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FAIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FOREIGN AFFAIRS AND INTERNATIONAL TRADE

COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 26 novembre 1998

• 0908

[Traduction]

Le président (M. Bill Graham (Toronto—Centre—Rosedale, Lib.)): Chers collègues, la séance est ouverte.

Nous avons le plaisir de recevoir l'honorable Raymond Chan, secrétaire d'État à l'Asie-Pacifique. Il a eu l'amabilité de venir ce matin nous parler de la situation en Indonésie, et en particulier du sort des citoyens sino-indonésiens.

Monsieur le ministre, vous souhaiterez peut-être également commenter certains articles de presse récents au sujet d'attaques contre des minorités chrétiennes.

Nous apprécions beaucoup votre visite, et nous vous remercions d'être venu ce matin.

Je crois comprendre que vous avez distribué une déclaration.

L'honorable Raymond Chan (secrétaire d'État, Asie-Pacifique): Oui, effectivement.

Le président: Vous pourriez peut-être vous contenter d'en relever les points saillants, après quoi les membres du comité pourront vous poser des questions.

M. Raymond Chan: Merci beaucoup, monsieur le président, confrères de la Chambre, chers collègues.

Je suis ici pour vous faire un rapport sur mon voyage à Jakarta en octobre. Ce voyage donnait suite aux émeutes qui se sont produites en Indonésie au mois de mai. Ce qui inquiète surtout le gouvernement canadien, c'est qu'on parle d'innombrables viols de Chinois de souche et d'émeutes qui ont causé près de 1 000 morts. L'avenir politique de l'Indonésie est une grande source de préoccupation.

• 0910

On m'a donc demandé de me rendre à Jakarta pour m'enquérir de questions relatives aux droits humains, à la gestion publique et au processus de réforme politique.

Mon séjour a été très court, trois jours environ, dont deux jours et demi d'activités, mais le programme était très chargé, avec des journées commençant à 7 h 30 du matin pour se terminer après souper, vers 11 heures du soir.

Nous avons eu de nombreuses rencontres très fructueuses. J'ai rencontré le président Habibie, le ministre des Affaires étrangères Alatas, la ministre des Affaires féminines, le ministre de l'Intérieur, des parlementaires, ainsi qu'un important groupe de représentants des ONG, dont la Commission nationale des droits de l'homme et le dirigeant syndical Pakpahan, qui venait tout juste de sortir de prison deux mois plus tôt.

J'ai pu aussi rencontrer le leader du Timor oriental emprisonné, le général Xanana Gusmao. Et nous avons aussi tenu des tables rondes avec des universitaires et des ONG indonésiens.

Une réunion spéciale avait été organisée avec le groupe Bénévoles pour l'humanité, le principal groupe qui s'est occupé de recueillir des informations auprès des victimes de viol. Il y a également un nouveau groupe qui s'est créé, le groupe GANDI, qui lutte contre la discrimination. Il s'agit d'une coalition d'Indonésiens de souche chinoise et d'Indonésiens, y compris des hommes politiques.

Pendant ma visite, des foules ont attaqué la fondation de l'aide juridique indonésienne, et par conséquent j'ai tenu à rendre visite à cette organisation pour lui manifester notre soutien politique.

Nous avons rencontré un groupe de représentants de la communauté de souche chinoise et des gens des milieux d'affaires pour entendre comment ils envisagent l'avenir de leur pays.

Pour vous donner mes impressions générales, beaucoup de zones de la ville endommagées pendant les émeutes ne sont toujours pas réparées. Il s'agit particulièrement du quartier chinois. Des entretiens avec les familles de victimes de viol confirment que des chinoises ont bel et bien été violées.

En même temps, certains universitaires pensent qu'on ne saurait choisir un meilleur moment pour faire changer les choses. La participation au processus politique est considérable, et on assiste également à de nombreux débats sur des réformes politiques possibles. En même temps, la situation est très dangereuse parce que des groupes d'intérêts spéciaux veulent aggraver le chaos et envenimer les conflits raciaux pour faire avancer leur propre programme politique. Dans le district oriental de Java, des prêtres musulmans sont assassinés, et d'autre part les victimes et les témoins des émeutes sont intimidés.

Tout juste deux jours avant mon arrivée, une jeune fille indonésienne de souche chinoise qui devait venir témoigner en Amérique du Nord a été assassinée. On a cherché à intimider sa famille, et celle-ci vit actuellement dans la clandestinité.

Il y a donc des signes encourageants—de nombreux partis politiques se sont créés, se sont formés—mais en même temps toute la communauté vit sous un nuage de peur.

• 0915

Lorsque nous avons rencontré les membres de la commission des droits de l'homme, et en particulier les commissaires qui font partie de l'équipe d'enquête conjointe, ils nous ont expliqué très franchement ce qu'ils ont vu, les entrevues qu'ils ont eues. Ils nous ont confirmé que ces viols avaient eu lieu.

Il y a également de grands partis d'opposition qui se créent et qui sont très actifs. Il y a en particulier quatre partis d'opposition dont les noms figurent dans mon rapport.

En même temps, les problèmes sont très graves, car l'économie continue à être durement frappée. Et les couches inférieures de la société indonésienne sont particulièrement frappées.

C'est dans l'ensemble une société extrêmement instable, car, lorsque les gens ont faim, lorsqu'ils sont sans ressources, ils sont facilement mobilisés par des groupes d'intérêts spéciaux.

Maintenant, j'aimerais vous parler plus particulièrement du Timor oriental. Pendant ma visite, les perspectives étaient plutôt bonnes. Pour la première fois depuis très longtemps, le gouvernement avait accepté de négocier avec le gouvernement portugais, et d'excellentes séances avaient déjà eu lieu.

Je suis allé rendre visite au général Gusmao, qui était en prison, et il m'a semblé que la position des gens du Timor oriental et celle du gouvernement indonésien n'étaient pas tellement différentes. Pour sa part, M. Gusmao est prêt à négocier l'autonomie gouvernementale, à condition que les résultats d'une telle négociation ne soient pas gravés dans la pierre, à condition que le Timor oriental ne fasse pas partie de l'Indonésie à tout jamais.

D'un autre côté, la position du gouvernement est d'accorder l'autonomie, mais le gouvernement est prêt à faire traîner les choses pendant une durée indéterminée. Il semble donc qu'une solution soit possible dans le cas du Timor oriental.

Toutefois, des développements plus récents ne permettent pas d'être aussi optimistes. Des pourparlers organisés par les Nations Unies entre le Portugal et l'Indonésie ont été suspendus par le Portugal le 20 novembre lorsqu'on a rapporté qu'un engagement armé aurait eu lieu et que des civils auraient été tués dans le Timor oriental. D'autre part, les gens du Timor oriental rapportent une grande concentration de troupes armées dans la région. Ce sont donc des signes troublants.

Ce qui est très encourageant, c'est que l'équipe d'enquête conjointe a fait un rapport au gouvernement, un rapport très sévère qui a été rendu public. Il y a peut-être quelques différences entre le nombre de victimes de viol relevé par l'équipe d'enquête conjointe et le nombre relevé par les ONG, mais dans l'ensemble il y a d'excellents éléments dans ce rapport.

Pour commencer, il y a bel et bien eu des viols dans la communauté chinoise. Ils ont été nombreux. L'équipe en question en a relevé de 50 à 58. Deuxièmement, il s'agissait d'une attaque organisée. Troisièmement, l'armée était impliquée. En particulier, le général Prabowo, le beau-fils de Suharto, est un des suspects des émeutes.

Quatrièmement, l'équipe a demandé au gouvernement de faire une enquête sérieuse et d'inculper les responsables.

Je pense que nous devrions donc parler en faveur du rapport de l'équipe d'enquête conjointe et prier instamment le gouvernement de suivre les recommandations de ce rapport.

• 0920

En même temps, une session spéciale du Parlement, ce que nous appelons une MPR, a adopté toute une série de lois. De nombreuses initiatives de la MPR nous semblent judicieuses.

Par exemple, ils ont décidé que des élections parlementaires auraient lieu au plus tard en juin 1999. Il y a également des recommandations sur les droits de l'homme, l'autonomie régionale, la limitation des mandats présidentiels, la révocation des pouvoirs présidentiels d'urgence et la suppression des passages qui incitent à la discrimination raciale dans les décrets visant l'aide économique aux petites entreprises.

D'un autre côté, pendant la session spéciale, il y a eu d'importantes manifestations d'étudiants. Les émeutes ont commencé le 22 novembre, et il y a eu des morts et des blessés—quelque 13 morts et 40 blessés. Aujourd'hui, on nous dit que le gouvernement a suspendu les 160 soldats qui auraient tiré sur la foule et qui seraient responsables des morts et des blessures.

En même temps, les partis d'opposition se sont regroupés pour déclarer la légitimité de la MPR, pour prouver qu'en général, à Jakarta, en Indonésie, il y a une volonté de résoudre les différends d'une façon pacifique et démocratique et de tourner le dos à l'anarchie.

Ce sont donc d'excellents signes, mais pour l'instant voici la position du gouvernement canadien: nous faisons pression sur les autorités pour les encourager dans la voie de solides réformes démocratiques, pour organiser des élections justes et transparentes en vue de mettre en place un gouvernement démocratiquement élu, un gouvernement qui respecte les droits de l'homme et les règles du droit.

En même temps, nous ne pouvons pas garantir l'issue du processus électoral. La personne élue ne sera pas forcément en mesure de respecter les règles du droit et les droits de l'homme.

En même temps, nous voudrions en profiter pour renforcer l'action des ONG, les fondations des droits de l'homme, la Commission des droits de l'homme, la Fondation de l'aide juridique, et toutes les autres ONG, dans l'espoir qu'à long terme elles continueront à influencer le processus politique.

C'est devenu un élément de ma visite. C'est la raison pour laquelle nous avons rencontré les représentants des ONG pour leur apporter ce soutien politique.

Monsieur le président, je vais m'arrêter ici. Vous trouverez dans l'exposé que j'ai distribué une description très complète de la situation actuelle en Indonésie.

Le président: Merci beaucoup, monsieur le ministre.

Avant de passer aux questions, j'aimerais attirer votre attention et celle des membres du comité sur le fait que nous avons parmi nous ce matin des représentants d'un groupe, Canadians Concerned about Ethnic Violence in Indonesia. C'est un plaisir de les avoir parmi nous, et nous sommes heureux qu'ils puissent assister à cette séance.

Je suis certain que nous aurons plaisir à nous entretenir avec vous après la séance.

Nul doute, monsieur le ministre, que vous voudrez distribuer votre déclaration à nos invités également, et peut-être les rencontrer après la séance.

Merci beaucoup.

Monsieur Strahl.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Réf.): Je n'ai que deux questions.

Monsieur le ministre, je vous remercie d'être venu nous parler de cette situation. Chaque fois que nous lisons des articles dans les journaux, cela nous rappelle à quel point la situation en Indonésie est difficile, qu'il s'agisse de l'économie, des réformes démocratiques ou de toute cette transition dont vous avez parlé. Je sais bien que dans cette région c'est un pays important, mais en même temps il se trouve dans une situation très difficile.

J'apprécie beaucoup le fait que vous vous intéressiez à cette situation et je vous encourage à continuer, à y retourner régulièrement, etc. À mon avis, il est non seulement nécessaire d'être bien informé, mais il faut également pouvoir exercer une bonne influence pendant toute cette période de transition.

• 0925

J'ai deux questions à vous poser; vous avez parlé des excellents contacts que vous entretenez, par l'entremise de l'ambassade, avec les ONG et d'autres éléments clés de la société civile. Est-ce qu'il y a un service officiellement chargé de ce contact dans votre ambassade? Autrement dit, est-ce qu'il y a un service de la démocratie, de la même façon qu'il y a un service commercial? Est-ce qu'il y a un mécanisme officiel, ou s'agit-il seulement, d'une façon générale, d'excellents contacts avec les gens qui se présentent à l'ambassade?

M. Raymond Chan: Nous avons effectivement un consul chargé des affaires politiques, et il est responsable de la liaison non seulement avec le gouvernement, mais également avec les ONG. Sa fonction est conçue de cette façon-là.

Je me souviens qu'à la fin de mon voyage il y a eu une réception à l'ambassade, à la résidence de l'ambassadeur. Pour citer notre collègue de l'ambassade des États-Unis, il n'avait jamais vu autant d'ONG représentées à une réception diplomatique étrangère, où que ce soit. Non seulement les représentants de la Commission des droits de l'homme étaient là, mais également ceux des ONG, la Fondation de l'aide juridique, les fondateurs et les directeurs généraux, et un grand nombre de groupes qui viennent en aide aux victimes de viol.

Cela vous montre comment nous soutenons les ONG dans le pays.

M. Chuck Strahl: Donc, cela comprendrait des relations à la fois avec le gouvernement, avec les partis d'opposition et avec d'autres intervenants?

M. Raymond Chan: Oui.

M. Chuck Strahl: Bien.

J'aimerais avoir votre opinion sur une question. Le mois dernier, le Sénat américain a approuvé une loi, la Loi sur la liberté de religion à l'étranger. Cette loi invite le président à réagir, surtout lorsque des persécutions ont lieu du fait de la religion. Comme notre président l'a mentionné, on a fait état dernièrement des exactions commises à l'endroit des chrétiens en Indonésie.

Cette loi—si je me fie aux apparences—semble encourager le président à réagir lorsque l'on signale des violations des droits de la personne de ce genre. Cette réaction peut prendre la forme d'une simple note diplomatique ou, selon les circonstances, de mesures touchant le commerce, l'aide internationale ou d'autres secteurs. Il ne fait aucun doute que cela peut donner lieu à une escalade. Mais la loi oblige le président à réagir chaque fois.

J'en ai parlé au ministre Axworthy l'autre jour à la Chambre, et il a mentionné qu'il allait donner un discours sur la liberté de religion. Je crois qu'il sera à Edmonton vendredi et qu'il prononcera une allocution sur le sujet.

J'aimerais savoir ce que vous pensez de ce genre de choses. Je me rends compte que le Parlement n'oblige pas toujours le premier ministre à poser des gestes qui lui déplaisent, mais d'un autre côté cela prouverait au reste du monde que lorsque des événements surviennent, on peut s'attendre à une réaction de la part du Canada.

Et je ne parle pas d'une réaction instinctive, mais plutôt du genre: «Attention: nous allons réagir, et nous allons garder l'oeil ouvert.» Au moins, notre bonne réputation dans le monde pourra servir à susciter des réactions.

Est-ce qu'il s'agirait d'un exercice valable?

M. Raymond Chan: D'entrée de jeu, je dois dire que le rôle de promotion que joue le gouvernement canadien dans le dossier de la liberté de religion en particulier est un élément important de notre politique étrangère. C'est une source de préoccupation constante pour nos diplomates et notre ministère.

Au sujet de la Chine, lorsque nous avons appris que des membres de la communauté chrétienne indépendante avaient été arrêtés, nous avons fait part de nos préoccupations au gouvernement chinois. La liberté de religion fait partie de notre politique.

De plus, le Cabinet du gouvernement du Canada fait partie du régime parlementaire, à la Chambre, jour après jour, pendant la période des questions, etc. Je pense que notre système est très différent de celui des États-Unis, où le Cabinet n'est pas sur place, au Congrès.

• 0930

Quant à savoir si l'exercice serait valable, le gouvernement est très conscient du problème et s'y intéresse de près. Mais à mon avis, les encouragements et le soutien de nos collègues sont importants.

M. Chuck Strahl: C'est ce que j'ai dit à M. Axworthy. Je veux l'appuyer lorsqu'il dénonce des violations. Je crois que les Canadiens veulent le voir et l'entendre parler fort, mais pas seulement lorsqu'il sera à Edmonton.

Je lis trop souvent des articles de l'Associated Press faisant état des persécutions religieuses dont sont victimes par exemple les baha'is en Iran. On finit par apprendre que le ministre a fait une déclaration quelconque, mais c'est parfois bien après les événements, et les Canadiens en sont peu informés.

Je vous invite, vous et le gouvernement, à trouver des moyens de réagir rapidement, et non instinctivement, et d'informer les Canadiens que le gouvernement est au courant de la situation et qu'il a pris des mesures, comme je l'ai dit, allant de la note au communiqué. J'ignore en quoi elles peuvent consister.

Parfois, j'apprends presque par accident la réaction du gouvernement. Si en tant que député je dois faire des recherches pour savoir en quoi elle consiste, je crois que de nombreux Canadiens abandonneraient avant même de commencer les recherches. J'aimerais que le gouvernement réagisse et qu'il nous tienne au courant.

M. Raymond Chan: Nous en avons parlé plus tôt avec M. Robinson. Nous avons publié des communiqués, mais parfois ils ne sont pas repris par les médias. Je vais néanmoins recommander que l'on veille à ce que les partis d'opposition reçoivent une copie des communiqués.

M. Chuck Strahl: Merci.

Le président: Merci.

Je ne sais pas; ce n'est peut-être pas le meilleur moment d'en parler, mais les députés pourraient peut-être discuter de votre suggestion, monsieur Strahl.

La question a été soulevée pendant les discussions habituelles entre le Canada et les États-Unis, et ce projet de loi a été porté à l'attention du comité. Certains députés se sont dits très préoccupés par le projet de loi, à cause de ses répercussions sur le commerce. Nous avons des obligations à l'égard de l'OMC. Si vous adoptez un projet de loi qui prévoit l'imposition de sanctions commerciales chaque fois qu'un problème survient, vous venez de faire sauter l'OMC. Vous avez détruit l'intégrité de l'accord commercial. Car nous avons des obligations réelles.

Les États-Unis ont le même problème, par exemple, dans le cas de la Chine. Si la Chine adhère à l'OMC, les États-Unis sont obligés d'examiner chaque année leurs relations commerciales avec la Chine. Ils ne peuvent le faire si la Chine fait partie de l'OMC. On ne peut avoir les deux.

Donc si nous voulons examiner ce genre d'idées, il me semble que le comité pourrait le faire.

M. Chuck Strahl: Merci, monsieur le président, pour ces précisions. Je vais vérifier auprès des responsables des discussions Canada-États-Unis qui siègent à ce comité. Mais l'important, c'est l'éventail des réponses, et je crois que c'est possible.

Le président: Oui. Quoi qu'il en soit, c'est une proposition très intéressante.

Monsieur Turp.

[Français]

M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Monsieur Chan, je vous remercie de vous présenter devant le comité et de nous rendre compte de votre visite en Indonésie. J'avais eu l'occasion de participer à la mission du Conseil canadien pour la coopération internationale quelques semaines auparavant, et ce groupe se présentera devant ce comité tout à l'heure. Il serait peut-être intéressant que vous restiez ici pour entendre ce qu'auront à dire ces témoins.

J'ai donc personnellement pu voir ce qui se passait en Indonésie. Des choses m'ont beaucoup dérangé; des choses m'ont attristé. La visite de Jakarta et surtout d'autres communautés à Yogyakarta et dans d'autres régions de l'Indonésie m'ont fait constater que la situation en Indonésie était précaire et que la communauté internationale devait se porter à la rescousse d'un pays dont les citoyens ont subi des violations très massives et systématiques de leurs droits, y compris des jeunes et des étudiants que nous avons rencontrés, qui sont à l'origine du départ de M. Suharto et qui, de toute évidence, veulent voir le président Habibie quitter la direction du pays à son tour. Je suis heureux que vous ayez pu vous-même constater ce qui s'y passait.

• 0935

Je poserai mes deux questions en anglais pour vous en faciliter la compréhension.

[Traduction]

Il y a deux questions qui me préoccupent beaucoup, monsieur Chan: le Timor oriental et tout le processus politique en Indonésie. Au Timor oriental, comme vous l'avez mentionné dans votre déclaration aujourd'hui, des négociations sont en cours. Vous avez rencontré l'un des leaders des Timorais orientaux. Il veut l'autonomie, mais il ne veut pas d'un avenir qui dépendrait d'une solution imposée au peuple du Timor oriental.

Je ne sais pas si c'est ce qui a entraîné les homicides extrajudiciaires des derniers jours. J'aimerais savoir ce que vous pensez de la situation actuelle au Timor oriental, car apparemment—ou c'est très évident; le Centre des droits de la personne au Timor oriental, qui est établi en Australie, l'a confirmé—le Timor oriental est le théâtre d'une répression militaire.

Je me demande ce que le gouvernement fait à ce sujet. A-t-il condamné les attaques commises par les militaires, et dans l'affirmative, quand l'a-t-il fait? Avez-vous publié un communiqué de presse vous-même, ou est-ce que le ministre a publié un communiqué sur les événements survenus au Timor oriental où, je le rappelle aux membres du comité, on a signalé 50 exécutions extrajudiciaires et la disparition de 28 Timorais orientaux? La situation dans cette région est dramatique. C'était ma première question.

Ma deuxième question porte sur le Parlement, et l'assemblée tenue entre le 10 et le 13 novembre, un mois après votre visite. Je crois que cette session devait confirmer le besoin de tenir des élections, d'avoir un gouvernement ouvert et transparent, et de modifier le régime. Mais je crois comprendre que le rôle des militaires a été confirmé, renforcé, et qu'ils seront automatiquement élus au Parlement indonésien.

Le gouvernement du Canada a-t-il fait une déclaration à ce sujet? Le fera-t-il? Croit-il qu'il devrait se taire lorsqu'il s'agit du rôle d'une armée au sein du gouvernement?

Voilà mes deux questions.

M. Raymond Chan: Merci beaucoup, monsieur Turp, pour vos questions.

Tout d'abord, le gouvernement du Canada n'a pas encore publié de communiqué pour condamner les tueries dont vous parlez, car nous recevons des informations contradictoires du Timor oriental; nous ignorons si les morts sont attribuables à des combats avec l'armée ou à des exécutions extrajudiciaires, comme l'affirment les activistes des droits de la personne.

La Croix-Rouge a dépêché une délégation pour faire enquête. S'il s'agit effectivement d'exécutions extrajudiciaires, nous réagirons en conséquence.

Pour ce qui est de votre deuxième question, lorsque j'y étais, il y avait un vif débat entre les universitaires et les intervenants dans le processus de réforme quant au rôle des militaires. En tant que gouvernement, nous avons décidé de ne pas nous prononcer sur cette question, car nous estimons que nous devrions laisser le processus de réforme suivre son cours, afin de permettre la tenue d'un débat constructif entre les différents intervenants.

On craint que l'armée ne dirige le pays, non seulement l'appareil gouvernemental, mais aussi l'administration des régions locales, la distribution des aliments et la liaison entre une bonne partie des communautés et le gouvernement.

• 0940

Parfois, on fait appel à l'armée pour réaliser des projets d'aide au développement dans certaines régions. Certains militaires sont bons, d'autres ne le sont pas. Certains abusent de leur pouvoir.

En outre, lorsqu'ils négocient le retrait de l'armée de la vie politique, certains universitaires et autres intervenants estiment qu'il faudrait une période de transition en douceur d'environ cinq ans.

Il y avait un vaste débat en cours à l'époque. Nous avons décidé de ne pas leur imposer notre position.

M. Daniel Turp: Vous avez rencontré le président Habibie, n'est-ce pas?

M. Raymond Chan: Oui.

M. Daniel Turp: Pouvez-vous nous dire quelle est sa position sur cette question et sur la question du Timor oriental?

M. Raymond Chan: Nous n'avons pas discuté de la participation de l'armée.

M. Daniel Turp: Pourquoi? Pourquoi ne lui en avez-vous pas parlé?

M. Raymond Chan: Parce qu'au cours de ces 30 minutes nous avons discuté des problèmes de l'ethnie chinoise. Une bonne partie de notre rencontre a été consacrée à cette question. Nous les avons exhortés à ne pas intervenir dans le travail de l'équipe d'enquête conjointe.

Beaucoup d'autres questions ont été abordées au cours de la réunion.

M. Daniel Turp: Avez-vous discuté du Timor oriental avec le président?

M. Raymond Chan: Oui, nous en avons parlé.

M. Daniel Turp: Quelle était sa position à l'égard du Timor oriental?

M. Raymond Chan: Il m'a dit qu'il appuyait le processus de négociation en cours, mais il n'a pas décrit en détail sa position. L'Indonésie est disposée à accorder l'autonomie gouvernementale, ou de vastes pouvoirs favorisant l'autonomie, mais à l'époque le gouvernement affirmait qu'il s'agissait des négociations finales, qu'il leur accorderait l'autonomie gouvernementale, mais rien de plus. Le Timor oriental fait partie de l'Indonésie.

C'était leur position.

M. Daniel Turp: Donc, cette autonomie n'est pas un régime définitif. Cela n'ira pas plus loin. Le gouvernement ne veut pas...

M. Raymond Chan: La position du gouvernement indonésien, ouvertement déclarée, consiste à accorder l'autonomie gouvernementale afin de mettre un terme au débat sur la séparation.

M. Daniel Turp: Qu'en pense le leader des Timorais orientaux?

M. Raymond Chan: Il est favorable à l'autonomie gouvernementale à condition qu'elle soit ouverte. Même s'il faut 50 ou 100 ans, le processus ne peut être fermé.

M. Daniel Turp: Quelle est votre position?

M. Raymond Chan: Nous soutenons l'autodétermination; nous devons respecter la volonté du peuple.

M. Daniel Turp: Croyez-vous que le gouvernement canadien, à l'instar de la Chambre des représentants des États-Unis, devrait affirmer qu'il soutient le droit des Timorais orientaux à l'autodétermination?

M. Raymond Chan: Pour l'instant, nous appuyons les négociations. Nous préférons une solution politique à une solution militaire, car nous estimons que nous pouvons jouer un rôle d'intermédiaire tout en renforçant les capacités des Timorais orientaux en leur fournissant de l'aide dans le domaine de l'éducation, du développement économique, de la formation, etc.

Par exemple, ils nous ont demandé de leur montrer comment négocier, une aide que nous sommes disposés à leur fournir. Nous croyons aussi que si notre position demeure floue, nous pourrons contribuer davantage à faire progresser le processus.

M. Daniel Turp: Merci.

Le président: Monsieur Robinson.

M. Svend J. Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Merci, monsieur le président.

Je tiens aussi à souhaiter de nouveau au ministre la bienvenue à ce comité.

J'ai aussi quelques questions à poser, mais j'aimerais d'abord enchaîner sur la question que M. Turp a soulevée.

• 0945

Je dois dire que je me réjouis d'entendre le ministre dire que «nous soutenons le droit du peuple du Timor oriental à l'autodétermination». C'est une déclaration importante.

Je suppose que vous parlez au nom du gouvernement, monsieur le ministre?

M. Raymond Chan: Oui.

M. Svend Robinson: Aussi, pour ce qui est de déterminer la volonté et l'opinion de la population du Timor oriental, je suppose que le ministre appuierait enfin la proposition défendue par José Ramos-Horta, Xanana Gusmao et d'autres leaders timorais, à savoir qu'au moment opportun—et ils ne disent pas immédiatement, mais au moment opportun—on puisse tenir un référendum, libre, sous supervision internationale, pour déterminer la volonté de la population du Timor oriental.

Est-ce que le ministre appuierait aussi cette proposition?

M. Raymond Chan: Je crois que si c'est le résultat de négociations avec le gouvernement, nous pourrions l'appuyer.

M. Svend Robinson: D'accord.

Au sujet du massacre qui a eu lieu dans le village d'Alas, au Timor oriental, la semaine dernière, le ministre a dit que le gouvernement du Canada n'avait pas encore pris position parce que les circonstances n'étaient pas claires. Pourtant, l'évêque Belo a vigoureusement condamné les actes commis, et il a déclaré que la situation était très grave—en fait, il a dit qu'il s'agissait de la pire tuerie depuis le massacre de Dili en 1991.

J'invite le ministre à se pencher sur cette question de toute urgence, et je lui demanderais, s'il est confirmé que des civils ont été exécutés par l'armée, de veiller à ce que le gouvernement du Canada publie une déclaration pour condamner vigoureusement ces actes.

Je suppose que le ministre serait d'accord?

M. Raymond Chan: Oui.

M. Svend Robinson: En ce qui concerne la situation des Indonésiens d'origine chinoise, j'ai eu l'occasion de rencontrer hier à Toronto des représentants des Canadians Concerned about Ethnic Violence in Indonesia et du Vancouver Forum Against Human Rights Violation. Je sais que le ministre les a aussi rencontrés.

Le ministre est au courant du racisme systémique de longue date en Indonésie, de la discrimination et de la répression dont est victime la communauté d'origine chinoise. Les agressions sexuelles, les viols qui ont été commis en mai étaient horribles, mais la communauté d'origine chinoise est depuis trop longtemps victime d'une répression brutale en Indonésie.

J'aimerais que le ministre précise la position du gouvernement du Canada sur les recommandations de l'équipe d'enquête conjointe, dont certaines sont importantes. Le ministre a dit qu'au cours de sa rencontre avec le président Habibie, il avait soulevé des préoccupations à ce sujet.

Le groupe de travail a déposé son rapport, et jusqu'à présent le gouvernement a ignoré les recommandations qu'il contenait. Quelles mesures le ministre est-il disposé à prendre sur le plan bilatéral afin que l'on donne suite aux recommandations très importantes du groupe de travail conjoint?

M. Raymond Chan: Le gouvernement a demandé au Cabinet, au ministre responsable, d'étudier le rapport. On tente d'expliquer les écarts entre les faits observés et le contenu du rapport.

Il ne fait aucun doute, selon nous, que l'armée rejette les accusations formulées dans le rapport. Je crois qu'il y a un vaste débat au sein de l'armée sur le meilleur moyen de renforcer son rôle à l'avenir, et sur la question de savoir s'il lui appartient de camoufler le problème ou d'y faire face.

M. Svend Robinson: Que fait le Canada pour les inciter à agir?

M. Raymond Chan: Le ministre Lloyd Axworthy et moi avons publié un communiqué la semaine dernière non seulement pour condamner la violence pendant la session de la MPR mais aussi pour exhorter le gouvernement à donner suite au rapport de l'équipe d'enquête conjointe. Voilà la position du gouvernement.

M. Svend Robinson: J'aimerais savoir si nous pourrions obtenir des exemplaires du communiqué.

Je ne l'ai pas vu moi-même, monsieur le président. Je ne sais pas si les autres députés l'ont reçu.

M. Daniel Turp: Je ne l'ai pas vu.

M. Svend Robinson: J'aimerais bien en avoir un exemplaire.

M. Raymond Chan: D'accord.

• 0950

M. Svend Robinson: Monsieur le président, les groupes que j'ai rencontrés ont soulevé d'autres sujets de préoccupation. Il y a d'abord les victimes de cette violence terrible, et celles qui sont toujours en danger, et aussi la suggestion que les responsables de l'Immigration reconnaissent la nécessité d'accorder un traitement spécial à ces victimes, tant au Canada qu'en Indonésie.

Quelle est la réponse du ministre et de son gouvernement à cette proposition?

M. Raymond Chan: Nous collaborons en ce moment avec le ministère de l'Immigration afin d'offrir de l'aide aux victimes des émeutes, non seulement aux victimes de viol mais aussi à celles dont les biens ont été endommagés ou détruits pendant les événements.

M. Svend Robinson: Est-ce qu'un programme spécial sera mis sur pied pour aider les victimes qui sont au Canada afin de leur offrir l'asile?

M. Raymond Chan: En ce moment, les fonctionnaires envisagent de créer une unité spéciale chargée de vérifier les dossiers des victimes et de fournir un abri à ces dernières.

M. Svend Robinson: Le ministre a fait allusion aux discussions qu'il a eues avec Lloyd Axworthy, le ministre des Affaires étrangères. Les groupes que j'ai mentionnés tentent de rencontrer le ministre des Affaires étrangères depuis quelque temps. J'aimerais savoir si vous êtes en mesure de dire au comité si ces groupes pourront rencontrer le ministre Axworthy dans un proche avenir.

M. Raymond Chan: Ce dossier préoccupe beaucoup le ministre, qui a déjà rencontré les groupes de Vancouver.

M. Svend Robinson: Je suis désolé, je parlais du groupe de Toronto.

M. Raymond Chan: Eh bien, nous pouvons l'inviter à le rencontrer de nouveau, mais en tant que secrétaire d'État pour l'Asie-Pacifique, je suis entièrement responsable de ce dossier. J'ai rencontré le groupe de Toronto.

M. Svend Robinson: D'accord.

Le bilan de Suharto est effroyable. Je crois que tous les principaux groupes internationaux de défense des droits de la personne sont de cet avis. Des centaines de milliers de personnes sont mortes lorsqu'il a pris le pouvoir dans les années 60—le génocide au Timor oriental a fait quelque 200 000 victimes; des milliers de Chinois sont morts au Kalimantan occidental en 1967; et il est certainement responsable des graves émeutes survenues en mai dernier. Il était en cause.

Le Canada réclame la création d'un tribunal pénal international. Est-ce que le Canada est disposé à piloter cette initiative, lorsque le tribunal pénal sera créé, afin de traduire en justice l'ancien président Suharto?

De fait, quelques députés portugais ont déjà présenté une proposition semblable, à savoir que dès qu'un forum international aura été créé, il devrait être traduit en justice pour crimes contre l'humanité.

Est-ce que le Canada est prêt à jouer un rôle prépondérant dans ce dossier?

M. Raymond Chan: Le problème, c'est que le tribunal pénal international n'est pas rétroactif. On ne peut pas accuser quelqu'un de crimes antérieurs. Il y aurait donc un problème technique.

M. Svend Robinson: Ma dernière question, monsieur le président, porte sur la note d'information rédigée par l'ancien ambassadeur du Canada en Indonésie, datée du 31 juillet 1997. Gary Smith a écrit cette note. Il y fait état d'une réunion entre le ministre des Affaires étrangères de l'Indonésie, Ali Alatas, et le ministre des Affaires étrangères du Canada, M. Lloyd Axworthy.

Selon cette note, Lloyd Axworthy et lui avaient discuté du réseau d'alerte du Timor oriental, et Lloyd Axworthy s'était excusé pour la campagne anti-Suharto menée au Canada.

Je suppose que le ministre est au courant de cette note; il suit le dossier de très près—j'aimerais donc lui poser la question suivante: est-ce que cette note traduit fidèlement la teneur de la réunion qui a eu lieu entre notre ministre des Affaires étrangères et le ministre Alatas, ou est-ce que notre ambassadeur, Gary Smith, s'est trompé?

M. Raymond Chan: Le ministre des Affaires étrangères, Lloyd Axworthy, ne s'est jamais—je le répète, jamais—excusé à qui que ce soit.

M. Svend Robinson: L'ambassadeur se serait-il trompé dans ce cas? Est-ce bien ce que le ministre nous dit?

M. Raymond Chan: J'ai oublié quel terme était employé dans la note.

M. Svend Robinson: Bien, laissons de côté le terme «excuse» pour un instant. Je répète ma question au ministre: est-ce que la note de service—et le ministre a vu cette note, évidemment—traduit fidèlement la teneur de la réunion?

• 0955

M. Raymond Chan: Sans avoir la note en question devant moi, il m'est très difficile de porter un jugement, mais, pour autant que je sache, notre ministre ne s'est jamais excusé.

M. Svend Robinson: Bien, monsieur le président, j'aimerais alors demander si le ministre pourrait relire la note, puisqu'il ne l'a pas devant lui en ce moment—et je le reconnais—et si au besoin il peut en parler au ministre Axworthy et par la suite indiquer au comité si la note renfermait des erreurs.

Le président: Si le ministre veut bien le faire.

M. Svend Robinson: Eh bien, monsieur le président, je demande au ministre de le faire.

M. Raymond Chan: Je crois que ce que nous devons faire, c'est examiner le caractère délicat de la note...

M. Svend Robinson: Oh, je suis sûr que c'est très délicat.

M. Raymond Chan: ...et ensuite rendre compte au comité.

M. Svend Robinson: Merci, monsieur le président.

Le président: Peut-être, monsieur le ministre, que vous pourriez examiner la note, en discuter avec le ministre, et ensuite écrire au comité. Cela nous serait très utile.

M. Raymond Chan: D'accord.

Le président: Merci, monsieur.

Quelle faculté de droit avez-vous fréquentée, monsieur Robinson?

Des voix: Oh, oh.

Le président: Monsieur Patry.

M. Bernard Patry (Pierrefonds—Dollard, Lib.): Merci, monsieur le président.

Monsieur le ministre, j'aimerais enchaîner brièvement sur la question de M. Turp et surtout sur celle de M. Robinson.

Dans votre déclaration, vous avez mis l'accent sur le rapport de l'équipe d'enquête conjointe du 23 octobre, mais vous savez que cette équipe comprenait quatre généraux, ainsi que des ONG, des fonctionnaires, et de nombreuses autres personnes, et que les généraux n'ont pas signé le rapport. Aucun d'entre eux ne l'a signé.

Vous semblez souligner le fait que le gouvernement est en train d'étudier le rapport et qu'il prendra des mesures. Tout d'abord, croyez-vous vraiment que le gouvernement va donner suite au rapport? Et quel genre de mesures croyez-vous qu'il va prendre?

Deuxièmement, il semble que le Canada pourrait faire beaucoup—et vous avez dit que les prochaines étapes pourraient comprendre de nombreuses mesures—mais quel genre d'aide fournissons-nous à notre ambassade en Indonésie? Car il me semble qu'elle doit avoir beaucoup de travail en ce moment.

M. Raymond Chan: Les ministres militaires et civils n'ont effectivement pas assisté à la publication du rapport, mais, pour autant que je sache, ils ont participé à sa rédaction. Donc, avant que le rapport ne soit annoncé, publié, ils faisaient partie de l'équipe qui était chargée de le rédiger.

De plus, le fait que les autres membres de l'équipe aient eu le courage de publier le rapport sans l'appui du gouvernement, dans un climat agité, témoigne de leur dévouement. Je crois que les pressions exercées par le public, en Indonésie et à l'étranger, ont fait fléchir le gouvernement.

Donc le gouvernement n'essaye plus de nier le rapport et va maintenant en faire l'étude. Je crois qu'il faut continuer à exercer des pressions tant de l'extérieur que de l'intérieur. Je crois que la manifestation des étudiants et la réaction des journaux en Indonésie ont un effet très positif sur le gouvernement. Et le gouvernement réagit, peut-être trop lentement selon ce qu'on voudrait voir, mais il y a un mouvement.

Il est très difficile pour nous de préjuger de ce que le gouvernement fera. Ce à quoi on s'attend cependant, c'est que d'ici quelques mois, d'ici mai ou juin, un nouveau gouvernement sera créé, et le processus électoral sera terminé, et, espérons-le, il y aura un gouvernement plus responsable, plus imputable, et à ce moment-là les coupables seront traduits en justice.

M. Bernard Patry: Et quel type d'aide donnons-nous à notre ambassadeur, à l'ambassade?

M. Raymond Chan: À l'heure actuelle nous travaillons de très près avec eux, sur une base quotidienne, pour leur venir en aide. L'ACDI travaille d'arrache-pied auprès des ONG pour les aider. Nous accordons une haute priorité en matière d'appui financier aux ONG à l'heure actuelle.

M. Bernard Patry: Merci.

Le président: Merci, monsieur Patry.

• 1000

Monsieur Assadourian.

M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Merci, monsieur le ministre.

Cette question a trait essentiellement, comme vous le savez, au commerce et aux droits de la personne, et au tribunal pénal international en Europe. Il y aura des cas semblables partout dans le monde—au Royaume-Uni, au Moyen-Orient, partout dans le monde.

Quel type d'efforts de coordination avons-nous entre le Canada et les autres pays membres du G-7 ou d'autres pays européens au sujet des droits de la personne, afin de coordonner une réponse uniforme à cela? Le Canada seul ne peut pas changer la politique mondiale, mais nous pouvons travailler ensemble avec d'autres États qui pensent comme nous pour y arriver.

Faisons-nous quelque chose pour rassembler ces nations afin d'avoir une seule voix face à la situation, par exemple, au Timor oriental, ou en Indonésie, ou en Turquie, ou ailleurs?

M. Raymond Chan: Il y a énormément de dialogues, de discussions, et d'échanges de correspondance entre notre ambassade et les autres corps diplomatiques de la région. De même, lorsque nous sommes participants à des groupes régionaux, par exemple le Forum régional de l'ASEAN, nous regardons un peu ce que chacun fait de son côté et nous travaillons avec des pays qui pensent comme nous, par exemple l'Australie, la Nouvelle-Zélande et les, États-Unis pour essayer de résoudre ce genre de questions. Donc il y a une coordination et une position uniforme en matière de droits de la personne.

M. Sarkis Assadourian: Mais il n'y a pas d'organisation formelle qui traiterait de ces questions de façon uniforme. Il s'agit uniquement de consultation, et la consultation ne mène pas nécessairement à un résultat concret.

M. Raymond Chan: Parfois une organisation formelle n'est pas nécessairement productive, parce qu'on ne veut pas laisser croire qu'on essaye d'imposer le point de vue de plusieurs pays à un seul pays plutôt que d'exprimer une préoccupation réelle du gouvernement canadien. Étant donné notre objectivité dans ce genre de cas dans le passé, très souvent nos conseils, nos préoccupations, seront plus respectés par les pays en cause. Certains autres pays ont des antécédents coloniaux, une participation militaire dans des régions etc.; donc, leur crédibilité est moindre que la nôtre. Donc, parfois, une organisation formelle n'est pas nécessairement la meilleure façon de procéder.

Cependant, la voie la plus formelle est la Commission des droits de l'homme des Nations Unies, où le Canada et d'autres ont toujours dialogué et discuté dans les coulisses, afin de veiller à ce qu'on ait une approche coordonnée.

M. Sarkis Assadourian: Voyez-vous, si vous aviez un mécanisme pour réagir à cela, ces Chinois, ces soi-disant visiteurs en Indonésie, si j'ai bien compris, depuis six ou sept générations... Cela ne s'est pas produit le mois dernier ou la semaine dernière ou l'an dernier, ou même avec Suharto. La situation existait avant Suharto, et je sais que Suharto a été là pendant plusieurs décennies.

Nous n'avons pas agi au sujet de cette question, et au sujet de bien des questions semblables, puisque nous n'avons pas de mécanisme cohérent pour réagir à ce genre de situations. Nous attendons qu'il y ait des meurtres, des actes de violence, et ensuite nous réagissons.

M. Raymond Chan: En réalité, les Chinois étaient plus en sécurité, ces 15 dernières années, sous le régime Suharto que les autres groupes minoritaires, parce que Suharto les protégeait en quelque sorte, tout en tenant les Chinois à l'écart de la politique et de l'armée. Les Chinois ont accepté ces dispositions avec beaucoup de docilité.

M. Svend Robinson: Ils n'ont pas vraiment le choix.

M. Raymond Chan: Oui. Mais il est vrai que les violations des droits de la personne en Indonésie se sont produites surtout au Timor oriental depuis 15 ou 20 ans, et parmi la population civile ou paysanne des régions isolées.

• 1005

La situation des Chinois est très particulière. Au moment où il y a une lueur d'espoir pour les autres minorités, les Chinois servent de boucs émissaires. La situation actuelle est extrêmement spéciale, et c'est la raison pour laquelle nous la surveillons de près.

En même temps, nous continuons à collaborer avec d'autres pays qui sont du même avis que nous au sein de la Commission des droits de l'homme des Nations Unies et ailleurs afin d'exercer ensemble une pression sur l'Indonésie, mais parfois les Australiens et les Américains n'adoptent pas nécessairement la même position politique que nous.

Par exemple, les Australiens et les États-Unis s'intéressent beaucoup plus à choisir le parti gagnant. Entre autres, il leur semble que Habibie pourrait être actuellement le seul capable de stabiliser le pays, mais ce n'est pas la position du Canada. Même s'il y a certaines différences sur le plan politique entre nous, nous travaillons de concert sur le front des droits de la personne. Je veux dire par là qu'ils expriment les mêmes préoccupations que nous.

Alors je pense que nous ne devons surtout pas trop lier notre position politique à celle des autres, ou bien donner l'impression que notre politique est la même que celle des autres pays qui travaillent avec nous. Même si nous travaillons ensemble, nous avons des méthodes différentes.

M. Sarkis Assadourian: Merci.

Le président: Nous avons M. Strahl, M. Turp, M. Robinson, Mme Finestone et M. Cannis sur notre liste. Si chacun pouvait se limiter à une intervention de quatre ou cinq minutes environ, je pense que tous auraient le temps de s'exprimer.

Monsieur Strahl.

M. Chuck Strahl: Merci.

J'ai été étonné, monsieur le ministre, d'entendre que les choses se sont améliorées sous le régime de M. Suharto ces dernières années. Mais je sais que vous parlez d'un cas très précis.

M. Raymond Chan: Je parlais de la communauté chinoise, et c'était en raison d'une espèce d'entente...

M. Chuck Strahl: Très bien; il faudra que je revoie ma documentation à ce sujet. Je n'étais pas certain de ce qui s'y passait. Mais j'accepte votre explication.

Je n'ai que deux questions à poser. Premièrement, quelle aide financière le Canada accorde-t-il à l'Indonésie?

M. Raymond Chan: Bilatéralement, environ 26 millions de dollars par an.

Peut-être que Sarah, mon assistante, pourrait se présenter.

Mme Sarah Taylor (directrice adjointe, Direction de l'Asie du Sud-Est, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Je suis Sarah Taylor, directrice adjointe de la Direction de l'Asie du Sud-Est au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international.

M. Chuck Strahl: Merci.

L'Indonésie, probablement à cause de l'incident de l'APEC, préoccupé beaucoup l'esprit des Canadiens depuis quelque temps, et il s'est produit de grands remous, avec la démission de M. Suharto et toutes les émeutes et leurs abus. Cela a fait les manchettes dans le monde entier.

Au niveau économique, je pense, comme vous le dites, que les Chinois ont servi de boucs émissaires dans plusieurs situations là-bas. C'est une tactique typique des régimes répressifs, où l'on choisit quelqu'un, on s'acharne dessus, et on cherche à lui faire porter tout le blâme.

Au cours des négociations entre le Canada et d'autres partenaires internationaux au sujet, entre autres, de l'aide accordée par le FMI ou par la Banque mondiale à l'Indonésie, est-ce qu'ils ont imposé des conditions, ou est-ce que le Canada a insisté pour que l'on impose des conditions à cette aide financière accordée à l'Indonésie afin qu'elle sache qu'elle devra collaborer, pour recevoir cette aide, en écoutant l'équipe d'enquête et en faisant preuve de progrès tangibles au niveau des droits de la personne? Avez-vous vu quelque chose qui ressemble à l'idée d'imposer des conditions à l'aide?

M. Raymond Chan: Au moment des négociations avec le gouvernement Suharto, les émeutes du mois de mai n'avaient pas encore eu lieu, et à l'époque le plus grand problème était l'effondrement économique. Les émeutes du mois du mai, et les conditions sociales actuelles, sont surtout l'effet des problèmes économiques, de l'effondrement de l'économie.

Alors les négociations du FMI que nous avons appuyées s'intéressaient surtout à la réforme du système économique, ce qui, d'après moi, fait partie intégrante des réformes politiques. Une fois que l'on a relâché les contrôles économiques imposés à la population—par exemple les monopoles, les sociétés de la Couronne, et les copains du gouvernement, qui contrôlent les conditions de vie de la population—lors les individus ont une meilleure chance d'améliorer leur sort.

• 1010

Ainsi, les négociations du FMI s'intéressent surtout au démantèlement des monopoles, et moins aux questions politiques.

M. Chuck Strahl: Je pense que beaucoup de Canadiens, quand ils voient les politiques d'aide étrangère du Canada, sont bien d'accord si cette aide est destinée à des ONG ou directement aux victimes des émeutes ou des désastres naturels, etc. Quand on accorde de l'aide bilatérale sans la relier aux droits de la personne, les Canadiens sont mécontents;, ils disent que nous sommes en train d'aider un régime qui se sert de l'armée et de la police pour réprimer ses propres citoyens.

Alors si nous accordons de l'aide, je voudrais que le ministre... Je pense que c'est dans la mentalité des Canadiens de dire: quand nous sommes certains que l'aide va visiblement aider la population, c'est très bien, et nous sommes en faveur. Je pense que les Canadiens sont très généreux. Ils sont moins généreux lorsqu'il s'agit d'aide bilatérale accordée à un gouvernement. Car aider directement un gouvernement, un régime comme celui de l'Indonésie...

Même s'ils se trouvent dans un état de transition, nous devons veiller à ce qu'ils nous écoutent, acceptent l'équipe d'enquête conjointe, prennent des mesures et aient un plan.

Quand la population voit ces choses, elle est très favorable à l'aide. Quand elle ne les voit pas, elle n'y est pas favorable. Étant donné la grande visibilité de l'Indonésie, je vous encouragerais à continuer à lier l'aide accordée aux droits de la personne, car je pense que les Canadiens veulent voir des progrès dans ce domaine.

M. Raymond Chan: L'aide que nous accordons bilatéralement aux pays en voie de développement est surtout destinée à des projets de réforme—réforme des institutions, formation du personnel, afin de les rendre plus civilisés, mieux éduqués—afin que le gouvernement prenne ses responsabilités, dans le contexte de l'écologie, et par le biais des ONG. Tout cela compte aussi comme de l'aide bilatérale.

Alors, selon l'analyse des 26 millions de dollars fournis à l'Indonésie, vous voyez que cela n'est pas versé en espèces sonnantes au gouvernement. C'est de l'aide bilatérale qui est offerte par le biais d'ONG canadiennes, des groupes canadiens qui assurent de la formation du personnel et qui aident le gouvernement indonésien à réformer ses institutions.

Pour ces raisons, je pense que même s'il y a des violations des droits de la personne dans ces pays-là, nous leur offrons quand même des méthodes qui les qui aident à évoluer.

M. Chuck Strahl: Merci.

Le président: Madame Finestone.

L'honorable Sheila Finestone (Mont-Royal, Lib.): Merci.

Je voudrais donner suite à la question de M. Strahl.

Bienvenue, monsieur Chan.

Je vous dirai, monsieur Strahl, que lors des deux voyages que j'ai faits en Indonésie, à Jakarta et ailleurs, j'étais très fière des programmes financés par l'ACDI dans le cadre de ce budget. Il y avait de merveilleux projets pour les femmes qui leur permettaient de devenir autosuffisantes et de faire vivre leurs familles. Il y avait des projets pour l'éducation des enfants, pour les enfants handicapés, et pour former et éduquer les gens afin de développer des institutions démocratiques.

Je pense que tous ces projets-là étaient excellents. Je suis très contente de ce que nous faisons dans tous ces pays de l'Asie du Sud-Est.

J'ai deux questions. L'une d'entre elles est pour le président.

Je ne sais pas si je dois la poser maintenant ou plus tard. Veuillez, s'il vous plaît, me conseiller.

J'ai une question à poser au sujet de la visite des Canadian Concerned about Ethnic Violence in Indonesia, qui ont demandé à nous rencontrer. On leur a dit qu'ils pourraient rencontrer le Sous-comité des droits de la personne.

Il me semble que lorsque ce comité se réunit au sujet de questions telles que la situation en Indonésie—et c'est un comité très instruit, mais cela ajouterait quand même à nos connaissances—que ce type de réunions devraient être tenues au cours des séances plénières du comité.

Le président: D'accord.

L'hon. Sheila Finestone: Je sais que ce n'est peut-être pas la pratique normale, mais s'il nous faut étudier cette région en profondeur, je voudrais que le comité en entier soit présent pour écouter leur exposé.

• 1015

Le président: Je ne vous contredis pas, mais je voudrais quand même dire que les décisions de ce type se prennent normalement au comité directeur, où l'on cherche à organiser les travaux des divers comités. Et notre programme est tellement chargé, à cause du rapport sur l'énergie nucléaire, qui a pris deux semaines de plus que prévu...

Normalement, le Comité des droits de la personne s'occupe de ces questions, pour ensuite faire rapport au comité plénier. Je viens de parler à Mme Beaumier, et je pense que s'il fallait réserver cette réunion au Comité des droits de la personne, ceux d'entre nous qui s'y intéressent...

J'allais dire à ceux qui sont présents ici que dans ma propre circonscription de Toronto j'ai un nombre considérable de membres, et je suis certain que c'est le cas de nous tous, et j'ai l'intention de me rendre personnellement à cette réunion. On peut toujours se rendre à la réunion du sous-comité. Je pense que M. Robinson y sera probablement présent.

Alors nous allons essayer d'avoir une assistance nombreuse à cette réunion, si cela vous convient.

L'hon. Sheila Finestone: Merci.

Monsieur Chan, hier j'ai eu l'occasion de rencontrer Mary Robinson pour discuter du tribunal pénal international. Comme vous le savez, la réunion était présidée par l'honorable Lloyd Axworthy à Rome, et le Canada s'y intéresse beaucoup.

Je dois dire que j'ai été étonnée d'apprendre qu'il n'y aurait pas de rétroactivité dans le cadre de ce projet de loi. J'ai l'intention de soulever cette question auprès du ministre, car je ne suis pas très contente de cela. Le cas de Pinochet en est un exemple parfait.

M. Daniel Turp: C'était toute une bataille à Rome.

L'hon. Sheila Finestone: Alors, Daniel, vous pourriez peut-être nous en donner les détails, car, franchement, je suis très déçue.

Deuxièmement, en écoutant les histoires de violence ethnique et raciale que vous rapportez, je pense à deux choses, bien entendu. On cherche des boucs émissaires dès que l'on cherche à distraire l'attention de la population. Moi-même, je fais partie d'une minorité ethnique, et, comme vous le savez, je suis bien consciente de tout ce que cela comporte, et de la possibilité de conséquences terribles.

D'autre part, il y a cette idée vraiment ridicule que nous ne devons pas nous immiscer dans les affaires des autres États, et que ce qui prime surtout, c'est le droit de chaque État de régler ses propres problèmes à sa manière.

Voici ma question: étant donné que l'année 2001 sera l'Année des Nations Unies pour les relations raciales, j'espère sincèrement, lorsqu'il s'agit du droit des pays ou des organisations internationales d'exprimer leurs préoccupations et d'intervenir en cas de conflit ethnique à l'intérieur d'un pays, que cet argument ne sera plus considéré comme valable, et que nous pourrons intervenir avant qu'il ne soit trop tard.

Je pense que la Yougoslavie, la Bosnie, le Rwanda, l'Herzégovine—toutes ces régions—sont un exemple parfait des raisons pourquoi il faut changer cela. Étant donné que le Canada participera à la mise au point du programme, j'espère que cette question sera soulevée, et, deuxièmement, que le tribunal pénal international aura le droit d'agir rétroactivement.

Pourriez-vous répondre à ces deux questions?

M. Raymond Chan: Pour ce qui est du tribunal pénal international, je dois dire qu'il est difficile de négocier l'appui des États membres et de les persuader de signer une entente pour établir ce tribunal. À mon avis, nous avons vraiment insisté, mais je suppose que finalement il nous faut accepter l'entente dans sa forme actuelle avec les résultats ultimes afin d'obtenir l'aval de tous les intervenants.

Le gouvernement du Canada n'est pas d'accord pour dire que la violence ethnique soit une question interne que les autres pays ne peuvent pas soulever. Selon nous, elle est une autre violation des droits de la personne qui va à l'encontre de la Déclaration universelle de l'ONU sur les droits de l'homme. Voilà pourquoi nous continuons à soulever des préoccupations, en dépit de l'opposition de pays souverains qui connaissent ce problème.

Si vous le permettez, monsieur le président, je voudrais apporter une précision. Quand j'ai dit que les Chinois de souche étaient dans une meilleure situation ces 10 à 15 dernières années sous le régime Suharto, je voulais dire qu'ils n'étaient pas particulièrement les cibles d'attaques ethniques. Ils n'en ont pas été les victimes avant les émeutes de mai.

• 1020

Par contre, leur carte d'identité porte la mention «Chinois de souche». Ils n'avaient pas le droit de participer à la vie politique, de s'enrôler dans les forces armées ou de travailler à la fonction publique.

L'hon. Sheila Finestone: Ils n'avaient pas le droit de faire des études postsecondaires non plus.

M. Raymond Chan: C'est comme ça qu'ils ont été victimes de discrimination. À cette rencontre, le gouvernement Habibie a accepté d'enlever la mention «Chinois de souche»...

L'hon. Sheila Finestone: Bon. Ils ont enlevé l'étoile jaune. Je suis contente de le savoir.

M. Raymond Chan: ...et de permettre aux Chinois de souche de participer à la vie politique. Par conséquent, maintenant il existe deux partis politiques chinois en Indonésie, et les Chinois de souche commencent à se joindre aux partis de l'opposition et au parti qui forme le gouvernement.

Donc, cela augure bien.

L'hon. Sheila Finestone: Merci.

J'ai une dernière question, car on a déjà soulevé ce problème, et je voulais en parler.

Comme vous venez de l'admettre, les conditions fixées par le Fonds monétaire international, et par la Banque mondiale, ont mené en partie aux émeutes de mai. À ce moment-ci de l'histoire de l'Indonésie, des dizaines de millions d'enfants ne sont pas en mesure de fréquenter l'école. Les ravages économiques ont eu des répercussions sociales énormes.

Ce problème me préoccupe beaucoup. Aux réunions de l'ANASE, auxquelles nous avons assisté, certains ont déclaré que les conditions du FMI ont eu des effets désastreux sur ces pays. On dit qu'elles ne sont pas appropriées; que le FMI ne peut pas adopter une démarche uniforme pour tous ces pays; et que les sociétés, les compagnies, bref, le secteur privé, ont une responsabilité et doivent apporter leur contribution pour que la société civile puisse travailler et mettre le pays sur des assises économiques plus stables.

Si le FMI impose des conditions sévères et si les prêteurs internationaux ne résilient pas une partie de la dette, un pays en difficulté ne peut pas faire des progrès et redresser son économie.

J'espère que les Nations Unies ou le tribunal des droits de la personne poursuivent le débat sur cette question avec le FMI. Il est impossible pour ces pays de redresser leur économie. Et très honnêtement, les répercussions, surtout les répercussions sur les enfants, sont dévastatrices.

Voulez-vous réagir à mes remarques?

M. Raymond Chan: Je ne suis pas d'accord pour dire que le FMI était entièrement responsable des émeutes de mai.

L'hon. Sheila Finestone: Je ne voulais pas dire qu'il en était entièrement responsable; je voulais dire que les conditions que le Fonds a fixées ont mené à ces émeutes.

M. Raymond Chan: D'accord. Mais d'après ce que j'ai vu, la décision du FMI a forcé le gouvernement à faire face aux problèmes. À mon avis, même sans l'intervention du FMI, l'économie se serait effondrée, ce qui aurait mené aux conflits, prises de position et luttes politiques internes qui ont eu comme conséquence les émeutes qui ont eu lieu en mai.

En effet, le FMI était beaucoup plus sévère avec l'Indonésie à cette époque. Le Fonds est maintenant beaucoup plus sensible aux besoins de la population.

Je suppose qu'au moment des négociations le Fonds a imposé des changements au gouvernement de l'Indonésie, et si le gouvernement de l'Indonésie avait accepté la recommandation au complet à l'époque, plutôt que d'avoir effectué des réformes tièdes, le Fonds aurait pu réussir comme il l'a fait en Thaïlande. D'ailleurs, les pays de l'Occident pouvaient fournir plus d'aide alimentaire à l'époque, pour aider l'Indonésie à traverser cette période difficile. Mais je suppose que les difficultés politiques du pays ont provoqué l'effondrement du système politique et de l'économie.

C'est très malheureux ce qui se passe en Indonésie.

L'hon. Sheila Finestone: Merci beaucoup.

Le président: Eh bien, comme on encourage le comité à étudier les institutions financières internationales, ce débat pourrait servir de catalyseur.

Monsieur Turp, suivi de M. Cannis et M. Robinson.

[Français]

M. Daniel Turp: J'aimerais d'abord émettre un commentaire, monsieur le président. La question de la Cour criminelle internationale suscite tant d'intérêt qu'elle devrait revenir comparaître devant ce comité.

• 1025

Nous avons adopté ce traité et il ne nous reste qu'à le signer, à le ratifier. Bien que nous soyons très occupés, je suggère que l'on convoque à nouveau les témoins qui ont comparu devant nous le printemps dernier afin qu'ils nous parlent du processus visant à devenir partie à ce traité.

[Traduction]

J'ai trois petites questions pour vous, monsieur Chan.

Avez-vous demandé la libération de prisonniers politiques du Timor oriental, spécifiquement la libération du prisonnier politique que vous avez rencontré M. Gusmao?

Deuxièmement, avez-vous rencontré—ou avez-vous pu rencontrer—le ministre de la Justice de l'Indonésie, qui est perçu comme un des membres les plus progressistes du conseil des ministres? Je crois comprendre que vous n'avez pas rencontré le ministre. Pourquoi?

Ma troisième question est la suivante: est-ce que vous ou le ministre ou d'autres membres du gouvernement allez visiter l'Indonésie dans un avenir rapproché? Dans l'affirmative, de quoi allez vous causer lors de ces visites?

Je voudrais aussi poser des questions sur la corruption, mais je suppose que nous n'avons pas le temps pour cela.

M. Raymond Chan: Effectivement, nous avons demandé la libération de prisonniers politiques en général, mais nous n'avons pas mentionné de cas spécifiques. Comme je l'ai dit, j'ai rencontré le général Gusmao.

Je crois que le gouvernement a des réticences dans les coulisses. Certains m'ont dit que le gouvernement est prêt à libérer le général Gusmao, mais il a fixé certaines conditions que le général n'accepterait pas. C'est juste une information que j'ai reçue.

M. Daniel Turp: Connaissez-vous ces conditions?

M. Raymond Chan: Non, je ne les connais pas.

Sarah, savez-vous quelles sont les conditions?

Mme Sarah Taylor: Je pense que la condition principale, c'est que le général accepte de reculer au sujet de sa position sur l'indépendance du Timor oriental. S'il est prêt à renoncer à sa position publique en faveur de l'indépendance ultime du Timor oriental, il sera libéré. Il a dit avoir refusé d'accepter cette condition.

M. Daniel Turp: ...

[Note de la rédaction: Inaudible]

M. Raymond Chan: Vous avez tout à fait raison de dire que le ministre est parmi les membres les plus progressistes...

Le président: Monsieur le ministre, nous allons continuer à siéger; nous n'allons pas partir tant que M. Turp n'aura pas renoncé à sa demande de souveraineté.

Des voix: Oh, oh!

Le président: Voilà comment nous allons régler ce problème.

M. Daniel Turp: Et moi, je risque de ne pas être ici.

M. Raymond Chan: En effet, le ministre de la Justice, que j'ai rencontré en avril, est un partisan des réformes très progressiste. À cette rencontre, il a demandé l'aide du Canada et des ressources pour aider l'Indonésie à mettre des réformes judiciaires en vigueur, avant que j'aie même offert d'encourager des réformes dans ce sens.

Lors de ce voyage, en octobre, je ne l'ai pas rencontré, faute de temps, parce que, en plus de mes réunions avec le gouvernement, j'ai consacré 80 p. 100 de mon temps à rencontrer divers ONG et groupes communautaires.

Sarah me rappelle qu'à l'origine j'étais censé rencontrer le ministre, mais il a dû faire face à une urgence. En effet, il a dû quitter Jakarta.

Mme Sarah Taylor: Il y avait des problèmes quelconques dans sa famille.

M. Raymond Chan: Oui; voilà pourquoi nous n'avons pas pu nous voir.

Mais, effectivement, il joue un rôle très important dans ces réformes.

M. Daniel Turp: Y a-t-il des visites à l'horizon?

M. Raymond Chan: Pas pour le moment. Toutefois, nous collaborons très étroitement avec les ONG à l'heure actuelle dans le but de fournir de l'aide à la population.

Monsieur le président, avant de conclure, me permettez-vous de faire une précision?

Le président: Nous risquons de dépasser le temps prévu, mais pourriez-vous rester encore quelques minutes avec nous? Parce que M. Cannis et M. Robinson veulent poser des questions tous les deux. Si vous êtes prêt à rester encore 5 ou 6 minutes, monsieur le ministre, je crois pouvoir donner la parole à tout le monde. Excellent. Ensuite nous allons vous demander de faire une petite déclaration pour terminer. Très bien.

Monsieur Cannis.

M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.): Je serai très bref, car ma collègue, Mme Finestone, a déjà posé des questions sur la plupart des sujets que je voulais aborder.

Monsieur le ministre, je vous souhaite la bienvenue. J'étais très content d'apprendre que le gouvernement permettra aux groupes ethniques de participer à la vie politique. Cela augure bien.

• 1030

Comme on vous l'a déjà dit, hier Mary Robinson a comparu devant nous. J'ai soulevé la question du respect des résolutions des Nations Unies, car c'est une question qui me préoccupe énormément, à la lumière de ce que vous avez dit au sujet de l'Australie et des États-Unis et de leur démarche, de leur façon de réagir à ces circonstances malheureuses, c'est-à-dire leur désir de choisir un gagnant.

Je crois que les Nations Unies font de leur mieux, mais peu importe le nombre de résolutions qui sont présentées, peu importe le nombre d'observations ou d'initiatives, si elles ne sont pas respectées... C'est-à-dire, nous pourrions les appuyer.

Comment pourrions-nous appuyer ou faire respecter les initiatives de l'ONU pour nous assurer qu'à l'avenir les résolutions seront respectées non seulement dans cette région en particulier, je l'espère, mais partout dans le monde où ces incidents malheureux ont lieu? Selon vous, qu'est-ce qu'il y a à faire? Devrions-nous offrir une aide financière, ou une autre forme d'appui à nos ONG?

Avez-vous des commentaires à faire à cet égard?

M. Raymond Chan: Je pense que vous avez trouvé la réponse quand vous avez mentionné les ONG. À la longue, si nous voulons mettre fin à ces violations des droits de la personne, il faut admettre que l'intervention de pays étrangers ne produit que des résultats temporaires parfois. Il faut un outil dans ces pays pour créer des pressions à l'interne pour faire changer les choses, et non seulement des pressions sur le gouvernement du jour, mais aussi un changement dans les mentalités du peuple lui-même. Voilà pourquoi il nous faut négocier parfois afin de provoquer des changements à l'intérieur.

Je vous donne l'exemple de l'Indonésie. S'il existe une commission des droits de la personne en Indonésie depuis 1993, c'est en raison des négociations entre les pays membres de l'ONU et l'Indonésie. Nous avons accepté de rabaisser le ton dans la résolution, et l'Indonésie a accepté l'établissement d'une commission des droits de la personne, nommée par le gouvernement. Cette commission des droits de la personne a su établir sa crédibilité. Elle reçoit jusqu'à 10 000 ou 12 000 plaintes par an. Elle est devenue l'ombudsman du pays.

Il y a beaucoup d'ONG à l'oeuvre en Indonésie. J'ai mentionné la Fondation de l'aide juridique, qui compte environ 100 avocats et a un budget d'un million de dollars américains, financé par les pays de l'Occident. Cette commission existe depuis environ 20 ans, depuis les années 70, sous le régime Suharto. La commission lutte contre les forces armées. Des membres ont été arrêtés à quelques reprises, et les avocats ont été pris à partie, mais la commission a défendu le peuple.

Donc, ces organismes font changer les choses en Indonésie.

M. John Cannis: Alors, vous nous dites que nous avons fait des progrès après avoir accepté de faire des concessions mutuelles, par opposition, bien sûr, à la démarche de l'Australie et des États-Unis. Selon vous, nous avons pu faire des progrès.

M. Raymond Chan: Et les États-Unis et l'Australie ont même appuyé ces positions.

M. John Cannis: Merci.

Monsieur Robinson.

M. Svend Robinson: Monsieur le président, je serai très bref.

Je remercie le ministre d'avoir accepté de rester encore quelques minutes devant le comité.

J'ai deux questions. La première fait suite à la question importante posée par M. Cannis sur le rôle des Nations Unies.

À la lumière des atrocités de mai 1998, en particulier—les agressions sexuelles, les viols et les autres violations graves des droits de la personne—est-ce que le gouvernement de l'Indonésie ne devrait pas accepter les recommandations de l'équipe d'enquête conjointe? Le ministre est-il d'accord pour dire que nous devrions soulever la question auprès de la Commission des droits de l'homme des Nations Unies et que nous devrions réclamer la nomination d'un rapporteur spécial qui ferait enquête sur cette question très sérieuse? Voilà ma première question.

Ma deuxième question est la suivante: comme les élections prochaines en Indonésie sont d'une importance cruciale, comme il y a eu des changements politiques dans ce pays, je me demande si le ministre est d'accord pour dire que le Canada devrait envoyer une délégation de parlementaires de tous les partis politiques en Indonésie pour servir d'observateurs à ces élections importantes, pour examiner la situation au Timor oriental, pour évaluer quel est le respect des droits de la personne en général et, enfin, pour faire enquête sur les problèmes que vivent les Chinois de souche.

Voilà mes deux questions, monsieur le président.

M. Raymond Chan: J'appuie votre suggestion disent que si le gouvernement de l'Indonésie fait la sourde oreille aux recommandations de l'équipe d'enquête conjointe, les Nations Unies devraient prendre des mesures sérieuses.

• 1035

Je serais aussi en faveur de l'envoi d'une délégation parlementaire en Indonésie. En même temps, nous avons offert d'aider l'Indonésie lors du déroulement des élections afin d'assurer que le processus soit équitable et transparent.

M. Daniel Turp: Allez-vous appuyer la nomination d'un rapporteur spécial?

M. Raymond Chan: Oui.

M. Daniel Turp: Avec un mandat aussi précis?

M. Raymond Chan: Oui.

M. Svend Robinson: Merci, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup.

Merci, monsieur le ministre. Je me permets de poser une question très brève.

Contribuons-nous encore, par notre programme d'aide, à la commission des droits de la personne de l'Indonésie, qui est située à Jakarta?

M. Raymond Chan: Oui.

Le président: Notre contribution annuelle s'élève à combien?

M. Raymond Chan: À l'heure actuelle, deux agents de notre Commission des droits de la personne sont en poste en Indonésie. En effet, quand j'étais là-bas, un de ces agents a assisté à la réunion avec nous.

Le président: D'accord. Donc, nous avons affecté deux personnes à leur commission. C'est comme une contribution en nature. Apportons-nous une contribution en espèces également?

M. Raymond Chan: Je ne suis pas certain.

L'hon. Sheila Finestone: Nous y avons envoyé une ONG très bien connue pendant deux semaines, monsieur le président.

Le président: Si je pose la question, c'est parce que le directeur de la commission des droits de la personne a comparu ici à Ottawa il y a quelques années. Il m'a dit comment la démarche d'engagement du gouvernement du Canada lui a permis d'être présent. Vous êtes prêts à garantir notre présence, et je me demandais tout simplement si nous leur offrons encore un appui...

M. Raymond Chan: Il ne faut pas oublier qu'il est possible de financer des programmes spéciaux. Par exemple, nous avons financé un projet de formation et d'information à l'intention des forces de sécurité.

Le président: Et je suppose que l'organisme de M. Allmand est aussi impliqué, le Centre international des droits de la personne, situé à Montréal.

Très bien. Merci beaucoup.

Monsieur le ministre, vous avez dit que vous voulez faire une brève déclaration pour terminer.

M. Raymond Chan: Oui, monsieur le président.

Je voudrais saisir cette occasion pour contrer certains mythes sur la communauté d'origine chinoise. Selon certains, les Chinois de souche contrôlent la majeure partie de l'économie de l'Indonésie. À mon avis, c'est un mythe propagé par les médias et par des gens qui comprennent mal la situation.

Malheureusement, le gouvernement de l'Indonésie n'a pas compilé les statistiques correctement. Je pense que c'est exprès; le gouvernement ne veut pas que les citoyens connaissent la vérité. Mais, d'après mes sources, les sociétés d'État, qui sont contrôlées par le gouvernement, représentent environ 50 p. 100 de l'économie de l'Indonésie. Sur les 50 p. 100 qui restent, entre 25 et 30 p. 100 sont contrôlés par des copains des autorités—et je pourrais citer des noms.

Ce qui reste dans le secteur public représente environ 20 p. 100 de l'économie au total. Oui, elle est contrôlée par de grandes sociétés en grande partie, et par des Indonésiens d'origine chinoise, avec la collaboration et l'appui du gouvernement. Mais ce n'est pas vrai que les 3 p. 100 d'habitants qui sont de souche chinoise contrôlent la majeure partie de l'économie. Entre 6 et 7 millions de personnes sont de souche chinoise, et elles représentent environ 3 p. 100 de la population. Mais de sur ces 6 ou 7 millions, 90 p. 100 sont des gens ordinaires—des marchands ambulants ou des cultivateurs. Ils sont aussi pauvres que tous les autres Indonésiens.

Cette petite partie de la population—peut-être moins de 1 000 personnes—qui contrôle ces 20 p. 100 de l'économie, avec l'appui du gouvernement ou en collaboration avec le gouvernement, est composée de Chinois, mais on ne peut pas dire qu'elle représente l'ensemble de la population chinoise.

Les victimes de cette émeute étaient des gens qui ne contrôlaient aucunement l'économie. Ceux qui contrôlent l'économie ont pour la plupart quitté le pays, ou bénéficient de la protection des forces armées.

Il est donc imprécis de la part de la presse de dire que les Chinois contrôlent l'économie de l'Indonésie. C'est faux. Il s'agit d'un petit nombre de Chinois qui travaillent avec le gouvernement et contrôlent, disons, 20 p. 100 de l'économie, et pourtant on blâme l'ensemble de la communauté chinoise.

• 1040

Lorsque j'ai visité ces zones atteintes par les émeutes, j'étais attristé de constater que les attaques visaient les petits commerçants chinois qui essaient de vous vendre un paquet de cigarettes, ou qui gèrent un petit magasin du coin.

Je voulais simplement profiter de cette occasion pour fournir des précisions, monsieur le président. Merci.

Le président: Merci.

Monsieur Chan, on pourrait peut-être vous demander—et donc au ministère—de fournir au comité les chiffres portant sur la distribution des richesses en Indonésie, c'est-à-dire quel pourcentage de la population bénéficie de quel pourcentage des richesses, et quelle est la part des 10 p. 100 qui sont les plus démunis.

Je viens de noter les statistiques pour l'Amérique latine, par exemple, et je crois qu'en Amérique latine 60 p. 100 des richesses sont contrôlées par les 10 p. 100 de la population qui sont le plus riches, et que la part des 10 p. 100 les plus pauvres est de l'ordre de 3 p. 100. Il serait intéressant d'avoir des chiffres semblables pour l'Indonésie, s'ils sont disponibles. Je suis certain que le FMI a compilé certaines de ces statistiques, ou qu'elles se trouveraient dans le Rapport mondial sur le développement humain.

Nous nous arrêterons sur ce sujet si nous abordons la question des institutions financières internationales, et lorsque nous aborderons la question de nos arrangements commerciaux. Les membres du comité s'y intéressent beaucoup. Nous discutons actuellement de la société civile, du partage des richesses, de l'influence des arrangements commerciaux sur le partage des richesses, etc. Donc, ce type d'information pourrait nous être utile.

Monsieur le ministre, je vous remercie encore une fois d'avoir répondu à nos questions d'une manière franche et utile. Nous apprécions le fait que vous soyez venu témoigner, et vous êtes toujours le bienvenu au comité.

M. Raymond Chan: Merci.

Le président: J'aimerais faire une petite annonce et soulever quelques autres questions avant que nous levions la séance.

Monsieur Turp, vous avez mentionné le tribunal pénal international. Je viens de me rappeler que le 10 décembre, à l'occasion du 50e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme, nous accueillerons ici bon nombre des participants qui nous ont parlé du tribunal pénal international. Nous pourrions peut-être aborder cette question à ce moment-là, pour ensuite décider si nous voulons poursuivre ces travaux.

M. Svend Robinson: La réunion est fixée pour quelle heure?

Le président: À 9 heures, le 10 décembre.

M. Svend Robinson: J'aimerais simplement signaler un problème éventuel relié à l'heure de cette réunion. Il se peut qu'il y ait des déclarations à la Chambre pour marquer la Journée internationale des droits de l'homme, ce qui aurait lieu normalement à 10 heures à la Chambre, au moment où les députés entrent. J'aimerais seulement signaler qu'il faudrait peut-être vérifier l'heure.

Le président: C'est une bonne idée. On pourrait peut-être prendre une pause, par exemple. Nous verrons.

Merci. C'est très apprécié.

[Français]

M. Daniel Turp: Monsieur le président, c'est autre chose. Je voudrais que les fonctionnaires des Affaires étrangères qui ont participé à la négociation reviennent nous voir et que le ministère nous indique quelles sont les étapes pour les fins de la signature et de la ratification de ce statut.

Une voix: Au printemps.

M. Daniel Turp: Au printemps.

Le président: D'accord. Je suggère qu'on soulève ce point au comité directeur parce que c'est évidemment une question d'organisation du temps du comité.

[Traduction]

J'ai une motion à considérer rapidement, et ensuite M. Grewal a une motion à proposer.

On m'a dit que le réviseur français du rapport sur le nucléaire prévoit avoir besoin de presque deux fois plus de temps que prévu pour terminer son travail. Nous mettons beaucoup de pression sur lui, parce que le rapport doit être prêt à temps.

J'aimerais que quelqu'un propose que nous allouions, à même notre budget, un montant qui couvrirait 100 heures de son temps, le cas échéant, plutôt que les 50 heures que nous avons prévues dans le budget, et que ce montant soit puisé dans d'autres catégories.

[Français]

M. Daniel Turp: Oui, parce j'ai commencé à le lire et il y a beaucoup de travail à faire.

[Traduction]

Des voix: D'accord.

Le président: Je constate qu'il y a consentement unanime pour la motion. Je suis donc autorisé à retenir les services de M. Louis Majeau pour la révision de la version française de l'ébauche de rapport du Comité sur le désarmement nucléaire, au taux horaire de 70 $, pour un maximum de 100 heures.

Merci beaucoup.

[Français]

M. Daniel Turp: Tout les gens sont d'accord.

[Traduction]

Le président: Monsieur Grewal, vous voulez proposer une motion au nom de M. Stinson.

M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Réf.): Oui, monsieur le président. J'aimerais proposer une motion que devrait adopter le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international. Je l'ai fait distribuer plus tôt aux membres du comité.

La motion se lit ainsi:

    Que la ministre de la Coopération internationale et ministre responsable de la Francophonie, l'honorable Diane Marleau, soit invitée à comparaître devant le comité aussitôt que possible, si possible au plus tard le 10 décembre 1998, pour discuter du rapport sur le rendement de l'ACDI pour 1998.

Le président: Puis-je poser une question au sujet de la résolution?

• 1045

Étant donné que nous n'avions pas de comité directeur, est-ce absolument essentiel pour vous que ce soit avant le 10 décembre? S'il faut remettre la comparution après l'ajournement, si elle s'engage à comparaître, la date du 10 décembre est-elle un élément clé? Ce que je veux dire, c'est que nous pouvons viser le 10 décembre.

M. Gurmant Grewal: Monsieur le président, elle devrait comparaître le 2 décembre, pour discuter du budget des dépenses et du rapport sur le rendement, parce qu'on nous a donné cette date comme échéance. Cela aurait donné au comité l'occasion de tenir un débat un peu plus long sur le budget des dépenses. Mais puisque la situation actuelle fait que nous ne serons pas en mesure de débattre le budget des dépenses, mais seulement le rendement de l'ACDI, je préférerais tenir cette discussion avant le congé de Noël.

Le président: D'accord.

Madame Hilchie, la ministre a comparu au mois de mai pour discuter le budget des dépenses, mais on demande que cela ait lieu avant le 10 décembre. Je suis en train d'expliquer à M. Grewal que cela pourrait ou ne pourrait pas être possible, selon notre échéancier.

Nous ne perdrons pas notre compétence si cela se fait en 1999. Nous serions toujours en mesure de l'étudier l'an prochain, pourvu que la demande soit faite à temps. Donc la demande est à temps, si le comité l'adopte, puis nous avons la compétence, et nous pouvons la remettre.

Je vous demande simplement de me donner une marge de manoeuvre. Je vais essayer de la faire venir avant le 10 décembre, mais si je ne le peux pas, j'aimerais avoir une marge de manoeuvre.

Si elle ne peut pas venir, elle ne peut pas venir. Nous n'y pouvons rien.

[Français]

M. Daniel Turp: Si la session est prorogée, est-ce qu'on aura la même compétence?

Le président: Non. Si la session est prorogée, tout disparaît. On recommence, et il faut constituer un nouveau comité.

M. Daniel Turp: Donc, on perd notre compétence à cet égard?

[Traduction]

Le président: La greffière me dit que cette motion-ci serait toujours considérée comme renvoyée au comité, peu importe qui siège au comité, peu importe sa composition. Le rapport sur le rendement serait toujours considéré comme renvoyé au comité.

D'accord?

Monsieur Robinson.

M. Svend Robinson: Monsieur le président, je veux simplement souligner cette observation, à savoir que le nouveau comité—si en effet il y a prorogation—continuerait d'être saisi du rapport sur le rendement et pourrait l'étudier. Donc je suggère que, comme l'a proposé M. Grewal, tous les efforts soient déployés afin de faire comparaître la ministre avant le 10 décembre, et si cela n'est pas possible, qu'elle comparaisse le plus vite possible après cette date.

Le président: D'accord. C'est sans aucun doute ce que j'aimerais faire.

Y a-t-il des objections à cette motion? Non?

(La motion est adoptée—voir Procès-verbaux)

Le président: Merci beaucoup.

La séance est levée.