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AGRI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON AGRICULTURE AND AGRI-FOOD

COMITÉ PERMANENT DE L'AGRICULTURE ET DE L'AGROALIMENTAIRE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 3 juin 1999

• 0904

[Traduction]

Le président (M. John Harvard (Charleswood St. James— Assiniboine)): Mesdames et messieurs, je déclare la séance ouverte.

• 0905

Aujourd'hui, nous allons faire quelque chose d'un peu différent et examiner un sujet intéressant, je pense. Il s'agit de ce que l'on appelle les «coopératives nouvelle génération». Au cours de la première heure, nous allons entendre les représentants de Prairie Pasta Producers. À 10 heures, ces témoins feront place aux représentants de la Commission canadienne du blé, un organisme dont le rôle a un rapport direct avec la question qui nous occupe. Nous allons entendre ce qu'ils ont à dire. Je suis certain, mes chers collègues, que vous aurez des questions à poser aussi bien aux représentants de Prairie Pasta Producers qu'à ceux de la Commission canadienne du blé, bien évidemment.

Commençons par Prairie Pasta Producers. Nous avons le plaisir d'accueillir David Schnell, le président. Il est accompagné de John De Pape, qui est expert-conseil.

Monsieur Schnell, Je crois savoir que vous allez consacrer quelques minutes à des remarques liminaires. Allez-vous prendre la parole tous les deux avant que nous passions aux questions?

M. David Schnell (président, Prairie Pasta Producers): C'est exact.

Le président: Très bien. Vous pouvez commencer, monsieur Schnell.

M. David Schnell: Merci, monsieur le président.

Je tiens à vous remercier, vous et les membres du comité permanent, de nous avoir invités à comparaître ici aujourd'hui.

J'aimerais me présenter. Je suis président de Prairie Pasta Producers et j'ai une exploitation agricole à Lampman, une localité située à 25 miles au nord-est d'Estevan. Je suis accompagné aujourd'hui de M. John De Pape. John est vice-président de Sparks Companies, Inc. de Winnipeg. C'est lui qui est chargé de préparer le plan d'entreprise de Prairie Pasta Producers.

Je voudrais tout d'abord vous parler brièvement de Prairie Pasta Producers, vous dire qui nous sommes, quels sont nos plans pour l'avenir, ce que nous aimerions faire. Derrière Prairie Pasta Producers, il y a 650 agriculteurs du sud de la Saskatchewan et du Manitoba et du Dakota du Nord et du Montana qui ont formé une coopérative nouvelle génération.

Nous espérons construire une usine de fabrication de pâtes alimentaires soit au sud de la Saskatchewan, soit au nord du Dakota du Nord. Nous avons l'intention de construire une usine de 120 millions de dollars où pourront être transformés, sur une base annuelle, cinq millions de boisseaux de blé dur. C'est en Saskatchewan, dans le Dakota du Nord et dans le sud du Manitoba qu'est cultivé un blé dur dont la qualité en fait un des meilleurs blés durs du monde.

Notre organisme regroupe des cultivateurs qui veulent passer à l'étape suivante de la chaîne de production alimentaire. Nous voulons être plus que des producteurs: nous voulons être des transformateurs.

À l'heure actuelle, les agriculteurs de l'ouest du Canada traversent une période difficile. Le prix des denrées de base étant bas, nous voyons notre blé dur évalué à 3 $ le boisseau une année et à 6 $ le boisseau une autre, alors que le prix des pâtes alimentaires vendues dans les magasins ne change pas.

Donc, tel est notre objectif: ajouter de la valeur, nous intégrer verticalement et être impliqués à l'étape suivante de la chaîne de production alimentaire.

J'ajoute que, pour certains, la création de coopératives nouvelle génération est un effort désespéré pour sauver l'exploitation agricole familiale dans l'Ouest du Canada. Nous avons pu constater la réussite d'autres coopératives privées, par exemple, celle de Carrington, dans le Dakota du Nord, qui, partie de rien il y a sept ans transforme maintenant 11 millions de boisseaux de blé dur. Ce que nous essayons de faire, c'est suivre cet exemple pour que nos agriculteurs puissent être impliqués à l'étape suivante de la chaîne de production alimentaire.

Sur ce, j'aimerais passer la parole à John De Pape. John a un exposé à vous présenter.

Merci.

Le président: Merci, monsieur Schnell.

Monsieur De Pape.

M. John De Pape (expert-conseil, Sparks Companies, Inc.): Merci, David.

Comme David vient de vous le dire, les services de mon cabinet ont été retenus pour élaborer un plan d'entreprise à l'intention de ce groupe d'agriculteurs. Nous nous intéressons à trois points particuliers. Ces questions sont liées et nous essayons de les résoudre toutes en même temps.

• 0910

Il s'agit, par ordre de préférence ou d'importance: des points à éclaircir avec la Commission du blé, de la façon de traiter avec la commission, aussi bien en tant qu'agriculteurs agissant conjointement qu'en tant qu'usine de transformation; de l'emplacement de cette usine; et de la part de marché, ce que j'appelle aussi la pénétration du marché, que ce soit en ce qui concerne la farine ou les pâtes qu'ils vont produire, tout dépendant de ce qui sera fixé dans le plan d'entreprise. Ces trois questions sont liées.

Nous nous sommes occupés de l'emplacement. Nous espérons, avec un peu de chance, être en mesure d'annoncer où sera située l'usine au cours des dix prochains jours. Nous sommes également sur le point d'établir des alliances ou des relations stratégiques avec des acheteurs de pâtes alimentaires.

L'autre question qui se pose est celle du rôle de la Commission du blé, et je pense que c'est le principal point qui reste à éclaircir aujourd'hui. Je dois dire, d'entrée, que ce volet du problème met directement en cause la question de l'emplacement. Comme David l'a mentionné, il s'agit d'une coopérative internationale avec participation américaine.

Si la Commission du blé peut structurer sa politique et ses règlements pour favoriser la création d'une coopérative nouvelle génération, il y a de nombreux facteurs positifs en faveur de la construction de ces installations au Canada. Si ce n'est pas possible, si la Commission du blé n'est pas en mesure d'agir facilement ou rapidement, c'est définitivement le Dakota du Nord qui sera immédiatement retenu comme emplacement de l'usine. Au cas où cela se produirait, il est tout à fait clair, étant donné la position adoptée par la commission et les dispositions de la loi, je crois, que la participation des agriculteurs canadiens serait inexistante. Ce serait une coopérative nouvelle génération américaine qui serait créée. Vous voyez donc que le choix de l'emplacement de ces installations est intimement lié aux questions qui doivent être résolues avec la Commission du blé.

Nous en avons abordé plusieurs au cours des pourparlers que nous avons engagés avec la commission, mais la plus importante, selon moi, c'est la politique de fixation des prix. Si vous le permettez, je vais vous donner quelques détails sur cette politique, à l'intention de ceux qui pourraient ne pas être au courant. Tous les agriculteurs de l'Ouest du Canada vendent tout leur blé destiné à l'alimentation humaine par l'intermédiaire de la Commission du blé, à un prix fixé pour chaque campagne agricole: ils reçoivent un acompte qui est ensuite complété ou arrondi, si vous voulez, par un ajustement de fin de campagne, ce qui donne le revenu total. Ce revenu se fonde sur la moyenne des ventes réalisées sur tous les marchés, si bien que tous les producteurs de blé dur partagent également le produit de toutes les ventes, qu'il s'agisse de ventes à l'étranger, sur le marché national ou aux États-Unis. C'est de cette façon que le prix est calculé.

De l'autre côté, les meuneries sont tenues d'acheter toutes leurs matières premières à la Commission du blé. Dans le cas qui nous occupe, il s'agit de blé dur et, étant donné que ce blé est transformé en pâtes alimentaires, la politique de fixation des prix est celle qui concerne ce que l'on appelle le «prix du blé destiné à l'alimentation humaine».

Comme vous pouvez le voir, ces agriculteurs veulent construire une installation de transformation. Ils veulent, comme David l'a mentionné, être impliqués à l'étape suivante de la chaîne de production à valeur ajoutée. Ils veulent produire du blé dur, le transformer et participer pleinement à cet investissement.

Toutefois, des études fondées sur des données de la Commission du blé, que la commission va également présenter, je pense, montrent qu'il y a des différences de prix. Pour l'agriculteur, il y a un prix fixe qui s'applique tout au long de l'année. En revanche, le prix du blé destiné à l'alimentation humaine varie quotidiennement, et sa volatilité est parfois assez marquée. Les données que nous avons examinées montrent que la différence de prix dans le sud-est de la Saskatchewan se situe autour de 17 $ par tonne métrique. La Commission du blé prétend que, d'après son analyse, cette différence est un peu moins marquée. En réalité, le chiffre lui-même n'a pas vraiment d'importance: la pierre d'achoppement, c'est le fait qu'il y a une différence de prix.

Disons qu'on pourrait s'entendre pour dire qu'une différence de 15 $ peut être utilisée comme point de repère. C'est une moyenne. La fourchette va de 80 $ dans un sens à 40 $ dans l'autre. Autrement dit, le prix demandé aux meuneries—le prix du blé destiné à l'alimentation humaine—peut dépasser le prix à la ferme de 80 $ ou être de 40 $ de moins. Cela fait également de cette activité une opération risquée, et c'est un risque qui ne peut pas être géré facilement.

Ce sont en réalité ces deux questions qui sont à résoudre avec la Commission du blé. Prairie Pasta a indiqué que, pour attirer l'investissement des agriculteurs, requis en vertu de la législation relative aux coopératives nouvelle génération, il faudrait que des mesures soient prises pour atténuer cette différence, cet écart.

• 0915

Sinon, les agriculteurs verraient disparaître de leurs recettes 15, 40 ou même 50 $ par tonne, des sommes qui reviendraient à la Commission canadienne du blé, alors que ce sont eux qui cultivent le blé dur, qui investissent dans l'usine de transformation, qui l'exploitent eux-mêmes... Ils ne voient aucun avantage à cette façon d'opérer et ils sont convaincus qu'ils ne seraient pas en mesure d'attirer l'investissement requis dans ces conditions.

Telle est donc la question qui se pose. Il s'agirait, pour Prairie Pasta d'obtenir des concessions, une exemption, si vous voulez, ou l'application d'une politique permettant aux agriculteurs qui investissent dans cette opération verticalement intégrée de capter les recettes qu'elle génère.

J'ai trouvé intéressant d'examiner le problème sous différents angles. Par exemple, depuis que le tarif du Nid-de-Corbeau a été modifié, depuis la réforme qui a eu lieu au cours de la dernière décennie et qui a finalement abouti à l'élimination du taux de fret du Nid-de-Corbeau, tout le monde a répété que l'on verrait la transformation prendre de l'ampleur—nous l'avons dit nous-mêmes, à titre d'experts-conseils. Tout le monde a répété que le secteur de la transformation prendrait de l'envergure dans l'ouest du Canada et que la croissance de cette activité s'avérerait bénéfique pour l'économie.

Eh bien, c'est ce que nous avons pu constater. C'est ainsi que les choses se sont passées dans le secteur des oléagineux, de la production porcine, de produits bizarres comme le chanvre; les gens se sont mis à faire pousser du chanvre et à le transformer.

En revanche, on n'a pas vu réellement se développer un intérêt pour la production ou la transformation du blé dur. On a vu s'ouvrir des installations de fractionnement du blé; il s'agit d'usines où l'on transforme le blé pour en extraire du gluten et de l'éthanol. Ce ne sont pas des produits destinés à la consommation humaine, et les propriétaires de ces installations ne sont obligés d'acheter qu'une partie de leur blé auprès de la Commission du blé. Sans vouloir leur faire dire ce qu'ils n'ont pas dit, ils trouvent que traiter avec la commission n'est pas un facteur qui rend ce genre d'activité attractive. De fait, ils essaient de réduire à un minimum leurs transactions avec la commission. C'est ce qu'on m'a dit.

Peut-être devrais-je essayer de conclure, car je pense que nous allons bientôt avoir épuisé les dix minutes qui nous sont imparties. Si on examine le programme de soutien agricole dont on a annoncé la création récemment, le programme ACRA qui doit permettre d'injecter 900 millions de dollars dans une économie agricole qui bat de l'aile, il est intéressant de noter que... concrètement, ce sont les secteurs de la production porcine et de la production céréalière qui sont ciblés. Le prix du porc était tombé au plus bas depuis des années, tout comme le prix des céréales, et les agriculteurs impliqués dans ces secteurs de production en subissaient les conséquences. Mais ce qui est très intéressant—et David y a déjà fait allusion—c'est que le prix des hot-dogs et des pains à hot-dogs vendus dans les magasins n'a pas changé.

Donc, ce que l'on peut en retenir, c'est que les recettes ou les marges bénéficiaires tirées de la production de denrées alimentaires—et c'est bien de production alimentaire dont nous parlons, de la chaîne qui va de la ferme aux consommateurs—n'ont pas changé. Ces recettes ont tout simplement été partagées différemment. Autrement dit, alors que les transformateurs, les distributeurs et les commerçants de détail faisaient en réalité plus de bénéfices, les agriculteurs gagnaient moins d'argent.

Il me semble donc qu'il serait tout à fait logique d'encourager les agriculteurs à s'impliquer dans le secteur de la transformation et de leur faciliter la tâche, afin de consolider leurs recettes, de consolider leur revenu et, ce qui est mieux encore, de réinjecter cet argent dans les régions rurales de la Saskatchewan, dans les régions rurales du Manitoba, dans les régions rurales de l'Alberta, etc., où l'on en a définitivement besoin.

David me disait en venant ici qu'éventuellement, 1 200 agriculteurs pourraient investir dans cette opération. C'est l'objectif: 1 200 agriculteurs. On s'est mis dans la tête que, le prix des denrées de base étant si bas et les coûts de production si élevés, pour que l'agriculture survive, le seul moyen, c'est d'avoir de plus grosses exploitations. Est-ce que nous voulons vraiment que le nombre de ces agriculteurs passe de 1 200 à 600? Procéder ainsi va à l'encontre de la consolidation—si je peux utiliser ce mot encore une fois—de l'économie agricole ou de l'économie rurale. Pourquoi ne pas faire en sorte que ces 1 200 agriculteurs continuent d'exploiter leur ferme, pourquoi ne pas leur donner l'infrastructure qui leur permettra de passer à l'étape suivante de la chaîne de production alimentaire et d'avoir des recettes plus stables, donc des collectivités rurales plus stables, ce qui rend le soutien fédéral moins nécessaire?

Le président: Une précision, monsieur De Pape: Essentiellement, êtes-vous d'avis que pour qu'une coopérative nouvelle génération réussisse, il faut plus ou moins faire disparaître ou éliminer toute participation de la part de la Commission du blé?

M. John De Pape: De notre point de vue, la participation de la Commission du blé fait tomber le rendement de l'investissement.

Je ne veux pas parler au nom de la commission—ses responsables vont avoir une heure pour s'exprimer plus tard—, mais ce qu'ils nous ont dit, c'est qu'ils traitent toutes les meuneries sur un pied d'égalité.

• 0920

Eh bien, nous voyons les choses un peu différemment, parce que l'implantation de coopératives de nouvelle génération est une phénomène qui prend de l'ampleur aux États-Unis—et en réalité, notre marché est nord-américain. Jusqu'ici, la coopérative nouvelle génération qui a le mieux réussi est Dakota Growers, située à Carrington, au Dakota du Nord. Il y a sept ans, cette entreprise n'existait pas. Au début, sa capacité de transformation était de 3 à 4 millions de boisseaux et à l'heure actuelle, elle atteint presque—si ce n'est déjà fait—11 millions de boisseaux. Cette coopérative est devenue, en seulement cinq ans, le deuxième plus gros producteur de pâtes alimentaires d'Amérique du Nord. Les dispositions concernant le prix du blé destiné à l'alimentation humaine ne la concernent pas. Elle n'a rien avoir avec la Commission du blé, étant donné qu'il s'agit d'une coopérative privée.

Telle est la concurrence, et il faut donc que nous nous assurions de pouvoir fonctionner sur un pied d'égalité avec nos homologues américains. Chaque fois que des recettes nous sont soustraites, cela nous rend moins concurrentiels.

Le président: Merci.

Chers collègues, nous avons presque 40 minutes à consacrer aux questions. Comme d'habitude, nous allons commencer par le Parti réformiste. Je présume que c'est M. Bailey qui va prendre la parole en premier.

Vous avez sept minutes, Roy.

M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Réf.): Merci, John.

David, John, je vous remercie d'être venus aujourd'hui.

Je voudrais dire aux autres membres du comité que, si je suis ici aujourd'hui, c'est que la question qui nous occupe est pour moi passionnante. J'ai dû me libérer de mes engagements vis-à-vis d'autres comités pour être ici, car le débat d'aujourd'hui est pour moi de première importance. Ces messieurs viennent de ma circonscription. Tous les membres de Prairie Pasta habitent dans ma circonscription et, dès le début, j'ai appuyé sans réserve ce qu'ils essaient de faire.

Permettez-moi de vous dire, chers collègues, qu'en me rendant de Weyburn à Estevan, j'ai souvent vu un train de 112 wagons chargé du meilleur blé dur du monde; et savez-vous où va ce blé dur? Il va à Minneapolis pour être transformé. Quand j'ai su cela, j'ai vraiment été renversé. D'autant plus que c'est à Weyburn que se trouve le plus grand silo terminus du Canada situé à l'intérieur des terres...!

Ces messieurs parlent de processus de création de valeur dont se chargent certaines entreprises, ici même, non seulement pour la production de pâtes alimentaires, mais également pour des choses comme les céréales biologiques, et ainsi de suite.

J'aimerais également vous signaler qu'une bonne partie des terres où pousse ce blé dur, qui, normalement, auraient dû être ensemencées ce printemps, se trouvent actuellement sous l'eau. Une grande partie des meilleures terres pour la culture du blé dur sont inondées ou si saturées qu'on ne peut les ensemencer—mais il s'agit là d'un autre problème auquel nous sommes confrontés.

J'ai une question à poser à nos invités d'aujourd'hui, à Dave et à John. J'ai le sentiment qu'étant donné la force de la volonté qui anime ceux qui veulent cette installation créatrice de valeur, il va falloir que les responsables de la Commission canadienne du blé fassent des concessions, et je pense que c'est ce qui va arriver. Cela va se faire lentement, je crois. Le processus qui a abouti à retirer l'orge fourragère du champ de compétence de la Commission du blé a été lent, mais éventuellement, je pense que, là encore, cela va se faire. Bref, la question que je me pose est celle-ci: pensez-vous que les autorisations nécessaires pour que ces produits à valeur ajoutée soient fabriqués là où il se doit—c'est à dire là où sont cultivées les matières premières—vont être délivrées assez rapidement? Si cela ne se fait pas vite, qu'est-ce qui arrive à votre entreprise?

Le président: Monsieur Schnell.

M. David Schnell: Voici ce que je peux vous répondre, Roy: Prairie Pasta Producers essaie de se lancer en affaires depuis maintenant deux ans. Le projet a vu le jour au Dakota du Nord et a ensuite gagné le Canada pour permettre aux agriculteurs canadiens d'y participer et parce qu'il fallait pouvoir compter sur une zone de production plus étendue, sur une plus grande quantité de blé dur. Le projet a acquis une dimension canadienne, mais il reste que nous y travaillons depuis deux ans et qu'il faut que cela aboutisse. Il faut que nous choisissions prochainement l'emplacement des installations, et nous avons dit que cela serait décidé d'ici la fin du mois.

Il faut que la Commission du blé fasse quelque chose pour que les agriculteurs puissent investir dans cette opération l'esprit tranquille. Peu importe que ce soit une exemption ou une politique de fixation des prix élaborée spécialement pour les coopératives nouvelle génération, mais il faut quelque chose pour que les agriculteurs investissent dans cette opération en toute tranquillité. Au bout du compte, ce sont les agriculteurs qui possèdent deux sections de terrain ou 2 000 acres qui vont verser les 120 millions de dollars nécessaires pour construire cette usine.

M. Roy Bailey: Merci.

J'ai juste une autre question à vous poser, John. Premièrement, je tiens à féliciter votre comité. Vous avez rencontré beaucoup d'obstacles et beaucoup d'écueils que vous avez su éviter et maintenant, on en arrive à un point critique, à mon avis à moi qui vois les choses de l'extérieur.

• 0925

Je sais qu'il y a des localités de la circonscription— principalement Weyburn—qui comptent là-dessus. Pourriez-vous expliquer au comité quelle est la valeur ajoutée que recèle la fabrication des pâtes alimentaires et dont profiterait Weyburn plutôt que Minneapolis? Pourriez-vous dire au comité ce que cela signifierait pour cette collectivité du sud de la Saskatchewan?

M. John De Pape: Bien sûr. Avant de s'adresser à moi, Prairie Pasta avait retenu les services de quelqu'un d'autre, malheureusement, pour effectuer une étude de faisabilité...

Des voix: Oh, oh!

M. John De Pape: ... que nous avons examinée et dont nous appuyons les conclusions.

Dans cette étude, il a été établi qu'une installation de 120 ou 80 millions de dollars US, où l'on produirait de la farine de blé dur et des pâtes alimentaires, emploierait de 90 à 95 personnes, ce qui représente une masse salariale d'environ 3,75 millions de dollars et ce qui ajouterait—si l'on se fonde sur des prix moyens—jusqu'à 3 $ le boisseau aux recettes des agriculteurs. Donc, si cette installation fonctionne à pleine capacité, cela signifie que les agriculteurs peuvent s'attendre à en retirer 15 millions de dollars, que les salaires qui seront versés s'élèveront à près de 4 millions de dollars et que les recettes fiscales locales s'accroîtront de 500 000 $. Et n'oublions pas les structures d'appui qui n'étaient pas mentionnées dans l'étude de faisabilité: les entreprises de camionnage, les hôtels et les restaurants, ni l'expansion du commerce et des infrastructures que génère un investissement de cette envergure.

M. Roy Bailey: Merci.

Le président: Merci, monsieur Bailey.

Madame Alarie.

[Français]

Mme Hélène Alarie (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le président, je vais céder ma place à mes collègues de l'Ouest canadien, qui ont plus d'intérêt que moi dans ce dossier. Merci.

[Traduction]

Le président: M. Calder ne vient pas de l'Ouest, mais c'est lui le prochain intervenant sur la liste.

Murray.

M. Murray Calder (Dufferin—Peel—Wellington—Grey, Lib.): Oh. Alors, je vais me placer dans la perspective de quelqu'un qui vient de l'Ouest de l'Ontario. Ça vous va?

Des voix: Oh, oh!

M. Murray Calder: John, il y a une chose qui m'intrigue. Vous dites que, selon vous, il est possible d'envisager la création d'une usine de 120 millions de dollars qui emploierait 90 personnes, ce qui représente une masse salariale de 4,5 millions de dollars. Comment se fait-il que cela ne soit pas déjà fait? L'étude de faisabilité que vous avez effectuée... S'il y a un marché, il me semble que quelqu'un du secteur privé aurait sauté sur l'occasion et aurait ouvert une usine là-bas? N'y a-t-il pas de marché? Pourquoi cela n'a-t-il pas été fait?

M. John De Pape: C'est évidemment ce que l'on essaie de faire actuellement. Je ne peux pas vous répondre au nom de ceux que j'appellerais des meuniers traditionnels, les entreprises qui sont déjà impliquées dans ce genre d'activité, comme CSP Foods, Archer Daniels Midland, Ellison Milling, etc., qui produisent de la farine de blé dur à l'heure actuelle.

Je ne peux pas vous dire pourquoi elles ne prennent pas de l'expansion. Je ne peux pas vous dire pourquoi un autre projet, une usine de fabrication de pâtes alimentaires qui devait être créée à Swift Current, n'a pas abouti. Je ne connais aucun des détails concernant ces affaires, ni aucune des raisons qui entrent en jeu, mais je sais que pour que ces agriculteurs investissent... N'oubliez pas ceci: je ne sais pas si nous l'avons dit assez clairement, mais en vertu de la législation, les seules personnes qui peuvent participer au capital d'une coopérative nouvelle génération sont des agriculteurs, qui ont également l'obligation de fournir les matières premières. Donc, pour eux, il ne s'agit pas simplement d'un investissement extra-agricole. Il s'agit d'investir dans une activité annexe. La raison pour laquelle ces agriculteurs s'intéressent à ce projet est celle que j'ai invoquée: le prix des produits de base étant ce qu'il est, on ne peut pas gagner sa vie en pratiquant l'agriculture, mais tout porte à croire que c'est possible en captant une part plus importante des recettes qui sont réalisées en amont.

À l'heure actuelle, la pierre d'achoppement, selon nous, c'est la politique de fixation des prix de la Commission du blé. Il est facile de faire le calcul. Je suis sûr que les responsables de la Commission du blé reconnaîtront qu'il existe une différence—un écart, autrement dit—entre ce que reçoit l'agriculteur et ce que paie la meunerie, et de l'avis de Prairie Pasta, si cet écart demeure, il ne sera pas possible d'attirer l'investissement requis de la part des agriculteurs pour construire ces installations.

J'ai parlé, rappelez-vous, d'un écart moyen de 17 $, qui peut descendre jusqu'à 13 $, mais qui fluctue entre 80 et moins 40 $. C'est une large fourchette. C'est impossible à gérer. Il se pourrait fort bien qu'une année, la meunerie que vous venez d'ouvrir soit obligée de payer son blé dur 80 $—c'est-à-dire 2 $, au moins, le boisseau de plus que ce qui vous est versé pour le blé dur que vous lui fournissez. Et pour aboutir à quoi? Cela ne vous rapporte rien.

Je sais que certains secteurs du marché des pâtes alimentaires sont statiques, mais les nouvelles technologies et les coopératives nouvelle génération, comme Dakota Growers, sont porteuses d'une capacité élargie et d'une réelle croissance. C'est là que se trouvent les sources de croissance et c'est ce dont nous essayons de faire profiter le Canada.

• 0930

M. Murray Calder: Bien.

Voici ma dernière question, avant que je ne passe la parole à mon collègue. Je suis impliqué moi-même dans une coopérative de transformation. Dans le privé, je suis aviculteur en Ontario. Bref, l'entreprise en question n'était pas un projet de 120 millions de dollars—on parle de 100 millions de moins, d'un projet de 20 millions de dollars. Nous étions plusieurs à nous y intéresser. Essentiellement, il s'agissait d'investir 20 000 $. Nous avons dû régler, entre autres, tous les problèmes de gestion auxquels on fait face quand on se lance dans ce genre d'affaire avant de pouvoir faire démarrer notre usine de transformation. Maintenant, elle est lancée, et nous cherchons actuellement à élargir notre part de marché. Dois-je comprendre que la Commission du blé, qui examine maintenant ce projet, vous empêcherait de faire exactement ce que nous avons fait? Est-ce ce que je dois comprendre?

M. John De Pape: En ce qui concerne la Commission du blé, je le répète, je ne vais pas passer le temps qui nous est imparti à présenter leur position. Étant donné que je ne peux pas répondre à ce que les responsables de la commission vont dire aujourd'hui, je vais vous dire comment nous réagissons à ce qu'ils nous ont déclaré auparavant.

M. Murray Calder: Bien.

M. John De Pape: Ils nous ont dit, et c'est logique, si le plan d'entreprise et l'étude de faisabilité démontrent que l'opération est rentable, pourquoi tout simplement, ne pas aller de l'avant? Eh bien, c'est exactement cela—pourquoi, tout simplement, ne pas aller de l'avant? Ce que la commission ne comprend pas, c'est que ce sont des agriculteurs qui sont impliqués, et que pour eux, il y a une chose qui est—je ne sais pas comment je pourrais le dire autrement—dure à avaler; c'est certainement le cas de ceux que j'ai rencontrés, de ceux qui ont fourni des capitaux d'amorçage... Le groupe a obtenu des capitaux d'amorçage de 650 agriculteurs. Aucun d'entre eux n'est intéressé à poursuivre le projet à moins de pouvoir tirer profit de l'écart dont j'ai parlé plutôt.

Selon moi, même si, en achetant ses matières premières à la commission au prix du blé destiné à l'alimentation humaine, la meunerie pouvait être raisonnablement concurrentielle par rapport aux autres meuneries du Canada, elle ne pourrait pas maintenir sa position concurrentielle à long terme, car l'avenir appartient aux coopératives nouvelle génération. Rappelez-vous que Dakota Growers, parti de rien il y a cinq ou six ans, est maintenant le deuxième producteur de pâtes alimentaires d'Amérique du Nord—et toujours en pleine expansion.

M. Murray Calder: Mais revenons à ce que je viens de vous dire, à l'exemple que je vous ai donné, à l'idée que nous avons eue... Nous nous sommes dit, en quelque sorte, que le gouvernement aille au diable. Nous avons juste allongé nos propres dollars, nous nous sommes regroupés, nous avons acheté une usine de transformation, nous avons embauché un directeur et nous avons mis les choses en place. Il n'y a rien qui vous empêche véritablement de faire exactement la même chose, n'est-ce pas?

M. John De Pape: La seule chose qui nous arrête, c'est obtenir l'investissement nécessaire.

M. Murray Calder: Oui. D'accord.

M. John De Pape: Obtenir l'investissement nécessaire de la part des agriculteurs...

Le président: Merci, monsieur Calder.

Monsieur Schnell.

M. David Schnell: Pourrais-je simplement ajouter quelque chose?

Murray, il s'agit d'un projet international auquel participent des agriculteurs américains et des agriculteurs canadiens, et si Prairie Pasta fixe un prix et que l'agriculteur américain peut participer en se contentant de faire parvenir son blé dur à l'usine avec un certificat d'utilisateur établissant le prix à tant—disons 3 $ le boisseau—, alors que l'agriculteur canadien doit passer par la Commission du blé pour faire parvenir son blé dur à l'usine et que cela lui coûte quelque chose, tant et si bien que l'agriculteur canadien reçoit moins que l'agriculteur américain, comment voulez- vous que l'agriculteur canadien puisse penser qu'investir dans ce projet est une bonne opération?

M. Murray Calder: Eh bien, il a une participation dans l'entreprise. S'il investit dans l'entreprise, il a une participation, n'est-ce pas?

M. David Schnell: Ce n'est pas que...

M. Murray Calder: C'est ce que nous avons fait. Dans notre cas, les transformateurs de l'Ontario nous posaient quelques petits problèmes qui avaient trait au prix à la ferme et au prix de gros, et nous n'étions pas satisfaits de la situation. Nous avons décidé d'ouvrir une usine de transformation pour éviter ces problèmes et, essentiellement, les mettre au pied du mur; et c'est exactement ce que nous avons fait. Ça marche. De fait, nous en sommes au point, à l'heure actuelle, où il existe une sorte de système de quota qui fixe la quantité de produits qu'une usine de transformation est autorisée à obtenir en Ontario. Nous essayons de contourner le problème; au lieu de signer des contrats avec un autre transformateur, je dis qu'il est plus avantageux pour moi de signer un contrat avec ma propre usine de transformation, une usine dont je suis propriétaire—ou qui m'appartient en partenariat.

Le président: Le temps de parole qui vous est imparti est écoulé, à moins que vous n'ayez quelque chose à ajouter, monsieur Schnell.

M. David Schnell: Ça va.

Le président: Monsieur Proctor, vous avez cinq minutes.

M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Merci, monsieur le président.

• 0935

Bienvenue, messieurs. Il me semble détecter dans vos propos un peu de frustration. Vous avez dit que cela fait deux ans que vous avez lancé ce projet, que vous devez avancer, que vous devez prendre une décision. Pour nous éclairer tous, pourriez-vous nous dire combien de fois vous avez rencontré les responsables de la Commission du blé et quelle a été la nature de vos pourparlers, juste pour nous donner une idée des tenants et des aboutissants de la question que nous examinons aujourd'hui?

M. David Schnell: Merci, Dick.

Notre première rencontre avec des responsables de la Commission du blé a eu lieu en novembre 1998, je crois. Nous leur avons alors indiqué que nous aimerions collaborer avec eux, que nous souhaitions qu'une politique soit élaborée, qu'on prenne certaines dispositions favorables aux investissements. La rencontre s'est bornée à cela. On ne nous a vraiment rien donné à espérer. Les responsables de la commission n'ont rien proposé, tout ce qu'ils nous ont dit, c'est qu'ils allaient continuer à s'intéresser à Prairie Pasta Producers.

Nous avons organisé une autre réunion. Nous y sommes allés accompagnés du ministre de l'Agriculture de la Saskatchewan, M. Upshall, et du ministre de l'Agriculture du Manitoba, M. Enns, et cette réunion a eu lieu, je crois, en février. À ce moment là, les deux ministres ont demandé à la Commission du blé de collaborer avec Prairie Pasta Producers et ont suggéré une rencontre avec le conseil d'administration de la commission. C'est ce qui est ressorti de la réunion de février.

En avril, six administrateurs et certains membres nommés au conseil de la commission sont venus à Regina pour rencontrer Prairie Pasta Producers. À ce moment là, les représentants de la commission nous ont encore déclaré qu'il se pourrait qu'il y ait des dispositions dans le projet de loi C-4 qui leur permettraient de faire quelque chose pour que le projet de Prairie Pasta Producers aboutisse.

Bref, nous savons que le projet de Prairie Pasta Producers a été inscrit à l'ordre du jour des deux dernières réunions de la Commission canadienne du blé. J'en ai entendu parlé hier. C'est juste une rumeur mais, apparemment, lors d'une des réunions du conseil d'administration de la commission, une résolution a été proposée et discutée. Mais je crois qu'elle n'a été déposée qu'hier; alors, tout ce que le conseil d'administration de la commission a fait, c'est parler de Prairie Pasta Producers, puisqu'elle ne nous a rien proposé d'autre que d'appliquer la politique de fixation du prix du blé destiné à l'alimentation humaine. C'est la même politique qui s'applique aux meuneries canadiennes.

Or, nous ne sommes pas une meunerie canadienne. Nous sommes une coopérative nouvelle génération. Nous représentons des agriculteurs qui, pour survivre, doivent s'impliquer à la prochaine étape de la chaîne de la production alimentaire. Nous ne pouvons pas continuer à cultiver la terre pour tirer moins de cette activité que le coût de production. Il faut que nous passions à la prochaine étape de la chaîne de production alimentaire. Il faut que nous nous considérions comme des transformateurs, pas seulement des producteurs. Les agriculteurs, les membres de Prairie Pasta Producers, n'investiront dans ce projet si les politiques de fixation des prix de la Commission du blé sont un obstacle à sa réussite. Si le rôle que joue la Commission du blé se traduit par un coût, nos membres n'investiront pas dans ce projet.

M. Dick Proctor: Donc, à l'heure actuelle, votre stratégie, c'est—pour reprendre l'expression utilisée par M. Calder—de les mettre au pied du mur en disant, en fin de compte, qu'il est temps de passer à la prochaine étape, que vous devez prendre une décision le mois prochain et que s'ils ne sont pas intéressés, vous allez vous adresser ailleurs—et par là, je veux dire au sud de la frontière.

M. David Schnell: Nous représentons une coopérative internationale et nous avons toujours dit que nous allions construire ces installations là où il est le plus logique de la faire.

M. Dick Proctor: En ce qui me concerne, je n'ai rien à ajouter.

M. John De Pape: J'aimerais faire une autre observation, si vous le permettez.

Le président: Monsieur De Pape.

M. John De Pape: À propos des sujets qui ont été discutés, entre autres choses, comme David l'a mentionné, la Commission du blé a fait valoir qu'en vertu de son mandat, elle devait traiter toutes les meuneries sur un pied d'égalité, et étant donné qu'il s'agit d'un organisme gouvernemental, je peux voir pourquoi elle veut agir ainsi. Il faut qu'on puisse considérer que son activité est transparente et qu'elle fournit à tous le même service. Comme nous l'avons déclaré, cela ne nous pose aucun problème. Nous pouvons admettre cela, tant et aussi longtemps que l'agriculteur tire quelque chose, d'une façon ou d'une autre, du prix payé par sa meunerie. Que le marché soit à la hausse ou à la baisse, les agriculteurs devraient en ressentir les effets par le biais du prix payé par leur meunerie. C'est aussi simple que cela.

Nous sommes tout à fait prêts à réfléchir au problème et à la façon dont il peut être résolu. Si les agriculteurs doivent être traités comme tous les autres meuniers, très bien, soit, mais prenons des mesures pour assurer que l'argent versé par cette meunerie revient à ses investisseurs. C'est pourquoi nous avons parlé d'une exemption ou de quelque chose du genre.

La Commission du blé a également déclaré que nous demandions un traitement spécial, que nous voulions être traités différemment. Ce n'est pas vrai. En fait, ce que nous voulons, c'est une politique. Nous aimerions qu'on élabore une politique ou un règlement qui permettrait à tous les agriculteurs de l'ouest du Canada qui veulent prendre ce genre de risque et faire les investissements que ces gens-là sont prêts à... Nous aimerions que ces mesures s'appliquent à toutes les coopératives nouvelle génération. Nous aimerions qu'il y ait une politique qui s'applique à tous les agriculteurs de façon à ce qu'ils soient tous traités sur un pied d'égalité. Il ne s'agit pas juste de Prairie Pasta. Nous ne sommes pas ici pour obtenir un traitement de faveur pour Prairie Pasta Producers. Ce que nous aimerions, c'est qu'il y ait une politique sur les coopératives nouvelle génération qui favoriserait plus d'investissements de ce type. C'est cela qui nous permettrait d'être d'avant-garde.

• 0940

Une dernière observation. Le troisième argument avancé par les responsables de la Commission du blé, c'est que s'ils nous accordent un traitement spécial, cela va diluer le fonds de mise en commun, le prix moyen, parce que nous avons accès à un marché lucratif. Eh bien, comme l'a dit David, si nous ne construisons pas cette usine au Canada, elle sera construite aux États-Unis. Dakota Growers va continuer à prendre de l'expansion et si Prairie Pasta s'installe au Dakota du Nord, ce sont cinq millions de boisseaux de blé dur à transformer que la commission ne pourra pas commercialiser. Prairie Pasta se contentera de transformer son propre blé dur. L'entreprise n'achètera rien à la Commission du blé. Quelle que soit la façon dont vous envisagez la chose, c'est cinq millions de boisseaux—ce qui est énorme—qui n'entreront pas dans le fonds de mise en commun, qu'on le veuille ou non.

Le président: Monsieur Borotsik, vous avez cinq minutes.

M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC): Merci, monsieur le président.

J'ai une question à poser à ce propos. Dans l'état actuel des choses, est-ce que ce transformateur du Dakota du Nord et cette nouvelle usine de fabrication de pâtes alimentaires qui pourrait éventuellement s'installer au Dakota du Nord ont accès au blé dur canadien? Est-ce que le blé dur canadien peut aboutir sur ces marchés ou est-ce absolument impossible?

M. John De Pape: La Commission canadienne du blé, bien évidemment, comme on l'a dit plus tôt, expédie de grandes quantités de blé dur aux États-Unis.

M. Rick Borotsik: Bien sûr.

M. John De Pape: Au Dakota du Nord, la législation qui s'applique aux coopératives nouvelle génération stipule que les investisseurs, les gens qui détiennent le capital-actions, sont également dans l'obligation de fournir les matières premières.

M. Rick Borotsik: D'acheter auprès des membres de la coopérative.

M. John De Pape: Ils perdraient leur statut de coopérative s'ils achetaient à quelqu'un de l'extérieur.

M. Rick Borotsik: Donc, en définitive, nous n'avons pas accès à ce marché.

M. John De Pape: C'est exact. Légalement, nous n'y avons pas accès.

M. Rick Borotsik: Légalement, nous n'y avons pas accès—absolument.

Juste pour revenir brièvement sur ce que Murray a dit à propos de la création de valeur, la première question que je veux vous poser est celle-ci: à votre avis—honnêtement—pensez-vous que la Commission canadienne du blé appuie vraiment le concept de la transformation à valeur ajoutée au Canada pour les grains qu'elle commercialise? Je vous pose simplement la question. Au plan philosophique, est-ce que la Commission canadienne du blé appuie le principe de la transformation à valeur ajoutée, au Canada, des grains qu'elle commercialise?

M. John De Pape: À mon avis?

M. Rick Borotsik: Je vous demande votre avis.

M. John De Pape: À mon avis, oui, je pense. Par certains côtés, la commission est bridée par les règlements. Nous ne lui demandons pas de prendre une décision ponctuelle. Si les règlements ou la loi doivent être changés, alors, c'est ce qu'il faut faire.

M. Rick Borotsik: Bien. À votre avis, est-il nécessaire de modifier les règlements, de changer les dispositions de la loi pour qu'une usine de transformation à valeur ajoutée de cette nature puisse exister?

M. John De Pape: À mon avis, cela ne semble pas être le cas.

M. Rick Borotsik: Merci.

À propos de la transformation à valeur ajoutée de grains qui ne sont pas commercialisés par la commission, il y a, dans ma région, une usine de transformation de l'avoine, Can-Oat. Il y a deux endroits où l'on transforme les pommes de terre en frites. Il y a une usine de traitement de la viande de porc. Il y a des installations de trituration des oléagineux en veux-tu, en voilà, pour la simple raison que les matières premières sont facilement accessibles—il s'agit de grains qui ne sont pas commercialisés par la commission. En revanche, il n'y a pas de meunerie, ni d'usine de fabrication de pâtes alimentaires, alors que ce sont des installations qui utilisent des grains commercialisés par la commission.

John, ou vous, David, pouvez-vous me dire pourquoi on trouve toutes ces autres usines de transformation qui créent de la valeur ce qui, soit dit en passant, est la voie de l'avenir? Il faut que les agriculteurs aient accès à de meilleurs marchés pour écouler leurs produits. Pourquoi n'y a-t-il pas d'installation ou l'on transforme les grains qui sont commercialisés par la commission?

M. John De Pape: Il y a des meuneries.

M. Rick Borotsik: Il y en avait une à Virden. Elle n'existe plus.

M. John De Pape: Il y en a deux, trois peut-être, à Saskatoon. Il y en a une à...

M. Rick Borotsik: Je parle du Manitoba.

M. John De Pape: Oh, excusez-moi.

M. Rick Borotsik: Allons, allons...

M. John De Pape: En ce qui concerne le Manitoba, vous avez raison.

M. Murray Calder: C'est le centre de son univers.

M. Rick Borotsik: Je parle du Manitoba, pas de Saskatoon.

Pourquoi en est-il ainsi?

M. David Schnell: Rick, j'aimerais juste signaler qu'en 1997, le Canada a produit 170 millions de boisseaux de blé dur. Nous en avons exporté 110 millions. Nous avons exporté 25 millions de boisseaux de blé dur aux États-Unis. En revanche, le Canada a importé pour 60 millions de dollars de produits à base de semoule de blé dur.

M. Rick Borotsik: Une autre question, monsieur le président, si vous le permettez...? Je pense que j'ai encore le temps.

Quelqu'un a également demandé pourquoi le secteur privé ne s'intéresse pas à cette activité, alors que c'est le cas de la coopérative nouvelle génération dont vous nous parlez. La question que j'aimerais vous poser est la suivante: est-ce parce qu'il n'est pas possible d'obtenir les matières premières à un prix contractuel constant? Est-ce une des raisons pour lesquelles le secteur privé ne s'intéresse pas, notamment, à la fabrication des pâtes alimentaires?

• 0945

Vous dites que le coût des matières premières fluctue. Que cela peut aller de 40 $ au-dessous d'un certain seuil à 80 $ au- dessus. Les entreprises de transformation de la pomme de terre qui fabriquent des frites se procurent leurs matières premières à un prix contractuel. Un prix contractuel est également fixé pour les oléagineux qu'achètent les usines de trituration.

Est-ce l'un des problème auquel vous faites face, le fait qu'il n'y a pas de prix contractuel pour la matière première, c'est-à-dire le blé dur?

M. John De Pape: Je le répète, j'hésite à parler au nom de multinationales ou de grandes sociétés, mais on m'a dit que le rôle que joue la Commission du blé au plan de la fixation des prix est perçu par certains comme un obstacle.

M. Rick Borotsik: Comme un facteur dissuasif?

M. John De Pape: Comme un facteur dissuasif, étant donné que...

M. Rick Borotsik: C'est une opinion très politisée, très...

M. John De Pape: Eh bien, je ne peux pas parler en leur nom. Je peux donner ma propre opinion...

M. Rick Borotsik: Je comprends cela.

M. John De Pape: C'est la rumeur, et vous me demandez d'en faire état. Mais alors, la question qui se pose est la suivante: pourquoi est-ce qu'ADM est venu des États-Unis et contrôle maintenant en grande partie le secteur de la meunerie? Encore une fois, à ce qu'on dit, selon les rumeurs, cette entreprise et d'autres se sont intéressées à la transformation du blé—certaines sur une petite échelle—parce qu'elles veulent avoir un pied dans la place, car la rumeur veut que dans cinq ans, la Commission du blé ne sera plus active sur le marché national, et ces entreprises veulent être les premières sur les rangs lorsque la commission abandonnera ce rôle.

Le président: Merci.

Madame Ur.

Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.): Merci, monsieur le président.

Rick a soulevé brièvement une des questions que je voulais poser. Vous avez mentionné que ce concept est né au Dakota du Nord et que maintenant, il a une dimension supplémentaire, une dimension canadienne. Pourquoi ce concept ne s'est-il pas développé davantage au Dakota du Nord? Pourquoi a-t-on voulu lui ajouter une dimension canadienne?

Telle est ma première question. Je vais en poser deux ou trois.

Au cas où cette usine verrait le jour, quel serait le pourcentage de blé dur américain, par rapport au blé dur canadien, qui y serait transformé?

Enfin, comme vous le savez certainement, dix agriculteurs, je crois, siègent au conseil d'administration de la commission. Je ne sais pas en quoi consiste leur activité, si ce sont des producteurs de blé dur. Ne comprennent-ils pas la situation dans laquelle vous vous trouvez, ni ce qui vous préoccupe? Le conseil ne compte plus maintenant uniquement des gens qui sont nommés, et je serais portée à penser que dix administrateurs qui sont impliqués dans l'agriculture pourraient comprendre ce que des agriculteurs veulent faire.

Peut-être devrais-je connaître la réponse à cette question, mais comme ce n'est pas le cas, je vais la poser. Ces 650 agriculteurs ne peuvent-ils pas joindre le geste à la parole en ce qui concerne cette coopérative, circonvenir la Commission canadienne du blé, tout simplement cultiver du blé dur, le vendre directement à la coopérative et ne plus avoir de problèmes avec la commission?

Le président: La réponse est non.

M. Roy Bailey: La réponse est non.

Une voix: Il n'y aucune garantie...

Le président: Continuez, madame Ur.

Mme Rose-Marie Ur: Mais il y a dix agriculteurs qui siègent au conseil d'administration, alors, en quoi est-ce qu'ils vous aident?

M. David Schnell: Je vais répondre aux deux premières questions, si vous n'y voyez pas d'inconvénient. John peut répondre aux deux dernières.

Des voix: Oh, oh!

Mme Rose-Marie Ur: Peu importe qui y répond.

M. David Schnell: Vous avez posé une question sur la participation des agriculteurs canadiens par rapport à celle des Américains et vous avez demandé pourquoi les Américains ne s'occupaient pas simplement eux-mêmes de la chose. Je l'ai dit auparavant, du moins, j'ai essayé: lorsque le projet a été lancé au Dakota du Nord, il fallait qu'il s'appuie sur une grande zone de production de blé dur. Il fallait trouver la matière première. Au début, le projet a attiré 250 agriculteurs du Dakota du Nord. Ils se sont dit: eh bien, c'est magnifique, nous sommes 250 et nous sommes tous déterminés à construire cette usine, mais ce n'est pas suffisant. Il nous faut 1 000 agriculteurs et il nous faut plus de blé dur—il faut élargir le cercle. C'est à ce moment là qu'on a fait appel aux Canadiens.

Vous avez demandé quel allait être le niveau de participation. Eh bien, lorsqu'ils ont fait appel aux Canadiens, tout d'un coup, cela a attiré 400 agriculteurs de plus ici, au Canada. Donc, à l'heure actuelle, il y a 400 Canadiens et 250 Américains. Avec le temps, et étant donné que rien ne bouge, l'intérêt des Américains a commencé à faiblir. Pour beaucoup de participants canadiens, il s'agit d'une opération rentable, d'un projet qui doit aboutir. La participation canadienne va probablement doubler dès que nous allons annoncer—si nous l'annonçons, si nous pouvons l'annoncer—quel va être l'emplacement de l'usine. Tels sont donc les niveaux de la participation canadienne et américaine.

Si cette usine était construite à, disons, Weyburn, je m'attendrais à ce que 1 000 agriculteurs canadiens y livrent du blé dur—par opposition à 200 Américains. Pour vous donner un aperçu du niveau de participation, du niveau de l'investissement d'un agriculteur dans cette usine, nous sommes partis de l'idée qu'il y aurait 1 200 agriculteurs qui livreraient chacun 4 000 boisseaux. Ces 4 000 boisseaux, c'est la production annuelle d'un quart de section de terrain. C'est ainsi que l'on arrive aux cinq millions de boisseaux dont nous avons parlé. Acquérir une part dans la coopérative vous donne le droit et l'obligation de livrer un boisseau par an à l'usine—le droit et l'obligation.

• 0950

Vous avez parlé de la réussite du groupe de Carrington, au Dakota du Nord: elle est due au fait que ce groupe a adopté le concept de la coopérative nouvelle génération. Il a accès à un blé dur qui est de la meilleure qualité au monde parce que ses membres ont le droit et l'obligation de livrer leur produit à son usine.

Le président: Voilà une longue réponse. Il ne reste qu'une minute pour les deux autres.

M. David Schnell: Bien. Merci.

Le président: Allez-y, John.

M. John De Pape: Je vais répondre à la deuxième question en premier. La réponse est non.

En ce qui concerne le conseil d'administration de la Commission du blé, à ce que nous sachions, les points de vue sont divergents. En fait, dans les milieux agricoles de l'Ouest du Canada, il semble que les avis soient partagés—au niveau des agriculteurs, du moins—certains étant favorables à la vente à guichet unique et d'autres, au marché libre. Voilà où nous en sommes.

Les membres du conseil qui s'opposent à toute concession en faveur des coopératives nouvelle génération estiment que cela menace le concept de la mise en commun, que cela menace la commission et que c'est le «commencement de la fin»—c'est une expression qui a été utilisée. Un des administrateurs m'a dit que s'ils autorisaient des concessions en notre faveur, ils allaient être inondés de demandes allant dans le même sens. Selon moi, ce serait une bonne chose, mais eux, ils considèrent cela comme un menace. Toutefois, d'autres membres du conseil appuient sans réserve ce que nous essayons de faire.

Voilà donc où nous en sommes.

Le président: Merci.

Monsieur Hoeppner.

M. Jake E. Hoeppner (Portage—Lisgar, Réf.): Merci, monsieur le président.

Bienvenue, messieurs.

J'aimerais vous lire une déclaration faite par un responsable de la Commission du blé, M. Geddes. Il est ici aujourd'hui. Il fut un temps où il faisait partie de mes électeurs. Bref, je voudrais ensuite vous demander ce qui, à votre avis, est faux dans cette déclaration. Voici ce qu'il a dit lors d'une audience du comité du sénat chargé d'examiner le projet de loi C-4:

    Un autre élément essentiel et qui n'est pas bien compris—et qui, d'après les compte rendus que j'ai lus, n'a peut-être pas été bien représenté dans certaines de vos audiences—a trait à l'exemption pour la transformation à la ferme. À une certaine époque, les agriculteurs pouvaient moudre jusqu'à 50 boisseaux de blé pour les besoins de leur famille. Ce n'est plus le cas, même si je crois que certaines personnes l'ont affirmé. Les agriculteurs—vous, par exemple, monsieur le président—qui produisent 15 000 ou 20 000 boisseaux de blé peuvent moudre la totalité de ce blé dans leur exploitation, dans une meunerie qu'ils contrôlent, et vendre le produit n'importe où au Canada. Nous avons créé un permis de transport interprovincial que les producteurs peuvent se procurer sans frais, et les agriculteurs peuvent en toute liberté vendre partout au Canada le grain produit par leur propre usine de transformation, sans avoir à passer par la Commission canadienne du blé. Il n'y a ni rachat ni acheminement par camion à l'élévateur.

On lui a demandé: «Il faut un permis pour le faire?»

M. Geddes a répondu,

    Il faut un permis en raison du libellé de la loi concernant le transport des produits du blé transformé entre les provinces. Le producteur a simplement à présenter une demande à la Commission du blé, et nous lui faisons parvenir ce permis de transport interprovincial.

Cela ne vous suffit pas?

M. John De Pape: Je ne m'attendais pas à cette dernière question. J'allais parler de l'exemption pour la transformation à la ferme. D'après ce que je comprends, l'exemption s'applique lorsqu'un agriculteur transforme son propre blé dans sa propre meunerie. Il faut que la meunerie soit situé sur les lieux de son exploitation agricole.

M. Jake Hoeppner: N'est-ce pas ce qui se passerait, en l'occurrence?

M. John De Pape: Ce que Prairie Pasta a demandé, c'est qu'on élargisse cette exemption pour couvrir 650 agriculteurs ou plus, collectivement. Si c'est possible dans le cas d'un agriculteur, pourquoi ne pourrait-on pas le faire pour un groupe d'agriculteurs?

M. Jake Hoeppner: Vous avez tout à fait raison.

M. John De Pape: La question que je pose est celle-ci: et si deux agriculteurs, deux frères qui détiennent chacun un carnet de permis, voulaient s'associer pour le faire? Quel est le seuil à partir duquel l'exemption ne s'applique pas? C'est clair, c'est au- dessus de un agriculteur.

Mais ce qui compte en définitive, c'est ceci: lorsque j'en ai parlé à un représentant de la Commission du blé—je ne me rappelle pas si c'était un membre du personnel ou un administrateur—on m'a répondu que l'exemption pour la transformation à la ferme est autorisée—dans le cas où il s'agit d'un agriculteur qui possède une meunerie—parce que ce n'est pas une opération d'envergure commerciale et que, par conséquent, cela ne risque pas de semer le trouble, je suppose. Mais si un agriculteur veut donner une dimension commerciale à ses opérations, pour une raison que j'ignore, cela pose des problèmes. C'est ce que nous n'acceptons pas, philosophiquement parlant.

M. Jake Hoeppner: Il s'agit d'une coopérative nouvelle génération, d'une coopérative privée. Personne ne peut investir dans ce projet, sauf des agriculteurs; ce sont des agriculteurs qui en sont propriétaires.

M. John De Pape: Oui.

M. Jake Hoeppner: On dit ici que vous pouvez transformer entre 15 000 et 20 000 boisseaux sur les lieux de votre exploitation agricole. Vous, vous demandez, je pense, 4 000 boisseaux à vos investisseurs; alors, dans quel but les agriculteurs cultivent-ils ce grain? Pour en tirer un bénéfice ou pour entretenir une Commission du blé?

• 0955

M. John De Pape: Je présume que vous posez la question pour la forme.

Des voix: Oh, oh!

M. Jake Hoeppner: J'aimerais savoir. J'ai toujours pensé que la Commission du blé existait pour agir dans l'intérêt supérieur des agriculteurs.

M. John De Pape: Voilà un agriculteur comme on n'en fait plus.

David, pourquoi cultivez-vous du blé dur?

M. David Schnell: Je cultive mon blé dur pour en tirer un bénéfice. J'ai découvert que, compte tenu des coûts de production, ce n'est plus possible. Je veux donc être impliqué dans l'étape suivante de la chaîne de production alimentaire. Il faut que je devienne transformateur pour survivre.

M. Jake Hoeppner: Je suis d'accord avec vous.

M. David Schnell: C'est de là qu'est partie l'idée de créer Prairie Pasta Producers.

M. Jake Hoeppner: Vous savez que c'est ainsi que l'industrie des oléagineux a vu le jour, avec la création de Co-op Vegetable Oils, à Altona. Des agriculteurs ont construit cette usine et l'ont exploitée sous la forme d'une coopérative pendant des années jusqu'à ce que Pools la reprenne. C'est ainsi qu'a démarré une industrie d'une envergure incroyable. Pourquoi la Commission du blé s'opposerait-elle à un projet pareil? Si nous pouvons transformer tout notre grain, nous n'avons pas besoin de la Commission du blé, n'est-ce pas?

Le président: M. Hoeppner, les députés auront la possibilité de poser des questions aux représentants de la Commission du blé.

Il ne nous reste que quelques minutes avant de clore cette partie de la séance et j'aimerais poser une question.

Monsieur De Pape, vous avez mentionné que certaines personnes, qui sont évidemment en faveur de la Commission du blé, voient dans votre proposition une menace. Je peux comprendre cela, parce qu'il y a dans les Prairies beaucoup de gens qui appuient sans réserve la Commission du blé et qui ne voudraient pas que l'on instaure quelque chose qui, dans la pratique, minerait l'intégrité de la commission. Alors, ma question est la suivante: croyez-vous en vérité qu'une entreprise comme la vôtre—notamment si votre méthode devenait populaire et était imitée par d'autres coopératives situées ailleurs, par exemple, en Saskatchewan—peut exister parallèlement à la Commission du blé? Bref, pouvez-vous exploiter votre entreprise sans pour autant miner l'intégrité de la Commission du blé?

M. John De Pape: Oui, absolument.

Le président: Pourquoi? Comment? Comment allez-vous vous y prendre?

M. John De Pape: À l'heure actuelle, la Commission du blé s'occupe de deux secteurs: les exportations à l'étranger, en dehors du pays, et la production nationale de farine provenant du blé destiné à la consommation humaine—non pas le blé fourrager, mais le blé alimentaire. Je ne veux pas leur faire dire ce qu'ils n'ont pas dit, mais les responsables de la commission nous ont très clairement laissé entendre qu'ils ne font pas de bénéfices sur les ventes nationales. Le prix du blé destiné à l'alimentation humaine est établi selon une formule qui se fonde sur le prix au comptant pratiqué à Minneapolis, dans lequel est pris en compte le coût du transport en divers points.

J'ai posé la question de but en blanc: faites-vous un bénéfice? Ils m'ont répondu non, qu'ils ne pouvaient pas, car il s'agit d'un marché libre et la commission doit être concurrentielle. Ainsi donc, en ce domaine, du moins, la commission ne crée pas de valeur. J'espère que vous allez poser la même question à ses représentants, car j'aimerais entendre leur réponse, mais à mon avis, pour continuer à jouer un rôle en tant qu'exportateur—et c'est là où, je crois, la commission crée de la valeur—elle n'a pas besoin d'intervenir sur le marché national.

Le président: Bon.

Une dernière précision. Vous avez mentionné que le conseil d'administration était partagé et que certains membres étaient favorables à votre projet et d'autres, non. Pourriez-vous préciser? Est-ce qu'il y a un administrateur qui est de votre côté, deux ou trois? Savez-vous comment se partagent les avis?

M. John De Pape: David, c'est vous qui tenez la marque.

Des voix: Oh, oh!

M. David Schnell: Nous avons rencontré la plupart des administrateurs. Les seuls que nous n'avons pas rencontrés, je crois, sont M. Arason et M. Stanford. Nous les avons rencontrés tous les 13, au moins une fois. Nous avons eu l'occasion de leur parler personnellement lors d'une réception qu'ils avaient organisée à Red Deer. Nous avons pu constater que les administrateurs qui sont nommés au conseil étaient très favorables au projet de Prairie Pasta, à cause du...

Le président: Tous les cinq?

M. David Schnell: Tous les quatre, parce que nous n'avons pas rencontré M. Arason.

Ils sont très favorables à notre projet parce que ce que veut faire Prairie Pasta est plein de bon sens, parce qu'il faut créer de la valeur. Nous avons pu constater que les quatre administrateurs nommés étaient tout à fait «sur la même longueur d'onde» que nous. Nous avons également pu constater que certains autres administrateurs nous étaient aussi très favorables. Certains ont un avis mitigé. Comme John l'a dit plutôt, les opinions sont partagées, et d'après ce que nous avons pu constater, je crois, certains sont très favorables, d'autres voient du pour et du contre dans notre projet et deux ou trois sont contre. Les avis sont partagés.

• 1000

Le président: J'aimerais vous remercier d'être venus faire cet exposé.

Mesdames et messieurs, nous allons faire une pause de cinq minutes, pas plus, et ensuite nous accueillerons les représentants de la Commission du blé. La séance est suspendue pour cinq minutes.

• 1001




• 1006

Le président: Chers collègues, nous reprenons nos travaux. Nous allons poursuivre la discussion sur les coopératives nouvelle génération et nous allons peut-être entendre un son de cloche différent—ou du moins le point de vue de la Commission canadienne du blé—à propos de la proposition faite à la Commission par Prairie Pasta Producers.

Je dois vous informer que Greg Arason, le PDG de la commission, n'a pas pu venir aujourd'hui. On m'a informé qu'il souffre apparemment d'une infection de l'oreille, et que son médecin lui a recommandé de ne pas prendre l'avion. Nous devrons donc nous passer du plaisir de sa compagnie aujourd'hui, mais je pense qu'il sera bien représenté par Adrian Measner, le vice- président exécutif de la commission en charge du marketing, par Jim Thompson, gestionnaire senior en marketing, et par notre vieil ami, Earl Geddes, qui est gestionnaire de programmes au Service du développement des marchés de la commission.

Serez-vous le seul à faire un bref exposé, monsieur Measner?

M. Adrian Measner (vice-président exécutif, Marketing, Commission canadienne du blé): Oui, je vais me contenter de faire une brève déclaration liminaire.

Le président: C'est parfait. Nous procéderons ensuite aux séries de questions. Merci d'être venus nous voir aujourd'hui.

M. Adrian Measner: Je vous remercie à mon tour de nous avoir invités à comparaître ici aujourd'hui, monsieur le président.

L'industrie céréalière à valeur ajoutée du Canada et de l'Ouest du Canada est bien vivante et se développe considérablement. Depuis que le gouvernement du Canada a supprimé le système de double prix du blé en 1990 et a permis à la Commission canadienne du blé de collaborer avec l'industrie nationale canadienne, on a assisté à une augmentation de 28 p. 100 de l'exploitation des capacités de mouture au Canada. Depuis 1990, l'industrie de l'orge de brasserie a, elle aussi, développé de 50 p. 100 son potentiel de transformation pour alimenter en malt les marchés national et internationaux, et sa capacité est passée à 1,2 million de tonnes annuellement. Au cours des cinq dernières années, la mouture de blé dur au Canada a progressé de 20 p. 100.

La Commission canadienne du blé défend énergiquement une augmentation du volume de la transformation domestique pour quatre très bonnes raisons. Notre marché national est stable ou en expansion, il est prévisible et il génère des bénéfices élevés pour les agriculteurs représentés par la CCB. Où qu'elle se situe au Canada, l'activité économique profite à tous les Canadiens, et dans l'Ouest, cette activité contribue au soutien des grandes collectivités rurales des Prairies.

Le grain transformé au Canada n'encombre pas autant le réseau de transport que le grain d'exportation, et nous entretenons d'excellentes relations de clientèle avec les plus gros clients des Prairies pour le blé de meunerie et l'orge de brasserie.

• 1010

Je voudrais à nouveau vous remercier, monsieur le président, de nous permettre de témoigner. Ce matin, j'aimerais faire le point sur la situation actuelle de l'industrie de transformation de l'orge et du blé, recenser les problèmes que soulève, pour la Commission canadienne du blé, la demande de Prairie Pasta Producers et expliquer comment la commission s'efforce d'aplanir ces problèmes en élaborant une politique sur les coopératives nouvelle génération.

J'aimerais, pour commencer, donner quelques détails sur la situation actuelle de l'industrie nationale. Les industries canadiennes du blé, de la minoterie et de l'orge de brasserie sont les principaux clients des agriculteurs des Prairies et ce sont des clients au comptant. L'industrie canadienne de la transformation achète annuellement à la Commission canadienne du blé entre 2,3 et 2,4 millions de tonnes de blé de meunerie; entre 270 et 280 tonnes de blé dur et 1,2 million de tonnes d'orge de brasserie. Le Canada, dans son ensemble, dispose d'une importante infrastructure de valeur ajoutée, et la capacité de transformation a progressé, grâce à de nouveaux investissements, d'environ 16 p. 100 depuis 1990. Cette croissance se compare favorablement à celle de l'industrie américaine.

Depuis 1990, une part importante de l'industrie canadienne de la transformation a changé de mains, et tous les investissements ont été le résultat d'initiatives prises par le secteur privé qui en a également assumé les risques, et non la conséquence de la mise en place, par les gouvernements ou les institutions, de mesures encourageant le développement. La relation entre la Commission canadienne du blé et les transformateurs canadiens est d'ordre strictement commercial. Les décisions d'investissement sont dictées par l'environnement concurrentiel nord-américain qui détermine les prix et par la profitabilité anticipée de l'investissement, et ne se fondent aucunement sur des incitatifs accordés par la Commission canadienne du blé.

Le prix facturé à tous les transformateurs au Canada est «concurrentiel en Amérique du Nord», sur un axe nord-sud, quelle que soit la région du Canada concernée. Il tient parfaitement compte des principes nord-américains qui assurent la communication préalable des prix et qui exigent des marchés transparents et l'application des tarifs de transport des marchandises courants à partir des diverses régions géographiques du Canada. La communication préalable des prix s'inscrit dans le contexte des signaux donnés par le marché; les prix varient quotidiennement en fonction des fluctuations du marché américain.

Il est également important de reconnaître que la frontière canado-américaine est ouverte au libre-échange; si la Commission canadienne du blé ne se montre pas concurrentielle, l'industrie canadienne de la transformation est en mesure d'importer du blé américain sans aucune restriction. Il n'y a pas eu d'importations importantes de blé américain. En outre, la balance commerciale avec les États-Unis, en ce qui concerne les mélanges de farine, les pâtes de cuisson, les produits de boulangerie et les pâtes alimentaires, affiche actuellement un solde positif pour le Canada.

Prairie Pasta Producers a fait valoir à la Commission canadienne du blé qu'à titre de coopérative nouvelle génération, l'entreprise devrait en fait être exemptée de la politique de détermination des prix de la commission. Cette demande a été formulée au nom de tous les agriculteurs qui pourraient souhaiter former une coopérative nouvelle génération pour transformer des céréales que la Commission canadienne du blé s'est engagée à commercialiser au nom des agriculteurs.

Essentiellement, voici ce qui est demandé: accorder aux membres d'une coopérative nouvelle génération l'accès exclusif à une partie du marché nord-américain. Cette demande découle du fait que le marché nord-américain est un marché à forte valeur ajoutée et que cela constituerait un incitatif à l'investissement pour les agriculteurs.

En examinant cette demande, la CCB, du fait qu'elle est le seul vendeur de blé, de blé dur et d'orge de brasserie sur le marché canadien, doit tenir compte de l'effet qu'une telle exemption pourrait avoir sur l'ensemble du secteur national de la transformation et, par-dessus tout, sur les agriculteurs de l'Ouest du Canada.

La priorité de la Commission canadienne du blé à cet égard et en ce qui concerne les autres questions liées à la valeur ajoutée est d'assurer que ses politiques créent un environnement qui contribue à des investissements prudents dans des activités à valeur ajoutée par tous les groupes concernés. Pour être précis, cela signifie qu'il n'y a pas de servitudes sur les investissements actuels et éventuels, qui s'ajouteraient à celles qui existeraient probablement dans un environnement ouvert ou à vendeurs multiples.

Cela signifie également que les investisseurs, présents ou futurs, doivent être assurés que, compte tenu des conditions du marché, notre politique de détermination des prix est et restera cohérente et juste pour tous. Les investisseurs doivent avoir confiance dans la stabilité à long terme de l'environnement de la transformation et ne peuvent pas accepter que leurs investissements soient menacés par des changements de politique et de réglementation inspirés par des objectifs à caractère politique ou social.

Je voudrais vous résumer les principes auxquels nous nous référons pour prendre de telles décisions. Nous devons adopter une approche équilibrée et juste envers tous les transformateurs. La consultation menée auprès des transformateurs nationaux a fait ressortir que la politique de la Commission canadienne du blé relative aux ventes sur le marché national doit être cohérente, claire, juste et transparente—autrement dit, ne pas permettre le traitement privilégié d'un transformateur par rapport à un autre. La CCB, dans le contexte d'une économie axée sur les forces du marché, doit se montrer aussi neutre que possible en ce qui concerne ses décisions discrétionnaires susceptibles d'influer sur la compétitivité des transformateurs canadiens en Amérique du Nord —et particulièrement sur la compétitivité qui existe entre les transformateurs canadiens.

• 1015

Nous devons préserver l'intégrité des comptes de mise en commun. Ce principe renvoie à l'obligation de la CCB, à cause de son monopole sur les livraisons, d'assurer que tous les agriculteurs qui approvisionnent le pool bénéficient de leur juste part des marchés lucratifs. En outre, nous devons défendre les principes qui sous-tendent la vente à guichet unique.

La CCB ne doit pas non plus être une force de dissuasion pour le secteur de la transformation à valeur ajoutée. Témoin les importants efforts consentis par la commission ces dernières années pour faire aboutir les négociations globales concernant sa politique de détermination des prix nationaux avec l'industrie canadienne de la meunerie, lors de conférences sur la valeur ajoutée et autres séminaires.

Nous devons avoir une approche équilibrée et juste à l'égard de tous les agriculteurs. Cela signifie que nous devons accorder un accès équivalent à chaque agriculteur qui passe un contrat céréalier avec la Commission canadienne du blé, c'est-à-dire un accès égal aux bénéfices du marché, aux débouchés et aux options de trésorerie.

La Commission canadienne du blé a toujours soutenu que l'on ne devrait pas s'attendre à ce que ce soit les agriculteurs des Prairies qui financent, par des incitatifs ou des subventions, le développement du secteur qui ajoute de la valeur aux récoltes au Canada. Encourager le développement industriel a toujours été et continue d'être l'apanage et la responsabilité des gouvernements.

Le conseil d'administration de la commission devra décider comment faciliter la création de coopératives nouvelle génération tout en respectant les principes énoncés ci-dessus. Les administrateurs et le personnel de la commission ont rencontré les responsables de Prairie Pasta Producers en trois occasions et communiquent régulièrement avec eux depuis décembre 1998.

Lors du conseil d'administration de la CCB du 1er juin, il y a tout juste une semaine, les administrateurs ont rencontré les dirigeants de l'Association nationale canadienne des meuniers afin d'obtenir un rapport de première main sur l'état de l'industrie. Cette association a fait remarquer à la CCB que son industrie tournait pratiquement à pleine capacité, et que la construction de nouvelles installations était envisagée à la fois pour le blé et pour le blé dur. Le personnel continue aussi à collaborer avec Pasta D'Aurum, qui prévoit construire une usine de pâtes similaire à Swift Current, en Saskatchewan.

L'élaboration d'une politique sur les coopératives nouvelle génération fait entrer en jeu tous les principes en vertu desquels fonctionne la Commission canadienne du blé, et son nouveau conseil d'administration prend cette responsabilité très au sérieux. Les administrateurs vont élaborer une politique qui s'appliquera aux coopératives nouvelle génération dans une perspective à long terme.

Il m'ont chargé de vous faire savoir que cette politique sur les coopératives nouvelle génération est en voie d'élaboration et que, vu l'importance de la question, ils souhaitent s'entourer de toutes les garanties nécessaires et que la question soit débattue. Ils ne sont pas encore parvenus à mettre au point cette politique, mais ils sont tout à fait conscients de la nécessité de régler la question.

Je conclurais en disant que l'industrie canadienne de la meunerie et celle de la malterie, en dépit des subventions à l'exportation dont profitent certains de leurs concurrents, sont en expansion et développent leurs exportations tout en collaborant étroitement avec la Commission canadienne du blé et les agriculteurs des Prairies. Le climat d'investissement pour la transformation des céréales au Canada est excellent, et tous les nouveaux projets qui sont examinés devraient être jugés en fonction de leur mérite économique. Nous félicitons les responsables de Prairies Pasta Producers de leur initiative et nous avons bon espoir que le mérite économique de ce projet ressortira une fois leur plan d'entreprise finalisé.

Nous avons aussi récemment vu s'ouvrir plusieurs entreprises: des minoteries à Elie, au Manitoba, et Agri Partners International à Red Deer, en Alberta. Nous espérons que bientôt, il y aura une nouvelle usine de pâtes alimentaires dans les Prairies.

Je vous remercie, monsieur le président, de m'avoir offert la possibilité de faire ces quelques observations.

Le président: Merci, monsieur Measner.

Avant de passer la parole à M. Bailey pour la première série de questions, la présidence souhaite obtenir une information.

Monsieur Measner ou vous, monsieur Thompson, peu importe, si Prairie Pasta était opérationnel aujourd'hui et qu'un agriculteur membre de cette coopérative nouvelle génération vendait une tonne métrique de blé dur à la Commission du blé—ce qui serait obligatoire puisqu'en bout de ligne, il faudrait que l'usine de pâtes alimentaires la rachète—combien toucherait l'agriculteur pour cette tonne métrique de blé dur aujourd'hui? Quel est le prix actuel du marché, approximativement?

M. Adrian Measner: Le montant final qu'on peut s'attendre à tirer aujourd'hui du DAOC numéro 1 est environ 190 $ la tonne.

Le président: Cent quatre-vingt-dix dollars la tonne? Combien l'usine de pâtes alimentaires devrait-elle payer pour le racheter?

• 1020

M. Adrian Measner: Si c'était vendu au prix national du blé destiné à l'alimentation humaine, Jim, ne serait-ce pas quelques dollars de plus?

M. Jim Thompson (gestionnaire senior en marketing, Produits locaux et d'exportation de blé et États-Unis, Commission canadienne du blé): Ce blé se vend autour de 200 $ la tonne.

Le président: Il y aurait donc un écart de 10 $.

M. Jim Thompson: En gros, oui.

Le président: Je suppose que pour un profane comme moi, le fait que d'avoir à passer par la commission entraîne une majoration de 10 $ la tonne apparaîtrait comme un désavantage.

M. Adrian Measner: Cela varie d'un jour à l'autre. Quoi qu'il en soit, ces 10 $ sont versés au compte de mise en commun de tous les agriculteurs de l'Ouest du Canada, et ce prix est établi en fonction du marché américain, ce qui fait que ce pourrait être 10 $ aujourd'hui, 15 $ demain ou 5 $. Ou encore, comme cela a été le cas ces dernières semaines, le prix pourrait se situer en deçà de la marge qu'obtiendraient les agriculteurs. Il s'agit d'un prix du marché qui fluctue au jour le jour.

Le président: Earl.

M. W. Earl Geddes (gestionnaire de programmes, Développement des marchés, Division du développement des marchés et des ventes, Commission canadienne du blé): Monsieur le président, si vous le permettez, j'aimerais revenir sur une de vos observations, quand vous avez dit qu'il s'agit d'un désavantage pour l'usine...

Le président: En apparence...

M. Earl Geddes: C'est effectivement un désavantage éventuel pour un investisseur qui aurait pensé tirer profit de la valeur du produit, mais pour l'usine... Le prix qu'elle paierait, qui est aujourd'hui d'environ 200 $ la tonne, est très compétitif à l'échelle nord-américaine, ce qui fait que l'usine n'est pas désavantagée par rapport à tous les autres transformateurs d'Amérique du Nord, par le prix national du blé destiné à l'alimentation humaine demandé par la Commission du blé.

Le président: Je vois. Merci.

Nous allons maintenant entendre M. Bailey.

M. Roy Bailey: Merci, monsieur le président.

Il y a une remarque que j'ai entendue dans la présentation qui m'a intéressé, car j'ai pris mon premier carnet de permis il y a plus longtemps que je ne voudrais l'admettre aujourd'hui. Je crois que c'était en 1951, et je peux dire, messieurs, qu'à l'époque, la commission faisait face à plusieurs problèmes et que cela n'a pas changé depuis ce temps là. Aujourd'hui, j'ai l'impression que le système de guichet unique est attaqué plus vivement qu'il ne l'a jamais été, je pense que vous en conviendrez, mais on a affirmé quelque chose qui mérite d'être précisé pour notre gouverne à tous.

Vous avez mentionné qu'il existait un accord de libre-échange régissant le mouvement transfrontières du grain, mais je veux que tout le monde sache qu'un agriculteur de la Saskatchewan ou de n'importe quel endroit sous la juridiction de la Commission du blé n'a pas la liberté de vendre son propre grain de l'autre côté de la frontière. Voilà autour de quoi tournent tous les conflits. Je pense qu'on n'a pas dit clairement que si l'agriculteur en question le fait, c'est une violation, car ce blé, en fait, n'est pas un blé dont il peut faire ce qu'il veut, sauf si c'est pour le consommer lui-même; j'aimerais que ce soit clair.

Il y a un autre point qui me chiffonne un peu. J'aurais pensé que la Commission du blé serait tout à fait heureuse de voir des initiatives témoignant d'un esprit d'entreprise comme la création de l'usine de Prairie Pasta—et d'autres—se multiplier, ce qui laisserait une moins grande quantité de grain à vendre sur les marchés étrangers. Vous n'auriez pas besoin de réaliser autant de ventes. Il y aurait plus de gens qui travailleraient dans les Prairies. Il y aurait plus d'activités induites dans les Prairies.

Je n'ai jamais compris—ça dure depuis ma tendre jeunesse—pourquoi nous sommes toujours des bûcherons et des porteurs d'eau après tout ce temps. Ce n'est pas le cas en ce qui concerne les matières premières hors commission... Regardez ce qui est arrivé au canola. Regardez ce qui est arrivé aux autres grains. La même chose ne s'est pas produite avec le blé dans les Prairies, et c'est pourquoi j'ai le sentiment, juste en parlant à mes gens, qu'il y a une opposition grandissante au système de commercialisation à comptoir unique mis en place par la Commission du blé. Je ne dis pas cela négativement. Je fais simplement remarquer—je suis sûr que vous en conviendrez—que cette opposition existe et qu'elle se développe.

M. Adrian Measner: J'aimerais répondre. Il y a deux choses à relever dans ce que vous venez de dire, et je vais demander à M. Thompson de répondre au premier point, votre remarque sur l'exportation du grain par les agriculteurs.

Je tiens à souligner que la Commission canadienne du blé est tout à fait en faveur de la valeur ajoutée. Nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour appuyer la valeur ajoutée. C'est à notre avantage. Il s'agit d'un marché intéressant pour nous. C'est bon pour les agriculteurs et c'est bon pour le Canada, et nous sommes à 100 p. 100 favorables à la valeur ajoutée.

Certains événements survenus sur le marché international ont rendu la vie très difficile aux meuniers et aux entreprises de maltage. Actuellement, vous le savez, les pays de la Communauté européenne accordent des subventions très élevées à l'exportation de la farine et du malt. Il s'avère très difficile pour nos entreprises de transformation d'être concurrentielles sur ce marché, alors qu'elles ne bénéficient pas des mêmes subventions à l'exportation. Nous avons travaillé en étroite collaboration avec elles pour parvenir à vendre un maximum sur ce marché à l'exportation.

Du côté des entreprises de maltage, je pense, comme je l'ai mentionné, que la croissance a été plus que substantielle ces dernières années. Quant aux meuneries, compte tenu de l'ampleur de ces subventions, les choses ont été beaucoup plus difficiles, et nous n'avons pas aussi bien réussi sur le marché à l'exportation, vu qu'il est impossible de se montrer compétitif face à un tel système. La croissance démographique, la population du Canada, est ce qui détermine véritablement la quantité de grain de mouture qui sera utilisé au Canada, et c'est là que la croissance devra se développer, à moins que les subventions ne soient supprimées dans les autres pays.

• 1025

J'aimerais que M. Thompson vous parle de la procédure que doit suivre un agriculteur qui veut exporter son grain.

M. Jim Thompson: Si vous le permettez, j'aimerais ajouter à ce qui vient d'être dit que plus de 800 000 tonnes de blé et de blé dur sont actuellement transformées dans l'Ouest du Canada. Il faut savoir également que l'industrie de la mouture sèche et de la mouture du blé dur est en pleine maturité—les premières minoteries ont été construites dans l'Ouest à la fin des années 1800—alors que le secteur des oléagineux et de la trituration du canola, de par sa nature, est beaucoup plus immature et en est au stade de la pleine croissance.

Pour ce qui est des ventes directes des producteurs auxquelles vous venez de faire allusion, ou ce que l'on appelle communément la campagne de rachat, étant donné que la Commission du blé conserve le monopole des exportations, elle a la responsabilité de capter, pour les comptes de mise en commun, les avantages pécuniaires de tout mouvement de grain vers ce point d'exportation. Par conséquent, les producteurs de la région désignée doivent passer par le système de vente directe quand ils commercialisent leur grain aux États-Unis.

M. Roy Bailey: Merci, monsieur le président.

Le président: Mme Alarie laisse passer son tour, nous entendrons donc tout de suite M. McCormick.

M. Larry McCormick (Hastings—Frontenac—Lennox and Addington, Lib.): Merci, monsieur le président.

Merci de votre présence, messieurs. Je me réjouis également que le groupe précédent ait aussi témoigné aujourd'hui.

La valeur ajoutée se développe rapidement au Canada. La Commission canadienne du blé a globalement bien accompli sa mission, c'est l'avis de la plupart des Canadiens, mais il arrive un moment où des changements sont nécessaires, et je pense que ce moment n'est plus très loin—dans combien de temps cela va-t-il arriver, nous verrons. Pour ce qui est de la valeur ajoutée, je présume que c'est une activité en majeure partie contrôlée par les très grandes entreprises. Je veux simplement en avoir confirmation. Par exemple, nous avons entendu parler d'une entreprise d'Elie, au Manitoba, qui fait de la transformation. Appartient-elle à une des grandes sociétés nationales ou internationales ou à une plus petite...?

M. Jim Thompson: L'industrie meunière canadienne est, en gros, composée de la manière suivante: 43 p. 100 de cette industrie appartient à ADM Milling Co.; 21 p. 100 à Robin Hood; 7 p. 100 à Dover Industries, qui est une compagnie canadienne; 7 p. 100 à Parrish and Heimbecker; et 3 p. 100 à la Commission du blé de la Saskatchewan, qui appartient à CSP Foods. Il y a aussi divers plus petits transformateurs qui contrôlent des pourcentages moins élevés—ce qui ne veut pas dire que ce sont des petits transformateurs. La société Nabisco est l'un d'entre eux—elle fabrique des produits à base de céréales—tout comme Nisshing Flour Milling, et ils possèdent tous des minoteries au Canada. Prairie Flour Mills est une entité indépendante. Je ne suis pas certain de sa structure de propriété, mais elle appartient à des capitaux privés—autant que je sache.

M. Larry McCormick: Merci.

J'étais là à vous écouter attentivement, et cela m'a fait penser au groupe de travail mis en place par le gouvernement l'année dernière pour examiner les fusions de banques au Canada. Aujourd'hui, un grand nombre de Canadiens nous demandent de faire la même chose dans le secteur de l'agroalimentaire et du commerce alimentaire de détail.

Cette après-midi, si je ne retourne pas dans ma circonscription—j'ai voté aujourd'hui, mais il y a des élections ici, en Ontario—je ferai une déclaration à la Chambre des communes à propos d'une caisse d'épargne qui est une coopérative publique sans but lucratif. Mon adjoint législatif m'a demandé si je m'étais préoccupé des conséquences de cette déclaration, dans laquelle je fais l'éloge de cette coopérative, de cette caisse d'épargne, pour les récompenses qu'elle a obtenues. J'ai dit que oui, que j'en étais conscient. Les six banques à chartes du Canada ont elles- mêmes déclaré qu'il y avait de la place pour les coopératives et les caisses d'épargne.

Le pays évolue dans cette direction, retourne aux origines et nous tournons en rond... Vous avez dit qu'une politique est en cours d'élaboration. Combien de temps faudra-t-il pour élaborer cette politique? Les petites entreprises disposent-elles d'une marge de manoeuvre pour traiter avec la Commission canadienne du blé? Encouragez-vous la croissance des petites entreprises? Encouragerez-vous le développement des coopératives grâce à une politique équitable?

M. Adrian Measner: En ce qui concerne la politique, il y a eu des discussions aux dernières réunions du conseil d'administration, comme cela a été souligné par les précédents intervenants. Le conseil espérait que la politique serait prête aujourd'hui, mais il s'agit d'un dossier compliqué, et les administrateurs ont jugé qu'ils avaient besoin de plus d'informations. C'est la raison pour laquelle ils ont rencontré l'association des meuniers, entre autres. Leur intention est de clore le dossier à la prochaine réunion du conseil d'administration, qui est prévue début juillet.

Bref, on peut dire que nous encourageons la croissance des petites industries. Nous encourageons effectivement leur développement. Nous n'essayons pas de créer des politiques qui s'y opposent. Nous essayons de mettre en place des politiques qui favorisent leur croissance.

Earl, souhaitiez-vous ajouter quelque chose?

• 1030

M. Earl Geddes: Si vous le permettez, monsieur le président, je voudrais donner des exemples à ce propos. Comme nous l'avons indiqué dans nos déclarations liminaires, l'industrie meunière a enregistré une croissance de 16 p. 100 au cours des dix dernières années; la majeure partie, sinon la totalité, de cette croissance a été enregistrée par des entreprises qui traitent moins 100 000 tonnes.

Au cours des deux ou trois dernières années, Prairie Harvest, un groupe d'agriculteurs d'Altona, au Manitoba a choisi, plutôt que de construire une usine à Altona, d'en acheter une à Edmonton. L'entreprise marche très bien. Tout l'argent investi dans cette usine vient d'agriculteurs, qui passent par la Commission canadienne du blé. Farm-Grow Oragnics est en train de faire construire une unité aux abords de Regina, là encore, il y a beaucoup d'argent provenant d'agriculteurs ou du milieu de l'agrobiologie, qui passe par la Commission canadienne du blé. Il y a Agri Partners International à Red Deer. On en a déjà parlé, mais encore une fois, c'est un groupe d'agriculteurs qui a commencé à promouvoir et mettre en oeuvre l'idée d'utiliser d'autres types de capitaux d'investissements.

On parle de changement—c'était un changement spectaculaire dans la façon dont nous traitons avec les transformateurs. Nous appliquons ce système, et il marche très bien. Nous encourageons activement le fonctionnement de tels groupes.

Et puis, il y a Prairie Flour Mills au Manitoba. Les agriculteurs ont investi beaucoup d'argent dans cette usine. Nous collaborons étroitement avec eux et le mécanisme de fixation des prix que nous appliquons dans leur cas leur permet d'être très compétitifs.

M. Larry McCormick: Monsieur le président, ma dernière question porte sur la coopérative du Manitoba qui appartient à des agriculteurs—quelle qu'en soit la structure—et qui a généré énormément de valeur ajoutée. Ces gens là bénéficient-ils de concessions, aussi modestes soient-elles, de la part de la commission pour transformer le blé dur?

M. Adrian Measner: Non.

M. Jim Thompson: Non, pas financièrement. Comme ce genre d'entreprise a généralement peu de personnel et qu'elle débute dans le secteur, nous consacrons énormément de temps et d'efforts à mettre les responsables pleinement au courant de tout ce qu'ils doivent savoir.

Dans le cas de Prairie Flour Mills, Earl, je pense que l'Institut international du Canada pour le grain leur a consacré 200 heures de temps et de recherches sur le marché pour tester leur produit, le tester sur le marché et le livrer à certains consommateurs et boulangers avant qu'ils commencent effectivement à exploiter leur meunerie.

M. Larry McCormick: Je vous remercie, monsieur le président.

Le président: Merci, Larry.

M. Measner, vous avez laissé entendre qu'on peut espérer voir la question résolue. Qu'est-ce que cela veut dire? Cela veut-il dire que du point de vue de la commission, il y a une possibilité de compromis, un moyen de parvenir à un arrangement, que si chaque partie met un peu d'eau dans son vin, il y a moyen de régler la chose, de donner à Prairie Pasta la possibilité de faire ce que ce groupe désire, sans pour cela menacer parallèlement le compte de mise en commun?

M. Adrian Measner: Le conseil examine toutes les options qui permettraient d'aider des organismes comme Prairie Pasta Producers tout en préservant l'intégrité du compte de mise en commun, ainsi que les investissements d'autres entités, de ne pas influer sur d'autres investissements ni de les placer dans une situation désavantageuse. Les administrateurs examinent très sérieusement un grand nombre d'options. Ils examinent les pouvoirs dont ils disposent en vertu de la nouvelle Loi sur la Commission canadienne du blé pour voir s'ils sont adaptés à certains de ces cas et ainsi de suite. Il existe une volonté patente, mais je ne sais pas quelle sera la réponse. Sera-t-elle acceptable pour Prairie Pasta Producers, je ne peux le dire.

Le président: Monsieur Proctor.

M. Dick Proctor: Merci, monsieur le président.

Je vous souhaite la bienvenue. Pour revenir à la question posée par John, nous avons tous entendu très clairement qu'ils ont fixé comme échéance—c'est ce qu'ils nous ont dit—la fin de ce mois.

Pensez-vous, monsieur Measner, que la CCB sera en mesure d'agir assez rapidement pour respecter cette échéance?

M. Adrian Measner: Oui. Je crois que le conseil d'administration prévoie régler la question au début juillet. Je ne suis pas en mesure de parler au nom du conseil, mais il est conscient de l'importance du dossier, et les administrateurs réalisent l'urgence de la situation. Je pense qu'ils sont également conscients de ce que cela signifie. Ils veulent s'assurer que la politique qu'ils élaborent sera adaptée à toutes les coopératives nouvelle génération, et pas seulement à une entité particulière. Ils s'efforcent de développer une politique qui s'inscrira dans une perspective à long terme et ils prennent leur tâche très au sérieux.

M. Dick Proctor: La proposition de Prairie Pasta, dans sa formulation actuelle, fait-elle craindre à la commission que nous sommes en train de nous placer dans une position vulnérable, en tant que pays, si l'on conclut une entente susceptible de privilégier un produit particulier; lui fait-elle craindre que nous puissions être en train de mettre en péril nos accords commerciaux? A-t-on des appréhensions à cet égard? Et dans l'affirmative, pourriez-vous développer?

M. Adrian Measner: Nous serions appréhensifs si l'intention n'était pas de facturer le prix à la valeur du marché à l'usine de transformation. S'il s'agissait d'une exemption notoire, c'est exactement ce que cela signifierait, et nous serions préoccupés d'un point de vue commercial, si l'on ne facturait pas le prix du marché. Le mécanisme actuel des prix est basé sur le marché américain, sur le marché commercial. Il est très défendable, du point de vue commercial, et ce serait effectivement s'en écarter.

• 1035

M. Dick Proctor: J'ai une dernière question, monsieur le président. La société Prairie Pasta a indiqué qu'elle bénéficiait du ferme soutien des ministres de l'Agriculture, aussi bien de la Saskatchewan que du Manitoba. Je me demande si ces deux gouvernements sont intervenus auprès de la Commission du blé au sujet du dossier de Prairie Pasta.

M. Adrian Measner: Earl, vous assistiez à la réunion.

Il y a eu une réunion, et je pense que Earl peut vous en parler.

M. Earl Geddes: Monsieur le président, les ministres de l'Agriculture du Manitoba et de la Saskatchewan ont rencontré les représentants de Prairie Pasta Producers et de la Commission canadienne du blé en février, si je ne me trompe pas, comme M. De Pape l'a indiqué.

Les deux ministres ont incité la Commission canadienne du blé à voir ce qu'elle pouvait faire pour aider les coopératives nouvelle génération à prospérer dans l'Ouest du Canada, déclarant notamment qu'ils aimaient le concept, la proposition avancée par Prairie Pasta Producers pour la construction d'une usine de transformation, tout en reconnaissant que la Commission du blé avait d'autre responsabilités et obligations à l'égard de l'industrie en général qui devaient être prises en considération.

Par conséquent, on peut certainement dire que les coopératives nouvelle génération bénéficient d'un appui évident dans l'Ouest du Canada.

M. Dick Proctor: Tout à fait.

M. Earl Geddes: Mais suggérer qu'il s'agit d'une tendance qui se dessine irait un peu au-delà de ce qu'ont prétendu les ministres, selon moi. Il s'agit d'un concept qu'ils appuient.

M. Dick Proctor: Merci.

Le président: Monsieur Borotsik.

M. Rick Borotsik: Merci, monsieur le président. Juste pour clarifier: nous avons parlé de la différence du coût par tonne quand la denrée doit transiter par la Commission canadienne du blé pour arriver à l'usine de transformation. On a entendu les représentants de Prairie Pasta déclarer que la différence se situait entre 15 et 17 $ la tonne. Vous avez parlé tout à l'heure d'un écart de 10 $, entre 190 et 200 $. Je sais que cela fluctue. Prairie Pasta et vous ne vous entendez pas—si je peux m'exprimer ainsi—sur le vrai montant. Convenez-vous qu'il pourrait très bien se situer entre 15 et 17 $ la tonne, en moyenne?

M. Adrian Measner: Le chiffre n'est peut-être pas aussi élevé. Je ne pense pas que ce soit là ce sur quoi nous ne nous entendons pas essentiellement. Notre chiffre est plutôt de l'ordre de 13 $, je pense que John vous l'a dit, mais que ce soit 13, 15 ou 17 $, là n'est pas véritablement la question.

M. Rick Borotsik: Le problème n'est pas le montant.

M. Adrian Measner: Effectivement.

M. Rick Borotsik: Le montant n'est tout simplement pas important.

M. Adrian Measner: Le fait est que le marché américain est un marché à valeur élevée. On vend ce qu'on a de mieux sur ce marché. La plupart des exportations américaines sont d'une qualité de second rang...

M. Rick Borotsik: Mais vous reconnaîtrez que le montant est manifestement très important pour l'usine de transformation, parce qu'évidemment, la rentabilité de l'investissement est meilleure quand elle peut capter ces sommes—plutôt que de les voir empochées par la Commission canadienne du blé.

M. Adrian Measner: L'usine aurait à payer le même prix pour les produits de la Commission canadienne du blé, et elle ne serait par conséquent pas désavantagée par rapport aux autres usines ou unités de transformation. Ce serait le même prix. En fait, ce serait le même prix que celui que doivent payer les unités de transformation américaines, parce que le prix est calculé d'après le marché américain. Le prix national...

M. Rick Borotsik: Alors, vous être en train de me dire qu'il n'y a pas de problème au niveau de la fixation des prix.

M. Adrian Measner: Pas en ce qui concerne le prix national pour le blé destiné à la consommation humaine. Il est conforme au prix du marché américain et du marché canadien.

M. Rick Borotsik: Les représentants de Prairie Pasta ont déclaré que les mêmes règles ne s'appliquaient pas à tous. Vous affirmez, vous, que tout le monde lutte à armes égales.

M. Adrian Measner: En ce qui concerne le prix national du blé destiné à la consommation humaine.

M. Rick Borotsik: En ce qui concerne le prix national du blé destiné à la consommation humaine?

M. Adrian Measner: Ces 10,13 ou 15 $—c'est un montant qui fluctue—représentent en fait le rendement définitif du compte de mise en commun de la Commission canadienne du blé, par rapport à ce que peut être le prix national du blé destiné à la consommation humaine. Je pense que M. De Pape a déclaré que le prix national du blé destiné à la consommation humaine ne posait pas de problème, qu'à ce niveau, l'usine était concurrentielle. Ils cherchent, selon moi, des moyens d'attirer les investissements.

M. Rick Borotsik: Monsieur Measner, vous avez déclaré dans votre exposé que la Commission canadienne du blé ne doit pas être un facteur dissuasif à l'égard de la transformation à valeur ajoutée. En ce qui concerne cette coopérative nouvelle génération, vous avez aussi dit que la Commission canadienne du blé devrait ou doit essayer d'élaborer de nouvelles politiques pour l'accommoder.

Quand le conseil sollicite l'avis de son personnel, vous proposez des recommandations. Quelle serait votre recommandation en ce qui a trait aux coopératives nouvelle génération? Serait-ce de simplement les maintenir à leur niveau actuel par rapport aux autres producteurs avec lesquels vous traitez? Ou recommanderiez- vous une grande flexibilité, afin de permettre aux coopératives nouvelle génération de bénéficier de ce que je n'appellerai pas un avantage, mais qui serait certainement un système d'achat différent de celui qui existe actuellement? Quelle serait votre recommandation?

M. Adrian Measner: Du point de vue opérationnel, nous défendons sans réserve le prix national du blé destiné à la consommation. Il s'applique à tous les transformateurs. Il est fixé d'après le marché américain. Il permet d'appliquer les mêmes règles du jeu à tous les intéressés.

Toutefois, ce n'est peut-être pas là où se situe le véritable problème. Je pense que tout dépend de la façon dont les choses sont structurées. Nous essayons ici aussi de trouver des idées et des solutions, mais ce n'est pas simple, car c'est lourd de conséquence pour les autres transformateurs canadiens.

La raison pour laquelle nous avons parlé chiffres, c'est qu'il s'agit d'un très grand marché pour nous. On parle de 400 à 500 millions de dollars, et si ce que nous faisons pour une unité de transformation risque d'avoir des conséquences sur les autres, on se trouve alors confronté à un effet de dominos. Nous sommes à la recherche d'idées et de solutions pour régler la situation—mais d'idées et de solutions qui seraient compatibles avec notre politique de détermination des prix pour les autres transformateurs.

• 1040

M. Rick Borotsik: Nous savons qu'il y a des meuniers dans l'Ouest du Canada. Existe-t-il aussi dans l'Ouest des usines qui fabriquent des pâtes alimentaires?

M. Adrian Measner: Oui.

Allez-y, Jim.

M. Jim Thompson: Il y a deux grandes usines, une dont a déjà parlé Earl, la nouvelle de Prairie Harvest et l'usine de Borden à Lethbridge, en Alberta. Il y a aussi d'autres plus petites exploitations.

M. Rick Borotsik: S'agit-il d'entreprises indépendantes?

M. Jim Thompson: C'est le cas de Prairie Harvest. L'usine de Borden fait partie de Borden of Ohio. Chose intéressante, si vous vous intéressez aux nouvelles du secteur des pâtes alimentaires, vous saurez que Borden vient tout juste de fermer six usines sur les dix que possèdent cette société, et que toutes étaient situées aux États-Unis. Les deux usines que la compagnie possède au Canada, à Montréal et à Lethbridge, sont restées ouvertes

M. Rick Borotsik: Pourquoi?

M. Jim Thompson: Il faudrait que vous posiez cette question à la Compagnie Borden.

M. Rick Borotsik: Oui naturellement, mais vous connaissez le secteur. Vous êtes manifestement leur fournisseur de farine de blé dur, de leur blé dur. Pourquoi? Pourquoi les usines canadiennes continuent-elles de fonctionner, et non celles qui sont situées aux États-Unis?

M. Jim Thompson: De notre point de vue...

M. Rick Borotsik: Oui, naturellement.

M. Jim Thompson: ... nous avons ici un environnement où les prix sont concurrentiels, stables et transparents, et c'est considéré comme un avantage.

M. Rick Borotsik: Les dirigeants de Prairie Pasta seraient-ils d'accord avec cette affirmation?

M. Jim Thompson: Je suppose qu'il faudrait le leur demander.

Des voix: Oh, oh!

M. Rick Borotsik: Merci—et soit dit en passant, c'est ce que je vais faire.

Le président: Earl.

M. Earl Geddes: Je voudrais simplement compléter la réponse en disant que nous avons collaboré étroitement avec Pasta d'Aurum, un autre groupe d'investisseurs privés qui tentent de construire une super usine pour produire des pâtes alimentaires à Swift Current. Ils reconnaîtraient que la politique nationale de détermination du prix du blé destiné à la consommation leur procure un avantage concurrentiel satisfaisant sur le marché.

Le président: Merci, Earl.

La parole est maintenant à M. Calder.

M. Murray Calder: Merci, monsieur le président.

Lors de la première série de questions, dans la foulée d'un commentaire de Rick, j'ai demandé pourquoi nous n'étions par en train de construire cette usine de 120 millions de dollars—qui va employer 90 personnes et qui va avoir une masse salariale de 4,5 millions de dollars? Y a-t-il surproductivité dans le secteur de la fabrication des pâtes alimentaires à l'heure actuelle dans l'Ouest, comme à l'usine de Lethbridge, par exemple? Cette usine a-t-elle une capacité de production qui dépasse celle qui est nécessaire pour desservir le marché dans ce secteur?

M. Jim Thompson: Il faut considérer l'industrie sous l'angle nord-américain. C'est un secteur en pleine évolution à l'heure actuelle.

Comme je l'ai indiqué, la Compagnie Borden a fermé plusieurs usines. CPC a fermé son usine du New Jersy. Quacker ferme son usine de Seattle. De nouveaux concurrents apparaissent sur ce marché, notamment de grandes entreprises industrielles américaines. American Ital Pasta Ltd. a pris de l'expansion et a ouvert une nouvelle usine en Caroline du Sud. Miller Milling a un projet d'expansion à Winchester. En fait, un consortium dont fait partie Miller Milling vient juste d'acheter Hershey Pasta, qui était le plus gros producteur de pâtes alimentaires des États-Unis et qui va maintenant être connu sous le nom New World Pasta. Une entreprise du nom de Barilla vient juste d'ouvrir une toute nouvelle usine à Ames, en Iowa.

Au Canada, une meunerie indépendante située à Blyth, en Ontario, a pris beaucoup d'expansion. La meunerie Howsen and Howsen a augmenté sa production d'environ 50 p. 100 l'année dernière. ADM de Montréal a pris de l'expansion pour répondre à la demande accrue de Borden à Montréal. Quant à la meunerie de Lethbridge, elle fonctionne pratiquement à pleine capacité pour répondre à la demande de l'usine de Borden à Lethbridge et à celle de Prairie Harvest, à Edmonton.

Donc, à l'heure actuelle, avec les toutes les nouvelles usines qui se sont construites, je dirais que la production de semoule de blé dur dépasse maintenant la demande du marché des pâtes alimentaires et que l'on peut s'attendre à quelques échecs dans ce secteur. Je ne prétends absolument pas être un expert du marché des pâtes alimentaires, mais c'est ainsi que la situation se présente actuellement, vu de l'extérieur.

M. Murray Calder: Bien.

Adrian, vous avez dit qu'à l'heure actuelle, le marché national a, pour la Commission canadienne du blé, une valeur de 400 à 500 millions de dollars. Est-ce que c'est uniquement pour les pâtes alimentaires ou est-ce que cela recouvre d'autres produits?

M. Adrian Measner: Cela comprend d'autres produits.

M. Murray Calder: Il y a donc d'autres produits qui entrent en ligne de compte. D'après ce que j'ai entendu ce matin, moi qui suis un aviculteur de l'Ontario, je considère que le problème qui se pose est que... Il me semble que le fait que la CCB s'occupe des produits à l'exportation ne soulève pas vraiment de grandes difficultés. Ce qui semble poser un problème, ce sont les produits qui sont commercialisés à l'échelle nationale, d'un bout à l'autre du pays. Les agriculteurs veulent monter une coopérative et fabriquer un produit à valeur ajoutée comme les pâtes alimentaires, par exemple. Évidemment, une fois que le blé est transformé, il échappe au champ de compétence de la CCB, de toute façon, car cela devient un produit à valeur ajoutée.

• 1045

Est-ce que cela soulèverait de grandes difficultés de changer la façon dont on traite les produits commercialisés à l'échelle nationale dans ce pays pour que les producteurs de pâtes alimentaires rencontrent des problèmes moins épineux que ceux qu'ils pensent avoir à l'heure actuelle?

M. Adrian Measner: L'industrie nationale a beaucoup d'importance pour les agriculteurs et, comme nous venons de le mentionner, cela représente beaucoup d'argent et par conséquent, si vous apportez des changements qui ont un impact sur l'industrie nationale, je pense que ce serait très grave pour les agriculteurs et que c'est une option qui ne devrait pas être considérée. Si vous pouvez faire quelque chose pour faire avancer ce projet sans que cela ait un impact sur le reste de l'industrie et par conséquent, sur les agriculteurs, je pense que c'est une solution qui susciterait beaucoup d'intérêt. Mais à mon avis, il faut se montrer très prudent et s'assurer que les mesures qui sont prises n'ont pas d'effet en cascade sur le reste de l'industrie.

M. Murray Calder: Cela m'amène à ma dernière question. Ce que j'ai trouvé assez intéressant, c'est le fait que quatre des cinq administrateurs nommés au conseil de la CCB se sont prononcés en faveur de ce projet, alors que les agriculteurs élus ont des opinions divergentes. Autrement dit, certains sont pour et certains sont contre. Pourriez-vous me donner quelques détails et m'expliquer pourquoi il en est ainsi.

M. Adrian Measner: Ce n'est pas nous qui avons dit cela et ce n'est pas la façon dont j'interprète la situation. J'ai été impliqué dans nombre des discussions qui ont eu lieu. Je ne suis pas certain que qui que ce soit ait pris une décision. Les administrateurs s'en occupent. Ils sont sans préjugés et ils essaient de trouver une solution. Je n'ai pas constaté que les avis étaient partagés—que certains étaient pour et d'autres contre. On s'en est tenu, la plupart du temps, à des discussions. Je pense que les intéressés ont pu tirer cette conclusion de conversations privées qu'ils ont eues avec les administrateurs, et je ne peux donc vraiment pas dire quelle position ces personnes ont adopté parce que je ne suis pas au courant. Je pense que les administrateurs vont attendre d'avoir toute l'information en mains et qu'à ce moment là, ils prendront une décision.

M. Murray Calder: Donc, essentiellement, vous me dites que la question n'est pas encore réglée, et pourtant...

M. Adrian Measner: Oui, c'est ce que je vous dis.

M. Murray Calder: Que c'est en cours de règlement...?

M. Adrian Measner: C'est en cours de règlement. Ces deux derniers jours, des discussions importantes ont eu lieu, et il y en aura d'autres au cours des quatre à six prochaines semaines.

M. Murray Calder: Bien.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci, Murray.

Juste avant que je donne la parole à M. Hoeppner, monsieur Measner, vous avez mentionné que vous, ou la commission, étiez préoccupé par l'effet que pourrait avoir la proposition de Prairie Pasta sur le reste de l'industrie. Qu'est-ce qui vous inquiète le plus: l'impact de ce projet sur l'industrie ou son effet sur la commission?

M. Adrian Measner: Son effet sur les agriculteurs, monsieur Harvard. Si je me suis mal exprimé... Ce qui m'inquiète, c'est l'effet que cette proposition pourrait avoir sur le reste de l'industrie, ce qui, en pratique, équivaut à un impact direct sur les agriculteurs. Si, au bout du compte, vous changez la structure de prix tant et si bien que tout le monde a 10 $ de moins...

Le président: Oui.

M. Adrian Measner: ... cela sort directement de la poche des agriculteurs.

Le président: Exact.

M. Adrian Measner: C'est l'impact que cela pourrait avoir sur les agriculteurs qui nous inquiète.

Le président: Merci.

Monsieur Hoeppner.

M. Jake Hoeppner: Merci, monsieur le président.

J'ai deux ou trois brèves questions à vous poser. Vous nous dites que l'existence de la commission n'est pas un obstacle à l'implantation d'une industrie à valeur ajoutée. Pourquoi, alors, trouve-t-on dans les États du nord un pourcentage bien plus élevé d'industries à valeur ajoutée?

La Commission du blé prétend appuyer la transformation à valeur ajoutée dans les Prairies. Pourquoi cela a-t-il pris deux ans pour que Prairie Pasta Producers en arrive à un accord quelconque avec vous?

Troisièmement, si les politiques de la Commission du blé n'empêchent pas les agriculteurs d'avoir accès aux recettes provenant d'activités à valeur ajoutée... Comment la Commission canadienne du blé peut-elle prétendre qu'elle donne aux agriculteurs la possibilité de faire le maximum de profit?

L'autre question que je veux aborder brièvement concerne les usines de fabrication de pâtes alimentaires qui sont déjà implantées. J'ai l'impression—et peut-être que je me trompe—qu'elles peuvent importer des matières premières sans avoir à passer par la Commission du blé, ce qui leur permet d'obliger la commission à leur vendre à un prix plus bas que celui qui est pratiqué sur le marché national. C'est la raison pour laquelle elles sont très concurrentielles.

Est-ce que je me trompe à propos de tout cela? Gardez la dernière question pour la fin et répondez aux trois premières.

M. Adrian Measner: Bien, je vais essayer. Vous avez soulevé beaucoup de questions. Jim va se charger de répondre à celle qui a trait aux matières premières.

Ces deux derniers jours, la commission a rencontré des responsables de la CNMA. Cette association représente environ 96 p. 100 de la capacité de transformation du Canada. Les observations que ses représentants ont faites devant le conseil d'administration n'indiquaient pas que nous faisons obstacle aux activités à valeur ajoutée. Il s'agissait d'observations favorables, puisqu'ils ont dit que leur étroite collaboration avec la Commission canadienne du blé leur a permis de donner de l'expansion à leurs installations de transformation. Aucune réserve n'a été exprimée à propos de leurs relations de travail avec la Commission canadienne du blé. Je vous encourage à poser ces questions directement à l'association des meuniers, à celle des malteurs ou aux entreprises, car ce n'est pas ce genre de commentaires qu'ils nous font.

Jim va vous donner des informations sur les activités à valeur ajoutée.

• 1050

M. Jim Thompson: Parler d'activité à valeur ajoutée quand il s'agit de la production de farine et de semoule, c'est employer une appellation quelque peu impropre. Nous avons fait les calculs. Dans l'Ouest du Canada, comme je l'ai indiqué, on transforme annuellement 800 000 tonnes de blé et de blé dur. Cela représente environ 31 p. 100 de la capacité canadienne.

M. Jake Hoeppner: Sur ces 800 000 tonnes, quelle est la quantité de produits importés?

M. Jim Thompson: Ces meuneries transforment du grain qui provient de la Commission canadienne du blé et du grain qui est produit par les agriculteurs de l'Ouest du Canada. La quantité de blé américain importé au Canada est insignifiante.

Ce pourcentage de 31 p. 100 nous place dans une position enviable. Bien évidemment, nous ne savons pas à combien se chiffrent les ventes réalisées dans les États américains du nord, ni quelles sont les quantités de matières premières qui sont transformées, mais la capacité combinée du Minnesota, du Dakota du Nord et du Montana, pour ce qui est de la production de farine et de semoule, est de 12 p. 100—seulement 12 p. 100—de la capacité totale aux États-Unis, si bien qu'avec nos 31 p. 100, nous sommes dans une position très enviable par rapport à leurs 12 p. 100.

En ce qui a trait à la deuxième partie de la question, Earl peut sans doute vous donner plus de détails, mais je peux vous dire que mon premier contact avec Prairie Pasta Producers remonte à novembre 1998, je crois. Ils ont communiqué avec nous et ils sont venus nous voir à la fin du mois de novembre ou au début du mois de décembre pour discuter avec nous de leur projet. Il se peut fort bien que la proposition ait été lancée bien avant cela, mais c'est autour de novembre 1998 que nous en avons été informés, que notre personnel a commencé à en discuter avec eux.

Le président: C'est donc il y a sept ou huit mois.

M. Jim Thompson: Oui.

M. Earl Geddes: Monsieur le président, si vous me permettez d'ajouter quelque chose, Jim a raison. Nous savions, par les médias, qu'un groupe s'intéressait à la création d'une coopérative nouvelle génération, plusieurs usines de ce type étant actuellement en exploitation en Amérique du Nord, mais le premier contact a effectivement eu lieu en novembre, et nous nous occupons du projet depuis.

En ce qui nous concerne, il faut tenir compte du fait que nous avons un tout nouveau conseil d'administration depuis le 1er janvier, ainsi qu'une nouvelle série de politiques qui découlent de l'entrée en vigueur du projet de loi C-4 et que nous pouvons utiliser pour régler ces questions. Le conseil d'administration a demandé au personnel d'examiner diverses solutions—pas uniquement ce qui, à notre avis, serait la meilleure option—et c'est ce qui est fait en ce moment.

La dernière partie de votre question portait sur le fait que les meuniers ou les fabricants de pâtes alimentaires canadiens peuvent avoir accès à du blé ou du blé dur américain pour le transformer. C'est exact. Il existe un accord de libre-échange qui leur permet de procéder ainsi. C'est la politique de fixation de prix concurrentiels pour l'Amérique du Nord, que la Commission canadienne du blé a adoptée, qui permet à l'industrie nationale d'être très compétitive à l'échelle nord-américaine. Comme nous l'avons indiqué, depuis 1990, l'utilisation de notre capacité de production a augmenté de plus de 25 p. 100 et, pour ce qui est de notre capacité de maltage de l'orge brassicole, il y a eu une augmentation de 50 p. 100.

Donc, c'est tout à fait exact. Cet accès aux matières premières existe, et cela permet à ces entreprises d'être très concurrentielles.

M. Jake Hoeppner: Monsieur Geddes...

Le président: Il vous reste juste quelques secondes.

M. Jake Hoeppner: Merci.

Monsieur Geddes, je pense que vous savez très bien quel est le sentiment des gens qui sont assis à cette table. Pouvez-vous parvenir à une entente avec Prairie Pasta Producers sans qu'on ait à adopter une nouvelle loi, ce que les députés du gouvernement et de l'opposition sont probablement prêts à faire, je pense, si vous ne parvenez pas à un accord?

M. Adrian Measner: La plupart des solutions qui sont examinées s'inscrivent dans le cadre de la loi, et le nouveau projet de loi C-4 nous donne beaucoup de marge de manoeuvre; je pense donc qu'il y a dans ce texte des dispositions qui permettent de trouver une solution, mais encore une fois, cette solution n'est pas...

M. Jake Hoeppner: ... très encourageante.

Le président: Monsieur Proctor.

M. Dick Proctor: Juste une précision, monsieur Measner. Vous avez mentionné, je crois, en nous citant l'exemple de Swift Current, que pour les responsables à qui vous avez parlé, la différence de prix ne semblait pas poser un problème. C'est bien cela?

M. Earl Geddes: C'est exact, monsieur le président. Nous sommes en pourparlers avec le groupe Pasta D'Aurum de Swift Current depuis quelques années. Ils ont en fait annoncé il y a deux ans où serait située leur usine et quels seraient certains des contrats qui leur permettraient de s'établir. Nous avons élaboré leur politique de prix avec eux, en nous fondant sur les dispositions qui s'appliquent aux «contrats directs avec les producteurs» et aux «livraisons à l'usine», et ils sont tout à fait à l'aise avec la façon dont cela fonctionne et avec l'impact que cela peut avoir sur les résultats de l'usine.

M. Dick Proctor: Je sais bien que vous faites partie de la commission, mais juste par curiosité, qu'est-ce qui se passe? Vous avez dit que l'emplacement de l'usine a été choisi il y a un ou deux ans. On parlait déjà de l'implantation de cette installation avant que ne soit lancé le projet de Prairie Pasta. Quels sont les obstacles à ce projet? Qu'est-ce qui se passe?

M. Earl Geddes: Monsieur le président, il est difficile de savoir exactement quels sont les obstacles à ce projet. Ils retravaillent leur plan d'entreprise, ainsi que leur prospectus, et ils essaient de traiter avec la Commission des valeurs mobilières de l'Alberta, parce qu'à l'heure actuelle, il s'agit d'un groupe d'investisseurs de l'Alberta—et ils ont plutôt tendance à ne pas divulguer les questions qu'ils ont à résoudre.

M. Dick Proctor: Merci.

Le président: Il reste encore à peu près assez de temps pour que l'on pose une autre question.

Madame Ur.

Mme Rose-Marie Ur: Un complément d'information: est-ce que les autres groupes de l'Ouest qui s'intéressent à la production de pâtes alimentaires ont les mêmes préoccupations que celles qui ont été exprimées ce matin par nos premiers témoins? Font-ils face aux mêmes difficultés que celles que la Commission canadienne du blé semble poser à nos premiers témoins? Ou bien est-ce simplement parce que ce sont des novices en la matière?

• 1055

M. Adrian Measner: Les autres propriétaires d'installations de transformation n'ont pas les mêmes préoccupations. La CNMA...

Mme Rose-Marie Ur: Et pourquoi?

M. Adrian Measner: Parce que, je pense, le prix marchand est transparent, facile à découvrir et qu'il se fonde sur les cours pratiqués sur le marché américain. Cela leur permet d'être concurrentiels, et ils apprécient la sécurité que leur procure la Commission canadienne du blé au plan de l'approvisionnement et de la qualité. Il y a eu des réactions très positives de la part d'autres transformateurs.

Mme Rose-Marie Ur: C'est très intéressant. Merci.

Le président: Monsieur Geddes.

M. Earl Geddes: Monsieur le président, nous avons préparé une sorte de document d'information sur l'industrie nationale de la transformation du blé où nous décrivons également la politique de prix de la Commission canadienne du blé qui s'applique à l'échelle nationale. Nous avons remis ce document au greffier qui l'a fait traduire. Les membres du comité pourront en prendre connaissance si cette information les intéresse.

Le président: Monsieur Borotsik.

M. Rick Borotsik: Monsieur le président, je veux juste poursuivre dans la foulée de ce qu'a dit Rose-Marie à propos des transformateurs qui sont déjà implantés et pour qui les transactions avec la Commission canadienne du blé ne posent pas de problème.

Vous me laissez entendre que tout le monde est très heureux, que ces transformateurs sont tout à fait satisfaits du processus qui est en place à l'heure actuelle. Alors, si on enlevait à la Commission canadienne du blé le monopole qui est maintenant le sien, est-ce que cela voudrait dire que les transformateurs en seraient mécontents?

M. Adrian Measner: Je ne peux répondre à leur place.

M. Rick Borotsik: Soyons honnêtes. Vous dites que tout le monde est plongé dans une bienheureuse béatitude à l'heure actuelle, que les transformateurs sont tout à fait satisfaits de la façon dont cela se passe, qu'ils ont la qualité, les approvisionnements et tout le reste. Ma question est la suivante: si vous n'étiez pas là, selon vous, ces transformateurs ne seraient pas aussi heureux qu'ils le sont maintenant?

M. Adrian Measner: Non. Je ne peux pas vous dire cela, parce que je ne sais pas. Ma remarque se rapportait à notre réunion avec les responsables de la CNMA qui a eu lieu il y a deux jours.

M. Rick Borotsik: Bien sûr. Ils suivent les règles. La CNMA respecte les règles mises en place par la Commission canadienne du blé, et ses membres sont satisfaits de ces règles parce que cela donne des résultats, semble-t-il. La question que je vous ai posée était celle-ci: si ces règles n'existaient pas, si le marché était libre et si les transformateurs avaient accès à ce marché à leur gré, selon vous, ils ne seraient pas satisfaits, pas plus satisfaits qu'ils ne le sont actuellement?

M. Adrian Measner: Non, je ne dis pas cela, je ne peux pas.

M. Rick Borotsik: Merci. Je voulais juste que vous apportiez cette précision.

M. Jim Thompson: Pourrais-je ajouter quelque chose?

Le président: Oui, Jim.

M. Jim Thompson: En me fondant sur mon expérience dans le secteur de la minoterie, notamment au sein d'entreprises, je peux affirmer que ces grandes sociétés vous diront très clairement qu'elles peuvent très bien fonctionner dans n'importe quel environnement. Elles peuvent très bien fonctionner dans un marché libre. À l'évidence, ADM, Nabisco et tous les autres le font actuellement aux États-Unis. Parallèlement, elles fonctionnent très bien sur le marché canadien qui est beaucoup plus réglementé.

M. Rick Borotsik: Qu'est-ce qui les satisfait le plus, un système réglementé ou un marché libre?

M. Jim Thompson: Je crois que ces sociétés vous diraient ceci: il faut que le système soit totalement libre ou qu'il soit réglementé. Elles ne veulent pas d'un système qui serait entre les deux. Il faut que ce soit l'un ou l'autre. Elles vous diront également qu'il y a des avantages inhérents à un système réglementé, par exemple, l'approvisionnement garanti et la possibilité d'établir un prix à terme et de stabiliser la valeur des matières premières. Elles vous diront q'un marché libre présente d'autres avantages. Il ne s'agit pas de dire qu'un système est meilleur ou pire que l'autre. Ce sont des systèmes différents qui fonctionnent différemment.

M. Rick Borotsik: Je voulais simplement que l'on consigne aux compte rendu qu'à l'heure actuelle, grâce au système qui est en place, tout le monde est plongé dans la plus bienheureuse béatitude. Je pense que vous avez clarifié cela, dans une certaine mesure.

Monsieur le président, j'ai une dernière question à poser à M. Thompson.

Vous venez de dire qu'il y a différents systèmes, différentes façon de fonctionner et différents avantages et désavantages. Ce n'est pas juste de vous poser cette question, et vous n'avez pas besoin de répondre si vous ne voulez pas, mais est-ce que ces transformateurs préfèrent l'un ou l'autre de ces systèmes? Est-ce qu'ils préfèrent le marché libre ou le système réglementé qui leur est imposé?

M. Jim Thompson: Ce n'est pas juste...

M. Rick Borotsik: Ha! Je savais que dès que je vous donnerais cette porte de sortie...

M. Jim Thompson: ... de m'obliger à répondre.

M. Rick Borotsik: Je regrette de vous avoir laissé cette porte de sortie.

M. Jim Thompson: Je vous dirais ceci: les meuniers américains achètent de grandes quantités de matières premières auprès des producteurs de l'Ouest du Canada. Pour moi, cela veut dire quelque chose. Cela veut dire que notre système présente des avantages qu'ils reconnaissent également.

M. Rick Borotsik: Cela s'appelle la qualité.

Le président: Merci.

Avant de conclure, j'aimerais rappeler à tout le monde que le ministre des Ressources naturelles, qui est responsable de la Commission du blé, sera ici le 8 juin pour poursuivre le débat sur les coopératives nouvelle génération.

Je n'oserais jamais parler au nom du comité. Tout ce que je me permets de dire en conclusion, c'est qu'à mon avis, des questions très épineuses se posent. Je pense que nous sommes tous en faveur des activités à valeur ajoutée. Ce serait très bien de voir s'ouvrir une nouvelle usine de fabrication de pâtes alimentaires qui emploierait 90 personnes, mais n'oublions pas que la Commission canadienne du blé est une institution très importante, qui a bien servi les agriculteurs canadiens pendant très longtemps. Je peux comprendre pourquoi il faut reconnaître et respecter l'intégrité de la commission.

• 1100

J'espère que vous pourrez en arriver à un accord qui satisfera tout le monde, aussi bien ceux qui appuient la commission et les comptes de mise en commun que, bien évidemment, ceux qui aimeraient que l'on construise une nouvelle usine de fabrication de pâtes alimentaires.

Je pense que j'exprime le sentiment de tous les membres du comité si je vous dis que nous avons beaucoup apprécié votre présentation.

La séance est levée.