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FAIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FOREIGN AFFAIRS AND INTERNATIONAL TRADE

COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 6 novembre 1997

• 0911

[Traduction]

Le président (M. Bill Graham (Toronto-Centre—Rosedale, Lib.)): La séance est ouverte.

Nous recevons ce matin M. Ian Gillespie, le nouveau président de la Société pour l'expansion des exportations. M. Gillespie est convoqué en vertu des articles 110 et 111 du Règlement.

Monsieur Gillespie, je crois savoir que vous avez une courte déclaration à faire. Comme l'objet de votre convocation est de vous poser des questions sur ce que vous estimez être le mandat de la SEE, avec la permission des membres du comité, je vous invite à être assez bref. Cela nous faciliterait les choses.

Merci.

M. A. Ian Gillespie (président, Société pour l'expansion des exportations): Merci beaucoup, monsieur le président. Je suis ravi d'être ici ce matin pour vous parler du succès de la SEE.

J'aimerais remercier le comité de me donner l'occasion de me présenter à lui et de lui rappeler ce qu'est la SEE, organisme auquel je suis extrêmement fier d'être associé depuis près de 20 ans en tant qu'employé et, depuis peu, en tant que président et chef de la direction.

[Français]

Juste après ma nomination, à la fin d'août, nous avons décidé d'envoyer à tous les parlementaires une trousse d'information sur la SEE, à la fois pour me présenter et pour encourager les députés à conseiller à leurs électeurs de s'adresser à la Société lorsqu'ils ont besoin d'appui pour gérer des risques à l'exportation. J'espère que mes propos d'aujourd'hui s'inscriront dans le prolongement de ce que vous avez peut-être lu dernièrement.

[Traduction]

Monsieur le président, permettez-moi de prendre tout d'abord quelques instants pour vous expliquer mon parcours universitaire et professionnel. Comme vous l'aurez conclu après m'avoir entendu parler français,

[Français]

je suis un anglophone de Toronto.

Le président: Moi aussi, et j'ai les mêmes défauts.

[Traduction]

Des voix: Oh, oh!

M. A. Ian Gillespie: J'ai obtenu un baccalauréat en économie de l'Université Queen's et une maîtrise en administration des affaires de l'Université Western Ontario. Je suis également analyste financier agréé, titre professionnel le plus élevé dans le milieu bancaire et le secteur des investissements.

J'ai passé deux ans chez Wood Gundy avant d'entrer en 1978 à la SEE, où j'ai occupé divers postes dans les secteurs des assurances, du financement, de la trésorerie, de la planification financière et des affaires générales. J'ai pu ainsi acquérir une expérience directe des activités de la SEE, dans des fonctions de soutien et d'autres de gestion des rapports de la SEE avec son actionnaire, le gouvernement du Canada. Avant ma nomination à la société, j'étais premier vice-président, gestion des risques et performance générale.

[Français]

Mes études et mon expérience de travail me fournissent, à mon avis, un riche bagage que je pourrai mettre à profit dans mes fonctions de président et chef de la direction de la SEE. Je comprends en effet le caractère unique de la Société, qui doit s'acquitter d'un mandat public tout en appliquant des pratiques de saine gestion commerciale.

[Traduction]

En tant que premier président et chef de la direction issu des rangs de la société, je vois dans ma nomination une approbation de la performance de celle-ci et un solide vote de confiance à l'égard du travail accompli avec dévouement par l'ensemble de ses employés.

• 0915

Parlons maintenant des activités de la SEE.

Tout d'abord, j'aimerais prendre un moment pour vous expliquer les rouages de la SEE et, plus particulièrement, pour vous dire qui nous sommes et ce que nous faisons.

La SEE a pour mandat d'appuyer et de promouvoir le commerce d'exportation du Canada et la capacité de notre pays de s'engager dans le commerce d'exportation, ainsi que de tirer parti des débouchés qu'offrent les marchés internationaux.

En pratique, elle offre principalement quatre types de services: l'assurance-crédit à l'exportation, qui protège les exportateurs canadiens contre le défaut de paiement d'acheteurs; le financement à l'exportation, et il s'agit là essentiellement de prêts consentis aux acheteurs étrangers de biens et de services canadiens; les cautionnements et garanties; et l'assurance-investissement à l'étranger.

Nous appuyons les exportateurs de toutes les régions du Canada, dans plus de 200 pays du monde.

Prenons l'exemple d'un fabricant de gadgets de Winnipeg qui aurait l'occasion de vendre ses articles, disons, à Mexico, à Manille ou à Milwaukee, mais qui a peur de ne pas être payé par l'acheteur une fois la marchandise livrée.

Avec une police d'assurance-crédit de la SEE, qui couvre 90 p. 100 de ses pertes si son acheteur ne paie pas, notre exportateur peut avoir l'esprit tranquille.

Côté financement, prenons l'exemple d'un fabricant d'un bien d'équipement qui a un acheteur potentiel en Inde. Ce dernier se montre très intéressé, mais veut bénéficier d'un financement pour l'ensemble de la transaction. La SEE peut accorder un prêt à l'acheteur. Les fonds ne quitteront jamais le Canada, puisque nous payons le fabricant canadien une fois le contrat exécuté selon les modalités prévues. Ensuite, nous nous tournons vers l'acheteur indien pour obtenir remboursement du principal du prêt et des intérêts, dont le taux est établi en fonction des risques.

La SEE est une société d'État qui fonctionne comme une institution financière commerciale. Elle ne reçoit pas de crédits parlementaires. Toutes ses dépenses administratives sont couvertes par ses revenus d'exploitation.

Elle n'accorde aucune subvention. Ses titulaires de polices versent des primes, et ses prêts aux acheteurs étrangers sont entièrement remboursables et portent intérêt.

En servant toute la gamme des exportateurs canadiens, la SEE génèrent les revenus dont elle a besoin pour offrir de meilleurs produits et services, des produits et services plus spécialisés aussi, à un nombre croissant de clients, particulièrement des petites et moyennes entreprises.

En 1996, la société a dégagé un bénéfice net de 112 millions de dollars, déduction faite des provisions pour pertes sur prêts et pour sinistres sur assurances.

Pour les six premiers mois de 1997, le bénéfice net a été de 66 millions de dollars. Ce sont là de bons résultats, mais qui reflètent un rendement sur les capitaux propres conforme au mandat de la SEE. Nous ne cherchons pas à maximiser les bénéfices, mais bien les exportations.

En étant rentable, la SEE peut accroître sa capacité d'appuyer les exportateurs canadiens.

Permettez-moi de m'arrêter sur quelques initiatives récentes...

Le président: Monsieur Gillespie, avant de vous laisser poursuivre, sachez que normalement nous accordons dix minutes à nos témoins, pour pouvoir leur poser des questions.

Vous en êtes à la troisième page d'un texte qui en fait dix. Ce sera beaucoup trop long. Nous allons joindre votre déclaration au compte rendu. Peut-être pourriez-vous n'en faire que le survol et en signaler les faits saillants. Cela nous aiderait.

Désolé de briser votre élan. Je sais que c'est difficile, mais vous nous obligeriez en procédant de cette façon.

M. A. Ian Gillespie: Très bien, monsieur le président. Je vais résumer les points saillants des sept pages suivantes.

J'allais vous parler de l'initiative prise récemment par la SEE en faveur de la PME.

En deux mots, la petite entreprise est une grosse affaire pour la SEE, puisque 85 p. 100 de nos clients sont des PME. C'est capital.

Il y a un million de PME au Canada; mais à peine environ 75 000 PME exportatrices. Il faut donc améliorer cette proportion. Dans mon texte, j'énumère divers modes de coopération avec les institutions financières du secteur privé destinées à accroître le soutien qui est accordé aux PME et à les encourager à se tourner vers l'exportation.

Je parle aussi de l'appétit pour le risque de la SEE. Ce qu'il faut retenir ici, c'est que nous sommes présents non seulement dans 200 pays du monde, mais que nous faisons aussi des affaires aujourd'hui dans plus de 130 marchés.

• 0920

Certes, plus de 80 p. 100 des exportations du Canada sont à destination des États-Unis, mais la SEE n'appuie qu'environ 4 p. 100 de ces ventes. Par comparaison, qu'il s'agisse de l'Amérique latine, de l'Europe de l'Est, de l'Afrique, du Moyen-Orient ou de l'Asie, elle a appuyé au minimum 15 p. 100 des exportations vers ces régions.

Pour continuer à être utile et à inciter les exportateurs à prendre pied dans ces quelque 200 pays, nous suivons de très près l'activité sur les marchés à risque élevé. Nous avons choisi d'assumer une partie de plus en plus grande du risque pour le compte des exportateurs canadiens; cela, toutefois, d'une manière prudente sur le plan financier.

Je veux aussi souligner que les recettes nettes dont j'ai parlé sont en fait recyclées. Cela vient fortifier la capacité des exportateurs canadiens. Des exportateurs veulent conclure un marché. Ils veulent des exportations. Ils ne veulent pas un bas prix ou un soutien partiel. Ils veulent un soutien complet à un prix qui nous permet à nous et qui leur permet à eux de conclure des affaires. Cette rentabilité va donc être bien mise en évidence.

Je parle également des considérations environnementales, auxquelles nous attachons une grande importance, de même qu'à la question des droits de l'homme. Je le dis clairement: la SEE ne fixe pas la politique du gouvernement; elle la suit.

Je dois également vous faire remarquer que la SEE diffère considérablement de certains des autres organismes de crédit à l'exportation, dans le monde, que vous connaissez peut-être, comme par exemple la Ex-Im Bank, des États-Unis. Celle-ci dispose de crédits de près de 700 millions de dollars par an pour couvrir ses dépenses d'exploitation, alors que la SEE est financièrement autonome, caractéristique qui en fait un cas unique, et de grande importance pour nos clients.

Quant à l'orientation que nous comptons prendre, il est évident que la mondialisation a de profondes répercussions, partout, sur la façon de faire des affaires.

Le Canada exporte à l'heure actuelle un plus grand pourcentage de sa production que tout autre grand pays industrialisé, et c'est ce que je voudrais bien faire comprendre au comité. L'augmentation des exportations est donc essentielle à la prospérité économique de notre pays, et c'est là que notre société joue un rôle crucial, un rôle, ajouterais-je, qui ne fait que gagner en importance. En 1990 les exportations canadiennes qui bénéficiaient de l'appui de notre société s'élevaient à quelque 6 milliards de dollars; cette année, elles vont s'élever, pensons-nous, à plus de 27 milliards de dollars.

Il y a deux autres remarques que je voudrais faire, monsieur le président, si vous le permettez.

Notre mission, en termes simples, est d'être au service d'un plus grand nombre de clients, de soutenir davantage d'entreprises et de prendre plus de risques au nom de nos clients, tout en assurant des pratiques financières solides.

En dernier lieu, la SEE représente une solution authentiquement canadienne d'équilibre idéal entre les disciplines du secteur privé et un solide mandat public. À l'heure actuelle nous faisons peut-être trop figure d'arme secrète: la tâche que nous devrions nous fixer, à mon avis, c'est de nous faire mieux connaître et d'affûter notre arme.

Le président: Je vous remercie, monsieur Gillespie; votre exposé était fort utile.

Monsieur Mills.

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.) Je souhaite également la bienvenue à M. Gillespie.

Je voudrais vous poser deux ou trois questions précises.

Tout d'abord vous parlez de bénéfices, et c'est là une douce musique pour nos oreilles. Mais je me demande si vous fonctionnez dans les mêmes conditions que d'autres. Est-ce que vous payez un loyer pour l'immeuble que vous occupez? Êtes-vous imposés? Autrement dit, fonctionnez-vous à l'instar des banques ou des personnes qui travaillent dans le secteur privé?

• 0925

En second lieu, j'aimerais savoir où en sont vos prêts à recouvrer; combien d'entre eux avez-vous imputés à l'exercice? Est-ce que vous prévoyez avoir cette année des portefeuilles non productifs?

En troisième lieu—c'est la question que la plupart des Canadiens, sans doute, voudraient vous poser—il est bien beau d'apprendre que c'est nous qui menons la charge pour débarrasser le monde des mines antipersonnel, qui peuvent certainement infliger des dégâts terribles aux civils, mais ne se pourrait-il pas qu'un réacteur nucléaire qui aurait des problèmes techniques, en particulier dans des pays comme la Turquie ou, le cas échéant, la Chine, cause aux populations des dégâts incomparablement pires que ceux que causent les mines antipersonnel?

C'est pourquoi j'aimerais savoir quel est le mandat qui vous a été donné pour appuyer la vente des réacteurs CANDU, en particulier celui dont il est question actuellement et qui se trouve en Turquie, et quels sont les critères que vous utilisez, quel est le statut adopté pour une vente de ce genre.

Le président: Permettez-moi de vous interrompre un instant, monsieur Gillespie.

La plupart des questions qui vont vous être posées seront probablement comme celles de M. Mills, à savoir orientées davantage vers la politique de la SEE. Je voudrais simplement rappeler aux membres du comité que cette audience porte sur l'article 110 du Règlement, à savoir vos qualifications pour occuper votre poste. Le fait de savoir si c'est la politique du gouvernement du Canada de mener certaines actions qu'il est de votre devoir d'exécuter n'a rien à voir avec cet article.

Je sais toutefois que les membres du comité sont vivement intéressés par la SEE et son fonctionnement, et c'est pourquoi je vais autoriser les questions, parce que cette audience nous offre une excellente occasion d'en savoir davantage sur cet organisme, mais je voudrais simplement rappeler aux membres quelle est la nature réelle de cette séance. Pour d'autres audiences nous devons tenir compte de ce qui est réellement notre objectif. Dans le cas qui nous occupe toutefois, je reconnais que c'est là une excellente occasion d'apprendre à mieux connaître et M. Gillespie et la SEE.

M. Julian Reed (Halton, Lib.): J'invoque le Règlement, monsieur le président: puisque notre mandat, pour cette séance, est tel que vous l'avez décrit, il pourrait être intéressant d'inviter M. Gillespie à comparaître de nouveau, par la suite, pour discuter en détail de la Société pour l'expansion des exportations.

Le président: Puisque M. Gillespie a préparé un exposé, nous pourrons peut-être faire ce matin d'une pierre deux coups.

Quant au temps que nous lui consacrons, les membres savent ce que nous tentons de faire, à savoir mieux connaître le rôle de la SEE, mais je vous rappelle qu'il y aura d'autres audiences où nous ne vous laisserons pas aussi libres de poser des questions.

Je vous remercie.

Excusez-moi de cette interruption. Vous avez la parole, monsieur Gillespie.

M. A. Ian Gillespie: Je vais essayer de répondre, si vous le permettez, aux questions de M. Mills.

En ce qui concerne votre cadre de référence par rapport à celui des banques, par exemple, nous payons certainement un loyer; nous payons également des subventions en guise d'impôt à la municipalité dans laquelle nous résidons. Non, nous ne payons pas d'impôt sur le revenu, ce qui constitue certainement une différence concrète entre la SEE et les banques canadiennes, mais on en revient là à toute la question du mandat politique de la SEE, à savoir la promotion des exportations canadiennes. Vous savez certainement qu'un emploi sur trois y est lié. Dans la mesure où la SEE peut donc aider les sociétés canadiennes à exporter dans le monde, nous créons la prospérité économique pour notre pays, ce qui est notre rôle le plus important.

En ce qui concerne le statut de nos prêts, notre rapport annuel comporte, dans la discussion de la gestion et l'analyse de nos opérations, tout un chapitre sur les prêts non productifs; vous y trouverez une liste assez détaillée. En résumé, environ 15 p. 100 de nos prêts appartiennent à ce que nous appelons une catégorie non productive.

Nous constituons des provisions assez considérables en prévision des problèmes que causerait notre portefeuille. Le revenu net que je mentionnais tout à l'heure est donc dégagé après constitution d'une solide réserve de provisions, qui doit évidemment être approuvée par le vérificateur général, compte tenu de notre portefeuille de prêts. Notre situation financière est très saine, mais, à l'instar d'autres institutions financières, il est certain que nous avons des avoirs non productifs.

Vous me demandiez, je crois, si nous avons radié certaines dettes. Il y a deux catégories de prêts, les prêts consentis à des États souverains et les prêts commerciaux. En ce qui concerne les premiers, ils relèvent de certaines dispositions du Club de Paris. Ces dispositions n'ont pas été conçues par la SEE; ce sont des dispositions dont le Canada est signataire, dans le cadre du Club de Paris. Ces dispositions comportent ce qu'on appelle les conditions de Naples, et prévoient, dans certains cas, un allégement considérable du fardeau de la dette.

• 0930

La SEE ne radie pas les dettes, mais en raison de ses obligations internationales, le Canada peut, dans certaines circonstances, mitiger les dettes pour certains pays répondant à des critères spécifiques.

Nous consentons également des prêts commerciaux aux acheteurs étrangers qui acquièrent des biens et services canadiens. Là aussi nous allons faire quelques mauvaises expériences: au cours des 53 années de notre existence nous avons certainement réduit certains prêts commerciaux, mais là encore il en a été pleinement tenu compte dans les états financiers que vous avez sous les yeux.

Quant aux CANDU, je ne puis que répéter que le rôle de la SEE n'est pas de faire la politique du gouvernement, mais de l'appliquer. En tant qu'institution financière nous devons évaluer si les pays étrangers sont en mesure de nous rembourser les prêts que nous leur consentons; c'est là notre responsabilité, c'est là ce qui relève de notre compétence. Nous ne consentons de prêts qu'aux parties qui, à notre avis, seront en mesure de rembourser avec intérêts l'intégralité du prêt que nous leur avons consenti.

M. Bob Mills: Je vous remercie.

[Français]

Le président: Monsieur Sauvageau.

M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): D'abord, je vous remercie de votre présence. Comme nous avons pu le constater dans votre présentation et votre curriculum vitae, vous avez toutes les compétences—nous le croyons tous et toutes—pour occuper vos fonctions. Compte tenu que vous aviez réservé une page de votre discours pour votre c.v. et que le reste portait sur la SEE, je crois légitime de vous poser des questions principalement sur la SEE.

J'aimerais vous poser une question spécifique sur un pays spécifique. Vous avez parlé de la défense des droits de la personne plus tôt, disant que c'était un critère important que la SEE prenait en considération avant d'accorder des prêts ou de poser des gestes concrets. J'ai en preuve des documents qui viennent du ministère des Affaires étrangères, qui sont disponibles sur Internet pour tout le monde et qui parlent d'un pays particulier, la Colombie. Je vais vous citer quelques données qu'on retrouve dans ces documents récents du ministère des Affaires étrangères, qui parlent aussi de la SEE. J'aimerais avoir votre opinion à ce sujet.

Dans un premier temps, dans le guide à l'intention des exportateurs du ministère des Affaires étrangères, on peut lire que l'économie colombienne est l'une des plus stables et dynamiques de l'Amérique latine. Toutes les citations que je vous donnerai proviennent du site du ministère des Affaires étrangères.

Dans une deuxième citation, on peut lire que la Colombie est l'un de nos partenaires commerciaux les plus dynamiques de la région. Plus loin, on peut lire que la Colombie observe depuis un an une forte poussée de l'activité canadienne d'investissement. Cependant, toujours dans le même site du même ministère, du même gouvernement, du même pays, on peut lire que le début de l'année 1997 a été marqué par l'incertitude, le gouvernement ayant décrété subitement un état d'urgence économique en Colombie.

Toujours dans le même document, on peut lire que des mesures de sécurité accrues s'imposent pour les Canadiens qui voyagent en Colombie, où la situation continue de se détériorer et présente des risques graves, tant pour les Colombiens que pour les voyageurs canadiens.

Plus loin, on dit que la Colombie a la réputation d'être un pays violent où le trafic de la drogue, le vol et les assassinats sont monnaie courante; les incidents y sont assez fréquents, en effet. Cependant, en prenant certaines précautions, ces risques peuvent être réduits.

Et plus loin, on dit que les groupes paramilitaires et les guérilleros ont récemment intensifié leur attaque. On sait que la Colombie est le pays où il y a le plus d'enseignants dans le monde qui se font tuer et que quatre syndicalistes sur dix qui se font tuer dans le monde se font tuer en Colombie.

Dans le même document, on peut lire que depuis que les États-Unis ont retiré leur certification à la Colombie en mars 1996, parce que ce pays ne se conformait pas aux objectifs américains de lutte contre la drogue, les programmes de l'Export-Import Bank des États-Unis ont bloqué tout nouveau prêt pour la Colombie. La SEE estime qu'il y a là une occasion de consentir de nouveaux prêts pour soutenir les programmes canadiens d'exportation en Colombie.

• 0935

Dans le document en anglais, on peut lire l'expression «windows of opportunity». Est-ce que vous ne trouvez pas un peu paradoxal, compte tenu de la situation des droits de la personne et compte tenu que le gouvernement canadien se sert d'une perte de certification de la Colombie pour non-respect des critères de la lutte contre la drogue, mais aussi des droits de la personne, que la SEE estime que ce sont des windows of opportunity pour les investisseurs canadiens?

[Traduction]

M. A. Ian Gillespie: Là encore je dois répéter que ce n'est pas à nous de formuler les politiques, mais de les appliquer. Notre évaluation s'est donc limitée à la capacité de remboursement de la Colombie, peut-être conjointement avec tout emprunteur commercial avec lequel nous faisons affaire, autrement dit à sa capacité de rembourser à l'échéance tous les prêts que nous avons pu lui consentir ou toute couverture d'assurance consentie aux sociétés canadiennes. C'est là la mesure de notre mandat. Aussi longtemps que nos opérations sont conformes aux politiques du gouvernement, notre tâche se limite simplement à évaluer la capacité de ces débiteurs de rembourser leur dette à la SEE ou de payer la créance due à une société canadienne.

[Français]

M. Benoît Sauvageau: Permettez-moi d'être un tant soit peu en désaccord, parce qu'on peut y lire que non pas le gouvernement canadien, mais la SEE estime qu'il y a là une occasion de consentir de nouveaux prêts pour soutenir les programmes canadiens d'exportation en Colombie. Est-ce qu'à tout le moins, pour mettre à jour le guide à l'intention des exportateurs, vous maintenez que c'est un pays stable, que c'est un bon endroit, que la Colombie observe depuis un an des poussées de l'activité canadienne des investissements et que le Canada est devenu l'un des principaux investisseurs étrangers en Colombie, surtout dans les secteurs du pétrole et des télécommunications? Est-ce que vous concevez à tout le moins qu'on devrait inscrire des informations justes et véridiques, dans un premier temps?

Dans un deuxième temps—je ne vous parle pas de la politique du gouvernement canadien, même si on pourrait en parler longuement—, la SEE estime qu'il y a là une occasion de consentir des prêts puisque les États-Unis disent que c'est un pays trop grave et ont décidé de se retirer. La SEE se dit que c'est parfait et que ça lui donne des windows of opportunity. Vous ne trouvez pas que c'est un peu paradoxal comme politique?

[Traduction]

M. A. Ian Gillespie: Vous faisiez une observation à propos des États-Unis: le problème n'est pas de savoir si la Ex-Im Bank des États-Unis considère que la Colombie ne serait pas en mesure de rembourser sa dette étrangère, car c'est là une question politique pour les États-Unis.

En ce qui nous concerne, nous y voyons un marché prometteur pour les exportateurs canadiens. C'est un pays en développement, désireux de construire son infrastructure, de faire des achats et de connaître une expansion comme tout autre pays. Notre rôle consiste à évaluer les risques associés aux prêts consentis à ce pays, et nous avons conclu qu'il sera en mesure de rembourser intégralement sa dette. C'est là tout ce qu'on attend de nous. En ce sens la Colombie représente un marché potentiellement intéressant pour les exportateurs canadiens, un marché qui n'est pas sans risque, mais le risque est notre métier.

[Français]

M. Benoît Sauvageau: J'ai une dernière question, si vous me le permettez, qui sera hypothétique. Si la SEE consent un prêt à une entreprise qui s'en va en Colombie, est-ce qu'elle suit cette entreprise pour s'assurer qu'elle n'embauche pas des guérilleros pour tuer toute naissance de mouvement syndical au sein de l'entreprise? On sait que des entreprises multinationales embauchent des guérilleros et amènent un ou des sympathisants syndicaux à l'intérieur de l'usine devant les travailleurs et les tuent systématiquement sur place pour décourager les autres. Est-ce que la SEE s'assure que lorsqu'elle consent un prêt à une entreprise qui veut faire du commerce avec la Colombie, cette entreprise respecte à tout le moins les valeurs canadiennes sur le marché international, ou est-ce que vous vous contentez de consentir des prêts et de vous assurer d'être remboursés?

• 0940

[Traduction]

M. A. Ian Gillespie: Notre métier consiste à consentir des prêts à des entreprises viables, que ce soit en Colombie ou ailleurs. Nous observons toutes les diligences exigées pour évaluer les risques que comporte un prêt à ces débiteurs, et nous sommes seulement une institution financière. Il y a des limites à ces diligences, pour toute situation donnée. Je ne crois vraiment pas pouvoir préciser davantage.

[Français]

M. Benoît Sauvageau: Je vous remercie, monsieur le président.

[Traduction]

Le président: Madame Barnes.

Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.): Je vous remercie.

Je vous souhaite la bienvenue, et je vais m'en tenir strictement à l'objectif de la séance de ce jour. Jusqu'à tout récemment je représentais l'Université Western Ontario. Mon époux est diplômé de cette même école de hautes études commerciales.

Je vais vous poser une question sur ce que je considère comme un domaine négligé de l'esprit d'entreprise et des exportations, domaine qui bénéficie maintenant de l'attention du gouvernement, comme en témoigne le voyage à Washington, au cours des prochaines semaines, de notre ministre du Commerce et de toute une délégation de femmes exportatrices. C'est là une première qui mérite d'être signalée. J'aimerais savoir comment votre société et comment vous—dans vos projets à la tête de la SEE—allez procéder pour activement contacter les femmes chefs d'entreprise et leur offrir vos services. De nombreuses études sont là pour prouver qu'il ne s'agit pas là simplement d'une problématique homme-femme, mais que c'est une question commerciale.

Je voudrais simplement vous citer des statistiques que la plupart des gens connaissent à présent: l'étude de la Banque de Montréal constate qu'environ un tiers des entreprises canadiennes ont à leur tête une femme, et que ces femmes, propriétaires ou associées, etc., d'entreprises, emploient environ 200 000 personnes de plus que les 100 principales entreprises canadiennes. Vous voyez donc quel est le rôle que joue dans l'emploi ce tiers. Certaines d'entre elles sont déjà activement engagées dans les exportations, mais d'autres ont encore besoin d'être guidées et encouragées.

J'ai examiné vos chiffres sur la représentation des femmes au sein de votre société, et je constate qu'il y a là environ 48 postes occupés par des femmes, et une dizaine dont je ne suis pas sûre, un prénom comme «Jean» ne permettant pas de savoir s'il s'agit d'un homme ou d'une femme. Cela représente environ 20 p. 100 de vos effectifs. J'aimerais savoir si le fameux plafond de verre existe dans votre organisation. Quant à votre conseil d'administration—et je reviendrai là-dessus avec d'autres organismes, dans mon propre gouvernement—sur 14 membres il y a deux femmes.

Cette question me tient fort à coeur, car elle est importante pour l'économie du Canada. Nous sommes un pays de commerçants, et je pense qu'un grand nombre de femmes chefs d'entreprise ne sont probablement pas aussi lancées qu'elles devraient et pourraient l'être. Nos organismes gouvernementaux ont un rôle à jouer dans lequel l'initiative leur appartient, et j'aimerais connaître votre point de vue personnel sur cette question, la façon dont vous la comprenez et ce que vous comptez faire au sein de votre société pour y remédier.

M. A. Ian Gillespie: Je vous remercie de ces questions; j'ai pris note de la plupart d'entre elles.

Il y aura deux membres de la SEE qui participeront à la délégation qui va à Washington. Nous aidons en fait à la financer, car nous en sommes l'un des principaux commanditaires.

Quant aux programmes d'extension, d'une façon plus générale, nous n'avons jusqu'à présent jamais fait de différence entre les hommes et les femmes propriétaires d'entreprise. Nous nous inspirerons certainement de l'expérience acquise au cours de notre prochaine mission à Washington pour mieux comprendre les besoins des femmes, dans la mesure où ils sont liés aux programmes de la SEE, et pour mieux déterminer comment nous pouvons être plus utiles et plus concrets dans ce domaine.

À l'heure actuelle nous n'avons pas de programmes officiels visant plus particulièrement les femmes, et, comme je le disais, si nous constatons qu'il y a là une lacune et qu'il convient de mieux répondre aux besoins spécifiques de ces clientes, c'est certainement une question sur laquelle nous nous proposons de nous pencher.

• 0945

Environ la moitié de nos effectifs sont des femmes; je ne sais plus au juste s'il s'agit de 49 ou de 51 p. 100.

Quand nous embauchons du personnel nous veillons à équilibrer les effectifs. Chaque année notre société organise un vaste programme de recrutement dans les universités, où nous embauchons des diplômés en commerce, en administration commerciale ou autres. À l'embauche nous recherchons une juste représentativité des sexes, de même que des langues, et en matière de langue nous ne prenons pas simplement en compte le français et l'anglais. La SEE doit être très au courant de certaines questions liées aux diversités culturelles. Nous sommes exportateurs, en un sens, et nous avons affaire à un grand nombre de pays; c'est pourquoi nous devons avoir un complément de personnel pratiquant un certain nombre de langues.

Quant au soi-disant plafond de verre, je crois pouvoir affirmer qu'il n'existe pas à la SEE. C'est un fait que nous n'avons que 20 p. 100 de femmes dans des postes de cadre: il doit y avoir des raisons historiques à cela, mais si vous examinez la répartition des hommes et des femmes dans nos programmes de recrutement et à un niveau plus avancé, vous constaterez que les femmes sont en nombre croissant; cela ne fait aucun doute. Le fait qu'elles constituent actuellement 50 p. 100 des effectifs de notre organisation signifie que ce nombre est en hausse.

Il y a certainement des questions auxquelles nous sommes très sensibles, et j'espère que lorsque nous nous retrouverons— peut-être d'ici à un an—nous pourrons revoir ces chiffres avec vous.

Mme Sue Barnes: Dans ma circonscription, l'automne dernier, j'ai reçu des représentants de la SEE et de la BDC; les représentants de notre centre d'affaires m'ont aidée à parrainer une séance d'une demi-journée organisée dans ma circonscription à l'intention des chefs d'entreprise, petites et grandes. Cette initiative a été très efficace et bien accueillie. Je crois qu'il convient de développer ces programmes d'extension non seulement à l'intention des grandes entreprises, ce que vous faites déjà, mais également à l'intention des petites entreprises.

C'est ainsi que dans ma région nous avons de petits producteurs de sirop d'érable qui exportent à présent.

Dans les régions il convient de faire preuve de dynamisme; nous en sommes les représentants, nous voulons vous aider à organiser des initiatives de ce genre. Nous avons parfois établi des contacts avec des gens que nous connaissons—en particulier dans les collectivités culturelles, où nous sommes très actifs—mais ce sont des gens que vous ne pourriez pas atteindre, vous. C'est là l'un des avantages du Canada.

Dans cette initiative j'ai rencontré des obstacles, en particulier ces groupes d'affaires locaux qui ont essayé de m'en dissuader en me disant que je serais déçue, que je ne pourrais pas faire se rencontrer ces intervenants. Eh bien, les faits ont démenti ces prévisions: ceux que j'ai réussi à faire venir sont meilleurs que les intervenants traditionnels, qui croient pouvoir se débrouiller tout seul sans établir de partenariats dans la collectivité.

Je sais que vous assistez aux foires commerciales et que vous travaillez de concert avec Industrie Canada et autres, parce que les communautés ont besoin de ces ateliers de formation proactive, auxquels participent non seulement les gens d'affaires, mais également les représentants locaux. Vous constateriez, si vous faisiez une enquête, que ce genre d'initiative a été fort bien accueillie, parce qu'il ne s'agit pas d'une question politique, au sens étroit du mot, mais d'une question économique pour nos circonscriptions.

En outre vous trouverez une ressource qui à mon avis est négligée. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

M. A. Ian Gillespie: Merci beaucoup. Je crois que c'est une suggestion fort intéressante. Il n'y a aucun doute, comme je l'ai dit dans ma déclaration tantôt, que nous devons augmenter le nombre de PME exportatrices dans notre pays. Nous ne sommes que 75 000, et pourtant il y a plus d'un million de PME.

Vous aimerez peut-être savoir que, au cours des neuf premiers mois de cette année, nous avons expédié quelque 46 000 envois postaux à quelque 32 000 exportateurs potentiels au Canada dans le but de leur expliquer les services de la SEE et comment on peut les aider. Un envoi postal supplémentaire sera expédié lors du quatrième trimestre. Notre taux de réponse est au-dessus de la moyenne; alors nous sommes très encouragés.

• 0950

Le président: Monsieur Brison.

M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Merci.

Je vous remercie d'avoir comparu aujourd'hui, monsieur Gillespie. Vos antécédents, votre expérience au sein de la société Wood Gundy ainsi que votre éducation se prêtent bien aux activités des services bancaires d'investissement. En tant qu'homme d'affaires j'ai énormément de respect pour certains volets de la SEE, et j'envisagerais sans doute la possibilité de devenir actionnaire s'il s'agissait d'une société privée.

Les conséquences relatives aux droits de la personne et à l'environnement sont très importantes. En raison du déclin du rôle de l'État-nation au niveau international, nous comptons de plus en plus sur la capacité de notre secteur privé d'effectuer, au nom du Canada, des changements sur la scène internationale dans les domaines des droits de la personne, de la politique environnementale, pour en nommer quelques-uns.

La SEE est un organisme de la Couronne, et alors on s'attend à ce que votre organisme soit plus au courant de ces critères, et non pas le contraire. Je crois que le gouvernement du Canada désire, entre autres choses, que les intervenants du secteur privé s'engagent dans cette lutte continue visant à améliorer le sort des pays à titre individuel et à titre global.

Vous avez indiqué qu'il existe des critères quant aux droits de la personne et à l'environnement, mais je crois que votre réponse à la question soulevée par M. Sauvageau était un peu contradictoire.

Permettez-moi de vous poser une question. Pourriez-vous me donner un exemple d'une transaction que vous avez refusée en raison d'une question concernant les droits de la personne ou l'environnement?

M. A. Ian Gillespie: Une transaction que nous avons refusée en raison des droits de la personne? Eh bien, nous ne pouvons ni accorder de prêts ni fournir de l'assurance à plusieurs pays dans le monde en raison de leur politique gouvernementale. Nul doute que cela a beaucoup à voir avec les droits de la personne; alors nous ne pouvons pas dès le départ participer à ces transactions.

Quant à l'environnement, j'aimerais faire quelques observations. Nous examinons cette question très sérieusement et de plusieurs points de vue. Nous sommes une institution financière et nous devons, au bout du compte, examiner la solvabilité du projet pour s'assurer qu'il s'agit d'un projet qui a du bon sens et que le pays va pouvoir respecter ses obligations et nous rembourser à la date d'échéance. Si le projet n'est pas faisable, s'il n'est pas conçu selon les normes ou selon les lois du pays hôte, ou si nous avons l'impression qu'il s'agit d'un projet qui pourrait être vulnérable aux changements d'attitudes au fil du temps, nous pouvons choisir soit de ne pas y participer, soit de le faire modifier d'une certaine façon.

Cependant, quand il s'agit de l'environnement, il est évident que les entreprises canadiennes figurent parmi les plus responsables du monde. Il est clair que le but de ces entreprises, c'est de vendre une technologie de pointe qui améliorera la situation d'un bon nombre de ces pays. En appuyant ces entreprises qui possèdent cette technologie de pointe, nous aidons également de façon directe certains de ces pays où nous faisons affaire.

M. Scott Brison: Lorsque je vous ai parlé de l'environnement, je ne voulais pas dire le milieu socio-économique ou la capacité d'un pays ou d'un organisme de rembourser; je vous parlais de l'environnement et de son impact sur le milieu naturel. C'est une préoccupation planétaire.

• 0955

Quatre-vingt-cinq pour cent de vos clients sont des petites et moyennes entreprises. Quel pourcentage de votre portefeuille, exprimé en dollars, représentent-elles?

M. A. Ian Gillespie: Environ 20 p. 100. Quatre-vingt-cinq pour cent de nos clients sont des PME. Cette année, environ 20 p. 100 de nos dépenses seront sous forme de soutien à ces entreprises.

M. Scott Brison: D'accord. La banque américaine Ex-Im n'est pas autosuffisante. Il est intéressant de noter que le Canada est très tolérant envers—et ce n'est pas nécessairement une bonne chose—les sociétés d'État qui ne sont pas très rentables. Les Américains sont beaucoup moins tolérants à cet égard.

En quoi les critères diffèrent-ils, surtout aux États-Unis? Pourquoi les gens sont-ils si tolérants? Est-ce une question de politique étrangère plutôt que la façon de faire de votre organisme?

M. A. Ian Gillespie: Je ne peux pas vous dire pourquoi la banque américaine Ex-Im fonctionne de cette façon. Nous croyons que le meilleur modèle du monde est celui de la SEE, un modèle unique en son genre pour les organismes de crédit à l'exportation.

De façon générale, les Français, les Italiens, les Britanniques ainsi que les Allemands ont presque toujours vu leurs organismes de crédit à l'exportation perdre beaucoup d'argent. Peut-être croient-ils que ces organismes peuvent servir de mécanismes de création d'emplois. Je l'ignore. Nous pensons que l'expérience canadienne est la meilleure. Nous avons des bases très solides. Nous sommes financièrement autonomes. Nous pouvons générer à l'interne les ressources requises pour accroître notre capacité. Je crois que cette capacité est dans le meilleur intérêt à long terme des exportateurs canadiens.

M. Scott Brison: La banque Ex-Im ne toucherait pas au projet des Trois-Gorges, et au Canada l'ACDI n'a pas appuyé ce projet non plus. D'ailleurs, il y a quelques années, le ministre de l'Environnement a vertement critiqué toute participation de la part de la SEE ou de l'ACDI ou tout soutien du projet des Trois-Gorges en raison des critères environnementaux et des droits de la personne.

Bien des Canadiens estiment qu'ici, au Canada, le projet serait inadmissible, car il ne respecterait pas nos propres critères en matière de droits de la personne et d'environnement. Et pourtant une société d'État canadienne aide à le faire démarrer dans un autre pays.

Le problème, c'est que nous enverrions le mauvais message au moment même où nous essayons d'encourager les joueurs du secteur privé n'ayant aucun lien direct avec le gouvernement à faire valoir une politique étrangère positive. Nous avons des agences telles que l'ACDI qui se dirigent dans une direction, tandis que la SEE fait tout à fait l'inverse.

J'aimerais entendre votre opinion sur le projet des Trois-Gorges et savoir pourquoi nous y participons, alors que la banque américaine Ex-Im et l'ACDI ne l'appuient pas.

M. A. Ian Gillespie: Encore là, nous suivons la politique du gouvernement canadien pour ce qui est du projet des Trois-Gorges.

Pour ce qui est de la banque américaine Ex-Im, je ne peux que conjecturer. Elle n'a pas encore dit non, mais elle n'a pas encore dit oui. Les Français, les Allemands, les Japonais et les Britanniques veulent tous participer au projet; alors on pourrait en tirer certaines conclusions concernant les vraies intentions des Américains. Le gouvernement canadien a examiné le projet et appuie notre participation.

M. Scott Brison: Étant donné que plusieurs de ces prêts nécessitent des délais d'exécution assez longs et comportent beaucoup d'incertitude, à quel moment le Conseil des ministres est-il informé d'une demande prévue d'utilisation de fonds canadiens? Quel serait l'échéancier typique pour ce genre de projet?

• 1000

M. A. Ian Gillespie: Le Compte du Canada à l'heure actuelle n'est pas très actif. On ne l'utilise vraiment que pour de très grands projets qui créeraient un déséquilibre dans le portefeuille de la SEE, étant donné que nous avons des avoirs d'environ 1,5 milliard de dollars.

Aussitôt que nous aurions une transaction possible qui pourrait intéresser le Canada, mais qui serait au-delà des moyens de la SEE, étant donné la taille et l'état de son bilan, nous demanderions conseil au gouvernement.

M. Scott Brison: Alors vous puisez de moins en moins dans le Compte du Canada.

M. A. Ian Gillespie: Oui.

M. Scott Brison: Par le passé vous avez réagi en conformité avec la politique étrangère du Canada et vous avez réagi en vous fiant de moins en moins aux politiques gouvernementales, mais maintenant vous n'allez plus puiser dans le Compte du Canada, ce qui vous donne une plus grande marge de manoeuvre pour poursuivre les propres intérêts de votre organisme. Vous n'avez plus à compter sur le Compte du Canada.

M. A. Ian Gillespie: Il est évident que nous ne devons plus compter autant sur le Compte du Canada, mais la SEE est quand même un instrument de politique gouvernementale. Nous sommes régis par la Loi sur l'expansion des exportations et par les politiques gouvernementales lorsque ces dernières s'appliquent à nos activités.

M. Scott Brison: Plusieurs de vos transactions sont très semblables à celles d'une banque mondiale d'investissement, par exemple.

Nous avons des joueurs au Canada; vous avez mentionné Wood Gundy. L'an dernier, Wood Gundy était le septième assureur aux États-Unis, et beaucoup de sociétés américaines et canadiennes comptent sur les joueurs du secteur privé.

Le rôle de la SEE devient de plus en plus vague et nébuleux. La SEE ne pourrait-elle pas être une société privée, étant donné son mandat actuel? En effet, on pourrait sans doute dire qu'il existe des sociétés privées qui tiennent davantage compte de l'environnement lors des prises de décisions concernant les investissements, puisque leurs clients exigent que les critères de l'environnement et des droits de la personne soient respectés. Leurs investissements sont plus étroitement liés à ce genre de critères que ne le sont les vôtres.

M. A. Ian Gillespie: La question de la privatisation est très intéressante à plusieurs égards. Nous pensons que la force de la SEE réside dans le fait que nous avons plusieurs experts sous un même toit. D'ailleurs, elle bénéficie des meilleurs experts financiers au Canada.

Nous oeuvrons de façon très efficace dans plusieurs domaines. Nous faisons des opérations de prêt, des transactions d'assurance, nous offrons des cautions, nous faisons des investissements à l'étranger. Nous croyons qu'il existe une grande synergie dans nos efforts visant à répondre aux besoins des clients canadiens si nous offrons une telle gamme de solutions. Si vous songez à privatiser la SEE, il faut d'abord songer aux avantages en termes d'efficacité.

Les coûts administratifs de la SEE en pourcentage du revenu net se chiffrent à 14 p. 100, si on utilise la même proportion que les banques utilisent dans leurs rapports annuels. Les coûts administratifs des banques se chiffrent à environ 60 p. 100. Bien sûr, les banques ont tout un réseau de succursales régionales, etc.; toutefois, je ne crois pas que les banques pourraient offrir la même qualité de services que la SEE pour le même coût.

Comme vous le savez sans doute, le personnel de la SEE est sous-payé, et privatisé... ce serait beaucoup mieux dans le secteur privé. Ce sont des bonnes nouvelles pour les employés, mais des mauvaises nouvelles pour les clients, parce que les coûts pourraient augmenter subitement, et les exportateurs deviendraient donc moins concurrentiels.

Nous travaillons déjà beaucoup avec le secteur privé. Nous avons des liens avec la Northstar Trade Finance. Nous avons des liens avec les banques lorsqu'il s'agit de financer certains programmes d'assurance. Alors nous collaborons beaucoup avec les institutions financières canadiennes et d'autres institutions financières internationales.

• 1005

Nous pouvons assumer énormément de risques, plus qu'une seule institution financière ne pourrait en assumer, et nous avons également toute une expertise.

Si vous vouliez démanteler la SEE, si c'est cela l'idée de la privatisation, ou la vendre à quelqu'un d'autre, vous auriez beaucoup de difficulté à trouver quelqu'un qui voudrait oeuvrer dans 200 pays du monde. Qui voudrait maintenir ce genre d'expertise financière assez unique?

Le but du Canada est de s'assurer que nous avons un avantage concurrentiel pour les exportateurs canadiens, et non pas seulement des règles du jeu équitables. Il faut le faire dans certaines situations, mais nous devons accroître le nombre d'exportations canadiennes. Il s'agit vraiment de créer un avantage concurrentiel. Cela veut donc dire la capacité d'assumer des risques, l'expertise, ainsi qu'une capacité de réagir extrêmement vite.

Nous croyons que c'est pour cette raison que la SEE est véritablement un cas de réussite canadienne unique. Nous avons un juste équilibre entre des disciplines du secteur privé, le cadre analytique des disciplines commerciales et un mandat de politique publique très vigoureux. Je crois qu'en chamboulant tout cela on ne contribuerait pas à maintenir la croissance que nous connaissons depuis un certain nombre d'années, croissance à laquelle les exportateurs canadiens ont pu participer.

Ce que je vais dire peut avoir l'air d'une déclaration intéressée, mais il faut examiner ce que fait le SEE et qui profite de nos activités. Les revenus nets que nous générons font partie des revenus nets qui sont recyclés dans des activités à risque plus élevé, dans des transactions de plus en plus nombreuses.

Un de nos domaines d'activité les plus importants est celui des marchés à risque élevé et l'analyse que nous en faisons. Ce n'est pas un domaine qui attirerait une institution financière commerciale traditionnelle sans qu'elle bénéficie de beaucoup d'appui financier du gouvernement, et, dans ce cas-là, est-ce que cela en vaut la peine?

Le président: Merci beaucoup.

Monsieur Reed.

M. Julian Reed: Merci beaucoup.

Bienvenue, monsieur Gillespie. Nous sommes heureux de pouvoir apprendre certaines choses ici ce matin.

J'ai une question concernant les autres banques d'expansion des exportations à travers le monde qui ne s'autofinancent pas. Seriez-vous d'accord avec moi pour dire que le fait que ces banques puisent régulièrement dans les coffres de l'État serait considéré comme une attribution de subventions directes aux exportateurs?

M. A. Ian Gillespie: Il serait plutôt difficile de prétendre que ce n'est pas le cas. Ou ils n'analysent pas assez bien les risques et subissent donc trop de pertes, ou ils n'établissent pas bien les taux en fonction des risques, ce qui est plus probable. Si vous n'établissez pas le taux en fonction des risques, ou si vous sous-estimez les risques, on peut se demander s'il s'agit d'une transaction commerciale ou pas.

C'est pour cette raison que nous croyons mieux servir les intérêts des exportateurs canadiens en faisant fructifier nos capitaux. Cela crée un contexte beaucoup plus durable et beaucoup plus sain, qui nous permet d'évaluer les compagnies avec lesquelles nous faisons affaire.

En faisant fructifier le capital, nous pouvons réagir beaucoup plus vite que certaines des autres agences de crédit à l'exportation, qui, en raison du problème auquel vous avez fait référence, travaillent dans un contexte beaucoup plus structuré. Elles trouvent donc plus difficile d'agir avec la vitesse, l'adresse et l'approche novatrice de la SEE. Il s'agit d'un modèle totalement différent.

Notre plus gros problème, c'est que certaines des autres agences de crédit à l'exportation commencent à devenir carrément jalouses de la SEE, en raison de sa méthode de travail et de son modèle unique.

Le président: Est-ce que je peux vous interrompre une seconde, monsieur Reed?

M. Julian Reed: Je m'excuse. Oui.

Le président: Techniquement parlant, si on pense à la législation commerciale plutôt qu'aux simples perceptions générales sur la question des subventions, ce n'est pas une subvention, à moins que les taux offerts ne soient très différents des taux commerciaux ordinaires. N'est-ce pas vrai?

• 1010

Il s'agit peut-être d'une subvention à certains égards, mais en ce qui concerne les subventions compensatoires, c'est une subvention seulement si le taux n'est effectivement pas soutenable. N'est-ce pas?

Je sais bien que vous n'êtes pas membres du TCCE; donc...

M. A. Ian Gillespie: Non, c'est vrai.

Toute la question soulève un débat assez intéressant. Il serait peut-être bon d'en discuter à un autre moment. Dans le cadre de l'arrangement par consensus de l'OCDE, on reconnaît clairement qu'il faut devenir plus rigoureux afin de pouvoir bien évaluer les risques qui existent dans certains de ces marchés. Il n'y a aucun doute qu'à un moment donné ces institutions sous-évaluaient certains des risques réels.

Plusieurs des difficultés qu'elles éprouvent sont en fait le résultat de gestes posés par le passé. Vous accordez un prêt pour 10 ans et vous devez vivre avec les conséquences de ce prêt. Alors elles essaient de s'éloigner de cela. Il est très clair que toute leur stratégie actuelle repose là-dessus.

Nous sommes dans une position très confortable, si je puis m'exprimer ainsi, en ce sens que notre approche n'a jamais été d'essayer de subventionner afin d'obtenir des clients. Nous avons pris nos clients en tenant compte du risque que nous acceptions, et cela nous a très bien servis.

M. Julian Reed: Cette évaluation du risque détermine-t-elle le niveau de passif éventuel que vous incorporez dans vos projections futures? De toute évidence, un faible pourcentage ne fonctionne pas pour vous. Vous devez prévoir ces éventualités. Le faites-vous uniquement par le biais du taux d'intérêt que vous fixez selon le risque, ou y a-t-il une réserve pour pertes inscrite dans votre comptabilité?

M. A. Ian Gillespie: Si j'ai bien compris votre question, lorsque nous examinons des transactions individuelles, nous essayons d'évaluer les risques inhérents à une transaction donnée et nous nous assurons que le taux d'intérêt fixé est suffisant pour couvrir ce risque inhérent.

Il y a effectivement deux éléments lorsqu'on étudie le risque. L'un est la probabilité de non-remboursement et l'autre est la gravité du risque associé à ce non-remboursement. Dans certains cas—et je prends ici un exemple hypothétique—il pourrait y avoir une probabilité de 100 p. 100 de non-remboursement, mais aucune probabilité ou gravité du risque associé à ce non-remboursement. Donc il peut s'agir tout simplement du fait que l'emprunteur doit trouver un nouvel échéancier pour rembourser ses obligations, mais vous allez quand même recevoir le plein montant avec intérêts, plus les intérêts de retard. C'est quelque chose qu'on peut facilement accepter.

Les difficultés se présentent lorsque vous accordez un prêt et que l'emprunteur ne peut absolument pas rembourser à aucune condition. À ce moment-là, vous devez avaler la pilule. Ce sont ces prêts-là qui peuvent vraiment miner votre base de capital plutôt que de vous permettre de la voir s'accroître. Donc, nous fixons nos taux d'intérêt de façon à avoir des bénéfices suffisants pour couvrir les risques inhérents aux transactions individuelles. Pour ce qui est du portefeuille complet, cela nous assure que nous générons suffisamment d'argent pour créer un surplus qui peut être utilisé pour augmenter la capacité de risque de l'organisme.

S'il advenait une crise mondiale inattendue, pour utiliser un exemple extrême, c'est votre base de capital qui entrerait en jeu, ainsi que vos provisions pour pertes sur prêts et vos assurances comme dernier recours. D'abord et avant tout, vous devez évaluer correctement les risques individuels pour chaque transaction.

M. Julian Reed: Merci.

Le président: Voyons voir si je peux compléter la question de M. Reed. Une banque normale, évidemment, établit des réserves pour les prêts qui sont douteux, mais surtout pour des fins fiscales, puisqu'on doit créer une taxe. Puisque vous ne payez pas d'impôt, est-ce que vous créez des réserves afin que vous puissiez alors calculer vos bénéfices avec exactitude? Je ne peux pas passer en revue tous les comptes ici. Avez-vous des réserves importantes?

M. A. Ian Gillespie: Oui, nous en avons. Nous avons une réserve qui se situe maintenant à peu près au même niveau que nos bénéfices non répartis. Il s'agit d'environ 1,5 milliard de dollars de réserves de prêts.

• 1015

Le président: Les critères pour mettre de côté ces 1,5 milliard de dollars... il y aurait un barème du total des prêts non recouvrables, et peut-être 50 p. 100 des non recouvrables, etc., dans votre compte de réserve. Il s'agit encore une fois de données historiques.

M. A. Ian Gillespie: On retrouve cela dans les notes. C'est environ 1,5 milliard de dollars.

Nous devons prévoir les facteurs inattendus. Nous ne sommes pas dans les affaires pour financer les faillites inévitables; nous sommes dans les affaires pour accorder des prêts qui seront remboursés selon nous. Évidemment, on ne peut avoir raison tout le temps. Nous devons prévoir des éventualités. Nous devons prévoir l'inattendu. C'est pourquoi ces provisions pour pertes sur prêts existent.

Notre approche a toujours été très vigoureuse du côté des risques, mais très conservatrice du côté de la comptabilité. C'est également dans l'intérêt des actionnaires. Nous tenons une comptabilité financière très prudente en raison de la nature très risquée de nos activités.

Les provisions pour pertes sur prêts que vous voyez, les revenus nets auxquels j'ai fait allusion, viennent après des provisions très importantes pour risques. Ce ne sont pas des pertes réelles. Ce sont des sommes qui sont indiquées pour tenir compte des imprévus, compte tenu de l'évolution dynamique qu'on connaît à l'heure actuelle.

On n'a qu'à regarder ce qui s'est passé au Mexique il y a quelques années, ou en Thaïlande ou en Asie du Sud-Est aujourd'hui, pour savoir que la situation peut évoluer très rapidement. La SEE doit continuer à appuyer les exportateurs pendant tous ces bouleversements. Ce n'est possible que si on a des provisions suffisantes pour les risques qu'on assume, si on a envisagé la possibilité que certaines de ces situations imprévues pourraient entraîner des problèmes.

Le président: Merci beaucoup.

Monsieur Grewal.

M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Réf.): Merci, monsieur le président.

Monsieur Gillespie, je tiens à vous féliciter de votre nomination à ce poste. J'ai examiné votre curriculum vitae et j'ai été extrêmement impressionné par tout ce que vous avez fait depuis 20 ans, et les postes importants que vous avez occupés au sein de plusieurs organismes.

Je trouve que vos qualités sont également impressionnantes. Il n'y a que cinq députés à la Chambre qui ont une maîtrise en administration des affaires, et j'en suis un. Je comprends donc votre point de vue.

J'espère que vous saurez améliorer et la rentabilité et l'imputabilité de la SEE.

Je sais que vous avez déjà répondu à une question posée par un de mes collègues au sujet de la privatisation de la SEE. Nous savons que depuis une décennie la Grande-Bretagne et la Nouvelle-Zélande ont privatisé leurs organismes gouvernementaux d'exportation. La tendance au Canada est peut-être de privatiser beaucoup des organismes du secteur public, sinon immédiatement, du moins dans l'avenir. La Société pour l'expansion des exportations est peut-être un de ces organismes.

Comment pouvons-nous renforcer les PME au Canada afin de réduire la paperasserie et faciliter les exportations? Comment peut-on mettre à contribution la synergie qui existe au sein de la SEE et comment, plus tard, peut-on encourager les PME à devenir plus indépendantes et plus capables de fonctionner dans le secteur privé? Quelles sont vos opinions là-dessus?

M. A. Ian Gillespie: Si j'ai bien compris votre question, vous voulez savoir ce que la SEE peut faire pour les petites et moyennes entreprises afin de continuer...

M. Gurmant Grewal: Oui. Par exemple, dans l'ouest du Canada, d'où je viens, à mon avis la SEE n'encourage pas beaucoup de petites entreprises qui sont capables de faire des exportations. Elles ne connaissent pas très bien la SEE.

Quels efforts fait-on pour informer ces petites entreprises, pour les familiariser avec les services de la SEE ou pour les aider à utiliser les services de la société pour améliorer leurs activités?

M. A. Ian Gillespie: J'ai dit un peu plus tôt que pendant les neuf premiers mois de l'année la SEE avait envoyé environ 40 000 lettres à quelque 32 000 PME du pays pour leur expliquer ce que la société peut faire pour elles.

• 1020

Il y a un autre point qui n'est pas très bien connu, mais j'y ai fait allusion dans mon exposé. La SEE a le plus important programme d'appui aux PME de tous les organismes du gouvernement fédéral. Je pense que ce fait est peu connu. Quatre-vingt-cinq pour cent de nos clients sont des PME, et nous voulons faire accroître le nombre de ces clients. Ces envois, les activités de nos bureaux régionaux et certaines de nos autres activités font que nous travaillons de très près avec les banques canadiennes de plusieurs façons pour essayer de faire accroître le nombre de nos clients qui sont des PME. Nous avons déjà réussi à accroître leur nombre de façon assez considérable.

Nous avons également investi beaucoup dans certaines technologies qui visent à nous permettre de répondre aux besoins en matière d'exportations des petites et moyennes entreprises par l'intermédiaire des numéros 1-800. Les entreprises n'ont qu'à appeler pour obtenir une police d'assurance immédiatement, ou pour obtenir l'approbation de demandes de crédit immédiatement.

Au cours des réunions de l'APEC qui ont eu lieu pendant cette année—et il y a environ un mois il y a eu une semaine de la PME et de l'APEC à Ottawa, comme plusieurs d'entre vous le savent—il a été assez clair que l'expérience de la SEE dans le domaine de l'analyse informatisée des demandes de crédit et dans celui de la documentation simplifiée est considérée comme étant la meilleure dans cette catégorie parmi les autres établissements de l'APEC et de la CEA.

Nous essayons donc de faire connaître de plus en plus la SEE et ses programmes. Nous faisons appel à des technologies novatrices en ce qui concerne l'analyse du crédit pour réagir le plus rapidement possible, faire connaître nos services et encourager les compagnies canadiennes à exporter. De toute évidence, l'exportation n'est plus une option pour les petites et moyennes entreprises.

M. Gurmant Grewal: L'autre question porte sur les marchés en bordure du Pacifique. Parmi les pays en bordure du Pacifique, on connaît les sept tigres, dont le taux de croissance est le double de celui du Canada.

Le président: Jusqu'à il y a un mois.

M. Gurmant Grewal: Oui, vous devez avoir raison, mais même après l'effondrement de la bourse, ils doivent toujours avoir un taux de croissance double de celui du Canada. Peut-être que dans deux semaines les choses se seront calmées, cela pourrait être pire, mais nous ne pensons pas que ce soit pire.

Il y a donc, parmi les pays en bordure du Pacifique, ces sept fameux tigres. Quand on considère la situation géographique du Canada, en particulier la partie ouest, on comprend à quel point nous sommes situés stratégiquement pour devenir un huitième tigre. Dans l'avenir, au cours des décennies prochaines, je pense que les pays en bordure du Pacifique vont devenir le principal marché mondial.

À votre avis, quelles sont les trois choses les plus importantes que le Canada pourrait faire pour renforcer sa position, et je pense en particulier à l'Ouest du Canada à cause des immigrants qui arrivent dans cette région? L'année dernière, en 1996, la Colombie-Britannique a reçu plus d'immigrants que n'importe quelle autre province. Grâce aux ressources que représentent les immigrants, en particulier ceux qui viennent des pays d'Asie, grâce à leur culture, leur langue, toutes ces diversités, nous devrions pouvoir mieux nous placer pour augmenter ou favoriser le commerce avec ces pays-là.

Quelles sont à votre avis les trois choses que le Canada devrait faire en priorité pour renforcer sa position et pour que la Colombie-Britannique, ou l'Ouest du Canada, devienne le huitième tigre parmi les pays en bordure du Pacifique? À quel marché niche le Canada doit-il s'attaquer au cours de la prochaine décennie?

M. A. Ian Gillespie: Comme je l'ai dit un peu plus tôt, il est intéressant de noter qu'en 1990 la SEE contribuait à environ 6 milliards de dollars d'exportations canadiennes. Cette année, ce chiffre va passer à 27,5 milliards de dollars, et même peut-être plus. Cette croissance exemplaire s'est accompagnée d'une croissance exponentielle des débouchés pour les compagnies canadiennes, une croissance encore plus rapide que ce taux ne le ferait penser.

Il est certain que dans cette partie du monde les débouchés sont énormes. Il y a des débouchés en Amérique latine, des débouchés en Europe de l'Est, ou dans l'ancienne Europe de l'Est. Dans le monde entier, les occasions commerciales sont énormes. Nous sommes là pour fournir les services financiers nécessaires à ces exportateurs, partout où ils veulent s'implanter, nous sommes là pour les aider à conclure des marchés.

• 1025

Je ne réponds pas directement à votre question, c'est certain, mais la SEE doit absolument demeurer un organisme fort et solide, et il doit se doter des outils nécessaires, non seulement sur le plan financier, mais également sur le plan des ressources humaines. En effet, ce sont les gens qui concluent des marchés. Il est donc nécessaire de bien comprendre les risques, de les analyser, et de trouver des solutions créatrices. Voilà ce dont nous avons besoin pour donner la plus grande expansion possible aux exportations canadiennes.

Il est certain que nous commençons à agir dans ce domaine. Nous encourageons de plus en plus de compagnies à exporter. En fait, c'est une solution d'avenir pour la prospérité économique canadienne, car cela crée non seulement des emplois, mais c'est aussi évidemment une source de richesse. En fait, ce n'est pas forcément régional, car il y a tellement de possibilités que c'est à nous de mettre le moteur en route, et c'est ce que nous avons fait.

Le président: À ce sujet, vous pourriez consulter l'étude effectuée il y a deux ans par le comité et qui portait sur les exportations des petites et moyennes entreprises. Dans cette étude, il y a bien sûr un chapitre sur la SEE. Mais il y a également un chapitre sur le rôle des entrepreneurs immigrants, en particulier les nouveaux marchés qu'ils peuvent nous ouvrir, comme en Chine et dans d'autres pays d'Asie avec lesquels ils ont des liens culturels, linguistiques et familiaux, un avantage que n'ont pas les autres Canadiens. Nous sommes tous convaincus que c'est un talent à mieux exploiter.

Je sais que nous avons essayé d'organiser une ou deux réunions avec la SEE à Toronto pour essayer d'attirer les gens et de leur faire connaître les services que vous offrez. Monsieur Grewal, vous n'avez pas participé à la préparation de ce rapport, car vous n'étiez pas encore au Parlement, mais ce rapport pourrait vous intéresser.

M. Gurmant Grewal: Certainement.

Le président: Nous insistions justement sur les points que vous avez soulevés.

M. Gurmant Grewal: Si j'ai parlé de l'Ouest du Canada, c'est que d'ici une vingtaine d'années la Colombie-Britannique va devenir la deuxième province en importance, à cause de la forte immigration que nous avons dans la province, et, à mon avis, les ressources que représentent ces immigrants sont sous-utilisées. Le Canada pourrait mieux en profiter, faire un meilleur usage de ces ressources.

Mon autre question porte sur l'Équipe Canada. Lorsque l'Équipe Canada se rend à l'étranger, comme elle s'intéresse principalement aux exportations, est-ce que vous êtes appelés à jouer un rôle important? Ou bien encore, avez-vous l'intention de jouer un rôle plus important à l'avenir?

Ce qui est décevant, c'est qu'après de telles visites d'équipes ou de missions, dans certains pays—pas tous—les échanges commerciaux ont diminué au lieu d'augmenter. Cela a été le cas de l'Indonésie, entre autres. Je sais que d'autres facteurs sont peut-être entrés en ligne de compte, mais comment pouvons-nous augmenter l'efficacité de ces missions commerciales à l'étranger? Comment l'Équipe Canada peut-elle devenir plus efficace? Comment faut-il organiser les choses pour améliorer l'efficacité au lieu de la diminuer?

M. A. Ian Gillespie: Je ne sais pas très bien à quelles statistiques vous faites allusion quand vous dites que l'efficacité diminue.

M. Gurmant Grewal: L'Indonésie est un de ces exemples. Il y en a deux ou trois autres. Je ne me souviens pas de quels pays il s'agit, mais, si on consulte les statistiques, trois mois après la visite d'Équipe Canada on s'aperçoit que les échanges ont diminué. Au lieu d'augmenter, ils ont diminué.

M. A. Ian Gillespie: Pour notre part, nous avons pu constater que ces missions avaient remporté un très grand succès. La SEE a toujours participé à ces missions, auxquelles nous envoyons un certain nombre de personnes. Je dois moi-même participer à la mission qui doit se rendre au Mexique, au Brésil, en Argentine et au Chili au mois de janvier. Il y aura pour cette mission-là environ 400 ou 450 compagnies. Et ces manifestations sont excessivement importantes pour mieux faire connaître le Canada et pour offrir aux compagnies canadiennes des débouchés nouveaux.

Le président: Il est maintenant 10 h 30; c'est l'heure à laquelle nous avions prévu de terminer. MM. Sauvageau et Brison ont une question très courte à poser. Monsieur Grewal, avez-vous à peu près terminé?

M. Gurmant Grewal: Une question très courte.

Le président: Très rapidement. Nous espérons pouvoir terminer dans cinq minutes, car la liste est assez courte.

• 1030

M. Gurmant Grewal: Cette question porte sur la Export-Import Bank. Est-ce que la SEE joue un rôle d'intermédiaire parmi les PME, ou même parmi les grandes sociétés qui souhaitent se faire financer par la banque Ex-Im? Ou bien leur offrez-vous des services lorsque de petites ou moyennes entreprises souhaitent obtenir un financement ou autre chose de la banque Ex-Im?

M. A. Ian Gillespie: Je ne suis pas certain d'avoir bien compris votre question.

M. Gurmant Grewal: Je vous parle des rôles respectifs de la SEE et de la banque Ex-Im en ce qui concerne les PME. Je me demande comment ces trois éléments fonctionnent les uns avec les autres. En effet, je sais que la banque Ex-Im organise beaucoup de choses et...

M. A. Ian Gillespie: Est-ce que vous parlez de la banque Ex-Im aux États-Unis?

M. Gurmant Grewal: Oui.

M. A. Ian Gillespie: Au sujet de?

M. Gurmant Grewal: Je vais le redire autrement. Est-ce que les PME ont un accès direct à la banque Ex-Im et à d'autres établissements financiers lorsqu'elles souhaitent emprunter, obtenir un financement?

M. A. Ian Gillespie: Je pense que dans l'ensemble ce type de programme est offert par des banques. Ce sont des programmes de type garantie. Pour sa part, la SEE offre un programme beaucoup plus direct, qui va directement aux PME. Quatre-vingt-cinq pour cent de nos 3 600 clients sont des PME avec lesquelles nous avons des relations directes. Aux États-Unis la structure est différente.

M. Gurmant Grewal: D'accord.

Le président: Merci.

Monsieur Sauvageau.

[Français]

M. Benoît Sauvageau: On avait suggéré au gouvernement canadien d'édicter un code de conduite volontaire pour les entreprises qui font du commerce à l'extérieur. Le gouvernement canadien n'a pas répondu à cette demande, mais des entreprises privées l'ont fait. J'oublie leur nom—peut-être que le président pourra m'aider à me rappeler d'autres noms—, mais je sais entre autres que Shell Canada figurait parmi les entreprises qui avaient émis un code de conduite volontaire qu'elles avaient annoncé l'été dernier.

Le gouvernement canadien a répondu qu'il n'obligerait pas ses sociétés d'État à adhérer à ce code de conduite volontaire. Je voudrais tout simplement vous demander votre opinion. D'abord, est-ce que vous en avez entendu parler? Est-ce que c'est sérieux? Il y a eu une conférence de presse. Est-ce que vous avez l'intention d'y adhérer ou d'encourager des entreprises que vous aidez à y adhérer?

[Traduction]

M. A. Ian Gillespie: Merci d'avoir posé cette question. Nous connaissons très bien le code dont vous parlez, et nous sommes entièrement d'accord avec ce principe. Nous sommes en train de déterminer si nous allons devenir signataire ou pas. Pour ce faire, nous devons nous pencher très attentivement sur les devoirs et les obligations que cela pourrait imposer à la SEE envers certains de ses clients dans le monde. Nous ne pouvons pas servir de police secrète pour les compagnies canadiennes qui travaillent à l'étranger. Dans le meilleur des cas, nous sommes seulement une arme secrète pour le Canada.

Quoi qu'il en soit, nous sommes pleinement d'accord avec les principes, mais nous n'avons pas encore pris de décision en ce qui concerne notre adhésion. Ce n'est pas que nous ne sommes pas d'accord avec les conditions, c'est seulement à cause de la structure du code. Il est possible que certains éléments de ce code ne concordent pas très bien avec nos méthodes commerciales dans certains marchés internationaux.

Le président: Monsieur Sauvageau?

[Français]

M. Benoît Sauvageau: Je ne pense pas qu'il y ait de problème à ce qu'une société de la Couronne du gouvernement canadien souscrive à un code de conduite qui fasse la promotion des valeurs canadiennes au niveau des exportations.

Le président: Monsieur Sauvageau, dans sa réponse, il disait clairement que la Société était toute disposée à accepter ses responsabilités, mais que si le code lui imposait l'obligation de faire la police en ce qui concerne tous ses débiteurs, ce serait tout à fait impossible.

M. Benoît Sauvageau: Dans ce cas-là, est-ce que vous pourriez faire part au comité de vos décisions concernant votre possible adhésion à ce code de conduite volontaire? Je ne sais pas si vous avez des délais et si vous prévoyez prendre cette décision dans deux, trois ou six mois, mais est-ce que vous pourriez faire connaître cette décision au comité? Je crois que ce serait intéressant. Je vous remercie.

[Traduction]

M. A. Ian Gillespie: Il sera intéressant de voir si ce code conservera exactement le mandat actuel ou si, avec le temps, un plus grand nombre d'entreprises commerciales y souscriront.

• 1035

Pour cette raison, j'hésiterais à vous dire exactement à quelle date nous sommes susceptibles de prendre cette décision. En effet, la SEE souhaitera peut-être attendre pour voir comment ce code évoluera avec le temps avant de devenir signataire.

Le président: Merci beaucoup.

Monsieur Brison.

M. Scott Brison: Merci encore pour votre indulgence ce matin. Nous l'apprécions beaucoup. J'ai une question très courte qui nous ramène à ce que M. Sauvageau disait.

Au sujet du code de conduite, nous avons assisté à un déclin très net de l'État-nation—c'est un phénomène mondial—et de plus en plus les États perdent leur influence sur ce qui se passe dans d'autres pays en ce qui concerne les droits de l'homme et les politiques environnementales. Nous avons besoin de la société pour mobiliser les protagonistes du secteur privé si nous voulons lier étroitement nos exigences en matière de droits de l'homme, notre politique étrangère et notre politique commerciale. Dans l'ensemble, c'est un rapport auquel les Canadiens tiennent et qui existe depuis toujours au Canada.

À mon avis, la SEE ne doit pas faire plus que nous en demandons aux sociétés privées, mais en sa qualité de société d'État elle doit au moins se conformer à ce que nous demandons aux sociétés d'État. C'est un code de conduite qui pourrait devenir un outil très utile pour notre politique internationale. Je suis convaincu que sans la coopération de la SEE, sans cet engagement, nous n'aurons pas la légitimité dont nous aurons besoin lorsque nous serons appelés à négocier avec Matthew Barrett, de la Banque de Montréal, ou avec David Hennigar, d'Extendicare, ou avec n'importe qui d'autre.

M. A. Ian Gillespie: J'apprécie cette observation. Il est certain que la SEE va devoir s'imposer, non pas seulement aujourd'hui, mais dans l'avenir, comme un organisme pleinement responsable à tous les égards. Évidemment, c'est un domaine qui nous intéresse particulièrement, et nous tenons à remplir toutes nos responsabilités.

Le président: Merci beaucoup.

M. Scott Brison: La société de consommation fait qu'on insiste de plus en plus pour que les compagnies respectent cette obligation morale. Même des compagnies comme Nike ont réagi, pas forcément parce qu'elles le voulaient, mais à cause des pressions exercées par les consommateurs. Là encore, en votre qualité de société d'État, vous avez des obligations envers le gouvernement du Canada, qui est en quelque sorte votre actionnaire. Nous agissons au nom des Canadiens, qui sont en réalité les actionnaires de la SEE. Nous sommes donc ici pour rappeler cette obligation.

Mais je vous remercie beaucoup pour votre indulgence.

M. A. Ian Gillespie: Merci.

Le président: Merci.

Madame Barnes.

Mme Sue Barnes: Merci beaucoup, monsieur le président.

Je vais me référer à l'un des paragraphes de la page 7 de votre rapport, où vous parlez des risques de l'exportation. Le plus souvent, les gens pensent que les seuls risques sont dans les pays en voie de développement, à cause de leur situation politique ou d'autres types d'instabilité. Or, 80 p. 100 des cas de non-paiement ou d'insolvabilité des acheteurs se trouvent aux États-Unis. J'aimerais savoir pourquoi il y a un tel risque dans ce marché, et également ce que votre organisme peut faire pour éviter cela.

M. A. Ian Gillespie: Le marché des États-Unis?

Mme Sue Barnes: Les cas d'insolvabilité et de défaut de paiement proviennent à 80 p. 100 des États-Unis, ce qui n'a jamais été considéré comme un risque élevé, pourtant la plupart des Canadiens se demandent pourquoi il faudrait commercer avec l'Afrique ou avec les nouveaux marchés. Que fait-on ou que peut-on faire pour atténuer les risques dans nos transactions avec les États-Unis?

• 1040

M. A. Ian Gillespie: Tout d'abord les sociétés canadiennes peuvent assurer leurs effets à recevoir de l'étranger auprès de la Société d'expansion des exportations ou se prévaloir des autres services financiers de la SEE, notamment de ses programmes de prêts.

Le plus curieux, c'est que toutes nos activités sont des activités à risque. Sur les 27 ou 28 milliards de dollars gagnés chaque année, toutes les transactions comportent un risque quelconque. Vous avez tout à fait raison de dire que les gens ont l'impression que seuls les nouveaux marchés comportent des risques. Ils en comportent, mais les marchés développés en présentent également. C'est notamment le cas du plus développé, celui des États-Unis.

Je crois que les sociétés canadiennes font parfois preuve de naïveté. On leur demande par téléphone d'expédier quelque chose à Cleveland et elles ne prennent même pas les précautions les plus élémentaires. Parfois, elles ne demandent même pas de rapport D & B. Elles expédient pour 1 000 ou pour 10 000 $ de marchandises, comme on le leur a demandé, et s'étonnent de ne pas être payées. Elles n'obtiennent pas de paiements pour diverses raisons: soit que la société acheteuse n'existe pas—au quel cas, il y a véritablement fraude—soit que l'acheteur ne veut simplement pas payer. C'est ce qu'on appelle un défaut de paiement. Le seul recours est d'intenter des poursuites. Le nombre de procès est très élevé aux États-Unis, et le problème, c'est qu'un procès pour obtenir un paiement coûte très cher. Le réveil est parfois brutal.

Ici aussi, les affaires sont rudes et il faut être sur ses gardes. C'est pourquoi les services proposés par la SEE me semblent particulièrement précieux.

Notre défi est de faire en sorte que l'ensemble des risques que nous prenons soit géré de telle sorte que les primes couvrent les mauvaises expériences que nous subissons. C'est un défi. Certains secteurs présentent des faiblesses notoires, et nous devons trouver les outils, notamment grâce à la technologie, pour garder en permanence la maîtrise des portefeuilles de façon à atténuer les risques dans toute la mesure du possible. L'exportateur bénéficie ainsi d'une politique d'assurance de la SEE qui couvre au moins 90 p. 100 du risque; il est donc presque intégralement protégé.

C'est une remarque très intéressante et...

Mme Sue Barnes: L'un de vos défis, c'est sans doute de faire l'éducation de nos exportateurs.

M. A. Ian Gillespie: Vous avez tout à fait raison.

Le président: Absolument.

Avant de terminer, pour en revenir à notre dernier rapport, monsieur Gillespie, les petites et moyennes entreprises nous ont parlé d'un problème qu'elles ont sur le marché américain en particulier: leurs banques font une différence entre les sommes à recevoir selon quelles proviennent des États-Unis ou du Canada, principalement à cause des facteurs de risque dont vous venez de parler. La banque ne sait pas si ses connaissances du marché de Chicago ou de Dallas s'appliquent de la même façon à notre marché et ne connaît donc pas la valeur des sommes à recevoir, ce qui a pour effet de réduire le fonds de roulement et le dynamisme de l'entreprise. La SEE pourrait-elle collaborer avec les banques canadiennes pour mettre en place un système grâce auquel les sommes à recevoir aux États-Unis seraient traitées de façon à ne pas entamer le fond de roulement des petites et moyennes entreprises? Il me semble que vous feriez ainsi une contribution extraordinaire à l'expansion de notre capacité d'exportation.

Le problème touche 80 p. 100 de nos exportations. C'est énorme. Lorsque les petites et moyennes entreprises ont comparu devant notre comité, elles nous ont affirmé très clairement que leur plus gros problème était le manque de capitaux et la difficulté d'accès aux capitaux, donc tout ce que pourra faire la SEE auprès des banques sera de la plus grande utilité.

Je voudrais laisser cela entre vos mains en tant que sujet que vous êtes peut-être déjà en train de considérer.

M. A. Ian Gillespie: Voilà, monsieur le président, un point d'une importance extrême. Voici deux considérations que je voudrais vous soumettre.

La première c'est que nous travaillons effectivement avec les banques canadiennes. Nous avons effectivement fait des cessions de nos polices d'assurance aux banques canadiennes, ce qui leur donne une sécurité par rapport au fonds de roulement qu'elles fournissent pour les créances étrangères.

Il ne fait que les fonds de roulement que les banques sont disposées à consentir avec une police assurée par la SEE varient énormément d'une banque à l'autre, et même d'une succursale à l'autre d'une même banque. La situation empire à l'extérieur des États-Unis quand on considère d'autres risques. Ils réduisent cela davantage, même s'il y a de l'assurance SEE. Ils font peut-être plus confiance à la SEE aux États-Unis, qu'ils ne le font ailleurs.

• 1045

C'est justement pour cette raison que nous avons lancé le programme de garantie générale sur les créances en 1996—nous l'appelons le GGC. J'y ai fait allusion dans mes notes, et son objectif consistait à faire augmenter la quantité de soutien en fonds de roulement que les banques canadiennes seraient prêtes à fournir aux petites et moyennes entreprises pour leurs créances étrangères. C'était de fait, une garantie pour la banque; si une compagnie faisait faillite, la banque était entièrement protégée. Il ne s'agissait pas de savoir si l'exportateur avait rempli toutes ses obligations, parce que la banque était protégée—et nous avons quelques statistiques à ce sujet.

En bref, comme je l'ai dit au cours de mes commentaires ici, nous n'avons pas encore réalisé les chiffres que nous aimerions réaliser. Nous pensons que c'est un excellent programme. Bien qu'il en soit à ses débuts, nous pensons qu'il démontre clairement que l'on pourra remettre plus de fonds de roulement entre les mains des petites et moyennes entreprises lorsque les banques auront adopté ce programme de garantie générale sur les créances. Le problème semble résider dans le fait que les banques offrent tellement de produits et de services différents sur leurs grands réseaux que les gestionnaires des succursales doivent gérer que franchement ils n'ont pas le niveau de connaissances nécessaires en tout temps pour pouvoir dire, oui, le service est disponible, et je peux vous offrir une garantie de 80 p. 100 contre ces créances étrangères.

C'est un problème, mais nous travaillons avec les banques pour chercher différentes solutions. La technologie pourrait offrir une solution, mais toutes les banques n'en sont pas au même point.

J'accepte donc ce que vous dites. Cet aspect des choses est très important. Nous avons cherché à y répondre de quelques nouvelles façons. Manifestement, nous n'avons pas entièrement réussi.

Le président: Au nom des membres du comité, je voudrais vous remercier d'être venu, monsieur Gillespie. Je pense que les réponses aux questions ont clairement démontré que la décision d'embaucher quelqu'un de l'intérieur était une bonne décision. Vous semblez savoir exactement en quoi consiste les opérations de la banque, et c'est ce que nous voulions savoir. Nous vous félicitons de votre nomination, nos voeux de succès vous accompagnent, et je suis certain que nous aurons l'occasion de vous revoir de nouveau devant ce comité pour parler de la SEE, qui est un élément très important de notre mandat, comme vous le savez.

M. A. Ian Gillespie: Merci beaucoup. Je veux remercier les membres du comité de m'avoir offert l'occasion de comparaître devant vous.

Le président: Nous reprendrons nos travaux mardi 18 novembre. La séance est levée.