminer l'efficacité des remèdes à base de plantes, les autorités à l'échelle internationale ont tendance à s'assouplir. Elles reconnaissent les usages traditionnels de ces produits et approuvent les allégations à visées thérapeutiques, allégations fondées sur des sources documentées reconnues.

• 0925

En ce qui concerne l'efficacité du médicament, il faut pour des raisons évidentes l'évaluer. Les allégations doivent toujours être comparées aux risques que présente n'importe quel médicament; ces risques doivent être atténués grâce à des renseignements supplémentaires ou à une mise en garde.

En revanche, il est raisonnable d'affirmer que la majorité des produits de santé naturels, qui présentent très peu de risque, se sont avérés ne pas être nocifs et n'ont pas d'effets secondaires semblables à ceux des médicaments. Ceux-ci ne devraient pas être assujettis aux mêmes normes d'efficacité.

De fait, en 1992, l'Organisation mondiale de la santé a adopté des lignes directrices relatives à l'examen des remèdes à base de plantes. Le principe retenu est celui qui veut que les produits de santé naturels qui n'ont pas d'effets nocifs avérés ne devraient pas être régis par un cadre réglementaire très restrictif.

Ma Santé, Mes Droits est fermement convaincu que l'État ne devrait pas se préoccuper du niveau d'efficacité d'un produit, car l'efficacité est un concept subjectif, dont l'interprétation réside dans nos croyances et nos libertés individuelles.

Tenter de prouver à tout prix l'efficacité d'un produit ou d'une procédure (la plupart du temps de pratiques non conventionnelles) peut mener à une interdiction discriminatoire du produit, plutôt qu'à l'établissement d'un processus de protection du public. Il n'y a qu'un pas entre protéger la population et nier ses droits.

Le consommateur canadien s'exaspère de voir les autorités lui imposer son point de vue étroit alors que c'est lui qui paye pour ces produits sans qu'il en coûte quoi que ce soit aux contribuables. Il est inconcevable de permettre aux consommateurs canadiens de traverser la frontière pour y acheter des produits naturels pour la santé à des fins personnelles, produits qui seraient déclarés dangereux s'ils avaient été achetés au Canada.

Ces mesures sont arbitraires, injustes et coûteuses pour le consommateur canadien et devraient être éliminées. Elles pénalisent le consommateur, nuisent à la compétitivité internationale et rendent le marché canadien moins intéressant à ceux qui voudraient investir dans la recherche ou le développement de produits de santé naturels ici.

La Direction générale de la protection de la santé manque totalement d'objectivité. Son personnel est composé de professionnels de la santé, conseillés par d'autres professionnels de la santé qui n'ont aucune formation digne de ce nom dans le domaine des produits naturels pour la santé.

À preuve, voici ce que Dann Michols, directeur général du Programme des produits thérapeutiques a déclaré devant le comité parlementaire lors de sa comparution du 2 décembre 1997:

    Il y a 750 personnes qui s'occupent de ces produits au sein du Programme des produits thérapeutiques; la plupart sont des scientifiques et des agents médicaux qui ont des connaissances en toxicologie, en chimie, en biologie, en sciences médicales, etc. Par ailleurs, lorsque nous avons besoin de renseignements plus spécialisés, nous nous adressons à l'extérieur.

Cela ressemble-t-il à des gens qui comprennent la nature et les applications des produits de santé naturels? Comment peuvent- ils réglementer impartialement un secteur entier auquel ils connaissent très peu de choses?

Les coûts du système de santé actuel sont astronomiques et poursuivent rapidement leur ascension. Il est évident que les budgets limités du gouvernement ne permettent plus de maintenir le système dans sa forme actuelle. Il est donc essentiel de le transformer, de façon qu'il puisse offrir aux Canadiens des soins de santé plus efficaces, et plus abordables.

• 0930

À la lumière de ces considérations, nous souhaiterions soumettre les recommandations suivantes au Comité permanent de la santé. La première est la pierre angulaire de toute l'opération, à savoir que la Loi sur les aliments et drogues et son Règlement soient modifiés de façon à établir une catégorie distincte pour les produits de santé naturels.

Deux mesures distinctes doivent être prises. D'abord, à titre intérimaire, nous proposons une modification du règlement en vertu de l'alinéa 30j) de la loi, qui se lit comme suit:

    exempter un aliment, une drogue, un cosmétique ou un instrument de l'application, en tout ou en partie, de la présente loi et fixer les conditions de l'exemption;

Je cite la partie de la Loi qui porte sur le Règlement.

À plus long terme, nous proposons une modification à la loi elle-même. Nous proposons que le mot «drogue» soit redéfini dans la catégorie des produits de santé. Nous proposons également que les produits de santé soient subdivisés en trois catégories: les produits pharmaceutiques, les produits de santé naturels et les aliments fonctionnels.

Je me souviens des témoignages où le Dr Bennett a demandé à Dann Michols ce qui nous a amenés dans ce pétrin. Pour moi, c'est évident. C'est la loi; elle fait 20 pages. Voici le Règlement. Regardez-moi l'épaisseur. Il est temps que quelqu'un passe en revue la loi pour corriger certains des termes qui y figurent.

Deuxièmement, nous recommandons qu'une structure permanente distincte dotée de pouvoirs de décision soit créée et qu'elle soit composée de personnes ayant les connaissances, l'expérience et la compréhension voulues des produits de santé naturels.

Troisièmement, nous recommandons que l'industrie des aliments naturels pour la santé soit autorisée à prêter des propriétés thérapeutiques à ses produits lorsqu'il est raisonnable de croire qu'elles sont étayées par des preuves scientifiques, historiques, ethniques et traditionnelles, à la condition que ces allégations ne soient ni fausses, ni trompeuses.

Quatrièmement, nous recommandons qu'une série d'exigences sur l'étiquetage soit établie afin d'informer davantage les consommateurs et de s'assurer de la qualité et du contenu des produits de santé naturels.

Cinquièmement, nous recommandons que l'annexe A de la Loi sur les aliments et drogues soit éliminée, car elle est périmée et ne reflète plus les produits maintenant disponibles sur le marché. Elle empêche également le consommateur de faire un choix éclairé.

Certaines conditions mineures sont mentionnées à l'annexe A, par exemple l'anxiété, la dépression et la nausée. On y remédie fort aisément par des changements dans le mode de vie, le régime, l'exercice et les suppléments. On court aussi un très grand risque en inscrivant à l'annexe A une maladie dans la mesure où on peut aussi restreindre involontairement l'identification des informations que l'on peut juger conformes aux intérêts de la santé publique. Par exemple, le fait d'inscrire une maladie du foie à l'annexe A empêche la promotion d'un vaccin pour l'hépatite.

Sixièmement, nous recommandons que l'accès aux produits de santé naturels déterminés comme dangereux soit limité proportionnellement à leur effet. Dans certains cas, un simple avertissement sur l'étiquette suffirait.

Septièmement, nous recommandons que les produits de santé naturels qui sont vendus dans d'autres pays, plus particulièrement aux États-Unis, soient disponibles au Canada.

Huitièmement, nous recommandons que toutes les modifications, toutes les révisions ou tous les ajouts au Règlement de la Loi sur les aliments et drogues soient examinés par le Comité permanent de la santé au moins tous les quatre ans.

• 0935

Neuvièmement, nous recommandons que Santé Canada coopère pleinement avec l'industrie et les groupes de consommateurs intéressés en procédant à des consultations auprès de leurs représentants avant d'envisager tout changement au Règlement, à son interprétation ou à sa mise en application.

Merci. Nous sommes disposés à répondre à vos questions.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Dugas.

Nous allons maintenant entendre Ken MacLeod de Nutri-Chem.

M. Kent MacLeod (président, Nutri-Chem): Merci de m'avoir invité. Je suis ici en ma qualité de pharmacien. Je possède une pharmacie ici même à Ottawa. Je vends aussi des produits aux États-Unis qui sont réglementés en vertu de la DSHEA, la Dietary Supplement Health and Education Act, et la Loi sur la réforme des soins de santé de la FDA. Je suis aussi président d'une installation de recherche qui teste des marqueurs capables de retracer des dommages oxydatifs dans diverses entités morbides.

Essentiellement, ce qui se passe avec les nutraceutiques, c'est-à-dire les aliments fonctionnels, les suppléments vitaminiques et minéraux au Canada, c'est que la loi les considère comme des médicaments contrairement aux États-Unis où la loi les considère comme des aliments sans la moindre distinction ou zone grise.

Je vais vous citer un excellent rapport commandé par Agriculture et Agroalimentaire Canada et publié en décembre 1995. Il s'agit d'une analyse comparative du cadre réglementaire de la création et de la commercialisation des aliments fonctionnels au Canada, au Japon, dans l'Union européenne et aux États-Unis. C'est un excellent rapport. J'espère que les membres du comité l'ont.

La présidente: Ça va, nous l'avons.

M. Kent MacLeod: Ce rapport approfondi sur l'état de l'industrie nutraceutique concluait:

    Au Canada, le cadre réglementaire est tellement restrictif que la création d'une industrie de l'alimentation fonctionnelle ou même d'aliments fonctionnels au Canada sera sérieusement entravée, si non exclue tout à fait.

Cette distinction entre aliments et drogues a causé, comme nous l'avons dit, une foule de situations absurdes auxquelles je suis confronté tous les jours en ma qualité de pharmacien. Je vais vous donner un exemple. Il s'agit des produits qui sont acceptés si l'on ne dit pas aux Canadiens ce qu'ils contiennent, mais qui ne sont pas acceptés si on leur dit ce qu'ils contiennent.

Par exemple, il y a le DHA, qui est en fait un composant normal du lait maternel. Des études européennes ont confirmé que des enfants nés prématurément et ayant reçu des suppléments de DHA ont deux fois le taux de survie, la moitié moins de crises cérébrales et autres séquelles... l'infirmité motrice cérébrale. Fait également intéressant, c'est que cette déficience de cet acide gras essentiel contribue au trouble déficitaire de l'attention, malaise qui comporte une foule de conséquences pour les Canadiens.

C'est également un composant qu'on trouve normalement dans les huiles marines, les huiles de thon et de foie de morue de la côte Est, mais chose intéressante, si je détermine la teneur en DHA d'une huile de foie de morue, d'une huile de saumon ou de thon, j'y trouve une teneur tellement forte en DHA qu'on la considère en fait comme illégale au Canada et comme un nouveau médicament. Mais si je donne un supplément de poisson au consommateur sans lui dire ce qu'il y a dans le produit, c'est légal parce qu'il s'agit d'un aliment.

Ce qui nous mène aussi à des situations où ces informations sur le DHA ou ses applications et ses conséquences sont accessibles à n'importe quel consommateur canadien, qu'il se serve d'Internet, d'une base de données virtuelles, ou des piles de périodiques pour consommateurs qui font état des recherches effectuées partout dans le monde et qui constatent que le DHA est très important.

La présidente: Monsieur MacLeod, pouvez-vous m'expliquer quelque chose? On a entendu parler du DHEA, qui est un stéroïde, je crois. Vous parlez du DHA. Pouvez-vous nous expliquer la différence, s'il vous plaît, afin que l'on sache bien à quoi s'en tenir.

• 0940

M. Kent MacLeod: Le DHA est un acide gras essentiel oméga 3, qui est, je le répète, un composant normal du lait maternel. On le trouve dans divers poissons. Il peut provenir aussi de sources végétales.

En fait, le DHEA est un précurseur; il s'agit de l'acide docasahexanoïque. Le DHA, c'est le dihydroandrosterone, un précurseur des hormones stéréoïdiennes normales, soit l'estrogène et la testostérone. Ce sont deux choses tout à fait différentes.

Donc ce qui se passe, bien sûr, c'est que ces consommateurs disposent maintenant de ces informations, qu'ils peuvent trouver n'importe où. Donc le consommateur entre chez moi et dit: «Vous savez, on entend beaucoup parler du DHA, et mon enfant a un trouble déficitaire de l'attention», ou alors on me dit: «Je n'allaite pas, mais je sais qu'il y a des études qui montrent que le fait de donner du DHA aux bébés qui ne sont pas allaités est très bon pour la santé; pouvez-vous me donner ce DHA et me confirmer que c'est bien ce que j'ai?» Eh bien, on répond à ce consommateur que non. Mais ce même consommateur peut commander ce produit par la poste des États-Unis, le faire entrer chez nous sous une étiquette conforme, sans le moindre problème.

Bien sûr, je me suis renseigné auprès de la Direction générale de la protection de la santé et je lui ai demandé pourquoi je ne pouvais vendre à mon consommateur canadien un produit quand il sait exactement combien de DHA il reçoit, et comment se fait-il que ce consommateur peut commander ce produit par la poste, comme il veut, ou aller en chercher lui-même aux États-Unis? La Direction me répond bien sûr que c'est un problème de douanes, que ce n'est pas son problème.

Bien sûr, encore là, même quand on lit le règlement, on s'aperçoit que nous sommes le seul pays qui a ce genre de problème... avec ces nouveaux médicaments qui se retrouvent dans le Code criminel. Donc, techniquement, j'imagine, même en vertu de la loi telle qu'elle est libellée, de ces quatre pays, nous sommes le seul qui criminalise cette question. Ce qui se passe, c'est que ces consommateurs qui importent le DHA... ou si je leur disais combien de DHA ils reçoivent, j'imagine que nous serions tous des criminels, chose intéressante.

Pour les pharmaciens aussi... Pour toute substance que l'on ingère se pose toujours un problème fondamental, et c'est ce qu'on appelle le ratio avantage-risque. Y a-t-il un risque à consommer ce produit? Quels sont les avantages reconnus?

La consommation de ces nutraceutiques pose une question très intéressante dans la mesure où ils permettent des interventions thérapeutiques ou préventives pour des maladies dégénératives chroniques avec lesquelles nous sommes aux prises, nous, Canadiens, avec très peu de désavantages ou de risques.

Prenons la maladie d'Alzheimer, par exemple, une maladie dont l'intensité s'accroîtra dans les années à venir. Aujourd'hui, 10 p. 100 des Canadiens de plus de 65 ans en sont atteints, ce qui entraîne des conséquences désastreuses sur le plan des finances et de la qualité de la vie pour ces personnes et leur famille. Il existe en ce moment trois traitements dont l'efficacité est prouvée dans le contrôle de la maladie d'Alzheimer. Il s'agit de la vitamine E, du ginkgo, une plante médicinale, et d'un médicament appelé Aricept.

D'ailleurs, la vitamine E fait maintenant partie du traitement contre la maladie d'Alzheimer de l'American Psychiatric Association. L'étude qui a prouvé les effets bénéfiques du ginkgo a paru, je crois, dans le Journal of the American Medical Association. Essentiellement, moi, comme fabricant, je ne peux au Canada publiciser les effets bénéfiques de deux des trois traitements les plus efficaces contre la maladie d'Alzheimer.

Si, comme fabricant, je commercialisais de la vitamine E en disant que cela pourrait contribuer au maintien de la santé du cerveau, je commettrais une infraction au Canada.

Pour déterminer les effets de ces substances, j'ai fait deux ou trois choses. J'ai examiné l'étude qui a paru dans le Western Journal of Medicine—c'est à la page 3 de mon mémoire—dans le cadre de laquelle on a examiné, aux États-Unis, la réduction possible des coûts en soins médicaux et hospitaliers pour le traitement de diverses maladies dont il a été prouvé qu'on pouvait les prévenir avec de l'acide folique et des multivitamines, notamment, telles que les maladies coronariennes, les malformations du tube neural et le faible poids à la naissance. Ce n'est là que quatre ou cinq des maladies qu'on a examinées dans cette étude.

• 0945

À l'heure actuelle, un examen rapide des études menées à ce jour nous prouve que la vitamine E est efficace contre la maladie d'Alzheimer et que les multivitamines avec B6 et acide folique entraînent une réduction de 24 p. 100 du risque de maladies coronariennes chez les femmes. Les travaux du Dr Chandra, à Terre- Neuve, nous indiquent que, chez les personnes âgées et les autres dont le système immunitaire est affaibli, on peut réduire le nombre de jours de maladie de moitié. D'autres effets à grande échelle montrent une baisse radicale du taux de cancer par suite de la prise de nutriments multiples.

Si, parallèlement, on examine les risques, on constate que la situation est intéressante. Je répéterai ici une partie des remarques déjà faites par les autres témoins.

Étant pharmacien, je sais qu'un nombre important de décès sont causés par les effets secondaires des produits pharmaceutiques. Encore une fois, je reprends les données de l'American Association of Poison Control Centres qui ont paru dans un article du JAMA. Les maladies provoquées par les effets secondaires des médicaments, les maladies iatrogènes, causent plus de 100 000 décès chaque année aux États-Unis. Or, les herbes et les vitamines ne provoquent certainement pas plus de 10 décès chaque année, décès qui sont tous associés à un surdosage toxique par suite d'une ingestion accidentelle.

C'est une constatation importante, surtout si on tient compte du fait que plus de 50 p. 100 de la population consomme un supplément quelconque. Si ces suppléments étaient nocifs, nous en aurions la preuve. Manifestement, ce n'est pas le cas; au contraire, on est maintenant en mesure de sensibiliser les gens aux avantages éventuels de certains de ces suppléments.

J'examine cette question de la réglementation depuis des années, et j'ai vite constaté qu'une des plus grandes menaces à la santé et à la qualité de vie des Canadiens semble être l'organisme de réglementation qui en a la responsabilité.

À titre de président d'un laboratoire de recherche, je peux vous dire que nous avons reçu l'une des plus importantes subventions jamais accordées par le Conseil national de recherches. Nous examinons diverses maladies qui ont des liens avec la maladie d'Alzheimer. Nous examinons le cas de personnes trisomiques et avons constaté qu'elles souffrent presque toutes de la maladie d'Alzheimer dans la quarantaine ou la cinquantaine. Nous tentons de trouver des marqueurs.

Nous savons que la vitamine E est très importante. Le ginkgo, un antioxydant, et la vitamine E surtout protègent les lipides contre l'oxydation, empêchent les lipides du cerveau de rancir. Nous mesurons les quantités de membranes du cerveau qui sont oxydées chez les enfants trisomiques et les comparons aux groupes de contrôle. Notre projet actuel nous a permis de constater que les lipides des enfants trisomiques sont beaucoup plus endommagés; cela nous amène à la deuxième phase, au cours de laquelle nous tenterons de déterminer si la vitamine E permet de réduire l'oxydation des lipides et, par conséquent, de prévenir la maladie d'Alzheimer.

En outre, le Johns Hopkins' National Cancer Institute nous a commandé, à contrat, une étude préliminaire sur la détection précoce de la maladie d'Alzheimer, ce qui signifierait que nous n'aurions pas à attendre 20 ou 30 ans les résultats d'essais en double anonymat et que nous pourrions envisager de prévenir cette maladie avec des nutriments.

• 0950

Les contribuables canadiens financent ces recherches. Il faut aussi une somme considérable d'argent provenant d'investisseurs privés canadiens. Notre entreprise est canadienne. Tous nos scientifiques sont canadiens. Dans le cadre réglementaire actuel, nous ne pouvons faire la promotion de nos résultats auprès des Canadiens. Tout notre travail, tout ce que nous faisons, ne sera mis à profit qu'à l'étranger, aux termes de la réglementation, car ce n'est qu'à l'étranger que nous pouvons diffuser les résultats de nos études sans crainte d'être censurés ou d'être accusés d'avoir commis une infraction, même si tous les investissements, tous les intéressés sont canadiens. Tous les scientifiques qui participent à ces recherches sont canadiens.

C'est une source de grande frustration pour moi que de savoir que, dans le cadre réglementaire très limitatif qui existe au Canada, quelles que soient nos constatations, peu importe l'enthousiasme qu'elles suscitent dans le monde entier, nous ne pouvons les mettre à la disposition des Canadiens.

Les mesures que je propose sont énoncées dans mon mémoire. Il faudrait notamment classer les nutriments dans les catégories des aliments ou des produits nutraceutiques, et permettre les attributions de propriétés pharmaceutiques fondées sur des preuves. Il est quand même étrange de devoir réclamer une reconnaissance fondée sur des preuves.

En ce qui concerne l'autoréglementation du secteur, encore une fois, aux États-Unis et au Japon... aucun gouvernement ne veut dépenser davantage et accroître le fardeau. Il faudrait permettre au secteur de s'autoréglementer et d'adopter des contrôles dans un cadre de collaboration.

N'oublions pas que l'industrie des produits nutraceutiques est le secteur des soins de santé qui croît le plus rapidement. D'ailleurs, on prédit qu'au début du prochain siècle, ce sera le secteur dont la croissance sera la plus rapide.

Vous pouvez, en collaborant avec cette industrie, améliorer la santé et la qualité de vie des Canadiens. Dans toutes mes entreprises et dans tous mes déplacements, connaissant différentes institutions américaines, je peux dire que nous avons au Canada certains des meilleurs scientifiques, des scientifiques qui ont toutes les compétences pour faire des découvertes importantes dans ce domaine et placer le Canada à l'avant-scène de la compréhension et de la résolution de certaines de ces questions.

Toutefois, avec le cadre réglementaire actuel, le Canada devra se contenter d'un rôle de spectateur. Je vous exhorte à agir pour empêcher cela.

Merci.

La présidente: Il est rare qu'on reçoive des applaudissements, ici.

Chaque membre du comité a cinq minutes pour poser ses questions et recevoir des réponses. Veuillez être brefs dans vos réponses de façon à permettre aux députés de poser le plus de questions possible.

Monsieur Hill.

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Vous avez entendu quelques-unes des petites attaques partisanes dont je fais les frais aujourd'hui. Pour ne pas que cela se reproduise, j'aimerais savoir ce que vous pensez des deux méthodes de consultation que pourrait employer notre comité. La première suppose des voyages dans cinq villes du Canada, ce qui coûterait 70 000 $, plus les points de voyage des députés, et qui seraient payés par les contribuables. La deuxième méthode est celle des vidéotéléconférences, qui nous relieraient à 10 villes du pays et qui coûteraient 40 000 $. Je voudrais savoir quelle méthode, vous, comme contribuables, vous préféreriez pour nos consultations publiques sur ce sujet.

M. Kent MacLeod: Peu importe la méthode, du moment que la réglementation est modifiée. Je ne peux...

M. Grant Hill: Je vous demande de choisir l'une des deux méthodes: 40 000 $ pour une vidéotéléconférence nous reliant à dix villes du pays...

M. Kent MacLeod: La méthode la moins coûteuse.

M. Stephen Case: Certaines organisations ont déjà fait beaucoup dans ce domaine. Si quelques députés venaient à Vancouver pour y enregistrer une réunion publique, ce serait assez peu coûteux comparé aux 2 500 $ que coûte mon billet d'avion aller-retour.

• 0955

M. Ronald Dugas: Quarante mille.

M. Grant Hill: Non, je vous prierais de ne plus soulever cette question en public; ce genre de politique sectaire n'est pas très utile. C'est de la partisanerie à outrance.

Mme Carolyn Bennett: Pas du tout. Il n'y a rien de sectaire à cela.

M. Grant Hill: Je poserai la question à tous les témoins si vous soulevez cette question de nouveau. Je suis très déçu par mes collègues.

M. Joseph Volpe (Eglinton—Lawrence, Lib.): Ce n'est pas une façon très productive d'employer notre temps.

M. Grant Hill: Si, absolument.

M. Joseph Volpe: Pourquoi ne passons-nous pas à la question de fond?

Mme Carolyn Bennett: Vous allez faire cela à toutes les séances?

M. Grant Hill: Si vous continuez de faire de la politique partisane, oui.

Mme Carolyn Bennett: Les gens veulent pouvoir participer à une assemblée publique locale et ne pas toujours s'en remettre aux intervenants, surtout aux groupes d'intérêts, qui viennent témoigner devant les comités...

M. Grant Hill: Puis-je poser ma question?

Monsieur Dugas, avec vos suggestions, vous avez assez bien résumé les témoignages que nous avons entendus jusqu'à présent. J'ai trouvé particulièrement intéressant que vous proposiez que les règlements soient examinés et approuvés par le Parlement. Cela ne se fait pas, sauf dans un cas. À la dernière législature, le Comité de la santé a été autorisé à examiner le règlement sur le tabac. Croyez-vous qu'un examen de ce genre serait profitable à d'autres égards, et pas seulement dans ce domaine?

M. Ronald Dugas: J'ai été secrétaire général du Syndicat de la santé nationale et du bien-être social pendant 16 ans. D'après mon expérience, il arrive souvent que les politiciens se servent des règlements pour contourner la loi. Si vous examinez la Loi sur les aliments et drogues, par exemple, et le règlement connexe, vous constaterez qu'on peut adopter toutes sortes de règlements pour contourner la loi.

Je vous en donne un autre exemple. Je vous ai parlé du paragraphe 30(j) qui permet aux bureaucrates de suggérer au ministre de la Santé une définition des produits de santé naturels qui ne soit pas limitée par la présence du mot «drogue» dans la loi. Je crois honnêtement qu'on ne devrait pas permettre l'adoption de règlements de ce genre. N'oublions pas que nous connaissons tous les règlements.

Nous savons tous comment on en est venu là. Je crois que c'est le Dr Bennett qui nous a demandé comment on en était venu là. C'est ainsi qu'on en est venu là. Voilà pourquoi je dis qu'il faut trouver une solution.

Voici notre suggestion au Comité permanent de la santé: qu'une personne soit responsable de ces règlements que les politiciens ne connaissent pas, les règlements qui sont rédigés au jour le jour, de semaine en semaine. En s'assurant que le Parlement soit saisi de ces règlements au moins une fois tous les quatre ans, on vous donnerait l'occasion de bien comprendre la Loi sur les aliments et drogues. Vous savez, c'est une loi complexe.

M. Grant Hill: Les règlements sont adoptés après les lois et examinés par le Cabinet seulement. Je crois aussi savoir qu'il s'agit d'un examen assez superficiel. Or, les règlements sont parfois très volumineux. Les bureaucrates disent ce qui est important, mais, comme vous l'avez dit, certaines dispositions à l'air inoffensif peuvent avoir des conséquences tragiques.

Je vous remercie de votre suggestion. Elle me semble très positive. C'est tout pour moi.

La présidente: Madame Bennett, je vous prie.

Mme Carolyn Bennett: Monsieur Dugas, un des problèmes de notre comité, une des questions au sujet desquelles vous voulez une garantie, c'est que, comme l'a dit Dann Michols au comité, le statu quo n'est plus acceptable. Voilà pourquoi nous sommes ici et voilà pourquoi nous vous écoutons. J'espère que vous considérerez que notre étude est une étude publique. J'espère que nous pourrons nous assurer que les gens que nous allons voir pendant les campagnes électorales ont la chance de nous parler de leur situation. Nous allons poursuivre nos efforts en ce sens.

Je crois que vous avez dit que «aliment» et «drogue» ne suffisent pas. Vous avez parlé de quatre catégories: les aliments, les aliments fonctionnels, les produits naturels et les produits pharmaceutiques. Il y aurait donc les aliments et les produits de santé, et trois sortes de produits de santé. D'autres préconiseraient plutôt une première catégorie pour les aliments, une deuxième pour les drogues et une troisième pour les produits naturels thérapeutiques. Est-ce que...?

• 1000

M. Ronald Dugas: Non. Nous, à Ma Santé, Mes Droits, préconisons l'inclusion de deux définitions dans la loi: une pour les aliments, et une pour les produits de santé. Les produits de santé pourraient être divisés en trois catégories qui comprendraient les produits pharmaceutiques, les produits de santé naturels et les aliments fonctionnels. Dans la loi même, les deux grandes catégories seraient celles des aliments et des produits de santé.

Mme Carolyn Bennett: Je vois.

Monsieur Case, vous semblez dire que deux catégories pour les aliments et drogues suffisent tant que les produits de santé se retrouvent dans la catégorie des aliments. Voici ma question: si les produits de santé étaient inclus dans la catégorie des aliments, comment pourrait-on réglementer la belladone et d'autres remèdes homéopathiques qui peuvent empoisonner les gens, surtout les enfants, parce qu'ils contiennent de la strychnine?

M. Stephen Case: Quelle était la dilution du produit homéopathique qui a empoisonné ces enfants? Une dilution de 30C, par exemple, ne représente même pas une seule molécule; elle est fondée sur l'énergie et la physique quantique.

Mme Carolyn Bennett: Je vous dis simplement que je connais un enfant qui a fini à l'hôpital et qu'on a trouvé de la strychnine dans son organisme.

M. Stephen Case: S'il y avait de la strychnine dans ce produit, c'était certainement une quantité de moins de 30C. Autrement, ce n'est pas permis. C'est un poison et il est interdit de vendre du poison.

Mme Carolyn Bennett: Si c'est considéré comme un aliment, qui déterminera à quelle dose ces produits, qu'on appelle naturels, sont inoffensifs ou non? J'entends deux messages différents.

D'une part, vous dites que ces produits sont sûrs et qu'il n'est pas nécessaire de les réglementer, que le secteur devra s'autoréglementer. Mais qui déterminera ce qui est sans danger?

M. Ronald Dugas: Madame Bennett, d'après les questions que vous posez, il semble que je n'aie pas été clair. Nous ne parlons pas d'aliments. Le genre de produits dont vous parlez seraient classés dans la catégorie des produits de santé.

Mme Carolyn Bennett: Pas dans le cas de M. Case... C'est ce qui me pose un problème. Je veux savoir ce que M. Case pense de votre système.

M. Ronald Dugas: Excusez-moi.

M. Stephen Case: Vous voulez que ce soit réglementé davantage, comme en Allemagne? À l'heure actuelle, en Allemagne, si vous voulez acheter de la vitamine C dans un magasin d'aliments naturels...

Mme Carolyn Bennett: Non, là n'est pas la question.

M. Stephen Case: Vous vouliez savoir ce qui se passerait si on élargissait la portée de la réglementation.

Mme Carolyn Bennett: Je veux savoir pourquoi vous vous opposez à la création d'une troisième catégorie, comme l'a proposé M. Dugas, pour les produits de santé naturels.

Peut-être que M. MacLeod pourrait nous aider.

M. Kent MacLeod: Premièrement, en ce qui concerne les adultérants, que l'on considère que la strychnine soit une drogue ou un aliment, c'est un adultérant qui ne devrait pas être présent dans un médicament. Les règlements prévoient déjà l'interdiction d'inclure de la strychnine dans les aliments, les drogues, et le reste. Même dans le cas du Skin-Cap... ce produit avait été approuvé et était vendu au Canada; or, on y avait ajouté des stéroïdes. Ce produit était en vente libre. Alors, tous les règlements du monde n'empêcheront pas un fabricant sans scrupules de fabriquer des médicaments falsifiés.

Mme Carolyn Bennett: Mais qui vérifie? Quel est le rôle du gouvernement dans tout ça?

M. Kent MacLeod: Dans cette situation, c'est assez simple—et c'est pourquoi j'ai apporté ce document qui nous compare à d'autres pays. Tous les règlements du monde ne changeront pas ces situations. Il en est ainsi dans le domaine pharmaceutique et dans d'autres domaines. L'autoréglementation est la seule façon de s'assurer que l'industrie assume ses responsabilités en matière de prévention de pratiques douteuses et sans scrupules et de respect de ses propres lignes directrices.

Mme Carolyn Bennett: Dans la première mesure que vous recommandez, à savoir classer les nutriments comme aliments, les considérez-vous comme une troisième catégorie ou comme faisant partie intégrante des aliments?

M. Kent MacLeod: D'après moi, cela fait partie intégrante des aliments mais sous réserve de certaines limites précises. Encore une fois je m'inspire du modèle américain. Aux termes du Dietary Supplement Health and Education Act, ces substances sont classées comme aliments mais assujetties à des limites très précises en ce qui a trait à l'étiquetage, l'autoréglementation...

Mme Carolyn Bennett: Donc, si j'achète une bouteille de belladone dans un magasin de produits naturels, cela devrait être considéré comme un aliment.

M. Kent MacLeod: Les substances qui se trouvent dans la belladone sont déjà réglementées à titre de médicament, aux termes de la Loi sur les aliments et drogues.

• 1005

Mme Carolyn Bennett: Oui, mais nous allons recommencer à zéro. Nous allons mettre à l'essai un nouveau système. Que feriez-vous?

M. Kent MacLeod: Nos herbes sont manifestement des substances considérées comme des médicaments ayant des applications thérapeutiques. Si l'on parle de la belladone, ce produit est déjà réglementé comme médicament aux termes de la Loi sur les aliments et drogues. Je suis pharmacien. Lorsqu'un produit a une action pharmacologique très précise, c'est qu'il s'agit d'un médicament.

Mme Carolyn Bennett: Nous allons donc tout reprendre à zéro pour essayer d'établir ce qui constitue un médicament. Nous en revenons toujours à cela. Il y aura des fonctionnaires qui vont se pencher sur la question pour déterminer ce qui est un médicament et ce qui est un nutraceutique, et il nous faut de l'aide pour rédiger ces règlements.

M. Kent MacLeod: Encore une fois, je vous conseille de voir ce qui se fait dans d'autres pays en matière de cadre réglementaire et de faire encore mieux.

La présidente: Madame Bennett, votre temps de parole est écoulé.

Madame Wasylycia-Leis.

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Je voudrais reprendre la discussion là où Carolyn l'a laissée. Le groupe de témoins d'aujourd'hui constitue un microcosme des témoignages que nous entendons depuis plusieurs mois, et nous sommes toujours aux prises avec les options possibles. Ce groupe nous a présenté une gamme d'options, à commencer par M. Dugas qui recommande, si j'ai bien compris, une troisième catégorie de produits, recommandation qui semble aller dans le même sens que celle du groupe consultatif constitué par le ministère de la Santé.

Quant à Stephen Case, il nous fait une recommandation que nous ont faite bon nombre de consommateurs qui ont comparu devant le comité: s'il existe au sein de la Direction générale de la protection de la santé un service susceptible de faire des tests aléatoires, pour vérifier l'authenticité des herbes et pour s'assurer que l'étiquetage est convenable, nous pourrions sans doute nous en tirer sans créer toute une autre bureaucratie, chargée d'appliquer une tout autre réglementation.

Je pense que les propos de Kent MacLeod vont dans le même sens.

Est-il possible de répondre aux préoccupations soulevées par Carolyn au sujet des arguments voulant que les produits de santé naturels aient un effet thérapeutique en envisageant de ne pas adopter une troisième catégorie, mais plutôt d'alléger les règlements en vigueur avant de confier à la Direction générale de la protection de la santé les pouvoirs d'enquête nécessaires?

M. Stephen Case: Je pourrais peut-être répondre en premier.

À mon avis, si nous ouvrons les laboratoires—et je comprends que si nous sommes ici, c'est principalement pour discuter de l'innocuité des produits. C'est ce qui m'a été dit par la Direction générale de la protection de la santé. Selon ses responsables, aucun décès n'a été attribué à la consommation de produits naturels.

Mme Carolyn Bennett: M. MacLeod a dit qu'il y en avait eu moins de dix.

M. Stephen Case: Il parlait des États-Unis. Je n'ai pas vérifié les données dans ce pays, mais il a parlé d'un nombre inférieur à dix.

Troisièmement, les règlements feront en sorte qu'il ne nous sera plus possible d'acheter les produits que nous payons déjà de notre poche. C'est impossible d'acheter du boron ou du picolinate de zinc au Canada. Je ne peux même pas acheter des vitamines pour mon fils qui renferment du picolinate de chrome. Je dois les faire venir des États-Unis.

En Allemagne, ce secteur est tellement réglementé que l'on ne peut obtenir que des vitamines C dosées à 200 milligrammes, au coût de 100 $.

Lorsqu'on considère les produits naturels, des gens meurent... S'il s'agit d'assurer l'innocuité des produits, il faut se pencher sur les causes de ces décès. À ma connaissance, personne n'est mort à cause de la belladone, à moins qu'il ne se soit vraiment agi d'une drogue, mais je ne crois pas que des gens recommandent la consommation de belladone en doses qui renferment une grande quantité de molécules. Si c'est le cas, je n'ai pas vu de statistiques de décès. Avez-vous des renseignements à ce sujet?

Mme Carolyn Bennett: Je pense qu'il vaut mieux nous concentrer sur le mieux-être et l'innocuité des produits. Il ne faut pas attendre que certaines personnes y laissent la vie.

M. Stephen Case: Non, ce que je veux dire, c'est que si nous nous préoccupons de l'innocuité des produits, alors nous ne mettons pas l'accent sur l'essentiel.

M. Kent MacLeod: Deux choses se produisent aux États-Unis relativement aux propriétés revendiquées.

• 1010

Il y a premièrement les allégations relatives à la structure et à la fonction du produit. Certaines allégations classiques sont autorisées. Même au Canada il est très difficile d'autoriser une allégation classique. En voici un exemple. Le calcium contribue à renforcer les os et les dents. Un autre exemple d'allégation touchant la structure et la fonction qui est autorisée c'est de dire que la vitamine C est importante pour le système immunitaire, ou qu'elle contribue au développement de la dentition. Il s'agit là de la possibilité de parler d'éléments nutritifs en fonction de leur utilité prouvée.

En fait, nous sommes en train de dire que cela n'est pas permis au Canada. Il existe des preuves selon lesquelles on s'entend quant à l'utilité des éléments nutritifs, et c'est le premier niveau, l'allégation relative à la structure et à la fonction du produit.

Le deuxième niveau est prévu dans la Loi sur la réforme de la FDA. Il met en cause l'Institut national du cancer, les centres de contrôle des maladies, ainsi que certains des principaux établissements quasi gouvernementaux. On consacre des milliards de dollars aux budgets de ces établissements qui font des constatations quant à l'utilisation des denrées alimentaires. Certaines entreprises peuvent en fait revendiquer ces propriétés en fonction des preuves qu'elles ont recueillies. Lorsqu'un organisme important fait une découverte, on peut dire que tel aliment est peut-être important dans le cadre de ce processus. Cela a l'air très logique. Nous disons en fait que les propriétés revendiquées ne sont pas...

Par contre, lorsqu'on prétend que la vitamine E soigne le cancer, c'est une tout autre affaire. Ce n'est tout simplement pas vrai. Ce que nous disons c'est que la vitamine E est un élément important pour le système immunitaire. Elle est importante pour diverses choses et on devrait être autorisé à parler de ses propriétés en fonction de l'utilité du produit.

Un autre exemple: un fabricant devrait pouvoir dire que l'acide folique est peut-être important pour la santé du coeur et pour prévenir les malformations du tube neural. Il s'agit là de données scientifiques généralement reconnues et pourtant, aux termes de notre cadre réglementaire actuel, il nous est interdit de dire ces choses-là. C'est absurde et dangereux car on devrait autoriser les entreprises à en faire la promotion, au lieu de simplement s'en remettre à l'optimisme aléatoire des gens ou des professionnels qui eux, peuvent dire, en effet, si vous envisagez de tomber enceinte, que vous devriez prendre une multivitamine contenant de l'acide folique.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur MacLeod.

Monsieur Volpe.

M. Ronald Dugas: Puis-je ajouter deux ou trois choses au sujet des propriétés revendiquées?

La présidente: Allez-y.

M. Ronald Dugas: Je pense qu'il nous faut aussi envisager d'autoriser ces allégations, cela ne fait aucun doute. Si le Canada veut soutenir la concurrence de ses partenaires commerciaux, il faut faire quelque chose.

Par exemple, si l'innocuité des produits préoccupe à ce point le gouvernement canadien, on peut s'inspirer du modèle américain, où il existe le système des avertissements, pour se dégager de toute responsabilité. En un mot, cet avertissement figurerait sur les flacons ici au Canada et stipulerait que Santé Canada n'est intervenu à aucun moment, qu'il s'agisse du diagnostic, du traitement, de la guérison ou de la prévention de la maladie. En fait, ce produit n'aura fait l'objet d'aucune vérification. C'est une possibilité que le comité devrait envisager. Il faut absolument assouplir les règles en vigueur si nous voulons être concurrentiels.

Du même coup, il faut sensibiliser les Canadiens et leur laisser le choix. Grâce à cet avertissement, s'ils veulent aller de l'avant et consommer tel produit de santé naturel, libre à eux. C'est leur corps.

La présidente: Merci, monsieur Dugas.

Monsieur Volpe.

M. Joseph Volpe: Bonjour à tous.

À la première page où il est question des empoisonnements accidentels, des médicaments et des produits biologiques, on parle d'environ 581 décès. Un grand nombre d'entre eux sont sans doute attribuables à la consommation d'aspirine, de Tylenol, etc. Ai-je raison?

M. Stephen Case: Les produits sont en fait classés en sous-catégorie.

M. Volpe: Ma question est la même. Recommanderiez-vous de retirer ces produits de la vente?

M. Stephen Case: Je dirais qu'il faut examiner ceux qui présentent le plus de risques, sans doute les antipyrétiques, les produits antirhumatismaux et peut-être la nifédipine. Il semble que ce produit ait obligé certaines personnes à quitter leur emploi à la DGPS. Ces produits présentent des risques si grands qu'il faut effectivement les étudier de près. Il importe d'étudier les produits qui tuent des Canadiens. Lorsque ce sera fait, il nous faudra examiner la façon d'empêcher le démantèlement de nos ressources humaines.

• 1015

M. Joseph Volpe: Merci. Au cours des deux derniers mois, diverses personnes ont comparu devant le comité pour faire des recommandations et certaines observations. Après avoir entendu, de ce côté-ci de la table, les arguments contradictoires présentés par les différents groupes, je suis de plus en plus sceptique mais je constate des divergences d'opinions profondes entre ceux qui ont recours aux médicaments traditionnels et les autres. C'est pourquoi je me réjouis d'avoir parmi les témoins d'aujourd'hui un pharmacien. Je pourrais peut-être vous poser une question pour essayer de faire le lien entre ces deux positions.

Il y a environ deux semaines, je pense, nous avons entendu un médecin qui a acquis une certaine célébrité—ou du moins une certaine réputation—nous expliquer que se sentir bien n'est pas nécessairement la même chose que se sentir mieux. J'espère ne pas interpréter de travers ses propos. D'autres ont comparu devant le comité pour nous expliquer que lorsqu'on se sent mieux, c'est parce qu'il se produit une réaction chimique dans son corps qui incite le cerveau à envoyer un message indiquant que l'on se sent mieux.

Lorsque vous examinez certains produits, comme ces produits naturels ou même les produits pharmaceutiques, y cherchez-vous la présence de certains ingrédients actifs qui provoquent cette réaction de «mieux-être», si je peux exprimer en langage profane ce que les autres nous ont dit?

M. Kent MacLeod: Si je vous comprends bien, ces personnes vous ont dit que ces produits naturels exerçaient peut-être un effet de placebo...

M. Joseph Volpe: Je n'en sais rien. Plus j'en apprends à ce sujet, plus je deviens sceptique.

M. Kent MacLeod: Je vous dirai simplement que oui. Quel que soit le médicament ou supplément alimentaire, il existe une proportion de gens, surtout lorsqu'il s'agit d'analgésique, qui est un excellent exemple... si on donne une pilule de sucre à dix personnes, trois d'entre elles diront que leur douleur s'est atténuée. Cet effet existe manifestement pour n'importe quel produit.

Quant aux produits naturels, cela va de soi... c'est l'objet d'études et de recherche où l'on utilise des points de repère objectifs, par exemple en donnant des multivitamines ou de la vitamine E à une personne et en mesurant vraiment les améliorations de ses cellules T. Les cellules T réagissent véritablement de façon positive aux multivitamines. Si nous mesurons les effets de nos produits grâce à ces biomarqueurs, on constate une réduction des fluides présents pour l'oxydation dans le corps. Pour vous répondre, donc, il y a également un effet de placebo dans la mesure où l'on se «sent bien» et pour tout médicament ou autre... mais je ne suis pas certain de la question.

M. Joseph Volpe: S'agissant des produits naturels, donc, je déduis de votre réponse que nous pourrions établir des marqueurs et tester ces produits par rapport à eux pour déterminer s'ils ont effectivement les propriétés qu'on leur attribue.

M. Kent MacLeod: Là encore, ce n'est pas nécessaire. Si vous voulez dire que l'on a déjà établi qu'une vitamine ou un élément nutritif est essentiel à la structure et à la fonction du corps, ce produit a déjà été découvert, est déjà connu... mais si vous voulez lui attribuer une propriété supplémentaire pour la santé en disant que ce produit a une valeur thérapeutique, il faut en faire la preuve. Là encore, c'est interdit même aux États-Unis. Il est possible de faire une allégation relative à la structure et à la fonction—c'est-à-dire affirmer que l'élément nutritif est important pour une certaine fonction corporelle—mais même dans ce cas, il faut y ajouter l'avertissement, comme l'a dit Ron Dugas, précisant que «cette allégation n'a pas été évaluée», en disant par exemple que «la vitamine E est importante pour la santé cardiaque».

M. Joseph Volpe: À votre avis, donc, ce n'est pas du tout la même chose, pour une personne, d'affirmer qu'elle «se sent mieux» ou d'être effectivement en meilleure santé. C'est pourquoi, dans le premier cas, on n'applique pas la rigueur actuellement exigée par la Direction générale de la protection de la santé.

M. Kent MacLeod: C'est tout à fait exact, c'est une chose qui se produit constamment. Dire que la vitamine E empêche les crises cardiaques est une chose; c'en est une autre d'affirmer que la vitamine E est un élément important pour que le coeur se porte bien.

M. Joseph Volpe: Devrais-je en déduire qu'en ce qui vous concerne c'est une question de choix de termes, que quand on décrit un produit on tend à l'enjoliver?

M. Kent MacLeod: C'est tout à fait cela. Une bonne partie de cette discussion est due à une confusion des termes: vous avancez des affirmations, afin de pouvoir discuter avec les gens, afin que les fabricants puissent donner une information aux consommateurs, une information basée sur l'expérience, et ceux en opposition à une situation où tout ce que vous avancez est... C'est ainsi qu'on n'a pas le droit de parler de l'acide folique pour les défauts des tubes neuraux: c'est insensé. À ce stade, c'est donc vraiment une question de vocabulaire.

• 1020

Quant aux propriétés qui sont attribuées, vous constatez, par exemple, aux États-Unis... C'est comme si on avait affaire à un constructeur d'automobiles qui affirme que sa voiture peut rouler à 120 milles à l'heure, alors que nous, nous nous contentons de demander si elle peut rouler à cette vitesse et s'il peut le prouver.

C'est là un problème de consommateur, non de santé. Toute affirmation devrait pouvoir être prouvée. On devrait avoir un défenseur de l'intérêt des consommateurs qui puisse s'opposer à toute affirmation gratuite, pour laquelle il n'existe pas de preuves.

La présidente: Très bien.

Monsieur Volpe, en l'absence d'un autre intervenant, vous avez toujours encore la parole. Peut-être avez-vous une autre question, Joe?

M. Joseph Volpe: Vous ne me laissez pas...

M. Kent MacLeod: J'essayais simplement de vous dire que la vogue des produits naturels est simplement due à l'effet placebo... C'est du moins l'impression générale, à ce que disent certains. Est-ce exact?

M. Joseph Volpe: Je ne voudrais attribuer à personne des affirmations qui n'ont pas été faites.

M. Kent MacLeod: Très bien.

M. Joseph Volpe: Je voudrais que vous compreniez bien que tout ce que vous nous dites, en tant que témoin, nous permet de mieux comprendre la situation. D'autres députés peuvent avoir une impression différente, mais il ne s'agit pas simplement de cocher une case en votre faveur et une autre case en faveur de quelqu'un d'autre. Nous voulons approfondir notre connaissance du problème.

Certains d'entre nous, à mon avis, pensent que les produits naturels—et non les thérapies en soi—ne sont pas à bien des égards soumis aux mêmes examens rigoureux que certains des produits pharmaceutiques; ce qui s'imposerait peut-être, c'est que les propriétés de ces produits devraient être prouvées en adoptant les mêmes règles que les produits pharmaceutiques. Le fait qu'une personne se sente bien après avoir absorbé un produit ne signifie pas nécessairement que cette personne se porte mieux.

M. Ronald Dugas: Mais pourquoi interviendrions-nous—j'entends le gouvernement et les hommes politiques—si le consommateur a eu l'impression de bien-être après avoir absorbé un produit naturel? L'État devrait intervenir quand il y a un problème de sécurité ou de qualité, mais quand on en vient aux effets, qu'il s'agit d'un produit naturel sans nocivité, et que je suis disposé à le payer de ma poche, comme je disais au début, je ne vois pas pourquoi quelqu'un—qu'il s'agisse du gouvernement ou de quiconque d'autre— viendrait me dire que je ne puis me procurer ce produit naturel?

Prenons le cas des cigarettes et de l'inscription sur le paquet: les cigarettes causent le cancer. Les cigarettes sont une cause de maladies cardiaques, d'accidents cérébrovasculaires. Cependant elles sont en vente partout, rien n'empêche les gens d'aller au magasin acheter des cigarettes qui risquent de causer leur mort, mais vous allez m'empêcher, moi, d'acheter un produit naturel qui, je le pense, aura des effets bénéfiques.

M. Joseph Volpe: Laissez-moi traiter de l'hypocrisie au cas par cas.

Des voix: Oh!

La présidente: Je vous remercie, monsieur Dugas. Nous y reviendrons.

Nous disposons de cinq ou six minutes, et trois ou quatre personnes ont manifesté l'intention de poser une question.

M. Joseph Volpe: Vous allez quand même me permettre de finir cette question, n'est-ce pas?

La présidente: Non, vous avez déjà eu deux fois plus de temps que prévu. Votre tour reviendra, Joe, s'il reste du temps.

La parole est à M. Hill, Mme Bennett, puis Joe et Mme Wasylycia-Leis, mais le tout ne doit pas durer plus de cinq minutes.

M. Grant Hill: Pour revenir à la proposition de Kent, à savoir que ce secteur s'autoréglemente, vous n'entendez pas par là que le gouvernement ne peut exercer le contrôle de la qualité dans ce secteur, pour s'assurer qu'un produit correspond en réalité à ce qu'on affirme qu'il est. Pourriez-vous parler un peu plus longuement de cette idée d'autoréglementation?

M. Kent MacLeod: Par autoréglementation nous entendons que le fabricant ou producteur doit avoir son propre règlement, accepté par le gouvernement, exigeant des méthodes de fabrication qui répondent à des lignes directrices, etc., ce afin d'éviter—je serai franc—un système basé sur la contradiction, sur l'opposition entre les médicaments et les produits naturels, et que ce dernier secteur puisse montrer qu'il s'autoréglemente et par conséquent a des normes.

• 1025

Le gouvernement a certainement un rôle à jouer, à mon avis, en imposant ce cadre réglementaire, pour rassurer et satisfaire le consommateur, pour montrer que ce secteur se plie à des règles d'étiquetage, des règles de description des propriétés du produit et de ses limites, et de la qualité de la fabrication.

M. Grant Hill: Êtes-vous d'accord avec Stephen, à savoir que le gouvernement devrait procéder à une vérification ponctuelle, examiner un produit pour vérifier qu'il contient bien ce qu'il affirme contenir?

M. Kent MacLeod: Aux États-Unis, l'autoréglementation présuppose que chaque fabricant doit fournir à l'association une liste des produits et qu'à intervalles réguliers, l'association demande à ce que certains produits lui soient envoyés pour vérifier le dosage.

Quant à la vérification ponctuelle des produits, le gouvernement ne procède pas ainsi dans l'industrie pharmaceutique.

M. Grant Hill: Si je vous ai bien compris, vous proposez donc une vérification ponctuelle, mais accomplie par une association plutôt que par...

M. Kent MacLeod: En réalité, aux États-Unis, l'autoréglementation consiste à... D'après mon expérience avec les règlements au Canada, sur les produits pharmaceutiques, l'autoréglementation est en réalité une surréglementation, les laboratoires voulant prouver qu'ils respectent scrupuleusement les règlements. Ils pratiquent ces vérifications ponctuelles, soumettent leurs produits à des essais indépendants qu'ils paient eux-mêmes, en opposition à... car sitôt que le gouvernement s'en mêle, il y a toutes sortes de conséquences.

Là encore, à la façon dont cela se pratique actuellement, aucun produit pharmaceutique, au Canada, n'est soumis à une vérification ponctuelle aléatoire. Proposer cela pour un secteur où la vérification ponctuelle n'est pas pratiquée serait bien difficile: ainsi le gouvernement ne procède à aucune vérification de produits comme Tylenol, l'aspirine ou autre; c'est au fabricant lui-même de donner les résultats à un inspecteur qui vérifie que le produit a été soumis à un essai.

La présidente: Je vous remercie, monsieur MacLeod.

Madame Bennett, vous avez la parole.

Mme Carolyn Bennett: Je vous remercie. Je voudrais revenir à ce que disait le docteur Hill.

On a déjà constaté la présence, dans l'échinacée, de pseudoéphédrine, et dans le Sleeping Buddha, de diazépam ou d'un autre produit. J'aimerais savoir quel rôle le gouvernement pourrait jouer pour s'assurer que quand on achète un produit ce dernier correspond à ce qui figure sur l'étiquette. Certains produits importés des États-Unis ne mentionnent pas le dosage, ce qui m'inquiète beaucoup. Le gouvernement ne devrait-il pas exiger que si vous achetez de la vitamine B6, par exemple, le dosage en milligrammes soit spécifié, si la dose est de 50 ou de 200 milligrammes, par exemple.

Qui détermine la dose à inscrire sur le flacon? Devrions-nous suivre, par exemple, le modèle australien d'après lequel on indique le dosage traditionnel de ce produit accompagné d'un avertissement: le consommateur sait alors qu'il achète un produit pur et que la dose indiquée correspond à la réalité.

M. Kent MacLeod: Mais même si vous imposez un règlement très strict vous n'empêcherez toujours pas une personne d'importer un produit chinois ou autre, ou un fabricant peu scrupuleux dont les méthodes de fabrication ne sont pas bonnes. Mais dans un milieu d'autoréglementation, où tout vendeur garantit qu'il respecte ces règles, alors qu'avec la méthode de l'inspection on n'arrive pas à faire appliquer ces règles...

Mme Carolyn Bennett: Nous attendrons donc que le champion olympique se fasse prendre avec de la pseudoéphédrine dans son urine, alors qu'il avait pensé absorber simplement de l'échinacée?

M. Kent MacLeod: Je suis pharmacien, et le nombre de retraits de produits pharmaceutiques que je constate... car avec l'autoréglementation il y a un mécanisme de retrait des médicaments. Le consommateur n'est pas au courant, mais moi, comme pharmacien, je constate combien il y a de retraits parce que tel produit ne contient pas tout ce qu'il est censé contenir, ou parce que des gouttes pour les yeux contiennent un produit qui ne devrait pas s'y trouver, ou parce qu'un produit présente des granulations. Il ne se passe probablement pas de quinzaine sans que je reçoive une demande de retrait d'un fabricant, mais parce qu'il y a autoréglementation aucun consommateur, aucun député n'est au courant.

• 1030

Mon propre député me disait: «Vous vous souvenez de ce ginseng velu» à quoi j'ai répondu «C'est intéressant que nous ayons dû faire retirer ce médicament, c'était une affaire grave»...

Mme Carolyn Bennett: Monsieur MacLeod, notre comité a appris qu'il y a des sortes si différentes de ginseng—avec des propriétés si différentes, qu'il faut vraiment faire des bioessais pour savoir duquel il s'agit. Qui devrait procéder à cela? Qui devrait dire, lorsque vous achetez telle ou telle sorte de ginseng, de quelle sorte il s'agit afin que les gens, qui sont des consommateurs tout à fait au courant, sachent qu'ils achètent vraiment l'espèce de ginseng qui est appropriée pour eux?

M. Kent MacLeod: Quand il y a autoréglementation, la personne qui procède à l'analyse du produit a des connaissances sur les propriétés attribuées à ce produit.

Mme Carolyn Bennett: Serait-ce à une association de le faire, ou au gouvernement?

M. Kent MacLeod: Ce serait le rôle d'une association. Le gouvernement ne peut imposer un régime de règles. Là encore, votre rôle en tant que gouvernement, à mon avis, serait de dire à ce secteur que c'est à lui de justifier au gouvernement ses activités.

M. Ronald Dugas: À ce propos, et avant que la séance ne prenne fin, je voudrais apporter une dernière précision. Je recommande vivement que le comité permanent lise ce qui a paru, dans la documentation scientifique, sur la prévalence, les conséquences et les coûts de santé de la non-observation et des ordonnances inappropriées au Canada. Ce rapport a été préparé par des médecins pour l'Association pharmaceutique canadienne.

C'est ainsi qu'il est dit, dans le résumé, que 50 p. 100 des antibiotiques ne devraient pas être prescrits pour les personnes âgées, que 20 p. 100 des benzodiazépines sont prescrites sans raison valable pour les malades âgés, au coût de 2,56 milliards de dollars par an pour le Canada.

Et nous parlons ici de produits naturels qui n'ont pas d'effets nocifs!

Le rapport conclut en disant que ce genre de prescriptions débouche sur l'hospitalisation et est la cause de nombreux décès au Canada. Ce rapport n'a pas été préparé par ceux qui prônent les médecines parallèles, mais par la communauté médicale.

Nous parlons d'efficacité et de sécurité, mais que fait le gouvernement pour la question des antibiotiques? Il n'est pas de nuit qui passe sans que je...

Des voix: Allons bon!

M. Ronald Dugas: Je défends la cause des consommateurs, et ce, depuis 25 ans. Des consommateurs viennent se plaindre en me disant, par exemple: «Voyez l'exemple de la mélatonine. Je peux l'obtenir en vente libre aux États-Unis.» Ils me demandent quelle est ma position, en tant que défenseur des consommateurs, sur la question des antibiotiques.

Pourquoi le gouvernement laisse-t-il les médecins continuer à prescrire ce médicament? C'est là que le système est pourri. C'est de là que viennent tous les coûts.

Une voix: Mais ce n'est pas réglementé...

Une voix: Mais l'association...

La présidente: Il y a encore une question qui doit être posée.

M. Ronald Dugas: Je sais...

Une voix: Les essais de vérification aléatoires...

La présidente: Madame Wasylycia-Leis. Une toute petite question, et nous passons ensuite à la prochaine...

Mme Judy Wasylycia-Leis: Pour revenir sur ce que disait M. Dugas, ce qu'il demande ne correspond pas à votre recommandation d'une troisième méthode de réglementation. Pourrait-on concevoir l'application du scénario suivant, basé sur certaines parties du mémoire de Stephen Case?

Les produits homéopathiques et les produits de phytothérapie figureraient, en tant qu'aliments, aux articles 4 et 5 de la Loi sur les aliments et drogues, et on amenderait cette dernière pour définir le terme «drogue» et en exclure les produits naturels; on aurait un mécanisme de réglementation pour assurer un étiquetage précis et une vérification de l'authenticité botanique, et on accorderait au gouvernement le droit de procéder à des vérifications ponctuelles et à des vérifications aléatoires, le cas échéant. N'est-ce pas là ce que vous préconisez, plutôt que d'établir toute une catégorie de réglementation distincte?

M. Ronald Dugas: Ce que vous proposez est exactement ce que j'avais en tête quand j'ai commencé à m'intéresser à la question. Au fur et à mesure que je l'étudiais, par exemple en tant que participant à un comité consultatif, etc., je découvrais de nombreux inconvénients, et j'ai constaté qu'il faudrait mettre en place certains règlements assortis de mesures de sauvegarde, afin de veiller à ce que nous ayons tout au moins une certaine sécurité. Mais là où nous ne sommes pas du tout d'accord, c'est que l'efficacité pour les produits à faible risque ne devrait pas relever de l'État, mais des consommateurs.

Des voix: Bravo!

• 1035

La présidente: Je vous remercie, monsieur Dugas. Au cours des dernières semaines nous avons entendu les opinions de nombreuses personnes, et parfois elles se répètent. Ce que nous recherchons avant tout, ce sont des idées, des propositions, et c'est pourquoi certains d'entre nous cherchent à vous faire dire certaines choses. Nous voulons connaître les solutions que vous préconisez. C'est bien beau de dire que vous n'approuvez pas ceci, et que vous n'approuvez pas cela, mais ce qu'il nous faut, à nous, ce sont des propositions constructives sur la façon de procéder, savoir pourquoi vous préférez l'autoréglementation à un cadre de règlement... Ce sont des idées concrètes qu'il nous faut, et c'est pourquoi les députés insistent pour que vous nous donniez les vôtres.

Je vous remercie tous. Nous allons faire une brève pause, pour donner au groupe suivant le temps de se préparer.

• 1035




• 1050

La présidente: Le comité va reprendre ses travaux.

Comme je l'ai mentionné au groupe qui vous a précédés, nous avons entendu de nombreuse opinions. Le ministre nous a demandé de nous mettre à l'écoute des Canadiens, de consulter tous les groupes intéressés et de voir ce qu'il convient de faire, s'il faut réglementer davantage, ou moins, ce secteur, ou le laisser tel quel, ou toute autre solution. C'est ce à quoi visent nos travaux.

Nous sollicitons les idées des groupes qui comparaissent devant nous sur la meilleure façon d'aborder un problème qui intéresse vivement un grand nombre de gens. Quelle est l'orientation à suivre? Nous connaissons la situation actuelle, nous savons ce qu'il en a été dans le passé, mais nous voudrions avoir des idées sur ce qu'il convient maintenant de faire, et nous vous demandons de nous dire vos préférences.

La Consumer Health Organization of Canada est représentée par Phil Anderson et Marcel Wolfe; The Herb Works est représenté par Richard DeSylva, et Freedom of Choice in Health Care est représenté par Marilyn Nelson.

Mme Marilyn Nelson (fondatrice, Freedom of Choice in Health Care): Mon invité s'appelle Josip Gabre, et il va faire une courte déclaration.

La présidente: Va-t-il parler au nom de votre groupe?

Mme Marilyn Nelson: Non, c'est moi qui parle au nom du groupe, mais je lui ai demandé de m'accompagner et de dire quelques mots sur le sujet qui vous occupe.

La présidente: Vous allez donc vous partager environ cinq minutes entre vous deux?

Mme Marilyn Nelson: En fait, nous allons parler environ cinq minutes chacun.

La présidente: D'accord.

Enfin, le magazine Health Naturally est représenté par David Rowland.

Nous vous serions reconnaissants de condenser vos commentaires le plus possible, car nous avons ici des députés qui veulent vous poser des questions. Je suis certaine que les sujets que vous voulez aborder pourront l'être à l'occasion des questions. Nous souhaitons recevoir le plus grand nombre d'idées possible.

Nous allons suivre l'ordre de l'avis de convocation, en commençant par Phil Anderson et Marcel Wolfe, au nom de la Consumer Health Organisation. Je ne sais pas qui va commencer. Essayez, s'il vous plaît, de ne pas dépasser les cinq minutes imparties à votre groupe.

M. Phil Anderson (trésorier, Consumer Health Organization of Canada): Mesdames et messieurs, je suis directeur de la Consumer Health Organization of Canada. Je fais également de l'agriculture organique et je suis dans ma 71e année.

J'ai commencé à me préoccuper de ma santé à l'âge de 40 ans, lorsque j'ai ressenti un manque d'énergie. J'étais facilement agité et j'attrapais tous les rhumes et toutes les grippes qui passaient à proximité. Après m'être entretenu avec le propriétaire d'un magasin d'aliments de santé, j'ai commencé à prendre des suppléments minéraux et vitaminiques, j'ai fait un peu plus d'exercice, je me suis intéressé à ce que je mangeais, et ma santé a commencé à s'améliorer tranquillement.

J'ai étudié le fonctionnement de l'organisme, le mode de production de nos denrées alimentaires ainsi que la nécessité et l'absorption des suppléments minéraux et vitaminiques, et j'ai mis mes découvertes en pratique. Ma santé a continué de s'améliorer, et j'ai maintenant plus d'énergie que je n'en avais à 40 ans.

Comme je m'intéresse à la culture organique que je pratique depuis dix ans, j'ai appris que si l'agriculture organique élimine les herbicides et les fongicides toxiques et si elle est préférable pour la terre, à cause de l'appauvrissement en minéraux de la quasi-totalité des terres agricoles d'Amérique du Nord, la qualité nutritionnelle des aliments organiques n'est guère meilleure que celle des autres aliments, mise à part l'absence de poisons.

Vous doutez peut-être de la validité de mon affirmation quand je dis que les produits alimentaires actuels présentent une déficience en ce qui concerne la plupart des minéraux, mais les experts en agriculture l'ont reconnu dès 1936, comme en atteste ce rapport présenté au Sénat américain en 1936 et publié par le Sénat. On y trouve exactement les arguments que nous reprenons aujourd'hui. J'en ai quelques exemplaires, si les membres du comité veulent le consulter.

La présidente: Vous pouvez en remettre un exemplaire au greffier. Nous aimerons tous l'obtenir.

M. Phil Anderson: L'appauvrissement des sols en minéraux résulte du fait qu'au cours des années 1800 on a découvert que l'utilisation de trois minéraux solubles, à savoir l'azote, le phosphore et la potasse, amélioraient la croissance, la taille et l'aspect des végétaux. Malheureusement, ils n'amélioraient pas leur santé véritable, si bien que les éboueurs de la nature, à savoir les insectes et les moisissures ont commencé à s'en nourrir. Il a donc fallu recourir à des poisons chimiques pour s'en débarrasser, ce qui a eu un effet durable sur la qualité des produits alimentaires, et la population a consommé des produits malsains. C'est pourquoi nous avons besoin de suppléments alimentaires et de suppléments minéraux.

• 1055

C'est toujours la même chose aujourd'hui. On procède toujours de la même façon, sauf que l'on consacre plus d'argent aux produits chimiques et aux engrais artificiels qui détruisent les sols, qui s'écoulent dans les cours d'eau, s'accumulent partout et provoquent la dégénérescence du pays et du monde entier.

Mais au moins si l'on peut prendre les suppléments alimentaires dont on a besoin, l'organisme s'en trouve rééquilibré et nettoyé, le système immunitaire est renforcé, et il prévient la maladie.

Mesdames et messieurs, la Consumer Health Organization of Canada, organisme éducatif à but non lucratif, organise la plus grande exposition annuelle au Canada consacrée à la santé atteinte par des moyens différents et appelée Total Health. Il se trouve qu'aucun ministre de la Santé ni aucun représentant du gouvernement fédéral ou d'un gouvernement provincial n'a jamais assisté à nos expositions, malgré des invitations réitérées. Cela nous donne l'impression que les ministères fédéral et provinciaux de la Santé ne se préoccupent pas de la santé atteinte par des moyens différents.

En revanche, les gens s'en préoccupent et manifestent un intérêt croissant pour la santé atteinte par des moyens différents et pour les suppléments alimentaires. Un récent article du Globe and Mail indiquait que 42 p. 100 des Canadiens se sont renseignés et ont recours à des suppléments alimentaires, des plantes médicinales et des solutions non médicales pour résoudre leurs problèmes de santé et pour se garder en santé.

Nous venons de terminer notre première exposition de trois jours, à laquelle ont assisté plus de 9 000 personnes. Comme l'année dernière, nous nous attendons cette année à recevoir des milliers d'appels de personnes qui veulent se renseigner sur l'utilisation des suppléments et autres moyens de ménager sa santé. Nous sommes là pour leur donner l'information dont nous disposons.

Tous ces gens nous disent également qu'ils veulent avoir le choix et souhaitent un allégement de la réglementation pour favoriser la concurrence, qui permettra de produire de meilleurs suppléments alimentaires à meilleur marché. Les gens sont plus instruits maintenant que quand j'étais jeune et sont en mesure de déterminer ce qui est bon pour leur santé et pour leur budget. Nous ne demandons pas à nous faire dorloter. Laissez simplement jouer la concurrence comme dans la production alimentaire, et aidez-nous à informer les gens pour qu'ils prennent en charge leur propre santé.

Oui, si vous voulez réduire les coûts sans cesse croissants des soins de santé—on devrait plutôt parler de soins de maladie— aidez-nous à informer les gens sur la façon de rester en santé, et même de vaincre la maladie, y compris le cancer et le sida, par une bonne alimentation, par un nettoyage et un rééquilibrage de l'organisme grâce aux aliments dont nous disposons et aux suppléments alimentaires naturels. Je sais par expérience que si l'on donne à l'organisme les éléments nutritifs dont il a besoin, il restera en pleine santé.

Merci d'avoir invité notre organisation à donner son point de vue.

La présidente: Monsieur Wolfe.

M. Marcel Wolfe (Consumer Health Organization of Canada): Je m'appelle Marcel Wolfe. J'ai 43 ans. Ne vous laissez pas abuser par mon allure jeune et fringante; c'est simplement un effet secondaire de ma bonne santé. Et d'après ce gouvernement, tout cela est illégal.

Nous vivons un moment tout à fait extraordinaire, qui restera comme un point tournant pour les Canadiens en ce qui concerne la liberté de choix en matière de santé.

Bonjour, mesdames et messieurs. Je suis partisan de la liberté en matière de santé pour les Canadiens. En politique, le choix du bon moment et l'impression faite auprès du public sont déterminants. Bien que la population canadienne n'ait pas eu le temps de comprendre les changements de la politique gouvernementale et toutes leurs répercussions, elle est beaucoup plus consciente que ne le croit le gouvernement.

L'action est plus expressive que les mots, et c'est le gouvernement qui a lancé le mouvement. Les Canadiens ont dépassé l'étape de la suspicion et de la méfiance à l'égard du gouvernement. Ils exigent de pouvoir se renseigner sur leur droit constitutionnel de choisir en matière de santé.

• 1100

On a l'impression que le gouvernement n'agit pas dans l'intérêt des Canadiens. Aujourd'hui, bien que la vérité ne soit administrée qu'au compte-gouttes, les gens n'ont plus confiance en leur gouvernement. Demandez-leur s'ils pensent que le gouvernement se préoccupe de leur santé et de celle de leurs familles, et ils répondront toujours non.

Nous savons parfaitement que pour le gouvernement il ne s'agit pas de satisfaire les intérêts de l'électeur canadien; sinon, nous ne serions pas ici aujourd'hui. Ce n'est pas une simple question d'argent, de cupidité ou de soif de pouvoir. C'est tout simplement le symptôme d'une maladie qui prend des proportions mondiales et qui ne réserve rien de bon aux Canadiens. La liberté de choix en matière de santé nous est garantie, comme les autres libertés, dans la Constitution, la loi suprême du pays, mais je vous pose la question suivante: avez-vous lu la Constitution de A à Z?

Les Canadiens savent aussi que, quel que soit le parti au pouvoir, vous dansez au son du même tambour. Les Canadiens n'ont pas besoin de réglementation et n'en ont pas demandé. Faut-il renforcer la réglementation? Non. Si le gouvernement veut faire quelque chose de constructif, il doit informer la population, au lieu de la tromper ou de réglementer. Ce dont les Canadiens ont besoin et ce qu'ils veulent, c'est une direction générale de la protection de la santé et un gouvernement qui travaillent dans leur seul intérêt.

Pour commencer, il serait bon d'améliorer le règlement 307 en en supprimant les échappatoires, et nous n'accepterons rien de moins. Je répète qu'il s'agit là d'un droit garanti par la Constitution, qu'il n'est pas question de négocier. Nous ne tolérerons plus de reformulations, de déclarations creuses, irresponsables.

Que tout le monde sache que mes suppléments sont fabriqués par la nature et approuvés par Dieu, et qu'aucun gouvernement ou mouvement mondial ne parviendra jamais à s'interposer entre mes suppléments, ma santé et moi.

En conclusion, on sait que les gens n'acceptent un changement majeur de mode de vie que dans deux types de circonstances: soit en réponse à une situation de crise, soit pour suivre un exemple. Jusqu'à maintenant vous n'avez pas donné l'exemple, mais je tiens à remercier chacun d'entre vous. Je vous suis reconnaissant d'avoir suscité un besoin, une situation de crise. Que la guérison commence.

En tant que membre de la majorité grandissante, je vous demande de cesser de gaspiller notre santé et notre temps. Vous nous renvoyez constamment au visage les questions de budget. À nous de vous les renvoyer au visage. Sortez de nos jardins, sortez de nos cuisines, sortez de nos salles de bain et sortez de nos poches; finalement, fichez-nous la paix et préparez-vous au plus grand retour de flamme qu'ait connu l'histoire politique canadienne si vous n'agissez pas correctement.

Je vous souhaite de bien vous porter le plus longtemps possible. Ne soyez pas victimes de votre propre ignorance ni de vos illusions.

J'ai ici deux cassettes audio qui ont été enregistrées la fin de semaine dernière à l'occasion d'un débat entre experts internationaux. Vous pouvez les écouter, mais je voudrais les récupérer.

Merci beaucoup.

La présidente: Marcel, si vous voulez donner ces cassettes au greffier, nous pourrons les écouter. Merci.

M. Marcel Wolfe: Je voudrais dire une autre chose. Est-ce que cette séance est enregistrée? Je veux un exemplaire du compte rendu en anglais et en français, et rien ne saurait m'empêcher de les obtenir.

La présidente: Personne ne prétend le contraire, Marcel.

M. Marcel Wolfe: Je ne veux pas avoir à chercher sur Internet. Je veux que vous m'en fournissiez un exemplaire. Merci.

La présidente: Un instant, monsieur Wolfe, s'il vous plaît.

C'est toujours la façon normale de procéder ici. Il vous suffit de le demander, et vous l'obtiendrez.

Notre témoin suivant est Richard DeSylva, propriétaire de The Herb Works.

• 1105

M. Richard DeSylva (propriétaire-exploitant, The Herb Works): Merci, madame la présidente; bonjour, mesdames et messieurs.

Je vous remercie de m'avoir invité à venir à Ottawa, car toute cette question me préoccupe grandement. Je suis herboriste depuis 22 ans et fabricant depuis 13 ou 14 ans. En ce qui concerne la fabrication, mon entreprise est passée de cinq ou six employés à environ deux, et encore, je vais sans doute devoir les licencier à cause de tous les remous qui agitent notre secteur d'activité. Donc, comme je l'ai dit, toute cette question me préoccupe grandement.

Cela me rappelle la période de 1983 où je correspondais avec l'équipe de révision de la législation provinciale sur les professions de la santé. À l'occasion de cette révision, nous avons reçu une trousse d'information où étaient énumérés les critères de la réglementation. À la fin de cette liste, on signalait que les herboristes doivent travailler en fonction d'un ensemble de connaissances acquises auprès d'un établissement d'enseignement reconnu.

Je voudrais vous dire que c'est encore de cela qu'il est question aujourd'hui; c'est cet ensemble de connaissances qui permet de déterminer si une substance est un aliment ou un médicament. À tout le moins, il s'agit d'une zone très grise.

Les contraintes de temps ne me permettent pas de vous dire en détail pourquoi nous considérons les plantes médicinales comme des aliments spécialisés pour les cellules de l'organisme. Nous ne pouvons pas entrer dans les considérations culturelles, psychosociales, historiques, religieuses, philosophiques, écologiques, etc.; je dirais simplement qu'en vertu d'un ensemble de connaissances on peut affirmer que les plantes médicinales sont des aliments très spécialisés.

Comme nous n'avons pas le temps d'entrer dans les détails de cet ensemble de connaissances, je tiens à dire que le gouvernement n'a pas à juger ceux qui choisissent d'utiliser ces substances pour assurer leur santé et leur bien-être. S'il y a une chose dont on doit se préoccuper, c'est de façon très générale la question de l'efficacité et de l'innocuité.

Il existe dans ce domaine trois faux-fuyants dont je voudrais vous parler.

Le premier faux-fuyant consiste à savoir si ces substances sont des aliments ou des médicaments. On constate aujourd'hui, grâce à la recherche dans le domaine des nutraceutiques, ou aliments fonctionnels, que la documentation vienne du Japon, d'Allemagne, du Canada ou des États-Unis, que plus on étudie les aliments, plus on les analyse, plus on découvre qu'ils contiennent des substances présentant des avantages «thérapeutiques». Que ce soit les lycopènes dans les tomates, les antioxydants dans les légumes ou l'indol-3-carbinol du brocoli, qui a des propriétés anticancéreuses, plus on les étudie, plus on leur trouve des propriétés thérapeutiques.

On sait maintenant que les aliments ont des propriétés thérapeutiques. C'est donc un faux problème que de se demander si une substance est un aliment ou un médicament. Les aliments ont des vertus thérapeutiques.

Le deuxième faux-fuyant est la question de l'innocuité. Le gouvernement se préoccupe grandement de l'innocuité de ces substances. Il prétend qu'un certain nombre de plantes médicinales sont potentiellement dangereuses. À mon avis, cela n'est pas scientifique.

Je voudrais renvoyer le comité à un article publié dans le numéro de Science Magazine d'avril 1987 et rédigé par trois médecins, Bruce Ames, Lois S. Gold et Renae Magaw, intitulé «Ranking Possible Carcinogens». Les auteurs indiquent dans cet article que l'on trouve dans les aliments différentes substances, qui une fois isolées et analysées séparément, peuvent avoir un effet carcinogène, que ce soit les hydrazines dans les champignons, les psoralènes dans le céleri, l'estragole dans le basilique, l'allo-isothiocyanate dans la moutarde brune et les nitropyrènes dans les aliments grillés.

Apparemment, tous ces aliments contiennent des substances potentiellement carcinogènes, mais nous nous en accommodons, nous les tolérons et nous parvenons à les métaboliser.

Si tel est le cas, pourquoi se préoccuper des substances contenues dans les plantes médicinales? Je peux vous affirmer qu'elles sont loin d'être aussi toxiques que les scientifiques voudraient nous le faire croire.

Dans le même article, on parle d'une échelle des gradients appelée «Herpes Index: Human Exposure to Rodent Potency», qui indique l'une des plantes médicinales interdites par la Direction générale de la protection de la santé parce qu'elle serait carcinogène, à savoir la feuille de consoude. En réalité, la feuille de consoude a à peu près la même toxicité potentielle qu'un sandwich au beurre d'arachides. Voilà pour les données scientifiques.

• 1110

Je peux vous dire qu'il en va de même pour les autres plantes médicinales dont le ministère se préoccupe. Si l'on veut parler de toxicité, il faut se fonder sur des données scientifiques éprouvées.

Si certaines plantes sont potentiellement toxiques, il faut se préoccuper des personnes qui pourraient en consommer, et je peux vous dire que si les plantes en question sont consommées à des doses normales, elles ne feront jamais de mal à personne.

Je suis phytothérapeute, comme je l'ai dit, depuis 22 ans. C'est le Dr Bennett qui a exprimé des inquiétudes? Permettez-moi de vous dire que j'ai parlé à des phytothérapeutes du monde entier à l'occasion de conférences que j'ai eu l'occasion de donner en Russie, en Australie, aux États-Unis et au Canada. Je ne connais aucun phytothérapeute qui utilise la belladone sous forme de plante, à cause du risque de toxicité que cela représenterait. Sous forme homéopathique, c'est-à-dire extrêmement diluée, comme quelqu'un dans le groupe précédent l'a observé, il n'y a pas de risque de toxicité.

Dans la vie, madame le docteur, tout se situe sur cette échelle qu'on appelle le principe d'Arndt-Schultz en pharmacologie: une grande quantité tue, une quantité modérée paralyse et une petite quantité stimule. Tout se situe sur cette échelle et doit être jugé dans ce contexte.

Troisième faux-fuyant: la Direction de la protection de la santé nous dit que tout produit à dosage pharmaceutique, c'est-à- dire sous forme de capsule ou de comprimé, est automatiquement un médicament. C'est une erreur. Comme je l'ai dit, je suis phytothérapeute depuis 22 ans, et au début je disais aux gens de prendre des thés et des concentrés liquides. Très souvent, ils me disaient: «Oh, cela a un goût horrible.» Quand on met ces produits dans une capsule ou un comprimé, c'est simplement un moyen pour les administrer, rien de plus, rien de moins.

Quand on pense au rythme moderne de notre existence, les gens n'ont plus le temps, même s'ils n'ont rien contre le goût des plantes, de se faire une tasse de thé, de la passer, d'ajouter un peu de miel ou d'autre chose, et de la boire. Ils veulent quelque chose qu'ils peuvent avaler avec une gorgée d'eau en sortant de chez eux.

Par conséquent, les préoccupations au sujet de ces substances doivent être jugées sur la base de ces trois observations.

Vous nous avez demandé des solutions, madame la présidente, et ce que je peux vous suggérer, c'est de ne pas vous mêler de ce secteur. Laissez-nous nous autoréglementer. Laissez-nous dispenser nous-mêmes nos produits. Je suis d'accord avec Ron Dugas, qui a parlé tout à l'heure: s'il faut faire des mises en garde, précisez sur les étiquettes de ces produits qu'ils n'ont pas été évalués par la Direction de la protection de la santé ou par un autre organisme qui pourrait remplacer cette direction.

Et cela m'amène à ma troisième observation: il faut absolument éliminer la Direction de la protection de la santé, ou du moins changer radicalement l'organisation actuelle. Ils n'ont absolument rien fait pour protéger le public des substances qui sont vraiment dangereuses, c'est-à-dire beaucoup de médicaments pharmaceutiques. Cela a déjà été dit: je n'insisterai donc pas sur ce point. Ce qu'il faut faire, c'est laisser cette industrie se développer, non pas sans poser des questions, en l'absence de toute réglementation, mais la réglementer comme l'industrie de l'alimentation. Comme mon collègue, le Dr Rowland, vous le dira certainement, les règlements dans ce secteur de l'industrie sont amplement suffisants.

Merci beaucoup.

Des voix: Bravo!

La présidente: Marilyn Nelson, allez-vous parler la première, ou bien Josip va-t-il commencer?

Mme Marilyn Nelson: D'accord, Josip. Commencez donc.

M. Josip Gabre (Freedom of Choice in Health Care): Mesdames et messieurs, la médecine nous apprend que notre corps produit environ 200 millions de nouvelles cellules chaque minute, et parmi ces cellules il y en a certaines qui sont cancéreuses, et d'autres qui sont faibles et ne servent absolument à rien. Toujours d'après la médecine, notre système immunitaire détruit toutes les cellules cancéreuses et toutes les cellules faibles dès qu'elles sont créées, et respecte les bonnes cellules, celles qui sont saines.

La conclusion de cela, c'est que nous produisons des cellules cancéreuses à chaque instant et que notre système immunitaire les contrôle. Lorsque notre système immunitaire est en difficulté, il y a des cellules cancéreuses qui passent au travers et qui commencent à se développer. Autrement dit, nos cellules saines et nos cellules cancéreuses ont des métabolismes identiques et ne peuvent être reconnues et contrôlées que par notre système immunitaire. Par conséquent, la seule chose qui puisse tuer sélectivement les cellules cancéreuses et épargner les cellules saines, c'est un système immunitaire en bonne santé.

Si on considère que nos cellules sont modelées sur des êtres humains, avec une intelligence humaine, qu'elles ont besoin de protéines, de minéraux, de vitamines et d'enzymes, dans tous les cas sous forme organique, eh bien, ce que les êtres humains ne peuvent pas faire, leurs cellules ne le peuvent pas non plus. Par conséquent, lorsque nous ne pouvons ni assimiler ni éliminer des produits synthétiques, nos cellules ne le peuvent pas non plus.

• 1115

Aux gens qui ne sont pas d'accord, je demande: est-ce que vous mangez souvent des verres en plastique, des bouteilles en plastique ou des sacs en plastique pour votre déjeuner ou votre dîner?

D'autre part, il y a beaucoup de produits synthétiques, et en particulier ceux qu'on utilise pour lutter contre le cancer, qui sont toxiques. La chimiothérapie, par exemple, fait appel au gaz moutarde qu'on utilisait sur les champs de bataille de la Première Guerre mondiale pour tuer les gens. Comment pouvons-nous tuer sélectivement de cette façon: tuer le cancer et épargner les cellules saines? S'il s'agissait de deux métabolismes différents, effectivement. Ainsi, nous n'avons toujours pas de médicament qui tue sélectivement certaines cellules et en épargne d'autres, et tous les produits synthétiques sont nuisibles pour l'homme.

Effectivement, il est possible de reproduire en laboratoire n'importe quelle formule qui existe dans la nature, mais ce n'est pas la même chose. Dieu a donné aux êtres humains toutes sortes d'herbes pour guérir toutes sortes de maladies, y compris le cancer.

Il est évident que les chats et les chiens, sans être végétariens, ont plus de bon sens que les êtres humains. Lorsqu'ils sont malades, ils vont dans la nature, dans le jardin, ils trouvent une herbe appropriée, ils la mangent, et cela les guérit. Dieu a donné le même instinct à l'homme, mais, pour une raison quelconque, l'homme est devenu trop malin ou trop stupide, je ne sais si c'est l'un ou l'autre. En tout cas, une chose est certaine, et c'est notre problème: il s'est mis à beaucoup trop aimer l'argent.

J'étais moi-même en train de mourir d'un cancer, et au dernier moment j'ai trouvé un remède, le taheebo. Je l'ai utilisé, et je me suis guéri moi-même en dépit du mal que m'avait fait la profession médicale.

Après cela, j'ai étudié le cancer en détail et j'ai écrit un livre, How I Beat Cancer. Je consulte des gens qui meurent du cancer, et beaucoup de vies sont épargnées ainsi. Je n'ai pas de dossiers, je ne le fais pas d'une façon professionnelle, et c'est tout à fait gratuit.

Si la Direction de la protection de la santé se soucie de notre santé, il faudrait interdire tous les médicaments synthétiques, et en particulier la chimiothérapie. Il faut que les gens puissent utiliser les plantes librement, en particulier ceux qui sont en train de guérir.

Pourquoi nous interdit-on de dire qu'une plante guérit certaines maladies? Si c'est vrai, c'est vrai, et nous devons pouvoir l'utiliser librement.

Mesdames et messieurs, à mon avis, personne ne nous a jamais guéris. Notre corps est le seul qui puisse se guérir lui-même. De l'extérieur nous obtenons des informations sur la façon de stimuler notre corps, nous lui donnons des stimulants, puis nous stimulons notre propre cerveau pour qu'il travaille en collaboration avec notre corps. Voilà comment les gens guérissent: c'est toujours de cette façon-là. Si la Direction de la protection de la santé veut nous protéger de la maladie, elle doit commencer par lever l'interdiction qui pèse sur toutes les plantes et par interdire tous les produits chimiques. En fait, ce qui se fait actuellement est très nocif pour notre santé.

Mesdames et messieurs, si jamais un jour—et c'est une possibilité, car d'après les statistiques un jour viendra où une personne sur deux mourra d'un cancer—si jamais vous aviez un cancer, est-ce que vous accepteriez qu'on vous tue lentement et dans la douleur? Si c'est votre intention, je vous félicite. Je ne veux pas savoir ce qui se passe dans votre esprit.

Si vous voulez nous protéger, faites ce qu'il faut. Faites-le en appliquant les lois de Dieu et du bon sens. Si les compagnies pharmaceutiques ont le droit de gagner tellement d'argent, de notre côté nous avons le droit d'être en bonne santé. Nous vous avons élus et, à ce titre, nous avons le droit de vous demander de nous servir. En fin de compte, je dirais sans hésitation que le cancer est une maladie guérissable. Le cancer est une maladie facile à guérir: il suffit d'utiliser les bons moyens.

Merci.

Des voix: Bravo!

La présidente: Merci beaucoup.

Des voix: Bravo!

La présidente: Madame Nelson.

Mme Marilyn Nelson: Bonjour. Je représente Freedom of Choice in Health Care, un organisme qui représente près de 200 000 consommateurs, non pas des groupes d'intérêts, simplement des consommateurs.

• 1120

Depuis un an, nous avons lancé une campagne: «Les aliments ne sont pas des médicaments». Des milliers de lettres ont été envoyées à des députés dans tout le pays. Aujourd'hui, nous vous apportons près de 200 000 pétitions. Nous n'avons pas pu les apporter dans la salle, mais vous pouvez les voir. Cela représente énormément de monde.

Cela fait près de 200 000 personnes qui réclament la fin des règlements, et non pas une troisième catégorie, comme on l'envisage. Par contre, ce qu'elles veulent, c'est des poursuites judiciaires pour mettre fin une fois pour toutes à cette injustice. Elles vous demandent également de rendre au public les produits qui lui appartenaient dès le départ.

À l'heure actuelle, nous sommes en train de préparer un concert-bénéfice national pour mieux faire comprendre aux gens à quel point de nouveaux règlements seraient inutiles. Les consommateurs s'impatientent de plus en plus lorsqu'ils entendent parler d'une troisième catégorie et de nouveaux règlements: ce n'est pas un secret. Ce qu'ils veulent, c'est de l'éducation, et non pas des règlements.

Ce n'est pas une question de sécurité. Tout cela tourne autour de la propriété des plantes médicinales et des fortunes qu'on pourrait faire dans ce domaine. Ne jouons pas ce jeu-là.

Cela m'amène à la question de la troisième catégorie. J'ai affiché quelque chose, et je vous demanderais de le regarder tout à l'heure. Cette troisième catégorie suppose que les Canadiens sont vraiment stupides. Les Canadiens savent que ce n'est pas du tout nécessaire. Nous avons déjà plus de règlements que nous ne pourrons jamais en utiliser.

L'article 4 de la Loi sur les aliments et drogues précise qu'il est interdit de vendre un aliment qui «contient une substance toxique ou délétère». Qu'est-ce que cela veut dire?

L'article 7 se lit comme suit: «Il est interdit de fabriquer, de préparer, de conserver, d'emballer ou d'emmagasiner pour la vente des aliments dans des conditions non hygiénique.» Cela me semble très clair.

L'article 5 dit: «Il est interdit d'étiqueter,... de vendre un aliment—ou d'en faire la publicité—de manière fausse, trompeuse ou mensongère ou susceptible de créer une fausse impression.»

Pour l'amour du ciel, nous avons plus de règlements que nous n'en avons besoin, nous en avons des montagnes, et à côté de cela nous avons la Loi sur l'emballage et l'étiquetage des produits de consommation. Nous avons les dispositions relatives aux pratiques mensongères de la Loi sur la concurrence. Pourquoi diable aurions-nous d'autres règlements? C'est tout à fait inutile, et vous allez devoir vous préparer à prouver au public l'utilité de ces séances mêmes que vous avez actuellement.

De plus, pensez-vous que le public ne sait pas que tout cela est fondé sur de fausses informations? Je parle du besoin d'une troisième catégorie.

On a parlé de la belladone. Dès que j'ai lu le rapport de Santé Canada... Après tout, nous utilisons tous les même ma huang, belladone, etc. J'ai appelé d'innombrables herboristes, et tous me disent qu'on ne s'en sert même pas dans notre pays.

C'est une véritable bêtise. Si vous voulez des règlements, vous allez devoir annoncer cela aux gens et espérer qu'ils seront assez bêtes pour se laisser prendre.

Toutefois, il serait bon de s'interroger sur tous les programmes particuliers que cela cache. Je n'aurai probablement pas le temps d'en parler aujourd'hui, mais c'est expliqué dans notre mémoire—je ne sais pas si certains d'entre vous l'ont lu. Si nous avons le temps d'en discuter plus tard, ce sera avec plaisir.

Il y a également le fait que ce n'est pas constitutionnel, que c'est injuste. Si vous ne pouvez pas prouver qu'il y a un problème de sécurité, vous n'avez pas le droit d'introduire une troisième catégorie de réglementation.

Et nous vous posons la question: où sont tous ces cadavres? On a parlé de cela ce matin. Vous avez d'autres chats à fouetter. Il y a d'autres domaines où il y a des centaines de milliers de cadavres, mais personne ne semble en parler. Vous vous attaquez aux plantes qui sont du domaine public.

En dernier lieu, et c'est probablement le plus important, les Canadiens n'en veulent tout simplement pas. Effectivement, à l'heure actuelle il y a une certaine confusion à cause des fausses informations qui circulent, et certains peuvent penser que nous avons besoin de règlements, mais ce n'est pas vrai.

Si on pense à cela, je vous demande... Votre mandat, c'est d'offrir aux consommateurs une liberté de choix et d'accès à des produits naturels. Vous avez dit que vous cherchiez des solutions. Je vous ferais observer que la solution est vraiment très simple.

S'il est prouvé qu'un produit est dangereux, placez-le dans la catégorie des médicaments. S'il n'y a pas de cadavres, et dans la plupart des cas, dans 99 p. 100 des cas, il n'y en a pas, laissez cela dans le domaine public, car c'est sa place. Nous savons que les règlements coûtent de l'argent, cela gaspille l'argent du contribuable, et c'est inutile.

• 1125

Je vous préviens donc que vous allez devoir prouver aux Canadiens que ces plantes tuent beaucoup de monde. Nos adversaires le répètent sans cesse, mais où est la preuve? Parlons donc de ces programmes cachés, disons donc à quel point cela va faire augmenter le prix des plantes naturelles qui sont parfaitement sûres. À cause de cela, elles vont devenir moins accessibles.

Il y a des centaines de milliers de personnes âgées et de gens pauvres qui ont besoin de ces produits. Chez moi, j'ai un flacon de millepertuis qui a coûté 3,60 $. Vous allez voir, cela va passer à 150 $.

Il y a beaucoup de produits qui étaient jadis en vente libre à moins de 10 $ la bouteille; maintenant vous pouvez avoir le même produit, c'est devenu un médicament, et cela coûte 120 $ ou 200 $. C'est la même chose. C'est un véritable désastre.

Merci beaucoup.

Des voix: Bravo!

La présidente: M. David Rowland, du magazine Health Naturally.

M. David W. Rowland (coéditeur, Health Naturally): Merci. J'ai donné plusieurs exemplaires du magazine à M. Préfontaine, au cas où vous voudriez les feuilleter. J'attire votre attention sur un article:

    La police des vitamines terrorise les fournisseurs. La Direction de la protection de la santé fait appel à la GRC pour faire des descentes dans les résidences de gens qui ont été accusés de faire le trafic de suppléments diététiques sans danger.

Cela pourrait vous intéresser.

Je parle avant tout de solutions, et je veux que les choses soient incroyablement claires. D'après ce que j'ai entendu, il y a beaucoup de confusion, et j'ai l'impression que vous voulez tous sincèrement trouver une solution au problème.

Pour trouver cette solution, vous devez d'abord identifier la cause du problème. Tout le reste est palliatif, tout le reste s'attaque aux symptômes. Il y a des intérêts particuliers, effectivement, mais ce qui permet à ces intérêts particuliers d'exister, c'est une définition qui figure dans la Loi sur les aliments et drogues et qui est dépassée.

Vers 1952, la Loi sur les aliments et drogues a confirmé une définition qui remontait à 1927. Elle précise:

    «drogue» Sont compris parmi les drogues les substances ou mélanges de substances fabriqués, vendus ou présentés comme pouvant servir:

      a) au diagnostic, au traitement, à l'atténuation ou à la prévention d'une maladie, d'un désordre, d'un état physique anormal ou de leurs symptômes, chez l'homme ou les animaux,

      b) à la restauration, à la correction ou à la modification des fonctions organiques chez l'homme ou les animaux,

etc. Ce que cela signifie, comme Ron Dugas l'a justement fait observer ce matin, c'est que ce n'est pas la nature d'une substance qui détermine si c'est un médicament ou pas. Ce n'est pas son innocuité qui détermine qu'il s'agit d'un médicament. C'est l'utilisation qu'on en fait, c'est le fait qu'on prétend qu'elle a certains effets.

À votre avis, qu'en pensera un magistrat lorsque cette définition sera contestée devant un tribunal? En ce moment, nous sommes sur le point de contester cette définition. Nous avons signifié nos intentions à Allan Rock le 27 juin.

Des voix: Bravo!

M. David Rowland: Le jour même, il a répondu à nos avocats qu'il avait l'intention de retarder la troisième phase du projet de recouvrement des coûts pour ce secteur. Ce que nous demandions, c'était une injonction. En fait, il nous l'a accordée, mais il reste neuf points à déterminer. Il est possible que nous nous retrouvions devant la cour avec un préavis de deux semaines.

Ce qui nous importe, c'est de rendre aux gens le pouvoir de prendre leurs propres décisions. C'est un pouvoir qui a été supprimé arbitrairement et que nous voulons récupérer.

Cette définition de «drogue» doit être changée et/ou limitée pour que les aliments et les médicaments deviennent deux choses bien distinctes. Si une substance ne présente aucun danger pour la santé humaine, le gouvernement du Canada n'a pas à imposer de restrictions.

Plusieurs d'entre vous ont signalé que les articles 4 et 5 donnent déjà à Santé Canada tous les pouvoirs dont ce ministère a besoin pour réglementer les produits naturels, sur le plan de l'étiquetage, de l'innocuité, etc. Je ne reviendrai donc pas sur cette question.

Cela dit, voici un exemplaire de la Loi constitutionnelle. C'est la loi suprême du Canada, qui donne au Parlement tous ses pouvoirs, et le Parlement n'a aucun pouvoir qui ne soit mentionné dans cette loi. Or, cette loi ne mentionne nulle part que le Parlement exerce une compétence sur la santé. Le seul endroit où on mentionne la santé, c'est pour préciser que cela relève exclusivement des provinces. Voilà donc une autre chose qui mérite d'être réglée.

Quand Santé Canada décide ou tente de décider qu'une substance est efficace ou n'est pas efficace pour traiter un état pathologique donné, le ministère pratique la médecine. Il n'est pas du ressort du gouvernement fédéral de dire si une substance donne ou non des résultats. Tenter de prendre une telle décision, c'est pratiquer la médecine sans permis. C'est de ressort provincial.

Le Parlement s'est vu confier le pouvoir de réglementer le commerce. Dans tous les autres domaines, il limite son intervention en matière de commerce à la sécurité, par exemple en ce qui a trait aux jouets d'enfants, à la véracité de la publicité sur les automobiles, etc. La même approche s'impose pour notre secteur. Si vous vous contentez de veiller à la sécurité, à prévenir la fraude et à attraper les fraudeurs, c'est tout ce que le secteur demande. Si vous en faites davantage, c'est que vous tombez dans le piège et que vous pratiquez la médecine sans permis.

• 1130

Comme Ron Dugas l'a signalé ce matin, l'efficacité n'est vraiment pas du ressort du gouvernement fédéral. Si une substance est sans danger, son efficacité n'est aucunement pertinente aux fins du processus réglementaire.

Maintenant, ce que M. Gabre n'a pas dit, c'est qu'il est interdit de vendre librement ce thé taheebo. Il a reçu il y a quelques semaines un avis de Santé Canada lui ordonnant de cesser de vendre ce produit, qui a été classé comme un nouveau médicament.

Mais c'était dans une décision judiciaire rendue en juin 1988 dans l'affaire R. contre Quest Vitamin Supplies Ltd. Le tribunal avait conclu qu'une nouvelle disposition du règlement sur les aliments et drogues était contraire à l'article 7 de la Charte des droits et libertés. Pourtant, on continue d'appliquer cette disposition aux termes de laquelle ce produit est considéré comme un nouveau médicament, en dépit du fait qu'il s'agit simplement d'une tisane qui ne présente aucun danger et qui n'a aucun effet secondaire.

M. Gabre a traité beaucoup de gens pour les aider, gratuitement. Il a des témoignages documentés. Il peut citer des études de recherche. Santé Canada l'empêche de dire la vérité.

J'ai entendu bien des gens parler du danger potentiel des suppléments alimentaires. Je n'ai jamais entendu personne parler du tort causé quand des Canadiens sont tués par la suppression de la vérité.

Dès que l'on impose des limites à l'attribution de propriétés à un remède naturel, on envoie automatiquement les clients acheter des médicaments d'ordonnance, qui sont mortels. On pourrait donc soutenir que restreindre indûment des solutions de rechange sans danger en faveur des médicaments d'ordonnance, c'est envoyer à la mort bon nombre de Canadiens.

Les gens doivent avoir accès à ces substances. Il y a des mécanismes qui garantissent leur sécurité dans la Loi sur les aliments et drogues.

Il existe une solution d'une simplicité extraordinaire. Le projet de loi C-307 imposerait des limites à la définition de «médicament», de sorte que cela ne reposerait plus sur l'attribution de propriétés, sur les dires des défenseurs du produit ou sur l'utilisation d'une substance donnée. La définition reposerait entièrement sur la sécurité. Voilà ce qui va protéger le public.

Si une substance est à la fois un aliment et un médicament—et cela peut assurément être le cas d'après cette définition—alors, aux termes du projet de loi C-307, ce produit peut seulement être réglementé à titre d'aliment, à moins qu'il n'y ait prépondérance des probabilités sur le plan scientifique montrant que ce produit est nocif à la posologie inscrite.

Je sais que créer une troisième catégorie est une solution à première vue simpliste. Eh bien, ces substances sont différentes des aliments ordinaires. Mais sur le plan de leur innocuité il n'y a pas de différence. C'est tout ce qu'il vous faut pour prendre une décision. Ce sont en effet les seuls aspects qui sont de votre compétence aux termes de la Constitution: l'innocuité des produits, non pas leur efficacité.

Il n'y a donc aucune différence sur le plan de la sécurité entre ces produits et les aliments ordinaires. Plus de gens meurent de chocs anaphylactiques causés par les arachides que par l'ingestion de l'un ou l'autre de ces remèdes.

Il faut donc que ces substances continuent d'être en vente libre. En confier la réglementation à une nouvelle bureaucratie qui serait chargée d'une troisième catégorie, c'est quand même empêcher le public d'y avoir accès. J'ai lu les mémoires et j'ai vu et entendu ce que les gens disent.

Nous nous en sommes pris à Santé Canada à cause de ses efforts pour torpiller l'industrie des produits de santé naturels. On impose la mort lente à ce secteur. Le ministère ne cesse de lui enlever des produits, etc. On insiste sur l'obtention de permis pour les usines, les produits, les BPF—et tout cela s'accompagne de droits à payer.

Que préconisent donc ceux d'entre vous qui réclament la création d'une troisième catégorie? Vous préconisez exactement la même chose: l'obtention de permis pour les usines et les produits, l'approbation préalable des attributions de propriétés.

Rien ne justifie de censurer les attributions de propriétés, de stipuler que les fabricants ou les fournisseurs peuvent attribuer des propriétés seulement s'ils ont obtenu au préalable l'approbation d'une bureaucratie quelconque. S'il y a fraude, poursuivons-les. Mais cela, c'est de la censure. C'est contraire à la liberté de choix des consommateurs en matière de santé.

Donc, si l'on n'adopte pas le projet de loi C-307 ou une autre mesure atteignant le même objectif, nous sommes disposés à faire tout ce qu'il faudra. Vous avez ici l'occasion de résoudre le problème et d'adopter la loi la plus avancée du monde en matière de liberté dans le domaine de la santé. Si vous ne résolvez pas le problème, il ne va pas disparaître pour autant; nous n'allons pas nous effacer, et les contestations judiciaires vont se poursuivre.

Merci.

Des voix: Oh, oh.

La présidente: Merci. Monsieur Elley.

• 1135

M. Reed Elley (Nanaimo—Cowichan, Réf.): Merci beaucoup, madame la présidente.

Je voudrais faire une déclaration personnelle. Je ne suis pas certain que ma position concorde avec celle d'autres membres du comité, mais je crois que c'est peut-être le cas. Je me considère comme un Canadien ordinaire qui a été élu par des Canadiens ordinaires pour se lancer à la recherche de la vérité. À mon avis, c'est vraiment le noeud de cette affaire: nous sommes à la recherche de la vérité. Qu'est-ce qui est vrai?

En fait, je vous demande, à vous qui êtes venus nous faire des exposés—et je suis extrêmement content de votre présence ici—de ne pas nous percevoir comme des ennemis dans cette affaire. Nous ne sommes pas vos ennemis. Nous sommes des Canadiens ordinaires qui s'efforcent, au nom d'autres Canadiens ordinaires, de trouver une solution dans ce dossier. Ce que nous constatons, c'est bien sûr qu'on nous a donné une extraordinaire occasion d'en apprendre plus sur cette question que n'importe qui d'autre au Canada. Cela nous impose une lourde responsabilité, et je l'assume entièrement. Ce que je recherche, c'est la vérité. Allons au fond des choses et faisons ressortir la vérité.

Nous avons entendu de nombreux représentants de divers secteurs de l'industrie des aliments de santé naturels: des fabricants, des commerçants, et des groupes de consommateurs. C'était très varié. Nous avons entendu des gens qui sont venus réclamer une troisième catégorie. D'autres nous ont dit qu'ils n'avaient pas d'objection à une troisième catégorie. Sauf erreur, la plupart d'entre vous ici présents disent qu'ils ne veulent pas de troisième catégorie, que ce n'est pas nécessaire.

Nous devons nous demander où se trouve la vérité dans ce dossier en nous fondant sur les témoignages qui nous sont présentés. Donc, quand je pose cette question, n'y voyez pas une question émanant de l'ennemi; essayons simplement de découvrir la vérité dans tout cela.

La semaine dernière, je me trouvais dans ma circonscription, qui est Nanaimo—Cowichan, sur l'île de Vancouver, et je lisais le Times Colonist de Victoria. En première page, on racontait l'histoire d'une femme qui avait utilisé des produits de santé naturels toute sa vie. L'année dernière, elle a pris du Sleeping Buddha et, malheureusement, ce produit importé contenait du valium. Après en avoir pris pendant une assez longue période, elle a eu de graves problèmes.

Vous nous avez dit qu'à votre avis le seul rôle du gouvernement devrait être de garantir l'innocuité des produits. Je pense que c'est ce que vous nous avez dit. Comment pouvez-vous demander au gouvernement de s'engager dans le domaine de l'innocuité, qui soulève la possibilité d'attributions frauduleuses de propriétés, ou de produits frauduleux, sans qu'il s'occupe également de faire des essais et de promulguer des règlements? Comment séparer les deux? J'aimerais que l'un ou l'autre des membres du groupe me donne une réponse, car nous nous efforçons de faire sortir la vérité.

M. David Rowland: La vérité, c'est que les articles 4 et 5 de la Loi sur les aliments et drogues donnent déjà à Santé Canada tous les pouvoirs voulus pour avoir cette situation bien en main. L'article 4 interdit de vendre un aliment falsifié ou délétère. L'article 5 interdit de vendre un produit dont l'étiquette donne de fausses indications. Les règlements sont déjà en place, et si Santé Canada veut procéder à un échantillonnage aléatoire, très bien, qu'il en soit ainsi.

Il faut protéger le public et garantir sa sécurité, mais nous n'avons pas besoin d'un nouveau règlement. Il existe déjà. Le crime, c'est que Santé Canada fait ce qu'il ne devrait pas faire et ne fait pas ce qu'il devrait faire.

M. Reed Elley: Je comprends ce que vous dites, mais je pense que M. DeSylva a dit qu'à son avis la Direction générale de la protection de la santé devrait être éliminée. Si on l'élimine, on supprime du même coup la capacité de faire des essais, et, dans ce cas, qui va se charger de mettre à l'épreuve un produit comme celui-là pour que les Canadiens sachent qu'il est sans danger?

M. Richard DeSylva: Les mots clés sont «dans sa forme actuelle». Nous faisons allusion à l'actuelle Direction générale de la protection de la santé.

M. Reed Elley: Veuillez vous expliquer.

M. Richard DeSylva: Je suis tout à fait disposé à accepter la présence d'un organisme de réglementation qui s'occuperait par exemple d'appliquer la Loi sur les aliments et drogues et le règlement connexe, mais je vous demande de changer la Direction générale de la protection de la santé.

M. Reed Elley: Faites-nous des suggestions. Comment vous y prendriez-vous?

• 1140

M. Richard DeSylva: D'accord. Je changerais son mandat, dans le sens proposé par David Rowland. Je confierais le dossier du contrôle de cette industrie à un groupe industriel qui s'autoréglementerait, parce que ce que nous avons vu jusqu'à présent de la part de la Direction générale de la protection de la santé, c'est de la corruption et une mauvaise application du règlement; c'en est rendu au point que les petits fabricants comme moi et d'autres sont acculés à la ruine parce qu'on applique avec trop de zèle ces règles et règlements. En même temps, ils ne sont pas appliqués à l'industrie pharmaceutique. Je vous en supplie, il faut que cela change.

M. Reed Elley: Pouvez-vous documenter cela à notre intention? Vous faites des allégations de corruption. Pouvez-vous documenter cela et nous le faire parvenir?

M. Richard DeSylva: À cet égard, je me reporte simplement aux déclarations faites par le Dr Michèle Brill-Edwards, ancienne inspectrice principale à la DGPS. J'ignore si elle a comparu devant votre comité.

M. Reed Elley: Oui. En fait, elle n'a pas comparu, mais nous savons...

La présidente: Je vous redonnerai la parole.

Oui, monsieur Gabre.

M. Josip Gabre: Puisque l'on parle de réglementation, je n'arrive pas à comprendre comment on peut utiliser la chimiothérapie, dans n'importe quelle circonstance. Il est prouvé que cela tue le patient à tout coup. Par exemple, Kenneth Jones, dans son livre intitulé Pau D'Arco: Immune Power from the Rain Forest, dit à la page 24 que plus de 67 000 produits chimiques différents, 25 p. 100 des médicaments, 48 p. 100 des aliments, 50 p. 100 des produits de beauté, et dans d'autres cas la proportion est de 76 à 82 p. 100... aucun de ces produits chimiques n'est testé pour en vérifier la toxicité.

Où en sommes-nous? Par exemple, si quelqu'un me dit que le taheebo peut me faire du mal... J'en buvais des gallons. Je devrais être mort à l'heure qu'il est. Au lieu de cela, depuis que j'ai moi-même guéri mon cancer, il y a 14 ans, je n'ai pas eu le moindre rhume et je n'en bois plus aujourd'hui qu'une tasse par jour. Dites-nous-le donc, où en sommes-nous?

M. Marcel Wolfe: Pourquoi devrait-il être persécuté par le gouvernement en place? Cet homme n'est qu'un exemple. Il est un cas typique de ce qui va arriver, et cela deviendra beaucoup plus fréquent. Si vous continuez à persécuter les gens de ce genre... nous ne pourrions pas payer pour une telle publicité. Je vous remercie beaucoup.

La présidente: Monsieur Rowland.

M. David Rowland: J'ai deux points à soulever.

D'après la Loi sur la concurrence, pour prouver qu'il y a complot il n'est pas nécessaire de prouver qu'il y a eu des conversations entre les parties en cause. Il faut seulement prouver que l'une des parties bénéficie directement des actions de l'autre; c'est très clair.

Je sais que vous avez tous entendu parler du tryptophane. Cela se vendait auparavant de 10 $ à 14 $ pour 100 capsules dans les magasins d'aliments naturels; aujourd'hui, c'est vendu seulement sur ordonnance, au prix de 120 $ pour la même quantité. Le tryptophane est une solution de rechange sans danger au valium, qui fut à une époque le médicament pharmaceutique le plus vendu dans le monde. Le L-Carnatine, autre aminoacide qui a été retiré du marché sans justification, est une solution de rechange sans danger aux médicaments pour le coeur; il se vendait auparavant dans les magasins d'aliments naturels au même prix de 10 $ à 14 $ pour une bouteille de 100 capsules. Aujourd'hui, on peut s'en procurer seulement sur ordonnance au prix de 190 $ la bouteille.

Il est facile de démontrer qu'il y a quelque chose de louche. Ces produits naturels qui mettent en danger la vente des produits pharmaceutiques les plus vendus sont justement ceux que Santé Canada retire du marché. Il n'est pas nécessaire de prouver qu'il y a eu des conversations pour prouver l'existence d'un complot. C'est le premier point.

L'autre observation que je voudrais faire au sujet de votre remarque, monsieur, c'est que si vous croyez qu'il s'agit seulement de jeter une série de points sur un graphique et de les relier par un trait pour résoudre le problème, je peux vous dire que cela ne va pas marcher. Je veux que vous écoutiez la vérité qui se trouve dans la Loi constitutionnelle, la vérité de cette mauvaise définition dans la loi, et que vous preniez votre décision en conséquence.

La vérité, ce n'est pas nécessairement toujours une question de voir combien de gens sont d'accord ou ne sont pas d'accord. Beaucoup d'intérêts sont en jeu dans la création de cette troisième catégorie, pour empêcher ces produits d'être du domaine public.

Beaucoup de fabricants ont déjà lourdement investi dans l'identification numérique des médicaments. Cela leur coûte des dizaines de milliers—parfois des centaines de milliers—de dollars par année. Ils estiment qu'ils ont un marché protégé et que s'ils peuvent conserver les numéros d'identification de leurs médicaments ou une autre forme quelconque de licence pour leurs produits, cela leur permettra de continuer à écarter les petites entreprises comme celle que dirige Rick DeSylva. Et beaucoup de compagnies comme la sienne ont déjà fermé leurs portes parce qu'elles ne peuvent tout simplement pas rivaliser sur cette base. C'est une façon de garder cela hors de la portée du public.

• 1145

La présidente: Madame Bennett.

Mme Carolyn Bennett: Premièrement, je voudrais dire que nous espérons ardemment réussir à rendre ce système meilleur. C'est la raison de notre présence à tous ici. Nous ne le redirons jamais assez. Vous êtes des gens profondément engagés et vous connaissez votre dossier à fond.

Notre première préoccupation, c'est de veiller à ce que les produits ne causent aucun mal. Nous devons nous assurer, si cela devient la façon habituelle de procéder en la matière, si les thérapies complémentaires deviennent plus généralement acceptées, etc., que cela n'ouvre pas la porte aux charlatans et à des gens qui, contrairement à vous-mêmes, seraient prêts à ouvrir une clinique pour cancéreux et à leur vendre de la teinture de pervenche, qui est en fait un produit très toxique.

Tout ce qui pousse n'est pas sûr. Je tiens à m'assurer que quand nous rédigerons la loi nous assurerons la protection du public. Nous avons tous vu—en tout cas, j'en ai vu dans ma pratique—des gens qui se trompent du tout au tout en ce qui a trait à l'utilisation traditionnelle de certains produits. Il y a des gens qui donnent de la vitamine C pour abaisser la tension artérielle. Il y a des gens qui insèrent dans leurs attributions de propriétés des éléments qui ne correspondent tout simplement pas à l'usage traditionnel.

Je peux acheter des oranges chez le fruitier, ou acheter de la vitamine C, ou acheter un produit que l'on me présente sous l'étiquette «acide ascorbique, bon pour abaisser la tension artérielle», mais comment décider du rôle que devrait jouer le gouvernement? De la même manière, je peux acheter une darne de saumon, ou de l'huile de poisson, ou de la DHA.

Bien des gens, non pas ceux que vous représentez, trouvent que dès que l'on met un produit dans des capsules, qu'on embouteille celles-ci et qu'on appose une étiquette pour attribuer des propriétés à ce produit, il ne s'agit plus vraiment d'un aliment.

La présidente: Monsieur Wolfe, voulez-vous répondre en premier?

M. Marcel Wolfe: Est-ce un simple effet du hasard que nous soyons encore en vie? Depuis la nuit des temps, il y a toujours eu des charlatans. Alors comment se fait-il que nous ne soyons pas morts? Comment se fait-il que nous n'ayons pas ce dont nous avons besoin, d'après vous...

Mme Carolyn Bennett: Non, vous me posez des questions. Je veux une réponse.

M. Marcel Wolfe: Vous avez fait une déclaration. J'en discute.

Mme Carolyn Bennett: Non, je vous ai demandé ce que nous devrions faire, d'après vous.

M. Marcel Wolfe: Mais dans votre question vous laissez entendre que nous avons besoin de règlements parce que nous avons peur des charlatans.

Mme Carolyn Bennett: Et la teinture de pervenche pour les cancéreux, qu'en faisons-nous?

Mme Marilyn Nelson: Pour ce qui est de la teinture de pervenche, le gouvernement peut peut-être intervenir. Où sont les efforts de sensibilisation? Il suffit d'éduquer le public et de le sensibiliser. En somme, nous vous invitons à ne pas réglementer cela.

Mme Carolyn Bennett: Prenons le cas de quelqu'un qui ouvre une boutique et qui vend de la teinture de pervenche... Nous savons que c'est une substance qui est toxique, car, en fait, c'est un médicament anticancéreux. Le gouvernement ne devrait-il pas simplement sensibiliser la population pour que les gens n'achètent pas ce produit?

Mme Marilyn Nelson: Non. Je crois savoir qu'il existe déjà une réglementation concernant la publicité fausse et trompeuse relativement aux produits sur le marché. La réglementation existe déjà. Il suffit de faire l'éducation de la population. C'est la seule intervention gouvernementale qui m'apparaisse justifiée.

David voudra peut-être faire un commentaire différent.

M. David Rowland: Pour ce qui est des produits dont l'étiquette renferme des erreurs—lorsqu'on dit que la vitamine C peut faire baisser la tension artérielle, etc.—si l'étiquette renferme une affirmation fausse, le gouvernement a les coudées franches pour mettre un terme à cela et poursuivre les contrevenants en vertu de l'article consacré aux aliments dans l'actuelle Loi sur les aliments et drogues. L'article 5 autorise Santé Canada, ou tout autre organisme de réglementation, à intervenir chaque fois qu'un produit n'est pas étiqueté convenablement ou que l'étiquette renferme une information fausse, trompeuse ou mensongère.

Ce qui vaut dans un autre domaine vaut tout autant pour la publicité. La loi souscrit au principe de la vérité. Il y a déjà une réglementation en place. Si les règlements ne sont pas appliqués, il faudrait qu'ils le soient. Le consommateur n'a besoin de rien d'autre qu'une réglementation bien appliquée pour se protéger.

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À mon avis, on s'enferre dans cette question de l'autoréglementation. Nous sommes en présence d'un secteur qui prospère en essayant d'aider les gens à améliorer leur santé. Il n'est pas dans l'intérêt des fournisseurs d'altérer leurs produits ou d'y glisser du poison. Oui, des accidents peuvent arriver, mais un fabricant qui tuerait ses clients perdrait sa clientèle. Le simple fait de mettre en marché un produit avarié nuit à leur réputation au point de les forcer à fermer leurs portes. Personne n'achètera plus leurs produits.

En toute logique, il est dans l'intérêt de l'industrie de fournir des produits sains. D'ailleurs, c'est leur raison d'être. Leur champ d'activité est la santé. Du fait de cet intérêt, auquel s'ajoute la réglementation dont nous disposons déjà contre les substances dangereuses et la fausse représentation, nous n'avons pas besoin d'autre chose. Je pense que le projet de loi C-307 y veillera.

La présidente: Mme Bennett a le temps, et il y a deux autres personnes qui veulent répondre. Souhaitez-vous qu'elles répondent?

Mme Carolyn Bennett: Bien sûr.

M. Josip Gabre: Lorsqu'on parle de cancer, il faut tenir compte du renouvellement de notre système immunitaire, et de rien d'autre. Étant donné que les métabolismes d'une cellule cancéreuse et d'une cellule saine sont identiques, nous ne pouvons en tuer une sélectivement et épargner l'autre. Cela n'est pas possible. Si nous pouvions faire cela, on pourrait mettre deux personnes dans une pièce, une criminelle et l'autre innocente, fermer la porte hermétiquement et y laisser entrer un gaz empoisonné, avec la conviction que le criminel va mourir et l'innocent survivre. C'est une idée insensée. Je suis désolé d'avoir à utiliser ce langage. La seule façon de survivre, c'est de porter un masque à gaz. Voilà ce qu'est le cancer.

Dans son ruban audio et vidéo, le Dr Lorene Day affirme qu'il y a mille et une façons de traiter le cancer, mais il n'en reste pas moins qu'il y a toujours le même dénominateur commun, soit le système immunitaire. Selon elle, si nous pouvions guérir le cancer ou toute autre maladie de cette façon, toutes les facultés de médecine et tous les hôpitaux feraient faillite.

Puisque nous parlons de savoir, Stuart M. Berger a écrit un livre intitulé What Your Doctor Didn't Learn in Medical School. Cela fait peur. Une seule édition a été publiée, et ensuite le livre a été interdit. Je ne suis pas médecin, mais j'en sais plus long sur le cancer que bien des médecins, car en bien des occasions j'ai eu connaissance d'un mauvais diagnostic de cancer. Les outils dont on se sert pour diagnostiquer le cancer ne sont pas bons.

Mme Carolyn Bennett: Tout d'abord, je tiens à préciser à M. Anderson que j'ai uniquement vu la conférence sur la santé intégrale dans l'avion qui m'emmenait à Halifax dimanche. J'aurais beaucoup aimé être invitée à cette conférence. Je pense que nous devons déployer davantage d'efforts pour partager l'information disponible, particulièrement avec le Comité de la santé.

Monsieur Wolfe, vous avez dit qu'une étude révélait que la population n'avait pas confiance dans le gouvernement dans le domaine de la santé. J'aimerais savoir de quelle étude il s'agit, car les études que j'ai vues montraient qu'au contraire on avait confiance dans le gouvernement à cet égard.

M. Marcel Wolfe: Je suis désolé, mais vous n'écoutiez pas. Je n'ai pas parlé d'une étude. Si vous devez consulter l'enregistrement, faites-le.

La présidente: Je vous demande pardon?

M. Marcel Wolfe: Madame dit que j'ai mentionné une étude. Je ne sais pas ce que vous avez entendu, mais je n'ai pas parlé de cela.

Mme Carolyn Bennett: À mon avis, vous ne pouvez vous fonder sur ce qu'a dit un groupe de personnes à une assemblée populaire pour généraliser quant à l'opinion des Canadiens. À ma connaissance, la seule façon de déterminer ce que pensent les Canadiens, c'est de mener un sondage scientifique. J'ai du mal à accepter que vous affirmiez devant le comité que les Canadiens souhaitent ceci ou cela.

Vous avez aussi dit: «La seule chose que nous allons accepter.» Je veux m'assurer que les propos que vous tenez devant le comité sont étayés par des données scientifiques ou par des sondages en bonne et due forme. Je veux savoir si c'est le cas ou si vous vous fondez uniquement sur ce que vous avez entendu à la réunion du week-end dernier.

M. Marcel Wolfe: Je suis un témoin. Je suis un consommateur canadien de produits de santé naturels. Je parle à de nombreuses personnes tous les jours au sujet de la santé.

Mme Carolyn Bennett: Moi aussi.

M. Marcel Wolfe: Dans ce cas, vous ne devriez pas poser cette question.

Mme Carolyn Bennett: Nous entendons diverses personnes tous les jours au comité, et vous représentez un certain segment de la population.

• 1155

M. Marcel Wolfe: Je ne suis pas venu ici armé de tableaux ou de statistiques. Je suis venu ici en tant que Canadien consommateur de produits naturels qui est convaincu que...

Mme Carolyn Bennett: Nous respectons cela.

M. Marcel Wolfe: Si vous respectez cela, vous devriez agir en conséquence. D'autres personnes ici ont les faits et les détails. Si vous voulez des faits et des détails, nous pouvons vous les fournir.

La présidente: Monsieur DeSylva, et ensuite M. Hill.

M. Richard DeSylva: Madame la présidente, une question technique. Mme Bennett a mentionné que la pervenche est toxique à cause de la vincristine et de la vinblastine. Je pense que cela illustre une fausse perception courante—et je dis simplement que c'est tout ce que c'est...

Mme Carolyn Bennett: Non, je ne pense pas avoir dit que...

M. Richard DeSylva: Si vous permettez que je continue...

Mme Carolyn Bennett: D'accord. Poursuivez.

M. Richard DeSylva: ... selon laquelle, pour être efficace, une substance doit être toxique. Dans les tests sur les animaux, on essaye de trouver la dose mortelle 50, c'est-à-dire la dose qui provoquera la mort de la moitié de la population animale. Une fois arrivé à ce seuil, on réduit la dose pour arriver à un «niveau thérapeutique».

Permettez-moi de préciser. La pervenche de Madagascar est la source de la vincristine et de la vinblastine. La pervenche canadienne, la vinca minor, ne renferme pas ces deux mêmes alcaloïdes.

Je voudrais ajouter une autre chose. Encore une fois dans Science Magazine—je ne me souviens ni de l'année ni du mois exacts—j'ai lu un article sur la chiralité de la nature, c'est-à- dire le format rotatif droit par rapport au format rotatif gauche. Dans l'article, on précisait que la forme la plus courante dans la nature est la forme rotative de droite. C'est celle qui se rapproche le plus près de la version synthétique, celle que vont fabriquer les sociétés pharmaceutiques.

J'ai un exemple parlant avec le cas de la thalidomide. La source naturelle avait pour effet d'atténuer les nausées matinales en laboratoire, mais lorsqu'elle a été fabriquée, elle a été fabriquée sous une forme erronée. La même chose s'applique aux préoccupations de l'éminent docteur au sujet de la pervenche.

Si ces alcaloïdes sont isolés, raffinés et synthétisés, ils risquent de produire un poison. S'ils sont utilisés dans la nature, ils ont la forme qui convient et que les cellules du corps peuvent le plus aisément absorber sans qu'il y ait risque d'empoisonnement.

La présidente: Monsieur Hill.

M. Grant Hill: Je vous remercie d'être venus.

Lorsqu'on nous fait des suggestions, j'essaie toujours de trouver un endroit dans le monde où on les a déjà mises à l'épreuve. Si je vous comprends bien, vous préconisez l'application des règlements existants sans qu'on crée un nouvel organisme de réglementation, une nouvelle bureaucratie. Le critère principal serait la sécurité des produits.

Est-ce que d'autres pays ont déjà fait cela? Est-ce qu'on pourrait bénéficier de leur expérience positive et négative?

M. David Rowland: L'exemple le plus proche est celui des États-Unis. Il s'agit d'une zone grise à l'heure actuelle, mais ce pays a toujours considéré les suppléments alimentaires et les produits de santé naturels comme des aliments. Aux États-Unis, chaque produit de santé naturel retiré du marché par Santé Canada est disponible sans restriction. La population américaine est de 10 à 13 fois plus importante que la nôtre, le pays utilise ces produits depuis très longtemps, et il n'y a pas eu de cas documentés où ces produits anodins ont provoqué des effets secondaires très nuisibles.

Donc ces produits ont fait leurs preuves aux États-Unis. Ils ont des règlements plus stricts pour empêcher la FDA de retirer des produits du marché jusqu'à ce que leurs effets nocifs soient prouvés. Cependant, on a créé aux États-Unis une troisième catégorie, une sous-catégorie d'aliments, dans laquelle on classe les suppléments alimentaires. Cette initiative ouvre la voie à la discrimination, car certains essaient de faire en sorte que les herbes soient considérées comme des médicaments en vente libre. Il y a un tollé contre ce mouvement, mais chaque fois qu'on met un produit dans une catégorie spéciale, cela implique des privilèges spéciaux et une discrimination possible.

Donc les États-Unis sont l'exemple le plus proche. D'autres pays essaient d'imposer des restrictions sur ces produits, sans que cela soit justifié du point de vue de la sécurité. Tous ces efforts sont motivés par les intérêts commerciaux et le pouvoir.

M. Grant Hill: Je suis sûr que la Direction générale de la protection de la santé est convaincue qu'il est nécessaire de prendre les décisions qu'elle prend. Je n'accepte pas du tout la notion de complot. À mon avis, le personnel de la direction générale fait de son mieux.

Les mesures prises par la direction générale sont attribuables, entre autres, à la crainte que la Direction générale de la protection de la santé ou le gouvernement seront tenus responsables. L'idée de mettre un avertissement sur l'étiquette pour dire que le produit n'a pas subi certains tests me semble constituer une dérobade, dans certains cas.

• 1200

Qu'en pensez-vous? Cela semble très beau de pouvoir dire que le produit n'a pas été testé, qu'il faut l'utiliser à ses propres risques. Que pensez-vous de ces avertissements de façon générale?

M. David Rowland: Si l'avertissement porte sur l'efficacité du produit, cela suppose que le gouvernement fédéral a le pouvoir de prendre des décisions au sujet de l'efficacité, ce qui n'est pas le cas selon la Constitution. Plutôt que d'avoir un avertissement, il serait préférable, à mon avis, de mentionner les contre-indications. Santé Canada a certainement le droit de contrôler la sécurité des produits. Si on sait qu'un produit est bénéfique, ou du moins neutre, pour la majorité de la population, mais représente un risque pour les femmes enceintes, par exemple, Santé Canada pourrait insister pour que les fabricants indiquent cela sur l'étiquette.

Il incombe au consommateur de s'informer de l'efficacité du produit par tous les moyens possibles. À l'heure actuelle, il est interdit, par exemple, de dire sur l'étiquette d'une bouteille de vitamine C que le produit prévient le scorbut, même si c'est vrai.

Si on éliminait la restriction actuelle qui empêche les fabricants de dire la vérité concernant les effets de leurs produits, si on éliminait cette censure, les consommateurs seraient inondés d'énormément d'informations utiles, constructives et informatives. Cela leur donnerait beaucoup plus d'informations pour les aider à prendre des décisions raisonnables.

Santé Canada a donc un rôle à jouer dans la protection de la sécurité des consommateurs. Mais je considère qu'ils n'ont aucune base juridique ou morale selon laquelle ils peuvent juger de l'efficacité d'un produit sécuritaire.

M. Grant Hill: Si personne d'autre n'a de commentaire à faire sur la notion d'avertissement, moi j'ai fini.

La présidente: Nous allons permettre une brève question encore, et puis nous lèverons la séance.

Mme Carolyn Bennett: Dans les catalogues américains apportés par certains de nos témoins, j'ai vu à ma grande surprise que certains produits, comme la vitamine B6, par exemple, n'avaient pas de posologie indiquée. La bouteille était identifiée seulement comme contenant de la vitamine B6.

Mais, évidemment, les gens doivent savoir s'ils consomment 25 milligrammes ou 100 milligrammes par dose. N'oublions pas que des doses très élevées de cette vitamine peuvent être neurotoxiques—certains voudront peut-être me corriger. Donc, si vous comparez votre modèle avec celui des Américains, êtes-vous satisfaits des règlements et de la loi? Maintenant, les Canadiens connaîtront la posologie pour cette vitamine, par exemple.

M. David Rowland: Il est très important que l'étiquette d'un produit identifie le contenu de la bouteille, et identifie aussi la posologie. Je ne pense pas qu'une étiquette n'identifiant pas la posologie soit conforme aux règlements des États-Unis. Cela viole probablement les règlements américains. En vertu de l'article 5 de notre Loi sur les aliments et drogues, les aliments sont réglementés, et il faut s'assurer que tous les ingrédients sont indiqués sur l'étiquette. Les consommateurs ont besoin de cette information. Ils doivent connaître les quantités: parlons-nous de 30 milligrammes ou de 300 milligrammes? Il est important qu'ils le sachent.

La présidente: Merci beaucoup.

La séance est levée.