STANDING COMMITTEE ON HEALTH

COMITÉ PERMANENT DE LA SANTÉ

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le lundi 27 avril 1998

• 1045

[Français]

La présidente (Mme Beth Phinney (Hamilton Mountain, Lib.)): Bonjour, tout le monde.

C'est la 37e séance du Comité permanent de la santé. C'est avec un grand plaisir que nous nous retrouvons à Montréal aujourd'hui pour poursuivre notre étude sur la réglementation des produits de santé naturels.

[Traduction]

Nous étudions toute une gamme de produits de santé naturels—les suppléments minéraux et vitaminiques, les préparations homéopathiques et les remèdes à base de plantes médicinales dont les produits nord-américains, chinois et ayurvédiques.

[Français]

Nos audiences publiques ont débuté en décembre dernier. Depuis février, nous avons eu cinq réunions par semaine à Ottawa, des conférences vidéo de Halifax, Calgary et Winnipeg, et nous avons également tenu des assemblées publiques à Vancouver et à Toronto.

[Traduction]

Nous avons entendu de nombreux témoins—des représentants des consommateurs, des fabricants, des détaillants, des distributeurs et des professionnels de la santé. Bon nombre d'entre eux partageaient le même point de vue, mais il y avait aussi des opinions contradictoires.

[Français]

Comme plusieurs témoins doivent comparaître devant nous aujourd'hui, je vous prie de respecter la limite de temps qui vous sera allouée. Je vous remercie.

Les premiers témoins d'aujourd'hui seront Arlette Rouleau, présidente de l'Institut de pharmacopée chinoise, ainsi que Luc Martineau, son vice-président. Je pense que vous avez 15 minutes, y compris le temps des questions.

Le greffier du comité: Une demi-heure.

La présidente: C'est effectivement une demi-heure. Excusez-moi.

Le greffier: On est un peu en retard.

La présidente: Oui, mais je vais quand même leur donner une demi-heure. Nous avons deux députés présents aujourd'hui: Elinor Caplan, qui est vice-présidente du comité, et Pauline Picard. Vous représentez quelle circonscription, madame Picard?

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Je représente la circonscription de Drummond et je fais partie du Bloc québécois.

La présidente: Très bien.

Mme Pauline Picard: Je suis aussi porte-parole pour le dossier de la santé.

La présidente: Je pense qu'il y aura aussi Joseph Volpe, qui vient de Toronto, mais il n'est pas encore là. Arlette, vous avez la parole.

Mme Arlette Rouleau (présidente, Institut de pharmacopée chinoise): Bonjour. Au nom de l'Institut de pharmacopée chinoise, nous voulons d'abord vous remercier et remercier le Comité permanent de la santé pour son accueil et la possibilité qu'il nous offre de soumettre aujourd'hui notre point de vue sur la pharmacopée chinoise et son application.

L'Institut de pharmacopée chinoise est un organisme à but non lucratif et à vocation charitable qui travaille au développement de la pharmacopée chinoise et à l'amélioration de l'état de santé de la population. L'Institut a été fondé en 1991 et il regroupe autant des professionnels acupuncteurs, acupunctrices et thérapeutes que des personnes du grand public. Enfin, l'Institut entend faire la promotion de la reconnaissance et de l'utilisation de la Materia Medica chinoise dans des activités de recherche, d'éducation, de prévention et de traitement des maladies par les produits de la pharmacopée chinoise utilisés dans l'esprit et le respect de la médecine traditionnelle chinoise.

• 1050

L'objectif ultime qui sous-tend ces diverses actions est la qualité des produits et la protection du public. Nous croyons que l'utilisation des produits de la pharmacopée chinoise peut être sécuritaire et peut représenter une alternative efficace et économique à une médication occidentale conventionnelle et aussi une médecine complémentaire. Ce n'est pas nécessairement une médecine alternative. Ce sont donc deux médecines qui peuvent travailler et qui devraient travailler ensemble.

L'Institut estime que l'objectif d'une utilisation efficace et sécuritaire des produits de la pharmacopée suppose la concrétisation de trois conditions fondamentales: premièrement, la reconnaissance des savoirs traditionnels; deuxièmement, la création d'une troisième catégorie, c'est-à-dire les produits de santé naturels; et troisièmement, le contrôle de la qualité de ces produits.

La première chose à expliquer, c'est qu'il importe d'abord de rappeler qu'il faut éviter de confondre médicaments chinois et produits de la pharmacopée chinoise. Les produits de la pharmacopée chinoise regroupent des substances végétales, fruits, feuilles, fleurs, racines et rhizomes, et des substances animales ou minérales reconnues pour leur effet thérapeutique.

Quelques personnes peuvent s'étonner de retrouver dans la Materia Medica des minéraux ou autres éléments d'origine animale. Si l'expression «herbes» a généralement trait à tout ce qui pousse dans la nature, quand on parle d'herbes chinoises, il faut entendre, bien sûr, les plantes médicinales mais aussi inclure les éléments minéraux ou animaux. Quant aux médicament chinois, il s'agit de médicaments de la médecine occidentale fabriqués en Asie. Quelquefois ils peuvent contenir des mélanges de plantes auxquelles on a ajouté certains ingrédients chimiques.

L'usage populaire confond souvent l'une et l'autre expression, et nous voulons rappeler que la véritable pharmacopée chinoise reste celle qui s'appuie sur une connaissance raffinée des plantes médicinales et des éléments animaux ou minéraux, seuls ou en combinaison avec les produits végétaux.

M. Luc Martineau (vice-président, Institut de pharmacopée chinoise): Nous avons ici six documents exceptionnels, en français et en anglais, qui contiennent le compendium des produits de la pharmacopée chinoise. Ces documents sont disponibles pour ceux qui veulent en faire l'examen. Éventuellement, on donne des références à ceux qui veulent en faire l'achat.

Il est essentiel, si on parle de la pharmacopée chinoise, d'avoir en main les outils qui existent déjà et qui sont d'une autorité mondiale sur le sujet.

Mme Arlette Rouleau: Permettez-nous une seconde parenthèse avant d'aborder les trois conditions citées plus haut. Il s'agit des différences importantes de la philosophie qui sous-tend les systèmes médicaux orientaux et occidentaux, et de la compréhension des approches thérapeutiques qui sont employées dans l'un et l'autre.

Nous avons souligné précédemment la confusion possible à propos du terme «herbes» qui renvoie à des réalités différentes. Nous partageons le point de vue de M. Joseph Wen-Teng Wu, qui soutenait dans sa présentation du 29 novembre dernier la nécessité d'inclure les éléments végétaux, minéraux et animaux dans l'expression «composés d'herbes» afin de correspondre à l'herboristerie chinoise traditionnelle et d'en préserver l'intégrité sans la pervertir.

La différence majeure réside sans aucun doute dans les concepts fondamentaux des deux systèmes médicaux. En Occident, la vision scientifique du corps humain le fragmente en systèmes, en sections plus ou moins importantes, et les interventions se font dans la ou les sections atteintes par la maladie. En Occident, on s'attache d'abord à réparer ce qui est brisé ou à remettre l'organe ou le système en état de fonctionnement.

Dans la médecine traditionnelle chinoise et sa pharmacopée, la pierre angulaire est la théorie du yin et du yang, et des cinq éléments: l'eau, le feu, le bois, le métal et la terre. L'équilibre entre le yin et le yang et l'harmonie entre les échanges d'énergie entre ces cinq éléments constituent la base de tous les concepts et de toute la terminologie de cette médecine. En Orient, on tend à restaurer l'équilibre, à préserver l'énergie, à tonifier le tout dans une perspective résolument holistique.

• 1055

Proposer de réglementer un système médical totalement différent, oriental, en s'appuyant sur des propositions d'un autre système nous paraît contradictoire. Il nous semble en effet assez problématique d'imposer des normes biomédicales ou pharmaceutiques basées sur des théories médicales occidentales quand les concepts et les paradigmes de la médecine orientale sont différents. Il ne s'agit pas de dénigrer un système au détriment de l'autre. Il s'agit, croyons-nous, d'avoir la lucidité et le courage de reconnaître les mérites et les capacités d'une autre approche thérapeutique et de trouver un niveau acceptable d'analyse pour explorer ce que les deux systèmes pourraient avoir en commun.

Fermons ces parenthèses et revenons aux conditions initiales de l'atteinte des objectifs pour une utilisation libérale, efficace et sécuritaire de la pharmacopée chinoise.

Première condition: la reconnaissance des savoirs traditionnels. La Materia Medica chinoise est la source de connaissance la plus avancée sur les entrées végétales, animales ou minérales reconnues pour leurs capacités thérapeutiques. En 2700 avant J.C., on trouvait déjà en Chine une liste de 365 substances médicinales avec leurs propriétés thérapeutiques. Aujourd'hui, quelque 5 767 produits, dont 90 p. 100 sont d'origine végétale, sont inventoriés et étudiés dans le Zhon Yao Zidian, encyclopédie éditée en 1977 par le Shanghai People's Press. On sait que pas moins de 400 de ces produits sont régulièrement utilisés. On sait aussi que 3 800 différents remèdes sont préparés en Asie et que, dans une grande majorité des cas, ils sont issus d'un manuscrit rédigé deux siècles après J.C., le Shan Han Lun, traité des maladies induites par le foie. Une application continue et efficace durant plus de deux millénaires de ces substances thérapeutiques constitue, à notre avis, un gage de la sécurité pour leur utilisation. Si tel n'était pas le cas, aucun survivant n'aurait pu transmettre ce savoir.

L'herboristerie chinoise a donc pu se développer autant par les écrits que par la transmission directe des connaissances et par les résultats cliniques in vivo. L'utilisation actuelle de la pharmacopée se base encore sur l'expérimentation poussée des herbes faite dans la Chine ancienne et sur les mélanges appropriés de plantes. L'utilisation actuelle s'appuie aussi sur les paradigmes de l'équilibre du yin et du yang, et des relations d'énergie entre les cinq éléments. Si cette façon de faire peut sembler déroutante ou illogique pour la médecine et la pharmacologie occidentales, il n'en reste pas moins que les résultats aujourd'hui sont probants et que la pharmacopée chinoise assure le maintien d'une bonne santé.

Bref, ça marche, et on est en mesure d'expliquer pourquoi. Nous proposons d'ailleurs en annexe un tableau de deux plantes bien connues, la menthe et la cannelle, et les propriétés de chacune quand elles sont utilisées selon les principes de la pharmacopée chinoise. Je ne le lirai pas, car vous le trouverez à la fin de l'annexe. C'est pour vous donner une idée de ce qu'on entend par connaissances traditionnelles sur les plantes. C'est un exemple concret par rapport à deux plantes que tout le monde connaît, la cannelle et la menthe.

M. Luc Martineau: Ces annexes-là viennent d'un ouvrage qui s'appelle Materia Medica de Dan Bensky, qui a été réédité dernièrement et qui fait autorité actuellement. C'est le concentré des 400 produits les plus utilisés de la pharmacopée chinoise, avec des indications aussi de leur pharmacodynamie.

Mme Arlette Rouleau: L'institut est d'avis que la tradition d'utilisation des produits de la pharmacopée chinoise tient aussi à la compétence et au professionnalisme de ceux et celles qui l'utilisent dans leur pratique habituelle. C'est pourquoi il estime qu'un praticien acupuncteur, herboriste, etc., expérimenté et détenteur d'une formation professionnelle rigoureuse en pharmacopée chinoise peut traiter efficacement sa clientèle sans risque pour elle.

• 1100

J'aimerais faire une parenthèse qui n'est pas dans le mémoire. Il est certain que la formation professionnelle relève présentement plus des compétences provinciales que fédérales. Mais si on veut penser à un bon système de gestion pour les plantes, il faut tenir compte du fait qu'il est nécessaire d'avoir des gens compétents pour traiter et conseiller les gens qui ont des problèmes de santé physique.

Deuxième condition: la création d'une troisième catégorie, les produits de santé naturels. Actuellement, la Loi sur les aliments et drogues propose deux catégories: celle des aliments et celle des médicaments. Comment les plantes médicinales peuvent-elles alors trouver leur place?

Nous avons en effet, d'une part, le groupe des aliments, substances utilisées pour nourrir, qui ne doivent pas présenter les caractéristiques suivantes: un aliment ne doit pas servir au traitement, à l'atténuation ou à la prévention d'une maladie ou d'un désordre physique chez les animaux et chez les êtres humains; un aliment ne doit pas servir à la restauration, à la correction ou à la modification des fonctions organiques chez les animaux ou les êtres humains.

Je crois que la loi était très juste en 1950, alors qu'on pensait que les aliments consistaient en glucides, protéines et lipides. Mais aujourd'hui, on est conscients que l'alimentation joue un rôle très important dans le maintien d'une bonne santé. C'est encore plus vrai pour les plantes médicinales, qui sont parfois aussi des aliments, mais qui ont des propriétés très importantes pour le maintien d'une bonne santé.

Deuxièmement, si on regarde la deuxième catégorie, qui sont les médicaments brevetés vendus en vente libre ou sous ordonnance, on voit qu'ils sont soumis à des séries de tests et à l'approbation de Santé Canada avant leur mise en marché.

La plante médicinale ne peut pas correspondre à la définition d'un aliment. Ce serait un non-sens puisque son objectif est de maintenir la bonne santé. Par ailleurs, on ne peut breveter une plante médicinale parce que les plantes font partie du patrimoine génétique mondial. Alors, comment peut-on utiliser, pour analyser les plantes, les critères que l'on utilise pour les médicaments ou les aliments? Cette ambiguïté n'est pas sans causer des difficultés de toutes sortes aux herboristes, aux fabricants et aux distributeurs de plantes médicinales.

L'Institut de pharmacopée chinoise propose qu'une troisième classe de produits soit créée, celle des produits de santé naturels. L'instauration de cette troisième catégorie permettrait de lever toutes les ambiguïtés et favoriserait une utilisation plus efficace de la pharmacopée chinoise.

Il faudrait, par ailleurs, que l'encadrement réglementaire pour les produits de santé naturels soit assumé par un organisme indépendant de la Direction des produits thérapeutiques. Une agence autonome conviendrait tout à fait pour reconnaître la nature particulière des produits de santé naturels pour lesquels l'actuelle Direction des produits thérapeutiques manifeste un intérêt mitigé. Elle met davantage l'accent sur les risques potentiels de leur utilisation que sur leurs avantages thérapeutiques.

Il semble également que le niveau de connaissances de l'autorité réglementaire actuelle ne soit pas suffisant pour assurer un processus d'approbation judicieux des produits de santé naturels vendus au Canada. Une direction séparée pourrait agir efficacement sur des principes acceptables autant pour l'industrie que pour le gouvernement. L'Institut de pharmacopée chinoise est également d'avis que cette agence autonome devrait compter sur la présence d'un comité permanent d'experts chargés d'élaborer les contenus de la pharmacopée.

Il est bien entendu que les experts que l'Institut souhaite voir siéger à cette organisation seront des personnes reconnues pour leur savoir et leur expertise en pharmacopée chinoise car, actuellement, les experts généralement consultés en santé, médecins, chimistes et pharmaciens, n'ont pas ou peu de connaissances sur les produits de santé naturels et leurs actions curatives.

Comme il s'agit d'une troisième catégorie qui exclut les aliments et les drogues, il nous paraît logique qu'un personnel qualifié, compétent et indépendant soit exigé pour juger de la valeur et de la qualité des produits de santé naturels.

• 1105

Troisième condition: le contrôle de la qualité. Il est essentiel que les produits de la pharmacopée chinoise en vente sur le marché soient conformes à des normes de qualité et que les arrivages de plantes au pays soient soumis à des contrôles rigoureux. L'Institut fait sienne la proposition de M. Joseph Wen-Teng Wu de retenir des spécialistes de médecine traditionnelle chinoise pour l'élaboration des normes de qualité et d'approbation des produits.

Cette recommandation s'inscrit dans la reconnaissance des différences fondamentales entre les deux systèmes médicaux. L'Institut rappelle aussi au comité qu'il existe déjà actuellement un contrôle de la qualité chez les herboristes chinois, qui ont établi depuis fort longtemps des catégories de produits selon des standards de qualité.

Lorsque Santé Canada estime qu'un produit d'herboristerie a causé un accident grave ou des effets secondaires importants, nous croyons qu'il est de son devoir d'enquêter avec le plus grand soin sur toutes les causes possibles de cet événement: quelle personne a fourni le traitement; pour quel problème; nature, durée, combinaison avec d'autres pathologies s'il y a lieu; âge et condition de la personne qui a reçu le traitement; quel type de produit a été utilisé et sous quelle forme il a été proposé. Bref, il s'agit de mener une investigation rigoureuse pour déterminer tous les facteurs qui ont pu contribuer à l'accident ou aux effets secondaires avant de conclure à la toxicité des plantes de la pharmacopée chinoise.

C'est d'ailleurs pour cette raison, entre autres, que l'Institut souhaite la présence d'une personne experte en la matière quand il s'agit d'évaluer tout produit d'herboristerie chinoise. Cette présence, juxtaposée à l'enquête, permettra d'éviter des jugements hâtifs qui nuisent considérablement à la réputation de la pharmacopée chinoise.

Nous savons tous que les médicaments brevetés que les consommatrices et consommateurs utilisent, en vente libre ou sur recommandation médicale, ne sont pas à l'abri d'effets secondaires, à des degrés divers, et que ces événements sont beaucoup moins publicisés que les problèmes liés à l'utilisation des plantes médicinales.

À titre d'exemple, rappelons seulement un récent article du journal Le Soleil du 15 avril 1998 citant les résultats de 39 études réalisées aux États-Unis à paraître dans le Journal of the American Medical Association mettant en cause les effets secondaires des médicaments conventionnels. Tous les ans, quelque 2 216 millions de patients américains hospitalisés sont victimes des effets secondaires des médicaments, et les produits pharmaceutiques causent le décès de 106 000 personnes. Il s'agirait de la quatrième cause de décès aux États-Unis.

Si les chercheurs reconnaissent tout de même les limites de ces études, comme l'augmentation de la médication pour compenser la durée minimale du séjour hospitalier, par exemple, il n'en reste pas moins que la situation mérite réflexion et que les médicaments conventionnels ne sont pas aussi sûrs qu'on veut bien nous le laisser croire.

Un contrôle de la qualité suppose aussi l'application de certaines normes d'étiquetage sur les produits de santé naturels. On devrait trouver pour chaque produit des indications claires et précises sur le nom du produit, nom commun et scientifique, les parties de plantes utilisées, la source du produit et des renseignements sur le producteur. De plus, des recommandations précises quant à la posologie devraient être inscrites sur chaque produit, de même que les contre-indications et les dangers potentiels pour certaines clientèles: femmes enceintes ou allaitant, jeunes enfants, personnes âgées ou personnes atteintes de certaines maladies.

Enfin, toute étiquette devrait formuler clairement l'utilité du produit en cause. Les consommateurs et les consommatrices ont besoin d'une information complète, quel que soit le produit en cause. En ce sens, les rapports doivent présenter la vérité sans biais, malentendu ou fausseté et être exempts de toute information à caractère de libelle. Autrement dit, il faut que les consommatrices et les consommateurs ne soient pas informés des seules contre-indications des produits de santé naturels mais aussi de leurs effets bénéfiques.

• 1110

Vouloir protéger le public en lui offrant une information partielle, et parfois partiale, nous paraît aussi dommageable que lui cacher toute la vérité sur les propriétés des plantes de la pharmacopée chinoise. La pratique de l'herboristerie au pays a fait ses preuves et mérite qu'on lui accorde le respect et la place qui lui revient de droit. Merci.

La présidente: Merci beaucoup. Nous n'avons malheureusement que le temps de permettre une question de la part de chaque député. J'espère que les témoignages qui suivront seront plus brefs parce que les députés sont vraiment intéressés à vous poser des questions.

Madame Caplan.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan (Thornhill, Lib.): J'aimerais que vous déposiez une bibliographie, une liste des livres que vous avez présentés au comité afin qu'elle figure au compte rendu. Je suis désolée que nous n'ayons pas le temps de vous poser des questions.

[Français]

La présidente: Madame Picard, une question suivie d'une courte réponse, s'il vous plaît.

Mme Pauline Picard: Quelles sont les plus grandes difficultés que vous éprouvez actuellement? Vous demandez qu'on désigne une troisième classe; vous demandez aussi un encadrement réglementaire et un organisme indépendant. Il me semble que vous éprouvez des difficultés face au manque de connaissances des experts ou des gens qui réglementent les produits chinois.

[Traduction]

M. Luc Martineau: Je dirai à Mme Caplan que la Materia Medica chinoise... nous fournirons au comité une liste de ces publications.

[Français]

Madame Picard, il est d'abord important de reconnaître qu'il existe un corps de connaissances que les experts boudent souvent. Telle est la réalité. Le ginseng Panax quinquefolia pousse ici dans votre région, et les gens ne savent même pas à quoi il sert. Il y a en quelque sorte un blocage et on ne veut pas reconnaître ce corps de connaissances. Notre institut souhaite faire la promotion de ce corps de connaissances et s'assurer qu'on utilise ces produits en toute sécurité.

Mme Arlette Rouleau: Nous éprouvons aussi des difficultés parce qu'il est clair qu'on a souvent tendance à passer un jugement sur nos produits. Par exemple, on portera un jugement sur l'éphédra, qui est une plante médicinale, selon ses connaissances de l'éphédrine, qui est un des principes actifs de cette plante. On confond donc les principes actifs et les analyses qu'on a pu faire sur la plante. L'utilisation de l'éphédrine s'accompagne de nombreux d'effets secondaires, bien que cette substance soit présentement en vente libre en pharmacie sous le nom de Sudafed. La plante éphédra ne contient toutefois que 2 p. 100 d'éphédrine et elle a beaucoup d'autres principes actifs, mais les effets secondaires qu'on lui attribue soient répertoriés tels ceux de l'éphédrine. Je recommande à mes patients l'éphédra et je n'ai jamais constaté ces mêmes effets secondaires, parce que la plante n'a pas les mêmes effets que les principes actifs qu'on isole. On porte trop souvent un jugement sur les plantes à partir de tels critères plutôt que de façon globale.

Par exemple, lorsqu'on fait la demande d'un DIN pour un certain produit qui tonifie...

La présidente: Madame Rouleau, puisque d'autres témoins attendent, je vous prie de hâter votre réponse.

Mme Arlette Rouleau: Je voudrais tout juste expliquer la question du DIN et du savoir traditionnel parce que c'est très important. Par exemple, le Xiaoyao San tonifie le yin des reins, nourrit le sang et est très bon pour traiter les problèmes prémenstruels et de digestion. Mais s'il y a un problème de yin du foie et qu'on a besoin de nourrir le sang, ce produit-là n'est pas recommandable. Sur quelle base ferons-nous la demande d'un DIN et sur quelle base la Direction des produits thérapeutiques nous autorisera-t-elle à demander un DIN? Sur le fait que ça tonifie le foie, que ça dénoue l'énergie du foie ou que ça nourrit le sang? Acceptera-t-on ces critères-là? C'est ça la question. Si on ne peut invoquer que le traitement du syndrome prémenstruel lorsqu'on demande un DIN, ce n'est pas juste parce que le syndrome prémenstruel n'est pas nécessairement dû à une nouure du Qi du foie. On ne peut donc pas tester le produit. Sur quelle base ferons-nous reconnaître nos produits?

• 1115

M. Luc Martineau: On vous remercie de votre attention. Je serai de retour cet après-midi.

[Traduction]

La présidente: M. Chuck Roberts est le président d'Immunotech Research Limited.

Vous avez 20 minutes, mais comme je viens de le dire, je préférerais que vous soyez bref afin que nous puissions vous poser des questions? Pourriez-vous nous présenter votre collègue?

M. Chuck Roberts (président, Immunotech Research Limited): Oui, voici le Dr Bounous, un de mes collègues.

Mesdames, je serai bref, parce que nous préférerions répondre à vos questions.

Notre entreprise fait de la recherche depuis une vingtaine d'années. Nous venons essentiellement d'inventer un produit canadien. Peut-être ne devrais-je toutefois pas employer le mot «inventer». Disons plutôt que nous avons fait une découverte. C'est le Dr Bounous qui a fait cette découverte après une vingtaine d'années de recherche à McGill et à l'Hôpital général de Montréal. Il s'agit d'un isolat de protéines du lait, un extrait du lait.

Voilà maintenant de nombreuses années que nous tentons de soumettre ce produit à des essais cliniques. Nos tentatives sont la source de grandes frustrations. Nous avons un brevet canadien, quatre brevets américains et un brevet mondial. Nous vendons ce produit dans tous les États-Unis et en Europe par l'entremise de médecins, de cliniques et de centres anticancéreux.

Sur le marché canadien, notre problème est probablement celui dont vous avez entendu parler à maintes reprises: notre produit se trouve dans les limbes. Il y a longtemps, le Dr Bounous et ses collègues médecins ont tenté d'obtenir une identification numérique de drogue. Cela nous a été refusé parce qu'on considère que notre produit est un aliment. Le produit est donc retourné dans la catégorie des aliments, mais c'est probablement plutôt un aliment médical.

Nous étudions le système immunitaire. Nous avons prouvé nos allégations. Nous avons des brevets de procédés ce qui est un peu différent d'un brevet de formule. Notre brevet s'applique au procédé, à ce que fait notre produit. Nous avons quatre brevets américains, y compris des brevets pour le sida. On vient de nous accorder un brevet pour le cancer qui a été en instance pendant quatre ans car il s'agit d'un brevet mondial. Nous avons commencé en Australie et espérons pouvoir utiliser ce brevet aux États-Unis. Nous avons des brevets pour notre méthode qui permet de renforcer le système immunitaire humain.

Notre produit est mis sur le marché à l'étranger. Ainsi, Fresenius AG, l'une des plus grandes sociétés pharmaceutiques européennes, a un permis pour commercialiser notre produit en Europe. Elle le commercialise de la façon traditionnelle, par l'entremise des pharmacies. Le coût de notre produit n'est toutefois pas assumé par le régime de soins de santé. Aux États-Unis, nous commercialisons notre produit par l'intermédiaire de la division des suppléments alimentaires. Nous avons demandé l'autorisation de commercialiser notre produit comme nutraceutique. Bon nombre de médecins vendent aussi notre produit, et nous croyons que dans deux ou trois mois, l'assurance-médicaments aux États-Unis remboursera aux sidatiques et à certains autres patients le coût de ce produit.

Revenons au Canada. Nous sommes une entreprise canadienne. Nous avons des employés ici, à Vaudreuil. Nous vendons notre produit comme aliment au Canada. Mais nous ne pouvons même pas utiliser notre propre nom. Nous n'avons pas non plus le droit de montrer nos brevets à qui que ce soit—même si ce sont des brevets canadiens—en raison de la réglementation s'appliquant aux aliments, ce qui est compréhensible.

Nous faisons des essais cliniques. Ainsi, nous faisons en ce moment un essai en double-aveugle, un essai de l'étape trois, au Centre thoracique de Montréal, avec le Dr Lalonde. Cet essai se poursuit déjà depuis un moment. Nous devrions sous peu pouvoir offrir notre produit comme traitement contre le sida. Nous ne pouvons cependant le dire à personne, même si ces essais coûtent plusieurs millions de dollars, une petite fortune, au Réseau canadien pour les effets VIH. Nous investissons aussi des sommes considérables dans ces essais.

Nous allons aussi faire une autre étude à McGill, avec le Dr Larry Lands de l'Hôpital pour enfants, sur la fibrose kystique.

Nous finançons des essais cliniques sérieux, mais nous ne pouvons en parler à personne. C'est donc très frustrant. Il faudrait donc une catégorie intermédiaire qui nous permettrait de rester sur le marché canadien.

• 1120

Moi, je suis d'ici, et je suis déterminé à rester au Canada, car c'est ici que se trouve notre siège social et nous allons faire des millions de dollars en exportant ce produit. Nous travaillons avec des laiteries locales. Elles n'ont pas encore la même technologie que nous, mais nous travaillons avec elles. Le produit est ici. L'emballage est fait dans une usine de produits pharmaceutiques de Québec et dans l'est de Montréal.

Nous continuons de vendre notre produit selon notre méthode, mais, je le répète, ça a été très frustrant pour nous. Nous voulons respecter les règles du Canada, mais cela empêche le public de savoir quelles sommes d'argent nous investissons. C'est un problème très réel. Ainsi, sur le marché américain—ce n'est peut-être pas le meilleur critère de comparaison, car je ne crois pas que la situation y soit idéale—nous pouvons parler de notre produit, nous pouvons prouver nos allégations.

Nos preuves proviennent d'essais cliniques effectués par des médecins. Vous n'avez qu'à regarder la carrière du Dr Bounous. Je vous ai remis des brochures. Plusieurs d'entre elles ne sont pas traduites parce que nous n'avons pas encore le droit de le faire, les règles d'ici ne le permettant pas. Nous vous avons donc apporté les documents que nous avons préparés pour le marché américain. J'y ai inclus le curriculum vitae du Dr Bounous. Il y a aussi un document sur les fondements cliniques qui a été rédigé par le docteur. C'est du solide. D'autres médecins s'en servent.

Ce que nous voulons vous dire essentiellement... J'en reviens à ce que je disais au début. Ce produit a été découvert à Montréal. C'est un produit unique dans son genre. Essentiellement, c'est du lait maternel pour adultes. C'est ce que nous avons créé. Nous avons trouvé un procédé d'extraction de cette protéine du petit lait que nous isolons ensuite mais de façon à ce qu'on puisse profiter de ses effets. Le produit a été éprouvé. Nous pouvons prouver nos allégations.

Les entreprises pharmaceutiques étrangères n'acquièrent ces permis pour rien. Elles consacrent des millions de dollars à la recherche. La Société européenne fera environ 60 millions de Deutschmarks la première année là-bas. C'est énorme. C'est une part considérable du marché.

C'est formidable pour une petite entreprise canadienne partie de rien. C'est une petite entreprise de recherche. Nous avons découvert ce produit et l'avons commercialisé. Nous avons accordé des permis dans 20 pays au cours des huit derniers mois, et ces entreprises pharmaceutiques savent maintenant ce dont elles disposent. Nous aimerions bien qu'il existe une catégorie intermédiaire grâce à laquelle nous pourrions montrer ce que nous avons découvert. Je suis certain que cela plairait à beaucoup d'autres.

Voilà ce que je voulais vous dire. Je suis certain que vous aimeriez poser des questions; nous serons heureux d'y répondre.

La présidente: Merci beaucoup. Madame Caplan.

Mme Elinor Caplan: Merci.

[Français]

Je poserai ma question en anglais parce que cela m'est plus facile.

[Traduction]

Je poserai mes questions en anglais; j'en ai un bon nombre à vous poser.

Notre comité se penche entre autres sur la meilleure façon de traiter de ces produits qui sont des aliments, ou qui ont toujours été classés dans la catégorie des aliments, auxquels on attribue des propriétés thérapeutiques. Je les ai souvent décrits comme des produits qui ressemblent à un médicament, qui auraient des propriétés thérapeutiques comme un médicament, mais qui, en fait, ne sont pas synthétiques.

Votre produit est-il naturel?

M. Chuck Roberts: C'est un extrait du lait.

Mme Elinor Caplan: Alors voici ma question: votre produit présente-t-il des risques?

M. Chuck Roberts: Non, si vous buvez du lait ou absorbez cette protéine. Ainsi, nous avons même éliminé le lactose de notre produit. Ce produit est utilisé dans des cas extrêmes, il est parfois même administré par tube, surtout chez les sidatiques, dont certains sont allergiques au lactose. Il n'y a ni gras ni lactose dans notre produit.

Mme Elinor Caplan: Votre produit est donc un bon exemple des produits naturels que notre comité examine et dont on se demande ce qu'on devrait faire...

M. Chuck Roberts: C'est exact.

Mme Elinor Caplan: ... et s'il devrait être réglementé. Ce qui me préoccupe, ce n'est pas tant la question d'une troisième catégorie, mais plutôt d'un nouveau processus de réglementation—je crois que ce serait la meilleure façon de décrire cela—pour garantir l'innocuité et la qualité.

• 1125

L'important, pour moi, si on tient compte du mandat du comité, est d'améliorer l'accès pour les consommateurs et la liberté de choisir des produits tout en garantissant l'innocuité et la qualité. Vous remarquerez que notre mandat ne mentionne pas l'efficacité. Alors ma question est la suivante: Croyez-vous que, lorsqu'on allègue qu'un produit à des propriétés thérapeutiques, on devrait le prouver?

M. Chuck Roberts: Oui, absolument.

Mme Elinor Caplan: S'il existait une autre façon de réglementer ces produits qui, dans le passé, ont toujours été considérés comme des aliments aux termes de la loi sur les aliments et drogues, mais dont on allègue maintenant qu'ils ont des propriétés thérapeutiques, croyez-vous qu'il incomberait à Santé Canada, à l'organisme de réglementation de s'assurer que ces produits sont de qualité conforme aux BPF?

Dr Gustavo Bounous (médecin, Immunotech Research Ltd.): Oui.

Mme Elinor Caplan: Il en irait de même pour ce qui est de l'innocuité du produit, autrement dit, de la capacité du produit à faire ce qu'on prétend qu'il fait?

M. Chuck Roberts: Certainement.

Mme Elinor Caplan: Seriez-vous en faveur d'une méthode qui prévoirait une mise en garde afin que vous n'ayez pas à faire toutes ces recherches et ces essais qui vous coûtent si cher?

Bon nombre de ces produits sont dans la pharmacopée, certains existent depuis des milliers d'années, il y a des monographies et ainsi de suite, mais ils n'ont pas fait l'objet d'essais en double aveugle, comme le veut la recherche traditionnelle, qui sont si coûteux. Pourrait-on prévoir une mise en garde qui permettrait la vente de produits naturels qui n'ont pas subi tous ces effets?

Dr Gustavo Bounous: J'aimerais d'abord préciser ce que sont les produits naturels. Ce terme est galvaudé. La plupart des poisons sont naturels, tels que l'arsenic, le cyanure, etc. Ces produits sont naturels, en ce sens qu'ils proviennent de source naturelle et ne contiennent aucun ajout. Pour ma part, je crois qu'on pourrait vérifier les propriétés thérapeutiques qu'on attribue à certains produits dans les universités. Cela pourrait se faire là comme ça se fait pour les médicaments.

Comme l'a dit M. Roberts, notre produit subit actuellement des essais à Montréal et dans des universités américaines. Nous attendons les résultats. Nous en avons déjà reçu certains. Mais il ne fait aucun doute que seule une vérification indépendante par des cliniciens qualifiés nous permettra de prouver nos allégations.

Pour ce qui est de savoir ce que le gouvernement ferait à ce sujet, c'est une autre histoire. On définit les aliments comme une substance qui contribue à la structure, aux fonctions et à la croissance physiologique. Les aliments n'ont pas de propriétés thérapeutiques. Les médicaments, eux, ont un effet bénéfique sur la santé, mais n'incluent pas les aliments. Il est plus facile de définir les médicaments que les aliments fonctionnels.

Moi, je définirais les aliments médicinaux comme des aliments qui, outre leur rapport nutritif, contribuent au traitement ou à la prévention des maladies.

Mme Elinor Caplan: Mais qu'en est-il de l'usage des produits thérapeutiques, par opposition aux aliments, s'il s'agit d'un produit thérapeutique ou d'un produit thérapeutique naturel?

M. Chuck Roberts: Si vous examinez la définition en fonction de la façon dont nous commercialisons ce produit, c'est un produit qui aide bien des malades. Il contribue à la prévention, et c'est probablement à ce titre qu'on peut s'approprier une part du marché.

Mme Elinor Caplan: Notre comité se penche sur une question que j'aimerais que vous abordiez, à savoir que bon nombre de produits sont utilisés de façon traditionnelle depuis très longtemps sans avoir pour autant été mis à l'essai comme votre produit. En outre, ils ont été utilisés à l'échelle mondiale ou dans différentes cultures. S'il fallait soumettre ces produits à des tests rigoureux, leur coût deviendrait prohibitif pour les consommateurs.

Une voix: C'est possible.

Mme Elinor Caplan: Cela nous préoccupe. Qu'en pensez-vous?

Dr Gustavo Bounous: Je comprends cela. En revanche, j'estime que, ultimement, c'est la science et la méthode scientifique qui nous permettront de trancher.

Dans notre entreprise, nous disons que ce que nous avons démontré dans nos expériences sur des animaux sera vérifié par des cliniciens indépendants. Par conséquent, si les résultats sont positifs, nous devrions pouvoir attribuer des propriétés thérapeutiques à notre produit.

• 1130

Mme Elinor Caplan: Ne pourrait-on pas prévoir une autre méthode pour réglementer les produits naturels qui vous donnerait la liberté, si vous le souhaitez, de procéder à des essais mais qui reconnaîtrait aussi l'usage traditionnel et la présence dans le codex...

M. Chuck Roberts: Oui.

Mme Elinor Caplan: ... à condition qu'on prévoie une mise en garde dans les cas où il n'y a pas eu d'essais?

M. Chuck Roberts: Je crois que vous êtes sur la bonne voie. Personne ne veut consacrer tout cet argent à ces tests, mais nous, nous avons fait tous ces essais au fil de longues années, mais nous nous retrouvons quand même devant rien.

Nous faisons affaire avec les médecins qui font les choses différemment. Tout le monde veut s'assurer que tous sont d'accord, et il faut passer par des processus bien établis. Le Dr Bounous n'est pas différent des autres à cet égard.

Je suis certain qu'il y a bien d'autres bons produits qui pourraient se trouver dans la même catégorie que le nôtre, mais nous estimons néanmoins qu'il faut prouver les allégations qu'on fait avant de pouvoir commercialiser un produit. Nous aimerions bien qu'il y ait une catégorie intermédiaire; nous pourrions alors prouver que nos allégations sont fondées. C'est tout.

[Français]

La présidente: Merci. Madame Picard.

Mme Pauline Picard: Vous m'excuserez, mais je ne crois pas avoir bien compris et j'aimerais obtenir des éclaircissements. Vous présentez un produit naturel qui devient comme une hormone de synthèse et voulez le faire approuver par Santé Canada à titre de produit à fin thérapeutique. Dès ce moment, le produit n'est plus considéré comme un aliment, mais plutôt comme une drogue. Santé Canada devrait normalement étudier votre produit, s'assurer de son efficacité et de son innocuité et vous accorder le permis afin que vous puissiez l'étiqueter comme produit à fin thérapeutique. Qu'est-ce qui ne va pas? Qu'est-ce qui n'a pas fonctionné? Est-ce que vous avez demandé votre brevet pour cette hormone-là sous la rubrique d'un aliment?

Dr Gustavo Bounous: Oui, à titre d'aliment. Il faut préciser clairement ce qui tombe sous la définition d'une drogue ou d'un aliment. C'est une question sur laquelle les Américains se penchent depuis au moins deux décennies et ils n'ont pas encore réussi à identifier jusqu'où va l'aspect nutritionnel et où commence l'aspect thérapeutique.

Notre produit est peut-être une illustration de ce que j'avance. Dans ce produit, l'ingrédient actif est le précurseur de Glutathion, qui est l'antioxydant spécifique de la cellule. Normalement, une alimentation ordinaire nous fournit tout ce qu'il faut au point de vue de précurseurs de Glutathion. Donc, si l'animal ou l'individu fait face à des conditions normale de vie, son alimentation ordinaire lui suffit amplement. Mais lorsqu'il fait face à une invasion virale ou bactérienne, ses lymphocytes doivent produire beaucoup plus d'anticorps et se multiplier. Il a alors besoin de l'antioxydant Glutathion. qui est spécifique à la cellule. Cet antioxydant doit être reconstitué au fur et à mesure qu'il est utilisé. Ainsi, un apport supplémentaire de précurseurs, comme ceux qu'on retrouve dans ce produit laitier, lui donne la capacité de mieux faire face à l'invasion bactérienne.

Mme Pauline Picard: D'accord.

Dr Gustavo Bounous: Certains produits de qualité inférieure ont le même pouvoir nutritionnel, mais ils n'ont pas ce pouvoir qu'on appelle l'activité biologique. Certaines protéines ont la même capacité nutritionnelle, mais ne manifestent pas cette propriété. Cette distinction, c'est le pas supérieur. C'est facile pour l'industrie pharmaceutique puisqu'elle traite de molécules sans fin nutritionnelle. Tout ce qu'elle fait a un effet, que cela serve ou ne serve pas, du moment que c'est bien documenté.

Nous faisons face à un mélange de choses. Il y a un ingrédient qui a une activité et nous ne sommes pas sûrs que ce soit seulement cet ingrédient qui agisse parce qu'il existe une interaction entre les autres protéines du lait. C'est une longue histoire, mais il y a évidemment un effet thérapeutique préventif qui se dissocie de l'aspect nutritionnel.

J'espère avoir su bien répondre à votre question.

Mme Pauline Picard: Oui, oui.

Dr Gustavo Bounous: Il est difficile de définir ce que c'est.

• 1135

La présidente: Je vous remercie beaucoup.

[Traduction]

Merci, monsieur Roberts, de votre exposé.

Nous avons vos documents. S'il y a autre chose que, d'après vous, nous devrions avoir...

M. Chuck Roberts: Nous avons des tonnes de documents. Vous n'auriez jamais le temps de tout les lire, mais nous pourrons certainement vous les faire parvenir.

J'aimerais ajouter une chose brièvement. Nous entreprendrons sous peu des essais, qui ont été prévus il y a déjà un moment, avec le ministère de la Défense nationale du Canada. Ces essais seront faits dans les laboratoires du ministère, je ne sais trop où ils se trouvent. Les fonctionnaires du ministère connaissent notre produit; ils pourraient s'en servir au sein même du ministère et même à l'étranger, où on envoie des troupes.

La présidente: Merci beaucoup.

M. Chuck Roberts: Merci.

Mme Elinor Caplan: Pendant que vous vous levez pour quitter la table... j'ai constaté ceci. Je croyais que, quand on prêtait des propriétés thérapeutiques à un aliment, l'aliment en question devenait un médicament et qu'il fallait ensuite passer par toutes les étapes prescrites.

M. Chuck Roberts: Nous avons essayé de faire cela. Parce qu'il s'agit d'un aliment et que rien n'y est ajouté, on ne nous a pas permis d'en faire un médicament. Si nous ajoutions quelque chose, il n'y aurait pas de problème. La règle prévoit que le produit est soit un aliment soit un médicament. Il n'existe rien entre les deux. Il faut quelque chose entre les deux.

La présidente: Merci beaucoup.

Dr Gustavo Bounous: Les Américains ont décidé, pour leur part, de ne pas inclure d'attribution de propriétés thérapeutiques sur l'étiquette.

La présidente: Merci.

Nous entendrons maintenant le groupe d'Eel River Bar: Tim Dedam, Gordon LaBillois et Gilles Soucy.

M. Gordon LaBillois (gérant de bande, Première nation d'Eel River Bar): Tim Dedam n'est pas là.

La présidente: Pardon, il n'est là.

Ai-je bien prononcé le nom de l'organisation?

M. Gilles Soucy (coordonnateur, Les Jardins du patrimoine autochtone, Première nation d'Eel River Bar): Oui, c'est juste.

La présidente: C'est vous qui allez commencer, Gilles?

M. Gilles Soucy: Non, c'est Gordon.

La présidente: Bon, d'accord. Nous avons 20 minutes, et nous vous serions très reconnaissants de laisser autant de temps que possible pour les questions. Merci beaucoup, Gordon.

M. Gordon LaBillois: Au nom de la Première nation d'Eel River Bar, je tiens à vous remercier pour l'invitation. Nous sommes honorés d'avoir été invités à venir témoigner devant le comité permanent pour vous parler du projet des Jardins du patrimoine autochtone, qui sera aménagé à Charlo, au Nouveau-Brunswick.

Le projet des Jardins du patrimoine autochtone est un projet d'interprétation qui vise à souligner et à célébrer l'apport des Autochtones à la société dans son ensemble. Grâce à ce projet, nous espérons, non pas nous lancer dans une entreprise commerciale, mais nous donner un outil pour nous aider à rebâtir un peuple et à rebâtir une nation qui a perdu tellement de sa richesse au fil des ans.

Comme vous le savez, dans notre région se trouve la Baie des Chaleurs, un des premiers endroits où Jacques Cartier a abordé quand il est arrivé dans notre grand pays, et les Micmacs sont les premiers avec qui il est entré en contact. Après 450 ans de contact avec les Européens, nous avons perdu une bonne partie de notre culture. Le projet dont je vous parle vise à récupérer certaines des connaissances que nos gens avaient en ce qui a trait à l'utilisation des plantes à des fins médicinales et pour des usages traditionnels.

L'objectif primordial du projet est de rebâtir un peuple, de lui redonner une certaine fierté et une certaine dignité en lui faisant découvrir le savoir que certains des nôtres possédaient autrefois de même que la relation particulière que les nôtres avaient avec leur milieu, avec notre mère la terre.

• 1140

Pour réaliser le projet, nous faisons appel à des aînés du Canada atlantique qui possèdent toujours ce savoir; nous faisons aussi appel à des herboristes de réputation internationale pour nous aider à redonner ce savoir aux nôtres.

En un cours laps de temps, la communauté autochtone du Canada atlantique a redécouvert ses racines. Je peux vous donner des exemples de personnes qui ont été guéries en se servant de médicaments traditionnels. Il y a cet homme de la bande de Restigouche, qui se trouve à 20 milles en amont de notre localité, qui se trouvait en phase terminale du diabète. Le médecin lui faisait trois injections par jour pour son diabète et son état continuait néanmoins à empirer. Il est toutefois passé par un gîte de guérison, où on lui a administré des médicaments produits à partir de l'écorce de sept types d'arbres, et il vit aujourd'hui une vie tout à fait normale et n'a plus besoin d'injections.

Il convient de signaler l'importance capitale pour les Autochtones des convictions spirituelles qui vont de pair avec l'utilisation des médicaments traditionnels.

J'ai oublié de dire que je remplace une autre personne qui devait vous faire cet exposé, mais je tiens à préciser que, dans l'Est, et dans le pays tout entier sans doute, beaucoup parmi les nôtres reviennent aux médicaments traditionnels pour régler leurs problèmes de santé.

Voilà pour le court exposé que je voulais vous présenter. Je conclurai toutefois en vous disant que la collectivité, les gens qui se sont engagés dans cette entreprise, se sentent maintenant très confiants. Vous parlez des apports spéciaux des Autochtones à l'ensemble de la société. Or, j'ai grandi et je suis allé à l'école à Dalhousie, mais dans nos livres d'histoire, les seules contributions qu'on reconnaissait aux Autochtones étaient les raquettes, le canoë et des choses comme celles-là. Quand toutefois on remonte dans l'histoire, on se rend compte que ce sont les Autochtones qui ont fourni aux premiers colons venus s'établir dans l'Île Ste-Croix, au Nouveau-Brunswick, les médicaments qui leur ont permis de survivre à ce premier hiver très rigoureux.

Ce projet nous enthousiasme énormément parce que c'est le début d'un cheminement qui nous redonnera la santé et la richesse que nous avions autrefois.

Merci.

La présidente: Merci beaucoup.

Gilles, aviez-vous quelque chose à ajouter avant que nous ne passions aux questions?

[Français]

M. Gilles Soucy: Merci.

[Traduction]

Merci.

[Français]

Comme mon ami M. LaBillois, lui-même un Micmac, le mentionnait, nous sommes très honorés d'être ici. Mon rôle consiste à coordonner le développement et la mise sur pied d'un jardin du patrimoine autochtone axé surtout sur les communautés Micmac et Malecite du Nouveau-Brunswick.

J'aimerais que les membres du comité soient conscients que nous ne sommes pas les seuls autochtones qui travaillent ou qui entreprennent des projets tels que le nôtre. Il est important de souligner le rôle de nos sages et le mandat qui nous a été donné, soit de vous transmettre simplement le message que cette pharmacie de la nature doit aussi être bien protégée et bien contrôlée. Vous l'avez démontré d'une façon significative ce matin en nous invitant à vous donner ce message.

• 1145

Nous sommes conscients de ce qui se passe depuis 10 000 ans. On constate que les ressources en poisson dont profitaient nos ancêtres s'apprêtent à disparaître de notre région. Beaucoup de pêcheurs ont déjà cessé leurs activités de pêche cette année. Vous avez sûrement entendu parler de la bataille ou de la confrontation qui s'est élevée entre les autochtones et le gouvernement du Nouveau-Brunswick au sujet de la forêt.

Nous craignons que les plantes médicinales ne soient plus là pour nos enfants. Nous voulons faire de l'interprétation et non de la commercialisation. J'enjoins le comité d'être très vigilant et prudent face aux grandes compagnies pharmaceutiques afin de préserver cette qualité de vie dont nos ancêtres jouissaient et afin qu'on ne se retrouve pas un jour comme le Nouveau-Brunswick qui, d'ici 10 ans, n'aura plus d'arbres. Chaque arbre dans notre province est déjà un nom de la famille de chaque résidant et nos ressources forestières sont en perte tout comme nos ressources en poisson.

J'espère que lors de vos délibérations, vous tiendrez compte de ces pertes qu'ont subies nos ancêtres au fil des ans. Encore une fois, c'est un message de prudence que nous lançons au gouvernement canadien.

Merci.

[Traduction]

La présidente: Merci beaucoup.

Madame Caplan, vous avez une question?

Mme Elinor Caplan: Merci beaucoup.

Plutôt que de poser une question, je voudrais faire une observation si vous le permettez. Nous vous sommes reconnaissants d'être venus nous rencontrer, et je crois parler au nom de tous les membres du comité en disant que nous ne voulons pas nous ingérer dans les traditions notamment spirituelles, non seulement des Autochtones, mais aussi des Chinois qui pratiquent la médecine chinoise traditionnelle ou encore de ceux qui pratiquent la médecine ayurvédique. Ce qui intéresse notre comité, aux termes de notre mandat, c'est l'innocuité et la qualité des produits. Nous devons formuler à l'intention du ministre des recommandations qui donneront aux gens la liberté de choix et l'accès aux divers produits.

Je me demandais notamment—et vous en avez parlé quand vous avez dit que l'aspect commercial ne vous intéresse pas—si vous croyez que nous pourrions recommander qu'on fasse une distinction entre les produits qui sont mis sur le marché, emballés et vendus dans des commerces de détail et ceux que vos guérisseurs traditionnels donnent à leurs patients et qui ne sont ni vendus ni mis en marché dans le cadre d'une activité d'emballage commerciale? Avez-vous réfléchi à cette possibilité? Voilà ce à quoi je pensais quand je cherchais à trouver un moyen de faire la distinction entre les guérisseurs traditionnels et les produits qu'ils donnent à leurs patients, conformément à la tradition, par opposition à... Je ne parlerai pas de «fabrication» ni de «transformation»—, mais uniquement d'emballage. Dès qu'un produit est emballé et étiqueté et qu'il est mis sur les étagères d'un établissement commercial, il serait traité différemment peut-être de celui qui est donné dans le cadre d'un processus de guérison traditionnel.

Que pensez-vous de cette idée?

M. Gilles Soucy: C'est une excellente question. C'est une question à laquelle nous devrons nous intéresser, et je suis heureux que vous l'ayez soulevée.

Dans le cadre de l'interprétation de nos Jardins, nous avons identifié plus de 220 plantes, mais nous n'avons pu en interpréter qu'un certain nombre.

Nous travaillons en très étroite collaboration avec le Musée canadien de la nature et aussi avec l'Institut Smithsonian, à Washington. La question que vous soulevez se posera le jour où les Jardins ouvriront en l'an 2000 et que les visiteurs voudront acheter des médicaments traditionnels qui se trouveraient sur les étagères de la boutique, par exemple. Je crois qu'il nous faudra sans doute tenter d'y répondre en collaboration avec Santé Canada.

• 1150

Il y a toutefois une foule de gens qui frappent déjà à notre porte pour demander de l'échinacée et des végétaux semblables, et il s'agit des visiteurs qui se présentent chez nous. Certains de ces médicaments se trouvent déjà en vente au magasin, et nous en achetons nous-mêmes. Le problème se posera quand il s'agira de l'aspect tourisme ou de l'aspect interprétation. Comment ferons-nous pour vendre ces produits? Il y aura certains mécanismes de contrôle qui seront établis de concert avec Santé Canada, en conformité avec la réglementation des médicaments. C'est un problème auquel nous devrons nous attaquer.

Mme Elinor Caplan: Je vous inviterais simplement à tenir compte de notre situation. Le problème que vous entrevoyez pour l'avenir, nous devons nous y attaquer dès maintenant. Il y a beaucoup de traditions qui ont des produits auxquels on aimerait attribuer des propriétés thérapeutiques. Voilà la question à laquelle notre comité doit s'attaquer aujourd'hui. Comment pouvons-nous traiter ces produits qui aujourd'hui sont classés comme des aliments mais auxquels on ne peut pas attribuer de propriétés thérapeutiques même s'ils ont un effet médicinal? Ils s'accompagnent d'une certaine posologie. Comment pouvons-nous assurer la qualité et l'innocuité de ces produits pour le consommateur?

Ce dont nous parlons c'est de l'intérêt public du point de vue de la protection du consommateur. Quel rôle devrait jouer Santé Canada en tant qu'organisme de réglementation pour veiller à la qualité et à l'innocuité de ces produits tout en respectant autant que possible la liberté de choix des consommateurs?

M. Gordon LaBillois: L'utilisation de médicaments traditionnels, c'est quelque chose qui a été transmis d'une génération à l'autre. Autrefois, c'était nos anciens qui devaient transmettre le savoir médical. Ils ont toujours un rôle à jouer, même quand il s'agit de l'utilisation de ces médicaments par les nôtres. Parfois, on peut se faire plus de tort que de bien. Je recommanderais donc qu'il y ait une relation quelconque qui soit établie avec la communauté autochtone pour qu'on puisse évaluer certains des médicaments qui sont utilisés dans tout le pays.

Je suis notamment préoccupé par le fait que certains médicaments ou certaines drogues qui sont utilisés par les Autochtones sont considérés comme illégaux au Canada. Je sais qu'aux États-Unis et dans l'Ouest, on se sert de médicaments dans les sueries; celui qui se ferait prendre en possession de ses médicaments, qu'il s'agisse de marijuana ou de quelque autre substance, pourrait faire l'objet d'accusation.

J'estime que Santé Canada devrait engager le dialogue avec les dirigeants autochtones des différentes régions du pays. Étant donné les résultats de travaux scientifiques et des recherches dont disposent Santé Canada, ce dialogue se fait attendre depuis déjà trop longtemps, il me semble.

La présidente: Merci.

[Français]

Madame Picard.

Mme Pauline Picard: J'aimerais davantage émettre des commentaires que vous poser des questions.

Monsieur LaBillois, vous disiez tout à l'heure que les peuples autochtones, avec leur médecine traditionnelle, ont soigné les premiers Français qui sont arrivés ici au Québec. Les traditions de médecine autochtone se sont reproduites et vous n'avez jamais été avares de vos recettes ou de vos techniques pour soigner les gens de la communauté. Il ne faut pas remonter bien, bien loin pour entendre dire dans nos familles que «ce sont des remèdes de grand-mère», mais les remèdes de grand-mère venaient souvent de la communauté autochtone.

J'ai une grand-mère qui vient du Bas-du-Fleuve et je me sers encore de certaines de ses techniques qui étaient à base de légumes ou de plantes.

• 1155

Il serait donc bon que vos sages qui utilisent les plantes et les produits naturels continuent à informer les gens afin qu'ils puissent se soigner le plus naturellement possible.

Je voulais aussi vous dire, monsieur Soucy, que j'ai pris bonne note, et que le comité l'a aussi sans doute fait, de votre mise en garde concernant la conservation des végétaux et de nos richesses naturelles. Je vous remercie de votre présence à ce comité.

La présidente: Avez-vous quelque chose à ajouter? Très bien, merci.

[Traduction]

Le groupe suivant est l'Association des herboristes chinois du Québec. C'est le nom d'Ing Dan Tran qui se trouvait sur la liste à l'origine, car je crois qu'elle en est la présidente. Nous avons aussi plusieurs autres personnes qui témoigneront en même temps qu'elle. Nous aurons l'Association de médecine chinoise, et je demanderais donc aux témoins de se présenter.

[Français]

Mme Ing Dan Tran (présidente, Association des herboristes chinois du Québec): L'Association des herboristes.

La présidente: Les médecins sont de ce côté et les herboristes de l'autre? C'est bien.

[Traduction]

Nous entendrons d'abord les deux groupes, après quoi nous pourrons poser nos questions.

[Français]

Nous allons entendre d'abord l'Association des herboristes chinois du Québec. Madame.

Mme Ing Dan Tran: Bonjour.

La présidente: Bonjour.

Mme Ing Dan Tran: Je suis la présidente de l'Association des herboristes chinois du Québec. D'abord, j'aimerais clarifier un point. Nous sommes deux groupes différents. Si, après mon exposé, vous avez des questions à poser, j'aimerais que vous les adressiez aux membres de notre association. Je vous remercie.

Aujourd'hui, notre propos porte sur la toxicité des plantes médicinales chinoises et sur la façon raisonnable de réglementer ces plantes. Vous avez déjà entendu parler de la toxicité des plantes médicinales chinoises. Je pense que c'est une question très importante à laquelle j'aimerais que vous portiez une attention particulière avant d'arrêter une réglementation les concernant.

Au cours des années passées, dans les journaux et dans les émissions de télévision, on a diffusé plusieurs reportages sur la toxicité des plantes médicinales chinoises de même que sur leurs effets nocifs sur la santé. À la suite de ces reportages, de nombreux consommateurs ont pris peur. Évidemment, le ministère de la Santé s'en est aussi inquiété. Aussi, ces dernières années, vous savez que certains comprimés d'herbes chinoises ont été mis sur le marché. Ils étaient fabriqués soit en Chine, soit en Amérique du Nord. Quelques décès leur ont été attribués, ce qui a attiré l'attention des consommateurs et du ministère de la Santé.

En conséquence, nous croyons que le ministère de la Santé devrait traiter cette question avec beaucoup d'attention et de sérieux.

• 1200

Pour que vous compreniez à fond la toxicité de ces plantes, nous aimerions aujourd'hui vous faire connaître plus complètement, sous tous leurs aspects, celui de leur toxicité en particulier, les plantes médicinales chinoises. J'espère que vous pourrez tenir compte des éléments que nous aurons précisés aujourd'hui lorsque vous établirez une réglementation touchant ces plantes.

Permettez-mois d'abord de vous présenter nos plantes médicinales chinoises. Il y a environ 5 000 sortes de plantes déjà inscrites dans le dictionnaire de la pharmacopée chinoise en Chine. Parmi celles-là, 509 plantes sont plus couramment utilisées par les médecins et les gens. Parmi ces 509 plantes, il y en a 22 sortes qui sont...

La présidente: Madame, nous avons toutes ces choses ici. Est-il possible de nous présenter vos recommandations? Nous pouvons voir ici les herbes, les produits.

Mme Ing Dan Tran: Oui, oui, mais j'aimerais...

La présidente: Est-ce qu'il serait possible d'abréger un peu?

Mme Ing Dan Tran: D'accord, mais j'aimerais faire un relevé...

La présidente: Pouvez-vous nous énoncer seulement vos recommandations?

Mme Ing Dan Tran: Vous faire nos recommandations tout de suite? Mais vous ne savez pas encore de quoi il est question.

La présidente: Nous avons invité de nombreux groupes qui nous ont expliqué en quoi consistaient tous ces produits et nous avons visité les magasins et les entreprises.

[Traduction]

Mme Ing Dan Tran: Vous pouvez me parler anglais. Je comprends.

La présidente: Je voulais simplement dire que nous avons visité bien des endroits. Nous sommes allés dans des herboristeries. Nous comprenons ces produits. Ce ne sont pas nos produits, mais nous en avons néanmoins une certaine connaissance.

Nous voulons en fait que vous nous disiez d'après vous quelle voie nous devrions suivre. Quelles sont vos recommandations? Que pouvons-nous faire? Il ne s'agit tellement de nous expliquer en quoi consiste chaque produit, mais de nous dire s'il faut modifier la réglementation. Le plus utile, je crois, serait que nous passions à la page 3, où vous formulez vos recommandations.

Mme Ing Dan Tran: Bon, d'accord, je comprends. Nous manquons de temps.

La présidente: Non, ce n'est pas par manque de temps. C'est simplement parce que nous connaissons déjà bien le dossier. Ce que nous voulons entendre, ce sont vos recommandations.

[Français]

Mme Ing Dan Tran: C'est bon. Donc, ce sur quoi j'aimerais attirer votre attention, c'est que parmi ces 509 plantes, il y en a seulement 4 p. 100 qui sont toxiques alors que 96 p. 100 ne le sont pas, selon le dictionnaire de la pharmacopée chinoise.

Nous aimerions préciser que celles qui sont toxiques, lorsqu'elles sont utilisées en médecine chinoise, sont très souvent combinées avec d'autres plantes dans une même ordonnance. Et lorsqu'il y a combinaison entre diverses plantes, leurs effets sont différents. Par exemple, leur effet pharmacodynamique peut être renforcé. L'effet le plus important, c'est que les différents ingrédients produisent une réaction d'ensemble lorsqu'on les combine dans une même ordonnance.

Quelle peut être cette réaction? C'est que l'effet particulier de certaines plantes peut être neutralisé. Il peut y avoir un effet d'absorption. L'absorption veut dire qu'en associant certains éléments et en les faisant bouillir, on crée une réaction chimique entre les différentes composantes, qui donne une liaison assez forte pour changer complètement le caractère de ces plantes et en réduire énormément la toxicité.

Passons à nos recommandations maintenant. Étant donné qu'il y a seulement 4 p. 100 des plantes qui sont toxiques et 96 p. 100 qui ne le sont pas, qui sont sécuritaires pour la santé du public... Comme vous le savez, la sécurité des plantes non toxiques est plus grande que celle de l'arachide. Il y a eu quelques cas de mortalité à la suite de réactions allergiques à l'arachide.

• 1205

Ce que nous voulons préciser, c'est que ces plantes sont très sécuritaires et que nous pensons qu'il n'est pas nécessaire d'élaborer une réglementation particulière pour ces plantes. On peut les considérer tout simplement comme un aliment, un thé ou du café, pour leur mise en vente.

Par contre, en ce qui concerne les 4 p. 100 de plantes qui sont toxiques, nous voulons suggérer qu'elles soient vendues sous un numéro d'identification, un DIN. On ne devrait pas en interdire la vente car, comme vous le savez, certains médicaments chimiques sont beaucoup plus toxiques que la plupart de nos plantes, ce ne les empêche pas d'être vendus, fabriqués et mis sur le marché. Donc, qu'on assigne un DIN, s'il le faut, aux plantes toxiques.

La troisième recommandation concerne elle aussi la toxicité de ces plantes. Comme vous le savez, en Chine et au Japon, par exemple, on a fait beaucoup d'études, d'analyses de ces plantes. On a aussi plusieurs années d'expérience dans l'emploi de ces plantes. On connaît toute la structure, l'action pharmacologique et la toxicité de ces plantes. Donc, on pourrait peut-être se reporter à ces études plutôt que de refaire les mêmes recherches si on veut avoir plus de connaissances sur ces plantes en vue d'une meilleure réglementation. D'accord?

Mme Mieu Tu Huynh (Association des herboristes chinois du Québec): Je voudrais vous demander la parole. Je voudrais ajouter quelques points. Je voudrais vous demander de reconsidérer ce que vous avez interdit, soit de présenter les plantes, les herbes naturelles comme des médicaments, des plantes médicinales.

Parmi les plantes toxiques que vous avez examinées, je voudrais que vous reconsidériez celles qu'on a refabriquées, qu'on a fait bouillir: leur toxicité est réduite, sinon complètement disparue. Je voulais vous dire cela.

La présidente: Est-ce que quelqu'un d'autre du groupe désirerait ajouter un mot? Non?

Qui veut parler ici? Monsieur?

[Traduction]

Le Dr Yu Guang Sheng (vice-président, Chinese Medicine and Acupuncture Association of Quebec Canada): J'appartiens à la Chinese Medicine and Acupuncture Association du Québec. J'en suis le vice-président. Le président est le Dr Hui et le directeur général est le Dr Xie.

Notre association tient aujourd'hui à remercier le gouvernement fédéral de prendre le temps d'écouter ce que nous avons à dire quant à la façon d'accorder à la médecine chinoise une position enviable tant pour les Canadiens que pour le Canada.

J'ai étudié à l'Université de médecine traditionnelle de Shangaï, le Dr Hui à l'Institut de médecine chinoise de Hong Kong et le Dr Xie à l'Université de médecine chinoise traditionnelle de Guangzhou. Nous sommes Canadiens maintenant.

On a fait des reportages sur nous dans La Presse et la Gazette, à Montréal, et nous avons eu la visite de la station de télévision CFCF. On a montré à la télévision beaucoup de patients que nous avons traités.

Nous traitons nos patients selon les principes de la médecine chinoise traditionnelle—le système du yin et du yang, les cinq éléments de la circulation et les différentes compositions de plantes médicinales. Par ailleurs, nous établissons aussi des diagnostiques en conformité avec la médecine traditionnelle, c'est-à-dire la médecine occidentale qui utilise les radiographies, les examens TDM, les échographies, les analyses du sang, d'urine et des selles, etc. Nous intégrons donc la médecine chinoise et la médecine moderne, pour le bien du patient.

• 1210

Bien entendu, l'acupuncture est maintenant très appréciée dans le monde entier, y compris au Québec, où elle est réglementée. Je crois qu'elle le sera aussi en Colombie-Britannique et en Ontario.

Il y a aussi les plantes. Nous traitons nos patients selon les principes de la médecine chinoise traditionnelle, et nous utilisons des plantes. En Chine, elles font toutefois l'objet de recherche universitaire et de réglementation, si bien que la médecine traditionnelle est sur un pied d'égalité avec la médecine moderne.

En Chine, pour devenir docteur en médecine, il faut faire six ans d'études universitaires au Département de médecine chinoise. Les exigences sont les mêmes pour la médecine moderne et pour la médecine traditionnelle, car il faut savoir plus que les rudiments de la médecine. Il faut connaître, par exemple, l'anatomie, la psychologie, la chimie, etc., et il faut aussi étudier la médecine chinoise ancienne—il faut lire beaucoup de livres anciens. Ces livres sont très difficiles à lire, surtout pour les parlants français et anglais, parce que les caractères chinois sont très difficiles.

Les membres de notre association, à Montréal, se servent de plantes et d'acupuncture pour traiter leurs patients conformément, bien entendu, aux principes de la médecine traditionnelle. Nous croyons, dans le cas notamment de certaines maladies plus difficiles à traiter—comme le cancer en phase terminale, le syndrome de la fatigue chronique ou les infections virales—que la médecine moderne n'a jusqu'à maintenant pu nous donner aucun traitement efficace à base de médicaments. La médecine chinoise cherche toutefois à équilibrer le yin et le yang de l'organisme et obtient de bons résultats. C'est vrai.

En Chine, il y a, bien sûr, des laboratoires scientifiques pour étayer cette médecine. Ici, la situation est un peu difficile parce qu'il n'y a pas de fonds ni de fondations pour favoriser la recherche en médecine chinoise. De nombreux essais cliniques montrent toutefois que... ainsi, les personnes atteintes de cancer du foie qui sont traitées à l'Hôpital St. Luc de Montréal peuvent espérer vivre trois mois de plus, mais celles qui vont dans une clinique chinoise et qui sont traitées par la médecine chinoise peuvent vivre deux ou trois ans de plus.

Il y a des médecins, des infirmiers et infirmières de même que des directeurs des services et de l'enseignement infirmier qui viennent dans nos cliniques chinoises pour y consommer des médicaments chinois. Nous leur demandons: «Voulez-vous de ces médicaments? Vous êtes des médecins allopathes.» Ils nous répondent: «Je connais la médecine occidentale, mais je lis aussi des ouvrages sur la médecine chinoise. J'aime bien cette médecine parce qu'elle est naturelle.»

En tout cas, j'estime qu'elle présente bien moins d'effets secondaires.

Certains médicaments chinois comprennent des ingrédients qui produisent des toxines, mais, depuis la Chine ancienne jusqu'à nos jours, nous avons appris à mélanger les plantes et à en faire une formulation contre les toxines. Ce genre de recherche se fait au Japon, à Hong Kong, à Taïwan et en Chine continentale. Je crois qu'un programme très difficile... Des recherches sont en cours en laboratoire pour essayer d'obtenir de bons résultats sans aucun effet secondaire.

• 1215

Nous recommandons donc au ministère fédéral de la Santé de prévoir une étiquette uniforme et de faire en sorte que la qualité soit très bonne. Des études doivent avoir été faites sur un grand nombre d'années. Ainsi, en Chine, il faut être diplômé du Département de médecine chinoise de l'université. On ne peut pas simplement étudier pendant trois ou six mois pour devenir herboriste. Voilà ce que nous pensons.

Merci de nous avoir écoutés.

La présidente: Merci beaucoup. Nous passons maintenant aux questions. Madame Caplan, vous voulez commencer?

Mme Elinor Caplan: J'ai quelques petites questions. La première s'adresse aux herboristes. Croyez-vous que Santé Canada a un rôle à jouer pour ce qui est de veiller à ce que les produits à base de plantes soient exempts de toute impureté ou de substances étrangères, et de quelle façon doit-il intervenir quand ces produits sont importés au Canada?

[Français]

Mme Ing Dan Tran: Est-ce que vous parlez des comprimés qui sont faits à partir d'herbages?

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Non, je parle aussi des plantes médicinales en vrac.

[Français]

Mme Ing Dan Tran: Aucun sous-produit n'est ajouté aux herbages qu'achètent les grossistes ici.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Je parle des importations. On en a vu dans de gros barils. Pensez-vous que Santé Canada peut jouer un rôle ici en s'assurant que ces produits sont propres et sécuritaires et qu'on n'y a rien ajouté avant qu'ils ne quittent le pays d'origine? Le ministère devrait-il jouer un rôle quelconque?

[Français]

Mme Ing Dan Tran: Je ne comprends pas très bien ce que vous voulez dire par «produits ajoutés».

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Une entreprise nous a dit qu'elle avait quelqu'un qui inspectait le produit dans le pays d'origine. Le produit est inspecté de nouveau à son arrivée ici, puis il est nettoyé. On nous a dit aussi qu'il était possible que d'autres compagnies n'offrent pas un produit de même qualité; il se peut que certains produits arrivent ici pleins de saleté, ou qu'on y ait mélangé d'autres produits dans le pays d'origine.

[Français]

Mme Ing Dan Tran: Si vous parlez de la poussière, il serait très difficile de réglementer cet aspect parce qu'en Chine, il y a beaucoup de producteurs qui cultivent ces plantes-là; parfois ils ne les lavent pas bien et il y a des résidus de sable. Si le gouvernement du Canada désirait se doter d'une réglementation à cet effet, il pourrait travailler de concert avec le ministère de la Santé en Chine afin d'établir des normes pour bien contrôler ces produits-là.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Ce qui m'amène à ma deuxième question. Croyez-vous que nous devrions avoir les mêmes normes ici au Canada que, disons, en Chine, lorsqu'il s'agit de la médecine traditionnelle chinoise? Ma question s'adresse aux deux témoins. Devrions-nous avoir au Canada les mêmes normes qu'en Chine?

M. Robert Wong (Association des herboristes chinois du Québec): Elles devraient être différentes.

Mme Elinor Caplan: Pourquoi devraient-elles être différentes en Chine?

M. Robert Wong: Parce qu'il s'agit de plantes médicinales différentes. La formule n'est pas la même.

Mme Elinor Caplan: Si les praticiens de la médecine chinoise sont formés en Chine et qu'ils viennent au Canada, et que les plantes médicinales portent le même nom en Chine qu'au Canada... Je ne vois pas où est la différence.

M. Robert Wong: On ne peut pas avoir une loi pour les deux pays parce qu'on ne pratique pas la médecine de la même façon en Orient et en Occident. On ne peut pas avoir une seule loi qui réglementera les deux.

Mme Elinor Caplan: Je parle de la médecine chinoise traditionnelle et des plantes médicinales traditionnelles qui sont réglementées en Chine et qui répondent à des normes. Croyez-vous que ces mêmes normes devraient s'appliquer au Canada?

• 1220

M. Robert Wong: Elles devraient être combinées parce qu'il y a une différence. Mais c'est la raison pour laquelle nous devons collaborer. Nous devons adopter de nouvelles lois ou prendre des mesures de contrôle.

Mme Elinor Caplan: Je ne crois pas que vous ayez compris ma question.

Mme Mieu Tu Huynh: Nous espérons que le gouvernement du Canada va communiquer avec le gouvernement chinois et que les deux vont collaborer pour trouver un moyen d'aider le Canada sur ce plan.

Mme Elinor Caplan: Existe-t-il des normes en Chine? Existe-t-il des normes qui régissent l'utilisation des plantes médicinales?

Mme Mieu Tu Huyn: Oui, je l'espère, parce que nous aimerions avoir au Canada les mêmes plantes dont on se sert en Chine.

Mme Elinor Caplan: Donc vous ne savez pas s'il existe des normes en Chine?

M. Robert Wong: Il existe bien sûr des normes en Chine, mais lorsqu'on importe ces produits au Canada, personne ne sait vraiment quels produits on peut importer ou pas. À la frontière, il y a quelqu'un aujourd'hui, et demain ce sera quelqu'un d'autre, et personne n'a de lignes directrices. Vous devriez adopter des lois sévères pour les contrôles aux frontières et dire à vos gens quels produits peuvent entrer chez nous. Vous avez quelqu'un là aujourd'hui, mais demain ce sera quelqu'un d'autre. Voilà pourquoi c'est difficile à dire. Il faut qu'il y ait collaboration à la frontière.

Mme Elinor Caplan: Merci.

J'aimerais que les praticiens de la médecine chinoise répondent à la même question. Croyez-vous que les normes qui s'appliquent en Chine devraient s'appliquer aussi au Canada? Même si la réglementation des praticiens relève de l'autorité provinciale, le gouvernement fédéral a un rôle à jouer pour ce qui est de la réglementation du produit.

Dr Yu Guang Sheng: Oui, nous pensons qu'il faut avoir les mêmes normes, les mêmes étiquettes et la même qualité. En Chine, la médecine chinoise est la même que la médecine occidentale. La Chine contrôle ses médicaments avec les mêmes normes et les mêmes étiquettes. Il n'y a aucune différence. De même, dans les universités chinoises, on offre des cours en médecine traditionnelle.

Nous pensons que si au Canada, au niveau des ministères, il y avait des spécialistes et des experts de la médecine chinoise qui examineraient les produits en appliquant des normes élevées, et si toutes les associations fabriquaient des produits de qualité, ce serait excellent pour la population canadienne parce qu'il s'agit de médicaments et non d'aliments. On ne parle pas d'arachides ici.

Par exemple, le doyen de la faculté de médecine de l'Université Harvard a visité l'Université de médecine traditionnelle de Shanghaï, et il a dit qu'à son avis, il n'existait qu'une seule médecine dans le monde, qui inclut la médecine chinoise et la médecine occidentale, parce que les deux soignent le patient. Il ne s'agit pas de Coca-Cola ici. Donc nous pensons que les mêmes normes devraient s'appliquer.

La présidente: Madame Picard.

M. Shao Li Ping (Association des herboristes chinois du Québec): En Chine, à Hongkong et à Taiwan, on trouve tous les fabricants. Si vous voulez produire des plantes médicinales, il faut avoir un permis. Vous devez montrer la prescription; ce qui veut dire que sur l'emballage, il faut dire combien de plantes médicinales il y a à l'intérieur. Il faut donc obtenir un permis, après quoi vous pouvez fabriquer des plantes médicinales.

La présidente: Mme Caplan vous demandait s'il fallait avoir les mêmes normes pour tous les produits vendus dans le même magasin. Lorsque nous avons été dans ces magasins, nous avons constaté que les produits emballés qui étaient sur les rayons et qui étaient importés étaient tous étiquetés alors que les produits d'ici ne l'étaient pas. Voilà pourquoi elle posait la question, à savoir s'il faudrait avoir les mêmes normes.

M. Shao Li Ping: Avant, il y avait des produits médicinaux qui comportaient des ingrédients animaux... mais aujourd'hui, on ne peut plus tuer les animaux. Dans ces animaux, il y a de nouveaux...

[Note de la rédaction: Inaudible]

La présidente: Madame Picard.

• 1225

[Français]

Mme Pauline Picard: Madame Ing Dan Tran, j'ai cru comprendre que, selon vous, la réglementation actuelle est satisfaisante, mais qu'il faudrait peut-être revoir, comme madame le disait, certains produits qu'on a mis de côté ou interdits. Vous n'êtes pas en faveur d'une troisième catégorie. Vous dites que, si on veut afficher qu'un produit a des vertus thérapeutiques, on peut demander un DIN. Est-ce que j'ai bien compris?

Mme Ing Dan Tran: Non. Je disais que si le gouvernement le voulait, il pourrait éventuellement exiger un DIN pour les herbages toxiques, et non pas pour les 96 p. 100 d'herbages qui sont non toxiques.

Mme Pauline Picard: Est-ce que la réglementation actuelle de Santé Canada est satisfaisante?

Mme Ing Dan Tran: Pour l'instant, oui. Il n'y a pas encore de réglementation sur les herbages.

Mme Pauline Picard: Alors, les herbages font partie des aliments?

Mme Ing Dan Tran: Oui, pour l'instant.

Mme Pauline Picard: Si vous croyez que vos herbes peuvent traiter une personne qui a une mauvaise circulation du sang, pouvez-vous les mettre sur la tablette et dire que telle tisane, par exemple une tisane de myrtilles, peut être bénéfique dans un tel cas sans qu'on sache vraiment si cette tisane est bonne pour la circulation du sang?

Mme Ing Dan Tran: À ce moment-là, vous devez faire intervenir votre médecin, qui pourrait mieux vous conseiller. Nous avons énormément d'herbages qui peuvent traiter la circulation du sang, mais c'est à nous, les médecins, de déterminer quels herbages sont les plus appropriés.

Mme Pauline Picard: Vous jugez donc que la réglementation actuelle est satisfaisante et vous recommandez à une personne qui a des problèmes d'aller voir un conseiller ou un expert en médecine chinoise qui va lui dire de prendre telle et telle chose. C'est ça?

Mme Ing Dan Tran: Oui.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Savez-vous qu'aujourd'hui vous ne pouvez pas légalement prétendre au Canada que les plantes ont des vertus médicinales?

M. Ing Dan Tran: Oui, je sais.

Mme Elinor Caplan: Donc si vous dites qu'il n'y a pas de changement, alors les prescriptions de la médecine chinoise traditionnelle qui figurent sur les emballages ne pourraient avancer aucune prétention. Comme l'a dit Mme Picard, s'il y a quelque chose dans votre tradition qui favoriserait la circulation ou le coeur ou soulagerait la douleur, vous ne pourriez rien dire de tel.

[Français]

Mme Mieu Tu Huynh: Normalement, il y a un herboriste qui travaille de concert avec la pharmacie. Si un patient souffre d'un problème de circulation du sang, nous lui conseillons de consulter l'herboriste, qui lui donnera une prescription avec laquelle il pourra se procurer des herbes. Nous travaillons ensemble et obtenons de très bons résultats.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Nous avons été dans les magasins de plantes médicinales, nous avons vu non seulement les plantes médicinales en vrac que prescrivaient les praticiens de la médecine chinoise; nous avons vu aussi des médicaments brevetés qui avaient été produits, mais dans le cadre du régime actuel, le fabricant devait oblitérer la prétention. Personne ne pouvait entrer dans ces magasins, regarder sur les rayons et acheter de ces produits où l'on dirait le bien qu'ils font ou comment ils doivent être pris.

M. Mieu Tu Huynh: Mais, normalement, nous travaillons en pharmacie et nous avons une longue expérience de ces choses. Nous causons avec les patients et nous leur donnons ensuite une consultation. Nous leur conseillons de consulter un herboriste.

• 1230

Mme Elinor Caplan: Donc vous ne croyez pas que n'importe qui peut entrer dans un magasin de plantes médicinales et acheter n'importe quoi sans une consultation préalable.

M. Mieu Tu Huynh: À moins qu'il ne s'agisse d'aliments, parce que les aliments naturels sont très bons pour la santé. Nous les mettons sur les rayons et les patients peuvent acheter ces aliments. Oui, c'est plus facile.

Dr Yu Guang Sheng: Il vient d'arriver en Amérique un médicament chinois, une plante médicinale qu'on appelle dan shen. C'est maintenant réglementé en Amérique, c'est un médicament qu'on injecte par intraveineuse et qui est en vente ici parce que la recherche universitaire chinoise en a démontré la haute importance, et l'on a repris les mêmes recherches en Amérique et on en a convenu. Donc, on autorise aujourd'hui l'utilisation de ce médicament en Amérique. C'est un exemple.

Si une personne entre dans une herboristerie et dit vouloir acheter une formule ou ceci ou cela ou une douzaine de choses—je ne crois pas que ça se fasse parce que ce n'est pas bon pour le patient. Cela peut causer des problèmes à cause du yin et du yang. Le patient ne sait pas s'il y a trop de yin ou trop de yang dans ce qu'il achète. Toute la médecine chinoise est fondée sur le yin et le yang, et si l'on se trompe, c'est très mauvais pour la santé. Voilà pourquoi je pense que le patient a besoin d'une prescription ou d'une consultation que lui donnera un expert en médecine chinoise. Maintenant, au Canada, oui, on en discute aujourd'hui.

La présidente: Quelqu'un veut-il ajouter quelque chose?

[Français]

Avez-vous d'autres commentaires? Oui.

Mme Ing Dan Tran: Lorsqu'on utilise les herbages toxiques dont nous parlions un peu plus tôt, il faut suivre les normes relatives au dosage. Ces normes sont déjà décrites dans le dictionnaire: on indique combien il faut en utiliser et pendant combien de temps. Lorsqu'on dépasse la période que recommande le livre ou qu'on utilise un dosage excessif, on risque de souffrir d'effets néfastes. On indique aussi certaines contre-indications: par exemple, on interdit à des personnes souffrant de problèmes d'hypertension ou de troubles cardiaques d'en utiliser certains. Par exemple, le mahuang, ou éphédrine, peut causer des dommages assez importants. C'est pourquoi il est important de bien respecter les contre-indications et de savoir combien on doit en utiliser et pendant combien de temps.

Mme Mieu Tu Huynh: J'aimerais ajouter que certaines de nos plantes, telle la réglisse, peuvent être bouillies et ajoutées à la prescription afin de réduire la toxicité de certaines plantes médicinales.

[Traduction]

La présidente: Merci beaucoup. Nous tenons à remercier votre groupe d'avoir permis à vos amis médecins de se joindre à vous.

M. Robert Wong: Puis-je avoir...

La présidente: D'accord. Vous aurez le dernier mot, après quoi nous allons nous arrêter.

M. Robert Wong: J'ai visité plusieurs hôpitaux. On n'y voit pas souvent d'Orientaux, à mon avis, et il en est ainsi parce que nous avons nos aliments santé, nos aliments naturels, et nous les consommons jour après jour, nous faisons donc de la prévention. On parle de prévention ici. Donc pour vous, c'est de la médecine, mais pour nous, ça fait partie de la vie. Il s'agit d'aliments et de santé. Vous pouvez dire qu'il s'agit de médicaments, mais pour nous, ce sont des aliments.

• 1235

Nous aimons les consommer régulièrement, et c'est pourquoi ça aide tant de gens. Ça fait du bien à tout le monde. Peut-être que vous ne voyez pas les quantités que les gens consomment. S'il s'agit du produit qu'on importe de Chine, des étiquettes et de ce genre de choses, il n'existe pas de lignes directrices à l'heure actuelle. C'est pourquoi nous aimerions collaborer. Les gens doivent les étudier maintenant et trouver des moyens de les réglementer.

Mais on ne peut se contenter de les réglementer parce qu'il faut connaître les effets de ces produits, et pourquoi ils sont toxiques ou non toxiques. Nous savons pourquoi. Par exemple, ce produit-ci est toxique, mais on y ajoute quelque chose pour en neutraliser la toxicité. Voilà pourquoi, si vous dites tout le temps que quelque chose est toxique... L'eau est toxique. Alors pourquoi ne buvez-vous pas d'eau? Vous avez des moyens pour la purifier.

C'est l'essentiel. C'est ce que je voulais dire.

La présidente: Merci beaucoup. Merci à tous. À ceux qui nous écoutent toute la journée, j'annonce que nous allons ajourner. Nous reprendrons à 14 heures.

• 1236




• 1410

[Français]

La présidente: Nous reprenons nos travaux. Nous accueillons cet après-midi trois groupes: le Syndicat professionnel des homéopathes du Québec, l'Association des diplômés en naturopathie et le Syndicat professionnel des acupuncteurs et acupunctrices du Québec.

Madame Larocque.

Mme Claudine Larocque (présidente, Syndicat professionnel des homéopathes du Québec): J'aimerais tout d'abord vous remercier de nous recevoir. Compte tenu de l'expertise qu'on détient au niveau de la situation de l'homéopathie au Québec, je pense que nous pourrons éclairer le comité et partager notre connaissance du terrain. Sachez que nous apprécions beaucoup la consultation que vous faites de façon à ce qu'on puisse avoir au Québec et au Canada la réglementation la plus adéquate possible. Sans plus tarder, je vais procéder à la lecture du document qu'on vous a présenté.

Nous sommes ravis de l'initiative du Comité parlementaire de la santé et de Santé Canada de consulter les différents intervenants du milieu alternatif de la santé sur les lois et réglementations des remèdes naturels. Cette consultation nous permet, à titre de professionnels, d'éclairer les membres du Comité parlementaire de la santé sur notre réalité quotidienne d'homéopathes.

Les membres du comité pourront ensuite proposer des modifications ou amendements aux différentes lois et réglementations présentement en vigueur au Canada. Les professionnels et les consommateurs canadiens pourront alors bénéficier de lois et de réglementations adéquates et représentatives de la réalité. Ces nouvelles lois et réglementations permettront au Canada d'être innovateur et rigoureux en matière de réglementation sur les remèdes naturels face à ses grands partenaires commerciaux. Les homéopathes canadiens seront à même de contribuer, à armes égales, au développement de la communauté homéopathique internationale.

L'accès à la totalité des remèdes homéopathiques des pharmacopées reconnues par Santé Canada est donc primordial. Les consommateurs, quant à eux, pourront se procurer en toute liberté tous les remèdes naturels de qualité, efficaces et sécuritaires.

Je vous brosserai un bref tableau du Syndicat professionnel des homéopathes du Québec. Depuis 1989, le SPHQ est un syndicat professionnel affilié à la Fédération des professionnels et professionnelles salarié(e)s et des cadres du Québec, à la Confédération des syndicats nationaux et à l'International Council for Classical Homeopathy. Entre autres, le SPHQ est le seul organisme canadien qui satisfait à la rigueur des normes de l'ICCH.

Les principaux objectifs du SPHQ sont: l'étude; la défense et le développement des intérêts professionnels, économiques, politiques, sociaux et moraux de ses membres; l'implantation et l'enracinement à long terme de l'homéopathie; l'autonomie de la profession d'homéopathe; et les qualités de l'enseignement et de la pratique homéopathiques.

Le SPHQ compte 360 membres, répartis dans toutes les régions du Québec. Tous les membres sont régis par un code de déontologie, que nous avons remis à M. Préfontaine, des statuts et règlements, que nous avons aussi remis en annexe, ainsi que les normes d'une formation de 1 500 heures échelonnées sur quatre ans. De plus, un comité de surveillance professionnelle gère les plaintes de la part de la population afin d'assurer la meilleure protection possible du public en l'absence d'ordre professionnel.

Le SPHQ compte plusieurs comités actifs: comité de recherche et développement, comité de formation, comité d'admission, comité de formation professionnelle, comité pour la Semaine québécoise de l'homéopathie et comité des communications.

Le SPHQ a aussi produit différents dépliants d'information en anglais, en français et en espagnol. Une ligne 800 nous permet de répondre aux questions des consommateurs et de bien accueillir les plaintes du public.

Le SPHQ a créé, en 1997, la première Semaine québécoise de l'homéopathie, qui s'est terminée par le Deuxième congrès international d'homéopathie de Montréal, où une dizaine de médecins étrangers et d'homéopathes québécois offraient à plus de 250 participants de 14 pays la richesse de leurs pratiques homéopathiques.

Le SPHQ mène de grands dossiers: dépôt d'une demande d'ordre professionnel, cause-type qui nous oppose au Collège des médecins et qui est en instance d'être entendue à la Cour suprême du Canada, projet de loi privé 205 pour la création d'un conseil académique, mémoire à la suite du dépôt du rapport du Comité interministériel sur les médecines alternatives, élaboration d'une formation universitaire auprès de l'Université du Québec à Trois-Rivières, projet-pilote pour la création d'un dispensaire de soins alternatifs de santé et représentations politiques fédérales et provinciales, ainsi qu'auprès des médias.

• 1415

L'homéopathie en deux mots: L'homéopathie a été fondée en 1796 par Samuel Hahnemann. La science et l'art de l'homéopathie sont totalement différents de la médecine conventionnelle. En effet, il s'agit de traiter le patient dans sa globalité, en intervenant sur la force vitale qui l'anime, par des remèdes homéopathiques.

L'homéopathie ne traite pas la maladie; elle traite le malade.

Les trois principales lois qui encadrent la pratique de l'homéopathie sont les suivantes: la loi de l'infinitésimalité, la loi de la similitude et la loi de l'individualisation.

La pharmacopée homéopathique, qu'elle soit française, allemande, américaine ou indienne, est composée de substances végétales, minérales, animales et humaines. Dans certains cas, ce sont des nosodes.

Nous n'élaborerons pas davantage sur les rudiments de l'homéopathie. L'Ontario Association of Homeopaths l'a très bien fait dans son mémoire présenté à votre comité, et Santé Canada bénéficie d'employés largement qualifiés qui détiennent l'expertise nécessaire à la gestion et à l'encadrement des remèdes homéopathiques.

La réalité homéopathique du Québec: Premièrement, la Charte des droits et libertés octroie à chaque Québécois le droit à la thérapeutique de son choix. Le droit à un traitement homéopathique est donc, au Québec, un droit acquis. Aucune réglementation n'encadre la pratique de l'homéopathie. Au Québec, en matière de médecine alternative, tout le monde peut pratiquer n'importe quoi, à l'exception des acupuncteurs et des chiropraticiens qui sont encadrés par des ordres professionnels.

Les remèdes homéopathiques sont disponibles à la population dans toutes les pharmacies de toutes les grandes chaînes de pharmacies. Une quinzaine de compagnies d'assurances de personnes remboursent les honoraires de consultation et les remèdes homéopathiques.

Les homéopathes membres du SPHQ travaillent tous en cabinet privé, en bureau individuel ou en clinique multidisciplinaire. Quatre-vingt-cinq pour cent de la population est favorable à la légalisation des médecines alternatives, tel que le démontre un sondage mené par Multi Réso en 1992 pour le ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec.

Quarante-cinq pour cent de la population qui consulte en soins de santé consulte un thérapeute alternatif, comme le démontre ce même sondage. Entre 1987 et 1992, les consultations homéopathiques ont connu une augmentation de 653 p. 100, selon le sondage du ministère de la Santé et des Services sociaux en 1994.

Les grands laboratoires homéopathiques, que ce soit Boiron, Dolisos, UNDA, Reckweg ou Holis, sont tous présents au Québec et leurs produits y sont distribués. La vente des remèdes homéopathiques représente environ 25 millions de dollars par année, avec une augmentation annuelle d'environ 20 p. 100. Les pharmaciens sont autorisés à vendre des remèdes homéopathiques, mais leur code de déontologie leur interdit la pratique.

Quelques médecins pratiquent l'homéopathie, malgré l'interdiction de leur code de déontologie et malgré le harcèlement du Collège des médecins à leur égard. Les médecins vétérinaires sont les seuls à pouvoir pratiquer l'homéopathie vétérinaire, mais aucune norme de formation et aucune réglementation n'encadrent leur pratique. Les écoles de formation sont toutes privées, et six d'entre elles offrent un programme de formation en conformité avec nos normes de formation de 1 500 heures, réparties sur quatre ans.

Une cause-type oppose le Collège des médecins et le SPHQ depuis 1991. Nous avons d'abord été entendus en Cour provinciale, puis en Cour supérieure, dernièrement à la Cour d'appel et nous devrions prochainement savoir si nous pourrons poursuivre notre cause jusqu'en Cour suprême.

Les homéopathes québécois doivent se procurer certains remèdes homéopathiques de façon clandestine afin de pouvoir traiter leurs patients avec le bon remède lorsqu'il est indiqué.

Nous croyons qu'il existe des objectifs communs au SPHQ et à Santé Canada. Les homéopathes du Québec comprennent les préoccupations de Santé Canada quant à l'encadrement et à la réglementation des remèdes naturels. Nous partageons certains objectifs et nos visions se rejoignent: premièrement, assurer la protection du public; deuxièmement, assurer à la population les meilleurs remèdes naturels possibles; troisièmement, assurer l'accès aux remèdes naturels; quatrièmement, encourager une pratique de pointe par nos professionnels des médecines alternatives; cinquièmement, favoriser le rayonnement des thérapeutes alternatifs canadiens au niveau international; sixièmement, harmoniser nos lois avec celles des grands partenaires économiques et professionnels du Canada.

• 1420

Pour en arriver à nos recommandations, nous avons entrepris une démarche qui a été quand même assez rigoureuse et nous la partagerons avec vous. Notre analyse de la situation actuelle sur la réglementation des produits homéopathiques est fondée sur l'étude des documents suivants: Codification ministérielle de la Loi sur les aliments et drogues et du Règlement sur les aliments et drogues; Bonnes pratiques de fabrication, 4e édition des lignes directrices; Bonnes pratiques de fabrication, Lignes directrices supplémentaires relatives à la fabrication de médicaments à base de plantes médicinales, version finale, octobre 1996; Programme des médicaments, Santé Canada, Cadre de référence pour un accord de reconnaissance mutuelle sur les programmes de conformité aux bonnes pratiques de fabrication pharmaceutique; Directives de la direction des médicaments, présentation des demandes d'identification numérique de drogue; Guide de conformité des produits thérapeutiques, janvier 1998; Règlement modifiant le Règlement sur les aliments et drogues (1099) JUS-97-768-01.

La mise en place ainsi que l'application des règlements de la Loi sur les aliments et drogues et l'ajout des directives pertinentes à l'intention des importateurs, distributeurs et fabricants de médicaments homéopathiques ont modifié de façon importante la manière d'agir de l'industrie et provoqué le retrait du marché de certains produits composés d'ingrédients multiples (complexes) et de certains produits unitaires (un seul produit).

Les retraits et les interdictions de vente peuvent être d'ordres multiples: pratiques de fabrication inacceptables; étiquetage non conforme; réclame non conforme; utilisation de dilutions trop faibles; délivrance du produit sous une forme pouvant présenter un risque pour la santé; utilisation de stupéfiants; produits inscrits à l'annexe F (prescription); et produits inscrits à l'annexe D (produits biologiques).

Bien que l'industrie ait été ébranlée par l'application des règlements de la Loi sur les aliments et drogues, aucun des règlements ou directives particuliers à l'industrie homéopathique ne nous semble abusif ou non fondé, compte tenu que la réglementation actuelle ne mentionne pas de façon explicite les doses infinitésimales ou doses homéopathiques. L'industrie homéopathique canadienne devrait se doter de normes comparables à celles de pays étrangers où l'industrie est plus ancienne et où les normes de fabrication sont mieux implantées.

Nous avons même constaté une certaine souplesse dans l'application de la réglementation actuelle. En effet, les articles C.01.034, C.01.038 et C.01.040 interdisent ou limitent la présence de l'arsenic, du mercure, de la strychnine et du chloroforme dans une drogue. De la même façon, d'autres articles les tolèrent dans certaines concentrations: par exemple, le B.06.003 dans le colorant pour les aliments.

Le point 1.4.2 de la section 1.4., «Substances prohibées dans les préparations homéopathiques» du Guide de conformité des produits thérapeutiques autorise la présence de ces produits dans les préparations homéopathiques, en précisant les dilutions acceptables. De plus, le document Bonnes pratiques de fabrication, Lignes directrices supplémentaires relatives à la fabrication de médicaments à base de plantes médicinales, section «Analyse du produit», point 1.1, oblige l'analyse des préparations homéopathiques contenant des ingrédients potentiellement dangereux (analyse d'identité et d'activité) pour déterminer l'activité d'un ou de plusieurs ingrédients dangereux ou démontrer que leur présence ne peut être détectée.

Nous sommes en accord sur les mesures d'application de la réglementation et de contrôle de ces produits puisqu'elles permettent de laisser en vente plus de 40 médicaments homéopathiques sans en limiter l'accès de façon déraisonnable. Selon la réglementation actuelle, les plus basses dilutions disponibles pour ces produits varient de 3X à 8X. Le 8X est généralement la plus basse dilution utilisée dans la préparation de médicaments homéopathiques composés d'ingrédients multiples ou d'unitaires.

Nous tenons à souligner que le Guide de conformité des produits thérapeutiques n'a pas de valeur juridique, mais sert de guide à l'industrie pour l'application de la réglementation. Ceci soulève le fait qu'à défaut de règlements spécifiques aux médicaments homéopathiques et aux doses infinitésimales ou doses homéopathiques, Santé Canada doit faire preuve de souplesse dans l'application de directives qui devraient être uniformes pour tous.

• 1425

Actuellement, la grande majorité des produits homéopathiques sont donc en vente libre au Canada s'ils sont conformes aux Bonnes pratiques de fabrication et aux spécifications de l'une des pharmacopées suivantes: la Homeopathic Pharmacopoeia of the United States, la Pharmacopée française ou la pharmacopée homéopathique allemande, dont je vous laisse prononcer le nom, soit Homöopathische Arzneimittel.

Toutefois, malgré l'évolution de l'application des règlements à l'industrie homéopathique, plus de 60 médicaments sont toujours interdits puisqu'ils sont identifiés comme stupéfiants ou faisant partie de l'annexe F (prescription) ou de l'annexe D (produits biologiques).

Dans le contexte de doses pondérales, les interdictions et limitations actuelles sont bien fondées. Par contre, pour ce qui est des doses infinitésimales ou doses homéopathiques, rien ne les justifie et nous ne croyons pas nécessaire de vous détailler les différents principes qui régissent la fabrication par dilutions (ou déconcentrations) successives des médicaments homéopathiques, qui leur procurent leur non-toxicité lorsque la déconcentration est suffisante. De plus, si les produits sont fabriqués selon les instructions de l'une des trois pharmacopées homéopathiques, le risque à la consommation est inexistant.

C'est la fabrication qui détermine l'appellation de «médicament homéopathique», et non son utilisation ou son contenu.

Voici nos recommandations.

Puisque Santé Canada a instauré des normes de bonnes pratiques de fabrication pour les médicaments homéopathiques et reconnaît la valeur des pharmacopées américaine, française et allemande, nous formulons trois recommandations:

- En premier lieu, que dorénavant ce soit le respect des modalités de fabrication qui détermine l'appellation de «médicament homéopathique» et non son utilisation et/ou son contenu.

- En deuxième lieu, que les médicaments homéopathiques soient exclus de la liste des stupéfiants de l'annexe F et de l'annexe D, et que les articles C.01.034, C.01.038 et C.01.040 ne s'appliquent pas à cette catégorie de produits si les Bonnes pratiques de fabrication et les instructions de fabrication de l'une des trois pharmacopées reconnues sont respectées.

En troisième lieu, qu'une réflexion conjointe soit amorcée sur la définition du prescripteur, afin que les professionnels des différentes provinces ne soient pas tributaires de l'absence de lois provinciales qui régissent la pratique de nos professions.

En guise de conclusion, nous sommes heureux d'avoir pu faire bénéficier le Comité parlementaire de la santé et Santé Canada de notre expertise homéopathique. Nous apprécierions être informés des prochains développements des travaux du comité. Soyez assurés de notre entière collaboration et de notre désir de respecter les différentes lois et réglementations qui régissent et encadrent les remèdes naturels.

Nous sommes conscients, tout comme vous, qu'une loi et une réglementation trop sévères et inadéquates pourraient avoir pour conséquence l'existence d'un marché noir des remèdes naturels. Cette conséquence serait désastreuse pour Santé Canada et pour toute la population canadienne.

Nous sommes confiants que la réglementation canadienne des remèdes naturels permettra aux homéopathes canadiens d'avoir accès à tous les remèdes homéopathiques et qu'ils pourront ainsi continuer de contribuer à leur façon au mieux-être et à l'amélioration de l'état de santé de la population canadienne.

Vous trouverez en annexe 1 des articles pertinents de la réglementation; en annexe 2, la liste des remèdes homéopathiques interdits; et en annexe 3, des lettres d'appui de différents organismes qui appuient notre démarche et les recommandations que nous présentons aujourd'hui, dont l'association homéopathique de Suède, The European and International Councils for Classical Homeopathy, l'Association professionnelle des homéopathes classiques de Suisse et l'Association homéopathique de Norvège

La présidente: Merci. Est-ce que les personnes qui vous accompagnent désirent prendre la parole ou êtes-vous prêts à répondre à nos questions?

Mme Claudine Larocque: Nous sommes prêts à passer aux questions, si vous le voulez bien.

La présidente: Alors, on va commencer. Madame Caplan.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Merci beaucoup pour cet exposé. Je pense que vous en avez fait un auparavant à Ottawa aussi. C'est la deuxième fois que vous témoignez devant notre comité.

Mme Claudine Larocque: Oui, mais aujourd'hui c'est pour le Syndicat professionnel des homéopathes du Québec. En février, je représentais la Fédération des professionnels et professionnelles salarié(e)s et des cadres du Québec.

• 1430

Mme Elinor Caplan: Vos recommandations m'intriguent. La dernière recommandation porte sur la réglementation des professionnels, et il s'agit là d'une compétence strictement provinciale. Vous le savez?

Mme Claudine Larocque: Oui. C'est seulement parce que dans certains textes du règlement, on parle du prescripteur, et entre parenthèses, on met toujours «prescripteur», mais ce terme n'a pas encore été défini, mais il le sera et devrait l'être.

Mme Elinor Caplan: Je vous rappelle que le gouvernement fédéral n'a aucune responsabilité ici et n'a pas non plus le pouvoir de définir qui est le prescripteur. C'est une prérogative provinciale. Je ne crois pas que les provinces accueilleraient avec enthousiasme une intrusion fédérale dans ce champ de compétence.

L'autre recommandation dont je voulais parler avec vous est celle où vous recommandez le principe de fabrication par rapport au produit. Pouvez-vous me donner plus de détails à ce sujet, s'il vous plaît? Comment cela fonctionnerait-il?

Mme Claudine Larocque: D'accord. Florent répondra à la question.

[Français]

M. Florent Tremblay (vice-président, Syndicat professionnel des homéopathes du Québec): Effectivement, dès que l'on parle de fabrication de produits homéopathiques, on est face à de grands principes mondiaux. Nous ne croyons pas qu'il faille s'attarder à chaque produit selon sa souche ou, en d'autres mots, s'attarder à savoir de quel type de plante il s'agit et quelle est sa toxicité, puisque la règle et les principes de fabrication le rendent inoffensif. La seule façon de définir le produit homéopathique, ce n'est pas d'étudier son contenu et sa dilution, mais bien de se pencher sur son principe de fabrication. C'est la règle à laquelle on a recours pour le définir ailleurs dans le monde.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Et vous êtes convaincu, ou vous croyez que Santé Canada devrait être convaincu, que parce qu'il existe de bonnes pratiques de fabrication, nous ne devrions pas nous préoccuper de l'innocuité du produit? La qualité a été établie, mais c'est une question de sécurité ou d'efficacité. Vous ne croyez pas que Santé Canada devrait jouer un rôle pour ce qui est de garantir l'efficacité ou la sécurité du produit? Est-ce que vous partez du principe que, étant donné qu'il existe de bonnes pratiques de fabrication, ce sont des produits de bonne qualité et sécuritaires, et que par conséquent, Santé Canada ne devrait pas s'en préoccuper? Est-ce votre position?

[Français]

M. Florent Tremblay: Oui, exactement. Tout est basé sur la fabrication. Il va de soi que c'est le contrôle lors de la fabrication, soit la conformité aux Bonnes pratiques, qui le détermine. D'ailleurs, toutes les pharmacopées, peu importe leur pays d'origine, ont des normes extrêmement précises qu'elles imposent de la cueillette à l'entreposage. Tout est très bien détaillé et il n'y a pas de risque réel pour le consommateur. Le seul risque, c'est que les règles de fabrication ne soient pas respectées et qu'on se retrouve avec un produit de piètre qualité. C'est un fait, mais après avoir consulté nombre d'ouvrages comparables à l'étranger, j'en conclus que tout ce qui a été fait jusqu'à maintenant est assez remarquable. C'est très bien fait.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Ce sera ma dernière question, si vous me le permettez.

À votre avis, est-ce que les produits homéopathiques qui sont fabriqués grâce à une méthode qui applique de bonnes pratiques de fabrication devraient avoir le droit de s'attribuer des qualités curatives, et si oui, devrait-on obliger les fabricants à prouver ce qu'ils avancent?

Mme Claudine Larocque: Oui, je suis d'accord.

Mme Elinor Caplan: Oui, on devrait leur permettre de s'attribuer des qualités, et oui, les fabricants devraient produire des preuves en ce sens?

Mme Claudine Larocque: Exactement.

Mme Elinor Caplan: Merci beaucoup.

La présidente: Madame Picard.

[Français]

Mme Pauline Picard: J'ai une courte question ainsi qu'un commentaire. J'abonde dans le même sens que Mme Caplan au sujet des nombreux organismes représentant les naturopathes et les homéopathes qui n'ont pas d'ordre professionnel à l'heure actuelle et qui nous ont demandé de faire des pressions auprès de Santé Canada. Je tiens à vous rappeler que la gestion des soins de santé appartient aux provinces. C'est donc à elles qu'il revient de reconnaître les ordres professionnels, comme cela s'est fait au Québec dans le cas des acupuncteurs.

• 1435

Mme Claudine Larocque: J'aimerais préciser que dans certains textes de réglementation au niveau canadien, un prescripteur est une personne qui est automatiquement membre d'un ordre professionnel, qu'il s'agisse d'un médecin, d'un médecin vétérinaire, d'un gynécologue, d'un obstétricien, etc. Nous voulions faire une nuance afin de différencier le terme «prescripteur» en matière de remèdes non naturels versus naturels.

Mme Pauline Picard: Ma collègue et moi, elle en anglais et moi en français, avons réagi de la même façon. Ma première question portait sur la recommandation 3.

Mme Claudine Larocque: Elle est peut-être mal formulée.

Mme Pauline Picard: Elle n'est pas claire.

Mme Claudine Larocque: Oui, j'en conviens.

Mme Pauline Picard: Dans votre exposé, vous disiez que l'industrie avait des normes comparables à celles de pays étrangers où l'homéopathie est plus ancienne, où on la retrouve depuis des centaines d'années. C'est presque nouveau ici. Selon vous, dans quel pays trouve-t-on les normes les plus intéressantes et celles que vous proposeriez en exemple?

M. Florent Tremblay: Santé Canada reconnaît les trois grandes pharmacopées qu'on a citées. Au niveau de l'homéopathie, la pharmacopée américaine est ni plus ni moins une copie de la pharmacopée française ou allemande. Ce sont ces deux dernières qui dominent, et ce largement, dans toute l'Europe. Plusieurs pays ont des pharmacopées semblables. Les industries belges peuvent se servir de la pharmacopée belge ou de la pharmacopée allemande. Au niveau de la pratique, ce sont vraiment les pharmacopées française et allemande qui dominent et de loin, l'américaine étant une sorte de copie, pour ainsi dire.

Mme Pauline Picard: C'est celle que vous utilisez actuellement comme base?

M. Florent Tremblay: Oui. C'est la base, la copie allemande étant la plus ancienne.

Mme Pauline Picard: D'accord.

M. Florent Tremblay: Et la plus rigoureuse aussi, à vrai dire.

Mme Claudine Larocque: Nous sommes très heureux d'ailleurs que Santé Canada ait autorisé ces trois pharmacopées parce que ce sont celles auxquelles se réfèrent la majorité des homéopathes sérieux partout dans le monde.

Mme Pauline Picard: Merci.

[Traduction]

La présidente: Pardonnez-moi. J'étais un peu mêlée, je pense, ou alors c'est que vous n'avez pas compris lorsque j'ai demandé plus tôt si les autres groupes voulaient intervenir. Vouliez-vous dire que vous ne vouliez pas parler de son mémoire mais que vous vouliez parler du vôtre? Je vous aurais écouté toutes les trois d'abord. Bon, d'accord, allons-y.

Madame Renaud, voulez-vous intervenir maintenant? Je pensais qu'on allait vous écouter tous les trois d'abord et qu'on poserait ensuite des questions. C'est ce que je voulais faire lorsque j'ai demandé si vous aviez quelque chose à dire, et vous avez dit non.

Madame Renaud, allez-y.

[Français]

Mme Nicole Renaud (présidente, Association des diplômés en naturopathie): Je vous remercie de nous avoir invités à exprimer notre point de vue aujourd'hui.

Je commencerai par vous présenter l'Association des diplômés en naturopathie du Québec. Cette association a obtenu ses lettres patentes en vertu de la Loi sur les compagnies le 14 décembre 1993. Son siège social est situé à Québec, ou plus précisément à Sillery. L'Association est présentement composée de plus de 110 membres, dont 85 sont des membres actifs, qui pratiquent la naturopathie à plein temps, tandis que les autres sont des membres de soutien ou des membres étudiants.

Le comité administratif et exécutif est composé de moi, à titre de présidente, d'un vice-président, M. Gilles Parent, qui est naturopathe, de la secrétaire, Mme Christiane Gendron, qui est elle aussi naturopathe, et de la trésorière, Mme Céline Adam. Les trois membres directeurs sont Mme Monick Juliette Élie, naturopathe, M. Maurice Nicole, naturopathe et aromathérapeuthe, et Mme Ghislaine Martin, elle aussi naturopathe.

La présidente: Madame Renaud, est-ce que vous pourriez passer directement aux recommandations?

• 1440

Mme Nicole Renaud: J'aurais voulu vous parler de la formation parce que c'est un élément important relativement à nos recommandations. Pourrais-je lire mon mémoire un petit peu plus vite?

La présidente: Nous avons déjà entendu d'autres présentations sur ce même sujet.

Mme Nicole Renaud: D'accord, je vous en donnerai donc un résumé.

La formation consiste en 1 000 heures de cours magistraux présentement. Notre association en a établi les normes et vous trouverez dans notre mémoire les exigences générales. La formation d'un naturopathe au Québec est basée sur les différents programmes de formation qui existent tant en Europe qu'en Amérique. Cette formation est présentement dispensée dans des écoles sérieuses. Ce programme de haut niveau d'excellence a pour but de former de futurs naturopathes avec les qualifications et les compétences requises pour exercer leur profession selon un code de déontologie régi.

La pratique: Les naturopathes sont des thérapeutes adéquatement formés pour dispenser des soins de santé, éduquer la population, aider les personnes sous traitement conventionnel, prévenir la maladie, etc. Ils n'établissent aucun diagnostic médical. Nous utilisons des substances naturelles tels les vitamines, les minéraux, les acides aminés, les plantes, les bourgeons de plantes, les organothérapiques et les extraits tissulaires. Nous sommes habilités à prescrire ces remèdes. Nous avons aussi recours à des tests de laboratoire.

La préoccupation des naturopathes concernant la réglementation est au niveau du remède naturel. L'ex-ministre de la Santé, M. Dingwall, avait déclaré: «Notre but est de protéger la santé des Canadiens et des Canadiennes, et non de limiter l'accès à des médicaments sûrs et efficaces.»

Comme on le mentionnait précédemment, nous utilisons des remèdes à base de plantes médicinales. Dans la Loi sur les aliments et drogues, les produits de santé sont classés et réglementés comme des aliments ou des drogues. On les retrouve au même titre que la marijuana, entre autres. Il va sans dire qu'un aliment ingéré avec excès peut causer des troubles de santé.

D'après le rapport préliminaire du Comité consultatif, les produits de santé vendus sur le marché canadien devraient être réglementés en fonction de leurs bienfaits et des risques qu'ils présentent. Si on analysait des produits offerts sur le marché, on remarquerait que certains ne correspondent pas à ce qui est inscrit sur la bouteille et que, par conséquent, les risques, tout comme les bienfaits, sont négligeables pour la santé.

Il est important de reconnaître que les produits de santé naturels sont uniques de par leur fabrication, leurs composés et leurs effets. Les consommateurs sont de plus en plus nombreux. Il faut également reconnaître les bienfaits des remèdes naturels sur la santé et le système de santé puisqu'ils font économiser de l'argent au gouvernement. Les produits de santé naturels sont utilisés pour maintenir et améliorer la santé, ainsi que prévenir et traiter les maladies. Il n'est aucunement mentionné sur les bouteilles pour quel type de maladies le remède est prescrit.

Depuis des siècles, les naturopathes utilisent les plantes et les produits naturels dans leur pratique. Certains produits biologiques ont subi des transformations notables qui les ont rendus inoffensifs, mais également sans effet thérapeutique. Les naturopathes d'aujourd'hui utilisent des produits de qualité, prouvés et sécuritaires, dont la norme de fabrication est conforme aux règlements du marché. Ces produits sont le plus efficaces possible, de manière à satisfaire le patient.

Voici nos recommandations. Il est vrai que plusieurs consommateurs se procurent des remèdes naturels en pharmacie, ignorant que les magasins d'aliments naturels dispensent ces mêmes produits ou des produits équivalents. Les consommateurs se dirigent vers les pharmacies parce que le coût de ces remèdes est beaucoup moins élevé. Il serait peut-être bon d'analyser les produits pour connaître la réponse. Contrairement aux naturopathes, les pharmaciens n'ont pas reçu une formation adéquate pour prescrire tel ou tel remède ou même donner des renseignements pertinents au sujet de ces produits. Les pharmaciens ont reçu une formation les rendant aptes à diriger le consommateur vers un médicament et à le renseigner sur les médicaments. Les naturopathes ont une formation les rendant aptes à diriger le consommateur vers un remède naturel et à le renseigner sur la prise dudit remède.

Par conséquent, l'Association des diplômés en naturopathie du Québec recommande qu'on considère la formation des naturopathes comme étant une formation adéquate pour informer les consommateurs sur tous les remèdes naturels à base de plantes, de vitamines, de minéraux, d'acides aminés et autres.

L'ADNQ recommande que les produits à base d'herbes, de vitamines, de minéraux, d'acides aminés et tout autre produit naturel disponible dans la pharmacopée américaine le soient également pour les naturopathes et les consommateurs canadiens.

• 1445

L'ADNQ recommande la mise sur pied d'un groupe de recherche afin de faire des investigations auprès des revues scientifiques, médicales et de santé quant aux études et résultats d'études qui ont paru relativement aux différents remèdes naturels, et de prouver l'efficacité et la non-iatrogénéité des produits à base d'herbes, de vitamines, de minéraux, d'acides aminés et autres produits naturels.

L'ADNQ étant d'accord sur les orientations de Santé Canada en ce qui a trait à la qualité, à la conformité et à la fabrication des produits naturels, elle recommande toutefois à Santé Canada de s'assurer que les mesures de contrôle soient plus sévères et respectées par les fabricants de produits naturels afin de permettre aux consommateurs d'utiliser des produits naturels de bonne qualité.

Je porte à votre attention le fait que dans ce document, on ne parle pas de remèdes homéopathiques.

C'est tout.

[Traduction]

La présidente: Thank you very much.

Luc, voulez-vous être plus bref?

[Français]

M. Luc Martineau (vice-président, information et formation, Syndicat professionnel des acupuncteurs et acupunctrices du Québec): Luce Prévost et moi sommes des acupuncteurs membres du Syndicat professionnel des acupuncteurs et acupunctrices du Québec. Au Québec, il y a actuellement 520 acupuncteurs qui sont membres de l'Ordre des acupuncteurs et notre association, qui est une association volontaire, en regroupe une centaine.

Nous avons préparé le mémoire que vous avez devant vous. Je ne vais pas en faire la lecture, faute de temps, mais je lirai un sommaire en anglais. Je répondrai ensuite à vos questions. Voilà qui sera beaucoup plus simple.

[Traduction]

Notre association tient à faire valoir son point de vue sur la pharmacopée chinoise et son utilisation par les acupuncteurs. La grande majorité d'entre eux s'intéressent à la pharmacopée chinoise pour deux raisons: parce qu'ils repoussent les limites de l'acupuncture en se servant de la pharmacopée, et parce que la formation essentielle qui vous permet de rédiger des ordonnances pour un produit inscrit dans la pharmacopée est semblable à la formation des acupuncteurs.

Pour faciliter l'utilisation de la pharmacopée chinoise par les acupuncteurs, il faut respecter trois conditions importantes: la création d'une troisième catégorie autre que les aliments et les médicaments, qui comporterait les produits santé naturels; l'amélioration du contrôle de la qualité de ces produits; et la reconnaissance du savoir traditionnel.

En pharmacopée chinoise, il y a deux ouvrages dont la valeur est reconnue dans le monde entier. Il s'agit des ouvrages dont nous avons parlé ce matin: Chinese Herbal Medicine de Benski et Chinese Herbal Medicine: Strategies and Formulas de Benski et Barolet. Ces ouvrages forment la base de la formation à l'acupuncture aux États-Unis. En reconnaissant au Canada l'existence de ce savoir, la nouvelle loi canadienne encouragerait un plus grand nombre de professionnels à étudier la pharmacopée chinoise, ce qui leur permettrait de servir le public canadien d'une manière efficiente et sécuritaire.

[Français]

Avant de venir ici, j'ai communiqué avec la présidente de l'Ordre des acupuncteurs du Québec et parlé du fait que nous sommes ici pour assurer à la fois la sécurité du grand public et la diffusion de ce savoir et de cette connaissance. Les acupuncteurs se font surveiller dans leurs cliniques dans le cadre d'inspections professionnelles, puisqu'ils sont membres de cet ordre professionnel. On sait très bien que les acupuncteurs utilisent autre chose que leurs aiguilles dans leurs cliniques; ils utilisent aussi la pharmacopée chinoise, les oligo-éléments et l'homéopathie. Il est important de reconnaître l'aspect de la pharmacopée chinoise et l'aspect yin, c'est-à-dire l'aspect matériel ou substantiel de cette médecine. L'un et l'autre vont ensemble. Mme Tousignant m'expliquait que c'est à ce niveau que nous touche cette loi canadienne puisqu'une modification de la loi nous permettrait de pratiquer en toute liberté.

Actuellement, la loi régit les aliments de les drogues, mais nous n'avons pas de catégorie pour les produits naturels de santé, et c'est pourquoi nous souhaitons qu'on apporte ces importants changements à la loi. Il y a blocage à trois niveaux, en premier lieu au niveau de la sécurité du public. Si on ne reconnaît pas un savoir traditionnel, comment croyez-vous que les experts en la matière vont s'intéresser à ce savoir traditionnel? Deuxièmement, comment voulez-vous parler de professionnels qui utilisent ces produits si on ne reconnaît pas le savoir traditionnel? Il faut évidemment un cadre de contrôle de la connaissance de ces professionnels. Quant au contrôle de la qualité, tout le monde est pour la vertu, les pharmaciens comme les autres. La question qui se pose, c'est qu'une évaluation de la qualité dépend encore de cette Materia Medica. Pour évaluer la qualité des plantes, il faut avoir une connaissance dans ce domaine. Et comme on l'explique dans le document au sujet de la prétention de l'Association des pharmaciens du Canada, quand on est pharmacien, on n'est pas automatiquement un expert en plantes médicinales.

• 1450

Nous avons été étonnés lorsque nous avons pris connaissance d'une récente étude dont faisait état le Journal of the American Medical Association et à laquelle on faisait allusion ce matin, selon laquelle 106 000 personnes meurent chaque année aux États-Unis et au moins 10 000 au Canada des effets secondaires des médicaments. Il ne faut pas se le cacher même si l'étude n'a pas été faite au Canada.

Donc, dans cette réalité, on parle ici d'une part de choux et de carottes, tandis que d'un autre côté... Je vais tenter de ne pas m'emporter, mais plutôt de m'exprimer avec retenue.

L'aspect principal que je désirais soulever est donc la reconnaissance de ce savoir.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Seulement les propriétés médicinales des choux et des carottes. C'est une blague.

Des voix: Ah, ah.

La présidente: Luc.

M. Luc Martineau: Ça va. Je pense que vous avez le document.

[Français]

La présidente: Madame Picard.

Mme Pauline Picard: Vous m'invitez à poser mes questions tout de suite?

La présidente: Oui.

M. Luc Martineau: Ce matin, on n'a pas pu accorder de temps pour les questions.

Mme Pauline Picard: Mais je ne suis pas prête. Je croyais que vous alliez poursuivre votre intervention.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Merci beaucoup. Je voudrais poser une question, et j'aimerais que chacun y réponde, et je déterminerai ce qui serait acceptable.

Comme vous le savez, notre comité va faire des recommandations visant à—et j'emploie le mot sans la moindre connotation partisane—libéraliser l'accès aux plantes médicinales et aux produits naturels, et il est dit dans notre mandat que si nous donnons une plus grande liberté aux gens, nous devons garantir l'innocuité et la bonne qualité des produits.

Le mandat ne dit rien au sujet de l'efficacité. Si nous devons recommander que la qualité soit définie par les bonnes pratiques de fabrication, que l'innocuité serait assurée par l'inspection de ce que l'on retrouve dans la bouteille, dans le capelet, que cela concorde avec l'étiquette, seriez-vous d'accord pour dire que cela répond à vos normes de qualité et de sécurité?

M. Luc Martineau: si l'on vend aujourd'hui au Canada pour un milliard de dollars de produits naturels avec la loi que nous avons, quelle amélioration cette loi nous donnerait-elle? Il en résulterait probablement que le chiffre d'affaires passerait à 6 milliards de dollars, soit exactement la somme que recueillent ces produits en Allemagne.

Si nous offrons des produits de qualité et sans danger, mais plus encore, si nous avons des praticiens des soins de santé dont nous reconnaissons les connaissances et que nous inscrivons...

Mme Elinor Caplan: Permettez-moi de vous interrompre. Notre comité ne peut pas recommander cela. Comme l'a dit Mme Picard, et comme je l'ai dit moi-même précédemment, la réglementation applicable aux praticiens des soins de santé est entièrement de compétence provinciale. Cette question ne relève pas de notre comité, non plus que du gouvernement fédéral.

Ce qui nous intéresse, à l'heure actuelle, ce sont les produits et l'accès à ces produits, la garantie de leur innocuité et de leur bonne qualité. L'efficacité fait partie du mandat actuel de Santé Canada. Ce que nous voulons savoir, dans nos discussions, c'est s'il existe une méthode qui permette de reconnaître l'utilisation traditionnelle de ces remèdes ou de prouver les allégations faites à leur égard sans qu'il faille faire des recherches aussi rigoureuses que ce qui est exigé dans le cas des médicaments.

Par exemple, il est actuellement interdit de faire des allégations en matière de santé au sujet des aliments. Pour obtenir une identification numérique de drogue, il faut prouver que la substance est un médicament. Comme on nous l'a dit ce matin, il y a bien des choses qui ne sont pas couvertes par le système. Ce terme «d'efficacité»—et je remercie la présidente d'avoir proposé que je l'explique—signifie que la substance possède ou non les propriétés alléguées. Les médicaments présentent généralement des risques élevés, mais pas toujours, et ils doivent faire l'objet d'essais et de recherches onéreux.

M. Luc Martineau: Nous savons cela.

• 1455

Mme Elinor Caplan: D'après ce que nous ont dit les utilisateurs de produits naturels, ils se demandent entre autres pourquoi les produits naturels devraient faire l'objet de recherches aussi rigoureuses que des médicaments dangereux, alors qu'ils ne sont pas nuisibles—bon nombre d'entre eux sont inoffensifs.

Croyez-vous qu'il soit possible de mettre en place un régime qui n'exige pas les mêmes essais cliniques, essais en double aveugle et recherches onéreuses, pour prouver qu'ils sont de bonne qualité et sans danger? Pourrions-nous, comme cela se fait dans d'autres pays, exiger que l'étiquette comporte une mise en garde indiquant qu'aucune recherche n'a été faite sur le produit, mais qu'il est utilisé traditionnellement, qu'il est inscrit dans des pharmacopées ou qu'il a fait l'objet de monographies dans d'autres pays? Croyez-vous que ce modèle pourrait être adopté par notre comité?

[Français]

La présidente: Madame Renaud.

Mme Nicole Renaud: À la lecture de tous les documents que m'a transmis Santé Canada, j'ai appris qu'il existe certains produits, tels certains acides aminés ou la mélatonine, qu'on ne peut pas utiliser parce qu'ils n'ont pas encore fait l'objet de recherches. On a aussi invoqué la question de la sécurité du public. Il est évident que les produits présentement vendus en pharmacie ou dans les magasins d'aliments naturels ne présentent pas de danger puisqu'ils sont accompagnés d'une posologie. Je ne sais pas si vous vous souvenez, vous qui êtes de l'Ontario...

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Mais il est interdit et illégal de faire des allégations en matière de santé à l'égard de ces produits.

Mme Nicole Renaud: Illégal? Voulez-vous dire...

Mme Elinor Caplan: C'est interdit par la loi.

[Français]

Mme Nicole Renaud: La mélatonine et les acides aminés?

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: La mélatonine n'est pas en vente libre, mais bien des produits...

Mme Nicole Renaud: Oui, je sais.

Mme Elinor Caplan: ... qui se trouvent sur les étagères des magasins de santé aujourd'hui ne peuvent légitimement, c'est-à-dire sous le régime de la loi, faire l'objet d'allégations en matière de santé.

Mme Nicole Renaud: Je sais, mais c'est pourquoi...

[Français]

Excusez-moi, je vais m'exprimer en français. Nous voudrions pouvoir utiliser les produits qui sont approuvés par la pharmacopée américaine parce qu'ils ne présentent pas de danger. Vous pouvez vérifiez toutes les études qui ont été faites aux États-Unis.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Vous appuieriez donc un modèle qui permettrait d'indiquer que Santé Canada ne garantit pas l'efficacité de la substance mais qu'elle est inscrite à la pharmacopée—quelque chose de ce genre?

M. Luc Martien: J'ai lu ce...

[Français]

Mme Nicole Renaud: Oui et non. Madame Caplan, nous craignons que les gens se procurent des produits qui n'ont aucun effet thérapeutique et dont les éléments ne sont pas conformes, entre autres. Cela nuit à notre pratique.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Je répondrais dans ce cas que les gens qui ont témoigné devant nous réclament la liberté de choix, surtout lorsqu'il s'agit de substances qui ne leur feront aucun tort. Ils veulent décider par eux-mêmes si ces substances sont efficaces ou non pour eux.

M. Luc Martien: Madame Caplan, je ne sais pas où en est votre comité à l'heure actuelle quant à la troisième option, c'est-à-dire celle d'un régime distinct applicable aux substances qui ne sont ni des aliments ni des médicaments et pour lesquelles il serait possible de créer une réglementation distincte. Vous savez que c'est une discussion sans fin. Vous avez lu ces rapports.

Mme Elinor Caplan: Oui. Le comité n'a pas pris de décision. J'estime pour ma part qu'il vaudrait mieux avoir, au lieu d'une troisième catégorie, une autre méthode qui permette d'évaluer les substances qui ne sont ni des aliments ni des médicaments. Ce qui importe, ce n'est pas la catégorie, mais la méthode qui permet de garantir leur qualité et leur innocuité. Vous avez peut-être des idées à nous soumettre. Bien des gens nous ont dit toutefois que si nous adoptons une troisième catégorie, ces substances seront évaluées par la même méthode. Il faut donc à mon avis trouver un moyen différent d'évaluer ces substances qui ont toujours été considérées comme des aliments mais à l'égard desquelles on souhaite faire des allégations en matière de santé.

• 1500

M. Luc Martineau: Il y a tant de choses à dire en faveur d'une troisième catégorie, plutôt que d'essayer d'intégrer tout cela au régime actuel. J'ai vu tellement... malgré tout le respect que je dois aux autres gens, ces connaissances n'existent pas à l'heure actuelle., Les scientifiques n'ont pas pris le temps d'étudier ce sujet.

Le directeur de la Faculté de pharmacie de l'Université Laval, M. Barbeau, est un homme très bien. Je suis allé écouter son exposé. Il ira en Europe étudier la médecine à base de plantes en Angleterre et en Allemagne. Même s'il est directeur de la Faculté de pharmacie, il admet lui-même qu'il ne connaît pas l'utilisation du Panax quinquefolium.

À l'heure actuelle, nous devons nous doter d'un nouveau groupe d'experts qui puissent s'aligner sur ce que veulent les Canadiens. Cette industrie d'un milliard de dollars atteindra les trois ou quatre milliards de dollars. Sa croissance sera très rapide. Puisque cette loi n'est modifiée que tous les 60 ans, il faut donc prévoir au lieu de faire ce que... Vous avez besoin d'un nouveau régime, d'une troisième catégorie.

Mme Elinor Caplan: Tout ce que je puis dire, c'est que je ne suis pas certaine qu'un nouveau système... J'admets que ce que nous cherchons, c'est un nouveau système qui rendra l'accès plus libre tout en garantissant la qualité et l'innocuité des remèdes. L'essentiel de la discussion, à mon avis, c'est de décider si ce nouveau régime doit comprendre des preuves d'efficacité ou non.

Je n'en sais trop rien moi-même, et notre comité n'a pas décidé s'il nous faut une nouvelle mesure législative ou s'il suffit d'ajouter un autre article à la loi actuelle. Lorsque vous parlez d'une troisième catégorie, cela signifie pour moi qu'il suffit d'ajouter une nouvelle division à la loi actuelle, et nous n'avons pas pris cette décision.

[Français]

La présidente: Madame Picard.

Mme Pauline Picard: Ma question s'adresse à Mme Renaud. Il faut quand même reconnaître qu'il existe un certain problème. Je suis une consommatrice de produits naturels. J'arrive à 50 ans et j'ai toujours été portée vers les médecines alternatives. En conséquence, je consomme des produits naturels.

Cependant, depuis que nous faisons cette étude sur les produits naturels, je suis devenue beaucoup plus consciente de différents aspects en ce qui les concerne. Je vais dans les pharmacies et je regarde les différents produits qu'on y trouve, de même que leurs marques. L'autre jour, je voulais me procurer de l'échinacée. Je me mets donc à examiner les marques et je m'arrête à lire plus que de coutume. Qu'est-ce qui se passe? Il n'y a quasiment rien; on n'a pas d'information sur l'étiquette. Il y a tout de même la posologie. Une telle entreprise, une telle marque, avait un produit qui contenait telle quantité d'échinacée. J'en ai examiné quatre, et les quatre étaient différents.

Je me disais donc que si, moi, qui suis sensibilisée plus que d'autres à la question, moi qui fais une étude là-dessus depuis décembre, qui en ai entendu beaucoup parler, je ne sais pas à quoi m'en tenir, qu'en est-il de la simple consommatrice ou du simple consommateur? Il achète n'importe quoi. Il ne sait pas quelle quantité contient le produit qu'il achète. Donc, il faut faire quelque chose.

Ce que nous vous demandons—nous ne sommes pas ici pour juger qui que ce soit—, c'est de nous dire ce qu'il faut recommander au ministère de la Santé pour que le consommateur soit informé du produit qu'il achète.

Mme Nicole Renaud: C'est pourquoi, dans mes recommandations, je demande à Santé Canada d'augmenter les mesures de contrôle. Vous avez raison, madame. Il y a parfois des compagnies... Il y a un règlement qui supposément réussit... Moi-même j'ai une entreprise de boulangerie, madame; le gouvernement est venu me voir pour s'assurer de ce que contenait le pain que nous fabriquons.

Est-ce qu'il s'assure également, auprès des autres compagnies, si ce que contiennent leurs produits est bien ce qui est écrit sur l'étiquette?

Prenons seulement l'exemple de l'ail. Certains producteurs en mettent des extraits dans des comprimés. D'autres ne vendent que de la poudre d'ail, comme celle qu'on saupoudre dans les aliments ou quelque chose de ce genre.

• 1505

Par conséquent, je pense que vous avez raison en ce qui a trait à votre échinacée. C'est sûr que cela peut être un extrait d'échinacée pourpre ou d'une autre variété d'échinacée, ce qui fait une différence.

Je pense qu'il serait important qu'une réglementation régisse la production, le produit, pour que le public ne soit pas berné, pour qu'il ne dépense pas d'argent pour un produit sans effet. C'est ce que je dis dans mon mémoire. Il n'a aucun effet thérapeutique ni d'effet dangereux; il ne contient rien.

Il faudrait qu'il existe une réglementation plus sévère. Selon ce que j'ai lu, il y en a une. C'est le point de vue que nous défendons, nous, les naturopathes.

Mme Pauline Picard: En tant que naturopathe, est-ce que la formation que vous recevez vous permet d'affirmer que l'efficacité de l'échinacée sur une personne dépend de sa teneur en certains ingrédients, du fait qu'il y en ait tel pourcentage dans la plante? J'imagine que vous êtes aussi sollicités par des laboratoires qui fabriquent ces produits. Qu'est-ce qui vous amène à choisir un laboratoire plutôt qu'un autre?

Mme Nicole Renaud: Madame Picard, les naturopathes qui font actuellement partie de notre association ont eu une formation adéquate. Ce n'est toutefois pas le cas de tous les naturopathes au Québec, parce que certains d'entre eux sont des autodidactes alors que d'autres ont acheté leur diplôme. Il faut donc être vigilant quant à la formation qu'ont reçue ces naturopathes.

Il est certain que nous sommes sollicités par plusieurs laboratoires. Au cours de notre formation, même si on ne mentionne pas telle ou telle compagnie, on nous apprend comment un produit doit être fabriqué pour être efficace. C'est avec ce bagage qu'on s'oriente vers certains produits. On les expérimente aussi beaucoup pour en connaître l'efficacité. Aussi, il y a des études qui sont faites sur des produits.

M. Luc Martineau: Madame Picard, la faille dans la loi est la suivante: en disant que l'échinacée est un aliment, elle autorise le fabricant à n'incorporer que 10 p. 100 d'échinacée dans son produit s'il veut le désigner par l'appellation «échinacée». Tant que c'est considéré comme un aliment, c'est le contrôle de la plante médicinale comme étant un aliment qui s'applique. Au FDA, on fait la même chose, sauf qu'on ajoute un claim, une prétention qui est aussi contrôlée.

Ce qu'il est important de saisir, c'est que la loi actuelle est extrêmement discriminatoire envers les plantes médicinales. Malgré cela, les Canadiens et les Québécois ont protesté en continuant à acheter ces produits. Ce n'est pas à cause de la publicité ou parce qu'ils sont mis en vente, mais parce que l'autre système leur convient de moins en moins. C'est pour cela qu'ils les achètent, même malgré les défauts du produit.

J'ai travaillé avec des gens qui sont dans Famili-Prix et je voyais des produits—devrais-je les nommer?—qui ne contenaient pas plus de 10 p. 100 de ginseng. On ne savait même pas quelle sorte de ginseng non plus, alors qu'il en existe trois sortes. On nage en pleine ignorance.

La loi actuelle nuit beaucoup aux plantes médicinales. Or, malgré tout, elles connaissent un grand essor. Je suis étonné qu'il s'en vende tellement malgré cette qualité qui est épouvantable. Il faut vraiment être un expert pour trouver le bon produit quand vous le cherchez.

C'est pourquoi je dis que l'Association des pharmaciens du Canada ne demande pas le statu quo pour rien. Ce n'est pas pour rien, à peu de chose près. C'est pourquoi je dis que ces changements qui se produisent dans le domaine de la santé au Québec et au Canada correspondent à une vraie petite révolution. J'espère que le comité saura être à la hauteur en ce qui a trait à ces questions.

Mme Pauline Picard: Merci beaucoup.

[Traduction]

La présidente: Merci beaucoup.

Je vous remercie tous d'avoir témoigné, et pour certains d'être restés et d'être revenus. Nous nous verrons peut-être de nouveau.

Si vous avez d'autres observations à nous présenter avant que nous prenions des décisions définitives, nous serons heureux de les recevoir.

Nous entendrons maintenant l'Association nationale des produits de santé, représentée par Denise Poirier, André Aubé, André Lavallée et Roger St-Laurent.

• 1510

[Français]

Est-ce qu'une personne veut parler au nom de tous ou si chacun veut parler à son tour? Nous allons commencer par entendre Mme Denise Poirier.

Mme Denise Poirier (Association nationale pour les produits de santé; présidente, Robert et Fils Inc.): Bonjour.

J'aimerais un peu vous faire part de l'expérience que nous font vivre actuellement les lois canadiennes en rapport avec un produit en particulier. Il s'agit d'une composition à base de vitamines et de plantes. Nous débattons de cette formule depuis 1970 parce qu'elle contient de la consoude. En 1970, elle était sur le marché; c'est une formule employée d'ailleurs depuis plus de 70 ans. Elle a toujours très bien fonctionné. Cependant, la loi voulait qu'il y ait débat quant au type de consoude ou à la partie de la plante qu'il fallait employer.

À l'époque, nous utilisions la feuille et la tige. On nous a fait savoir qu'il ne fallait plus employer que la feuille. Nous avons donc établi une nouvelle composition et refait l'étiquetage en conséquence. Quand tout a été terminé, on nous a fait savoir qu'il ne fallait plus employer la feuille mais la tige. Pour abréger, nous sommes passés de 1970 à 1973, à 1979 et à 1982, année où nous avons obtenu une approbation pour la consoude, qu'on nous a retirée en 1988. Depuis ce temps, nous avons dû changer la composition pour y incorporer autre chose et, finalement, retirer le produit du marché parce qu'il n'avait plus la même efficacité, la consoude étant l'élément qui lui conférait sa principale propriété.

Mon intervention porte sur une interrogation: comment fait-on, quand on est un industriel, pour s'entendre avec le ministère ou avec la Direction des produits thérapeutiques afin de survivre? Nous sommes une petite entreprise, une PME. Nous existons depuis 61 ans. Nous exerçons un contrôle sévère sur la fabrication et le conditionnement de nos produits. Nous avons deux microbiologistes et biochimistes sur place; en plus, des laboratoires responsables fabriquent certains produits pour nous au besoin.

Comment peut-on fonctionner, en tant que fabricants, et comprendre ce qu'il faut faire pour arriver à survivre dans cette jungle de lois et d'interventions du gouvernement?

C'est là l'objet de mon exposé car je sais que nous ne disposons pas de beaucoup de temps. Si nous avons encore une minute, je pourrai vous raconter une autre mésaventure qui m'est arrivée ou qui nous est arrivée, concernant une demande de DIN pour deux produits. Je ne les nommerai pas parce que j'ai peur de me faire retirer le DIN qu'on m'avait accordé. Disons qu'ils s'appelaient tous les deux Pierre: Pierre 1 et Pierre 2. Donc, la demande de DIN pour les deux Pierre est arrivée en même temps chez vous. On a accepté le Pierre 1, qui était une formule pour les enfants, et on a refusé le Pierre 2, qui avait la même composition mais dont les doses étaient plus élevées, quoique toujours contrôlées. Mais on n'a pas accepté le nom de Pierre parce que Pierre voulait dire quelque chose de très solide. Par contre, on a accepté le Pierre 1, alors que le Pierre 2 nous a été refusé à cause du nom qui signifiait quelque chose de fort, de solide, de consistant. Alors, cela nous a été refusé.

Voici donc les deux anecdotes que j'ai à vous présenter. J'aimerais savoir ce que vous en pensez. Je vous demande encore une fois comment on doit faire, en tant qu'industriels et gens affaires, pour survivre avec ces lois que vous nous imposez. Je vous remercie de m'avoir entendue.

[Traduction]

La présidente: Nous vous demandons de nous faire part de vos idées et c'est nous qui vous poserons des questions.

[Français]

André Aubé.

M. André Aubé (Association nationale pour les produits de santé; président, Les Produits Naturels Magistral Inc.): Bonjour, madame la présidente, mesdames les députées. Je suis très heureux de savoir que les femmes sont plus persévérantes que les hommes; s'il y avait eu moins de femmes à ce comité, je pense qu'il n'y aurait plus eu personne pour nous écouter. Donc, merci.

• 1515

[Traduction]

La présidente: Permettez-moi de vous interrompre. Notre comité compte généralement 16 membres. Nous nous sommes toutefois réparti la tâche, certains sont allés à Vancouver et à Toronto. Nous devons participer aux délibérations de la Chambre des communes et aussi aux travaux du comité, et c'est un peu difficile. Nous devons limiter le nombre des personnes qui voyagent, et si ce n'était de ces déplacements, nous serions tous ici.

[Français]

M. André Aubé: Merci de la précision. Vous me permettrez de parler en français. Je me sens beaucoup plus à l'aise en français qu'en anglais et j'espère que vous comprendrez très bien mon intervention. Elle vous sera sûrement utile, parce que je ne pense pas que tous ceux qui se sont présentés devant vous et qui ont eu l'occasion de se faire entendre aient vécu des faits aussi étranges que ceux que je vais vous communiquer.

Depuis 1995, aux États-Unis, il y a un produit qui s'appelle chitosan, qui est distribué sur une très grande échelle. Il sert principalement, et on en a fait la réclame à un moment donné, comme produit pour faire maigrir. Il se vend en quantités astronomiques aux États-Unis.

Vers la fin de 1995 et au début de 1996, on a tenté de le vendre au Canada aux mêmes fins, soit pour permettre aux gens de maigrir. Santé Canada est alors intervenu pour en interdire la vente. J'y reviendrai.

Je veux ajouter qu'à la même époque où on commençait à distribuer le chitosan aux États-Unis comme produit présumément efficace pour faire maigrir, j'ai eu l'occasion de rencontrer des chercheurs de l'Université de Sherbrooke qui travaillaient depuis cinq ans sur des animaux pour vérifier la faculté du chitosan de réduire le taux de cholestérol. Après les avoir rencontrés, nous avons fait une entente avec eux et ils ont cessé de faire leurs travaux sur des animaux.

Quand Santé Canada avait émis son opposition à la distribution du chitosan au Canada, il avait invoqué les problèmes qui pourraient découler de l'absorption des vitamines par ce produit, principalement des vitamines liposolubles. Selon Santé Canada, il y avait un risque que certaines vitamines liposolubles soient entraînées par le chitosan en même temps que le cholestérol.

Je dois préciser que j'étais d'accord avec eux; je partageais exactement les craintes de Santé Canada. C'est pourquoi, à un moment donné, mon entreprise a décidé de confier à un groupe de chercheurs de l'hôpital de Sherbrooke, en fait du Centre de recherches cliniques du CUSE, le Centre universitaire de la santé de l'Estrie. C'est le centre principal des hôpitaux de l'Estrie. On y fait de la recherche clinique sur une très grande échelle.

Nous avons donc confié—et je vous souligne tout de suite que nous ne sommes pas une multinationale—à ces personnes tout à fait compétentes en la matière la mise en oeuvre d'une étude clinique sur 32 patients, ce nombre étant statistiquement valable pour obtenir des résultats auxquels on peut se fier entièrement.

Les travaux ont été réalisés du début à la fin de 1997. En décembre, plus précisément, les chercheurs déposaient leur rapport qui démontrait hors de tout doute que ce produit était absolument sans danger. Nous vous avons remis un document, à couverture grise, dans lequel vous pouvez vérifier la qualité des chercheurs qui ont fait l'étude. En même temps, on a pu vérifier que, non seulement il était sans danger, mais qu'il était extrêmement efficace pour réduire le cholestérol et qu'il pouvait même être distribué au Canada comme supplément alimentaire.

Je vous ai dit tout à l'heure que nous n'étions pas une grande entreprise. Or, ces travaux nous ont coûté près de 300 000 $. Nous avons donc déposé auprès du gouvernement canadien, plus précisément auprès de la Direction des aliments, une demande pour commercialiser le produit chitosan. Cette demande a été acheminée à la fin de 1997.

L'étude clinique portait exactement sur les interrogations et les préoccupations que le gouvernement avait. Nous avions en main, au moment où l'objet de l'étude a été défini, la lettre du gouvernement canadien qui stipulait très clairement les points d'interrogation et les questions que le gouvernement se posait. Donc, l'étude a été ciblée exactement pour répondre aux interrogations du gouvernement.

À la fin de 1997, nous déposons notre document, certains d'obtenir une réponse rapide qui, une fois toutes les interdictions levées, devait nous permettre de commercialiser notre produit. Mais ceux qui ont examiné notre document, par manque de compétence ou parce qu'ils n'ont pas pris le temps d'examiner les choses correctement, y ont découvert deux lacunes.

• 1520

En fait, ces lacunes n'existaient pas. Les médecins et les chercheurs engagés dans le projet—ce n'est pas moi qui y ai répondu—ont répondu aux deux objections qui avaient été soulevées par le gouvernement. Munis de cette réponse aux deux objections, nous avons déposé notre demande à nouveau et nous attendons toujours la réaction du gouvernement.

Attendre est une chose. C'en est une autre quand vous n'êtes qu'une petite entreprise, mais composée de gens sérieux, qui fait tout en son pouvoir pour s'assurer qu'un produit à commercialiser sera efficace et sans danger pour la santé. Le plus déplorable, c'est que dans l'arsenal des produits existants pouvant prévenir la production de cholestérol par l'organisme, celui dont on parle est probablement le plus efficace.

Le plus étrange, dans le contexte actuel, c'est que non seulement il est absurde d'attendre encore la réponse, mais il est encore plus absurde d'avoir à attendre quand on sait qu'on pourrait commercialiser un produit qui aiderait les gens à diminuer leur taux de cholestérol sans subir aucun effet secondaire puisque ce n'est pas absorbé.... Il s'agit d'une binding action: le cholestérol est lié au chitosan et éliminé par les voies naturelles sans que rien n'ait été absorbé.

Donc, à cause des lois canadiennes actuelles, nous allons mettre sur le marché—j'espère que vous tiendrez compte de cet avis—un produit pour réduire le cholestérol, sur lequel on n'aura pas le droit de mentionner le cholestérol. Ce sera un produit dont l'étiquetage comportera une posologie. Il n'y aura pas de mise en garde puisqu'il ne comporte aucun danger, et les gens vont devoir deviner à le regarder, à la couleur, à la forme de la bouteille ou je ne sais trop comment, qu'ils ont en face d'eux ce qui est probablement le produit le plus important actuellement sur le marché. En effet, 40 p. 100 des gens souffrent d'un surplus de cholestérol à divers degrés. Ces gens vont devoir deviner qu'il s'agit d'un produit bon marché, efficace et absolument sans danger.

Je vous rappelle que ce produit est efficace et qu'en plus, il a été testé sur des personnes qui n'ont pas été soumises à des régimes. Ce n'est donc pas un médicament. C'est un supplément alimentaire. Les gens n'ont pas besoin de se priver. Ils mangent normalement, et le produit est efficace quand même et il n'a aucun effet secondaire.

Ce système est absurde et vraiment intolérable, tant pour la population que pour ceux qui sont mêlés au développement de nouveaux produits, qui ont à coeur la santé des gens et de leur proposer des produits de qualité et efficaces. Pour démontrer encore davantage à quel point il est absurde, je vous dirai qu'un jour, on obtiendra probablement l'autorisation de le commercialiser comme aliment. On aura alors un produit sans aucune réclame, donc avec une étiquette anonyme.

Cependant, on ne peut pas accepter une telle situation après avoir investi autant d'argent. Il faut qu'on puisse l'annoncer et récupérer les sommes d'argent investies pour poursuivre les travaux commencés sur d'autres produits qui ont la même valeur que celui-là.

Nous allons donc demander au gouvernement un DIN. Nous allons demander en même temps un droit de réclame exclusif sur le produit pour que nous puissions conserver pendant une période de temps notre avance technologique et récupérer les sommes d'argent investies, ce qui est tout à fait normal.

[Traduction]

La présidente: Pourriez-vous conclure rapidement, afin que les autres puissent également prendre la parole, s'il vous plaît?

[Français]

M. André Aubé: Dans toute cette démarche, le plus absurde, c'est qu'il est à peu près certain que les règlements actuels de Santé Canada vont nous empêcher d'obtenir le DIN et que nous devrons nous contenter de mettre le produit sur les tablettes en tant qu'aliment, sans faire aucune réclame.

Je termine en disant que 300 000 $ et 24 mois plus tard, nous sommes revenus à la case départ. Je vous dirai que je ne crois pas que vous soyez d'accord sur une telle situation. Je ne le suis pas. Je suis à tout le moins frustré, pour rester poli, et j'espère que des situations comme celle-là ne pourront plus se répéter. J'espère que les gens auront accès aux médicaments quand ils auront besoin d'y avoir accès, avec toutes les informations nécessaires inscrites sur l'étiquette.

Je ne vous l'ai pas encore dit, mais je suis président d'une compagnie modeste. J'espère qu'elle deviendra un jour une très grande compagnie. Je ferai les choses sérieusement, parce que je sais de quoi je parle. Je suis pharmacien et cela fait des années que je suis engagé dans la fabrication de produits naturels.

Je vous remercie beaucoup de m'avoir écouté. J'espère que ce que je vous ai dit vous aidera à prendre une décision juste.

• 1525

La présidente: Monsieur André Lavallée.

M. André Lavallée (Association nationale pour les produits de santé; directeur général, Le Naturiste JMB Inc.): Merci, madame la présidente. Bonjour, mesdames, bonjour, messieurs.

Mon exposé d'aujourd'hui sera bref. Je vous ai remis un document par l'intermédiaire du greffier tout à l'heure. Avant de débuter cet élément, je veux simplement préciser que l'entreprise que je représente est une entreprise de détail. C'est probablement l'une des plus importantes au Québec, sinon au Canada, dans le domaine des aliments naturels ou des produits naturels.

Pour vous donner un aperçu de ce que nous sommes, nous avons 150 emplacements de détail, surtout au Québec; il y a quatre emplacements au Nouveau-Brunswick et un seul en Ontario. Nous avons environ 500 employés qui travaillent au détail dans le secteur des produits naturels, ce qui nous place, d'une façon assez avantageuse, très près des consommateurs canadiens et québécois dans ce domaine.

Je veux vous entretenir aujourd'hui plus spécifiquement d'un article qui a paru dans Le Journal de Montréal. Cet article est de la plume du fondateur de l'entreprise, le naturiste Jean-Marc Brunet, qui exprime son point de vue sur le sujet des audiences de votre comité. Je ne vais pas le lire en entier, car vous pourrez le faire vous-mêmes. J'aimerais vous en lire seulement quelques extraits, si vous le voulez bien. Ce ne sera pas très long.

Essentiellement, ce que nous visons, à titre de détaillants, c'est une parité ou une similarité avec ce qu'on retrouve aux États-Unis. Je vous lis un extrait de l'article.

Je pense que je vais me limiter à ce document, à cette prise de position. Je vous ferai simplement remarquer que le Dr Jean-Marc Brunet a fondé cette entreprise il y a 30 ans. C'est donc une entreprise qui est en affaires depuis 30 ans. Je vous ferai remarquer également que la chronique dont je viens de vous lire un extrait ne sert jamais à des fins de commercialisation. Ce sont des articles de nature scientifique qui y paraissent. Il n'y est jamais question de produits ou de marques de commerce qui ne sont commercialisés que chez nous. Dans cette chronique quotidienne, il n'y a jamais d'indications de nature commerciale.

Je vous remercie, mesdames et messieurs.

La présidente: Merci beaucoup.

Monsieur Roger St-Laurent.

M. Roger St-Laurent (Association nationale pour les produits de santé; président, Laboratoire du St-Laurent E.H. Ltée): Madame la présidente, mesdames, messieurs, voici un bref historique. Je suis chimiste de formation. J'oeuvre dans la fabrication de produits pharmaceutiques et de produits naturels depuis un peu plus de 25 ans. J'ai démarré une nouvelle entreprise il y a quelques mois. On veut se spécialiser dans l'extraction de plantes; on veut aller chercher les principes actifs des plantes.

• 1530

J'ai entendu quelqu'un dire que souvent, on ne sait pas ce qu'il y a dans les produits qu'on vend sur le marché. Je dois dire que ce n'est pas parce que les laboratoires ne veulent pas indiquer leurs ingrédients, mais parce que les normes d'étiquetage imposées par le gouvernement canadien nous empêchent de les indiquer. Aussitôt qu'on fait une réclame sur un ingrédient, cela devient une drogue et, quand cela devient une drogue, comme mon confrère Aubé le disait tantôt, il y a des coûts énormes qui sont impliqués et le produit est refusé dans 99,9 p. 100 des cas.

Je voudrais parler de la valorisation des nutraceutiques au Canada. La grosse question est celle-ci: on veut faire l'harmonisation, par le libre-échange ou par d'autres règlements, avec les États-Unis et l'Europe, mais on a tendance, au Canada, à faire des choses qui vont à l'encontre de l'harmonisation.

À 100 kilomètres de Montréal, les gens peuvent s'approvisionner d'herbages qui sont illégaux au Canada, par exemple la consoude dont on a parlé tout à l'heure. Pourquoi les Américains peuvent-ils avoir, à 100 kilomètres de Montréal, le carnitine dans les acides aminés et l'arginine? Qu'est-ce qui fait qu'on ne peut pas appeler un produit antioxydant au Canada quand on parle tout simplement de vitamine E, de vitamine C ou de bêta-carotène, alors que les Américains peuvent le faire? Pourquoi peuvent-ils avoir du chitosan dans leurs régimes amaigrissants? Qui ne connaît pas quelqu'un qui est allé outre-frontière pour s'acheter de la mélatonine?

Je dois vous dire qu'on fait sourire un peu les Américains. J'étais sur la côte est le week-end dernier. Ils se demandent pourquoi on ne peut pas avoir de mélatonine, pourquoi on ne peut pas avoir certains herbages, alors qu'on peut librement s'acheter des comprimés de codéine et d'aspirine au comptoir, nos fameuses 222 que les Américains s'arrachent. Qu'est-ce qui fait qu'on peut avoir de la codéine au comptoir et qu'on ne peut pas avoir de produits naturels et de plantes? Cela fait sourire les Américains et je pense qu'ils ont raison.

Tout ce que je veux vous dire, c'est que je pense qu'on brime la liberté des citoyens en les empêchant de s'approvisionner normalement et que, par le fait même, on nuit à l'économie canadienne. On ne peut pas fabriquer, distribuer ou vendre des produits qu'on peut vendre facilement dans d'autres pays. On aiderait peut-être ainsi notre système de santé qui est malade. On essaie de réduire un peu partout les coûts. Si on laissait aux patients le libre choix d'utiliser des produits naturels, le système médical ne coûterait pas plus cher. Il coûterait peut-être moins cher parce qu'il y aurait peut-être moins de produits pharmaceutiques qui seraient consommés, des produits pharmaceutiques que l'on sait toxiques.

Enfin, on oblige les gens à se procurer les produits par importation privée ou à aller les chercher plus ou moins légalement. Comme on a un contrôle douanier tout à fait inadéquat, il est beaucoup plus difficile d'exporter des produits aux États-Unis que d'en importer des États-Unis. Est-ce que la frontière est plus large de notre côté que de l'autre? Je me pose des questions.

Je sais qu'on a essayé d'envoyer des échantillons d'ampoules buvables vides aux États-Unis et qu'on a voulu contrôler l'air qui était dans l'ampoule buvable au cas où il aurait été toxique. Je peux cependant vous dire qu'on peut faire entrer au Canada des produits américains, notamment de la mélatonine à coups de 144 bouteilles alors que c'est un produit illégal au Canada. Merci.

[Traduction]

La présidente: Merci beaucoup.

Madame Caplan, avez-vous des questions?

Mme Elinor Caplan: Oui, merci.

Nous avons entendu bien des témoignages comme ceux que viennent de nous livrer Mme Poirier et de M. Aubé. Bien des gens nous ont dit que Santé Canada devrait avoir davantage d'experts dans les produits naturels et les produits thérapeutiques naturels. Je suppose que vous êtes du même avis.

En outre, certains nous ont dit, tout comme vous madame, qu'ils craignent de signaler publiquement des anomalies. Je déplore que les gens aient ce sentiment. C'est un message qu'a entendu notre comité et je suis persuadée que Santé Canada l'entendra également.

Ma question s'adresse à M. Aubé. Vous avez dit au début que le produit que vous avez mentionné servait à perdre du poids. Est-il encore efficace pour la perte de poids, ou avez-vous changé votre demande parce qu'il existe maintenant des preuves de ce qu'il est efficace pour réduire le cholestérol? Je m'interroge, car vous êtes passé d'une formule amaigrissante à une formule de réduction du cholestérol, et je ne savais pas pourquoi.

• 1535

[Français]

M. André Aubé: Aux États-Unis, le produit est exclusivement commercialisé pour la perte de poids. Personne avant nous n'avait fait une étude pour en démontrer l'efficacité sur le cholestérol. On est la première entreprise à avoir fait une étude exhaustive qui démontre non seulement que c'est sans danger, mais aussi que c'est efficace pour le cholestérol. Aux États-Unis, on n'a pas fait ces travaux-là et personne n'a osé mettre une réclame sur la bouteille disant que le produit servait à contrôler le cholestérol. On s'est donc tourné du côté de la perte de poids.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Recommandez-vous une mise en garde indiquant que ce produit peut provoquer une perte de poids?

[Français]

M. André Aubé: Non. Des études ont démontré que c'était peu efficace pour perdre du poids. C'est efficace pour le cholestérol.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Vous dites toutefois que ce produit est vendu partout aux États-Unis comme un produit amaigrissant.

[Français]

M. André Aubé: Oui. Aux États-Unis, on l'a commercialisé exclusivement pour la perte de poids.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Peut-on en déduire qu'il existe un problème?

[Français]

M. André Aubé: Non, ce n'est pas un problème. C'est qu'à un moment donné, de notre côté, des études qui avaient été entreprises au Québec, à l'Université de Sherbrooke, portaient sur la capacité du chitosan à agir sur le cholestérol. C'est dans cette voie-là qu'on a poursuivi les travaux.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Au début de votre exposé, j'avais l'impression que vous vouliez que ce produit soit vendu au Canada comme produit amaigrissant.

[Français]

M. André Aubé: Cela a été offert aux Canadiens pour la perte de poids dès 1995. C'est à ce moment-là que le gouvernement canadien est intervenu. Le gouvernement est intervenu non pas parce qu'il était d'accord ou pas d'accord sur la réclame concernant la perte de poids, mais parce qu'on n'avait pas de preuve que le produit était sûr. La sécurité du produit n'était pas démontrée, indépendamment de ce pourquoi on voulait le distribuer.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Dites-moi si je comprends bien. À l'heure actuelle, on estime que ce produit est inoffensif. Il n'est pas efficace comme produit amaigrissant, mais il est efficace pour réduire le cholestérol. Ce produit est disponible aux États-Unis comme produit amaigrissant.

[Français]

M. André Aubé: C'est cela, et c'est aussi disponible au Canada pour la perte de poids. Pendant que nous n'avons pas le droit de le distribuer,...

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Je comprends.

[Français]

M. André Aubé: ...il est déjà sur les tablettes. Ceci a été pris à Toronto. Sur l'Internet, il y a 40 endroits où vous pouvez acheter du chitosan.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Il se vend donc au Canada comme produit amaigrissant, mais il n'est pas efficace pour cela. Toutefois, il est inoffensif et ne peut causer aucun tort.

[Français]

M. André Aubé: C'est moi qui affirme qu'à partir des études qu'on a réalisées, on a constaté que ce n'était pas très efficace pour la perte de poids. Mais ce n'est pas cela, le problème. Le problème, c'est que c'est sur le marché canadien pendant que je vous parle, sans réclame puisqu'on n'a pas le droit de faire de réclame. C'est annoncé, par des moyens détournés, comme produit pour faire perdre du poids. Mon entreprise ne veut pas commercialiser le produit pour faire perdre du poids. C'est peu efficace. On veut le commercialiser pour le cholestérol, pour lequel il est très efficace. Nous avons fait la preuve que c'était sans danger.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Pour ce qui est de l'exclusivité, je suppose que votre brevet est protégé. Vous avez demandé un brevet et...

[Français]

M. André Aubé: Pas pour le produit chitosan tel quel. Les études se poursuivent. Elles vont avoir lieu pendant une période de trois ans. On va avoir un produit dérivé du chitosan pour lequel on va avoir un brevet, mais dans le moment, le chitosan est disponible à toute personne qui veut en acheter. N'importe qui peut acheter du chitosan.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: J'aimerais savoir quel droit d'exclusivité vous réclamez.

[Français]

M. André Aubé: Une exclusivité de réclame. On est les seuls à avoir fait des travaux pour démontrer que c'est efficace pour le cholestérol et on voudrait, pendant une période de temps, être les seuls à pouvoir mettre sur la bouteille une réclame disant que c'est un produit qui est efficace pour le cholestérol. Ce n'est pas moi qui invente la méthode....

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Mais qu'en est-il de la perte de poids?

[Français]

M. André Aubé: La perte de poids? Si quelqu'un d'autre veut faire la preuve que c'est bon pour la perte de poids, il la fera et il demandera une exclusivité, mais il faut quand même avoir la preuve que c'est efficace.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Existe-t-il d'autres moyens que la protection des brevets pour garantir l'exclusivité que vous réclamez?

[Français]

M. André Aubé: C'est possible, et on en a déjà discuté au Canada. Cela se fait déjà dans d'autres pays.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Peut-on y recourir à l'heure actuelle?

[Français]

M. André Aubé: Cela se fait dans d'autres pays où on donne, pour une période de temps, l'exclusivité d'une réclame pour permettre à la compagnie qui a fait les travaux, qui a eu le courage et l'honnêteté de faire les travaux, de regagner une partie de l'argent investi pour pouvoir l'investir dans autre chose par la suite.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Mais au Canada, à l'heure actuelle, on ne peut le faire à partir d'une propriété attribuée à un produit?

[Français]

M. André Aubé: Non, madame.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Merci beaucoup.

Je voudrais m'assurer d'avoir bien compris M. St-Laurent. Je ne suis pas certaine d'avoir bien compris la traduction.

Vous dites que les 222 avec codéine sont en vente libre aux États-Unis?

M. André Aubé: Ce produit est en vente libre au Canada.

Mme Elinor Caplan: Il ne l'est pas aux États-Unis?

M. André Aubé: Non.

Mme Elinor Caplan: Il est vendu sur ordonnance aux États-Unis?

• 1540

M. Roger St-Laurent: Oui. Les comprimés que nous appelons 222, qui contiennent une faible dose de codéine, sont en vente libre.

Mme Elinor Caplan: Mais derrière le comptoir.

M. Roger St-Laurent: Le produit est derrière le comptoir, mais si vous le demandez au pharmacien, il vous en donnera. Il n'a pas besoin pour cela d'une ordonnance.

Mme Elinor Caplan: C'est exact. Ce que vous illustriez par là, c'est qu'il existe des différences entre le Canada et les États-Unis.

M. Roger St-Laurent: Nous appliquons des règles très rigoureuses aux produits à base de plantes et nous sommes très tolérants pour la codéine.

Mme Elinor Caplan: Et les Américains appliquent des règles rigoureuses à la codéine et...

M. Roger St-Laurent: Des règles d'une rigueur absurde à la codéine.

Mme Elinor Caplan: Mais il est possible d'attribuer des vertus aux produits, et M. Aubé dit qu'il n'existe pas de preuve à cet égard.

M. Roger St-Laurent: C'est exact, oui.

Mme Elinor Caplan: C'est donc qu'il existe des problèmes des deux côtés de la frontière, n'est-ce pas?

M. Roger St-Laurent: Je suis d'accord avec vous.

Mme Elinor Caplan: Dans le modèle américain, le DSHEA, il y a des règlements sur les produits en vente libre, les produits naturels et les produits à base de plantes. Cette méthode semble également poser certains problèmes.

Merci.

M. Roger St-Laurent: Puis-je répondre à votre autre question? Vous avez dit quelque chose à M. Aubé, au début. Vous avez dit qu'il n'y a pas suffisamment d'experts au Canada, qu'il n'y a pas suffisamment de compétences canadiennes.

Mme Elinor Caplan: Au sein de Santé Canada.

M. Roger St-Laurent: J'ai déjà été président de l'ANPS, l'association que nous représentons aujourd'hui. Nous avions proposé il y a quelques années, dans une réunion, que le ministère ait recours aux compétences qui existent au Royaume-Uni, en France et en Allemagne, qu'il utilise les pharmacopées qui sont utilisées dans ces pays. Le ministère a refusé, disant que le travail devait être fait par des experts du ministère lui-même, du gouvernement. Au cours des cinq à dix dernières années, le ministère a élaboré deux pharmacopées des produits à base de plantes. Et disons-le franchement, entre nous, les fonctionnaires veulent protéger leurs emplois. Voilà le problème.

Mme Elinor Caplan: Merci beaucoup.

La présidente: Merci.

J'ai une question à poser à M. Aubé. Nous ne voulons pas nous en prendre à vous particulièrement, mais pourriez-vous vendre aux États-Unis votre produit qui réduit le cholestérol?

[Français]

M. André Aubé: Oui.

[Traduction]

La présidente: Mais vous ne le faites pas. Vous le vendez seulement comme produit amaigrissant.

M. André Aubé: Non.

La présidente: Vous le vendez là-bas pour la réduction du cholestérol et la perte de poids?

[Français]

M. André Aubé: Non. On n'a pas encore commencé à le vendre aux États-Unis. On va commencer dans les prochaines semaines. Il sera vendu comme produit pour le cholestérol et on indiquera très clairement sur la bouteille qu'il réduit le niveau de cholestérol ou conserve un taux de cholestérol-santé.

[Traduction]

La présidente: Aux États-Unis, vous n'avez pas à prouver que ce produit est amaigrissant. Auriez-vous à prouver qu'il peut réduire le cholestérol?

[Français]

M. André Aubé: Avec la loi américaine actuelle, que vous commercialisiez le produit pour réduire le poids ou pour le cholestérol, vous devez posséder des preuves qui démontrent que votre produit fait vraiment ce pourquoi vous faites une réclame. C'est déjà dans la loi aux États-Unis.

[Traduction]

La présidente: Vous dites que vous n'avez pas...? Oh, c'est vous qui êtes personnellement convaincu que ce produit n'est pas efficace pour faire perdre du poids?

[Français]

M. André Aubé: C'est ça.

[Traduction]

La présidente: Mais vous le vendez aux États-Unis pour...

[Français]

M. André Aubé: On n'a pas encore commencé à le vendre. On va commencer à le vendre dans les prochaines semaines comme produit pour le cholestérol. On ne vend pas ce produit-là, ni pour le cholestérol ni pour maigrir. Nous ne voulons pas le commercialiser pour la perte de poids, mais pour le cholestérol, pour lequel il est efficace.

[Traduction]

La présidente: Est-ce que d'autres sociétés vendent ce produit aux États-Unis?

[Français]

M. André Aubé: Pas pour le cholestérol parce qu'on est les premiers à faire...

[Traduction]

La présidente: Est-ce que quelqu'un d'autre vend votre produit comme produit amaigrissant?

[Français]

M. André Aubé: Oui. Le produit dont je parle vient de coquillages de crevettes ou de homards. C'est un produit naturel et ce produit peut être acheté par n'importe qui. D'autres compagnies vendent le chitosan. Il est vendu aux États-Unis pour la perte de poids.

[Traduction]

La présidente: J'ai d'autres questions à poser, mais nous tournons en rond.

Mme Elinor Caplan: Une précision. Aux États-Unis, votre produit porterait une mise en garde indiquant que la FDA n'a pas prouvé l'efficacité de ce produit pour la perte de poids ou pour autre chose, n'est-ce pas?

[Français]

M. André Aubé: Dans le cadre de la loi américaine actuelle, vous êtes obligé de mettre ce disclaimer sur tous les produits naturels. C'est une obligation. Vous êtes obligé de le mettre. C'est dans la loi.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Si vous le vendiez comme produit qui réduit le cholestérol, vous devriez rajouter la même mise en garde...

[Français]

M. André Aubé: La même chose, madame.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: ... et vous n'auriez pas l'exclusivité.

[Français]

M. André Aubé: Non.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Merci.

La présidente: Aimeriez-vous que les mêmes mises en garde existent au Canada? Cela vous permettrait-il de vendre votre produit maintenant?

[Français]

M. André Aubé: Peut-être dans certains cas, mais je ne pense pas qu'on devrait suivre exactement l'exemple des Américains dans ce cas-là. Si, effectivement, une entreprise a des preuves que le produit est efficace et que les tests ont été faits, je ne vois pas pourquoi on mettrait un disclaimer disant le contraire. Il faudrait le mettre sur la majorité des produits, mais dans d'autres cas très précis, dont celui que je viens de vous expliquer, on n'a certainement pas besoin d'un disclaimer quand on a fait les études cliniques qui sont celles qu'on utilise pour les médicaments dits conventionnels.

• 1545

[Traduction]

La présidente: Mais si vous n'aviez pas encore réalisé vos études, s'il y avait une mise en garde, vous pourriez peut-être vendre votre produit ici sans avoir à dépenser tout cet argent pour faire faire les tests dont vous avez parlé.

[Français]

M. André Aubé: Je ne peux pas non plus le vendre comme aliment naturel sans mettre quoi que ce soit sur la bouteille. Je n'ai pas le droit de le vendre du tout. Le chitosan ne peut être vendu ni comme aliment ni comme médicament au Canada. C'est complètement défendu. Ces compagnies-là sont dans l'illégalité.

[Traduction]

La présidente: Oui, c'est vrai, si nous avions des mises en garde. Mais ce dont je parle...

[Français]

M. André Aubé: Si jamais on avait un disclaimer? Oui, certainement. Mais je voudrais tout de même qu'on ait fait certaines vérifications de sécurité, parce que le disclaimer ne fait pas en sorte que le produit est sécuritaire. Cela dit que la FDA n'a pas vérifié ce que vous dites. Cela ne veut pas dire que le produit est sécuritaire.

La loi américaine contient de bonnes choses, mais il y a certaines petites adaptations à y faire. D'ailleurs, si le gouvernement veut avoir des bonnes idées, il pourra peut-être nous solliciter parce que nous sommes dans ce domaine depuis des années, Roger et moi entre autres. Nous savons exactement ce que le gouvernement devrait faire pour que la population soit en sécurité et ait accès aux médicaments.

[Traduction]

La présidente: Pourriez-vous nous en faire part? Nous sommes ici pour cela, pour vous demander de telles idées. Nous connaissons les problèmes, nous voulons des idées. Vous pourriez nous les faire parvenir. Nous devons maintenant passer à d'autres questions.

[Français]

M. André Aubé: L'association à laquelle je siège, qui s'appelle l'ANPS, l'Association nationale pour les produits de santé, vous a déjà envoyé un rapport il y trois semaines ou un mois. Vous aviez là-dedans tous les éléments d'une solution sérieuse à long terme.

[Traduction]

La présidente: Très bien.

Madame Picard.

[Français]

Mme Pauline Picard: Je voudrais qu'on revienne à Santé Canada. Vous avez présenté votre produit à Santé Canada comme un produit innovateur pour qu'il soit homologué.

M. André Aubé: Dans un premier temps, comme supplément alimentaire.

Mme Pauline Picard: À ce moment-là, c'était pour la perte de poids?

M. André Aubé: Non, non, non. Oubliez la perte de poids. Cela n'a rien à voir avec moi.

Mme Pauline Picard: D'accord.

M. André Aubé: Moi, je suis M. Cholestérol.

Mme Pauline Picard: Très bien, M. Cholestérol. Alors, vous l'avez présenté comme aliment pouvant réduire le cholestérol.

M. André Aubé: C'est bien ça.

Mme Pauline Picard: Cela vous a été refusé?

M. André Aubé: Ça a été présenté et appuyé par l'étude dont je parle depuis tout à l'heure, et on nous est revenu en signalant que deux points méritaient d'être éclaircis. Les deux points ont été éclaircis, mais on n'a toujours pas l'autorisation.

Mme Pauline Picard: Vous n'avez pas d'autorisation?

M. André Aubé: Non.

Mme Pauline Picard: On vous a parlé de deux points et on...

M. André Aubé: Je dois dire que les deux points...

Mme Pauline Picard: Normalement, sous la rubrique «aliments», vous n'avez pas besoin d'un DIN pour mettre votre produit sur les tablettes.

M. André Aubé: Non, mais le chitosan est défendu au Canada, et comme aliment et comme médicament. On n'a pas le droit de distribuer du chitosan parce que son innocuité et sa sécurité n'avaient pas été démontrées jusqu'à ce qu'on réalise notre étude.

Mme Pauline Picard: Après l'étude, ils vous ont refusé...

M. André Aubé: On attend. On ne nous a rien refusé. On est en période d'attente.

Mme Pauline Picard: Depuis combien de temps?

M. André Aubé: Depuis environ quatre mois.

Mme Pauline Picard: Merci, monsieur. On comprend vos frustrations. Ce n'est pas la première fois qu'on entend parler de cela. On a rencontré je ne sais combien de témoins à travers le Canada depuis décembre. Des histoires comme la vôtre, on en a entendu d'autres, mais je suis toujours étonnée quand j'entends de telles choses. Je me dis que ce n'est pas possible. Qui décide, qui fait les analyses et pourquoi? On nous dit telle chose, mais personne ne sait pourquoi. C'est défendu, mais pourquoi? Pourquoi la mélatonine est-elle défendue? On ne sait pas pourquoi.

M. André Aubé: Excusez-moi, madame. Puis-je prendre 30 secondes pour vous expliquer une des objections?

Une des objections du gouvernement, c'est que le produit semblait, à la lecture préliminaire de l'étude, diminuer la quantité de vitamine D. C'était une des deux objections du gouvernement.

Eh bien, croyez-le ou non, au Québec, dans toute la partie de l'hémisphère nord, durant l'hiver, la vitamine D baisse de 50 p. 100 chez tout le monde. Quand il n'y a plus de soleil, on n'est pas irradié et on n'a plus de vitamine D. La vitamine D avait baissé de 30 p. 100 parce que l'étude s'était terminée au mois de décembre. Si elle avait continué jusqu'au mois de février, la vitamine D aurait baissé de 50 p. 100, comme chez toute la population. Quand les gens ont arrêté de prendre le chitosan, la vitamine D n'a pas remonté, parce qu'il n'y avait pas de soleil.

Cela veut dire que ceux qui examinent nos dossiers sont des gens incompétents. C'est aussi simple que ça. Non seulement ils ne sont pas intéressés mais, en plus, ils sont incompétents. Je ne pense pas être impoli en disant cela.

• 1550

Mme Pauline Picard: Merci.

Monsieur Lavallée, je lis tous les jours M. Jean-Marc Brunet avec plaisir. Est-ce que le fondateur de votre compagnie est en faveur d'une troisième catégorie pour les produits naturels?

M. André Lavallée: Quand vous parlez d'une troisième catégorie, vous parlez d'une catégorie autre que celles des aliments et des drogues?

Mme Pauline Picard: Oui.

M. André Lavallée: Je vous dirai que la position du fondateur a toujours été de dire que ce ne sont pas des drogues comme telles. Ce ne sont pas des aliments non plus. Donc, une troisième catégorie serait une voie intéressante.

Une chose est certaine, c'est que pour nous, les produits naturels ne sont pas des drogues. Ce qu'on vend chez nous, ce ne sont pas des drogues. Je peux vous dire que chez nous, il y a eu une résistance très forte, au fil des années, à la commercialisation de produits qui portent des DIN, hormis des produits très spécifiques comme des vitamines, entre autres. Il y a une résistance très forte à la commercialisation de produits portant un DIN chez nous, ce qui fait que la réglementation actuelle nous empêche de dire quoi que ce soit au sujet de nos produits. Si ce ne sont pas des drogues, ce sont des aliments. Vous connaissez certainement le circuit dans lequel on est pris.

Cela devient de plus en plus difficile, d'autant plus qu'actuellement, il y a une démocratisation de plus en plus grande dans le domaine des produits naturels. On se bat contre des concurrents qui ont tendance à faire des affirmations qui vont au-delà de ce qui est permis par la loi actuelle. Je pense qu'on est mûrs pour un changement de ce côté-là.

Mme Pauline Picard: Merci, monsieur. Merci, madame.

[Traduction]

La présidente: Madame Caplan.

Mme Elinor Caplan: J'ai deux questions à poser à M. Lavallée.

Premièrement, compte tenu des discussions que vous avez entendues à ce comité, êtes-vous toujours d'avis que nous devrions harmoniser notre politique avec celle des États-Unis?

[Français]

M. André Lavallée: Oui, je pense qu'il faut qu'il y ait quelque chose qui soit relativement semblable. S'il y a quelque chose qui est trop dissemblable, strictement au point de vue économique, on va avoir des problèmes tôt ou tard.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Même s'il y a des problèmes aux États-Unis? Les Américains devraient peut-être adopter notre régime.

[Français]

M. André Lavallée: Je ne pense pas que ça soit nécessairement souhaitable, entre vous et moi.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Une deuxième question porte sur votre déclaration selon laquelle les remèdes à base de plantes ne sont pas toxiques, qu'ils n'ont pas d'effets secondaires ou de contre-indications. D'autres témoins nous ont pourtant dit que certains produits à base de plantes ne devraient pas être utilisés par les femmes enceintes ou les personnes qui souffrent d'hypertension. Croyez-vous que Santé Canada devrait s'assurer de l'innocuité des produits et insister pour que soient faites des mises en garde lorsqu'il y a des contre-indications?

[Français]

M. André Lavallée: Oui. Il peut y avoir certains produits qui peuvent être plus sensibles que d'autres à l'aspect de la toxicité. Je suis d'accord qu'on doit être précautionneux dans certaines circonstances. C'est une chose qu'on fait déjà actuellement.

Par contre, la très grande majorité des produits qui sont en vente dans notre entreprise n'ont aucun élément de toxicité. Je vous parle d'expérience. En anglais, je pense qu'on parle d'evidence.

Comme je vous l'ai mentionné tout à l'heure, il y a 30 années d'expérience au sein de l'entreprise. Pendant ces 30 années d'expérience de vente de produits naturels, à ma connaissance, on n'a jamais eu de problèmes de cette nature-là.

Par contre, il faut être prudent dans le cas de certains produits, mais pas de tous les produits. La très grande majorité des produits n'ont pas d'effets toxiques.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Je suppose que vous connaissez la teneur de l'ébauche de rapport du Comité consultatif sur les produits de santé naturels.

[Français]

M. André Lavallée: Oui.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Le comité a recommandé toute une série de méthodes fondées sur la gestion du risque et il préconise une réglementation plus rigoureuse à l'égard des produits présentant des risques élevés. Êtes-vous pour une telle approche?

[Français]

M. André Lavallée: Oui.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Merci. C'est tout.

[Français]

La présidente: Merci beaucoup.

M. André Lavallée: De rien.

• 1554




• 1557

[Traduction]

La présidente: Lise, voulez-vous commencer?

[Français]

Mme Lise Lefebvre (Association nationale pour les produits de santé; directrice, Institut de recherche biologique Yves Ponroy Canada): Madame la présidente, bonjour. Mesdames et messieurs, bonjour. Je vais résumer le mémoire qui vous a été distribué.

Je suis la directrice de l'Institut de recherche biologique Yves Ponroy Canada, fondé en 1991. L'Institut de recherche biologique Yves Ponroy existe en Europe depuis 1979. Yves Ponroy est un grand pionnier. C'est un leader dans le marché des compléments nutritionnels. C'est un biochimiste et un docteur ès sciences.

Je vais passer sous silence les problèmes qu'on a eus avec une gamme qui s'appelle Leritone, et je vais en venir aux faits.

En ce qui concerne Nutricap, nous avons eu un problème avec la DGPS qui est venue à nos bureaux au mois de février et qui nous a demandé d'arrêter la vente de notre produit Nutricap. J'ai apporté des boîtes qui proviennent d'un peu partout à travers le monde, de la Belgique, de la Russie et de la Grèce, et qui disent toutes, sans exception, que c'est essentiellement «pour nourrir et fortifier les ongles et les cheveux.»

En 1994, l'Institut Ponroy a fait une étude clinique qui a été publiée dans Les Nouvelles Dermatologiques en Europe et qui prouvait effectivement une amélioration au niveau des ongles et des cheveux. Cela a été publié. Je vais vous en laisser une copie. Comme vous pouvez le voir sur les boîtes, on indique seulement «complément nutritionnel», et c'est la boîte qui a été acceptée par la DGPS. Personnellement, je pense qu'il est tout à fait inadmissible de vendre un produit qui ne comporte aucune indication supplémentaire.

Après le passage de la DGPS, nous avons évidemment arrêté de vendre le produit. On a réemballé toutes les boîtes. On a mis à la poubelle tout ce qu'on avait, à savoir 30 000 boîtes. On a dépensé à peu près 15 000 $, sans parler des dépenses et des pertes de ventes qu'on a eues en février sur ce produit-là.

• 1600

Je peux vous dire qu'après le verglas de janvier, ce fut pour nous une autre catastrophe en février. Nous avons donc tout effacé sur les boîtes sauf «complément nutritionnel». Mais vous pouvez voir sur les boîtes qui viennent d'ailleurs dans le monde qu'il est écrit que c'est «pour nourrir et fortifier les ongles et les cheveux».

Je pense qu'il est inadmissible qu'on ne puisse pas utiliser, au Canada, les résultats des études cliniques faites en Europe par une entreprise sérieuse comme Yves Ponroy pour commercialiser un produit. Et ce n'est qu'un exemple! J'en ai six ou sept autres, si vous voulez.

Nous avons toute une gamme de produits pour lesquels il y a eu des études cliniques et nous venons même d'investir 150 000 $ pour des études cliniques en collaboration avec l'UQAM. On a fait une étude clinique scientifique pour un autre produit, mais encore là, c'est tout juste si on peut se servir des résultats. Il semble que l'on ne peut pas dire qu'on a fait une étude clinique et que les résultats sont l'amélioration de la qualité de vie chez les personnes âgées ou la baisse de la dépression, ou que cela favorise le sommeil.

Je vous laisse donc réfléchir à tous ces exemples que je vous ai apportés. Je vous remercie.

La présidente: Merci beaucoup.

Who's next?

M. Guy Bohémier (Association nationale pour les produits de santé; naturopathe et consultant): Je m'appelle Guy Bohémier. Je suis le président de la Société ÉducoSanté, où nous avons un groupe de praticiens en prévention. Je suis également vice-président du Collège des naturopathes du Québec, qui est le plus vieil organisme de la profession naturopathique au Québec, puisqu'il a été fondé en 1963. J'ai souvent été appelé à intervenir dans le domaine de l'industrie en tant que conseiller. J'ai eu affaire à plusieurs occasions aux fonctionnaires du gouvernement et, bien sûr, à tous les problèmes dont nous parlons ici.

Notre intérêt dans le domaine des produits naturels est bien évident. Il faut que ces produits-là soient sur le marché si on veut les recommander à nos patients ou à nos clients.

Dans un premier temps, je mentionnerai qu'il est nécessaire d'avoir une réglementation sur les produits naturels. Il pourra toujours se glisser dans nos milieux des individus peu scrupuleux qui voudraient mettre sur le marché, sous l'étiquette de produits dits naturels, des produits qui ne répondraient peut-être pas à des critères bien précis. Une réglementation s'impose donc.

Le problème, si on parle de réglementation, c'est que nos produits ont toujours été identifiées à des médicaments et qu'on leur a appliqué la même réglementation qu'aux médicaments. Cela soulève toute une série de problèmes partout au Canada, dont vous avez sans doute déjà entendu parler.

On a souvent l'impression que la réglementation sur les médicaments est une réglementation idéale, extrêmement sécuritaire, qui permet de répondre aux critères de sécurité dans un premier temps et ensuite aux critères d'efficacité.

Sur ce plan-là, je pense qu'il faudrait probablement apporter quelques précisions parce qu'à notre avis, ce n'est pas tout à fait ce qui se passe dans les faits. Je comprends que les médicaments classiques sont les médicaments pharmaceutiques de prescription pour un bon nombre, mais je pense qu'il faut également inclure les médicaments qui sont en vente libre parce que ce sont des substances qui présentent presque toujours une certaine toxicité et sont en quelque sorte un peu dangereuses.

On a vu récemment, et cela a été mentionné à la télévision comme à la radio, qu'une étude réalisée aux États-Unis par un professeur de l'Université de Toronto a montré que les réactions adverses aux médicaments représentaient la quatrième cause de mortalité.

Or, malgré une réglementation sur les médicaments qu'on dit sévère, sérieuse, bien serrée, que l'on veut nous appliquer et que l'on nous applique en ce qui concerne les produits naturels qui, eux, sont loin de présenter la même toxicité, les médicaments sont loin d'être sécuritaires.

• 1605

En ce qui concerne les produits de santé naturels, il y a deux éléments fondamentaux. Il faut que ces produits-là répondent à un critère d'innocuité. Il faut que nos produits soient sans danger. Il faut que nos produits soient non toxiques. C'est la première chose, je pense. Nous sommes dans le domaine des produits de santé et nous ne sommes certainement pas là pour empoisonner les gens ou encore leur faire courir des risques en consommant nos produits. Donc, le premier critère à respecter, c'est qu'il faut que nos produits soient sans danger.

Le deuxième critère, bien sûr, c'est qu'il faut qu'ils soient également efficaces. Si nos produits sont sans danger mais ne sont pas efficaces, ça ne vaut pas la peine de les commercialiser. Ça ne vaut certainement pas la peine, non plus, pour les consommateurs de les consommer.

Si on regarde le premier principe, celui de la non-toxicité de nos produits, il faut que cette non-toxicité puisse être démontrée. Divers moyens s'offrent à nous pour démontrer et déterminer la non-toxicité de nos produits. On peut se baser sur les études existantes. Généralement, dans le domaine des produits naturels, nous procédons toujours avec prudence et nous attendons, avant de commercialiser un produit, que son innocuité ait été démontrée. Des études peuvent permettre d'arriver à cette conclusion.

On peut aussi consulter des monographies existantes qui indiquent si tel ou tel produit présente une toxicité. Si la monographie indique que le produit ne présente aucune toxicité, c'est un élément qui va nous permettre de dire que notre produit est sans danger et que, par conséquent, on peut le commercialiser.

On veut aussi, dans une certaine mesure—et je pense que ça a été fait—se baser sur l'expérience. Si des gens consomment un produit depuis des dizaines d'années et même davantage et qu'ils n'ont jamais eu de problèmes, on peut alors considérer que ce produit est sans danger.

L'efficacité relève sensiblement des mêmes principes ou des mêmes sources pour qu'elle puisse être démontrée. La recherche, par exemple, va permettre de savoir si le produit est efficace. Les fonctionnaires utilisent souvent la tradition dans une certaine mesure. Si le produit a toujours été recommandé et a toujours été utilisé dans tel but, on peut supposer qu'il présente une certaine efficacité. Les monographies vont également nous indiquer l'efficacité du produit. Cela devrait être suffisant pour connaître ou déterminer si, oui ou non, le produit est efficace.

On applique souvent, dans le domaine de l'efficacité. des normes qui nous paraissent carrément exagérées. Par exemple, il y a la notion—et on l'exprime souvent en anglais—de significant scientific agreement. Selon cette notion, il faudrait que 50 p. 100 de la communauté scientifique ou des experts qui se prononcent sur la question soient d'accord sur l'efficacité du produit. Je pense que cette notion ne peut pas être retenue parce que le désaccord de plus de 50 p. 100 de la communauté peut être expliqué par beaucoup de raisons non valables. L'arrogance des gens en place, le manque d'ouverture de certains individus, les idées préconçues et peut-être aussi la paresse intellectuelle de certaines personnes font qu'elles peuvent s'opposer à une notion ou au contenu d'une recherche sans aucune espèce de justification réelle.

Maints exemples ont déjà été mentionnés. Peut-être qu'un des plus percutants est celui d'un médecin anglais, le Dr Lynd, qui avait découvert que le scorbut chez les marins anglais pouvait être corrigé en leur proposant de consommer des quantités suffisantes de jus de lime. Quand le Dr Lynd a émis cette théorie, on l'a ridiculisé dans les milieux scientifiques. On l'a traité de farfelu, considérant que le scorbut était une maladie bien trop sérieuse pour qu'un produit aussi banal que la lime puisse constituer un élément thérapeutique.

• 1610

Ce n'est que 40 ans après que le Dr Lynd ait mentionné le fait que le jus de lime pouvait prévenir le scorbut que l'on a appliqué cette thérapie, tout simplement parce qu'on n'avait pas, à cette époque, même si le terme n'était peut-être pas utilisé, a significant scientific agreement. Pendant 40 ans, les marins ont continué de mourir du scorbut. Combien de personnes sont mortes à cause de l'arrogance des gens en place? Au lieu de vérifier si le Dr Lynd avait, oui ou non, trouvé quelque chose de valable, on s'est contenté de nier bêtement ce qu'il affirmait.

Une recherche est valable si elle démontre quelque chose, et pas seulement parce que tout le monde est d'accord. Ce qui fait la valeur d'une recherche, c'est, bien sûr, ses qualités intrinsèques et la justesse de ce qu'elle démontre, tout simplement. À partir du moment où on a entre les mains une recherche qui est faite selon les règles et qui aboutit à des résultats spécifiques, je pense qu'on peut et doit l'envisager sans avoir à demander l'assentiment de 50 p. 100 de la communauté. C'est d'ailleurs bien difficile de l'obtenir parce que beaucoup de gens en place ont toutes sortes de réserves sur les idées nouvelles et risquent de s'y opposer assez farouchement.

J'en arrive à ce qu'on pourrait peut-être présenter comme une solution au problème qui nous préoccupe tous. Je pense que la loi ne doit pas nécessairement être changée si certaines substances qu'on appelle des suppléments alimentaires ont—comme ça peut être démontré facilement et comme beaucoup de recherches le démontrant—des vertus thérapeutiques et qu'on peut les considérer comme des médicaments selon la définition des drogues. Cependant, si ces substances ne sont pas toxiques et si elles sont également efficaces, on n'a pas à les faire passer par le même cheminement que des substances de synthèse qui, généralement, présentent une très grande toxicité.

Si on acceptait qu'un comité d'experts proposé par l'industrie soit mis en place, on pourrait laisser au gouvernement—parce que le gouvernement a bien de la difficulté à se départir de son droit de gérance, ce qui est normal dans les circonstances puisqu'il est chargé de protéger la santé de la population—le droit de veto sur le choix des membres de ce comité. Le comité serait essentiellement consultatif, mais avant qu'il soit décidé si un produit a doit de cité ou non, il faudrait retenir ou du moins écouter l'opinion de ce comité d'experts.

En ce qui concerne les produits qui ne sont pas toxiques, c'est-à-dire dont la toxicité n'a pas été démontrée, certaines allégations pourraient être faites et ne présenteraient normalement pas de difficulté. On peut parler d'allégations de type structure-fonction, par exemple pour un produit qui favoriserait la régularité intestinale. On ne parle pas de maladie comme telle; on parle tout simplement d'une structure ou d'une fonction qui s'accomplit mieux quand on consomme telle ou telle substance. Les allégations peuvent aussi concerner la réduction du risque et, dans ce cas, ne présentent pas vraiment de difficulté. On peut ajouter également des allégations de type prévention de la maladie. Une personne qui n'est pas malade et qui veut prévenir une maladie n'est pas dans une situation critique.

La notion de traitement présente peut-être un peu plus de difficulté, mais les trois premières allégations, de types structure-fonction, réduction de risque et prévention de la maladie, pourraient être faites relativement facilement. On pourrait retenir la formule suivante: l'industrie mettrait ses produits sur le marché et, au bout d'une période de temps relativement courte, peut-être un mois ou deux, notifierait au gouvernement la mise sur le marché du produit, et le gouvernement pourrait alors décider si ce produit peut rester sur le marché sans faire courir de danger à la population.

• 1615

Le gouvernement devrait faire des allégations particulières concernant la structure-fonction, la réduction du risque ou encore la prévention de la maladie. Si le gouvernement pense que des problèmes peuvent surgir, il devra consulter son comité consultatif d'experts, qui émettra une opinion dont le gouvernement tiendra compte pour prendre sa décision. On peut imaginer, si on n'est pas d'accord sur la décision du gouvernement parce qu'elle pourrait être contraire à l'opinion du comité d'experts, de créer un comité d'appel, un organisme qui serait indépendant des deux groupes qui s'opposent, l'industrie et le gouvernement, auquel on pourrait faire appel pour trancher la question. Ce comité émettrait une décision finale.

Je pense que le simple fait que le comité d'experts se soit penché sur une question et ait émis son opinion devrait influencer les fonctionnaires dans leur décision, d'autant plus que cette opinion pourrait toujours être transmise à l'opinion publique, avec les conséquences que l'on peut imaginer. Cela empêcherait peut-être les fonctionnaires de prendre des décisions injustifiées. Il faudrait vraiment qu'ils aient des raisons très sérieuses pour rejeter les conclusions du comité d'experts.

Avec une structure comme celle-là, on arriverait probablement à régler les problèmes qui se présentent dans l'industrie, problèmes dont vous avez certainement eu connaissance au cours de vos délibérations. Beaucoup de gens viennent devant la commission pour se plaindre de différentes choses qui, à leurs yeux, ne devraient pas se produire. Je pense qu'ils ont raison de porter plainte, et c'est sans doute une des raisons pour lesquelles vous avez décidé, à la suite de la décision du ministre de la Santé, de lancer le Comité permanent sur la santé dans le débat sur les produits naturels.

On aurait peut-être là un élément de solution qui permettrait finalement de satisfaire tout le monde. Merci.

La présidente: Merci beaucoup.

Monsieur Gagnon.

M. André Gagnon (président, Association nationale pour les produits de santé; vice-président général, Santé naturelle (AG) Inc.): Madame la présidente, mesdames, messieurs, bonjour. Je m'appelle André Gagnon. Vous vous souvenez peut-être de moi. Je vous ai présenté ce document lors de ma comparution en commission parlementaire il y a quelques temps. Je suis membre du Comité consultatif sur les produits naturels de santé. Je suis également président de l'ANPS. Je vous invite à prendre le document que vous devez tous avoir entre les mains. Je suis également vice-président de la compagnie Santé naturelle, une compagnie qui fabrique des produits naturels et qui est mieux connue sous le nom de Produits Adrien Gagnon.

La semaine dernière, jeudi et vendredi, j'étais à Ottawa pendant deux jours, où se tenait la dernière réunion du Comité consultatif sur les produits naturels de santé. Ce fut une réunion fort intéressante. Il y a eu beaucoup d'échanges de concepts et de remise en question. Je dois dire tout de suite que le rapport des recherchistes nous a été très utile. Il est dommage que le comité n'ait pas eu de façon officielle le rapport des recherchistes. Sans ce rapport, il aurait été difficile de faire un travail sérieux.

Au Comité consultatif, tous ont été très contents que j'aie pu leur soumettre le rapport des recherchistes, où des questions très directes étaient posées. Je remercie donc les personnes qui nous l'ont remis. Ce rapport était très bien fait et il nous a été très utile. Je voudrais ici souligner l'excellent travail des recherchistes dans ce dossier.

Dans le présent dossier, je dois dire que l'ANPS appuie beaucoup des positions qui seront retenues par le Comité consultatif. Il faut essayer d'en arriver à un consensus autant dans l'industrie qu'au niveau du Comité consultatif, qui représente plusieurs intervenants de plusieurs milieux au Canada.

On s'est rendu compte, premièrement, qu'il y avait beaucoup de problèmes de sémantique. C'est important parce qu'il faut être précis dans les deux langues. Par exemple, on parle de risk; j'entends souvent parler de risk, que l'on confond très souvent avec safety. On s'est rendu compte qu'il fallait faire beaucoup de ménage là-dedans.

On parle aussi de drug claim, de treatment claim, de therapeutic claim, des mots qui sont tous utilisés de façon interchangeable. On parle d'une troisième catégorie. On se rend compte, quand on y réfléchit, qu'il faut mettre de l'ordre dans l'utilisation de tous ces mots.

• 1620

Dans l'exposé que je vais vous faire tout à l'heure, je vais faire attention d'utiliser les bons mots dans leur contexte.

Tout d'abord, il y a eu des commentaires assez loufoques concernant la troisième catégorie. Certains commentaires provenaient malheureusement du TPP, à savoir que la troisième catégorie créerait une zone grise additionnelle. Malheureusement, c'est jouer avec les termes et ne pas les mettre dans leur contexte.

Actuellement, la loi définit les aliments et les drogues. Quand on parle des produits de santé, il n'y a aucune logique à dire que les produits de santé seront entre les aliments et les drogues au sens de la loi actuelle. Dans la loi actuelle, une drogue, c'est n'importe quoi, autant un aliment qu'un produit de santé ou n'importe quoi d'autre. Si on replace l'idée que les produits de santé sont quelque part entre les aliments et les produits pharmaceutiques, il me semble que c'est plutôt sensé, et c'est sur ce principe-là que nous avons élaboré nos recommandations.

Je dois dire également que j'ai lu beaucoup de mémoires qui vous ont été présentés. Vous avez entendu des commentaires du médecin conventionnel, ultraconservateur, au TPP, qui est venu vous dire que ce n'était pas si terrible, ainsi que de pharmaciens qui veulent s'approprier un marché en pleine croissance en invoquant de faux arguments de professionnalisme et autres. Je vous ferai remarquer que ma compagnie vend des produits en pharmacie. Par contre, il faut regarder les choses en face et voir si les arguments sont réellement soutenus par un intérêt commercial ou par des arguments qui ont de la valeur du point de vue intellectuel.

Vous avez également entendu des groupes très particuliers, chez qui la philosophie culturelle prend une dimension très importante. Je fais allusion à la médecine chinoise. Je suis bien au courant parce que plusieurs représentants de la médecine chinoise font partie du Comité consultatif.

Je suis de très près ce qui se passe aux États-Unis. Il faut cependant filtrer tous ces renseignements, et je crois que les recherchistes ont fait un excellent travail. Il reste peut-être encore un petit bout de chemin à parcourir avant de pouvoir arriver à de bonnes conclusions.

Je prends maintenant le document que vous devez avoir en anglais et en français.

[Traduction]

Vous avez l'anglais et le français, l'anglais se trouve de l'autre côté.

[Français]

Quand on résume le tout, les éléments principaux d'un cadre réglementaire sont au nombre de sept. Comme vous les avez, je ne les nommerai probablement pas tous, mais ces sept éléments regroupent la plupart des concepts que vous avez besoin d'utiliser.

Premièrement, il y a la catégorisation des produits naturels de santé et les produits couverts. Cela répond finalement à la grande question: à quelle place met-on les produits de santé naturels?

Nous proposons de les mettre sous l'appellation «produits thérapeutiques présentés sous forme dosée», ou therapeutic products presented in dosage form. Cela implique de modifier l'utilisation du terme «drogue» dans la loi pour le remplacer par le mot «thérapeutique». C'est très important. Le mot «thérapeutique» au sens large inclurait la notion de maintien et de promotion de la santé. Ce point-là est très important du point de vue technique.

Je m'adresse peut-être ici un peu plus aux recherchistes, parce que la definition de «drogue» dans la loi n'inclut pas actuellement la notion de maintien et de promotion de la santé. Donc, si on remplace le mot «drogue» par le mot «thérapeutique» et qu'on ajoute à la définition de «drogue» l'aspect du maintien et de la promotion de la santé, on couvre l'utilisation des produits de santé naturels.

On aurait donc maintenant, sous les produits thérapeutiques, les produits de santé naturels et les produits pharmaceutiques de synthèse. Pourquoi fait-on cela? Parce qu'à un moment donné, il faut s'arrêter et regarder ce qu'est la réalité dans la vraie vie, the real life.

Les gens mangent pour se nourrir, prennent des médicaments que le médecin leur prescrit ou ont recours à une solution alternative qui est la consommation des produits de santé naturels. Il faut donc faire un plan à partir de cela. Finalement, cette catégorisation a été élaborée par le Comité consultatif un peu en fonction de la vraie vie.

Donc, on ne parle pas d'une nouvelle catégorie entre les aliments et les drogues. J'espère que c'est clair. Cela n'a aucun sens d'utiliser le mot «drogue» dans un contexte de discussion puisqu'actuellement, le mot «drogue» couvre n'importe quoi. On ne parle donc pas d'une troisième catégorie. On parle simplement de mettre les choses à leur place.

Je vais maintenant parler du modèle de gestion du risque. Je crois que Mme Caplan en a parlé tout à l'heure. Là encore, il y a eu énormément de confusion entre le risk et la safety. Pour y mettre fin, on résume cela de façon très simple.

• 1625

Il y a l'aspect toxicité d'un produit et il y a la réclame. Je crois que la toxicité a été bien expliquée par M. Bohémier.

En ce qui concerne la réclame, je pourrais donner comme exemple, si on prend le tableau ici, un produit qui a une faible toxicité et qui est donc sûr. Quand devient-il dangereux?

[Traduction]

Quand ce produit commence-t-il à présenter un risque pour la santé, sans pour autant être dangereux?

[Français]

C'est quand le produit porte une réclame non justifiée pour un problème de santé important, une réclame de santé de type traitement.

Je voudrais vous donner un exemple, mais je ne voudrais pas prendre un exemple trop brutal. On parle toujours du cancer, et je vais donc prendre quand même l'exemple du cancer. C'est un exemple facile. Si on dit que ce produit-ci peut aider à traiter le cancer du côlon et que ce n'est pas vrai, ce produit présentera tout de même un risque pour l'utilisateur, même si le produit est sécuritaire.

[Traduction]

Je devrais peut-être dire cela en anglais parce que c'est fondamental. Ce produit peut être sécuritaire tout en présentant un certain risque s'il n'est pas efficace pour ce qu'il est censé faire.

[Français]

Cette nuance-là est donc très importante, et je crois que cela met fin au débat sur l'utilisation des termes. Je le pense, du moins. Au comité, en tout cas, c'est ce à quoi on est arrivé. Je dois dire que la majorité des produits de santé naturels sur le marché sont de faible toxicité. C'est reconnu et l'expérience le démontre.

Ensuite, de quelle façon gérer la mise en marché des produits naturels de santé? On tient pour acquis que l'innocuité et la qualité sont requis. On n'argumentera pas là-dessus. Tout le monde est d'accord.

En ce qui a trait aux méthodes et aux modèles afin d'y arriver, il est certainement possible de créer des sous-comités pour arriver à développer des paramètres et des critères pour établir comment on fait pour décider qu'un produit est sûr et de qualité.

Les réclames santé: voilà le principal, le gros morceau, si on peut dire. Une chose est certaine: le comité s'entend pour dire qu'il doit y avoir une postnotification de mise en marché—qu'on appelle la post-market notification—, ce qui veut dire qu'un manufacturier informe par écrit l'organisme réglementaire de la mise en marché d'un produit de santé dans un délai de 30 jours. La notification serait permise dans le cas des produits pour lesquels des monographies ou des normes d'étiquetage existent.

[Traduction]

Il s'agit donc d'une notification postérieure à la commercialisation pour les produits qui font déjà l'objet d'une monographie ou d'une norme en matière d'étiquetage.

[Français]

Il est donc important de reconnaître la documentation existante valable à travers le monde, et je dois insister fortement sur le fait que ce n'est pas le cas actuellement. Tant que ce problème-là ne sera pas réglé, rien ne va changer.

Peu importe la structure réglementaire qu'on va adopter, on n'avancera pas beaucoup si on ne se met pas à élargir ses horizons et à considérer ce qui existe. Beaucoup de littérature et de preuves existent actuellement, et l'idée serait qu'un comité consultatif externe soit chargé d'étudier et de consulter les monographies, toute la documentation existant partout dans le monde. À mesure que cette information serait considérée comme réelle et justifiée, elle serait ajoutée aux monographies canadiennes et aux standards d'étiquetage.

Je vais vous donner un exemple. Dans le cas du sulfate de glucosamine, il n'existe par de normes d'étiquetage au Canada. Si on avait un comité consultatif d'experts qui regarde les études qui se font à travers le monde et qui considère que c'est acceptable, on aurait immédiatement un nouveau standard d'étiquetage et on éviterait d'être submergés par des centaines et des centaines de demandes de compagnies qui font la même demande à un organisme réglementaire, comme c'est le cas actuellement.

Actuellement, chaque personne qui veut faire une demande de DIN doit remplir une demande et l'envoyer au ministère. C'est une bureaucratie lourde. Il existe certains standards d'étiquetage. Il n'en existe que quelques-uns pour les herbages.

Maintenant, l'autre façon de mettre un produit en marché serait l'évaluation avant la mise en marché, what we call free-market assessment.

• 1630

Cela s'appliquerait dans le cas des produits pour lesquels les monographies ou standards d'étiquetage ne sont pas officialisés au Canada. Évidemment, cela a été un point fortement débattu parce que, si on dit que toutes les réclames doivent être préapprouvées si elles n'ont pas de lien avec des monographies, on s'embarque dans une grosse bureaucratie. Il y avait à peu près 18 personnes au comité dont 14 étaient présentes. Elles n'étaient pas toutes des commerçants. Nous étions peut-être cinq industriels. Certaines autres personnes, malgré leur compétence, ne sont peut-être pas en mesure d'évaluer ce que ça veut dire au jour le jour de faire évaluer des produits et de mettre une bureaucratie en place.

Curieusement, dans les lignes directrices du comité, on dit que it has to be cost-effective. Mais on ne peut pas avoir les deux, cost-effective et une structure bureaucratique lourde. Alors on peut considérer l'option d'entrevoir la possibilité de notifier les réclames de type structure-fonction et même réduction de risque, mais je dois dire que je parle plutôt de structure-fonction.

[Traduction]

C'est très important parce que cela traduit un peu l'essence même du système DSHEA. Ce que je m'entends toujours dire c'est que le système est perfectible mais il faut bien entendu commencer par se demander quel est au juste le problème.

Je persiste à penser que pour ce qui est de la fonction structurelle, les produits qui sont inoffensifs ne doivent pas faire l'objet d'une évaluation préalable à leur mise en marché étant donné qu'ils ne présentent guère de risques pour la santé.

[Français]

Est-ce que c'est clair? Si le produit n'est pas dangereux, qu'il est sécuritaire, et que l'on fait quand même une réclame de type structure-fonction parce que le produit n'est pas efficace, il n'y a pas de danger pour la santé puisqu'on ne laisse pas entrevoir au consommateur que ce produit peut traiter une maladie. Je serais même prêt à mettre un disclaimer au Canada disant que le produit n'est pas destiné à guérir ou à traiter une maladie. Je serais prêt à le faire.

Prenons l'exemple de la prostate. Supposons qu'on dise que le palmier nain est efficace pour le bon fonctionnement de la prostate. Je n'ai absolument pas indiqué au consommateur que, s'il prend ça, il remplace son médicament de synthèse. J'ai juste indiqué que cela pouvait lui être utile. C'est là qu'est toute la différence. Cela peut certainement créer un gros débat intellectuel. Il est évident que la plus grande assurance est de réglementer toutes les réclames. N'importe qui sera d'accord. Mais cela implique des coûts, des délais, une bureaucratie.

Actuellement, quand on sait qu'on est sur un cost-recovery program et que 75 p. 100 du budget de fonctionnement du TPP vient des utilisateurs, j'imagine qu'il est difficile d'ajouter une structure bureaucratique encore plus lourde.

Premièrement, l'industrie ne contrôle pas les coûts. Actuellement, ça me coûte 500 $ par année juste pour avoir l'autorisation de vendre de la vitamine C. Si on met une structure bureaucratique plus lourde, je n'aurai aucun contrôle sur les coûts. Ils pourront s'élever à 1 000 $ éventuellement. Si j'ai 100 produits, je vais dépenser 100 000 $ uniquement pour des frais de licence. Cela n'a aucun bon sens. Je dois dire que je reconnais que le meilleur moyen d'assurer la protection du public canadien serait d'évaluer systématiquement toutes les réclames, avec toutes les combinaisons de produits possibles, mais je crois que ce n'est pas réaliste. Il faut faut faire un choix politique: il faut vendre des produits sécuritaires et ne pas préautoriser toutes les réclames. C'est là qu'il y a un choix politique à faire.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Vous recommandez donc une mise en garde dans le cas où les prétentions n'ont pas été prouvées.

M. André Gagnon: Uniquement lorsqu'il s'agit d'effets curatifs, mais pas pour la fonction structurelle.

Mme Elinor Caplan: Pouvez-vous me donner un exemple?

M. André Gagnon: Un exemple? Une prétention curative serait que le produit est bon contre l'inflammation de la prostate. Une fonction structurelle serait que le produit aide la prostate à bien fonctionner. Une prétention curative consisterait à dire que le produit peut être utilisé pour traiter les cas d'hypertrophie bénigne de la prostate. C'est toute la différence entre le fait de traiter la maladie et de faciliter une fonction.

Il y a encore deux choses et elles sont toutes importantes bien sûr.

[Français]

La structure réglementaire: le comité a décidé que ce ne serait pas conféré à la Direction des aliments. Il y a de nombreuses raison à cela. En ce qui me concerne, j'ai fourni des documents qui justifient la raison pour laquelle ça ne doit pas être donné à la Direction des aliments. Je vous invite à prendre l'annexe 1 de votre document.

Cela a été fait le 19 septembre 1996. L'avez-vous tous devant vous?

• 1635

[Traduction]

Quoi qu'il en soit, c'est ce qui est dit à la deuxième page:

@ti26 7.3 Plan provisoire—La DPS devrait élaborer un plan provisoire pour une évaluation au cas par cas des prétentions concernant les aliments fonctionnels et nutraceutiques.

@ti26 7.2 Comité d'experts—La DPS devrait immédiatement prendre l'initiative de constituer un comité d'experts...

[Français]

Cela a eu lieu en septembre 1996. J'ai moi-même siégé au Comité des aliments fonctionnels et nutraceutiques. Regardez ensuite l'autre document intitulé Review of Health Canada's Policies Concerning the Addition of Vitamins and Minerals to Foods. Savez-vous combien de temps ils se donnent pour étudier cela? Dix-huit mois!

À l'autre page, on dit qu'on se donne jusqu'en l'an 1999 pour étudier l'addition des vitamines et minéraux dans les aliments. On part donc du 19 septembre 1996, et si on compte 1997, 1998, 1999, cela va peut-être prendre trois ou quatre ans avant d'aboutir à quelque chose. Je ne peux pas accepter cela. On ne peut pas fonctionner avec ce système-là. En plus, je dois dire que j'ai lu le mémoire des Fabricants de produits alimentaires et de consommation du Canada.

[Traduction]

Je pense que l'Association canadienne des fabricants d'aliments et de produits de consommation a déjà témoigné devant vous. Elle prétend qu'il pourrait n'y avoir qu'une seule catégorie de produits, et qu'il suffirait de réglementer les prétentions. Fort bien, mais lorsque vous lisez le document, vous voyez qu'il y a des lacunes. Comment administrer ces prétentions? Le document est muet à ce sujet. J'ai parlé aux gens de l'Association, je les ai interrogés mais ils ne s'en soucient pas et ils n'ont pas de réponse.

[Français]

Je ne pense pas qu'on ait tout à fait les mêmes intérêts. L'industrie alimentaire implique d'autres données que le domaine des produits de la santé. Je vous épargne les débats sur la différence qui existe entre les termes «nutraceutique» et «fonctionnel» car cela pourrait durer deux heures. C'est la raison pour laquelle il faut éviter ce débat. On préfère donc laisser les aliments faire leur travail. Toutefois, il faut que le système soit équitable.

Si vous prenez l'annexe, j'ai quelques commentaires à faire. J'ai l'impression de revenir sur des choses qui ont déjà été dites, mais pas tout à fait. On entend souvent au comité des commentaires sur les différences qui existent entre le Canada et les États-Unis. Moi, je vais vous parler des différences entre le Canada et le Canada. Prenons une publicité des jus Oasis. J'ai mis cela en annexe. On y dit que le bêta-carotène est bon pour la vision.

[Traduction]

Ils peuvent bien prétendre que le bêta-carotène est bon pour la vue. C'est un produit alimentaire. Moi j'ai mon bêta-carotène, mais c'est une prétention que je ne peux pas annoncer. Nous sommes au Canada. Cela n'a absolument aucun sens. Les aliments peuvent donc faire l'objet d'exceptions et donner lieu à des prétentions qu'il m'est interdit d'annoncer dans le cas d'un produit de santé.

Ensuite, prenez le cas de All-Bran. Tout le monde connaît All-Bran. Les fabricants affirment que c'est une façon naturelle d'assurer le bon transit intestinal.

[Français]

On parle d'un aliment pour lequel on n'a pas le droit de faire une réclame-santé parce que cela deviendrait une drogue. De quel droit?

[Traduction]

C'est probablement dû à une exemption par voie réglementaire en application de l'article 30.

J'ai posé la question par écrit à la direction générale des aliments qui ne m'a jamais répondu. C'était il y a un mois et demi. Pourtant, ce sont ceux-là mêmes qui sont venus me harceler au sujet de mon sulfate de glucosamine. Je trouve cela intolérable.

Enfin, il y a quelque chose dont nous n'avons jamais parlé. Passez à la page des produits de beauté. C'est très intéressant, surtout pour vous mesdames. Vous voyez ici un produit de beauté qui contient de la vitamine C et du ginseng. L'utilisez-vous?

La présidente: Oui.

M. André Gagnon: Est-ce un bon produit?

La présidente: Je l'ignore, je vous laisse juger.

M. André Gagnon: Mais le fait est que le fabricant dit dans sa publicité que la vitamine C est un puissant antioxydant qui neutralise les radicaux libres, alors que le ginseng améliore le tonus de la peau et que sais-je encore.

J'essaie de traduire à vue, mais ce n'est pas facile.

Ce que je veux faire valoir, c'est que vous ne savez peut-être pas que les produits de beauté ne sont pas assujettis à la réglementation concernant les médicaments. C'est la vérité. Les produits de beauté ont leur propre réglementation.

Mme Elinor Caplan: Ils ne sont pas réglementés?

M. André Gagnon: Les produits de beauté font partie de la catégorie des aliments et drogues, mais ils font l'objet de dispositions particulières et ne relèvent donc pas de la définition des drogues ou médicaments. C'est cela que je veux faire valoir. Les fabricants peuvent donc affirmer certaines choses à leur sujet, mais ils n'ont pas besoin de numéro DIN.

[Français]

Tout cela étant dit, je voudrais simplement vous faire remarquer que, si on essaie de tout régler en même temps, à savoir les aliments et les cosmétiques, on n'y arrivera pas. Nous sommes particulièrement concernés—et c'est la raison pour laquelle le comité a été mis sur pied—par l'analyse des produits naturels de santé.

• 1640

Nous arrivons maintenant à la structure réglementaire. On est arrivés à la conclusion qu'il faut créer un comité consultatif externe. On n'a pas le choix. Je pense que cela a été démontré. Si quelqu'un veut me convaincre qu'on va se soumettre à un comité consultatif sous l'égide du TPP, j'ai le regret de vous dire que je n'accepte pas cette idée.

Je ne suis pas contre l'idée qu'il y ait, du point de vue administratif, une sous-unité du TPP. Je ne suis pas contre cette idée parce qu'il faut quand même gérer et faire de la documentation. Il faut une certaine bureaucratie. Mais en ce qui concerne l'évaluation des réclames, les politiques et les règlements qui doivent être mis en place, un comité consultatif externe doit être consulté. Il en a été question, et c'est une recommandation très forte. Il est impensable maintenant de penser que le TTP puisse décider d'une réglementation et d'une politique sans consulter les intervenants. On ne peut plus accepter cela.

De toute façon, avec notre système gouvernemental canadien, le dernier recours revient toujours au gouvernement ou aux fonctionnaires en place. Ce qu'on veut, c'est une plus grande intervention de l'industrie et des intervenants, ce qui nous permettrait d'avoir un droit de regard et de donner nos opinions.

Je voudrais maintenant en venir à un point important. Vous avez entendu parler de je ne sais combien de types de catégories: la médecine chinoise, la médecine ayurvédique et d'autres. Chacune se réclame d'une catégorie. Pour régler cela, je pense qu'il faut établir des groupes de travail avec des spécialistes dans ces médecines particulières, si on veut établir ces disciplines particulières.

Je vais vous donner un exemple: il peut y avoir un groupe de travail sur la médecine chinoise qui s'occuperait de collecter les monographies existantes, de les évaluer, de les justifier et de les proposer au comité consultatif, qui ferait ses recommandations. C'est une façon d'y arriver. Je sais que cela devient un peu technique. Si vous le voulez bien, je serais prêt à aller plus loin pour vous l'expliquer. On entre là dans le vif du sujet. On doit évidemment mettre en place un processus d'appel.

Dans le plan intérimaire,

[Traduction]

en ce qui me concerne personnellement, c'est là l'élément le plus important. Comme je vous le disais, nous ne pouvons pas nous permettre d'attendre trois, quatre ou cinq ans pour que quelque chose survienne. Je ne peux pas accepter de devoir travailler dans l'illégalité pendant encore toutes ces années.

Ce qu'il faut faire rapidement, c'est constituer...

[Français]

un comité consultatif externe. Il faut le former le plus rapidement possible, former des groupes de travail le plus rapidement possible. Même dans le contexte actuel de la loi, on pourrait déjà travailler.

Mais l'obstacle majeur demeure toujours l'annexe A. Tant que l'annexe A sera en place, on sera toujours au point de départ. On arrive devant un mur qu'on ne peut pas franchir. L'annexe A nous empêche de faire la réclame même si la qualité est démontrée.

J'espère que vous avez compris l'importance de l'annexe A. Tant que l'annexe A sera en place, on ne pourra pas faire de réclame pour 90 p. 100 des produits qu'on veut vendre. Alors, il faut, le plus rapidement possible et par tous les moyens, essayer d'éliminer l'annexe A, ou au moins essayer d'assouplir la façon dont elle est appliquée. Je pense que nous avons les moyens d'y arriver.

À l'annexe A, que vous avez également en annexe, il est écrit qu'on ne peut faire de réclame pour certaines maladies comme les maladies de la prostate. On peut toujours faire preuve de souplesse dans l'application et permettre des réclames de type structure-fonction. Rien de ce genre n'a été proposé jusqu'à maintenant, mais cela va être à nouveau revu par le comité consultatif d'experts.

Il y aurait donc moyen de tester un produit pendant un an ou deux dans la mesure où il est possible de travailler avec les gens en place. Il est certain qu'entre-temps, il faut faire un choix et décider de continuer avec le TTP. On n'a pas d'autre choix entre-temps. Il faut que quelque chose se passe. Si on forme des comités consultatifs et que le TPP continue à refuser neuf produits sur dix malgré les groupes de travail en place et malgré un comité consultatif, on décidera d'une nouvelle stratégie. On peut se revoir dans deux ans et décider de mettre sur pied une agence séparée qui relèvera directement du gouvernement et non plus du ministère du Santé. J'espère qu'on n'en arrivera pas là. Je suis persuadé qu'il est possible d'y arriver autrement.

Dans l'immédiat, il est important de continuer le processus de consultation pour l'élaboration et la mise en place du nouveau cadre réglementaire.

[Traduction]

Je pense que les chargés de recherche vont devoir préparer un rapport final à l'intention du ministre Rock. Ce que nous souhaitons pour notre part, c'est une consultation en continu avec les intervenants. Après avoir fait tout ce travail, nous ne voulons pas en bout de ligne avoir à remonter jusqu'au ministre et revoir tous ces fonctionnaires auxquels nous avons été confrontés pour qu'ils nous disent: «Voilà ce que vous allez faire, voilà comment vous allez fonctionner». Je demande simplement que nous continuions à être consultés jusqu'à la toute fin.

• 1645

[Français]

Je vous remercie beaucoup. Nous allons nous revoir le 13 mai, et je serai présent également au comité consultatif. Merci.

[Traduction]

La présidente: Monsieur Gagnon, il y a une ou deux petites choses dans votre publication que je vous demanderais de préciser. Pourriez-vous nous expliquer l'utilisation des termes «traitement» et «réclame» dans votre modèle d'évaluation du risque? Peut-être est-ce la même chose, mais je ne m'y retrouve pas bien.

M. André Gagnon: D'accord. Une réclame est une prétention quelle qu'elle soit. Une fonction structurelle est un genre de réclame, une réduction du risque est un autre genre de réclame et un traitement est également un genre de réclame.

La présidente: De sorte que le mot «réclame» apparaît dans chacune des colonnes. D'accord, je pense que je comprends un peu mieux.

À la page suivante, à la rubrique concernant la commercialisation des produits naturels, pourriez-vous me lire la dernière ligne du point 1? Cela dit quelque chose comme: «il est important de reconnaître l'utilité des...» je ne sais trop quoi.

M. André Gagnon: Il s'agit de: «textes de référence étrangers». Je vous prie de m'excuser mais j'ai composé cela hier soir et tôt ce matin.

La présidente: C'est évident d'après les cernes que vous avez sous les yeux. Vous devriez peut-être utiliser ce produit, il donnerait peut-être des résultats.

M. André Gagnon: C'est plutôt un problème d'éclairage, j'ai la lumière directement dans les yeux.

La présidente: Moi je ne me cherche pas d'excuse.

Je voudrais vous poser une question à propos d'un élément que vous avez mentionné, le groupe consultatif et le comité. C'est du groupe consultatif dont vous nous parlez, n'est-ce pas, et lorsque vous parlez du comité, il s'agit de nous?

M. André Gagnon: Je veux parler du groupe consultatif sur les produits naturels.

La présidente: Celui dont vous faites partie?

M. André Gagnon: C'est bien cela.

Mme Elinor Caplan: Mais vous nous parlez également de la création d'un nouveau comité consultatif externe.

M. André Gagnon: En effet. Le groupe consultatif n'a pas de caractère permanent. Le nouveau comité qui serait constitué devrait être assez amusant. J'ai consacré le plus clair de l'an dernier à ce dossier, et si je dois faire partie d'un comité consultatif externe composé d'experts, il faut que ce soit amusant parce que la tâche elle ne l'est pas.

Ne vous déplaise, les gens de TPP vous diront qu'ils ont déjà un comité consultatif externe, qu'ils ont d'ailleurs baptisé EAC. Ils ont dû vous en parler. Je sais que cinq de ses membres n'ont pas le temps. L'un d'entre eux enseigne à Halifax et tous ces gens ont un emploi permanent et n'ont donc pas le temps de s'engager.

La présidente: Il fait également partie de votre groupe consultatif.

M. André Gagnon: En effet. Trois d'entre eux en font partie, mais ils n'ont pas de temps à nous consacrer. À quoi bon un comité si ses membres n'ont pas le temps de s'en occuper en plus de n'être pas payés pour le faire? Soyons réalistes et ne nous lançons pas dans des entreprises qui selon moi seraient dépourvues d'honnêteté intellectuelle. Je suis prêt à travailler, mais à condition de pouvoir le faire vraiment et sincèrement.

Mme Elinor Caplan: Je vais laisser André une seconde.

M. André Gagnon: Je vais baisser le ton un petit peu.

Mme Elinor Caplan: Monsieur Bohémier, faites-vous partie de la même association que Nicole Renaud?

M. Guy Bohémier: Quelle association?

Mme Elinor Caplan: L'Association de naturopathie. Êtes-vous naturopathe?

M. Guy Bohémier: Oui. Notre organisme s'intitule Collège des naturopathes du Québec.

Mme Elinor Caplan: Elle fait partie de l'Association des diplômés en naturopathie.

M. Guy Bohémier: Non, c'est encore autre chose. Une autre association.

Mme Elinor Caplan: Quelle est la différence?

M. Guy Bohémier: Les naturopathes n'ont pas tous la même formation. Il y a plusieurs écoles, et aussi plusieurs associations.

Mme Elinor Caplan: Je vois.

Votre utilisation du terme «efficacité» est intéressante. L'exemple du scorbut est également très parlant, il s'agissait du jus de citron. Mais le problème vient en partie, dans votre exemple, de ce qu'il y avait une théorie, et pourtant rien dans la recherche faite normalement ne prouvait qu'il y avait quelque efficacité à l'utilisation du jus de citron pour empêcher le scorbut. Pourtant d'après vous il faut que l'efficacité des produits ait été prouvée.

Mais la question qui se pose alors pour moi, c'est que Santé Canada, pour les aliments et les drogues, et particulièrement la direction des médicaments, a pour travail de veiller à ce que l'efficacité soit prouvée. Tout ce qui concerne la recherche, les essais cliniques, les recherches en double aveugle, tout cela coûte très cher. Lorsque vous utilisez le terme «efficacité» dans le cas des produits naturels, des produits de santé naturels, des plantes et herbes etc., pensez-vous que la monographie dont parle M. Gagnon suffit à prouver l'efficacité?

[Français]

M. Guy Bohémier: Oui.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Êtes-vous en train de nous dire que l'on n'a pas besoin de faire la même recherche que pour les autres médicaments?

[Français]

M. Guy Bohémier: Non. Bien qu'on puisse avoir l'impression que l'industrie pharmaceutique est très bien équipée, dans les faits, la réalité est bien différente. L'industrie pharmaceutique, disposant des moyens qu'on connaît, a ses propres chercheurs qui font des recherches sur leurs produits particuliers, qui en présentent les résultats au gouvernement, qui à son tour les regarde et les accepte. Il n'est pas en mesure de les vérifier ni de les contester, n'ayant pas de chercheurs à son compte. Alors, comme les recherches semblent bien présentées, il les accepte d'emblée sous prétexte qu'elles sont sûrement sérieuses.

Mais dans les faits, les choses sont bien différentes. Il arrive souvent qu'un produit soit mis sur le marché et qu'on le retire trois ans plus tard à cause des problèmes qu'il a engendrés. Ce n'est donc pas nécessairement sérieux, ce qui se fait dans le domaine de la recherche pharmaceutique. C'est une recherche très orientée, tandis que les recherches auxquelles nous faisons allusion sont faites par des gens indépendants.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: J'aimerais que ce soit bien clair, parce qu'il y a un petit peu de flottement lorsque vous nous parlez de la preuve de l'efficacité d'un produit. Lorsqu'aujourd'hui Santé Canada veut avoir la preuve de l'efficacité d'un produit, le ministère s'appuie sur des modèles de recherche utilisés pour les autres médicaments, voilà pourquoi j'ai parlé d'une méthode substitutive à ce sujet.

[Français]

M. Guy Bohémier: Il y a un modèle que l'industrie dicte et que personne au gouvernement ne contre-vérifie. Par contre, dans la vie de tous les jours, dans la recherche en général, la recherche est moins orientée et on arrive peut-être à des résultats qui sont un peu plus valables. Quand je parle de recherche, je fais appel à l'ensemble des recherches qu'on retrouve dans la littérature scientifique.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: Merci beaucoup, monsieur Bohémier.

M. André Gagnon: Madame Caplan, le gouvernement ne travaille pas seulement à partir d'études scientifiques traditionnelles, puisqu'à propos de la médecine traditionnelle à base de plantes, on a accepté que les sources traditionnelles soient citées, je parle de la littérature...

Mme Elinor Caplan: Il arrive...

M. André Gagnon: Par principe, on a accepté que la littérature qui fait traditionnellement autorité soit citée.

Mme Elinor Caplan: Mais le problème ne vient-il pas justement des contradictions que l'on y trouve?

M. André Gagnon: Mais en vertu de la liste de l'annexe A, vous ne pouvez vous appuyer que sur les sources de la littérature traditionnelle, parce que l'annexe A limite ce que vous pouvez invoquer. Deuxièmement, bien sûr, il y a aussi les neuf conditions qui s'appliquent, un autre obstacle important à l'utilisation de ces médecines naturelles.

Mme Elinor Caplan: Pour poursuivre mes questions, monsieur Gagnon, j'aimerais savoir si ce que nous entendons ici n'est qu'une avant-première de ce que nous allons entendre...

M. André Gagnon: En gros, oui.

Mme Elinor Caplan: Parfait, voilà qui est très utile. Merci. Je vois que vous avez commencé à réfléchir à la question.

Pour la suppression de l'annexe A, voulez-vous que l'on s'en débarrasse complètement, ou que l'on revoie cette liste en fonction de la nouvelle classification, et que l'on décide de ce qui s'y trouvera en fonction des monographies et de la littérature qui permettraient de faire un reclassement?

M. André Gagnon: On a eu pour cela l'excellent document de Andrew Adams, un employé du gouvernement. Je crois que vous avez ce document. On vous l'a présenté au mois de février, au moment de la comparution de l'ANPS. C'est un document d'environ 30 pages. Ce document vous explique très bien pourquoi il faut supprimer l'annexe A, et comment s'y prendre.

Est-ce que vous avez le document? Très bien. Il explique beaucoup de choses.

Pour répondre à votre question, si l'on conserve dans la liste certaines maladies—par exemple, une maladie du coeur est quelque chose de très grave, et nous ne pouvons pas laisser passer cela—, ce n'est pas du tout ce que je pense, parce quÂon peut très bien alors parler de réduire le cholestérol, ce qui sera toujours utile pour prévenir les accidents cardiaques. Ce n'est pas parce que le terme utilisé impressionne qu'il faut que cela reste sur la liste. Tout dépend de ce que vous voulez faire. Vous comprenez? Si on a la preuve que, par exemple, les fibres permettent de prévenir le cancer du colon, pourquoi pas?

Nous parlons de prévention. Nous ne parlons pas de traitement. Il s'agit donc plus de la prétention que de la maladie proprement dite. Ne nous laissons pas effrayer par le fait qu'il s'agit d'une maladie importante.

• 1655

Mme Elinor Caplan: Ce que vous proposez, donc, c'est de faire subir le nouveau test d'innocuité aux produits qui figurent actuellement à l'annexe A.

M. André Gagnon: Oui.

Mme Elinor Caplan: Au lieu de l'annexe A...

M. André Gagnon: Évidemment, il y a des complications juridiques. Je ne les connais pas très bien, mais on pourrait en discuter.

Mme Elinor Caplan: Vous dites qu'il faut tenir compte des coûts associés au système proposé. Qu'est-ce que ça signifie? Nous pouvons en tenir compte.

M. André Gagnon: De quoi parlez-vous?

Mme Elinor Caplan: L'avant-dernière recommandation.

M. André Gagnon: Au comité, on a beaucoup parlé de l'évaluation préalable des allégations. On s'est demandé si elles devaient toutes être évaluées. Est-ce que son mandat devrait être de tenir compte du coût du système ou est-ce que le coût ne compte pas? Je ne sais pas.

Si vous me dites que le gouvernement et le ministre Rock disent que ça ne compte pas et que l'on peut dépenser des sommes faramineuses, je veux bien. Je ne pense pas que ce sera le cas. Si le coût est un facteur important, je ne pense pas qu'on puisse mettre en place un système qui coûterait moins cher que celui qu'on a actuellement et qui est d'ailleurs déjà trop coûteux.

Mme Elinor Caplan: Votre recommandation est donc...

M. André Gagnon: Ma recommandation serait que son attribution de propriétés au produit selon la structure-fonction n'exige pas d'évaluation préalable. Ça ne signifie pas que vous n'avez pas de preuve dans votre documentation. Bien sûr, il vous faut des corroborations. Évidemment, vous pouvez la garder au dossier si le gouvernement vient vous demander de justifier vos prétentions parce que ça a l'air bizarre, ça a l'air exagéré.

J'essaie de trouver un équilibre entre un danger pour la santé et un risque pour la santé. Si le produit est inoffensif, je ne pense pas qu'une prétention de type structure-fonction soit dangereuse, même si elle n'est pas complètement efficace. Ça semble bizarre à dire. Ça n'a pas l'air très sérieux. C'est un équilibre; c'est un choix politique.

Mme Elinor Caplan: Entendu. Je ne veux pas vous mettre sur la sellette...

M. André Gagnon: Ça ne fait rien.

Mme Elinor Caplan: M. Aubé nous a dit qu'il a un produit pour lequel il a certaines indications qu'il est bon pour réduire et prévenir le cholestérol et qu'il est actuellement en vente pour faire perdre du poids. Il dit que ce n'est pas... Comment cela fonctionnerait-il dans votre système?

M. André Gagnon: Pas de problème, savez-vous pourquoi? Consommeriez-vous un produit censé être amaigrissant s'il n'est pas efficace?

Mme Elinor Caplan: Je vous répondrai après que vous aurez terminé.

M. André Gagnon: Très bien, je ne devrais pas répondre par une question, n'est-ce pas? Ça revient à la question du danger pour la santé. Personnellement, je pense que

[Français]

si le produit n'est pas assez efficace,

[Traduction]

les gens vont cesser de l'utiliser. Je pense encore qu'il faut en tenir compte. Si un produit ne donne pas de résultat, pourquoi quelqu'un continuerait-il à s'en servir.

Mme Elinor Caplan: Continuer à s'en servir... c'est donc la réponse que je vous donne. Si quelqu'un dit que cela peut vous aider à perdre du poids, je voudrais peut-être l'essayer pour voir si ça marche dans mon cas même si son efficacité n'est pas prouvée. Si ça ne marche pas pour moi, je vais cesser de le consommer.

M. André Gagnon: Je vois ce que vous dites. Cela a du sens.

Mme Elinor Caplan: Même si cela marche pour moi, je vais peut-être cesser de le prendre.

M. André Gagnon: Cela a du sens. Au lieu d'être absolu dans votre libellé, si ça n'a pas été pré-évalué, vous pourriez utiliser une formulation qui laisse les choses un peu plus ouvertes.

Mme Elinor Caplan: Beaucoup de gens viennent nous dire qu'ils veulent la liberté de faire l'essai d'un produit pourvu qu'il ne leur causera pas de tort.

M. André Gagnon: Voilà.

Mme Elinor Caplan: Merci.

La présidente: Je vais donner la parole à Mme Picard, mais j'aimerais d'abord poser moi-même quelques questions.

[Français]

Mme Pauline Picard: Je n'ai pas d'autres questions. Merci.

[Traduction]

La présidente: Elle n'a pas de questions.

Revenons à notre modèle de l'évaluation du risque. Il y a une partie grisée, la sécurité élevée. Est-ce à dire que pour tout le reste, il n'y aurait pas d'évaluation préalable?

M. André Gagnon: Non.

La présidente: Même pas pour les propriétés curatives.

M. André Gagnon: Excusez-moi à nouveau, mais nous avons achevé ceci ce matin à cause de tout le travail que nous avons fait mardi, jeudi et vendredi. Ça demanderait d'être raffiné.

À l'heure actuelle, il n'y aurait pas d'évaluation préalable pour les prétentions de type structure-fonction. Pour la réduction du risque, on en débat toujours. Je vais être honnête avec vous. Guy et moi en discutons encore. Il est aussi expert-conseil pour une compagnie, au fait. Dans le cas de propriétés curatives, c'est certain, s'il n'y a pas de monographie sur les normes d'étiquetage pour le traitement, il ne pourrait pas y avoir de notification. Il faudrait une évaluation préalable si la propriété attribuée au produit est fondée sur d'autres types de preuve.

• 1700

La présidente: Quand vous parlez à des gens comme vous qui n'ont pas de formation médicale ou scientifique, je pense que le mot «prétention» devrait figurer à chaque endroit. Si c'est ce qu'ils veulent dire, mettez seulement prétention de type structure-fonction...

M. André Gagnon: Je pourrais vous envoyer un graphique un peu plus clair.

La présidente: Je pense qu'on va les obtenir...

M. André Gagnon: Vous allez les obtenir de toute façon la semaine prochaine, le 13.

La présidente: ... officiellement dans une semaine ou deux, et peut-être devrions-nous attendre une semaine, le temps de les recevoir officiellement, si c'est bien de là qu'ils viennent.

Je pense que c'est tout, s'il n'y a pas d'autres questions, merci beaucoup.

[Français]

M. André Gagnon: Merci beaucoup.

[Traduction]

La présidente: Si vous avez quoi que ce soit d'autre pour nous... si vous avez pu faire tout ceci en une nuit vous aurez peut-être d'autre chose pour nous dans les semaines à venir.

Merci beaucoup.

Nous avons deux autres témoins: le Dr Yves Roy et M. Mark Perlstein. Je n'ai pas la convocation, mais je pense que c'est bien ça.

• 1705

Pourriez-vous commencer et nous dire...? Vous êtes médecin, n'est-ce pas?

Dr Yves Roy (témoigne à titre personnel): Oui.

Le président: En nutrition, anthropologie et... en santé énergétique?

Dr Yves Roy: C'est bien ça.

La présidente: Je ne sais pas ce que c'est. Pourriez-vous nous l'expliquer?

Dr Yves Roy: Volontiers. L'acuponcture et l'homéopathie reposent sur l'énergie, parce que vous n'avez aucune molécule qui reste...

La présidente: Pardon, c'est quelque chose que je n'ai jamais entendu.

Dr Yves Roy: Cette énergie est de nature électromagnétique. Cela commence à se voir en résonnance magnétique nucléaire, quelque chose qui est à la fine pointe, à l'avant-garde de la médecine. Beaucoup de traitements ou de thérapies naturels ou prétendus tels font intervenir les énergies de l'organisme humain et nous commençons à le voir maintenant sur les appareils. C'est l'avenir de la médecine. Beaucoup de produits ou de thérapies naturels ou prétendus tels s'intégreront à la médecine de haute technologie dans un proche avenir, et nous sommes déjà rendus à ce stade.

Mon propos d'aujourd'hui...

La présidente: Je ne déduirai pas cela de votre temps de parole. Vous avez maintenant 10 minutes.

Dr Yves Roy: J'ai préparé mon exposé en français. Ça va? Ça ne dérange pas?

La présidente: C'est très bien.

[Français]

Dr Yves Roy: Je regrette de ne pas avoir pu vous fournir un mémoire, faute de temps. Je viens comparaître devant votre comité non pas pour faire des recommandations spécifiques de nature technique, mais plutôt des recommandations d'ordre moral. Je vous présenterai très succinctement mes antécédents et je vous ferai part de l'ensemble de mes réflexions au niveau de la santé et des thérapies.

Je suis un médecin et j'ai fait des études médicales à l'Université McGill, ici à Montréal. Auparavant, j'ai fait de la recherche à l'Université du Québec, à l'Institut Armand-Frappier. Par la suite, j'ai étudié beaucoup de médecines et pratiqué comme médecin généraliste. J'ai beaucoup étudié la médecine douce, l'homéopathie et tout particulièrement les thérapies énergétiques. Je me suis beaucoup intéressé à l'énergie, que l'on peut aussi appeler le magnétisme. J'ai donc passé une dizaine d'années en pratique.

À la lumière de mon expérience personnelle, je dois dire que je suis en faveur de la liberté de choix dans le domaine de la santé et que, pour moi, l'entente entre le thérapeute et son client prime. L'entente thérapeutique est la chose la plus sacrée qui existe, donc la chose qui est la plus importante.

Tout comme le client a le droit de choisir son psychologue, il a également le droit inaliénable de choisir de se soigner de la façon qu'il trouve la plus appropriée. Si une personne estime que des méthodes ou des produits naturels, dont le magnétisme, l'homéopathie ou les nutraceutiques, lui font du bien ou lui confèrent un bien-être, elle est la seule juge dans ce domaine. Toute thérapie, tout produit ou approche que le client juge lui faire du bien doit être respecté, sans aucune intervention extérieure de quelque ordre que ce soit, surtout si un client ou un patient n'obtient pas satisfaction au sein de la médecine conventionnelle.

Je crois—et cette croyance est partagée de plus en plus par la population canadienne, compte tenu du niveau d'éducation qui ne cesse de s'élever—qu'il y a un droit absolu de compléter les traitements reconnus. Il existe aussi un droit absolu de refus des traitements reconnus, lesquels ne pourraient s'avérer bons que pour une période donnée; c'est-à-dire qu'un traitement pourrait être le traitement de choix pour une période assez courte, après quoi la science ou enfin la philosophie médicale découvrira une autre approche. Le patient ou le client a ce droit de refuser un traitement qui est reconnu et qui sera peut-être retiré du marché dans deux ans, par exemple.

Il y a aussi le droit absolu de l'individu à l'alternatif, sans aucune intervention de l'extérieur, et ce en raison de la psychologie de la biologie. Chaque être humain a une biologie différente et c'est pourquoi il est très difficile de standardiser les traitements.

Un produit dit scientifique pourrait peut-être faire du bien à 70 p. 100 des gens, ne produire aucune réaction chez 20 p. 100 d'eux et s'avérer dangereux pour les autres 10 p. 100.

• 1710

La psychologie de la biologie, c'est-à-dire la façon dont la biologie réagit, est différente chez chaque individu. On le voit beaucoup de race en race, mais aussi d'individu en individu, de là la difficulté de faire des études très strictes et très serrées, comme la science prétend en faire en ce moment. L'organisme de chaque individu est vraiment unique, et c'est un fait à reconnaître.

L'individu est le seul juge, et son corps est le seul juge par rapport aux sensations et au bien-être qu'il reçoit de tel ou tel traitement. Ce ne sont pas les entités extérieures, telles les corporations professionnelles, qui peuvent juger pour l'individu. L'individu doit s'orienter et se servir de tous les apports techniques que peut lui donner la haute technologie médicale et de toutes les perceptions du monde scientifique, mais aussi et avant tout des perceptions de la psychologie de sa biologie, les perceptions que lui offre son corps, son organisme. On doit respecter en tout le choix d'une personne, qu'il s'agisse de son psychologue, de son médecin généraliste, de ses produits naturels, de son pharmacien ou de son professeur de yoga.

Il y a un droit absolu du consommateur à refuser certains traitements conventionnels qu'il juge inappropriés ou dans lesquels il n'a pas confiance. Inversement, il a un droit absolu de choisir tout traitement inorthodoxe auquel il a confiance et qui lui procure une amélioration mesurable ou non de sa santé, de son bien-être physique ou psychologique. Personne ne doit se substituer au client pour juger du bien-fondé de certains traitements innovateurs, inorthodoxes ou méconnus. Si on attend que les choses soient prouvées pour faire quelque chose, on ne fera jamais rien de nouveau. Pour évoluer et apporter des choses nouvelles, on doit se servir de toute l'intelligence acquise jusqu'à maintenant et se développer à partir de ce moment-ci. Il ne s'agit pas de sabrer, mais d'accumuler de nouvelles connaissances.

Je vous livre ici quelques réflexions. De quel droit une corporation ou des ordres professionnels qui ne possèdent qu'une connaissance superficielle de quelques-unes des thérapies alternatives, dont le nombre ne cesse d'ailleurs de croître, peuvent-ils invoquer la protection du public, alors qu'ils ne sont pas habilités à en juger et qu'ils sont d'ailleurs en conflit d'intérêts?

À l'aube du XXIe siècle, l'accent devrait être mis premièrement sur l'éducation. On devrait éduquer la population afin qu'elle connaisse tout ce qui existe. Si on veut parler d'autres possibilités, de liberté de choix et d'un pays libre comme le Canada, on doit avoir des choix. Si on n'a pas de choix, on nous indique que telle voie existe et que c'est la seule voie; on n'a pas de choix. L'éducation est très importante.

La prévention, qui est la meilleure des médecines, doit être appliquée. On doit respecter l'être humain dans sa dignité, dans son individualité et dans sa liberté de choix. Les thérapies naturelles et énergétiques qui sont réputées non scientifiques le sont, bien qu'elles soient la plupart du temps rejetées du revers de la main. Alors que les méthodes scientifiques actuelles sont basées sur l'observation, l'hypothèse et l'expérimentation, tout phénomène qui offre du bien-être à l'être humain fait appel à une méthode supérieure, celle des sciences pures. Je pourrais l'expliquer avec la physique mathématique, la physique géométrique ou la physique énergétique, mais je vous perdrais peut-être.

Je termine donc ainsi et je remercie le comité, au nom des citoyens, du temps qu'il m'a accordé. Merci beaucoup.

[Traduction]

La présidente: Vous avez piqué ma curiosité. Il faudra que je lise sur toutes ces choses que, d'après vous, nous n'arriverons pas à comprendre.

Avez-vous des questions, madame Caplan?

Mme Elinor Caplan: Je voudrais d'abord entendre l'autre témoin.

La présidente: Libre à vous. Ce n'est pas ainsi qu'on était censé procéder; chacun devait avoir son temps pour comparaître.

Mme Elinor Caplan: C'est relié avec votre hypothèse sur ce qui est efficace pour chacun. Je vais vous raconter une anecdote sur la façon dont je comprends l'efficacité.

Le mari d'une amie à moi a très peur de prendre l'avion. Pour son travail, il est obligé de prendre l'avion. Ils avaient donc un choix: il pouvait donc suivre de longues séances de thérapie et de counselling pour l'aider à vaincre sa peur; mais un ami lui a dit que si elle portait un certain bracelet au moment du décollage et le retirait à l'atterrissage, son mari pourrait prendre l'avion en toute sécurité.

• 1715

Lorsqu'elle m'a raconté ça, j'ai dit «C'est ridicule. C'est toi qui porte le bracelet et c'est lui qui est en sécurité dans l'avion. Il n'y a aucun lien». «Cela marche, qu'elle me répond, il n'a jamais été dans un écrasement d'avion. Je mets le bracelet quand il part et je l'enlève quand il revient. Il se sent en sécurité. Pourquoi mettez-vous en doute l'efficacité de ce produit?»

Dr Yves Roy: Oui. Eh bien, il y a beaucoup de foi. C'est pourquoi la foi, ou la relation thérapeutique, est extrêmement importante. Si vous faites des choses auxquelles vous ne croyez pas, vous n'aurez pas de résultats et ça c'est le pouvoir de l'esprit humain. Mais c'est aussi le pouvoir qu'émet le thérapeute ou le médecin sous forme d'énergie personnelle. Sigmund Freud a dit le premier qu'il y a un phénomène qui a une base para-scientifique, mais une fois que le phénomène a été expliqué, il est intégré à la science.

N'écartons pas le phénomène de la médecine naturelle, qui est un phénomène grandissant qui sera expliqué en termes scientifiques rigoureux dans les années à venir ou au siècle prochain. Commençons par s'en servir parce qu'il apporte beaucoup de bien à beaucoup de gens.

Des articles récents parus dans Scientific American prouvent l'existence de l'énergie magnétique. Les chromosomes n'apparaissent que dans certains cellules lorsqu'ils sont magnétisés par différentes lumières. L'intention du chercheur est extrêmement importante. S'il croit à ce qu'il fait, il trouvera une réponse et les chromosomes vont apparaître. S'il n'y croit pas, ils n'apparaîtront pas. Il y a beaucoup de choses que l'on découvre. L'être humain est à la frontière entre la matière et l'énergie. Nous sommes donc des êtres d'énergie. Il faut le reconnaître.

Les Chinois le savent depuis 2 000 ans et nous le reconnaissons aujourd'hui. Nous essayons de le voir avec la résonance magnétique nucléaire et avec d'autres techniques, qui nous donnent un aperçu des énergies humaines. Ce sont la porte sur la médecine du XXIe siècle. Une grande partie de la médecine naturelle ou traditionnelle est basée sur l'énergie. C'est mystérieux pour beaucoup de gens, et pour l'expliquer en termes scientifiques, il faut beaucoup d'études, mais nous y arrivons.

Je pense qu'avec l'augmentation de l'instruction dans la population, les gens peuvent maintenant voir par eux-mêmes ce qui marche pour eux. Ils peuvent poser des questions à leurs médecins et à leurs naturopathes et tout contester. Je pense que ça fait partie de la sensibilisation de la population. L'instruction est déterminante.

La présidente: Merci.

Dr Yves Roy: Merci beaucoup.

La présidente: Mark, voulez-vous continuer? Mark vient de Mannatech Incorporated.

M. Mark Perlstein (témoigne à titre personnel): Mannatech est une entreprise américaine qui travaille étroitement avec la FDA pour mettre en oeuvre une partie du nouveau règlement qui s'appliquera aux libellés des étiquettes et diverses autres allégations, thème qui a fait l'objet d'une excellente discussion ici aujourd'hui.

La présidente: Est-on en train d'apporter des changements à la loi américaine, la DSHEA?

M. Mark Perlstein: Non, je ne parle que de la mise en oeuvre. Autrement dit, lorsque la loi a pris effet en octobre 1994, elle était censée être mise en oeuvre en octobre 1996. Il y a eu des lenteurs et la mise en oeuvre aurait commencé l'an dernier. Elle portait le nom de loi Hatch-Harkin et elle s'intitule aujourd'hui la Dietary Supplement Health and Education Act.

La présidente: Appartenez-vous à une maison d'experts-conseils ou fabriquez-vous des produits chimiques?

M. Mark Perlstein: C'est une société de recherche et de développement qui offre aussi une gamme de produits.

Comme je suis le dernier intervenant, j'aimerais féliciter tous ceux qui m'ont précédé. Ils ont fait un travail magnifique et les membres du comité ont posé d'excellentes questions. Je suis heureux d'assister à une discussion aussi ouverte que celle-ci, car il s'agit là de questions importantes.

Mon point de vue est celui du profane. C'est très simple. Il y a beaucoup de professionnels éminents ici, comme le Dr Roy—je le connais et il a beaucoup de crédibilité dans la région de Montréal—et aussi certaines autres personnes qui ont comparu avant lui. Comme je n'ai que quelques minutes, je serai bref.

• 1720

La présidente: Parlez-vous en votre nom propre ou au nom de la société?

M. Mark Perlstein: En mon nom propre. Tout à fait.

Il faut être très prudent lorsque l'on classe les produits naturels. Il faut s'assurer de ne pas les assimiler à des médicaments. Ils sont distincts des médicaments. Dans la plupart des cas, les médicaments ont des effets très spécifiques et des effets secondaires qui peuvent être très dangereux. Les produits naturels fortifient le corps et ont souvent des effets multiples parce qu'ils permettent à l'organisme de se guérir lui-même.

Tout à l'heure, j'ai entendu une partie des échanges au sujet du cholestérol et de la perte de poids. Je l'ai souvent constaté: un produit naturel donné pourrait agir sur quatre ou cinq malaises. Il est très possible qu'il puisse vous aider à perdre du poids et à réduire votre cholestérol. Je vois cela tout le temps. Cela arrive souvent dans le cas de soutien endocrinien ou hormonal. Quand vous aidez votre système hormonal, vous pouvez perdre du poids, parce que le métabolisme vous aide à perdre du poids.

Il se pourrait que l'on maîtrise les problèmes hormonaux comme le syndrome prémenstruel et toutes sortes d'autres problèmes. Les niveaux d'énergie, les niveaux de concentration—parfois, c'est infini le nombre de choses que les produits naturels peuvent faire. Il faut s'en rendre compte. Ce n'est pas toujours univoque, comme dans le cas d'un produit pharmaceutique, qui ne traite qu'un symptôme.

Il faut aussi réaliser—et je pense que le Dr Roy en a parlé—que chacun réagit différemment à divers types de produits. Certains obtiennent d'excellents résultats, d'autres obtiennent des résultats médiocres et d'autres encore n'obtiennent aucun résultat.

Je pense qu'il faudrait créer une nouvelle catégorie—on en a très bien parlé tout à l'heure—que l'on appellerait soit les aliments fonctionnels soit les nutraceutiques. L'essentiel, ici, c'est la validation scientifique. Si l'on informe les consommateurs grâce à des études scientifiques et s'ils peuvent voir ce que ces produits font à diverses étapes d'une maladie ou comme agent préventif ou quoi que ce soit d'autre, alors tant que le produit est naturel et non toxique, il devrait être accessible à la population. Le consommateur devrait pouvoir décider au bout du compte ce qu'il met dans son organisme.

La DSHEA—et c'est quelque chose important que l'on oublie—, si vous lisez le début très attentivement, a été adopté pour abaisser le coût des soins de santé. Aux États-Unis, 17c. de chaque dollar dépensé par le gouvernement va aux soins de santé. C'est énorme. Si les gens étaient en meilleure santé, on pourrait sans doute réduire ces coûts. C'est donc une façon très sensée d'aborder un problème croissant, parce qu'à l'heure actuelle la communauté des allopathes, en fait dirigée par les sociétés pharmaceutiques, a créé une situation qui est tout à fait hors de contrôle.

Je connais une personne souffrant de fibromyalgie à qui l'on a prescrit des antidépressifs parce qu'elle se sent si mal qu'elle est déprimée. Évidemment qu'elle est déprimée; elle est malade. Les antidépressifs n'aident pas à régler le problème et elle subit tous les effets néfastes d'un médicament comme le Prozac ou quelque chose de semblable qui est manifestement très mauvais pour le corps.

On devrait adopter une approche qui vise à rendre le corps plus fort et à cette fin lui donner ce qu'il faut. C'est comme dans une carotte. Lorsque vous mangez une carotte, vous ne le faites pas parce que vous souffrez d'un problème précis et que vous dites: «Je vais manger une carotte et ça réglera ce problème». La carotte comprend des vitamines et des minéraux de tous genres, des produits phytochimiques—des éléments différents de tous genres qui interviennent à divers niveaux et améliorent le fonctionnement du corps. Lorsque le corps fonctionne mieux, il peut se soigner.

Le miracle, c'est le corps. Il n'y aucun médicament ni produit naturel qui soit miraculeux. Le fait que nous marchions tous, voilà le miracle. Si nous soignons bien notre corps, si nous lui donnons les éléments fonctionnels ou nutritifs nécessaires, alors le corps se prend en charge et nous nous retrouvons en bien meilleur état tout en commençant à dépenser moins sur les soins de santé.

Une dernière chose. Au cours de ma vie, j'ai connu des gens qui n'étaient pas très prospères, mais qui prenaient des produits pharmaceutiques même si les produits naturels leur convenaient mieux. Ces personnes n'avaient pas le choix, les produits pharmaceutiques étaient couverts par les assurances alors que les produits naturels ne le sont pas. Elles prennent donc les produits pharmaceutiques, elles subissent les effets secondaires et les effets néfastes dans bien des cas, mais elles n'ont pas de choix.

• 1725

Si nous pouvons mettre en place une loi progressive qui soit équitable, qui soit sûre, et je pense que c'est très possible... J'ai entendu mentionner de nombreuses façons de s'y prendre ici aujourd'hui. Si nous pouvons agir ouvertement sans pression de l'industrie pharmaceutique... C'est une industrie énorme, qui a beaucoup d'argent, et qui peut exercer des pressions énormes. En Europe, ce secteur est très important. Il y a une pharmacopée en Europe que l'on essaie d'imposer partout au monde. Je pense que le Canada y souscrit déjà plus ou moins.

Il nous faut examiner cela. Nous ne voulons pas que les mêmes personnes qui nous ont placés dans la situation actuelle soient celles qui réglementent un nouveau groupe de produits qui pourraient nous sortir de là. Il nous faut vraiment tenter de trouver une nouvelle approche, avec de nouvelles personnes, et ne pas retourner à ces mêmes personnes qui nous ont vraiment placés dans...

Les maladies actuellement—on n'avait jamais entendu parler de certaines d'entre elles. Il y a 20 ans, qui avait entendu parler de la fatigue chronique et de la fibromyalgie et de toutes ces autres choses. Maintenant c'est commun—l'arthrite, le diabète—c'est complètement fou. Et tout cela parce que nous avons complètement oublié de faire de la prévention et de prendre soin de notre corps qui au bout du compte prend soin de nous.

Merci beaucoup.

La présidente: Merci beaucoup. Y a-t-il des questions? Voulez-vous vous poser des questions les uns aux autres? Non? Très bien.

Je vous remercie beaucoup et j'aimerais remercier également les membres du comité, les greffiers, les attachés de recherche, les interprètes et les préposés à la console.

La séance est levée.