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FAIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FOREIGN AFFAIRS AND INTERNATIONAL TRADE

COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 11 mai 1999

• 0906

[Traduction]

Le président (M. Bill Graham (Toronto-Centre—Rosedale, Lib.)): Bonjour, monsieur Weekes, merci beaucoup d'être venu.

Certains d'entre nous avaient eu l'idée plus romantique d'aller vous rendre visite à Genève, mais voilà, nous sommes ici. Nous vous sommes reconnaissants d'être venu jusqu'à nous parce que chaque fois que nous avons essayé de nous rendre là-bas, diverses raisons ont fait que cela était impossible.

Nous savons que vous êtes très occupé et c'est pourquoi nous vous remercions. Je vous invite à faire une déclaration liminaire, après quoi les membres du comité voudront vous poser des questions.

Vous savez que nous réalisons actuellement une étude sur l'OMC; je n'ai donc pas besoin de vous en dire davantage.

M. John Weekes (ambassadeur du Canada auprès de l'Organisation mondiale du commerce): Merci beaucoup, monsieur le président.

Je suis heureux d'être ici. Vous devriez peut-être essayer à nouveau de venir à Genève. Vous n'auriez pas été les seuls parlementaires à venir à Genève au cours des derniers mois. Nous constatons un regain d'intérêt des parlementaires de plusieurs pays pour ce qui se fait à Genève. Les représentants qui sont là commencent à s'habituer à l'idée qu'une partie de leurs fonctions est de s'entretenir avec des législateurs venus d'autres pays que le leur. J'aurai peut-être donc l'occasion de vous accueillir à Genève un beau jour.

Ce matin, je vais essayer de vous donner une idée de la façon dont on voit les choses à Genève et de vous indiquer en quoi ce qui se passe là-bas intéresse le Canada.

Je suis un peu nerveux à l'idée de comparaître devant vous ce matin. Je sais que vous approchez du terme d'une série d'audiences qui a permis au comité d'apprendre beaucoup de choses.

Le principal événement auquel on se prépare actuellement à Genève est la troisième conférence ministérielle de l'Organisation, qui se tiendra à Seattle dans l'État de Washington du 30 novembre au 3 décembre. Ce matin, je voudrais examiner les possibilités d'élargir la négociation à Seattle pour en faire ce que certains appellent un cycle. J'aimerais examiner les thèmes qui pourraient en faire partie. J'aimerais aussi aborder brièvement les conséquences d'affaires réglées par le règlement des différends et des négociations sur l'accession.

Il m'a semblé utile de dire d'abord quelques mots sur ce qui distingue les prochaines négociations de celles de l'Uruguay Round et sur le nouveau rôle des pays en voie de développement, ce qui m'apparaît nécessaire à la compréhension de ce qui se passe à Genève.

Auparavant, j'ajouterai, comme vous le savez sans doute, que nous sommes activement à la recherche d'un nouveau directeur général de l'OMC. Cette recherche a commencé à distraire l'Organisation de ses autres tâches. J'espère que le choix sera arrêté le plus tôt possible.

Pour ma part, je me réjouirais de voir M. Roy MacLaren devenir le prochain directeur général de l'OMC.

• 0910

Comme je l'ai dit, Genève s'occupe activement des préparatifs de la rencontre ministérielle de Seattle. Nous avons reçu nos ordres de marche des ministres réunis lors de la seconde conférence ministérielle de Genève en mai dernier.

Permettez-moi de vous rappeler ce que les ministres ont déclaré dans leur communiqué. Je vais vous citer une partie d'un passage déterminant. Ce n'est pas très long. Même si c'est un peu morne, c'est important.

Je cite:

    [...] nous déciderons qu'un processus sera lancé sous la direction du Conseil général afin de veiller à la mise en oeuvre intégrale et fidèle des accords actuels et d'assurer les préparatifs à la troisième session de la conférence ministérielle. Le processus permettra au Conseil général de présenter des recommandations concernant le programme de travail de l'OMC, y compris une libéralisation plus poussée des échanges, suffisamment large pour répondre à l'ensemble des intérêts et des préoccupations de tous les membres dans le cadre de l'OMC, pour nous permettre de prendre des décisions à l'occasion de la troisième session de la conférence ministérielle.

L'allusion au «programme de travail de l'OMC» est en fait une référence à de nouvelles négociations et le passage relatif à une «libéralisation plus poussée des échanges, suffisamment large» a été incorporé sur l'insistance de la Communauté européenne, qui voulait un point d'ancrage pour présenter ses arguments en faveur d'un cycle de négociation du millénaire.

Les ministres se sont aussi entendus sur l'ampleur du programme de travail du Conseil général, à propos duquel des recommandations allaient être préparées. La priorité a été donnée aux questions de mise en oeuvre, les «négociations déjà décidées à Marrakech, pour faire en sorte que ces négociations commencent à temps»—c'est-à-dire sur l'agriculture et les services—et «les travaux futurs déjà prévus» en vertu de décisions prises à l'OMC et ailleurs à Marrakech, y compris, par exemple, l'examen de l'accord sur les mesures sanitaires et phytosanitaires et d'autres examens, comme celui du mécanisme de règlement des différends, ainsi que la décision sur le commerce et l'environnement. Une priorité un peu moins grande a été accordée à d'autres questions, comme les investissements, la politique de concurrence et toute autre question qui pourra être soulevée.

Autrement dit, le mandat à l'intention des ministres n'a pas déterminé l'ampleur des négociations mais a certainement évoqué la possibilité d'un vaste nouvel effort de négociation.

À l'extérieur de Genève, les appels au niveau politique en faveur d'un cycle commencent à se multiplier. Sir Leon Britton, le premier à réclamer un cycle du millénaire, a obtenu l'appui des États membres de la Communauté européenne, atout non négligeable vu l'incertitude de sa situation actuelle. Le président Clinton a réclamé le lancement d'un nouveau cycle lors de son discours sur l'état de la nation en janvier. Les Japonais se sont déclarés en faveur de l'idée, et un groupe de petits pays, surtout des pays en développement, qui s'appellent les «Amis du nouveau cycle», se sont réunis au niveau ministériel à Hong Kong pour déclarer leur appui à cette idée.

C'est donc dire que l'idée d'une négociation beaucoup plus vaste que ce qui était prévu à l'origine—l'agriculture et les services—a fait beaucoup de chemin. Certains pays en développement comme l'Égypte, le Pakistan et l'Inde ont exprimé des réserves à propos d'un nouveau cycle, mais plus pour des raisons tactiques que de principe.

Il est bon de constater qu'un certain nombre des pays en faveur d'un nouveau cycle sont convaincus qu'une négociation plus vaste est nécessaire si l'on veut enregistrer des progrès dans les négociations sur l'agriculture et les services. Ce sont surtout les Japonais et les représentants de la Communauté européenne qui tiennent ce discours. La Corée fait partie des Amis du nouveau cycle. Cela signifie qu'un certain nombre de pays auxquels le Canada demandera des concessions sont en faveur d'une négociation élargie.

Il faut examiner les diverses propositions qui sont avancées sur l'objet des négociations et les examiner sur le fond. C'est ce qui s'effectue actuellement à l'occasion de rencontres du Conseil de l'OMC à Genève, une instance que les ministres ont chargée des préparatifs.

• 0915

Un certain nombre de délégations ont proposé qu'un sujet de négociation soit les droits de douane sur les produits industriels. Elles soutiennent qu'il n'est pas très sensé de négocier la réduction des obstacles au commerce des produits agricoles et des services sans en faire autant pour les produits industriels. Ces trois grands thèmes peuvent déjà composer les éléments d'une négociation très importante.

D'autres questions vous donneront une idée des thèmes qui seront abordés dans les mois à venir, qui détermineront la tournure des négociations.

Mais de plus en plus, les négociations commerciales et la politique commerciale portent sur la politique de réglementation. Cette question est au coeur du dialogue commercial transatlantique et elle pourra occuper une place importante dans les négociations de l'OMC. La réglementation n'est pas un thème inédit à l'OMC, mais son importance est aujourd'hui primordiale.

Lors du cycle de Tokyo des négociations du GATT dans les années 70, un accord sur les obstacles techniques au commerce a été négocié pour essayer de faire en sorte que la réglementation technique et les normes des produits ne servent pas à des fins protectionnistes. Des termes comme «les obstacles techniques au commerce» ou son équivalent agricole dans le cycle d'Uruguay, «les mesures sanitaires et phytosanitaires», n'illustrent pas vraiment le fait que ces accords commerciaux portent sur la politique de réglementation intérieure. Ce sont pourtant là le genre de questions qui font l'objet de négociations—la maladie de la vache folle, le boeuf aux hormones, les organismes transgéniques et les exigences relatives à l'étiquetage dans le cas du papier fin.

Il faut signaler qu'en adoptant des règles internationales, les États ne renoncent pas à leur droit de prendre des règlements dans l'intérêt public, mais dans un nombre croissant de cas, cette réglementation a des chances d'être plus efficace si elle est adoptée à l'échelle internationale plutôt que nationale.

La politique de la concurrence figure elle aussi de plus en plus à l'ordre du jour. L'accord de l'OMC sur les télécommunications de base comporte des engagements en faveur de réglementations proconcurrentielles pour veiller à ce que la libéralisation du marché déjà convenue se traduise dans la réalité. La plainte lancée par les États-Unis contre le Japon à propos de la pellicule photographique il y a quelques années montre le lien étroit entre la libéralisation du commerce et la politique de la concurrence. La nouvelle initiative sur la déréglementation et la politique de la concurrence fait partie des discussions commerciales entre les États-Unis et le Japon depuis quelque temps déjà.

De plus en plus, à mon avis, il faudra inclure dans les accords commerciaux des dispositions semblables aux principes de réglementations proconcurrentielles dans l'accord sur les télécommunications afin de renforcer la libéralisation des échanges. La Communauté européenne s'est montrée ambitieuse sur ce front. Il reste à voir si nous le serons tout autant, mais la question, je crois, est de déterminer comment nous traiterons de la politique de la concurrence et non pas de savoir si nous allons en traiter.

La politique relative aux investissements est également de plus en plus une question commerciale. Les chefs d'entreprise savent que dans la réalité le commerce et les investissements sont quasiment inséparables. Les chiffres de l'ONU montrent que les ventes de filiales étrangères d'entreprises multinationales dépassent aujourd'hui la valeur totale du commerce mondial de produits et de services. Les règles relatives aux investissements figurent en bonne place dans les grands accords régionaux comme l'ALÉNA.

Ces dernières années, les pays de l'OCDE se sont beaucoup employés à négocier un accord multilatéral. Cet effort, comme vous le savez, n'a pas été couronné de succès. À l'OMC, il est aussi de plus en plus question des investissements. L'OMC incorpore des dispositions sur les investissements dans le secteur des services.

Par exemple, l'élément essentiel des négociations récentes sur les télécommunications et les services financiers était de savoir quel volume d'investissement étranger serait autorisé dans ces secteurs auparavant interdits d'accès. Il y a des dispositions de l'OMC sur les mesures d'investissement reliées au commerce. Nous préparons un programme de travail à l'OMC qui doit nous permettre de décider si nous voulons entamer des négociations afin de fixer des règles multilatérales sur l'investissement à l'OMC. L'opportunité et la manière de traiter les investissements dans les nouvelles négociations sera une des principales questions sur lesquelles on se penchera dans les mois à venir.

• 0920

L'environnement est un autre dossier actuellement à l'étude à l'OMC. Si l'on ne le traite pas comme il faut, ce dossier pourrait compromettre dangereusement la coopération en matière de commerce international.

En mars, l'OMC a tenu une réunion de haut niveau sur le commerce et l'environnement sous la présidence de son directeur général de l'époque, Renato Ruggiero. Cette rencontre a été l'occasion pour la communauté du commerce de l'OMC de faire participer les milieux écologistes à une discussion tous azimuts. La réunion a aussi montré que l'OMC est une organisation ouverte, bien à l'écoute de ses membres.

Une des conclusions qui s'est clairement dégagée, c'est que l'OMC ne fait pas obstacle à l'environnement. Il faut toutefois être réaliste à propos de ce que l'OMC peut ou doit faire dans ce domaine.

Le commerce électronique fait partie de la révolution du savoir. Lors de la réunion ministérielle de mai 1998, les ministres de l'OMC ont déclaré un moratoire sur l'imposition de droits de douane sur les transmissions électroniques et ont réclamé un programme de travail complet. La question a fait l'objet de discussions à la conférence ministérielle des pays de l'OCDE à Ottawa en octobre dernier, comme vous le savez tous.

Il est important de signaler que la communauté mondiale est arrivée à la conclusion que ce nouveau mode de communication doit être examiné à l'échelle internationale parallèlement aux diverses démarches nationales en voie d'élaboration. La question ne manquera pas de figurer en bonne place lors de la conférence ministérielle de cette année.

Voilà qui vous donne une idée des nombreux points de discussion en matière de commerce. L'ordre du jour portera de plus en plus sur des mesures et des politiques nationales. Cela vous donne une idée du défi qui reste à relever dans nos préparatifs en vue de ces négociations.

Dans l'exécution des consignes des ministres, le Conseil général a déjà débattu de quantité de ces questions. Le travail de préparation s'effectue dans une série de séances spéciales du Conseil général, assorties de rencontres plus officieuses destinées à faciliter l'échange de vues.

À l'automne, les délégations ont recensé les thèmes qui pourraient être soumis à l'attention des ministres. Nous nous préparons actuellement à déposer des propositions plus précises et nous continuerons d'en discuter jusqu'au mois de juillet environ. Jusqu'à présent, peu de propositions en bonne et due forme ont été déposées, mais beaucoup ont été annoncées.

Le Groupe de Cairns a déposé son énoncé des perspectives d'avenir, et l'Australie a présenté trois propositions sur des éléments des négociations sur l'agriculture. À partir du mois de juillet, nous allons préparer le texte préliminaire des recommandations destinées aux ministres.

Il y a beaucoup à faire à Genève, et les délégations doivent conserver leur sens de la perspective. Ce n'est pas à nous de conclure les négociations; nous n'avons qu'à nous entendre sur la façon de les mettre en route.

Le Conseil général a aussi reçu pour consigne des ministres de préparer «des recommandations en vue de décisions concernant l'organisation future et la gestion du programme de travail»;—c'est-à-dire les nouvelles négociations. Au nombre de ces recommandations doivent en figurer certaines concernant «l'ampleur, la structure et les échéanciers, pour faire en sorte que le programme de travail soit entrepris et mené à terme dans les meilleurs délais».

La plus grande partie de ce travail d'organisation sera entreprise lorsque nous connaîtrons mieux la nature d'ensemble de ce qui sera présenté aux ministres. Toutefois, de nombreuses délégations ont déjà dit qu'il ne faudra pas laisser traîner les négociations. On a laissé entendre que trois ans serait une échéance raisonnable et permettrait aux négociations d'aboutir avant l'expiration de la «clause de paix» de l'accord sur l'agriculture, à la fin de 2003. En effet, cet élément pourrait bien servir de catalyseur et encourager les négociateurs à conclure avant cette date en raison des frictions qui apparaîtront sans doute si des arrangements ne sont pas pris auparavant concernant ce qui se passerait après cette date.

• 0925

Un certain nombre de litiges tranchés récemment à l'OMC ne manqueront pas d'influencer les nouvelles négociations, y compris, ce qui est important, celles sur l'agriculture. Il est difficile de prédire exactement quel sera l'effet des conclusions des groupes spéciaux ou des instances d'appel, mais on peut être certain que les négociateurs étudieront ces décisions lorsqu'ils prépareront leurs méthodes de négociation. De fait, certains litiges auront peut-être un retentissement bien supérieur au point précis du litige. Par exemple, le litige sur la banane est révélateur car il reposait en bonne part sur l'interprétation de l'accord sur les services et la question de la distribution.

Le litige concernant le mécanisme de fixation du prix par le Canada du lait de transformation et du recours à des contingents tarifaires aura un effet très net sur les négociations, quelle que soit son issue. La décision donnera l'interprétation définitive de certaines dispositions fondamentales de l'OMC et il faudra qu'elle soit le point de départ des négociations.

D'autres différends, comme ceux relatifs aux embargos sanitaires applicables à l'importation de saumon frais en Australie, de boeuf aux hormones—et cela est tout à fait d'actualité—et des restrictions phytosanitaires sur les importations de fruits au Japon, ont des conséquences pour l'accord sur les mesures sanitaires et phytosanitaires. Pour cette raison, il est très probable que certains membres voudront rouvrir l'accord, et invoqueront peut-être l'examen déjà prévu pour cette année pour ce faire.

On est fondé à croire qu'il y aura prochainement un différend concernant les organismes transgéniques.

Le président: Pour que nous ne restions pas dans l'expectative, vous dites que nous voudrons sûrement rouvrir l'accord, dans le but de l'assouplir, j'imagine, n'est-ce pas, c'est ce que vous dites?

M. John Weekes: Ou peut-être de le clarifier. Au moment de la rédaction, lorsqu'on a employé un libellé disant qu'il fallait fonder les décisions sur des faits scientifiques—je ne cite pas le libellé textuellement—cela semblait suffisant. On peut peut-être se demander s'il s'agit là d'une définition adéquate de ce qui est nécessaire dans ces circonstances.

Je crois qu'aux yeux de la plupart des producteurs canadiens, ou c'est du moins l'impression que j'en ai eue lors de la récente conférence sur l'agriculture à Ottawa, les dispositions de cet accord sont à la hauteur du défi. Mais c'est peut-être parce que nous avons gagné deux fois notre cause en vertu de ces dispositions.

Néanmoins, de façon générale, je crois que le système de règlement des différends fonctionne bien. Il peut fournir des interprétations définitives, ce qui aidera les négociateurs à avoir une meilleure idée de ce que veulent dire exactement les règles. Il est déjà clair que les négociateurs auront moins la capacité, cette fois-ci, de passer sur les divergences de vues en recourant à un libellé ambigu, car s'ils le font, ils inviteront simplement le système de règlement des différends à interpréter le sens d'une disposition, ce qui ne donnera pas toujours le résultat qu'ils espéraient.

Il y a 30 pays qui négocient actuellement leur accession à l'OMC, y compris de grands pays comme la Chine, Taiwan, la Russie, l'Ukraine et l'Arabie saoudite. Prises ensemble, ces négociations sont aussi importantes que certains cycles de négociations passés. La plupart de ces pays, sinon la majorité, n'auront pas encore obtenu leur accession lorsque les prochaines négociations débuteront. Ces pourparlers pour leur accession nous offrent la possibilité d'améliorer l'accès au marché des produits canadiens et de faire en sorte que ces pays acceptent des règles qui limiteront leur capacité à menacer injustement le commerce et la production du Canada.

Pour ceux qui auront déjà adhéré à l'OMC d'ici la fin de cette année, nous aurons l'occasion de pousser plus loin nos discussions avec eux dans le contexte des nouvelles négociations. Tout cela exigera une bonne coordination au Canada, avec les parties prenantes ainsi qu'à la table de négociation.

• 0930

Je voudrais parler un peu de ce qui différencie l'OMC de l'ancien GATT. Le contexte dans lequel nous abordons ces négociations est très différent de celui qui prévalait en 1986, avant le lancement de l'Uruguay Round.

Tout d'abord, du moins pour le secteur de l'agriculture et des services, nous savons depuis longtemps que nous entamerons de nouvelles négociations à la fin de cette année, car c'est ce que prévoit l'OMC. Deuxièmement, nous avons une bien meilleure idée de ce que sera la teneur de ces négociations.

Le secteur des services ne faisait même pas partie du GATT et il a fallu déployer beaucoup de temps et d'énergie pour établir des moyens d'intégrer ce nouveau secteur. La structure de base est maintenant en place. Il devrait être donc plus facile d'entamer ces négociations.

Dans le secteur de l'agriculture, le point de départ est beaucoup plus clair. En fait, nous devons poursuivre le programme de réforme. Nous pouvons donc éviter les discussions à n'en plus finir de l'Uruguay Round quant à ce que les règles devraient être et quant à savoir s'il faudrait se mettre d'accord ou non sur la tarification.

Nous savons maintenant quelles sont les règles de base. Bien entendu, les négociations vont quand même soulever un grand nombre de questions délicates pour beaucoup de gouvernements, mais au moins l'objectif devrait être plus clair. Les questions sur lesquelles il faudra prendre des décisions devraient être plus faciles à définir.

Une autre différence entre l'OMC et l'ancien GATT est qu'il y a beaucoup plus de membres. En 1986, lors de la réunion de Punta del Este qui a marqué le début de l'Uruguay Round, il y avait moins de 100 membres. Ils sont aujourd'hui 134 et, comme je viens de le dire, 30 autres négocient leur accession. C'est un fait à considérer pour ce qui est des répercussions que l'Uruguay Round a eues sur la nature de cette institution.

Il vaut la peine de souligner que tous les participants ont accepté en bloc pratiquement tous les résultats des négociations de l'Uruguay Round. Cela veut dire que toutes les parties ont accepté à peu près tous les éléments de l'accord, y compris les questions qui avaient fait l'objet de codes séparés lors du Tokyo Round. Dans le cadre de l'ancien GATT, c'est à la carte que les parties ont adhéré aux divers codes, ce qui a suscité la confusion et une fragmentation. L'OMC ne comprend maintenant qu'une seule et même catégorie de membres.

Les pays en développement ont négocié et accepté toutes les règles et n'ont obtenu un traitement spécial et différent que dans des domaines limités, surtout les mesures de transition. Leur engagement à se conformer au nouveau système résulte de leur émergence graduelle sur le marché mondial. D'autre part, ils se rendent compte qu'un traitement spécial ne voudrait pas dire grand-chose si le système principal était faible.

La réalité a changé énormément la situation depuis l'époque du GATT. Un bon nombre des pays qui ont été les premiers à demander de nouvelles négociations sont des pays en développement. Ils se considèrent chez eux à l'OMC. Le nombre de membres a augmenté, comme je vous l'ai dit.

Il est maintenant important de profiter de ce nouveau partenariat pour consolider la coopération entre les pays industrialisés et les pays en développement. Cela contribuera à raffermir la coopération multilatérale et à créer des bases solides pour relever les défis de demain. C'est une tâche importante qui exigera un nouvel élan à l'approche de ces nouvelles négociations. Les problèmes de développement se refléteront dans tous les aspects de ces pourparlers.

Une organisation qui compte davantage de membres sera certainement plus complexe à gérer, mais cela ne veut pas dire que les négociations seront nécessairement plus difficiles. Les possibilités de négocier s'en trouveront peut-être améliorées et il y aura moins de resquilleurs en dehors du système. Lorsque la Chine adhérera à l'OMC, cela aura des effets que nous ne comprenons pas encore entièrement. Néanmoins, le renforcement institutionnel de l'OMC peut compenser les problèmes découlant de son élargissement. Par exemple, nous avons déjà une conférence ministérielle au sein de l'OMC pour gérer les négociations.

Enfin, de très nombreux accords régionaux se préparent, comme vous le savez. Je signale simplement l'engagement de l'APEC à établir un libre-échange dans cette région et les efforts déployés pour créer une zone de libre-échange dans les Amériques. Le lancement d'un nouveau cycle de négociations commerciales multilatérales à la fin de l'année pourrait s'avérer être la plus importante de ces initiatives.

• 0935

Une bonne partie de l'énergie dépensée au niveau régional pourra être recueillie au niveau multilatéral dans le cadre de l'OMC. À Seattle, les ministres devront au moins examiner soigneusement le lien entre les nouvelles négociations de l'OMC et les diverses initiatives régionales.

Enfin, comme vous le savez, nous jugeons essentiel que les gouvernements abordent leurs préparatifs de façon ouverte et transparente. À Genève, nous préconisons beaucoup plus de transparence au niveau multilatéral et c'est ce que nous continuerons de réclamer. Nous n'avons rien à perdre et beaucoup à gagner en permettant aux parties prenantes et aux citoyens de savoir ce qui se passe. En fait, l'OMC est beaucoup plus ouverte que certains pourraient le croire, mais les choses peuvent encore être largement améliorées. C'est un aspect sur lequel nous allons continuer à insister d'ici la réunion de Seattle.

J'ai hâte de voir votre rapport qui, j'en suis certain, apportera une importante contribution à la préparation et au déroulement de nouvelles négociations.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci, monsieur Weekes.

Vous avez commencé en disant que nous avions la possibilité d'acquérir beaucoup de sagesse depuis que nous avons entamé notre étude de ces questions. Il aurait peut-être été plus exact de dire que nous avons obtenu beaucoup de renseignements. Quant à savoir si nous les transformerons en sagesse, cela dépendra de ce que nous ferons lorsque nous préparerons notre rapport.

Votre exposé nous a été très utile et il était très complet. C'était un très bon aperçu de la situation. Merci beaucoup.

Monsieur Stinson, s'il vous plaît.

M. Darrel Stinson (Okanagan—Shuswap, Réf.): Merci.

Merci, monsieur Weekes, d'être venu aujourd'hui et bienvenue à Ottawa.

Au cours des réunions que nous avons tenues aux quatre coins du pays, celles auxquelles j'ai participé, plusieurs questions ont été soulevées au sujet du commerce international. Vous en avez mentionné certaines qui concernent l'environnement. La question qui revient sans doute plus souvent sur le tapis que les autres est celle des normes du travail. On s'inquiète beaucoup de la façon dont nous pouvons être concurrentiels par rapport à des pays qui font travailler les enfants, par exemple, et où les normes ne sont pas les mêmes. Comment pouvons-nous compenser cela?

M. John Weekes: Merci beaucoup.

En relisant, hier après-midi, les notes que j'avais préparées, je me suis rendu compte que je n'avais rien dit au sujet des normes du travail, mais j'étais certain que le sujet serait abordé.

Premièrement, c'est un des sujets dont nous discutons actuellement à Genève quant à la façon d'aborder la question au niveau international. C'est un sujet qui suscite certainement beaucoup de préoccupations dans les pays industrialisés et pas seulement au Canada. Il suscite également un certain nombre d'inquiétudes dans plusieurs pays en développement.

Ces derniers ont exprimé la crainte que l'inscription de cette question à l'ordre du jour, qui pourrait également poser la question du salaire horaire des travailleurs, puisse devenir un instrument de protectionnisme. Je dirais que, de toutes les questions que nous examinons actuellement dans le contexte de l'OMC—et pour le moment, nous n'étudions celle-ci que dans l'antichambre de l'OMC—c'est sans doute la plus épineuse sur le plan politique.

Lorsque je participais aux négociations de l'ALÉNA, le ministère des Finances a fait une comparaison de la productivité de la main-d'oeuvre au Canada et au Mexique. Cette analyse a montré que, même si le salaire mexicain représentait environ le septième du salaire canadien, la productivité de la main-d'oeuvre canadienne était sept fois plus élevée qu'au Mexique. Par conséquent, en moyenne—et les moyennes sont toujours dangereuses—la compétitivité était en réalité la même.

• 0940

Bien sûr, pour ce qui est des droits fondamentaux des travailleurs et surtout du travail des enfants, cela fait l'objet d'un regain d'activité auquel le gouvernement canadien a participé très activement dans le cadre de l'Organisation internationale du travail. Lorsque les ministres se sont penchés sur les normes du travail à la Conférence ministérielle de Singapour, en 1996, ils ont conclu que l'OIT était l'organisme compétent pour examiner ces questions.

Certains pays industrialisés ont exprimé le désir de continuer à étudier les normes du travail également au sein de l'OMC. Nous avons fait de bons progrès sur le front du travail des enfants ainsi que les autres normes du travail dans le cadre de l'OIT. Pour la première fois, nous avons établi un mécanisme, au sein de l'OIT, pour surveiller le respect des engagements à cet égard, si bien qu'on se penche certainement sur la question au niveau international.

Lorsque nous nous demandons ce que l'OMC et les autres organisations devraient faire, il est important de voir ce que nous voulons que l'OMC négocie ou accomplisse elle-même.

À la récente réunion de haut niveau sur le commerce et l'environnement dont j'ai parlé dans ma déclaration liminaire, par exemple, Renato Ruggiero, directeur général de l'OMC, a laissé entendre qu'il faudrait créer une organisation environnementale multilatérale pour permettre aux divers pays du monde de disposer d'une tribune où l'environnement aurait la même importance que le commerce dans le cadre de l'OMC.

Plusieurs groupes environnementaux n'aiment pas beaucoup l'idée de voir l'OMC établir des règles et des politiques en matière d'environnement. Ils jettent parfois un regard d'envie sur le système de règlement des différends de l'OMC pour l'influence qu'il pourrait exercer en ce qui concerne l'application des règles environnementales susceptibles d'être négociées.

Ma réponse est peut-être un peu trop longue. Elle le serait certainement trop pour la période des questions.

Cela fait partie de ce que l'on examine également dans le cadre de ce qu'il est convenu d'appeler le «programme de cohésion», l'une des questions à l'étude lors des préparatifs du Sommet économique du G-8 qui aura lieu cette année à Cologne. Il s'agit de voir comment les gouvernements peuvent mieux organiser la gamme d'activités internationales qu'ils jugent nécessaires au moyen d'une meilleure coordination des divers organismes internationaux chargés de ces questions.

Sur ce front, il s'agit de voir quelles devraient être les relations entre l'OMC et un certain nombre d'organisations internationales dont l'OIT.

M. Darrel Stinson: L'OMC ne doit-elle pas aborder elle-même ces questions? Si vous prenez les normes environnementales d'un pays à l'autre...

Prenons seulement la Chine étant donné qu'elle songe à adhérer. Comparons les normes environnementales du Canada avec celles de la Chine et même chose pour nos normes du travail. À moins que les normes chinoises ne soient pratiquement identiques aux nôtres, nous allons nous placer dans une situation désavantageuse sur le plan commercial.

Comment pouvons-nous concurrencer leurs prix si les Chinois n'ont pas les mêmes normes environnementales et les mêmes normes du travail?

M. John Weekes: Le comité pourrait sans doute examiner cette question séparément étant donné qu'elle soulève un tas de questions subsidiaires. Ce n'est pas le genre de sujet auquel on peut répondre rapidement.

Si vous prenez l'ensemble de nos échanges commerciaux avec les pays qui ont des normes environnementales ou une législation du travail moins strictes que les nôtres, vous ne pourrez pas vraiment constater que notre système se trouve mis en danger par notre commerce avec ces pays. Tout le monde n'essaie pas de s'aligner sur les normes de travail de Haïti, par exemple, ou des autres pays les moins développés qui ont les normes de travail et les salaires les plus faibles.

• 0945

Le président: Très bien.

[Français]

M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Bon matin, monsieur Weekes, et bienvenue parmi nous. Merci aussi de votre témoignage. J'ai quelques questions.

La première porte sur le nouvel instrument culturel dont le Canada s'est récemment fait le promoteur. Présentement, et jusqu'à preuve du contraire, l'exemption culturelle fait partie de la position canadienne. Les réponses des experts précédents n'ont pas été claires sur le processus pour présenter cette nouvelle position de négociation à Seattle et lors de la prochaine ronde de négociations. Également, en tant qu'ambassadeur à Genève, pouvez-vous nous dire le nombre de pays alliés sur lesquels le Canada peut compter pour faire front commun avec lui dans ce débat? J'aimerais aussi vous demander s'il va falloir attendre quelques années avant qu'on puisse arriver à ce changement, car la position du Canada est l'exemption culturelle, jusqu'à preuve du contraire. C'est ma première question.

Voilà la deuxième. Lors d'une déclaration au conseil général des 15 et 16 mai, vous avez déclaré, et je vous cite:

    ...j'estime qu'il est peut-être temps, à la veille de nouvelles négociations, d'engager une réflexion sereine sur la structure de l'OMC.

Vous dites plus loin:

    Cela fait peser un énorme fardeau sur les Membres et je me demande parfois si nous ne manquons pas quelque peu de cohérence.

J'ai trois séries de questions là-dessus. Vous vous questionnez sur le manque de cohérence, et plusieurs ont fait mention du manque de transparence. J'aimerais vous entendre sur le sentiment des membres de l'OMC quant à ce manque de transparence. Qu'est-ce que vous en pensez? Selon vous, quelle pourrait être la participation ou le rôle de la société civile dans la modification de cette situation de cohérence et de transparence?

Ma dernière question porte sur les commentaires de M. Stinson sur l'intégration des normes environnementales et des droits du travail. Vous avez été assez flou là-dessus. Vous réfléchissez tout haut sur la nécessité de remodeler l'OMC. Quel rôle feriez-vous jouer à cet organisme dans le cadre des normes environnementales et sociales? Je vous remercie.

M. John Weekes: Je dois dire que je suis l'ambassadeur du Canada à Genève et que ce n'est pas moi qui fais la politique du Canada en ce qui concerne notre position dans les négociations ou à l'OMC. C'est fait ici par le gouvernement, par les ministres, avec la contribution de ce comité et des autres organismes que consulte le gouvernement. Donc, c'est ici, au Canada, qu'on va fabriquer la politique portant sur les questions dont nous discutons. Je peux vous donner ma perspective de Genève, mais je ne vais pas essayer de vous dire ce que le Canada va faire sur tel ou tel sujet.

[Traduction]

Permettez-moi de commencer avec la question culturelle et là, bien sûr, le gouvernement n'a pas encore décidé officiellement de ce qu'il souhaite faire dans ce domaine.

Le groupe de consultation sectorielle sur le commerce extérieur nous a présenté, sur ces questions, un rapport très intéressant qui conclut qu'au lieu de rechercher l'exemption totale de ce secteur, comme nous avons tenté de le faire dans l'ALÉNA, il vaudrait mieux négocier des règles spéciales pour le secteur culturel. Mais le rapport ne précise pas ce qu'il faudrait faire pour y parvenir.

• 0950

Deuxièmement, ce rapport a été adressé au ministre du Commerce international. À ma connaissance, le gouvernement n'a pas encore pris officiellement position à ce sujet. Ce que nous avons fait jusqu'ici à Genève est donc relativement limité, car nous ne voudrions pas agir avant que le Cabinet ne prenne une décision.

Nous avons communiqué le rapport du groupe de consultation sectorielle aux autres délégations à Genève et je puis dire qu'il a suscité un certain intérêt. Nous pourrions certainement nous trouver des alliés. Je songe par exemple aux Français mais il y en aurait sans doute d'autres.

Le problème, toutefois, est que personne ne se trouve exactement dans la même situation que le Canada sur le plan des industries culturelles. Aucun autre pays ne parle, dans une grande partie de son territoire, la même langue qu'aux États-Unis ou ne se trouve voisin des États-Unis, ce qui crée une proximité culturelle peut-être plus imposante pour nous que pour les autres. Dans ce sens, notre situation est unique.

Le président: Monsieur Weekes, puis-je vous arrêter là et vous poser une question?

N'y a-t-il pas un parallèle à faire avec l'Autriche et l'Allemagne, par exemple? N'y a-t-il pas d'autres petits pays qui se trouvent à côté de grands voisins dont ils partagent la langue? Je pense à l'Autriche et à l'Allemagne. Je me demande simplement si nous sommes vraiment dans une situation unique.

M. John Weekes: C'est une bonne question, mais d'autre part les États-Unis sont considérés comme la puissance culturelle qui domine le monde, du moins dans la culture contemporaine. Si vous vivez en Autriche, vous pouvez vous sentir davantage dominés par la culture américaine que par la culture allemande...

Le président: Je vois.

M. John Weekes: ...mais c'est moins menaçant, puisque les Autrichiens parlent allemand, et non anglais.

Le président: Oui.

M. John Weekes: Mais ce ne sont là que mes impressions.

Par ailleurs, en Europe, les gens entrent quotidiennement en contact avec des personnes qui parlent deux langues différentes, et on entend constamment des langues différentes, si bien que la situation culturelle donne une impression différente selon qu'on est en Autriche ou ailleurs.

Quoi qu'il en soit, je crois qu'il s'agit là d'un secteur où nous devrions avoir plusieurs alliés dans la négociation, mais il nous faudra également travailler pour essayer de préparer les États-Unis à ces négociations. Quels que soient les pays que nous pouvons avoir de notre côté, la négociation nous obligera à convaincre les États-Unis qu'il y va de leurs intérêts. Je ne pense pas que cela soit impossible, compte tenu de ce que nous proposerons. Les Américains n'aiment pas l'incertitude créée, de leur point de vue, par nos différentes politiques dans le secteur des industries culturelles, et nous aurons sans doute une certaine marge de manoeuvre si nous voulons négocier dans ce domaine.

En ce qui concerne la durée prévisible des négociations, j'ai parlé d'une durée de trois ans. Vraisemblablement, la plupart, sinon la totalité des résultats des négociations devraient se concrétiser à la fin de la période mais il serait intéressant de voir s'il n'est pas possible d'obtenir certains éléments plus tôt, au lieu d'attendre le terme des négociations. Nous envisageons une période de trois ans, compte tenu de toutes les autres questions.

En ce qui concerne la préservation de l'exemption culturelle, nous en avons une avec l'ALÉNA, et elle ne subira aucun effet direct de l'issue des négociations de Genève.

• 0955

Il n'existe pas d'exemption culturelle aussi vaste à l'OMC. En fait, nous avons appris, au sein du groupe spécial des magazines, que la clause essentielle du GATT sur laquelle notre politique était fondée est celle du principe du traitement national, qui existe au GATT depuis 1947.

J'ai tenu les autres propos que vous avez cités dans mon discours d'ouverture en tant que président du Conseil général de l'OMC, et non pas en tant qu'ambassadeur du Canada. C'était en réalité des remarques personnelles que j'ai faites un an après le début de ma présidence du conseil et c'était plutôt des réflexions, conformément à l'usage en vigueur à la présidence de cet organisme.

Je pense qu'il faut réfléchir à la structure de l'institution. En l'occurrence, je pensais, en particulier compte tenu de la présence de tous les ambassadeurs, qu'il existe désormais, je crois, 35 organismes permanents au sein de l'OMC. Si vous considérez que chaque mission essaie de se faire représenter auprès de chacun de ces organismes tout en appliquant une politique cohérente, et que les chefs de mission ont pour responsabilité de gérer ce processus tout en rendant des comptes à leur gouvernement... Je crois que c'est tout cela qui crée un problème.

Je ne sais pas exactement comment y remédier, mais je pense que selon toute vraisemblance, nous allons présenter au cours de ces négociations une sorte de corbeille institutionnelle de sujets qui pourrait comprendre la cohérence structurelle de l'organisme et sa cohérence avec d'autres organismes internationaux qui traitent de sujets connexes à ceux dont s'occupe l'OMC, notamment l'OIT, les différents organismes environnementaux, la Banque mondiale, le FMI, où nous avons déjà des accords, l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, l'Union internationale des télécommunications, la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement, et cetera.

En ce qui concerne la transparence, je crois que la plupart des documents du GATT, ou plutôt de l'OMC, perdent leur cote de sécurité six mois après leur dépôt. Bon nombre d'entre eux tombent même immédiatement dans le domaine public. Nous voulons encore renforcer cette transparence. À notre avis, rien ne justifie la cote de sécurité de la plupart des documents. Par exemple, dans les affaires soumises à un groupe spécial, nous avons pour politique de publier nos rapports dès qu'ils ont été présentés au groupe spécial, et nous en discutons à l'avance avec les parties intéressées.

Ce fut également le cas lorsque j'ai parlé de la société civile. Évidemment, la société civile s'intéresse de plus en plus à ce qui se passe à l'OMC, mais on discute beaucoup, au sein de l'organisme, de l'étendue du rôle que pourrait y jouer la société civile. Ne convient-il pas plutôt que celle-ci prenne pour interlocuteurs les gouvernements nationaux, qui ensuite, au sein d'un organisme intergouvernemental, pourront lui faire part des différentes perspectives des intérêts qu'ils représentent?

Le Canada et la plupart des pays développés sont favorables à une interaction plus étroite entre la société civile et le déroulement des événements à Genève, en plus de ce qui se passe au niveau national. Les récentes rencontres de haut niveau sur le commerce et l'environnement et sur le commerce et le développement ont donné l'occasion à des éléments importants de la société civile d'intervenir devant la chambre du conseil de l'OMC. À raison de deux jours par sujet, les gouvernements et les différents organismes non gouvernementaux, notamment du milieu universitaire, ont pu s'exprimer et échanger leurs points de vue en toute franchise, devant les journalistes du monde entier présents à la tribune de la presse.

• 1000

Je crois que cette démarche a été utile. Je doute qu'elle puisse toujours donner de bons résultats dans la négociation des questions délicates. Il n'est pas toujours possible d'accueillir tout le monde dans la salle des négociations, et il y a des limites pratiques à ce que l'on peut faire. Lorsqu'un organisme compte 134 membres, il faut prévoir des salles suffisamment vastes si l'on veut accueillir les équipes de négociation et les représentants de la société civile.

Le président: Je dois vous arrêter ici, monsieur Weekes, car 15 minutes se sont écoulées et nous avons encore d'autres questions à traiter. Peut-être pourrons-nous revenir tout à l'heure sur ce sujet. M. Turp voudra peut-être le faire.

Madame Bulte.

Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): Merci, monsieur l'ambassadeur Weekes. Je suis heureuse de vous retrouver.

Je voudrais revenir sur le thème de la question de M. Sauvageau concernant le rapport du GCSCE; vous lui avez dit que nous avons une exemption dans le cadre de l'ALÉNA. Cette question ne manquera pas d'être soulevée. Elle l'a déjà été à propos de l'investissement lorsque nous avons étudié l'AMI. À cette époque, nous avons essayé de déterminer quelle devait être l'étendue de la définition de l'exemption culturelle, et nous avons vu que la définition de l'ALÉNA, adoptée il y a cinq ans, ne couvrait pas tous les nouveaux produits culturels qui existent avec la nouvelle technologie et les nouveaux médias. Comment résoudre cette difficulté?

Le rapport du GCSCE indique qu'il devrait y avoir un autre accord international. Quelle sera sa situation par rapport aux décisions de l'OMC? Est-ce qu'à l'OMC, on reconnaît que les produits culturels ne sont pas des biens ou des services ordinaires, ce qui me semble être le message essentiel du rapport, ou est-ce qu'on se contente de demander un autre accord international? Comment cet accord s'agencerait-il par rapport à l'OMC? Nous allons devoir régler cela à l'OMC. Je sais qu'il faut convaincre les Américains, mais c'est un sujet que nous ne pouvons pas ignorer.

M. John Weekes: Tout d'abord, lorsqu'on parle de la négociation d'un accord international, je crois qu'on pense à un accord dans le cadre de l'OMC. Les Canadiens doivent indiquer plus précisément ce qu'ils veulent si nous nous engageons sur cette voie. Comme je l'ai dit au début, bien qu'un certain nombre de ministres aient fait des déclarations encourageantes concernant ce genre de solution, personne n'a encore décidé de s'engager dans cette direction.

Il ne nous faut tout d'abord, me semble-t-il, déterminer ce que nous ferions si nous empruntions cette voie. Nous devons arriver à formuler avec précision l'objet de nos négociations à Genève, de manière à respecter les exigences que le gouvernement juge importantes en matière de protection et d'encouragement de nos secteurs culturels. C'est le point de départ, selon moi.

Comme je l'ai dit, cet aspect ne me concerne pas vraiment. Je suis la personne chargée d'exposer la politique à Genève et de faire rapport au sujet de l'évolution de la situation à cet endroit. Je me ferai un plaisir de participer, dans cette optique, à l'élaboration d'une approche de ce genre, mais j'estime que ce sont là des questions qui doivent être démêlées au Canada par les divers intervenants et les parties intéressés, qu'il faudra consulter.

Mme Sarmite Bulte: Dans votre exposé, vous avez parlé d'environnement. Pour ma part, je me demande s'il existe un soutien suffisant pour tenter d'obtenir cette exemption culturelle. J'avoue avoir des craintes à ce sujet. Il a également été question d'environnement au cours de notre tournée au Canada. Et la question des normes de travail, dont M. Stinson a parlé, a également été soulevée.

Pourtant, même dans votre exposé, vous n'avez rien dit au sujet de la culture. Je me demande si nous ne menons pas un combat perdu d'avance en tentant de protéger nos secteurs culturels. Allons-nous obtenir le consensus à l'OMC ou devons-nous porter notre cause devant une autre instance?

M. John Weekes: J'ai toujours été étonné de ce à quoi on peut aboutir par la négociation et je ne recommanderais certainement pas d'abandonner d'entrée de jeu. Si nous estimons avoir de bons arguments, comme c'est clairement le cas, pour préconiser des règles spéciales dans ce domaine, alors nous devons nous efforcer de formuler de telles règles et de persuader d'autres intervenants que notre démarche mérite d'être prise au sérieux.

• 1005

Considérez par exemple ce que l'on jugeait possible au début des dernières grandes négociations, celles du cycle d'Uruguay en 1986, par rapport à tout ce qui s'est effectivement concrétisé durant les négociations. En 1986, pratiquement tout le monde estimait que rien d'aussi ambitieux n'était possible.

Il ne faut donc pas penser que la partie est perdue d'avance. Nous avons abouti à des consensus qui semblaient assez peu vraisemblables au départ. Ainsi, si l'on prépare bien ses dossiers, si l'on étoffe bien ses arguments et si l'on fait preuve de persévérance, on peut atteindre des résultats qui semblent par ailleurs improbables.

Le président: Selon ce qui m'a été rapporté, on aurait conseillé au comité de Mme Bulte, à Calgary, de ne pas envoyer un bouvillon pour faire le travail d'un taureau. Je me demande, monsieur Weekes, si on faisait allusion par là à ceux qui sont nos négociateurs à Genève à l'heure actuelle.

Des voix: Oh, oh!

M. John Weekes: Je suis convaincu qu'il s'agissait d'un conseil sur la façon de doter certains postes à l'avenir.

Mme Sarmite Bulte: Une dernière question. Vous avez dit qu'il était important de poursuivre les efforts de libéralisation à l'échelle régionale et vous avez aussi parlé de l'APEC. Comment envisagez-vous donc les négociations relatives à l'ALEA, qui ont lieu parallèlement à celles qui concernent l'OMC? Quels résultats pourrons-nous en tirer qui seront utiles dans le cadre de l'OMC? Encore ici, j'utiliserai comme exemple le secteur de la culture pour vous demander si le contexte de l'ALEA peut nous permettre d'aller chercher des appuis à nos initiatives en matière de culture.

M. John Weekes: La question me semble excellente. C'est justement à ce genre de question que nous devrions réfléchir. Quelle est la tribune la plus favorable pour faire valoir le plus efficacement possible tel ou tel objectif? Pour ce dossier plus particulièrement, j'aurais tendance à croire que certains de nos alliés les plus importants se trouvent du côté de l'Europe et je pense ici notamment aux Français, auxquels j'ai déjà fait allusion. Il me semble donc préférable de faire cheminer ce dossier dans le cadre de l'OMC plutôt que dans celui de l'ALEA, même si l'idée d'un ballon d'essai de ce côté a un certain mérite.

J'ai pu constater quand j'étais négociateur pour l'ALÉNA que les Mexicains, du moins à ce moment-là, ne partageaient pas notre inquiétude concernant les industries culturelles éventuellement menacées par les États-Unis. Ils respectaient notre position et jamais au cours des négociations ils n'ont fait quoi que ce soit pour entraver ce que nous essayions d'obtenir des États-Unis, mais ils n'estimaient pas que cette question était importante pour eux.

Du reste, il faut dire qu'ils avaient certaines visées culturelles eux-mêmes aux États-Unis. Ils souhaitaient démanteler certains obstacles imposés par les Américains comme la restriction quant à la propriété étrangère de stations de télévision situées aux États-Unis.

Je pense que cela est dû au fait qu'à ce moment-là vivaient aux États-Unis environ 30 millions d'hispanophones. Ce qui rendait le marché américain pour des produits espagnols plus lucratif que le marché mexicain lui-même. Ainsi, c'était le monde à l'envers car on aurait pu croire que les Mexicains se sentaient menacés par les grands méchants Américains avec lesquels ils ont guerroyé à plusieurs reprises au cours de l'histoire. Toutefois, en y regardant de plus près, on pouvait constater que les enjeux et les problèmes n'étaient pas ce qu'ils paraissaient être à première vue. Quand je suis entré en fonction, on m'a dit ici à Ottawa qu'il fallait que je contacte les Mexicains car je trouverais en eux des alliés pour le Canada. Ce n'est pas ce que j'ai pu constater.

Mme Sarmite Bulte: Merci beaucoup.

Le président: Merci.

La parole est à M. Assadourian et puis ensuite à M. Turp.

M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Merci beaucoup.

Vous avez dit que l'OMC réunissait 134 pays, avec 30 candidats, dont la Chine. Le bombardement de l'ambassade de Chine à Belgrade a refroidi les rapports entre la Chine et les États-Unis, entre la Chine et le Royaume-Uni. Est-il possible que la Chine n'assiste pas aux pourparlers ou cesse de vouloir adhérer à l'OMC ou qu'elle prétexte le bombardement pour être plus exigeante lors des négociations de l'OMC?

M. John Weekes: Eh bien, on prévoit que...

Le président: Cela viole-t-il l'accord phytosanitaire?

Des voix: Oh, oh!

• 1010

M. John Weekes: C'était nettement une mesure unilatérale.

Tout d'abord, il faut dire que quand on procède à des négociations pour l'accession à l'OMC, ce sont les membres de l'OMC eux-mêmes qui imposent certaines exigences au pays candidat. En devenant membre de l'OMC, le pays candidat acquiert des droits contractuels pour toutes les concessions négociées par tous les membres du GATT et de l'OMC depuis 1947. Rien de nouveau ne sera donné à la Chine quand elle adhérera à l'OMC. La Chine va tout simplement payer pour rattraper ce que nous avons fait jusqu'à présent, pour y avoir droit.

Je ne suis pas expert en la matière mais d'après ce que j'ai pu lire dans les journaux l'autre jour, les activités où la Chine a déclaré suspendre sa coopération avec les États-Unis n'incluaient pas le commerce. La décision des Chinois de procéder à ces négociations et de faire un ultime effort pour qu'elles aboutissent témoigne davantage de sa détermination quant à ses propres objectifs économiques nationaux et ne semble pas prendre en compte les enjeux plus généraux de la coopération internationale.

Je ne prévois pas que les efforts des Chinois pour adhérer à l'OMC et les efforts des membres de l'OMC pour que la Chine se joigne à l'organisation seront compromis à cause de ce qui s'est produit à Belgrade.

M. Sarkis Assadourian: Puis-je poser une brève question pour obtenir une précision? S'il y a un différend entre nous et les Mexicains à propos de l'ALÉNA et que le groupe spécial décide en faveur du Canada ou du Mexique, l'OMC peut-elle être saisie du différend? Qu'adviendrait-il alors?

M. John Weekes: Une disposition de l'ALÉNA prévoit qu'il faut choisir ses armes.

M. Sarkis Assadourian: Avant, et ensuite...

Mme Sarmite Bulte: On ne peut pas tatillonner.

M. John Weekes: C'est cela. Il faut décider si un différend sera tranché à l'OMC ou par un groupe spécial de l'ALÉNA. Une fois cela décidé, c'est irrémédiable, on ne peut pas s'adresser à l'autre organisme car cela ressemblerait à un appel.

M. Sarkis Assadourian: Qu'advient-il si nous choisissons l'OMC et que le Mexique décide de s'adresser à un groupe spécial de l'ALÉNA? Qui prend la décision alors?

M. John Weekes: Le différend sera présenté aux deux organismes. C'est une question très intéressante. Le cas ne s'est pas encore produit, que je sache.

M. Sarkis Assadourian: Ainsi, il pourrait y avoir deux tribunes de discussion. Si les décisions sont contraires, qu'advient-il?

M. John Weekes: En effet, c'est en théorie possible. Une mesure prise par les Américains pourrait avoir une incidence sur le Canada et le Mexique, le Mexique décidant de s'adresser à un groupe spécial de l'ALÉNA ou à l'OMC et nous inversement.

On peut supposer que nous aurions rencontré les Mexicains pour discuter avec eux de la meilleure façon de procéder. Dans les cas que je connais où nous avons dû choisir, les dispositions de l'OMC et celles de l'ALÉNA ont été analysées, en tenant compte du mécanisme de règlement des différends dans les deux cas, et c'est ainsi que l'on se demande s'il s'agit d'une question pour laquelle nous voulons pouvoir compter sur d'autres alliés. En effet, puisque l'OMC compte un plus grand nombre de pays membres, cela peut se révéler plus intéressant que le recours à l'ALÉNA.

M. Sarkis Assadourian: Merci.

Le président: Monsieur Turp.

[Français]

M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Je vous remercie beaucoup, monsieur Weekes, de vous présenter devant nous. J'ai quelques questions sur la culture.

Vous avez négocié l'ALÉNA et vous connaissez le contenu de la clause d'exemption culturelle. J'aimerais avoir une opinion très franche, très sincère sur la qualité de cette exemption. À défaut d'un traité plus vaste sur la diversité culturelle, est-ce une chose qui mériterait d'être reprise dans une convention multilatérale pour assurer la protection des industries culturelles du Canada, du Québec et d'autres pays? C'est au négociateur de l'ALÉNA que je pose la question. J'aimerais vraiment savoir ce que vous pensez de cette protection qui nous serait accordée au niveau international par une clause analogue à celle qu'il y a dans l'ALÉNA.

• 1015

Ma deuxième question porte sur les dimensions sociales de l'accord. Je trouve assez curieux que vous ne nous ayez pas parlé dans votre présentation des droits du travail et des autres questions relatives aux droits de la personne, alors que depuis le début des auditions de ce comité, il en a été question constamment. Est-ce qu'il y a un problème, non seulement pour les questions de droits du travail, mais aussi pour les questions de droits de la personne en général? Voyez-vous déjà une impossibilité d'intégrer dans les négociations cette dimension sociale, même au-delà des droits des travailleurs?

Troisièmement, j'ai trouvé une chose très intéressante dans votre présentation. D'ailleurs, c'est l'une des premières choses que vous avez dites. Il s'agit de l'idée que les négociations vont porter sur la regulatory policy, donc sur des questions très importantes, des questions de normes qui sont habituellement édictées par les parlements, les parlements nationaux, les parlements des États membres, des États fédératifs comme le Canada par exemple. S'il s'agit d'une question si importante, quel rôle voyez-vous au Parlement et aux parlementaires dans tout le débat, dans toute la négociation? Il a déjà été évoqué devant notre comité qu'il devrait y avoir une assemblée parlementaire de l'OMC. Qu'est-ce que vous en pensez?

Ma dernière question, monsieur le président, est très importante. Il y a beaucoup de questions dans les négociations qui concernent les provinces. De plus en plus de questions concernent les provinces. Je ne parlerai ni de M. Bouchard ni de Mme Beaudoin, car vous connaissez la controverse qu'il y a déjà ici, mais quelqu'un qui s'appelle David Cook a soumis un mémoire tout à fait intéressant à notre comité, qui dit qu'il faudrait associer les provinces à la négociation. En tant qu'ambassadeur qui allez participer à la négociation, trouveriez-vous approprié qu'il y ait avec vous des négociateurs des provinces pendant les prochaines négociations? C'est la question que je pose à M. Weekes, pas sur le Pakistan mais sur le Canada.

M. Benoît Sauvageau: Ne vous inquiétez pas. Si on déménage au Pakistan, on va former un parti souverainiste.

Le président: Le débat commence.

[Traduction]

Le président: Tout cela en environ deux minutes.

[Français]

M. Daniel Turp: Non, il faut que vous soyez équitable, monsieur le président.

[Traduction]

M. John Weekes: Tout d'abord, s'agissant de questions parlementaires, les fonctionnaires auraient intérêt à être au diapason de leur ministre.

Je vais répondre à vos questions dans l'ordre. Concernant l'exemption culturelle, lors des négociations de l'ALÉNA, nous avons repris exactement la même exemption culturelle que dans le cas de l'ALE. Le libellé est exactement le même. Le résultat dans le cas de l'ALÉNA est un peu différent que dans le cas de l'ALE car la portée de l'ALÉNA est plus vaste. L'accord nous donne en effet une certaine latitude supplémentaire pour prendre des mesures dans le cas de la propriété intellectuelle notamment. Cela pourrait aller jusqu'à une dérogation des dispositions de l'ALÉNA mais les États-Unis n'auraient pas le pouvoir d'exercer de représailles contre nous.

D'un point de vue purement technique, même si le libellé semble rigoureusement le même, l'exemption culturelle de l'ALÉNA est en fait plus généreuse que celle de l'ALE. Maintenant, si vous voulez plus de détails, il faudrait vous adresser à un des juristes qui comprend bien les nuances et qui pourrait vous les expliquer.

• 1020

Vous m'avez demandé ce que je pensais de tout cela. À la vérité, il ne convient pas qu'un fonctionnaire se prononce de la sorte. Je serais plutôt du même avis que le groupe de consultation sectorielle, quant à la démarche... Il a été décidé dans le contexte de l'ALÉNA que nous souhaitions une exemption mais nous étions conscients que cette exemption, alors qu'elle ne nous imposait rien d'obligatoire à cet égard, laissait les États-Unis libres d'exercer des représailles. Ainsi, au bout du compte, le résultat comporte des incertitudes considérables, il faut bien le reconnaître. Je m'en tiendrai à cela.

Pour ce qui est de la clause sociale—les droits des travailleurs et les droits de la personne—c'est évidemment un des gros dossiers. Dans mes remarques préliminaires, je n'en ai pas beaucoup parlé car pour l'instant, la question est fortement débattue dans diverses capitales et il nous faut voir quelle position les divers gouvernements adopteront en l'occurrence. Je pense qu'il faut prendre en compte le champ d'action de l'OMC dans le contexte des diverses autres organisations internationales.

Voulons-nous retirer le «C» du sigle de l'OMC et l'appeler désormais l'Organisation mondiale pour qu'elle remplace progressivement les Nations Unies? Vaut-il mieux négocier les questions du travail à l'OMC plutôt qu'à l'OIT où il est déjà prévu que les syndicats seront représentés et participeront directement à la discussion? Étant donné que l'OMC fonctionne suivant le principe du consensus, il est presque impossible d'imaginer que les gouvernements acceptent de permettre aux représentants des syndicats de participer directement aux séances de l'OMC.

Pour ce qui est de la question plus générale des droits de la personne, il est vrai que l'on a suggéré de recourir à des sanctions commerciales pour faire respecter les droits de la personne, mais que je sache, il n'y a pas eu de proposition importante visant à traiter des droits de la personne dans le contexte de l'OMC. Je pense qu'il serait très difficile de le faire. Même si on décidait d'essayer, j'ai du mal à concevoir comment ces questions supplémentaires pourraient venir s'ajouter à celles, de plus en plus compliquées, dont l'organisation s'occupe déjà.

Il y a aussi la question de la politique de réglementation. Dans mes remarques préliminaires, je signale que la discussion sur ce sujet s'est graduellement insinuée à partir du cycle de Tokyo, car au fur et à mesure que les tarifs étaient supprimés, on s'est tourné vers ces barrières non tarifaires. Un grand nombre de ces barrières non tarifaires bien entendu découlent des politiques nationales de réglementation. Par contre, on a pu constater que dans bien des cas, ces politiques nationales étaient utilisées pour ériger des barrières contre les produits étrangers plutôt que pour atteindre des objectifs véritablement nationaux.

Ainsi, le fait que l'OMC se penche sur cette question ne vise pas à interdire toute réglementation nationale nécessaire notamment pour protéger les citoyens, garantir le bon fonctionnement des marchés, etc. On cherche plutôt à régler l'aspect protectionniste de ces politiques. Néanmoins, la discussion aboutit forcément à cette ligne très fine qui existe entre le droit d'établir une réglementation nationale et les autres enjeux.

Quant au rôle des parlementaires... Je vous ai invités à venir à Genève... Sérieusement, je reconnais très clairement que les parlementaires et les législateurs vont s'intéresser de plus en plus à ce qui se passe à Genève. Dans notre régime, la concrétisation de toute action doit être l'aboutissement d'une discussion entre le gouvernement et les parlementaires... et les provinces.

• 1025

Le président: Plus particulièrement concernant la société civile et une assemblée parlementaire éventuelle...

M. John Weekes: Oh.

Le président: ...dont M. Turp parlait. Pouvez-vous nous dire d'après ce que vous avez observé à Genève si d'autres pays s'intéressent à cette notion et si c'est réalisable. Vous avez dit qu'il y a 160 pays. Pourrait-on les unir? Tout cet aspect...

M. John Weekes: Personnellement, l'idée me plaît et à la vérité, je pense qu'il serait plus facile de faire accepter la participation des parlementaires à un comité consultatif ou à un autre organe de ce genre. Ainsi, certaines questions pourraient être étudiées annuellement par cet organe dont je ne vois cependant pas précisément la structure. Je pense qu'on accepterait mieux l'idée d'un organe de ce genre que celle d'une participation plus directe et plus concrète de la société civile car les membres de toute organisation intergouvernementale pourraient vous demander qui sont ces gens de la société civile. Qui représentent-ils?

Le président: Les ONG plus précisément.

M. John Weekes: C'est cela. Mais qui les élit? Ces organismes représentent-ils la population en général ou seulement leurs adhérents? Si l'on avait recours à des parlementaires, on saurait très bien que par définition ces derniers représentent toute la population.

Pour ce qui est des provinces, comme vous le savez, je m'occupe de politique commerciale depuis un certain temps et je participe à des négociations. Même si cela prend beaucoup de temps, j'ai toujours trouvé réconfortant de pouvoir travailler avec les représentants des provinces et de pouvoir apporter à la table de négociation une meilleure perception de l'intérêt national, grâce à ces discussions. Je pense que nous serions malavisés d'entamer de nouvelles négociations—lesquelles deviennent de plus en plus complexes—avec des idées préconçues quant à ce qu'il faut faire ou ne pas faire. Je pense qu'il faut trouver le meilleur moyen de négocier dans le meilleur intérêt des Canadiens, de façon générale, quand on sait la nature des problèmes auxquels nous sommes confrontés à la table de négociation.

Je me souviens assurément qu'à un certain moment pendant les négociations des accords parallèles de l'ALÉNA, nous avons pu compter sur la présence de représentants des provinces à l'hôtel où nous mettions au point les derniers éléments. Vous avez dit tout à l'heure «être dans la salle», mais souvent à ce moment-là, chaque partie présente dans la salle pouvait compter sur deux personnes—deux Mexicains, deux Américains et deux Canadiens—, dont pour chaque partie, un ministre.

Quand vous dites qu'il faut «amener les gens à la table de négociations», c'est une notion que... Qu'est-ce que cela veut vraiment dire? Quelle genre de table?

À Genève, comme c'est le cas au conseil général, les réunions durent parfois toute la journée et portent sur une question donnée, sur laquelle chaque délégué parle une fois. Il n'y a donc pas de véritable discussion ou de négociations pour ainsi dire. Les négociations se déroulent ailleurs, dans une salle à part et elles sont menées par les pays que la question intéresse le plus. Ensuite, bien entendu, il faut que la chose soit reprise en séance plénière. C'est un processus toutefois... La façon dont se déroule les négociations n'est pas aussi évidente qu'on pourrait le croire, les parties s'asseyant à une table et entreprenant des pourparlers.

Le président: Merci.

Madame Finestone.

L'hon. Sheila Finestone (Mont-Royal, Lib.): Merci beaucoup.

Je voudrais poursuivre dans la même veine que M. Turp. Tout d'abord, l'idée d'un examen par les parlementaires est une idée que j'ai soulevée ici et au niveau international, à l'Union interparlementaire notamment, et elle pourrait être intéressante.

J'espère, monsieur l'ambassadeur, que nous aurons l'honneur de votre compagnie à Berlin. Nous y discuterons en priorité du Cycle de négociations multilatérales de l'Organisation mondiale du commerce, et les pays du tiers monde, les économies en développement, ont exprimé de graves inquiétudes concernant l'OMC, son manque de transparence, le fait qu'ils n'ont pas suffisamment voix au chapitre et que quatre ou cinq grands pays prennent toutes les décisions en fin de compte. Je suis impatiente de travailler avec vous et de compter sur votre aide dans notre analyse de ces questions.

• 1030

Deuxièmement, je pense qu'on a là le point de vue des ONG et des parlementaires, car 136 pays y sont représentés, plus toutes les ONG internationales, qui ont le droit de s'exprimer et le droit de participer à la discussion.

J'ai toutefois été troublée quand je vous ai entendu dire que vous aviez distribué le rapport SAGIT sur les questions culturelles à vos homologues à Genève. J'étais pour ma part le porte-parole de mon parti sur les questions culturelles quand les exemptions ont été discutées lors des négociations de l'ALÉNA et de l'Accord de libre-échange. Dans mon souvenir, ce n'était pas une tâche facile ou agréable. Nous n'avons pas gagné grand-chose de toute façon. Nous avons moins bien protégé nos biens culturels que notre bière. Cela dit, je m'inquiète un peu. Ma question devrait peut-être s'adresser au président.

Monsieur le président, ai-je raté quelque chose?

Le président: Oui.

Mme Sheila Finestone: Monsieur le président, ma question s'adresse à vous, et je vous demanderais de la transmettre à notre témoin. Quant à moi, je ne sais absolument pas ce que contient le rapport SAGIT. J'ai peut-être raté quelque chose. C'est tout à fait possible.

M. Daniel Turp: Nous devrions peut-être vous en donner un exemplaire.

Mme Sheila Finestone: Un instant, nous allons éclaircir cela dans un instant. Je viens de me renseigner.

Le fait qu'un ambassadeur distribue un rapport avant qu'il ait été examiné—soit par le Comité des affaires étrangères ou par le Sous-comité du commerce ou par le Comité du patrimoine—me trouble. Ce rapport n'a pas été étudié, examiné, et nous n'avons pas donné notre avis. Pourtant, ce rapport est distribué à l'échelle internationale.

Le président: Je pense qu'il y a un grave malentendu.

Mme Sheila Finestone: Voilà pourquoi ma question s'adressait d'abord à vous.

Le président: Permettez-moi d'éclaircir les choses. Le rapport SAGIT n'est manifestement pas un rapport de notre comité ou du gouvernement.

Mme Sheila Finestone: Je sais. Je sais très bien d'où il vient.

Le président: Le rapport SAGIT est un rapport du groupe sectoriel des industries culturelles qui conseillent le ministre. C'est un document public. Les membres de ce groupe sont venus témoigner. Ils étaient trois, et nous avons parlé du rapport. Chaque membre du comité en a reçu un exemplaire, et nous en avons parlé ouvertement au comité. Nous y avons consacré toute une séance.

Mme Sarmite Bulte: Une de nos séances a porté sur le rapport.

Le président: Voilà pour le SAGIT. Lors de nos audiences publiques... À Toronto, par exemple, tout le monde ne parlait que du rapport SAGIT.

Mme Sheila Finestone: Je vois.

Le président: Vous craignez qu'il y ait eu violation d'une règle de protocole parce que...

Mme Sheila Finestone: Non, je m'inquiète parce que je n'ai pas vu le rapport SAGIT. Cela ne veut pas dire que je demanderais qu'on le modifie, mais je ne sais pas...

Le président: Absolument pas, car vous n'avez pas siégé officiellement au groupe sectoriel.

Mme Sheila Finestone: Monsieur le président, étant donné que je me suis occupée des questions culturelles au moment des négociations de l'ALÉNA et du libre-échange, je sais qu'on s'inquiétait vivement à l'époque des éléments que le Canada pouvait ou non négocier. Quand on sait l'évolution que connaît le monde des télécommunications, l'avènement des satellites, et toutes ces autres questions, on se dit que c'est le genre de rapport qui doit absolument refléter les intérêts du Canada. Je sais qu'un rapport SAGIT peut présenter une perspective très sectaire et que cela ne constitue pas nécessairement une perspective générale.

Je m'inquiète que ce rapport ait été distribué sans que nous ne nous soyons prononcés. Vous dites que oui, nous avons donné notre avis, nous avons dit ce que nous en pensons, et nous avons eu la possibilité de faire des modifications. Excusez-moi, je n'ai pas participé à cette réunion. Autant pour moi.

Le président: Pas du tout, ne vous méprenez pas. Nous n'avons rien changé au rapport car il ne s'agit pas de notre rapport. C'est tout comme s'il s'agissait d'un rapport du Parlement australien. C'est un rapport des industriels qui s'adressent directement au ministre, tout à fait indépendamment de nous. Nous n'avons aucun pouvoir, aucune compétence, aucun rôle à cet égard. Toutefois, nous l'avons reçu, nous l'avons lu et nous en avons discuté.

[Français]

M. Daniel Turp: Mais il n'y a pas eu d'atteinte au privilège parlementaire, madame Finestone.

Mme Sheila Finestone: Non, je ne pensais pas à cela.

[Traduction]

Le président: Madame Finestone, je pense qu'on va nous demander, pour les fins du chapitre auquel ils travaillent—sur la culture—de nous prononcer pour ou contre les recommandations du rapport SAGIT. Dans notre propre rapport, c'est ce que nous devrons faire. Pour l'instant, nous n'avons rien à voir là-dedans. Il suffit que nous lisions le rapport et que nous décidions de lui donner notre aval ou non.

Mme Sheila Finestone: Merci de cette explication car j'étais très inquiète. Je suis sûre que tout cela est très bien, mais je n'aime pas l'idée que ce rapport soit envoyé à l'étranger, à des partenaires et à d'autres pays qui pourraient croire que le Parlement du Canada lui a donné son imprimatur. C'est ce qui m'inquiétait en vérité.

Je suis sûre que l'on comprend bien qu'il s'agit d'un rapport rédigé par les gens du secteur, n'est-ce pas, monsieur l'ambassadeur?

• 1035

M. John Weekes: Oui, monsieur le président. Nous avons bien expliqué d'où venait ce rapport quand nous l'avons distribué aux autres délégations et nous n'avons jamais laissé entendre que son contenu reflétait la politique du gouvernement. Toutefois, nous avons cru qu'il serait utile, dans l'éventualité où le gouvernement déciderait de prendre des mesures, de commencer à sensibiliser nos partenaires à l'idée que le Canada songeait à présenter un point de vue sur cet aspect-là. Ainsi, nous cherchions davantage à les alerter qu'à les mettre au courant de nos intentions définitives.

Nous avons également fait distribuer aux autres délégations à Genève l'avis paru dans le Registre fédéral pour qu'ils comprennent les efforts que nous déployons pour préparer ce dossier. Il s'agit plutôt de la Gazette du Canada. Je me suis trompé.

Le président: Combien de temps êtes-vous resté à Washington pour négocier ce traité?

M. John Weekes: Je n'ai jamais vécu à Washington.

Il s'agit d'un avis paru dans la Gazette du Canada, par lequel le gouvernement demande aux Canadiens de donner leur point de vue sur divers éléments qui pourraient éventuellement être négociés lors des négociations de la ZLEA et de l'OMC, et qui indique les travaux préparatoires que nous effectuons à cet égard.

Permettez-moi d'ajouter quelque chose à ce que Mme Finestone a dit à propos du point de vue d'un certain nombre de membres du groupe qui se réuniront à Berlin. Au cours de nos discussions à l'OMC, le mot «transparence» est utilisé pour décrire deux choses tout à fait différentes, suivant ceux qui l'utilisent. Dans bien des cas, les pays en voie de développement se réfèrent à la transparence pour indiquer qu'ils veulent tout savoir des discussions que les principaux pays tiennent entre eux en dehors des pourparlers ouverts à tous. Par ailleurs, d'habitude, cela ne couvre pas pour eux la société civile ou la diffusion publique des documents. Ils tiennent à la transparence entre les membres, mais cela ne doit pas sortir des murs.

Quant à nous, nous voulons une transparence totale. Je viens de vous dire que quand nous tenons des discussions à Genève, au bout d'une heure, il devient évident que les gens parlent de choses différentes quand ils préconisent la transparence.

Mme Sheila Finestone: On a certainement pu constater dans les discussions que les parlementaires ont eues entre eux, que le processus n'était pas satisfaisant. On nous a dit qu'en fin de compte, quatre pays prenaient les décisions au dernier moment et que les autres devaient s'y conformer. C'est là le message essentiel qu'on nous a transmis.

Vous avez dit que les choses étaient beaucoup plus ouvertes désormais. Votre description de la «transparence» en témoigne. Très bien. Merci beaucoup. Je voudrais que vous me disiez si vraiment, à votre avis, les choses sont plus ouvertes. En outre, pouvez-vous me dire à quelle aune vous mesurez le succès de vos entreprises? Et en dernier lieu, et ce n'est pas à négliger, quelles sont les normes sociales ou de droits de la personne ou encore de droits des travailleurs ou encore les normes environnementales dont vous avez besoin... À vrai dire, je ne vous pose plus la question car vous y avez déjà répondu, merci beaucoup. Je voudrais savoir quelles sont les mesures d'appui que l'on fournit sous forme d'aide aux pays en développement ou moins avancés pour qu'ils puissent mettre en oeuvre l'accord de l'OMC.

Vous dites que l'OMC a mis sur pied des programmes. Quand on va au Mozambique ou en Angola, par exemple, et quand on entend parler du Congo, ou quand on va dans les pays qui sont couverts de mines terrestres, on se rend compte qu'il y a là des obstacles à la mise en oeuvre d'un commerce équitable. En effet, on ne peut cultiver le sol ou extraire le minerai ou encore procéder à un développement économique là-bas car il y a des entraves. Est-ce qu'on tient compte de cela? Que fait l'OMC pour garantir que ces pays sont aidés, sans pénalité et sans qu'on exige d'eux un remboursement?

M. John Weekes: Tout d'abord, pour ce qui est de l'ouverture, on dispose désormais de renseignements supplémentaires que, j'en suis sûr, nous pouvons mettre à la disposition des membres du comité et qui décrivent la situation actuelle concernant la diffusion de documents et d'autres mesures prises par l'OMC. L'OMC a en effet un site Internet, WTO.org, qui fournit une vaste documentation et tous les mois, dans tous les pays du monde, des millions et des millions de pages sont téléchargées.

• 1040

Mme Sheila Finestone: A-t-on les moyens de se payer le papier?

M. John Weekes: Je peux vous dire que près de 80 pays se prévalent de ce site, mais je pourrais vous donner plus de détails si vous le voulez. On ne s'étonnera pas de savoir que les principaux usagers de ce site Internet sont encore les États-Unis et les pays d'Europe de l'Ouest. Toutefois, on constate une augmentation spectaculaire de son utilisation par les pays en voie de développement. L'OMC a fait beaucoup, de concert avec la Banque mondiale, pour améliorer la capacité des administrateurs des pays les moins développés à tirer parti de cet outil.

On a longuement discuté du besoin d'assurer au sein de l'OMC une aide technique liée au commerce. Il y a 18 mois, il y a eu une conférence sur les pays les moins développés et sur leurs besoins à cet égard. En fait, le renforcement des capacités, ce qui pourrait inclure ce dont vous parlez, est clairement l'une des choses qu'il nous faut étudier. Je crois que nous devons cependant également étudier ce qui peut être fait par l'entremise de l'OMC, ou grâce à la coopération inspirée par l'OMC, et ce que nous pouvons faire ailleurs.

Il existe un partenariat très actif entre l'OMC, la CNUCED, le Centre du commerce international à Genève, la Banque mondiale, le Fonds monétaire international et le Programme des Nations Unies pour le développement; tous ces intervenants essaient d'assurer une aide technique coordonnée, liée au commerce, aux pays les moins développés.

Pour être honnête, mon autre réponse serait tout simplement qu'il nous faut faire encore plus, avoir une meilleure coordination, pour permettre à ces pays de participer de façon plus efficace aux négociations et pour mieux comprendre l'impact que le résultat de ces négociations pourrait avoir; nous devons également être en mesure de les rendre plus à même, au niveau de leurs économies, de vraiment profiter d'un système de libre-échange.

Le président: Madame Debien.

[Français]

Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Ma question s'insère un peu dans celle de Mme Finestone. Je voudrais tout simplement lui dire que nous avons eu comme témoins des hauts fonctionnaires du ministère, entre autres, et que des mémoires nous ont expliqué exactement la situation des pays en voie de développement et les programmes qui existent à l'OMC pour leur venir en aide. On sait que c'est principalement pour des raisons financières et techniques que les pays en voie de développement ne participent pas pleinement aux activités de l'OMC. On a d'excellents documents qui définissent clairement la problématique des pays en voie de développement.

J'aimerais savoir quel bilan vous faites personnellement de ces programmes. On sait qu'il y en a eu plusieurs et que plusieurs pays ont aidé les pays en voie de développement. Quel bilan faites-vous personnellement de ces programmes, quelle est la perception des pays en voie de développement face à ces programmes et quel est le rôle du Canada dans ces programmes?

[Traduction]

M. John Weekes: Il m'est difficile, de Genève, de juger quels sont les résultats concrets de ces programmes. Évidemment, lorsque vous étudiez les pays en voie de développement de façon globale, vous constatez qu'ils ne sont pas tous au même niveau; certains d'entre eux sont plus avancés et peuvent certainement mieux se débrouiller seuls que d'autres. Je crois cependant qu'un grand nombre d'entre eux vous diraient que ce qu'on a fait jusqu'à présent ne suffit pas.

• 1045

Je crois qu'il serait utile de chercher, à Genève, comment nous pourrions mieux comprendre la nature des programmes qui existent actuellement; il nous faudrait en fait évaluer leur efficacité.

Je crois que la question que vous avez posée est très importante. C'est une question sur laquelle il faudra certainement nous pencher. Merci de l'avoir posée.

[Français]

Mme Maud Debien: Votre perception de la satisfaction des pays en voie de développement est plutôt négative. Est-ce bien ce que vous dites?

M. John Weekes: Oui.

Mme Maud Debien: D'accord. Dans votre intervention, vous avez souligné que, lors des négociations de l'ALÉNA, le ministère des Finances avait fait une étude démontrant que le salaire des travailleurs mexicains équivalait au septième de celui des travailleurs canadiens, mais comme le taux de productivité des travailleurs canadiens était sept fois plus élevé que celui des travailleurs mexicains, dans la pratique, cela s'équivalait. J'espère que vous ne voulez pas dire par là que le niveau de vie des travailleurs mexicains est égal à celui des travailleurs canadiens, parce que vous savez qu'il faut tenir compte d'un grand nombre d'autres facteurs lorsqu'on fait de telles comparaisons. C'est une observation plutôt qu'une question.

[Traduction]

M. John Weekes: Cela visait simplement à nous aider à penser à la question qui a été posée, je crois, par M. Stinson. Je parlais d'une étude qui a été effectuée il y a plusieurs années; je m'en souviens car, à l'époque, j'étais négociateur.

Mais cela a vraiment fait ressortir le problème du simple fait que si vous comparez un travailleur canadien à un travailleur mexicain, l'activité du travailleur mexicain sera beaucoup moins efficace que celle du travailleur canadien, même si le travailleur même fait du très bon travail, parce qu'il est entouré d'une infrastructure qui ne lui permet pas de faire un travail aussi efficace. Le système de communication n'est pas aussi bon, d'autres aspects de l'infrastructure ne sont pas aussi bons, etc.

[Français]

Mme Maud Debien: Je comprends très bien, mais cela ne veut pas dire pour autant que le niveau de vie des travailleurs mexicains est identique à celui des travailleurs canadiens. Vous n'en arrivez pas à cette conclusion-là?

[Traduction]

M. John Weekes: Non.

[Français]

Mme Maud Debien: D'accord.

[Traduction]

Le président: Monsieur Speller.

M. Bob Speller (Haldimand—Norfolk—Brant, Lib.): Merci, monsieur le président.

Merci, monsieur l'ambassadeur, d'être venu nous rencontrer aujourd'hui.

Je crois que la plupart des questions pertinentes ont été posées, mais j'aimerais en savoir un peu plus long sur les négociations qui se déroulent actuellement au sujet de la sélection d'un nouveau secrétaire général et sur l'impact que tout cela peut avoir sur l'environnement à l'OMC. Comme vous le savez, ces négociations se déroulent actuellement. Je me demande si vous pourriez nous dire où en sont ces négociations, quel impact elles ont sur le climat à l'OMC, si ce climat se maintiendra lors de la prochaine ronde de négociations, et si vous jugez qu'il devrait y avoir un nouveau processus de sélection puisqu'on connaît actuellement de graves problèmes. Est-ce que quelque chose est accompli?

[Français]

[Note de la rédaction: Inaudible]

M. Daniel Turp: ...le directeur général de l'OCDE; maintenant il veut celle de l'OMC.

[Traduction]

M. John Weekes: Je dois remercier M. Speller. Je commençais à croire que je repartirais aujourd'hui sans avoir eu besoin de répondre à des questions sur ce problème.

Le président: Il est supposé d'être de votre côté.

M. John Weekes: Non, c'est une bonne question, et j'en ai parlé brièvement dans ma déclaration préliminaire.

Pour être honnête, je crois que la situation actuelle à Genève en ce qui a trait à la sélection d'un nouveau directeur général est la suivante: il y avait à l'origine quatre candidats, et deux d'entre eux sont clairement en tête; en fait le président du conseil général essaie d'obtenir un consensus des membres autour de ces deux candidats. Un peu plus tôt dans le processus de sélection, le président avait décidé qu'il ne croyait pas qu'il serait possible, tout au moins à l'époque, d'avoir un consensus pour la sélection de M. MacLaren; par la suite le candidat marocain, Hassan Abouyoub, a décidé de se retirer.

• 1050

Je crois qu'actuellement le problème est attribuable, dans une certaine mesure, au fait que l'appui accordé aux deux principaux candidats est vraiment bien équilibré. Il y a M. Moore, au sujet duquel le président a dit qu'on pourrait avoir un consensus pour sa sélection, mais, dès le début, certains pays s'y sont opposés, et en fait la délégation de la Malaisie représentant les pays membres de l'ANASE, dont évidemment la Thaïlande fait partie, continue à s'opposer à la sélection de M. Moore. L'autre candidat, M. Supachai, vient de Thaïlande. Compte tenu des critères que le président essaie d'utiliser pour qu'on puisse en venir à la sélection d'un candidat, ni l'un ni l'autre des candidats n'est vraiment en tête.

Le problème avec le processus, c'est qu'on se retrouve avec deux candidats qui sont sur un pied d'égalité. Il aurait mieux valu que les représentants se rangent plus du côté d'un candidat que de l'autre. À ce moment-là, on n'aurait pas eu le problème qu'on connaît actuellement.

Cela a un impact sur nos autres travaux et sur les préparations pour les négociations de Seattle. Je ne peux le nier. En fait, nous avons dû utiliser certaines des réunions du conseil général qui étaient prévues pour la préparation des négociations de Seattle, pour discuter du processus de sélection.

De plus, les gens commencent à perdre patience parce que rien n'avance. Certains ont dit des choses qu'ils n'auraient peut-être pas dû dire. Je suis convaincu que les parlementaires ne comprennent pas comment on pourrait dire quelque chose qu'on n'aurait pas dû dire. D'autres ont réagi à ces propos, et maintenant, en plus de devoir trouver un nouveau directeur général, il faudra rétablir la confiance entre les délégués.

Je crois cependant que le président a eu raison de proposer une pause cette semaine, non seulement pour me permettre de venir ici rencontrer votre comité, mais aussi pour donner aux autres délégués le temps de bien penser à ce qui s'est passé.

Comme vous le savez sans aucun doute, aujourd'hui à Tokyo il y a une réunion de la quadrilatérale des ministres du commerce; je suis convaincu que cette question figurera à leur ordre du jour. Je ne crois pas que les pays membres de la quadrilatérale peuvent régler le problème, mais je crois qu'en discutant de la question, ainsi que de la question que vous m'avez posée, à savoir si nous avons besoin d'un nouveau processus, on fera quelque chose d'utile.

Je ne crois pas que le processus posait vraiment des problèmes à l'origine. Je crois que c'est un bon processus. Nous avons eu de bons candidats. Les candidats ont également eu l'occasion de mieux se faire connaître des délégués. Cependant, nous nous trouvons aujourd'hui dans une situation où, clairement, il nous faut décider comment nous pouvons passer du point où nous en sommes maintenant à celui où nous pourrons procéder à la sélection d'un candidat.

M. Bob Speller: Je me demande quelle sera l'humeur lors de la prochaine ronde de négociations. Nous avons des différends avec les Américains. Le Congrès américain semble encourager le président à devenir plus dur, plus rigide à l'égard non seulement du Canada mais d'un bon nombre d'autres pays. J'ai parlé à des représentants d'autres pays, qui me disent qu'ils éprouvent les mêmes problèmes. Ça ne laisse pas vraiment entrevoir de bonnes négociations quand il y a toutes sortes de différends. D'après vous, que se passera-t-il? Pensez-vous que les prochaines négociations se dérouleront dans un climat positif?

M. John Weekes: Encore une autre bonne question. Nous n'avons pas toujours entamé des négociations commerciales dans des circonstances internationales positives. Dans les années 80 les pressions protectionnistes et les projets de loi protectionnistes étaient nombreux au Congrès américain, et pourtant nous avons lancé l'Uruguay Round.

• 1055

Je crois que, d'une certaine manière, les négociations commerciales répondent presque plus à des nécessités qu'à des souhaits. C'est dû au fait que 25 p. 100 de la production intérieure brute mondiale est désormais exportée. Chez nous, comme vous l'avez fait remarquer tout à l'heure, c'est 40 p. 100, mais il reste qu'un pourcentage de 25 p. 100 sur une base mondiale interdit d'ignorer la gestion d'un tel volume de l'économie mondiale; c'est impensable. Il faut trouver en permanence des solutions. Il y a des problèmes réels qui sont à la base de certains de ces différends.

Les Américains ont leur manière à eux de se faire aimer par le reste du monde, ce qui ne facilite pas forcément le déroulement de ces négociations. En revanche, je crois que la majorité des pays prêtent une telle importance au dossier du commerce international qu'ils finissent par tous vouloir participer.

Deuxièmement, je constate que l'atmosphère générale à Genève, si on oublie les querelles commerciales entre les États-Unis et l'Union européenne—il leur faudra trouver le moyen de gérer ces relations d'une manière ou d'une autre, et les États-Unis et le Canada... Je trouve l'attitude des pays en voie de développement envers ces nouvelles négociations beaucoup plus positive que celle qu'ils avaient avant le début de l'Uruguay Round.

En 1986, plusieurs mois avant la réunion de Punta del Este, il n'était pas du tout certain qu'on arriverait à se mettre d'accord pour lancer de nouvelles négociations. Cette fois-ci, personne ne conteste l'engagement initial pris au sujet de négociations sur les services et sur l'agriculture. Honnêtement, de plus en plus de pays disent en privé qu'ils sont prêts à négocier toutes sortes de choses.

Il a aussi été intéressant de noter au cours des débats de la semaine dernière sur la question de la nomination du nouveau directeur général, que plusieurs pays, y compris les pays en voie de développement, se sont inquiétés de la manière dont nous rattraperions le travail en retard nécessaire pour préparer correctement la réunion de Singapour. Donc, si ces négociations ne les intéressaient pas, certains d'entre eux auraient pu trouver utile de se servir de cette diversion concernant la nomination du directeur général pour bloquer la procédure et ne pas avoir à affronter ces autres questions. Ce n'est pas du tout ce qui semble s'être passé pendant les débats à Genève.

Le président: J'aimerais poser une dernière question, puis il nous faudra passer à nos prochains témoins sur le projet de loi S-22, la Loi sur le précontrôle.

Monsieur Weekes, vous avez, vous le professionnel familier des ressources de Genève, exprimé un doute quant à la prise en charge par l'OMC des problèmes des droits de l'homme, d'environnement et de main-d'oeuvre. J'ai trouvé merveilleuse cette perspective de suppression du C dans OMC, ce qui nous laisserait avec une organisation mondiale chargée de résoudre tous les problèmes. Beaucoup de nos témoins nous ont dit que c'était inéluctable car c'est notre organisation la plus efficace et il est impératif de s'en servir pour résoudre tous ces autres problèmes.

À supposer, cependant, que cela ne se passe pas ainsi, continuerons-nous comme avant? Continuerons-nous à confier les problèmes de législation du travail à l'OIT, les problèmes d'environnement au Programme des Nations Unies pour l'environnement, les problèmes de droits de l'homme aux instances concernées? Nous nous retrouverons avec le vieux problème de la cohérence, et qui fera respecter les décisions de l'OMC? M. White nous a dit qu'il fallait s'adresser à l'OIT, où tous les gouvernements se mettent d'accord sur le respect de certaines normes pour le monde du travail. Ces mêmes gouvernements se rendent à l'OMC et prennent des décisions totalement opposées aux principes entérinés par l'OIT.

Si nous ne voulons pas que l'OMC hérite de tous ces problèmes, il faudra mettre un peu de cohérence ou créer un organisme habilité à décider que les règles de l'OIT s'appliquent et qu'on ne peut pas... Quelqu'un doit décider ce qui va se passer, sinon les lois commerciales vont entrer en contradiction avec les lois sur l'environnement, et on ne pourra plus s'en sortir. Cela fera peut-être l'affaire de certains, mais pas des témoins que nous avons entendus. Selon eux, il faut qu'on règle ces questions, et si ce n'est pas l'OMC elle-même qui s'en occupe, ce devra être soit un organisme supranational du genre de l'OMC, ou bien les nations-États devront conserver leur souveraineté pour pouvoir se protéger, et, à ce moment là, l'OMC ne pourra plus fonctionner parce que les diverses normes sur l'environnement, le travail et d'autres domaines vont empêcher l'arrivée de certains produits.

Il me semble que nous allons devoir faire quelque chose. Du moins, c'est ce que réclament certains groupes au Canada. J'ignore s'il y a le même genre de demandes venant d'autres pays, mais j'imagine que c'est le cas dans les pays de l'OCDE.

Quel est le sentiment à Genève? Je voudrais vraiment savoir si vous avez une panacée à nous proposer, parce que c'est un problème énorme, mais il me semble que les autorités à Genève doivent se dire qu'il est essentiel de faire quelque chose. Quel est le sentiment à Genève?

• 1100

M. John Weekes: Je vous recommande à cet égard de lire le dernier discours prononcé par Renato Ruggiero à titre de directeur général de l'OMC, discours qui s'intitulait quelque chose comme «Au-delà de l'OMC», parce qu'il y parlait justement de la question que vous avez soulevée. On pourrait croire qu'après quatre années de succès au poste de directeur général de l'OMC, où l'on a négocié de nouvelles ententes et renforcé l'institution, M. Ruggiero serait satisfait de ce qu'il a accompli, et il l'est dans une certaine mesure. Cependant, il se rend bien compte que la société civile et d'autres éléments considèrent que les organismes internationaux ne s'occupent pas très bien de toutes sortes de questions et que cela a des conséquences pour les diverses sociétés du monde à cause de la globalisation. Certains groupes considèrent que l'OMC a permis en quelque sorte au problème de surgir, mais d'autres la considère comme un élément d'une solution future.

M. Ruggiero signale que les chefs de gouvernement devraient être saisis de cette question et qu'ils devraient à leur tour confier un nouveau mandat aux organismes internationaux pour s'attaquer à ces problèmes et collaborer. Il signale aussi qu'un endroit possible pour lancer ce débat serait le sommet du millénaire aux Nations Unies l'année prochaine.

De toute façon, dans ce discours bien réfléchi, M. Ruggerio examine le problème qu'il a lui-même constaté en écoutant ce que les gens lui ont dit lors de ses visites.

[Français]

M. Daniel Turp: Pourrait-on en avoir une copie?

[Traduction]

Le président: Cela nous sera utile. Nous obtiendrons des exemplaires du discours pour les députés. Il me semble que c'est l'une des questions importantes que nous devrons traiter dans notre rapport.

[Français]

M. John Weekes: Le texte est disponible en français, en espagnol et en anglais sur le site Web de l'OMC.

Le président: Fort bien, tant mieux.

M. Daniel Turp: Monsieur le président, j'ai seulement une petite question. Pensez-vous que le rapport de ce comité mériterait d'être distribué à vos collègues à Genève, comme celui du SAGIT sur la culture?

M. John Weekes: Oui, peut-être.

[Note de la rédaction: Inaudible]

Le président: ...

M. John Weekes: Oui, je suis en train de réfléchir à mes réponses.

M. Daniel Turp: Avec les opinions dissidentes qu'il pourrait y avoir.

M. John Weekes: Non, mais je crois qu'il est très important de...

Le président: Il faut qu'on rappelle notre délégation de Genève. Peut-être est-ce une réticence, mais...

M. John Weekes: Oui. C'est un document public, mais je crois qu'il vaut la peine de montrer à nos collègues la pensée des parlementaires canadiens.

[Traduction]

Le président: Merci beaucoup, monsieur Weekes. Nous vous remercions de vos sages conseils. Nous en savons maintenant plus long qu'auparavant et nous vous en remercions.

Nous allons maintenant passer à notre deuxième séance. Les représentants du Conseil des aéroports du Canada sont venus nous parler du projet de loi S-22.

Monsieur Shaw et monsieur Bruno, je vous prie de vous avancer.

• 1103




• 1108

Le président: Chers collègues, ce sera notre deuxième réunion pour étudier le projet de loi S-22 sur le précontrôle. Vous vous rappellerez que nous avons entendu les témoignages des agents de gouvernements l'autre jour. Nous avons maintenant la chance d'accueillir les représentants du Conseil des aéroports du Canada, M. Steve Shaw et M. Gerry Bruno, qui vont nous donner le point de vue des autorités aéroportuaires sur les avantages et l'administration du projet de loi.

Merci beaucoup d'être venus.

Mme Sheila Finestone: Aimons-nous le projet de loi?

Le président: Tout à fait. Nous l'adorons. Cela va permettre à nos aéroports d'être concurrentiels vis-à-vis des aéroports étrangers. Tout va pouvoir mieux fonctionner. Les voyageurs vont pouvoir plus facilement aller aux États-Unis et en revenir. Tout le monde...

M. Darrel Stinson: Va-t-on baisser le prix des billets? C'est tout ce que je veux savoir.

Le président: Vous devrez poser la question à M. Shaw. C'est lui qui répond à toutes ces questions.

Monsieur Shaw.

M. Steve Shaw (coprésident, Comité bilatéral et de facilitation, Conseil des aéroports du Canada): Merci, monsieur le président, et bonjour aux membres du comité permanent.

Je m'appelle Steve Shaw et je suis accompagné par Gerry Bruno. Je suis le vice-président des Affaires sociales et des communications de la Greater Toronto Airport Authority, qui gère et administre l'aéroport Pearson à Toronto. Gerry est le président d'InterVISTAS, une compagnie de marketing pour les aéroports, qui a son siège social à Vancouver. Gerry et moi sommes les coprésidents du Comité bilatéral et de facilitation du Conseil des aéroports du Canada, et nous avons participé de très près à l'élaboration du projet de loi dont vous discutez ce matin.

Nous vous remercions de nous avoir permis de venir témoigner pour vous exposer la position du Conseil des aéroports du Canada, ou CAC, au sujet de cette question que nous jugeons fort importante.

Le CAC regroupe quelque 22 autorités aéroportuaires au Canada. Nous représentons ensemble plus de 90 p. 100 de tout le trafic voyageurs au Canada.

• 1110

Je vous rappelle tout d'abord que, dans le cadre de la politique nationale sur les aéroports instaurée par le gouvernement en juillet l994, la gestion des aéroports a été confiée à des autorités aéroportuaires, qui sont des organismes sans but lucratif, et ces autorités aéroportuaires ont formé le Conseil des aéroports du Canada. À notre avis, cette politique a eu beaucoup de succès. Toutes les autorités aéroportuaires se débrouillent extrêmement bien, et nous croyons que l'Association est très bien placée pour mettre de l'avant certaines de nos préoccupations communes.

Les autorités aéroportuaires du Canada appuient l'instauration de cette mesure sur le précontrôle en transit, et je voudrais ce matin vous expliquez le plus succinctement possible pourquoi nous appuyons le projet de loi S-22.

D'abord, il est bien évident que cette mesure sera très avantageuse pour les voyageurs. Dans le cadre du nouveau système, les voyageurs en transit, c'est-à-dire ceux qui n'entrent jamais vraiment au Canada, ne seront plus obligés de passer par les douanes canadiennes et américaines. Cette rationalisation va être plus commode pour les voyageurs et éliminera une source importante de retard et d'incertitude pour les voyageurs qui ne font que transiter par les plaques tournantes aéroportuaires du Canada pour aller aux États-Unis. Nous travaillons de concert avec les transporteurs aériens du Canada pour améliorer dans la mesure du possible les niveaux de service et la commodité pour les voyageurs, et j'ai vu d'ailleurs que les représentants de l'ATAC, c'est-à-dire des lignes aériennes, sont venus aussi appuyer le projet de loi aujourd'hui.

Deuxièmement, le précontrôle en transit améliorera la compétitivité de nos aéroports par rapport à ceux d'autres pays. Le Canada a un avantage géographique naturel pour les déplacements entre les États-Unis et l'Europe et entre les Amériques et l'Asie. Presque tous les vols vers les États-Unis en provenance d'Europe traversent l'espace aérien canadien. Les transporteurs qui desservent bon nombre de villes américaines pourraient considérer un vol pour l'Europe ou ailleurs qui passe par un aéroport canadien comme une solution attrayante.

Les transporteurs aériens du Canada sont reconnus pour leur service de qualité et leurs prix attrayants. Par exemple, la plaque tournante de Toronto pourrait servir de point de convergence pour le trafic américain vers l'Europe, tout comme le ferait une nouvelle plaque tournante à Montréal vu que les vols réguliers sont concentrés à Dorval. Le précontrôle en transit permettrait aux aéroports de Halifax, d'Ottawa, de Winnipeg et de Québec d'avoir accès au marché européen à destination des États-Unis. Ces aéroports seraient alors mieux placés pour organiser des services aériens vers l'étranger que s'ils devaient compter uniquement sur le marché local. Les aéroports de l'Ouest sont, de leur côté, bien placés pour servir les marchés en expansion sur la côte ouest des États-Unis, et les aéroports de Winnipeg, de Calgary et d'Edmonton sont en position idéale pour les marchés californiens.

Pour ce qui est des marchés asiatiques, Vancouver est environ 1 200 kilomètres plus proche de l'Asie que ne l'est Los Angeles, la principale plaque tournante aux États-Unis. Les aéroports de Vancouver, de Calgary et d'Edmonton offrent les endroits les plus attrayants pour les vols des marchés du centre et de l'ouest des États-Unis. Qui plus est, les aéroports de Winnipeg et de Toronto sont des plaques tournantes vers l'Asie pour de très importants marchés du nord-est des États-Unis. La possibilité de ce marché pour nos plaques tournantes est bien établie. Le fait d'éliminer le processus de double inspection, c'est-à-dire l'obligation de passer par les douanes canadiennes et ensuite les douanes américaines, supprimerait un désavantage très important au niveau de la concurrence pour les plaques tournantes du Canada.

En 1996, plus d'un million de voyageurs internationaux ont transité par les aéroports américains à destination ou en provenance du Canada, c'est-à-dire qu'ils sont passés par une plaque tournante aux États-Unis pour arriver au Canada. D'autre part, quelque 285 000 voyageurs internationaux sont passés par les plaques tournantes canadiennes à destination ou en provenance des États-Unis. Le précontrôle en transit permettra aux plaques tournantes canadiennes d'attirer une partie de ce trafic et de devenir plus concurrentielles par rapport aux aéroports américains.

Les possibilités de croissance du trafic voyageurs en transit sont ressorties du projet pilote mis sur pied à l'Aéroport international de Vancouver. Pendant la première année d'application de ce projet pilote, le nombre de voyageurs internationaux à destination et en provenance des États-Unis a augmenté de 32 p. 100.

• 1115

M. Gerry Bruno (coprésident, Comité bilatéral et de facilitation, Conseil des aéroports du Canada): Bonjour. Je vais prendre la relève de Steve pour vous parler du troisième et sans doute plus important avantage du précontrôle en transit, c'est-à-dire les possibilités de développement économique qui sont nombreuses.

Selon une étude menée en 1997 par le Conseil des aéroports du Canada, un programme de plaques tournantes en transit pourrait augmenter le nombre de voyageurs aux aéroports canadiens de 4 p. 100 pendant les premières années. C'est une augmentation importante parce que les voyageurs en transit parcourent généralement de longues distances et produisent donc des recettes élevées. Un nombre plus élevé de voyageurs représente des recettes accrues pour les lignes aériennes du Canada. Cette augmentation des recettes de l'industrie de l'aviation augmentera les avantages fiscaux pour tous les échelons gouvernementaux du Canada. À l'heure actuelle, les aéroports canadiens et les industries qui y sont reliées produisent quelque 4,5 milliards de dollars de recettes fiscales chaque année. On pense que le précontrôle en transit pourrait augmenter les impôts fédéraux et autres droits de 32 millions de dollars par année. Ce serait aussi à l'avantage des gouvernements provinciaux et des administrations municipales vu qu'ils obtiendraient jusqu'à 2 millions de dollars de recettes fiscales supplémentaires chaque année. Cela fait donc quelque 54 millions de dollars de plus par année en impôt pour tous les échelons gouvernementaux du Canada.

Le précontrôle en transit pourrait aussi réduire les dépenses gouvernementales en réduisant les coûts reliés aux services d'inspection au Canada. Cela supprimerait la nécessité d'inspecter les voyageurs qui ne font que passer par les aéroports du Canada, ce qui économiserait l'argent des contribuables. Un autre avantage, c'est que cela réduirait les files d'attente aux postes de Douanes et Immigration Canada aux arrivées parce que certains de ces voyageurs pourraient passer directement au précontrôle américain.

Un autre avantage économique du précontrôle en transit a trait à la création d'emplois. D'après l'étude effectuée par le CAC en 1997, 3 000 emplois seraient créés directement dans l'industrie de l'aviation par l'augmentation du trafic voyageurs qui découlera du précontrôle en transit, et nous pouvons nous attendre en plus à la création de 3 800 emplois indirects.

Comme vous pouvez le constater, le projet de loi S-22 est très avantageux non seulement pour les aéroports canadiens, mais aussi pour les transporteurs, les voyageurs, les gouvernements et l'ensemble du pays. Il donne à l'industrie de l'aviation un avantage concurrentiel qui aura des retombées sur l'ensemble de l'économie canadienne. Cela pourrait avoir d'importantes retombées lucratives.

En un mot, le Conseil des aéroports du Canada appuie le projet de loi S-22. Je remercie le comité de nous avoir permis d'expliquer notre position au sujet du précontrôle en transit. Nous espérons que cette mesure importante sera adoptée rapidement.

Merci beaucoup.

Le président: Merci, monsieur Bruno.

Questions? Monsieur Turp.

[Français]

M. Daniel Turp: Merci de votre présentation, messieurs. Vous êtes très favorables à ce projet de loi, si je comprends bien, mais aimeriez-vous qu'on y apporte des changements? Les dispositions du projet de loi telles qu'elles sont vous conviennent-elles parfaitement ou si vous avez des amendements à proposer au libellé des dispositions?

[Traduction]

M. Steve Shaw: Nous pensons que le projet de loi tel qu'il est maintenant rédigé fera l'affaire. On nous a certainement consultés à ce sujet et nous sommes satisfaits du projet de loi.

[Français]

M. Daniel Turp: Connaissez-vous la loi américaine? On nous a parlé de cette loi la semaine dernière. Êtes-vous d'avis que la loi américaine, ou celle dont on est en train de discuter, contient les éléments nécessaires ou réciproques à celle du Canada?

[Traduction]

M. Gerry Bruno: Selon les négociations qui ont eu lieu, cette entente sera tout à fait réciproque, et les agents canadiens auront exactement les mêmes droits et privilèges aux aéroports des États-Unis si nous installons des services de précontrôle canadien à ces aéroports. C'est donc tout à fait réciproque.

Le président: Madame Finestone.

Mme Sheila Finestone: Merci beaucoup, monsieur le président.

Cela semble très bien à première vue. Je voudrais savoir comment cela fonctionnera pour les personnes handicapées et ce que cela signifiera pour les retraités et les personnes âgées qui doivent marcher d'un poste à l'autre. Comme vous le savez très bien, ce ne sont pas seulement les gens d'affaires qui voyagent, mais aussi les personnes âgées. Vous pouvez vous consulter pour savoir qui répondra ou vous pouvez répondre tous les deux.

• 1120

Je tiens à vous dire qu'à cause des autres engagements que nous avons tous comme parlementaires, nous voyageons pas mal à l'étranger. En ma qualité de voyageuse expérimentée, je peux vous dire que c'est embêtant; c'est pénible; c'est déplaisant; ce n'est pas agréable; l'enregistrement des bagages est une expérience affreuse; partout, il faut attendre. Toute amélioration serait la bienvenue. Je ne vois toutefois pas d'amélioration dans ce qui est proposé, à part le fait que la personne aura à parcourir la même distance à pied, mais qu'elle n'aura pas à s'arrêter à un certain poste de contrôle pour dire «bonjour, au revoir» et présenter son passeport.

On nous soutirera les mêmes sommes d'argent. Je ne vois aucune amélioration au chapitre de l'argent qu'on nous soutire. Il faudra s'arrêter alors qu'on est en pleine course pour prendre son avion et payer 10 $ ou 15 $ pour passer par une porte quelconque ou encore laisser son empreinte digitale pour avoir accès à l'endroit où l'on veut se rendre parce qu'on est un grand voyageur.

J'aimerais savoir quelles sont les améliorations que vous seriez prêts à envisager. Étant donné que vous aurez tous ces revenus supplémentaires—tant mieux—qu'allez-vous faire pour me rendre la vie plus agréable quand je prends un avion pour aller dans un autre pays du monde?

Le président: Qu'en pensez-vous, monsieur Shaw?

M. Gerry Bruno: Je crois que nous voulons tout deux répondre à la question, mais je pourrais peut-être dire quelques mots en premier.

Le précontrôle en transit aura effectivement pour effet de supprimer toute une étape des contrôles auxquels les voyageurs sont soumis.

Mme Sheila Finestone: Y compris la distance qu'il faut parcourir à pied?

M. Gerry Bruno: Exactement, oui.

Mme Sheila Finestone: Bien.

M. Gerry Bruno: Exactement. Vancouver est un bon exemple. Nous avons à cet aéroport un projet pilote de précontrôle en transit qui fonctionne maintenant depuis environ un an et demi. Auparavant, les voyageurs qui arrivaient de l'étranger et qui se rendaient aux États-Unis devaient descendre deux niveaux, faire la queue et passer par le comptoir des douanes canadiennes, prendre leurs bagages, puis emprunter l'escalier roulant ou l'ascenseur pour monter un étage, faire de nouveau la queue et passer par tout le processus. Nous avons donc supprimé toute cette étape, si bien que le voyageur peut descendre de l'avion et aller directement au précontrôle américain à un niveau intermédiaire. Ainsi, la distance à parcourir à pied est réduite de beaucoup, de même que le temps qu'il faut pour le contrôle des passagers.

Pour répondre à votre question dans le contexte plus large de ce que font les aéroports canadiens—je peux vous parler de Vancouver et Steve fera certainement le point pour vous sur ce qui se passe à Toronto—je vous dirai que nous déployons beaucoup d'efforts, non seulement aux divers aéroports mais collectivement, par l'entremise du Conseil des aéroports canadiens, afin d'améliorer tous les processus par lesquels doivent passer les voyageurs afin d'éliminer les étapes inutiles et faire en sorte que le contrôle puisse se faire de façon plus efficiente, faire en sorte que les bagages puissent être transférés de façon plus efficiente sans qu'il soit nécessaire, par exemple, de les inspecter tous.

Quant à l'argent, il va aux travaux d'expansion des aéroports canadiens. Les autorités aéroportuaires sont toutes des organisations sans but lucratif, de sorte que tout revenu supplémentaire doit être réinvesti dans les installations aéroportuaires, dans des trottoirs roulants, par exemple. Je crois que nous sommes tous très conscients du fait que nous vieillissons tous et que nous nous heurtons tous à des problèmes de ce genre. Nous tentons d'améliorer tous nos aéroports pour que les gens puissent s'y déplacer plus facilement.

Mme Sheila Finestone: Allez-vous trouver des porteurs qui pourront enlever les bagages du carrousel?

M. Gerry Bruno: Cela fait certainement partie du service.

Mme Sheila Finestone: Ah, oui? D'accord. Je pourrais vous donner une longue liste, puisque mes nerfs ont été mis à rude épreuve tout au long du périple que je viens de terminer et qui m'a emmené d'un bout du pays à l'autre. Il serait donc très intéressant de savoir quelles seraient les améliorations qui seraient apportées aux installations aéroportuaires.

Pourriez-vous m'expliquer pourquoi on doit payer des frais de 10 $ ou de 15 $ selon l'aéroport où on se trouve et pourquoi ces frais ne peuvent pas être inclus dans le prix du billet pour qu'on n'ait pas à s'arrêter pour les payer en cours de route? Ce n'est pas que j'estime que le prix des billets n'est pas déjà trop élevé. Il l'est, mais c'est là autre chose.

M. Gerry Bruno: Cela commence à se faire dans certains aéroports. Calgary, par exemple, a négocié un accord avec les compagnies aériennes pour qu'elles incluent ces frais dans le prix du billet. Vancouver, Edmonton et Montréal continuent à faire payer ces frais à l'aéroport. Des discussions sont en cours pour inclure ces frais dans le prix du billet et simplifier ainsi le système.

• 1125

M. Steve Shaw: Pour commencer, permettez-moi de vous rappeler, que si la politique aéroportuaire nationale a créé les autorités aéroportuaires, c'est pour qu'elles deviennent des pôles générateurs d'économie dans les régions qu'elles desservent. Les bénéfices tirés de l'augmentation du trafic aérien profitent directement à la région. À Pearson, par exemple, nous avons constaté une augmentation de près de 15 p. 100 en deux ans des revenus annuels. Le nombre d'emplois directs et indirects liés à Pearson est passé de 100 000 à 115 000 et les revenus de 10 milliards à près de 12 milliards par an. C'est en partie attribuable à cette locomotive économique pour la région.

Deuxièmement, comme Gerry vient de le dire, le précontrôle en transit permettra d'accélérer la procédure et de limiter les déplacements dans l'aéroport. En ce qui nous concerne, nous construirons des installations de transit dans les aérogares 2 et 3, ce qui réduira de beaucoup les déplacements. Elles seront, bien entendu, équipées d'ascenseurs et elles seront totalement accessibles.

Permettez-moi d'ajouter que nous sommes en train de construire une nouvelle aérogare qui sera la norme de demain.

Mme Sheila Finestone: Devrons-nous nous y rendre par autocar?

M. Steve Shaw: Non, vous pourrez vous y rendre directement, et le chemin à faire à pied ensuite sera très court.

Dans notre conception, nous incorporons des installations de précontrôle en transit où la priorité sera donnée à l'accueil. Nous avons fait le maximum pour tenir compte du fait que, dans toute conception d'aérogare, l'objectif doit être de faciliter la vie aux passagers. Je me ferai un plaisir de vous expliquer nos intentions en vous montrant nos plans.

Mme Sheila Finestone: Il y a une dernière chose que vous pourriez faire et qui serait merveilleuse pour le consommateur, c'est, d'essayer d'être à l'heure et d'essayer de décoller quand vous êtes censés décoller et ne pas avoir à attendre parce qu'il y a trop d'avions qui attendent leur tour pour décoller.

M. Steve Shaw: Madame la députée, c'est une question que vous pouvez tout à fait poser aux compagnies aériennes. L'aéroport lui est toujours là. Nous sommes toujours à l'heure.

Puis-je faire un dernier commentaire en réponse à ce que vous avez suggéré tout à l'heure. Comme Gerry l'a dit, dans certains aéroports, il y a une taxe d'aéroport. De plus en plus, nous envisageons d'incorporer ces frais d'amélioration dans le prix du billet, et si jamais il y a un jour des frais d'amélioration d'aéroport à Toronto, ils seront intégrés au prix du billet.

Mme Sheila Finestone: Oserais-je poser une question concernant les fumeurs?

Le président: Non.

Mme Sheila Finestone: Très bien. Je n'oserais donc pas mais j'aimerais des fumoirs un peu plus agréables.

M. Steve Shaw: Je peux aussi répondre à cette question, si vous le voulez.

Le président: J'espère que ce n'est pas vous qui avait eu tout un tas d'ennuis pour avoir fumé dans les toilettes de l'avion.

Mme Sheila Finestone: Non.

Le président: Madame Debien.

[Français]

Mme Maud Debien: Merci, monsieur le président. Que je sache, les douaniers américains sont armés alors que les douaniers canadiens ne le sont pas. Vous me corrigerez si j'ai tort—je n'ai pas pris connaissance du projet de loi tout entier—mais est-ce que tous les douaniers visés par le projet de loi devraient être armés? J'aimerais connaître votre opinion là-dessus ainsi que la situation dans le cadre du projet-pilote à Vancouver.

[Traduction]

M. Gerry Bruno: Je peux certainement vous répondre. À Vancouver et dans les autres aéroports, les douaniers américains n'ont pas le droit d'être armés. Il est vrai qu'aux États-Unis ils le sont mais ils ne le sont pas dans les aéroports canadiens. Généralement, nous fournissons une présence policière en cas de besoin. Les policiers sont armés et les gardes de sécurité sont armés mais ce sont des agents canadiens et non pas des agents américains. C'est le cas dans le projet pilote de Vancouver. Un agent de la Gendarmerie royale est présent dans la zone de précontrôle américaine pour venir en aide aux douaniers américains en cas de besoin. Mais les douaniers américains n'ont pas le droit d'être armés.

[Français]

Mme Maud Debien: Mais on ne voit pas cela dans le projet de loi.

[Traduction]

Le président: Il y a une chose que je ne comprends pas. Vous avez ce projet pilote depuis un an et demi, et il semble fonctionner. Pourquoi dans ce cas avoir besoin d'une loi pour faire ce que vous faites déjà à Vancouver? C'est bizarre. On nous a dit que cette loi était nécessaire parce que nous avions donné aux douaniers américains le pouvoir de faire toutes sortes de choses au Canada et, réciproquement, que nous avions donné aux douaniers canadiens le pouvoir de faire toutes sortes de choses aux États-Unis qu'ils ne pourraient pas faire autrement. Mais c'est ce que vous faites déjà depuis un an et demi, en toute illégalité si je comprends bien. Mais c'est Vancouver. Vancouver a toujours joué les exceptions. Ça a toujours été comme ça. Je le sais. J'y ai grandi. C'est vrai.

Des voix: Oh, oh!

Le président: Je sais parfaitement que c'est la Cascadie et que, par conséquent, la loi canadienne ne s'y applique pas. Mais comment avez-vous fait? Pourquoi avons-nous besoin de cette loi si vous le faites déjà?

• 1130

M. Gerry Bruno: J'aimerais répondre. Ce projet pilote est le résultat d'un accord entre le Canada et les États-Unis, et l'idée était de faire un essai pour voir si cela marcherait ou non. Dans le projet pilote, les douaniers américains n'avaient pas ces pouvoirs.

Le président: Oh, d'accord.

M. Gerry Bruno: Il y a des douaniers canadiens dans la zone de précontrôle pour faire appliquer certaines des règles douanières, car les douaniers américains n'ont pas ces pouvoirs. Cette loi—si elle est adoptée, ce que j'espère—leur donnera ces pouvoirs, si bien qu'il ne sera plus nécessaire d'affecter des douaniers canadiens dans cette zone.

Le président: Il y a le droit de fouiller par palpation, par exemple. Il y a tout un vocabulaire dans cette loi qui a causé beaucoup d'intérêt...

[Français]

M. Daniel Turp: Cet article est là-dedans.

Mme Maud Debien: Je vous ferai remarquer, monsieur le président, que ce sont seulement les hommes qui parlent de cela.

[Traduction]

Le président: J'apprends. Mon français s'améliore.

C'est intéressant. Donc à Vancouver vous avez essayé ces techniques, mais ils n'avaient pas en fait ces pouvoirs, et, donc ils étaient toujours accompagnés de Canadiens. Désormais, ils n'auront plus besoin de ces Canadiens.

M. Gerry Bruno: Exactement.

Le président: Si nous avons bien compris les fonctionnaires qui sont venus nous parler l'autre jour, ils ne seront pas armés. S'il y a un besoin d'intervention policière ou d'intervention armée, il faudra faire appel à un agent canadien.

M. Gerry Bruno: Exactement.

Le président: Monsieur Shaw.

M. Steve Shaw: Nous estimons que cela permet de régulariser et de faciliter le précontrôle et le précontrôle en transit.

Le président: C'est au tour de Mme Augustine, suivie de M. Turp.

Mme Jean Augustine (Etobicoke—Lakeshore, Lib.): Monsieur le président, je crois qu'il y a un détail qui m'échappe. Comment cela fera augmenter le trafic?

M. Steve Shaw: Je vais répondre. Les compagnies aériennes étudient actuellement le moyen de faciliter les déplacements entre l'Asie et les États-Unis. Le passage obligé actuellement par les douanes canadiennes suivi des douanes américaines est considéré comme un obstacle et un inconvénient dans les aéroports canadiens. À Toronto, quand cette procédure de passage unique par les douanes américaines sera en place, nous croyons que le résultat sera une augmentation du trafic, car Toronto deviendra un point d'accès privilégié pour le nord-est des États-Unis. Par exemple, pour aller de Kong Kong à Washington, passer par Toronto est déjà de loin l'itinéraire le plus rapide et il deviendra encore plus rapide. Nous prévoyons donc une croissance du trafic non négligeable.

Le président: N'y a-t-il pas beaucoup d'Américains, par exemple, qui aiment prendre Air Canada à partir de Toronto mais qui ne veulent pas passer deux fois par la douane? Ils ne comprennent pas pourquoi il leur faut atterrir à Toronto, passer la douane canadienne, puis remonter à l'étage au-dessus et passer leur propre douane américaine. Désormais ils pourront le faire en une seule fois.

M. Steve Shaw: Exactement.

Mme Jean Augustine: Mais ce n'est pas un nouvel itinéraire. C'est simplement une question de choix...

Le président: Les passagers utiliseront le même itinéraire mais avec un obstacle de moins.

[Français]

M. Daniel Turp: Vous soulevez là un point. Est-ce une nouvelle route ou non?

[Traduction]

Le président: D'accord. Laissons-les répondre.

M. Gerry Bruno: Si on considère ce qui s'est passé pendant le projet pilote à Vancouver en un peu moins d'un an, on voit que le nombre de passagers qui transitent maintenant par Vancouver est passé de 60 000 à 70 000. C'est l'équivalent de...

Mme Sheila Finestone: Vous voulez dire plutôt que passer par Seattle?

M. Gerry Bruno: Je veux dire plutôt que de passer par Seattle ou San Francisco, exactement.

Cela signifie donc que les compagnies aériennes ajoutent des vols supplémentaires pour prendre ces passagers à Vancouver. Ces chiffres peuvent se traduire en gros par au moins deux vols de plus par jour de Vancouver vers les États-Unis pour ce trafic supplémentaire. Et ce n'est qu'un début. Il y aura probablement d'autres vols d'ajoutés. Une fois que les aéroports comme Toronto et Montréal auront le précontrôle en transit, ils pourront aussi accroître la fréquence des liaisons existantes et ajouter de nouvelles liaisons. Ils n'ont peut-être pas assez de passagers locaux pour ces destinations, mais en ajoutant ces passagers supplémentaires en provenance d'Europe ou d'Asie, ils pourront remplir un avion et créer en conséquence une nouvelle liaison.

Mme Jean Augustine: Y aura-t-il une incidence sur les tarifs?

Mme Sheila Finestone: Excellente question.

• 1135

Le président: Il s'occupe des aéroports.

Mme Jean Augustine: Avec le prix d'un aller-retour Ottawa-Toronto, ce que je fais une fois par semaine, je pourrais me payer un billet pour l'Europe, les Caraïbes...

Le président: Pour Moscou.

Mme Jean Augustine: Pour Moscou, vient de dire quelqu'un.

Le président: Nous devons entendre les responsables du transport aérien jeudi. C'est plutôt à eux qu'il faudrait poser la question parce que ce sont eux qui fixent les tarifs. Ces gens ne font que gérer les aéroports.

Mme Sheila Finestone: Oh, vraiment! Vous voulez dire que ce sont eux les profiteurs!

Le président: Oui, ce sont eux. Ce sont eux qui fixent les tarifs.

[Français]

Monsieur Turp, vous avez encore une question?

M. Daniel Turp: J'en ai deux.

J'aimerais que vous nous commentiez la situation particulière de l'aéroport de Dorval et son impact sur Dorval.

Ma deuxième question n'est pas liée au projet de loi puisque vous êtes d'accord sur son contenu; elle porte sur un aspect assez technique dans les aéroports. N'y aurait-il pas moyen, comme on le fait dans les aéroports européens, de faire la distinction entre les passagers qui détiennent la nationalité du lieu de l'aéroport, ceux qui détiennent la citoyenneté de l'Union européenne et les autres? Est-ce quelque chose qu'on envisage de faire? Que je sache, on ne fait pas cette distinction dans les aéroports canadiens. On pourrait à tout le moins faire la distinction entre les passagers des pays membres de l'ALÉNA et les autres. Avez-vous envisagé cela au Conseil des aéroports?

[Traduction]

M. Gerry Bruno: Aussi à Dorval?

M. Daniel Turp: Oui.

M. Gerry Bruno: En ce qui concerne Dorval, le précontrôle en transit s'inscrit directement dans le contexte du regroupement. Maintenant que vous avez à la fois les vols nationaux et internationaux dans le même aéroport, transformer Dorval en point d'entrée ou d'accès sera plus simple. Le précontrôle en transit n'est qu'un des éléments parmi tous les services que désormais Dorval offrira pour être plus compétitif comme point d'entrée avec les aéroports américains. Ce sera donc définitivement un avantage pour Dorval.

Pour ce qui est de votre deuxième question, ce sont les douanes et l'immigration qui ont la responsabilité des formalités à remplir par les passagers dans la salle des arrivées, et le Conseil des aéroports du Canada travaille en étroite collaboration avec eux. Dans certains aéroports ils assignent certains guichets, par exemple, aux titulaires de passeports canadiens uniquement. Cela se fait donc dans certains aéroports. Nous étudions la possibilité de faire la même chose pour, disons les voyageurs nord-américains, afin que les Canadiens et les Américains bénéficient d'un guichet distinct des autres nationaux qui peuvent avoir besoin de visas et qui par conséquent peuvent prendre un peu plus de temps pour remplir les formalités.

Il y a une autre initiative à laquelle réfléchit le Conseil des aéroports du Canada. C'est un nouveau système de passage automatisé des frontières. Nous avons un projet pilote, encore une fois à Vancouver, appelé CANPASS aéroports, dans lequel un passager possesseur d'une carte peut s'identifier au moyen de sa carte et de l'empreinte de sa main et être autorisé à passer sans remplir toutes les formalités. Ces passagers ont fait l'objet d'une enquête préalable des douanes et de l'immigration. Ils procèdent à une vérification de sécurité complète. Les passagers présentant le moins de risque peuvent donc utiliser cette procédure accélérée et le plan est de...

Le président: Ils prennent vos empreintes digitales?

M. Gerry Bruno: Les deux.

Le président: Ils prennent vos empreintes digitales avant de vous donner la carte. J'en ai une.

M. Gerry Bruno: Vous avez une carte CANPASS, très bien.

[Français]

M. Daniel Turp: Ils prennent aussi un échantillon d'ADN.

[Traduction]

M. Gerry Bruno: Nous n'en sommes pas encore là.

[Français]

Mme Sheila Finestone: Mais c'est là.

[Traduction]

M. Gerry Bruno: Le plan prévoit d'introduire ce nouveau système à Montréal, à Toronto et dans d'autres aéroports canadiens l'année prochaine.

[Français]

M. Daniel Turp: Merci.

[Traduction]

Le président: Mme Finestone veut poser une petite question, puis ensuite Mme Augustine. Ce ne sont pas les idées qui manquent.

Mme Sheila Finestone: Oui. Il y avait deux choses.

À propos de la carte CANPASS à laquelle nous nous sommes intéressés quand nous avons étudié les possibilités de problèmes vis-à-vis de la Loi sur la protection des renseignements personnels et de la Loi sur les droits de la personne, les risques d'intrusion et la nécessité de protéger l'ADN ont été considérés comme un facteur important, pour commencer.

Deuxièmement, l'expérience CANPASS à Vancouver, tout comme les expériences sur la côte est du Canada et les deux endroits où vous avez essayé, n'a pas été couronnée de succès. J'aimerais donc savoir sur quoi vous vous fondez pour penser pouvoir utiliser la carte CANPASS, et quelle protection vous offrirez au client qui devra donner ses empreintes digitales ou qui devra permettre que son pouce ou un de ses doigts soit utilisé comme facteur d'identification.

• 1140

La deuxième question que j'aimerais vous poser concerne les réfugiés et les immigrants. Selon certains experts canadiens, le Canada est censé être un refuge pour les terroristes. Que comptez-vous faire? Pour être franche, je ne considère pas la situation au Canada pire que dans n'importe quel autre pays. Cependant, ceci dit, quel moyen prévoyez-vous dans ce nouveau système pour vous assurer qu'un immigrant reçu légitime ou un réfugié légitime se trouve à bord de cet avion et qu'il atterrit là où il est censé atterrir? Je crois que c'est un point très important.

En dernier lieu, quel niveau de protection avez-vous prévu pour les enfants qui sont en transit, quand on connaît le nombre de divorces et le nombre d'enlèvements d'enfants par des parents véritables ou substituts? Qu'avez-vous prévu pour protéger les enfants au moment où ils prennent une correspondance, étant donné le système de transit que nous sommes en train de mettre en place?

Mme Jean Augustine: C'est une bonne question.

Mme Sheila Finestone: J'ai posé trois questions.

Le président: Toutes ces questions portent sur le CANPASS et son fonctionnement, n'est-ce pas?

Mme Sheila Finestone: Non. Le CANPASS n'a rien à voir avec les premiers essais qui se sont révélés inefficaces, avec la protection de l'ADN, des enfants et des réfugiés. Finalement, j'ai posé cinq questions.

Le président: Je comprends bien. Vos questions n'ont toutefois rien à voir avec ce projet de loi. Ce projet de loi ne traite absolument pas de ces éléments, sauf pour... Il faut savoir que quand les agents du ministère ont comparu, l'autre jour, nous avons amplement discuté de la question des réfugiés avec les représentants du gouvernement...

Mme Sheila Finestone: À la bonne heure. Merci. Vous n'avez pas besoin de me répondre alors.

Le président: ...et avec les avocats qui représentent le ministère et qui pourraient nous fournir des réponses. Je ne sais pas si nos témoins, qui sont des administrateurs d'aéroports, peuvent vous donner des réponses à ces questions d'ordre juridique concernant les réfugiés. S'ils le peuvent, soit. Vous obtiendrez sans doute une réponse pratique.

Mme Sheila Finestone: Excusez-moi, monsieur le président. Je n'ai pas assisté à cette réunion, et si vous pensez avoir obtenu des réponses satisfaisantes, eh bien, je m'incline.

[Note de la rédaction: Inaudible]

Mme Jean Augustine: ...

Le président: Maintenant, je n'en suis plus sûr. Pour résumer, il me semble que le problème ne survient pas tant au Canada car ce processus ne serait pas déclenché. Si quelqu'un arrive ici et réclame le statut de réfugié, à Toronto par exemple, le transit ou le précontrôle n'interviennent pas. Cette personne se présente devant les autorités canadiennes, voilà tout.

La situation pourrait changer si nous avons une réciprocité avec les États-Unis. Ainsi, une personne pourrait atterrir à Miami et se présenter devant les autorités canadiennes en disant: «Je veux être réfugié au Canada». Les Américains diraient: «Pas question, nous allons vous mettre à bord d'un avion et vous renvoyer d'où vous venez». C'est le problème que vous soulevez, n'est-ce pas? C'est le problème auquel nous sommes confrontés... C'est peut-être un problème juridique. D'après ce que nous ont dit les agents du ministère, ce régime en particulier ne comporte pas de difficultés de ce genre.

Vous avez peut-être des remarques à faire, étant donné que vous avez l'expérience de l'administration d'un aéroport. Monsieur Shaw ou monsieur Bruno, souhaitez-vous répondre?

M. Gerry Bruno: Je peux certainement répondre à la question concernant le CANPASS, et Steve aura quelques mots à ajouter sur la situation en transit des réfugiés.

Le projet pilote CANPASS de Vancouver est le seul qui vise un aéroport au Canada. Les autres projets pilotes CANPASS, je pense, visent des passages à la frontière en surface.

Celui qui concerne l'aéroport a été très fructueux, et Revenu Canada voudrait l'appliquer à l'échelle du pays. La difficulté provient en partie du fait qu'on a du mal à trouver l'argent nécessaire à cette fin. Nous travaillons en partenariat avec Revenu Canada et les aéroports vont en fait assurer le coût dans ce cas-là.

La vie privée est protégée, car toute identification biométrique, que ce soit grâce aux empreintes digitales ou à la géométrie de la main, demeure la propriété du gouvernement. Ces renseignements ne sont pas versés à une base de données distincte et ne servent que comme outil d'identification des particuliers. Il n'est pas question que les aéroports aient accès à ces renseignements et puissent les utiliser. Ainsi, la protection des renseignements personnels...

Mme Sheila Finestone: Les balises sont donc en place.

M. Gerry Bruno: Absolument.

M. Steve Shaw: Je voudrais abonder dans ce sens-là car nous avons fait tous les efforts nécessaires pour garantir que ces passes protégeront les renseignements personnels tout en permettant une identification juste... en d'autres termes, aucune contrefaçon n'est possible.

Je vais ajouter deux choses. Comme l'a dit Gerry, nous faisons diverses tentatives pour améliorer la façon dont on s'occupe du trafic transfrontalier. Dans tous les cas, d'après ce que j'ai pu constater, il y a amélioration du point de vue de la sécurité, mais c'est surtout le confort des voyageurs qui s'accentue. Si vous êtes un voyageur régulier entre les États-Unis et le Canada, le système utilisé, que nous appelons désormais le CANPASS, vous sera utile et vous facilitera les choses. De notre point de vue, notre tâche n'en est que plus facile, car nous n'avons pas besoin de nous occuper de vous puisque vous êtes un voyageur régulier qui passe par l'aéroport. Ainsi, nos ressources peuvent être concentrées ailleurs où il y a de plus grandes menaces à la sécurité.

• 1145

Mme Sheila Finestone: À la vérité, pour ma part, je fais la queue comme tout le monde, même si j'ai un passeport vert. Cela ne fait aucune différence. Il n'y a pas de queue spéciale pour les parlementaires. En fait, je pense qu'on s'intéresse un peu plus à nous qu'aux autres, mais cela est sans importance.

Le président: En particulier, si le préposé est un de vos électeurs, ce qui m'arrive souvent, quand je passe par Toronto... «Hé, je vous connais».

M. Steve Shaw: Tous les voyageurs doivent être munis de pièces d'identité valides. C'est vrai pour les enfants, accompagnés ou non. Ce projet de loi ne change rien à cela. C'est encore vrai. Le projet de loi ne changera absolument rien aux considérations de sécurité.

Mme Sheila Finestone: Quand on fait voyager un enfant qui a moins de six ou cinq ans, une personne est désignée... Ce sont peut-être les représentants des lignes aériennes qui pourraient répondre à cette question car ces compagnies reçoivent une délégation d'autorité et l'enfant est sous leur responsabilité.

M. Steve Shaw: En effet. C'est un problème qu'il faudrait poser aux représentants des lignes aériennes, vous avez raison.

Mme Sheila Finestone: Peut-on réserver cette question pour la poser aux représentants des compagnies aériennes qui vont venir témoigner. Pour ma part, je dois me rendre à une autre réunion. Excusez-moi. Voudriez-vous poser cette question alors... Les représentants des compagnies aériennes ne vont-ils pas comparaître aujourd'hui?

Le président: Non, ils viendront jeudi. Vous aurez ainsi l'occasion de reposer votre question.

Jean, vouliez-vous poser une autre question?

Mme Jean Augustine: Dans le train de services que vous offrez en tant qu'administration aéroportuaire, le transport de surface, taxis et limousines, est-il inclus?

M. Steve Shaw: En vertu de notre bail de surface, il nous incombe de veiller à l'administration des règlements concernant les taxis et les limousines, en effet.

Mme Jean Augustine: Peut-être devrais-je...

Le président: Téléphonez à Colleen et dites-lui de venir, car c'est...

Mme Jean Augustine: Eh, bien, j'habite à l'intérieur de ce que l'on appelle une zone à 19 $ aux abords de l'aéroport, et les chauffeurs de taxi ne trouvent pas que je suis une cliente intéressante.

M. Steve Shaw: Je vois.

Mme Jean Augustine: Ils conduisent à des vitesses vertigineuses car ils sont impatients de retourner à l'aéroport faire la queue. Ils sont de mauvaise humeur. Ils jettent ma valise une fois arrivée chez moi. C'est épouvantable. Je descends de l'avion de fort bonne humeur, et quand j'ai affaire à un chauffeur de taxi... Si je pouvais rentrer chez moi à pied, je le ferais.

Peut-être pourrions-nous examiner les problèmes à court terme et à long terme sous un autre angle, en ce qui concerne l'aéroport de Toronto.

Le président: C'est la même chose dans bien des endroits, à London notamment. Il y a diverses files pour...

Mme Sheila Finestone: Il y a une file pour les courses brèves.

M. Steve Shaw: Je pense que vous avez tout à fait raison, il existe un problème et nous sommes en train d'examiner les divers éléments de la question des taxis et des limousines à Toronto. Nous avons pu en parler avec Colleen Beaumier et d'autres députés, de sorte que nous connaissons bien la situation. Nous espérons pouvoir faire le nécessaire d'ici quelques mois afin de mettre en oeuvre une politique bien pensée qui, nous l'espérons, réglera non seulement ce problème mais toutes sortes de problèmes concernant l'octroi des permis.

Le président: Monsieur Shaw, il serait commode que, pour les courses brèves, il y ait une file différente. Par exemple, à Dorval, à l'aéroport de Montréal, cela se fait, et c'est très pratique. Cela est indéniable. Même en ville, si vous montez à bord d'un taxi et que le chauffeur pense qu'il va vous conduire à l'aéroport, alors que vous lui demandez de vous amener à trois pâtés de maison, vous comprendrez qu'il s'énerve. Il est difficile, à l'aéroport... Avez-vous déjà essayé de prendre une limousine à l'aéroport à 1 heure du matin quand il neige au mois de février?

Puisque tout le monde saisit l'occasion de parler d'autre chose que du projet de loi, je vais quant à moi poser une question qui concerne précisément le projet de loi. Le précontrôle aux États-Unis, qui bien sûr sera réciproque... Je suppose qu'on commencera ici dans les grands aéroports comme Toronto, Vancouver et Montréal. Je ne vois pas où cela sera fait à part dans ces villes-là. Va-t-on inclure Halifax également ou s'en tiendra-t-on à ces trois-là?

M. Steve Shaw: On pourrait certainement inclure Halifax et d'autres aéroports.

Le président: De toute façon, cela se limitera aux grands aéroports manifestement.

M. Steve Shaw: Au départ... le nombre augmentera progressivement.

Le président: À supposer qu'il y ait quatre ou cinq aéroports de réciprocité aux États-Unis—je ne sais pas desquels il s'agirait, mais on peut supposer que ce sera Chicago, New-York, Washington, que sais-je encore—est-ce que cela va vous aider, vous, dans vos aéroports ou est-ce que cela va vous nuire? Quel est l'impact...

• 1150

M. Steve Shaw: Quand les passagers d'un vol ont fait l'objet d'un précontrôle aux États-Unis, il n'est pas nécessaire ici de passer à la douane, de sorte qu'il y a une économie, car on peut réduire le personnel des Douanes et de l'Immigration et, au demeurant, cela facilitera les déplacements entre les États-Unis et notre pays.

Quant à nous, l'incidence ne sera pas négative. Cela fait partie d'une amélioration d'ensemble qui trouve son origine dans l'accord Ciels ouverts.

Le président: Si 50 p. 100 des vols en provenance des États-Unis, et se dirigeant vers Pearson par exemple, faisaient l'objet d'un précontrôle, et si les passagers n'avaient pas besoin d'aller faire la queue avec tous ceux qui viennent d'autres endroits, ce serait effectivement très avantageux.

M. Steve Shaw: Cela prouve encore mieux que les douaniers peuvent concentrer leurs efforts sur les vols et les personnes qui sont les plus suspectes.

Le président: C'est utile.

Je veux maintenant vous poser une question qui n'a rien à voir avec le projet de loi et qui concerne l'administration aéroportuaire.

Il me semble étrange que dans un monde où les lignes aériennes sont les transporteurs les plus efficaces pour vous permettre d'aller d'un endroit à un autre, les aéroports semblent être les endroits les plus inefficaces de la planète. Pensez-vous que vous pourriez exploiter une épicerie si vous exigiez que vos clients fassent la queue pour y entrer, subissent des vérifications, passent dans le magasin en ayant à faire la queue encore plusieurs fois, avant de devoir faire la queue encore trois fois pour payer et sortir?

Quand j'entre dans un aéroport, je fais la queue pour faire enregistrer mon billet. Ensuite, si je vais à l'étranger, je dois passer le contrôle des douanes. Si c'est à Dorval, il faut que je paie la taxe d'aéroport, et je fais la queue, et ensuite je fais la queue pour le contrôle de sécurité. Ensuite, je fais la queue pour monter à bord de l'avion. On me dit qu'il faut que je sois à l'aéroport 90 minutes avant le départ de l'avion. Pourquoi? À cause de toutes ces queues. C'est un peu comme à l'armée: «Courez vous mettre en rang».

Ce doit bien être le système le plus farfelu du monde mais il semble que ce soit universel. Je ne vous blâme pas, vous. À Londres, à New-York, où que ce soit, c'est la même chose. Les compagnies aériennes n'essaient-elles pas de réduire ces inconvénients que l'on rencontre à terre?

M. Steve Shaw: Je ne peux pas parler au nom des compagnies aériennes, mais nous travaillons en étroite collaboration avec elles pour améliorer l'efficacité du processus d'enregistrement des bagages et de passage des divers contrôles. Nous avons tout intérêt à ce que les choses soient plus faciles. Nous n'aimons pas les files sans fin, pas plus que les gens qui, eux-mêmes, font la queue.

Je pense que ce sont des initiatives comme le précontrôle en transit, CANPASS, le transit sans visa, et beaucoup d'autres mesures de ce genre qui faciliteront les choses. Vous avez toutefois raison. Il y a des vérifications qui sont importantes. Dès le premier moment, il y a la question du parking et les billets, etc. Dans chaque cas... Par exemple, pour ce qui est de Toronto, nous avons longuement réfléchi à la façon dont les gens accéderaient à la nouvelle aérogare, comment nous pourrions faciliter l'enregistrement et comment nous pourrions maximiser l'utilisation commune de l'aérogare par les lignes aériennes. Pour ce qui est ensuite de faire la queue, nous essayons de réduire cela au minimum au moment du contrôle douanier. Nous avons choisi une approche multi-usages pour faciliter les choses.

Le président: Par exemple, ce qui est de l'aéroport de Londres, on peut désormais enregistrer ses bagages à la gare de Paddington. L'enregistrement se fait là et on monte à bord d'un train qui vous amène directement jusqu'à...

M. Steve Shaw: Cela semble intéressant pour Toronto.

Le président: Vous devez donc envisager toutes ces possibilités-là également.

M. Steve Shaw: En effet.

Le président: Et je suppose que vous allez songer à une éventuelle liaison ferroviaire avec l'aéroport de Toronto, n'est-ce pas?

M. Steve Shaw: Je crois savoir qu'il se peut que le gouvernement prenne cette initiative.

Le président: Merci beaucoup d'être venus. Nous vous en sommes reconnaissants.

Il n'y a pas d'autres questions, que je sache. C'est dommage car la comparution de nos témoins nous permet d'exprimer toutes nos frustrations concernant les voyages par avion. Quand nous accueillerons les représentants des transporteurs aériens, à la prochaine séance, madame Finestone, vous aurez votre chance. Ces témoins-ci sont tout à fait innocents. Les coupables comparaîtront plus tard cette semaine.

Merci d'être venus. Nous vous en sommes reconnaissants.

Mme Jean Augustine: Réglez la question de la taxe.

Le président: Cet après-midi, il y aura une séance d'information sur le Kosovo à 15 h 15. En outre, le Sous-comité des droits de la personne de Mme Beaumier siégera à propos du Sierra Leone, ce qui promet d'être très intéressant.

Mme Sheila Finestone: Je sais bien, mais il m'est impossible d'assister à l'une ou l'autre de ces réunions.

Le président: La séance est levée.